Retraitement des dispositifs médicaux à usage unique dans le cadre de la transition écologique du système de santé
AUJOLLET, Yvan ;KUJAS, Paule ;SCHAPIRA, Irina
Auteur moral
France. Inspection générale de l'environnement et du développement durable (IGEDD)
;France. Inspection générale des affaires sociales
Auteur secondaire
Résumé
<div style="text-align: justify;">Le retraitement des Dispositifs médicaux à usage unique (DMUU), prévu par l'article 66 de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2024, fera l'objet dès cette année d'une expérimentation pour une durée de deux ans, mesure inscrite dans la feuille de route « planification écologique du système de santé » de mai 2023. Une mission conjointe IGAS-IGEDD a été saisie pour préparer la mise en oeuvre de cette expérimentation. Le retraitement des DMUU, qui consiste à permettre leur réutilisation sûre à l'issue d'un processus de stérilisation et de remise en état, est interdit en France depuis les années 1980. Il n'existe donc pas en France de filière industrielle de retraitement. Vanguard, entreprise allemande, est à ce jour la seule susceptible de retraiter des DMUU dans le cadre de l'expérimentation. Le périmètre de l'expérimentation dépendra donc du catalogue de Vanguard. La mission recommande de plus de le limiter aux références qui ont fait l'objet du contrôle externe de qualité associé au marquage CE. La mission recommande si possible de privilégier un circuit « ouvert » c'est-à-dire un mode de fonctionnement dans lequel l'établissement de santé vend des DMUU à retraiter et acquiert des DMUU retraités. Ceci permet de majorer les économies engendrées par le retraitement et offre plus de flexibilité dans la gestion de stocks. Les établissements de santé sélectionnés pour participer à l'expérimentation devront présenter un volume annuel d'actes d'électrophysiologie suffisant pour susciter l'intérêt de l'entreprise de retraitement. Il serait aussi pertinent de sélectionner des établissements de tailles et de statuts différents. Enfin, il est indispensable de vérifier que les professionnels concernés par l'expérimentation adhèrent à la démarche. Les DMUU utilisés devront avoir été nettoyés au préalable. La mission recommande alors de faire établir par la Société française d'hygiène hospitalière un protocole de nettoyage des DMUU destinés au retraitement, compatible avec les standards français, les exigences de l'entreprise de retraitement et les dispositions du code de l'environnement relatives aux déchets. Afin d'assurer efficacement l'information obligatoire des patients, la mission recommande d'élaborer, en lien avec les représentants des usagers, un document national d'information soulignant l'absence de risque sanitaire et l'intérêt écologique du retraitement, et de privilégier un système d'« opt out » selon lequel les patients doivent manifester expressément leur opposition à l'utilisation d'un DMUU. Cette opposition sera tracée. L'évaluation de l'expérimentation devra confirmer l'intérêt écologique du retraitement des DMUU. À cette fin, il est indispensable de sélectionner en amont un prestataire expert de la méthode de l'Analyse de cycle de vie (AVC). Par ailleurs, cette expérimentation ne doit pas évincer d'autres leviers de décarbonation des DMUU. Enfin, les moyens et la gouvernance retenus pour mettre en oeuvre la planification écologique du système de santé méritent d'être questionnés. Une implication plus marquée des administrations en charge de la transition écologique permettrait notamment de mieux prioriser les actions dans le cadre de la stratégie « France nation verte ».</div>
Editeur
IGEDD
;IGAS
Descripteur Urbamet
santé
;expérimentation
;réutilisation
Descripteur écoplanete
hygiène et sécurité
Thème
Environnement - Paysage
;Ressources - Nuisances
;Santé
Texte intégral
Retraitement des dispositifs médicaux à usage
unique dans le cadre de la transition écologique du
système de santé
Rapport
Paule KUJAS Yvan AUJOLLET
Irina SCHAPIRA
Membres de l?Inspection générale des
affaires sociales
Membres de l?Inspection générale de
l?environnement et du développement
durable
N°2023-085R N°015247-01
P
U
B
L
I É
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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SYNTHÈSE
Le retraitement des Dispositifs médicaux à usage unique (DMUU), prévu par l?article 66 de la LFSS
pour 2024, fera l?objet dès cette année d?une expérimentation pour une durée de deux ans. Cette
mesure s?inscrit dans le cadre de la feuille de route « planification écologique du système de
santé » publiée en mai 2023. L?Inspection générale des affaires sociales (Igas) et l?Inspection
générale de l?environnement et du développement durable (IGEDD) ont été saisies pour préparer
la mise en oeuvre de cette expérimentation.
Le retraitement des DMUU, qui consiste à permettre leur réutilisation sûre à l?issue d?un processus
de stérilisation et de remise en état, est interdit en France depuis les années 80. Malgré le cadre
posé au niveau européen par le Règlement 2017/745, la France a rappelé en 2022 cette
interdiction, contrairement à neuf États membres qui autorisent cette pratique. En conséquence,
il n?existe pas sur le territoire national de filière industrielle de retraitement. Or la LFSS pour 2024
prévoit que le retraitement devra être réalisé, pour le compte de quatre établissements de santé,
par une entreprise externe. Compte tenu des investissements nécessaires, en particulier pour
obtenir le marquage CE des DMUU retraités, il n?est pas envisageable qu?une filière industrielle
émerge en France dans les deux prochaines années. Une telle filière ne pourra émerger que si les
pouvoirs publics se positionnent clairement en faveur du retraitement des DMUU.
Vanguard, entreprise allemande, est la seule susceptible de retraiter des DMUU dans le cadre de
l?expérimentation. Elle exerce cette activité, y compris pour le compte d?établissements de santé
étrangers, sur trois sites en Allemagne. Les autorités sanitaires allemandes n?assurent pas un suivi
du retraitement des DMUU. Aucune alerte particulière n?a été soulevée sur le plan de la
matériovigilance. Dans l?attente d?un rapport d?évaluation prévu en mai 2024, la Commission
européenne ne dispose pas non plus d?éléments sur le volume ou la nature des DMUU retraités.
Le périmètre des DMUU retraités dans le cadre de l?expérimentation dépendra donc du catalogue
de Vanguard. Sur les 600 références retraitées par l?entreprise, constituées à 98 % de DMUU
utilisés en électrophysiologie (cathéters de diagnostic et d?ablation en particulier),
seules 74 présentent un marquage CE et sont utilisées par des CHU français. La mission
recommande d?exclure du périmètre de l?expérimentation les références qui, bien qu?elles soient
utilisées en France, n?ont pas fait l?objet du contrôle externe de qualité associé au marquage CE.
Deux circuits de retraitement sont envisageables dans le cadre de l?expérimentation. En circuit
« ouvert », l?établissement de santé, d?une part, vend des DMUU à retraiter et, d?autre part,
acquiert des DMUU retraités. En circuit « fermé », l?établissement de santé sous-traite le
retraitement de ses propres DMUU. Sous réserve que les contrats-cadres conclus par les
établissements de santé avec les fabricants de cathéters neufs n?incluent pas de clause
d?exclusivité, ou moyennant un avenant à ces contrats, la mission recommande de privilégier un
circuit « ouvert ». En effet, il permet de majorer les économies engendrées par le retraitement
(qui représenteraient 60 % du coût annuel lié à l?acquisition des cathéters neufs) et offre plus de
flexibilité dans la gestion de stocks.
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Plusieurs critères sont envisageables pour sélectionner les quatre établissements de santé qui
participeront à l?expérimentation. Ces établissements devront présenter un volume annuel
d?actes d?électrophysiologie suffisant pour susciter l?intérêt de l?entreprise de retraitement. Il
serait aussi pertinent de sélectionner des établissements de tailles et de statuts différents. Enfin
et surtout, il est indispensable de vérifier que les professionnels concernés par l?expérimentation
(médecins électrophysiologistes, personnel paramédical, pharmaciens) adhèrent à la démarche
dans le cadre d?une stratégie globale de diminution de l?empreinte écologique des DM.
Sur le plan logistique, le retraitement, incluant la traçabilité des DMUU retraités, devrait
représenter une surcharge de travail limitée pour les établissements de santé. Les transports des
DMUU vers et depuis le site de retraitement seront assurés par l?entreprise. Les DMUU utilisés
devront avoir été nettoyés au préalable. La mission recommande de faire établir par la Société
française d?hygiène hospitalière un protocole de nettoyage des DMUU destinés au retraitement.
Ces dispositions devront être compatibles avec les standards français, les exigences de
l?entreprise de retraitement et les dispositions du code de l?environnement relatives aux déchets.
L?information obligatoire des patients, prévue par l?article 66 de la LFSS pour 2024, constitue un
point d?attention. Pour ne pas faire obstacle au déroulement de l?expérimentation, la mission
recommande d?élaborer, en lien avec les représentants des usagers, un document national
d?information soulignant l?absence de risque sanitaire et l?intérêt écologique du retraitement. À
l?inverse des essais cliniques, un système d?« opt out » doit être privilégié. Les patients devront
manifester expressément leur opposition à l?utilisation d?un DMUU. Cette opposition sera tracée
par les établissements de santé participant à l?expérimentation.
Si la mission ne remet pas en cause l?intérêt écologique du retraitement des DMUU, elle invite à
l?objectiver et à remettre en perspective ce levier avec les autres moyens de décarboner les DM.
Plusieurs études suggèrent que le retraitement des DMUU contribue à diminuer leur empreinte
environnementale. L?évaluation de l?expérimentation devra confirmer cet intérêt écologique. À
cette fin, il est indispensable de sélectionner suffisamment en amont un prestataire expert de la
méthode de l?Analyse de cycle de vie (AVC). Par ailleurs, cette expérimentation ne doit pas évincer
d?autres leviers de décarbonation des DMUU, dont une partie sont cités par la feuille de route «
planification écologique ». À l?image de la stratégie retenue par la Grande-Bretagne (« Greener
NHS »), le levier des achats hospitaliers pourrait être mieux mobilisé, en particulier pour inciter les
fabricants à éco-concevoir les DM et à proposer des DM à usage multiple (DMUM).
Enfin, les moyens et la gouvernance retenus pour mettre en oeuvre la planification écologique du
système de santé méritent d?être questionnés. Avec 0,5 ETP en charge de la transition écologique
au sein du ministère de la santé, et malgré une mobilisation croissante de l?Agence nationale de
la performance sanitaire et médicosociale (Anap), la feuille de route reste essentiellement portée
au niveau des cabinets. Des établissements de santé s?engagent de façon encore isolée, et sans
incitation particulière, dans la mobilisation de certains leviers. Le défaut d?expertise et
d?accompagnement ne favorisent pas un passage à l?échelle des actions les plus pertinentes. Une
implication plus marquée des administrations en charge de la transition écologique permettrait
également de mieux prioriser les actions dans le cadre de la stratégie interministérielle « France
nation verte ».
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RECOMMANDATIONS DE LA MISSION
n° Recommandation
Autorité
responsable
Échéance
1
Sur la base de l?évaluation de l?expérimentation
inscrite à l?article 66 de la LFSS pour 2024, donner
rapidement de la visibilité aux industriels français
sur le calendrier et le périmètre d?une éventuelle
autorisation pérenne du retraitement en France
DGS / DGOS
Avant la fin de
l?expérimentation
2
Circonscrire le périmètre des DMUU retraités dans
le cadre de l?expérimentation à ceux qui
présentent un marquage CE
DGS / DGOS 1er trimestre 2024
3
Choisir des établissements de santé avec des
statuts différents et une activité
d?électrophysiologie suffisante, dont les
professionnels adhèrent à l?expérimentation dans
le cadre d?une démarche globale de réduction de
l?empreinte écologique des DM
DGS / DGOS 1er trimestre 2024
4
Sous réserve de l?expertise juridique des accords-
cadres entre chaque établissement de santé et les
fabricants de cathéters neufs, privilégier le
retraitement en circuit « ouvert » et dissocier les
services fournis de l?achat des consommables
DGS / DGOS 1er trimestre 2024
5
Assurer la conformité du contrat établi entre les
établissements de santé et l?entreprise de
retraitement avec le protocole de
décontamination établi par la société française
d?hygiène hospitalière
DGS / DGOS /
DAJ
1er trimestre 2024
6
Mettre en place un dispositif spécifique de
traçabilité permettant le suivi des DMUU retraités
utilisés pour chaque patient
DGS / DGOS 1er trimestre 2024
7
Associer les représentants des usagers à
l?élaboration d?un document national
d?information à partager avec les patients qui
devront manifester expressément leur opposition
en cas de refus d?utilisation d?un DMUU retraité
DGS / DGOS 1er trimestre 2024
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n° Recommandation
Autorité
responsable
Échéance
8
Allouer une partie des financements prévus à
l?article 66 de la LFSS pour 2024 à l?évaluation de
l?expérimentation par un prestataire maîtrisant la
méthodologie de l?analyse de cycle de vie
DGS / DGOS 1er trimestre 2024
9
Sur la base d?une expertise de l?intérêt écologique
des différentes actions engagées par les
établissements de santé, assurer un passage à
l?échelle des leviers les plus pertinents de
réduction de l?empreinte écologique des DM
DGS / DGOS 1er semestre 2024
10
Faire reposer la « task force » sur la transition
écologique en santé sur des moyens pérennes
dont le calibrage et la gouvernance, à dimension
interministérielle, doivent faire l?objet de travaux
spécifiques
Ministère de la
santé et de la
prévention
1er trimestre 2024
11
Élargir aux DM les travaux engagés par la Direction
générale des entreprises, en lien avec l?objectif de
relocalisation des industries de santé, pour
calculer et diminuer l?impact carbone des
médicaments
DGE / DGS 1er semestre 2024
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SOMMAIRE
SYNTHESE .......................................................................................................................................................... 3
RECOMMANDATIONS DE LA MISSION ...................................................................................................... 5
RAPPORT ............................................................................................................................................................ 9
1 LE PERIMETRE ET LES MODALITES DE RETRAITEMENT A TITRE EXPERIMENTAL DES DMUU
DEVRONT ETRE DETERMINES EN L?ABSENCE DE FILIERE INDUSTRIELLE EN FRANCE ....... 12
1.1 SEULE UNE ENTREPRISE, VANGUARD, LOCALISEE EN ALLEMAGNE, EST SUSCEPTIBLE DE RETRAITER DES
DMUU DANS LES DEUX PROCHAINES ANNEES ..................................................................................... 12
1.1.1 Le cadre expérimental retenu par la LFSS 2024 n?est pas de nature à favoriser l?émergence
d?une filière industrielle de retraitement en France ........................................................................ 12
1.1.2 Vanguard a mis en place depuis une vingtaine d?années un processus spécifique de
retraitement de DMUU sur trois sites en Allemagne ....................................................................... 17
1.2 LE PERIMETRE DES DMUU A RETRAITER DANS LE CADRE DE L?EXPERIMENTATION EST CONTRAINT PAR LE
CATALOGUE DE VANGUARD ................................................................................................................ 18
1.2.1 Ce catalogue, constitué à 98 % de cathéters d?électrophysiologie, inclut 74 références avec
marquage CE utilisées en France ........................................................................................................ 18
1.2.2 Le recours à ces cathéters retraités devrait engendrer des économies annuelles allant de 35 à
59 % du coût d?achat de ces DMUU neufs selon le circuit retenu par les établissements de santé
............................................................................................................................................................... 20
2 LE CAHIER DES CHARGES DE L?EXPERIMENTATION DEVRA PRECISER LES CRITERES DE
SELECTION DES ETABLISSEMENTS DE SANTE, LE PROCESSUS D?ACHAT DES DM RETRAITES
ET LES MODALITES D?INFORMATION DES PATIENTS ................................................................. 22
2.1 LA PARTICIPATION DES ETABLISSEMENTS DE SANTE DOIT REPOSER SUR UNE ADHESION DES
PROFESSIONNELS CONCERNES A L?EXPERIMENTATION ET A UNE REDUCTION DE L?EMPREINTE
ECOLOGIQUE DES DM ........................................................................................................................ 22
2.1.1 Plusieurs critères pourraient être pris en compte pour choisir les quatre établissements de
santé qui participeront à l?expérimentation ................................................................................... 22
2.1.2 L?adhésion des professionnels concernés à la démarche dans le cadre une réduction de
l?empreinte écologique des DM est un critère prioritaire ............................................................. 23
2.2 UN MARCHE GROUPE POURRAIT ETRE ENVISAGE SELON DES MODALITES A DETERMINER APRES EXPERTISE
DES ACCORDS CONCLUS PAR CHAQUE ETABLISSEMENT DE SANTE AVEC LES FABRICANTS DE CATHETERS
NEUFS ................................................................................................................................................. 24
2.2.1 La mission préconise que le retraitement des DMUU se fasse en circuit « ouvert » plutôt que
« fermé » ............................................................................................................................................... 24
2.2.2 Un dialogue devrait être engagé avec les fabricants de cathéters neufs, qui pourrait déboucher
le cas échéant sur un avenant aux accords-cadres ........................................................................ 24
2.3 LE PROCESSUS LOGISTIQUE ASSOCIE AU RETRAITEMENT NE POSE PAS DE DIFFICULTES PARTICULIERES,
AVEC UN POINT D?ATTENTION NEANMOINS CONCERNANT L?INFORMATION DES PATIENTS ................ 25
2.3.1 Ce processus, qui devrait a priori représenter une surcharge de travail limitée, doit reposer sur
un protocole partagé de décontamination et garantir la traçabilité des DMUU retraités ....... 25
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2.3.2 Le déploiement de l?expérimentation doit s?accompagner d?un effort global de pédagogie avec
un système d?« opt out » pour les patients ..................................................................................... 27
3 LE RETRAITEMENT DOIT ETRE MIS EN PERSPECTIVE AVEC LES AUTRES LEVIERS DE
REDUCTION DE L?EMPREINTE ECOLOGIQUE DES PRODUITS DE SANTE QUI EXIGENT DES
MOYENS ET UNE GOUVERNANCE A LA HAUTEUR DES ENJEUX .............................................. 28
3.1 DES ETABLISSEMENTS DE SANTE MOBILISENT DE FAÇON ENCORE ISOLEE ET NON HIERARCHISEE
PLUSIEURS LEVIERS DE REDUCTION DE L?EMPREINTE ECOLOGIQUE DES DM ......................................... 28
3.1.1 L?évaluation de l?expérimentation inscrite en LFSS 2024 devra en particulier confirmer l?intérêt
écologique relatif du retraitement des DMUU ................................................................................ 28
3.1.2 Le ministère de la santé doit prioriser la mise en oeuvre d?autres leviers de réduction de
l?empreinte écologique des DM, et accompagner le cas échéant leur passage à l?échelle ...... 30
3.2 SEULS UNE GOUVERNANCE ET DES MOYENS A LA HAUTEUR DES ENJEUX CREDIBILISERONT LES
ENGAGEMENTS DU MINISTERE DE LA SANTE EN MATIERE DE TRANSITION ECOLOGIQUE ....................... 34
3.2.1 Le besoin d?accompagnement des établissements de santé justifie des moyens humains et
financiers dans le cadre d?une gouvernance qui reste à définir ................................................... 34
3.2.2 Au regard de l?expertise nécessaire pour hiérarchiser les leviers de réduction de l?empreinte
écologique, cette gouvernance doit avoir une dimension interministérielle plus affirmée ..... 36
LISTE DES ANNEXES ..................................................................................................................................... 38
ANNEXE 1 : IDENTIFICATION D?UNE FILIERE INDUSTRIELLE DE RETRAITEMENT ET
PERIMETRE DES DMUU ELIGIBLES .................................................................................................... 39
ANNEXE 2 : MODALITES D?EXPERIMENTATION DU RETRAITEMENT DES DMUU DANS
QUATRE ETABLISSEMENTS DE SANTE ............................................................................................ 55
ANNEXE 3 : ÉLEMENTS DE PARANGONNAGE SUR LE RETRAITEMENT DES DMUU EN
EUROPE .......................................................................................................................................... 67
ANNEXE 4 : LEVIERS DE REDUCTION DE L?EMPREINTE ECOLOGIQUE DES DISPOSITIFS
MEDICAUX............................................................................................................................................... 81
ANNEXE 5 : RESULTATS DU QUESTIONNAIRE ADRESSE PAR LA MISSION AUX
ETABLISSEMENTS DE SANTE ............................................................................................................ 112
LISTE DES PERSONNES RENCONTREES ................................................................................................. 123
LETTRE DE MISSION .................................................................................................................................... 131
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RAPPORT
[1] Par lettre de mission transmise le 28 août 2023, le ministre de la Transition écologique et de
la Cohésion des territoires et la ministre déléguée chargée de l?Organisation territoriale et des
Professions de santé ont demandé à l?Inspection générale des affaires sociales (Igas) et à
l?Inspection générale de l?environnement et du développement durable (IGEDD) d?évaluer la
faisabilité d?une levée conditionnelle de l?interdiction de retraitement des Dispositifs médicaux à
usage unique (DMUU).
[2] En effet, l?article 66 de la Loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2024 prévoit
le lancement, au plus tard en novembre 2024, d?une expérimentation de deux ans sur le
retraitement des DMUU. Le retraitement des DMUU est défini au niveau européen comme « le
procédé dont fait l'objet un dispositif usagé pour en permettre une réutilisation sûre, y compris le
nettoyage, la désinfection, la stérilisation et les procédures connexes, ainsi que l'essai du dispositif
usagé et le rétablissement de ses caractéristiques techniques et fonctionnelles en matière de
sécurité »1. Il se distingue du processus de stérilisation applicable aux DM à usage multiple.
L?article 17 du Règlement européen 2017/745, pleinement applicable depuis mai 2021, encadre
cette pratique sous réserve qu?elle ait été préalablement autorisée au niveau national. La France,
qui interdit le retraitement des DMUU depuis les années 80, a rappelé et précisé la portée de cette
interdiction au niveau législatif en 20222.
[3] Cependant, la feuille de route « planification écologique du système de santé », publiée en
mai 2023, prévoit d?expérimenter, à titre dérogatoire par rapport au code de la santé publique,
le retraitement des DMUU. En effet, cette pratique est identifiée comme un levier de réduction
de l?empreinte écologique des produits de santé3. Or, dans le cadre de la démarche « France
nation verte »4, le ministère de la santé s?est engagé à réduire à horizon 2050 de 5 % par an ses
émissions de gaz à effets de serre. Ces émissions représenteraient 8 % du total des émissions
1 Article 2 du Règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 relatif aux
dispositifs médicaux.
2 L?article 10 de l?ordonnance n°2022-582 du 20 avril 2022, codifié à l?article L. 5211-3-2 du code de la santé
publique, dispose que « le retraitement de dispositifs à usage unique mentionné à l?article 17 du règlement (UE)
2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017, leur mise sur le marché et leur utilisation sont
interdits ».
3 La diminution de l?empreinte écologique ne se limite pas à la réduction des émissions de gaz à effet de serre
(décarbonation). Elle renvoie à la pression qu?exerce l?homme sur les ressources et les écosystèmes. Elle inclut
la réduction des émissions de GES. Elle correspond à la superficie de terres nécessaires pour qu?un individu
ou une population puisse subvenir à ces besoins. Selon l?Ademe, l?Analyse de cycle de vie (ACV) est l?outil le
plus abouti en matière d?évaluation globale et multicritères des impacts environnementaux d?un produit. Elle
recense et quantifie, tout au long de la vie d?un produit, les flux physiques de matière et d?énergie associés
aux activités humaines
4 Lancé en octobre 2022 par la Première ministre, « France nation verte » est le plan d?actions recensant
toutes les actions engagées pour répondre aux objectifs de baisser suffisamment les émissions de gaz à effet
de serre, adapter le pays au changement climatique, restaurer la biodiversité et réduire l?exploitation des
ressources naturelles à un rythme soutenable.
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nationales, et 20 % d?entre elles seraient liées aux DM5. C?est donc sous l?angle écologique que le
sujet du retraitement des DMUU a été remis à l?agenda moins de deux ans après son interdiction
par la loi. La France se distingue à cet égard des neuf États membres de l?UE qui ont autorisé cette
pratique, sans l?expérimenter au préalable, dans l?objectif premier de rechercher des économies.
[4] Le cadre de l?expérimentation du retraitement des DMUU est en partie défini par la LFSS
pour 2024. Elle concernera quatre établissements de santé. Le retraitement ne pourra être réalisé
que par une entreprise externe, et non par l?établissement de santé lui-même. Les DM retraités
devront présenter un marquage CE, qui emporte les mêmes responsabilités que celles qui
incombent au fabricant du DM neuf, ou respecter les spécifications communes, dispositif plus
flexible défini par la Commission européenne6. Enfin, le patient, préalablement informé, pourra
s?opposer à l?utilisation d?un DM retraité. Pour le reste, un décret en Conseil d?État précisera les
modalités de mise en oeuvre de l?expérimentation.
[5] Dans cette perspective, il était demandé à la mission :
? d?identifier, d?une part, une filière industrielle susceptible de retraiter des DMUU et de
définir, d?autre part, le périmètre des DMUU éligibles, sur la base notamment de critères
économiques (cf. annexe n°I) ;
? d?apprécier les modalités de mise en oeuvre de l?expérimentation dans les établissements
de santé, en portant une attention particulière à la sécurité sanitaire (cf. annexe n°II) ;
? de présenter des éléments de parangonnage avec les autres États, en particulier en Union
européenne, ayant autorisé le retraitement des DMUU (cf. annexe n°III) ;
? d?élaborer une méthode d?analyse de l?impact écologique du retraitement (cf. annexe n°IV).
[6] Pour répondre à cette commande, la mission a pris l?attache d?un large panel d?acteurs :
? elle a rencontré les représentants du ministère en charge de la santé (en particulier la
direction générale de la santé, la direction générale de l?offre de soins et l?agence nationale
de la performance sanitaire et médico-sociale), du ministère en charge de la transition
écologique (commissariat général au développement durable, direction générale de la
prévention des risques, agence de la transition écologique) et du ministère en charge de la
souveraineté industrielle (direction générale des entreprises) ;
? elle a échangé avec les représentants de différentes catégories de professionnels
hospitaliers (direction générale, médecins électrophysiologistes, pharmaciens, hygiénistes,
paramédicaux) dans trois CHU particulièrement engagés en matière de transition
écologique (Bordeaux, Clermont-Ferrand et Nîmes) ainsi qu?avec deux centrales d?achats
hospitaliers (Résah et UniHA) et l?Agence générale des équipements et produits de santé
(AGEPS) de l?AP-HP. En outre, pour apprécier le positionnement des établissements de santé
5 The Shift Project, « Décarboner la santé pour soigner durablement », rapport final V2, avril 2023 (actualisation
de la version publiée en 2021). Il s?agit d?une étude privée non expertisée par une agence publique.
6 Règlement d?exécution (UE) 2020/1207 de la Commission du 19 août 2020 portant modalités d?application
du règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les spécifications
communes pour le retraitement des dispositifs à usage unique. Ces spécifications communes sont réservées
aux DMUU retraités pour utilisation dans un établissement de santé.
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sur l?expérimentation inscrite en LFSS, et plus largement les actions engagées pour réduire
leur empreinte écologique, la mission leur a adressé un questionnaire auxquels plus
de 1 500 d?entre eux ont répondu7 ;
? elle a recueilli le point de vue des représentants du Syndicat national de l?industrie des
technologies médicales (Snitem), d?un fabricant de DM (Johnson et Johnson), d?un
organisme notifié (GMED)8, du réseau de pharmaciens hospitaliers spécialisés dans les DM
(Euro-Pharmat), de deux sociétés savantes (société française des sciences de la stérilisation
et société française d?hygiène hospitalière), du conseil national de l?ordre des pharmaciens
et des usagers du système de santé (France Assos Santé) ;
? elle a adressé un questionnaire aux conseillers pour les affaires sociales de trois États
(Espagne, Royaume-Uni, Suède) et échangé avec un collaborateur de l?unité « dispositifs
médicaux » de la Commission européenne ;
? dans le cadre de son déplacement à Berlin du 13 au 15 novembre, la mission a visité le site
de retraitement de l?entreprise Vanguard et rencontré les représentants du ministère de la
santé et de l?institut fédéral des médicaments et des DM (BfArM) ;
? enfin, la mission a échangé avec les représentants des filières à responsabilité élargie des
producteurs (FNADE9, FEDEREC10 et DASTRI11).
[7] Ces échanges l?ont conduite à élargir l?approche retenue par la lettre de mission. En effet, si
le retraitement est un levier de diminution de l?empreinte écologique des DM, il doit être mis en
perspective avec d?autre leviers, pour partie recensés par la feuille de route de mai 2023. Du fait
du caractère encore récent de la stratégie de transition écologique du ministère de la santé, les
services d?inspection n?ont pas encore eu l?opportunité de se positionner sur la pertinence des
leviers retenus ou de la gouvernance mise en place. Le présent rapport ne prétend pas répondre
à ce besoin qui justifierait des travaux ad hoc. Néanmoins, il ébauche des constats qui relativisent,
sans le remettre en cause, l?intérêt écologique du retraitement des DMUU et, surtout, interrogent
le calibrage des moyens et l?organisation retenus pour mettre en oeuvre la feuille de route.
[8] Centré sur la commande initialement adressée par les ministres, le présent rapport est
organisé en trois parties :
? la première souligne que, en l?absence de filière industrielle de retraitement en France, le
périmètre et les modalités de mise en oeuvre de cette pratique dépendront dans les deux
7 Questionnaire mis en ligne du 19 octobre au 20 novembre 2023 sur les sites d?Euro-Pharmat, de la Fédération
de l?Hospitalisation de France (FHF), de la Fédération de l?Hospitalisation Privée (FHP), et de la Fédération
des Établissements Hospitaliers et d'Aide à la Personne Privés solidaires (FEHAP). L?enquête a été annoncée
lors des 33ème journées nationales sur les dispositifs médicaux à Clermont Ferrand du 10 au 12 octobre 2023.
Sur les 1 583 réponses à ce questionnaires, seules 6 % sont complètes.
8 Le GMED, spécialisée en certification dans le domaine médical, a été désignée organisme notifié (ON) en
France, au titre du Règlement européen 2017/745 sur les DM. Un organisme notifié évalue et délivre le
marquage CE nécessaire à la commercialisation des DM en Europe.
9 Fédération nationale des activités de la dépollution et de l?environnement.
10 Fédération professionnelle des entreprises du recyclage.
11 Eco-organisme national agréé par l?Etat français depuis 2012 et financé par les industries de santé qui
collecte et traite les DASRI perforants des patients en auto-traitement et des utilisateurs d?autotests de
diagnostic des maladies infectieuses transmissibles.
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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prochaines années d?une entreprise allemande, Vanguard, qui est la seule apte à répondre
aux besoins de l?expérimentation ;
? la deuxième précise, en vue de la rédaction du cahier des charges de l?expérimentation,
quelles pourraient être ses modalités de déploiement dans les quatre établissements de
santé qui seront retenus ;
? enfin, la troisième remet en perspective l?expérimentation au regard des autres leviers de
diminution de l?empreinte écologique du système de santé, dont la mise en oeuvre exige des
moyens et une gouvernance à la hauteur des enjeux.
1 Le périmètre et les modalités de retraitement à titre
expérimental des DMUU devront être déterminés en
l?absence de filière industrielle en France
1.1 Seule une entreprise, Vanguard, localisée en Allemagne, est
susceptible de retraiter des DMUU dans les deux prochaines années
1.1.1 Le cadre expérimental retenu par la LFSS 2024 n?est pas de nature à
favoriser l?émergence d?une filière industrielle de retraitement en France
[9] Le retraitement des DMUU par une entreprise externe, option retenue par la LFSS
pour 2024, n?est pas la seule autorisée par le droit européen. En effet, le Règlement 2017/745
prévoit trois schémas alternatifs de retraitement (cf. tableau 1). Le retraitement peut être réalisé
(i) dans et par les établissements de santé pour leur usage propre (ii) par une entreprise externe
dans le cadre d?un contrat de sous-traitance avec un établissement de santé (iii) par une entreprise
externe dans le cadre d?un contrat de vente, cette entreprise ayant alors le statut de fabricant et
les DM retraités un marquage CE. L?article 66 de la LFSS pour 2024 exclut l?option d?un
retraitement au sein des établissements de santé (option n°1). En revanche, le retraitement par
une entreprise externe pourra être réalisé dans le cadre d?une sous-traitance (option n°2), le cas
échéant sans que les DM retraités présentent un marquage CE, ou dans le cadre d?un contrat
d?achat de DM retraités, qui présenteront alors nécessairement un marquage CE.
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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Tableau 1 : Trois options de retraitement prévues par le Règlement 2017/745
Options Où est effectué le
retraitement ?
Qui valide ? À qui appartiennent les
DMUU retraités ?
1 Établissement de santé Un organisme notifié
certifie la conformité des
procédés de retraitement
aux spécifications
communes
Les DMUU restent la
propriété de
l?établissement de santé
qui les utilise
2 Entreprise externe (à la
demande d?un
établissement de santé)
Un organisme notifié
certifie la conformité des
procédés de retraitement
aux spécifications
communes
Les DMUU restent la
propriété de
l?établissement de santé
qui les utilise
3 Entreprise externe qui a le
statut de fabricant
Les DM retraités
présentent un marquage
CE, la conformité est
certifiée par un organisme
notifié
Les DMUU sont vendus à
une entreprise externe qui
les retraitent et les
commercialise auprès de
n?importe quel
établissement de santé
Source : Mission
[10] À fin octobre 2023, sur les 27 États membres de l?Union européenne, 15 ont interdit la
pratique du retraitement et neuf12 l?ont autorisé selon des modalités mal connues et a priori
hétérogènes. Dans l?attente du rapport prévu par le Règlement 2017/745 à horizon mai 202413, la
Commission européenne ne dispose pas d?éléments sur les conditions dans lesquelles le
retraitement est mis en oeuvre dans les États l?ayant autorisé (ex : volume et nature des DM
retraités, schémas de retraitement privilégiés, matériovigilance, impact écologique et
économique, etc.). Les informations synthétisées dans le tableau 2 ci-dessous se fondent sur les
retours des Conseillers aux affaires sociales saisis par la mission et sur les dispositions juridiques
accessibles en ligne. Il en ressort que, sur les neuf États membres ayant autorisé le retraitement :
? seuls deux États (Irlande et Pays-Bas) interdisent à la fois le retraitement des DMUU au sein
des établissements de santé (option 1) et la sous-traitance du retraitement à une entreprise
externe dans le cadre des spécifications communes (option 2) ;
? deux États (Suède et Croatie) autorisent le retraitement uniquement en circuit fermé, sans
cession de la propriété des DMUU à une entreprise externe ;
? sur les sept États qui autorisent le retraitement des DMUU par une entreprise externe, trois
(Suède, Slovénie, Croatie) excluent la possibilité pour l?entreprise de retraitement
12 Belgique ; Croatie ; Allemagne ; Irlande ; Pays-Bas ; Suède ; Portugal ; Espagne ; Slovénie.
13 L?article 17 du Règlement 2017/745 prévoit l?élaboration d?un rapport sur son exécution qui devra être
établi avant le 27 mai 2024 et remis au Parlement européen et au Conseil. Ce rapport, confié à un prestataire
sélectionné par la Commission, est en cours d?élaboration.
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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d?intervenir dans une logique de sous-traitance, en dehors du cadre de responsabilité des
fabricants de DM marqués CE ;
? trois États (Belgique, Croatie, Suède) ont restreint le périmètre des DMUU pouvant être
retraités au-delà des critères d?exclusion posés par l?article 17 du Règlement 2017/74514 (cf.
encadré ci-dessous) ;
? enfin, la majorité des États ayant autorisé le retraitement des DMUU sur leur territoire ne
prévoit pas d?information obligatoire des patents.
Carte 1 : Position des États membres sur le retraitement des DMUU à fin
octobre 2023
Source : Mission
14 En plus de la liste d?exclusion prévue au niveau européen, la Belgique précise que : « seul le retraitement de
dispositifs à usage unique réputé sûr, eu égard aux données scientifiques les plus récentes, peut être réalisé ».
En Suède, il est précisé que : « L?Agence des produits médicaux peut édicter d?autres règlements sur les
conditions et les exigences qui s?appliquent au retraitement et à la réutilisation des produits à usage unique »,
cf. annexe n°3.
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Tableau 2 : Modalités d?application de l?article 17 du RMD par pays qui autorisent le
retraitement
Pays En établissement
de santé (option
1)
Par une
entreprise
externe avec
spécifications
communes
(option 2)
Par une
entreprise
externe avec
marquage
CE (option
3)
Restrictions au
périmètre des
DMUU
éligibles
Information
obligatoire du
patient
Belgique Autorisé Autorisé Autorisé Oui Oui
Croatie Autorisé Autorisé Non autorisé Oui Non
Allemagne Autorisé Autorisé Autorisé Non Non
Irlande Non autorisé Non autorisé Autorisé Non Non
Pays-Bas Non autorisé Non autorisé Autorisé Non Non
Suède Autorisé Autorisé Non autorisé Oui Non
Portugal Autorisé Autorisé Autorisé Non Oui15
Espagne Autorisé Autorisé Autorisé Non Oui
Slovénie16 Autorisé Autorisé Non autorisé NC Oui
Source : Mission à partir des données transmises par les conseillers des affaires sociales et mises en
ligne par la Commission européenne.
15 Les établissements de santé informent les professionnels de santé et leurs patients de l?utilisation des
dispositifs médicaux à usage unique retraités et de toute autre information pertinente à leur sujet, et le
comité d?éthique de l?entité responsable concerné doit être impliqué.
16 En cours d?élaboration.
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RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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Critères européens de restriction du périmètre des DMUU pouvant être retraités
L?article 17 du Règlement 2017/745 dispose que « seul le retraitement de dispositifs à usage
unique réputés sûrs, eu égard aux données scientifiques les plus récentes, peut être réalisé ». Si
l?évaluation de l?aptitude au retraitement n?y est pas spécifiquement abordée, le RMD regroupe
en deux catégories les critères sur la base desquels un État membre peut exclure un DMUU du
retraitement :
1/ les DMUU présentant un risque élevé de contamination croisée :
-émettant des rayonnements ;
-utilisés pour administrer des médicaments cytostatiques ou radiopharmaceutiques ;
-contenant des substances médicamenteuses ;
-destinés à être utilisés dans des procédures invasives sur le système nerveux central ;
-présentant un risque de transmission d?encéphalopathies spongiformes ;
-implantables ;
2/ les DMUU susceptibles de défectuosité notamment en raison de leur technicité :
-pour lesquels des incidents graves ont eu lieu après le retraitement et pour lesquels la cause
des incidents est liée au retraitement ou il ne peut être exclu que la cause des incidents soit liée
au retraitement ;
-fonctionnant avec des piles ou batteries qui ne peuvent pas être changées ou qui présentent
un risque de dysfonctionnement après le retraitement ;
-munis d?une mémoire de données interne nécessaire à leur utilisation et qui ne peut pas être
changée ou qui présente un risque de dysfonctionnement après le retraitement ;
-comportant des lames coupantes ou tranchantes, des forêts ou des composants soumis à
l?usure qui ne sont plus fonctionnels après la première utilisation et qui ne peuvent pas être
changés ou affûtés avant la prochaine intervention médicale.
[11] La France se distingue des autres États de l?UE par le choix d?une voie expérimentale qui ne
favorisera pas l?émergence d?une filière industrielle de retraitement sur son territoire. Une
expérimentation d?une durée de deux ans, sans assurance sur le calendrier et le périmètre de
généralisation, n?offre pas de visibilité suffisante aux industriels au regard des investissements à
réaliser :
? d?une part, des investissements matériels (locaux, équipements spécifiques pour le
nettoyage, la stérilisation, le conditionnement et les contrôles avec des moyens analytiques
ad hoc), associés au recrutement d?un personnel formé à la mise en oeuvre du processus de
retraitement ;
? d?autre part, un investissement administratif pour obtenir le marquage CE ou la certification
du respect des spécifications communes auprès d?un organisme notifié. Le délai actuel
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RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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d?obtention du marquage CE est estimé à 18-24 mois si l?entreprise dispose déjà d?un
système de management de la qualité dans le cadre de ses activités de production17.
Recommandation n°1 Sur la base de l?évaluation de l?expérimentation inscrite à l?article 66 de
la LFSS pour 2024, donner rapidement de la visibilité aux industriels français sur le calendrier et le
périmètre d?une éventuelle autorisation pérenne du retraitement en France
1.1.2 Vanguard a mis en place depuis une vingtaine d?années un processus
spécifique de retraitement de DMUU sur trois sites en Allemagne
[12] Les seules entreprises européennes de retraitement identifiées par la mission, dont la plus
importante est Vanguard, se situent en Allemagne18. L?existence d?une telle filière sur le territoire
allemand peut s?expliquer par le fait que le retraitement y est autorisé depuis 2001. Créée en 1998,
la société Vanguard est la plus ancienne, la plus importante en nombre de salariés (près de 200)
mais surtout la seule des trois qui exporte des DMUU retraités avec un marquage CE. Les deux
autres entreprises n?interviendraient que dans le cadre de contrats de sous-traitance auprès
d?établissements de santé allemands et en dehors d?un marquage CE. Implantée sur trois sites,
Vanguard aurait retraité environ 270 000 DMUU en 2022, dont une partie auraient été vendus à
des établissements de santé au Royaume-Uni et en Israël.
[13] Le processus de retraitement mis en place par Vanguard, observé par la mission lors de son
déplacement à Berlin le 13 novembre 2023, s?assimile à une opération industrielle de « re-
fabrication » assurant la traçabilité des DMUU retraités sur la base de cinq étapes principales :
? la réception du DMUU provenant des établissements de santé : les DMUU, après avoir subi
au sein de l?établissement de santé une phase de prétraitement, sont colligés dans un
containeur fourni par la société Vanguard et enregistrés, à réception, dans un système
d?information19 ;
? l?appréciation de l?aptitude des DMUU à être retraités, qui repose sur une inspection visuelle
et des techniques de contrôle de leur fonctionnalité ;
? l?apposition sur les DMUU à retraiter d?un numéro de lot permettant leur identification
individuelle et le suivi du nombre de cycles de retraitement ;
? le retraitement à proprement parler, qui inclut trois phases successives de démontage,
nettoyage et contrôle de la sécurité et de la performance du DMUU retraité ;
? le conditionnement des DMUU et leur stérilisation à l?oxyde d?éthylène ;
? l?expédition des DMUU conditionnés vers les établissements de santé.
17 Il s?agit du délai indiqué à la mission par le GMED et corroboré par les représentants de l?entreprise Johnson
et Johnson.
18 Voir l?annexe n°1. Les deux autres entreprises, de taille plus faible que Vanguard, sont Meditreat et
Vecomed.
19 Ces DM peuvent être neufs, inconnus du système d?information ou avoir déjà été retraités. Dans ce dernier
cas, ils sont retrouvés grâce au numéro de traçabilité.
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RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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[14] Les autorités sanitaires allemandes ne pilotent pas spécifiquement le retraitement des
DMUU. Elles ne disposent pas de données sur le volume ni sur la nature des DMUU retraités. Elles
n?ont pas mis en place de matériovigilance. Elles ne sont donc pas en mesure d?apprécier si les
DMUU retraités entraînent plus de déclarations de matériovigilance que les DMUU neufs.
1.2 Le périmètre des DMUU à retraiter dans le cadre de l?expérimentation
est contraint par le catalogue de Vanguard
1.2.1 Ce catalogue, constitué à 98 % de cathéters d?électrophysiologie,
inclut 74 références avec marquage CE utilisées en France
[15] Sur les 590 références retraitées par Vanguard, 98 % sont des DMUU utilisés au cours des
actes d?électrophysiologie (patch, cathéters de diagnostic et d?ablation). Sur ces 590
références, 40 % (245) ont le marquage CE (conformément aux directives de 1993), et les 60 %
restants (347) sont conformes aux spécifications communes. Concernant les DMUU retraités
marqués CE, 241 sur les 245 sont utilisés au cours d?actes d?électrophysiologie et quatre en
chirurgie.
[16] Sur ces 590 références identifiées dans le catalogue de Vanguard, 74 références marquées
CE et 129 références conformes aux spécifications communes, retraitables en moyenne 3 fois,
sont utilisées par trois CHU français20. Il s?agit des deux principales familles de DMUU utilisées
dans les procédures d?électrophysiologie (cathéters d?ablation et cathéters de diagnostic). Les
cathéters d?électrophysiologie sont des DM qui présentent un haut niveau de risque. En effet, une
fois introduits dans le coeur, ils permettent, soit de stimuler et d?enregistrer l?activité électrique
du coeur pour localiser l?origine de la pathologie (cathéter de diagnostic), soit de traiter la
pathologie en coupant la conduction électrique (cathéter d?ablation). Ils sont donc classés au
niveau de risque le plus élevé (niveau III)21.
[17] Selon Vanguard, contrairement à ce que prévoit le Règlement 2017/745, aucun organisme
notifié ne certifie aujourd?hui le respect des spécifications communes. Les 129 références dites
« CS » du catalogue de Vanguard n?ont donc pas fait l?objet d?un audit par un tiers. Les DMUU
retraités par Vanguard, qu?ils aient un marquage CE ou non, sont issus du même processus de
retraitement. En théorie, ils présentent donc le même niveau de sécurité et de performance que
les DMUU neufs. Toutefois, dans le cadre de cette expérimentation, la mission recommande de
limiter le périmètre des DMUU à retraiter aux seuls DMUU marqués CE utilisés également par les
CHU retenus.
20 La mission a comparé le catalogue de Vanguard aux références utilisées par trois CHU français : AP-HP,
Bordeaux, Clermont-Ferrand.
21 Il existe quatre classes pour les DM, par ordre de criticité : I, IIa, IIb et III. La criticité est fonction du risque
potentiel pour le patient, le personnel soignant ou toute autre personne intervenant lors de l?utilisation du
dispositif.
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Tableau 3 : Catégorisation des DMUU retraités référencés dans le catalogue de
Vanguard à fin octobre 2023
Type de
procédure
Électrophysiologie Chirurgie Total
Marquage CE 241 4 245
Spécifications
communes
343 4 347
Non précisé 6 0 6
Total 590 8 598
Source : Mission sur la base des données du catalogue de Vanguard.
Tableau 4 : Groupes de DMUU par types de procédures (marquage CE ou
spécifications communes -CS) et nombre maximal de cycles de retraitement
(« reprocessing cycles »)22
Source : Mission à partir des données de Vanguard. Il s?agit du recoupement entre les DMUU
figurant dans le catalogue Vanguard et ceux achetés par les trois établissements de santé
22 « OEM » ou « Original equipement manufacturer » désigne le fabricant neuf du cathéter, et en l?espèce les
références de DMUU issues de ce processus initial de fabrication.
Groupe de DMUU
Nombre de OEM
Article Description /
Article family name
Moyenne de Max.
reprocessing
cycles*
Nombre de OEM
Article Description /
Article family name
Moyenne de Max.
reprocessing cycles*
Connection cable, electrical, system 1 12 3 8,0
EP-Ablation Catheter, 3D-mapping 2 3,0
EP-Ablation Catheter, 4-pole 18 4 25 3,7
EP-Ablation Catheter, Cryo 2 2,0
EP-Ablation Catheter, irrigated SF 6 3
EP-Ablation Catheter, irrigated SF, 3D-mapping 2 3
EP-Ablation Catheter, irrigated SF, Contact force, 3D-mapping 5 2
EP-Ablation Catheter, irrigated, 4-pole 6 3
EP-Ablation Catheter, irrigated, Contact force, 3D-mapping 4 2
EP-Ablation Catheter, irrigated, Contact force, 3D-mapping, TactiCath SE 5 3,0
EP-Diagnostic Catheter, 10-pole 8 3,0
EP-Diagnostic Catheter, 4-pole 39 3,6
EP-Diagnostic Catheter, 6-pole 9 3,7
EP-Diagnostic Catheter, 8-pole 1 3,0
EP-Diagnostic Catheter, steerable, 10-pole 11 4
EP-Diagnostic Catheter, steerable, 4-pole 3 4
EP-Diagnostic Catheter, steerable, 6-pole 1 4
EP-Diagnostic Catheter, steerable, 8-pole 4 4
EP-Diagnostic Catheter, steerable/fix, Lasso/Loop, 3D-mapping 2 3 4 3,0
Introducer sheaths 3 1,0
Introducer sheaths, steerable 6 1,0
Package EP-Ablation Catheter, 3D-mapping 2 3,0
Package EP-Ablation Catheter, irrigated SF, Contact force, 3D-mapping 5 2
Package EP-Ablation Catheter, irrigated, Contact force, 3D-mapping 4 2
Package EP-Diagnostic Catheter, steerable/fix, Lasso/Loop, 3D-mapping 2 3
Transseptal needles 20 3,0
Total général 74 3,4 129 3,3
Process (CE, CS)
CE CS
ARTICLES EN MARCHES CHU
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Recommandation n°2 Circonscrire le périmètre des DMUU retraités dans le cadre de
l?expérimentation à ceux qui présentent un marquage CE
1.2.2 Le recours à ces cathéters retraités devrait engendrer des économies
annuelles allant de 35 à 59 % du coût d?achat de ces DMUU neufs selon le
circuit retenu par les établissements de santé
[18] Deux circuits de retraitements, dits « ouvert » ou « fermé », sont envisageables dans le
cadre fixé par la LFSS pour 202423 :
? dans le circuit « ouvert », les établissements de santé, d?une part, vendent24 à l?entreprise
de retraitement les DMUU utilisés et, d?autre part, achètent à cette entreprise des DMUU
retraités, indépendamment du lieu où ces DMUU ont été précédemment utilisés ;
? dans le circuit « fermé », les établissements de santé sous-traitent à une entreprise le
retraitement des DMUU qu?ils ont utilisés, sous le plafond du volume maximal de cycles de
retraitements prévus.
[19] Le mode de calcul et le niveau des économies envisageables grâce au retraitement
dépendra du circuit choisi :
? en circuit « ouvert », le seul paramètre à prendre en compte est la différence entre les deux
prix d?achat (DM neuf et DM retraité). Le catalogue transmis par Vanguard permet d?avoir
un aperçu des prix pratiqués pour les DMUU retraités. À titre d?exemple, pour un cathéter
d?ablation vendu neuf à un établissement de santé au prix de 1 854 ¤ HT, le prix catalogue
de Vanguard est de 755 ¤ HT, soit une différence de - 59 % ;
? en circuit « fermé », l?établissement de santé réutilisant son propre cathéter, le calcul de
l?économie devra intégrer en outre le nombre maximal de cycles de retraitement et le taux
d?échec. Ce taux d?échec représente le pourcentage de DM qui, une fois inspectés lors de
leur réception, ne peuvent pas subir de retraitement. Vanguard estime ce taux d?échec
à 25 % (un cathéter sur quatre est jeté lors de la première inspection)25.
[20] En circuit « ouvert », selon la simulation réalisée par la mission, le recours au retraitement
engendre une économie annuelle de 59 % tandis qu?elle serait de 35 % en circuit « fermé ». Cette
simulation se fonde sur des hypothèses de prix26. Le tableau ci-dessous présente les économies
potentielles pour l?utilisation de 25 cathéters d?ablation. Dans le cas du circuit « ouvert »,
l?établissement devra en acheter 25 pour 25 utilisations. Dans le cas du circuit « fermé », comme
l?établissement réutilise ses propres cathéters pour 25 utilisations, il ne devra en acheter que 10
23 Le circuit de vente des DMUU usagés peut être aussi découplé du circuit d?achat des DMUU retraité, un
établissement de santé est libre d?acheter un DMUU retraité sans vendre ses propres DMUU, et inversement
24 La vente des DMUU utilisés ne nécessite pas de formalités particulières. Le prix de vente doit être agréé au
préalable avec l?entreprise de retraitement. A titre indicatif, ce prix de vente est de l?ordre de 8 ¤ HT.
25 Ce taux est conforme à celui observé par Johnson & Johnson dans son usine de retraitement aux USA.
26 La mission a considéré que le prix de vente par Vanguard sera le même pour les deux circuits mais
l?hypothèse d?un prix plus élevé pour le circuit « ouvert » n?est pas à exclure. Dans ce cas, le coût de la perte
d?un cathéter est assuré dans son intégralité par l?entreprise de retraitement.
PUBLIÉ
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(10 cathéters neufs qui peuvent être chacun retraités deux fois avec un taux d?échec de 25 %
garantissent la réception au maximum de 15 cathéters retraités).
Tableau 5 : Calcul des économies annuelles pour une utilisation de 25 cathéters en
circuit ouvert et en circuit fermé
Paramètres Circuit fermé Circuit ouvert
Prix achat cathéter neuf (HT) 1 854 ¤
Prix achat cathéter retraité (HT) 755 ¤
Nombre de cathéters achetés 10 25
Nombre de cycles de
retraitement
2
Taux d?échec 25 % Sans impact car le cathéter non
conforme est jeté
Nombre maximal d?utilisation
d?un même cathéter
20 fois Sans objet
Nombre d?utilisations en
intégrant le taux d?échec
15 fois Sans objet
Nombre d?utilisations de 10
cathéters
25 fois Sans objet
Coût annuel sans retraitement 46 350 ¤
Économie 16 485 ¤ 27 475 ¤
En % 35 % 59 %
Source : Pôle « data » de Igas à partir des données transmises par un CHU et par Vanguard
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2 Le cahier des charges de l?expérimentation devra préciser les
critères de sélection des établissements de santé, le
processus d?achat des DM retraités et les modalités
d?information des patients
2.1 La participation des établissements de santé doit reposer sur une
adhésion des professionnels concernés à l?expérimentation et à une
réduction de l?empreinte écologique des DM
2.1.1 Plusieurs critères pourraient être pris en compte pour choisir les quatre
établissements de santé qui participeront à l?expérimentation
[21] Le choix des quatre établissements de santé27 qui participeront à l?expérimentation
pourrait reposer sur au moins deux critères :
? la volumétrie de DMUU retraitables (donc de cathéters d?électrophysiologie) utilisés
(cf. tableau ci-dessous) car elle conditionne l?intérêt de l?entreprise de retraitement à
participer au marché ;
? la taille et le statut juridique des établissements, qui permettraient d?apprécier les
éventuelles différences entre eux dans le déploiement du retraitement des DMUU.
[22] En revanche, la proximité géographique des établissements de santé constitue un critère
secondaire. Cette proximité permettrait certes d?optimiser le circuit de transport des DMUU
retraités vers le site de l?entreprise de retraitement. Toutefois, les analyses de cycle de vie réalisées
sur le retraitement montrent que l?empreinte carbone liée au transport est relativement faible
par rapport à l?empreinte globale du retraitement qui est surtout liée au processus de stérilisation
(cf. annexe n° IV).
27 Il s?agit du nombre mentionné par l?étude d?impact de la LFSS pour 2024.
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Tableau 6 : Top 10 des établissements de santé publics et privés ayant réalisé le plus
de traitements par voie vasculaire en 2022
Établissement de santé Statut Volume de traitements réalisés par voie vasculaire
en 202228
CL PASTEUR TOULOUSE Privé 1 280
INSTITUT MUTUALISTE MONTSOURIS Espic29 970
CHU DE BORDEAUX Public 810
HOPITAL SAINT JOSEPH Marseille Espic 800
HOSPICES CIVILS DE LYON Public 752
CLINIQUE DE LA PLAINE CLERMOND
FERRAND
Privé 747
CLINIQUE CHIRURGICALE AMBROISE
PARE
Privé 701
CHU DE SAINT-ETIENNE Public 667
INFIRMERIE PROTESTANTE Espic 632
CHU DE CLERMONT-FERRAND Public 618
Source : Pôle « data » de l?Igas.
2.1.2 L?adhésion des professionnels concernés à la démarche dans le cadre une
réduction de l?empreinte écologique des DM est un critère prioritaire
[23] L?adhésion de l?ensemble des professionnels hospitaliers au retraitement des DMUU est une
condition de réussite de l?expérimentation. Ce critère pourrait être apprécié sur la base d?un
document de présentation de la démarche signé par l?ensemble des professionnels concernés
(secrétariat général, commission ou conférence médical d?établissement, médecins,
paramédicaux, pharmaciens, hygiénistes) au sein de l?établissement de santé candidat. Ce
document préciserait les rôles et responsabilités respectifs de chaque catégorie de professionnels
dans le cadre de l?expérimentation. Il prévoirait également les modalités de pilotage de
l?expérimentation, dans le cadre d?une comitologie existante (par exemple, en lien avec la
stratégie de transition écologique) ou ad hoc.
[24] La participation des établissements de santé à l?expérimentation doit aussi s?inscrire dans
une démarche plus globale de diminution de l?empreinte écologique des produits de santé. En
effet, le retraitement ne doit pas être considéré comme un levier isolé, et in fine modeste à
l?échelle de la totalité des émissions recensées (cf. annexe n°IV). À l?inverse, il peut jouer un rôle
de catalyseur quand d?autres actions relatives aux DM ont déjà été identifiées, voire engagées
28 Traitements majeurs des troubles du rythme par voie vasculaire : GHS 05K191, 05K192, 05K193, 05K194,
05K19.
29 Espic : Établissement de santé privé d?intérêt collectif.
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(développement de l?usage multiple, renforcement des clauses environnementales dans les achats
de produits de santé, valorisation des déchets issus des DM, etc.).
Recommandation n°3 Choisir des établissements de santé avec des statuts différents et une
activité d?électrophysiologie suffisante, dont les professionnels adhèrent à l?expérimentation
dans le cadre d?une réduction de l?empreinte écologique des DM
2.2 Un marché groupé pourrait être envisagé selon des modalités à
déterminer après expertise des accords conclus par chaque
établissement de santé avec les fabricants de cathéters neufs
2.2.1 La mission préconise que le retraitement des DMUU se fasse en circuit
« ouvert » plutôt que « fermé »
[25] Le circuit « ouvert », équivalent sur le plan sanitaire au circuit « fermé », offre plus de
flexibilité dans la gestion des stocks mais soulève des questions sur le plan juridique :
? sur le plan sanitaire, dans la mesure où les DMUU retraités marqués CE sont strictement
équivalents aux DMUU neufs, il n?y a pas d?intérêt à privilégier des DMUU retraités déjà
utilisés dans le même établissement ;
? sur le plan opérationnel, ce circuit permet à l?établissement de santé d?ajuster plus
facilement ses stocks en fonction de son activité car le volume de DMUU retraités achetés
ne dépend pas du volume de DMUU vendus à l?entreprise de retraitement ;
? sur le plan juridique, au regard du droit de la commande publique, la DAJ des ministères
sociaux30, saisie par la mission, estime néanmoins qu?il existe un risque contentieux si les
accords-cadres signés par l?établissement de santé avec les fournisseurs de DMUU neufs ne
prévoient pas des exceptions au principe d?exclusivité.
2.2.2 Un dialogue devrait être engagé avec les fabricants de cathéters neufs, qui
pourrait déboucher le cas échéant sur un avenant aux accords-cadres
[26] Quel que soit le circuit retenu, un échange avec les fabricants de cathéters neufs, et le cas
échéant un avenant aux accords-cadres, seront nécessaires. En effet, les fabricants de DMUU
neufs, en l?espèce de cathéters d?électrophysiologie, lient souvent la vente de ces DMUU avec
d?autres prestations. Elles incluent la mise à disposition d?une console à laquelle est connecté le
cathéter et un service de conseil et de maintenance à travers la présence, durant les interventions,
d?un ingénieur travaillant pour le compte du fabricant31. Conformément aux règles
d?allotissement, ces prestations pourraient être distinguées de la fourniture de consommables. En
cas d?achat de DMUU retraités, il conviendra alors de s?assurer auprès du fournisseur de DMUU
30 Note du bureau de la commande et des interventions publiques de la DAJ des ministères sociaux datée
du 20 novembre 2023.
31 Dans son analyse, la DAJ rappelle que le pouvoir adjudicateur, lorsqu?il suit une procédure régulière, n?est
pas conduit à accepter une prestation qu?il n?a pas demandée et sur laquelle la concurrence n?a pas porté.
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neufs que (i) la console mise à disposition pourra être utilisée avec ces cathéters retraités (ii) la
prestation de conseil et de maintenance pourra être, soit dissociée dans un support contractuel
distinct, soit étendue à l?utilisation des cathéters retraités.
Recommandation n°4 Sous réserve de l?expertise juridique des accords-cadres entre chaque
établissement de santé et les fabricants de cathéters neufs, privilégier le retraitement en circuit
« ouvert » et dissocier les services fournis de l?achat des consommables.
2.3 Le processus logistique associé au retraitement ne pose pas de
difficultés particulières, avec un point d?attention néanmoins
concernant l?information des patients
2.3.1 Ce processus, qui devrait a priori représenter une surcharge de travail
limitée, doit reposer sur un protocole partagé de décontamination et
garantir la traçabilité des DMUU retraités
[27] Le retraitement des DMUU nécessite la mise en place d?un circuit logistique incluant a
minima les étapes suivantes :
? le nettoyage, selon le protocole convenu avec l?entreprise de retraitement et en conformité
avec les règles définies par la société française d?hygiène hospitalière, par le personnel
paramédical (infirmiers, ou aides-soignants a priori) du DMUU utilisé durant l?intervention
dès lors que le nombre maximal de cycles de retraitement n?est pas atteint32 ;
? le stockage, dans la salle d?intervention, ou à proximité, des DMUU destinés à être retraités
dans un container fourni par l?entreprise de retraitement dont la taille dépendra (i) du
volume hebdomadaire ou mensuel de DMUU utilisés (ii) de la fréquence convenue de
collecte par le prestataire de transport mandaté par l?entreprise de ces derniers ;
? la remise, à la date et heure convenues avec l?entreprise de retraitement, par le personnel
en charge de la logistique, des containers avec les DMUU utilisés33 ;
? une fois ces DMUU retraités (en circuit « fermé »), ou une fois les DMUU retraités
commandés en fonction de l?évolution du stock de DMUU restants (en circuit « ouvert »),
leur recueil par les services en charge de la logistique pour acheminement vers les salles
d?intervention ;
? lors de leur utilisation, l?inscription, dans le système d?information quand il existe, ou dans
un registre à défaut, de l?identifiant unique (UDI)34 du DMUU retraité et du numéro apposé
32 Cette information est lisible à travers le numéro de lot apposé sur le DM par l?entreprise de retraitement.
33 Le transport des DMUU ne sera pas sous la responsabilité des établissements de santé mais sous-traité par
l?entreprise de retraitement à un logisticien. Ainsi, la fréquence et l?optimisation des retraits ou livraisons de
DMUU dépendront des choix effectués par cette entreprise en lien avec chaque établissement de santé.
34 L?UDI est un code international numérique ou alphanumérique permettant d?identifier chaque DM tout au
long de son cycle de vie.
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par l?entreprise de retraitement reliés au numéro d?identification du patient sur qui ce
DMUU retraité a été utilisé.
[28] Concernant spécifiquement l?étape de nettoyage des DMUU35, elle devra être réalisée selon
des standards conformes au protocole de l?entreprise de retraitement, aux recommandations de
la société française d?hygiène hospitalière et au code de l?environnement. En effet, il36 prévoit qu?
« un déchet cesse d'être un déchet après avoir été traité et avoir subi une opération de valorisation,
notamment de recyclage ou de préparation en vue de la réutilisation (?) ». Comme l'a indiqué la
DAJ des ministères sociaux, conformément à la norme ISO 17664 :201737, le simple nettoyage à
l?eau d?un DMUU ne permettrait pas de faire sortir ce dernier de la catégorie de « déchet » au sens
du code de l?environnement. Or, pour que les DMUU retraités puissent circuler librement en UE,
ils ne doivent pas être considérés comme des déchets38. Il est donc nécessaire que la société
française d?hygiène hospitalière, qui ne s?est pas positionnée jusqu?ici sur le nettoyage des DMUU
avant retraitement, établisse un protocole tenant compte à la fois des standards d?hygiène
français39, des exigences de l?entreprise de retraitement et des dispositions du code de
l?environnement.
[29] Sur la base de ses échanges avec les représentants de trois CHU, la mission estime que la
surcharge de travail associée au retraitement des DMUU devrait être limitée mais nécessitera
d?être évaluée dans le cadre de l?expérimentation en prenant en compte le temps supplémentaire
d?intervention engendré :
? elle est concentrée sur le personnel paramédical qui, au lieu de jeter directement les DMUU
utilisés, devra les nettoyer pour un temps estimé par les représentants de la profession
rencontrés par la mission à moins de 10 mn par dispositif ;
? les acheteurs en Pharmacie à usage intérieur (PUI) seront mobilisés en amont de
l?expérimentation pour participer à la construction d?un éventuel marché groupé avec
l?entreprise de retraitement et renégocier si nécessaire les accords-cadres avec les
fournisseurs de DMUU neufs ;
? la surcharge de travail pour les acteurs responsables de la logistique (acheminement des
containers des salles d?intervention vers le lieu de retrait, et réciproquement pour la collecte
des DMUU retraités) est jugée marginale.
35 Ce nettoyage consiste à préparer les DMUU utilisés en intervention en vue de leur retraitement, ce qui
inclut la vérification de leur intégrité (ex : DMUU non visiblement endommagé).
36 Article L. 541-4-3.
37 La norme ISO 17664 :2017 intitulée « Traitement de produits de soins de santé ? Informations relatives au
traitement des dispositifs médicaux à fournir par le fabricant du dispositif » précise que le nettoyage consiste
« à éliminer, généralement à l?aide d?un agent nettoyant et d?eau, les souillures adhérentes (par exemple, sang,
substances protéiques et autres débris) des surfaces, fentes, cannelures, joints et lumières d?un dispositif
médical, par le biais d?un procédé manuel ou automatique qui prépare les produits à une manipulation en toute
sécurité et/ou à la poursuite du traitement ». Ce nettoyage intervient avant tout procédé de désinfection
et/ou de stérilisation postérieur.
38 L?article 33 du Règlement (CE) 1013/2006 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2006 exige une
procédure de notification et de consentement écrit préalable pour le transfert de déchets ménagers entre
États de l?UE.
39 Respect des précautions standards : les DM sont traités de la même manière quel que soit le patient sur
lequel ils ont été utilisés.
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Recommandation n°5 Assurer la conformité du contrat établi entre les établissements de
santé et l?entreprise de retraitement avec le protocole de décontamination établi par la société
française d?hygiène hospitalière
Recommandation n°6 Mettre en place un dispositif spécifique de traçabilité permettant le
suivi des DMUU retraités utilisés pour chaque patient
2.3.2 Le déploiement de l?expérimentation doit s?accompagner d?un effort
global de pédagogie avec un système d?« opt out » pour les patients
[30] L?obligation d?informer les patients du caractère retraité d?un DMUU est une quasi-
exception française qui peut s?expliquer par le cadre expérimental retenu. Pourtant, l?article 17
du règlement 2017/745 précise que les États membres « encouragent, et peuvent obliger, les
établissements de santé à fournir aux patients des informations sur les dispositifs médicaux retraités
en leur sein ». Parmi les pays européens qui autorisent le retraitement, seule l?Espagne prévoit
l?obligation d?en informer au préalable les patients. Les DMUU retraités ne présente pas de sur
risque sanitaire quantifié. À cet égard, l?obligation d?information prévue par la LFSS pour 2024 est
contradictoire avec les responsabilités incombant au fabricant dans le cadre du marquage CE, qui
sont identiques que le DMUU soit neuf ou retraité.
[31] Pour que cette obligation d?information soit compatible avec l?expérimentation, un
dispositif d?« opt out » devrait être prévu en lien avec les représentants des usagers. Une logique
d?« opt in » pourrait remettre en cause la mise en oeuvre de l?expérimentation. L?« opt out »
reposerait sur un document d?information commun aux quatre établissements de santé
participant à l?expérimentation. Les représentants des usagers pourraient dans le même temps
être sensibilisés aux enjeux de la transition écologique du système de santé. Ce document serait
systématiquement partagé avec les patients pour lesquels l?utilisation d?un DMUU retraité est
envisagée. Il stipulerait l?accord du patient à l?utilisation d?un tel DMUU tout en rappelant son
droit à s?y opposer. En cas d?opposition expresse du patient, elle serait tracée par les
professionnels de santé aux fins d?évaluation de l?expérimentation.
Recommandation n°7 Associer les représentants des usagers à l?élaboration d?un document
national d?information à partager avec les patients qui devront manifester expressément leur
opposition en cas de refus d?utilisation d?un DMUU retraité
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3 Le retraitement doit être mis en perspective avec les autres
leviers de réduction de l?empreinte écologique des produits
de santé qui exigent des moyens et une gouvernance à la
hauteur des enjeux
3.1 Des établissements de santé mobilisent de façon encore isolée et non
hiérarchisée plusieurs leviers de réduction de l?empreinte écologique
des DM
3.1.1 L?évaluation de l?expérimentation inscrite en LFSS 2024 devra en
particulier confirmer l?intérêt écologique relatif du retraitement des
DMUU
[32] Si des études suggèrent que le retraitement des cathéters d?électrophysiologie à usage
unique réduirait leur empreinte carbone de l?ordre de 50 à 60 % sur leur cycle de vie, elles doivent
être abordées avec prudence :
? elles s?appliquent à un DMUU donné (en l?espèce, des cathéters d?électrophysiologie) pour
un processus de retraitement donné ;
? leurs résultats sont sensibles à différents paramètres, en particulier le coût et l?empreinte
écologique du DMUU neuf, les ressources utilisées dans le cadre du retraitement et le
nombre maximal de cycles de retraitement applicables au DMUU ;
? elles peuvent présenter des biais méthodologiques, par exemple une sous-évaluation du
nombre maximal de cathéters pouvant être stérilisés simultanément, qui remettent en
cause la robustesse de leurs conclusions40 ;
? elles reposent quasi-uniquement sur des données fournies par les deux entreprises
intervenant sur ce marché oligopolistique (Vanguard en Allemagne et Stryker aux Etats-
Unis).
[33] L?intérêt écologique du retraitement des DMUU fera partie des axes d?évaluation de
l?expérimentation à confier à un prestataire maîtrisant l?analyse de cycle de vie (ACV). La mission
recommande de flécher sur l?évaluation de l?expérimentation une partie des financements prévus
40 À titre d?exemple, une étude publiée en février 2023 dans la revue « Sustainability » (Lalman, C. ;
Karunathilake, H. ; Ruparathna, R. ?To Dispose or to Reuse ? Analyzing the Life Cycle Impacts and Costs of
Disposal, Sterilization, and Reuse of Electrophysiological Catheters?.Sustainability 2023, 15, 5363.
https://doi.org/10.3390/su15065363) met en cause l?intérêt écologique du retraitement des cathéters
d?électrophysiologie ; or, selon plusieurs experts de l?ACV rencontrés par la mission, ses calculs seraient
faussés en particulier par une sous-évaluation du nombre maximal de cathéters pouvant être stérilisés
simultanément.
PUBLIÉ
https://doi.org/10.3390/su15065363
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pour accompagner l?expérimentation41. En effet, la méthodologie de l?ACV, qui suppose de
recueillir et de traiter un volume important de données, ne peut aujourd?hui être mise en oeuvre
de façon autonome par les établissements de santé, leur tutelle ou les services d?inspection. Le
prestataire en charge de l?évaluation pourrait être sélectionné en amont du lancement de
l?expérimentation. Il participerait à l?élaboration de son cahier des charges et serait associé à son
pilotage.
[34] L?évaluation de l?expérimentation, qui interviendra 18 mois après son lancement42, devra
répondre aux questions soulevées sur au moins trois plans :
? sur le plan écologique, peut-on objectiver sur leur cycle de vie la diminution de l?empreinte
écologique, et non uniquement des émissions carbone, des DMUU retraités par rapport aux
DMUU neufs ?
? sur le plan financier, est-il possible de quantifier les économies annuelles réalisées grâce au
retraitement en tenant compte du coût complet sur leur cycle de vie des DMUU neufs par
rapport à celui des DMUU retraités ?
? enfin, sur un plan humain, en lien avec le circuit logistique mis en place en établissement,
quel est l?impact de l?expérimentation sur la charge et l?organisation du travail des
professionnels concernés ?
[35] Par ailleurs, différents indicateurs de suivi pourraient être retenus dans le cadre du
dispositif de pilotage de l?expérimentation :
? nombre de déclarations de matériovigilance recensées des DMUU retraités rapportés au
nombre de déclarations relatives à ces mêmes DMUU neufs43 ;
? nombre d?événements indésirables associés aux soins mobilisant des DMUU retraités ;
? volume de DMUU retraités sur une période donnée rapporté au volume de DMUU neufs
achetés, à comparer au volume acheté avant retraitement ;
? nombre de DMUU envoyés pour retraitement par rapport au nombre de DMUU retraités
acquis sur une période donnée ;
41 L?étude d?impact de la LFSS pour 2024 prévoit un montant de 890 000¤ pour accompagner les quatre
structures sur les deux années de l?expérimentation tant en moyens humains qu?en ingénierie. Si le montage
du marché avec l?entreprise de retraitement pourrait nécessiter une expertise juridique externe, la mission
n?identifie pas de besoins de financement autres dans le cadre de l?expérimentation.
42 Calendrier prévu par l?article 66 de la LFSS pour 2024.
43 Les données de matériovigilance transmises par l?Ansm entre 2019 et le premier semestre 2023, montrent
pour les cathéters d?électrophysiologie / diagnostic / cartographie : 219 cas, pour les cathéters par
électroporation 13 cas, pour les cathéters de cryochirurgie (cathéters + accessoires) 89 cas, et pour les
cathéters de radiofréquence (cathéters + accessoires) 718 cas. Ces données intègrent tout type d?incident
(grave ou non) incluant des dysfonctionnements (ex : non fonctionnement, perte de signaux, problème de
déflection, fuite, rupture, piégeage, carbonisation?) et des effets indésirables (tamponnade/épanchement
péricardique/perforation cardiaque, trouble du rythme cardiaque, AVC, décès.).
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? nombre de patients ayant manifesté leur opposition à l?utilisation d?un DMUU retraité
rapporté au nombre de patients pour lesquels un DMUU retraité a été utilisé sur une période
donnée ;
? taux de satisfaction de différentes catégories de professionnels de santé (pharmaciens,
paramédicaux, médecins) à l?égard du circuit logistique mis en place et, s?agissant des
soignants, de la fonctionnalité des DMUU retraités.
Recommandation n°8 Allouer une partie des financements prévus à l?article 66 de la LFSS
pour 2024 à l?évaluation de l?expérimentation par un prestataire maîtrisant la méthodologie de
l?analyse de cycle de vie
3.1.2 Le ministère de la santé doit prioriser la mise en oeuvre d?autres leviers de
réduction de l?empreinte écologique des DM, et accompagner le cas
échéant leur passage à l?échelle
[36] Si la feuille de route « transition écologique du système de santé » cite d?autres leviers de
décarbonation des DM, elle ne les hiérarchise pas et accorde une visibilité contestable sur le plan
écologique au retraitement (cf. annexe n° IV). Or, comme l?illustre le schéma ci-dessous, il existe
une gradation de l?intérêt écologique de ces leviers. Ainsi, le retraitement (ou « remanufacturing »
en anglais) des DM a un intérêt écologique supérieur à leur recyclage, mais inférieur à leur
réutilisation (« reuse »). À cet égard, il est regrettable que la feuille de route ne mentionne pas la
nécessité de développer les DM à usage multiple, ou encore celle de travailler avec les filières
REP44 pour mieux valoriser les DM en fin de vie. La mise en exergue du retraitement ne doit pas
engendrer un effet d?éviction par rapport à des leviers plus impactants sur le plan écologique.
[37] Les leviers qui ont le plus d?intérêt sur le plan écologique sont ceux qui agissent directement
sur les fabricants le plus en amont de la chaîne d?approvisionnement45, mais ce ne sont pas
aujourd?hui les mieux utilisés :
? si près de 10 % des marchés hospitaliers contenaient en 2022 une clause environnementale
(pour un objectif de 100 % des nouveaux marchés en 2025)46, ces dispositions restent, selon
les acheteurs rencontrés par la mission, d?une portée limitée en raison notamment du
défaut de transparence des fabricants sur l?empreinte carbone de leurs produits ;
44 Les filières à responsabilité élargie des producteurs (REP) sont des dispositifs particuliers d?organisation de
la prévention et de la gestion de déchets qui concernent certains types de produits. Ces dispositifs reposent
sur le principe de responsabilité élargie du producteur, selon lequel les producteurs, c?est-à-dire les
personnes responsables de la mise sur le marché de certains produits, peuvent être rendus responsables de
financer ou d?organiser la prévention et la gestion des déchets issus de ces produits en fin de vie.
45 Le recyclage des DM, qui concerne par exemple les métaux précieux contenus dans les cathéters
d?électrophysiologie, s?il a un impact plus marginal sur l?empreinte écologique du produit, reste globalement
peu organisé et à l?initiative des établissements de santé.
46 La loi n°2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la
résilience face à ses effets a introduit au niveau légal l?obligation de clauses environnementales dans les
marchés publics et prévu la création d?outils d?analyses du coût du cycle de vie à destination des pouvoirs
adjudicateurs au plus tard le 1er janvier 2025
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? les fabricants au sein de l?UE sont libres de qualifier leur DM comme étant à usage unique,
sans devoir le justifier, ce qui a autorisé depuis une trentaine d?années une substitution
massive des DM qui étaient à usage multiple par des DM à usage unique, sans qu?il existe
aucun recensement de la part respective de chacune de ces catégories de DM ;
[38] Certains établissements de santé, particulièrement engagés dans la transition écologique,
mobilisent certains leviers de façon relativement isolée, ce qui ne favorise pas l?essaimage des
leviers les plus pertinents :
? les établissements identifiés par la mission présentaient pour points communs (i) la présence
de professionnels de santé mobilisés à titre personnel sur cette question47 (ii) la capacité à
mobiliser des moyens (appels à projet DITP, fonds issus de l?Association nationale pour la
formation permanente du personnel hospitalier) pour financer les expertises (en particulier,
les analyses de cycle de vie de produits) réalisées par des prestataires spécialisés (iii) une
volonté partagée des professionnels des fonctions supports et du soin de participer à un
projet commun de décarbonation, le cas échéant dans le cadre de l?obtention d?un label
environnemental48 ;
? dans le même temps, les directions générales de ces établissements ont indiqué à la mission
n?avoir jamais évoqué l?objectif de réduction de leur empreinte écologique avec leur tutelle
en ARS, les Contrats pluriannuels d?objectifs et de moyens (CPOM) conclus avec ces
dernières ne contenant aucun indicateur sur cet enjeu.
47 Il s?agit souvent d?acteurs engagés dans des collectifs nationaux regroupant des professionnels issus de
différentes disciplines, comme le Collectif EcoResponsabilité en Santé (Ceres) ou le Comité pour le
développement durable en santé (C2DS). Ces professionnels partagent la conviction que le système de santé
a une responsabilité particulière en matière de transition écologique en raison (i) du principe hippocratique
« primum non nocere » qui doit susciter selon eux une réflexion sur le rapport entre l?impact environnemental
de l?acte de soins rapporté à son bénéfice pour les patients (ii) de l?afflux prévisible à l?hôpital dans les
prochaines années de patients dont les pathologies seront directement liées au réchauffement climatique.
Selon l?Organisation mondiale de la santé (OMS), entre 2030 et 2050, le changement climatique pourrait
entraîner au niveau mondial près de 250?000 décès supplémentaires par an, dus uniquement à la dénutrition,
au paludisme, à la diarrhée et au stress lié à la chaleur.
48 À titre d?exemple, l?obtention par la maternité de Clermont-Ferrand du label TQSE (Très haute qualité
sociale et environnementale) s?est accompagnée d?un travail de réduction du recours aux DM à usage unique
durant l?accouchement.
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Schéma 1 : Leviers de réduction de l?empreinte écologique des DM classés en
fonction de leur impact49
Source : Amanda Andersen, « A case study of the environmental and economic sustainability of
using remanufactured ultrasound catheters?, université d?Aalborg (Danemark), juin 2022. L?intérêt
écologique du ?remanufacturing? (retraitement) des DMUU est supérieur à celui du recyclage mais
inférieur à celui de l?usage multiple (« reuse »).
Tableau 7 : Évolution de la part des achats hospitaliers incluant une clause
environnementale entre 2020 et 2022
2020 2021 2022
Nombre de marchés 264 6 707 6 098
en % du total 4,2 5,6 9,3
Montant (en Md¤) 0,2 0,5 2,1
en % du total 1,7 2,9 13,5
Source : Observatoire économique de la commande publique.
49 Reuse : réutilisation ; remanufacturing : retraitement ; energy recovery : récupération d?énergie.
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Les achats hospitaliers : un levier central de la stratégie « Greener NHS » en Grande-Bretagne
Le National health system (NHS) a adopté dès 2008 une stratégie de décarbonation dite
« Greener NHS ». Actualisée en octobre 2020, elle repose sur un double objectif : la neutralité
carbone à horizon 2040 pour les émissions directes du NHS et à horizon 2050 pour les émissions
indirectes. Pour atteindre l?objectif de réduction des émissions indirectes qui, comme en
France, sont liées pour deux tiers aux achats de produits de santé, un plan spécifique a été
élaboré concernant les achats hospitaliers. Ce plan, qui s?appuie sur un outillage et un
accompagnement spécifique à destination des fournisseurs, repose sur des jalons successifs :
-depuis avril 2023, pour tous les achats d?une valeur supérieure à 5M de £50, les fournisseurs
doivent obligatoirement communiquer un plan de réduction de leurs émissions directes de
carbone ;
-cette obligation sera étendue à l?ensemble des achats, quel que soit leur montant, dès avril
2024 ;
-enfin, à partir d?avril 2027, le plan de décarbonation communiqué par les fournisseurs devra
inclure leurs émissions indirectes.
Les fournisseurs sont accompagnés dans la mise en oeuvre de cette stratégie de décarbonation
via des outils51 leur permettant d?apprécier leur « maturité » par rapport aux attentes du NHS.
Il est demandé aux entreprises qui revendiquent un niveau de maturité est jugé élevé de faire
certifier leur stratégie de décarbonation par une association indépendante selon des standards
internationaux52.
50 5,7 M¤ au 24 novembre 2023.
51 Voir « Evergreen Sustainable Supplier Assessment ».
52 Science Based Targets Initiatives. Lancée en juin 2015, l?initiative Science Based Targets (SBTi ou iSBT en
français) est un projet conjoint du Carbon Disclosure Project (CDP), du Global Compact des Nations Unies,
du World Ressource Institute (WRI) et du World Wildlife Fund (WWF). C?est un organisme de notation qui
offre un label et une reconnaissance aux entreprises qui définissent un plan avec des objectifs fondés sur des
critères scientifiques clairs et transparents pour réduire leur empreinte carbone.
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Deux exemples d?initiatives portées par des CHU pour réduire l?empreinte écologique des DM
Le CHU de Clermont-Ferrand, sur la base des travaux menés par une interne en pharmacie53, a
démontré que la substitution d?une partie des DMUU utilisés lors de l?accouchement par voie
basse par des DMUM permettait en particulier de diviser par trois leur empreinte carbone. Il
s?est engagé en 2022 dans une évolution de la composition des différents « packs »
(épisiotomie, suture, sur-mesure) constitués par les pharmaciens pour les soignants. Un travail
comparable a été réalisé sur le set fourni aux gynécologues au bloc opératoire.
Le CHU de Nîmes, dans le cadre d?un projet engagé en 2021 de réduction des déchets issus du
bloc opératoire (« Durabloc »), a mené des travaux sur l?ACV comparée des lames de
laryngoscopes à usage unique (LUU) et à usage multiple (LUM)54 soulignant un intérêt écologique
de ces dernières proportionnel au nombre de lames utilisées et pouvant représenter 26 tonnes
de CO2 par an (soit l?équivalent de 120 000 km en voiture). La substitution des LUU par des LUM
a été engagée en 2022.
Recommandation n°9 Sur la base d?une expertise de l?intérêt écologique des différentes
actions engagées par les établissements de santé, assurer un passage à l?échelle des leviers les plus
pertinents de réduction de l?empreinte écologique des DM
3.2 Seuls une gouvernance et des moyens à la hauteur des enjeux
crédibiliseront les engagements du ministère de la santé en matière de
transition écologique
3.2.1 Le besoin d?accompagnement des établissements de santé justifie des
moyens humains et financiers dans le cadre d?une gouvernance qui reste
à définir
[39] La crédibilité de la stratégie française de réduction de l?empreinte écologique des DM, et
globalement du système de santé, est mise en cause par la faiblesse des moyens et de la
gouvernance associés. Si ce sujet reste à instruire, la mission estime que les modalités actuelles de
pilotage de la feuille de route « transition écologique » du ministère de la santé engendrent un
risque de « greenwashing » (ou éco-blanchiment). À titre d?exemple, selon une représentante du
programme « Greener NHS » rencontrée par la mission, environ 80 personnes travaillent au
service de la transition écologique du système de santé en Grande-Bretagne, dont une trentaine
uniquement sur les marchés hospitaliers durables. En France, le pilotage de la stratégie de
transition écologique en santé repose essentiellement sur un conseiller au cabinet de la ministre
déléguée en charge de l?Organisation territoriale et des Professions de santé :
53 Steffi Calland, « Les dispositifs médicaux de l?accouchement par voie basse : usage unique ou réutilisable ? »,
Sciences pharmaceutiques, 2022.
54 Nathalie Rouvière et. Alii., « Reusable laryngoscope blades: a more eco-responsible and cost-effective
Alternative », Elsevier, 2023.
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? alors que la plupart des leviers concernent au moins deux directions du ministère, seule une
personne, positionnée au cabinet de la DGOS, consacré la moitié de son temps de travail à
la feuille de route ;
? l?Anap a indiqué à la mission mobiliser 5 ETP au sujet du développement durable, qui
assurent en particulier un rôle de suivi global des actions et de pilotage en propre de
plusieurs chantiers ;
? un haut-fonctionnaire en charge du développement durable (et de l?égalité entre les
femmes et les hommes) est responsable au secrétariat général des ministères sociaux du
seul volet interne de la transition écologique (services publics écoresponsables en
55particulier) et participe à la comitologie de la feuille de route :
? la Caisse nationale d?assurance maladie a créé en novembre 2023 une Mission nationale
pour la Transition écologique du système de santé et la santé environnementale, centrée
sur la décarbonation des médicaments, et composée d?un ETP56 ;
? enfin, selon l?Anap, si une minorité des ARS, comme l?Île-de-France, ont identifié des
personnes en charge de la transition écologique, le rôle des ARS, dont deux participent au
comité de pilotage de la feuille de route, reste dans ce domaine très limité.
[40] Le manque d??accompagnement des établissements de santé ne favorise ni la
hiérarchisation des leviers permettant de réduire l?empreinte écologique des DM, ni un passage à
l?échelle des leviers les plus pertinents. La DGOS et l?Anap ont certes engagé récemment un
chantier de partage de bonnes pratiques en matière de transition écologique sur la base des
remontées effectuées par les établissements de santé mais (i) cette mise en visibilité ne s?appuie
pas suffisamment sur une appréciation préalable de la pertinence ou de l?impact des pratiques (ii)
ces bonnes pratiques ne font l?objet à ce stade d?aucun regroupement par nature de levier et ne
s?accompagnent pas d?un guide opérationnel favorisant leur transposabilité. Selon les
témoignages de professionnels de santé recueillis par la mission, l?essaimage des bonnes pratiques
en matière de transition écologique a surtout reposé jusqu?ici sur les démarches menées par les
fédérations hospitalières (FHF en particulier), sur les liens de connaissance entre professionnels et
sur le recours commun à des prestataires.
55 Dans le prolongement de la démarche services publics éco-responsables, une circulaire de la Première
ministre du 21 novembre 2023 liste 15 engagements pour la transformation écologique de l?État. Ces
engagements concernent aussi les établissements publics de l?État et opérateurs publics sous tutelle.
56 Dans son rapport « charges et produits » pour 2024, la Cnam propose en particulier d?aller vers une prise
en compte de l?empreinte carbone des produits de santé dans leur tarification en lien avec le Comité
économique des produits de santé (CEPS). Un deuxième ETP au sein de cette mission se consacré au volet
interne de la transition écologique au sein du réseau de la Cnam.
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3.2.2 Au regard de l?expertise nécessaire pour hiérarchiser les leviers de
réduction de l?empreinte écologique, cette gouvernance doit avoir une
dimension interministérielle plus affirmée
[41] Si la feuille de route « planification écologique du système de santé » s?inscrit dans une
logique interministérielle, l?apport d?expertise de la part des administrations en charge de la
transition écologique reste limité :
? selon les interlocuteurs rencontrés par la mission, l?Ademe, quoique sollicitée à plusieurs
reprises, n?a pas pris part à la « task force » interministérielle mise en place dans le cadre de
la feuille de route, ni participé au premier comité de pilotage, présidée par la ministre de
l?organisation des territoires et des professionnels de santé, qui s?est tenu le22 mai 2023 ;
? le Commissariat général au développement durable (CGDD) ainsi que le Secrétariat général
à la planification écologique (SGPE) participent aux travaux mais, en vertu d?un principe de
subsidiarité, leurs représentants ont indiqué à la mission ne pas s?être positionnés sur la
pertinence des leviers choisis : en revanche, dans le cadre du « temps II » de la planification
écologique qui s?ouvre en 2024, le SGPE souhaite investir davantage certaines filières, dont
la santé ;
? un projet de convention interministérielle, incluant en particulier le SGPE et le CGDD
(l?Ademe étant citée comme un partenaire à associer), ainsi que les principaux opérateurs
du champ de la santé et les fédérations hospitalières est en cours de finalisation pour
décliner la feuille de route de mai 2023 : il s?agit en réalité de la troisième convention avec
un objet similaire, la dernière s?étant achevée en 2018 sans qu?un bilan des actions prévues,
et notamment de la participation des signataires relevant de la transition écologique, ait été
réalisé.
[42] Or, concernant en particulier les produits de santé, une telle expertise est indispensable
pour :
? réaliser au niveau national des analyses de cycle de vie sur des produits utilisés par plusieurs
établissements de santé, ou à tout le moins diffuser des critères d?appréciation de la
robustesse des études existantes ;
? partager des éléments de parangonnage sur les leviers de décarbonation utilisés dans
d?autres secteurs et la façon de surmonter les freins rencontrés (par exemple, le défaut de
transparence des fournisseurs) ;
? hiérarchiser les leviers en fonction notamment de (i) leur degré de faisabilité (ii) leur impact
sur les émissions carbone (iii) leur impact sur la consommation des ressources abiotiques (iv)
leur cohérence avec les autres leviers prévus dans le cadre de « France 2030 ».
[43] La Direction générale des entreprises (DGE) a engagé des travaux fondés sur un double
objectif de relocalisation des industries de santé et de décarbonation, qui doivent encore être
élargis aux DM. Elle se fonde sur le contrat stratégique de filière « industries et technologies de
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santé » élaboré en 2019 dans le cadre du conseil national de l?industrie57. Par ailleurs, le plan
« innovation santé 2030 » lancé en 2021 fixe un objectif de soutien à l?industrialisation des
produits de santé sur le territoire français. La DGE a indiqué à la mission prioriser les médicaments
dont le circuit de fabrication et la structure plus homogène des fabricants sont jugés plus
compatibles avec un objectif de relocalisation. Ainsi, une feuille de route « décarbonation des
industries et technologies de santé », ciblée sur les médicaments, a été élaborée en lien avec la
Fédération française des industries de santé (Fefis). Un appel d?offres visant à construire une
méthodologie de l?empreinte carbone des médicaments a été publié par la DGE, en lien avec la
DGS, en octobre dernier. Le calendrier d?extension de cette démarche aux DM reste à préciser.
Recommandation n°10 Faire reposer la « task force » sur la transition écologique en santé sur
des moyens pérennes dont le calibrage et la gouvernance, à dimension interministérielle, doivent
faire l?objet de travaux spécifiques
Recommandation n°11 Élargir aux DM les travaux engagés par la Direction générale des
entreprises, en lien avec l?objectif de relocalisation des industries de santé, pour calculer et
diminuer l?impact carbone des médicaments
57 Créé en 2010, le conseil national de l?industrie est une instance visant à éclairer et conseiller les pouvoirs
publics sur les enjeux de l?industrie en France. Il regroupe 19 Comités stratégiques de filière (CSF). Chaque
CSF est doté d?une gouvernance représentative de la filière portant des projets collectifs structurants qui
engagent de manière réciproque l?État et les acteurs privés. Si le contrat de la filière « industries et
technologies de santé » ne faisait pas initialement référence à l?enjeu de décarbonation des produits de
santé, ni à la souveraineté sanitaire, un tournant a été pris à la suite de la crise Covid de 2020. Une direction
de projet « relocalisation des industries de santé » a été créée à la DGE.
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LISTE DES ANNEXES
Annexe n°I : identification d?une filière industrielle de retraitement et périmètre des DMUU
éligibles
Annexe n°II : modalités d?expérimentation du retraitement des DMUU dans quatre
établissements de santé
Annexe n°III : éléments de parangonnage sur le retraitement des DMUU en Europe
Annexe n°IV : leviers de réduction de l?empreinte écologique des dispositifs médicaux
Annexe n°V : résultats du questionnaire adressé par la mission aux établissements de santé
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ANNEXE 1 : Identification d?une filière
industrielle de retraitement et périmètre
des DMUU éligibles
1 LE CADRE EXPERIMENTAL RETENU EN LFSS POUR 2024 NE FAVORISE PAS L?EMERGENCE
D?UNE FILIERE INDUSTRIELLE FRANÇAISE DE RETRAITEMENT ............................................... 40
1.1 L?INTERDICTION, REAFFIRMEE EN 2022, DE RETRAITER LES DMUU EN FRANCE EST LE PRINCIPAL
FACTEUR D?EXPLICATION DE L?ABSENCE DE FILIERE INDUSTRIELLE SUR LE TERRITOIRE NATIONAL ......... 40
1.2 LES INVESTISSEMENTS NECESSAIRES A LA CONSTITUTION D?UNE TELLE FILIERE RENDENT
INENVISAGEABLE SON EMERGENCE DANS UN DELAI DE DEUX ANS, A FORTIORI DANS UN CADRE
EXPERIMENTAL .................................................................................................................................... 42
2 VANGUARD, LOCALISEE EN ALLEMAGNE, EST LA SEULE ENTREPRISE SUSCEPTIBLE DE
RETRAITER DES DMUU DANS LE CADRE DE L?EXPERIMENTATION ........................................ 44
2.1 PARMI LES TROIS ENTREPRISES ALLEMANDES DE RETRAITEMENT, SEULE VANGUARD POSSEDE DES
REFERENCES MARQUEES CE COMMERCIALISEES A L?ETRANGER ............................................................ 44
2.2 LA MISSION A OBSERVE SUR SITE LE PROCESSUS MIS EN OEUVRE QUI CONSISTE A « RE-FABRIQUER » UN
DM STRICTEMENT EQUIVALENT AU DM NEUF ..................................................................................... 45
3 LE PERIMETRE DE L?EXPERIMENTATION DEVRAIT ETRE LIMITE A LA SOIXANTAINE DE
REFERENCES DE CATHETERS D?ELECTROPHYSIOLOGIE MARQUEES CE ET RETRAITEES PAR
VANGUARD ............................................................................................................................................ 49
3.1 EN THEORIE, SUR LE PLAN SANITAIRE, LE FUTUR DCE POURRAIT PREVOIR DES CRITERES D?EXCLUSION
FONDES SUR LE REGLEMENT EUROPEEN DE 2017 ................................................................................. 49
3.2 EN PRATIQUE, SUR LES 600 REFERENCES RETRAITEES PAR VANGUARD, SEULES 250 SONT MARQUEES
CE, DONT 74 SONT DES CATHETERS D?ELECTROPHYSIOLOGIE UTILISES PAR LES HOPITAUX FRANÇAIS 50
4 LE RETRAITEMENT ENGENDRERA DANS LES ETABLISSEMENTS DE SANTE DES ECONOMIES
PAR RAPPORT AU COUT ANNUEL DES CATHETERS NEUFS CIRCUIT COMPRISES ENTRE 35
ET 59 % D?ECONOMIE SELON LE CIRCUIT CHOISI ....................................................................... 53
4.1 EN CIRCUIT OUVERT, POUR 25 UTILISATIONS, LE RETRAITEMENT DIMINUE D?ENVIRON 60 % LE COUT
ANNUEL DES CATHETERS ..................................................................................................................... 53
4.2 EN CIRCUIT FERME, LES ECONOMIES OBTENUES GRACE AU RETRAITEMENT SONT PLUS DIFFICILES A
CALCULER ET MOINDRES QU?EN CIRCUIT « OUVERT » .......................................................................... 54
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1 Le cadre expérimental retenu en LFSS pour 2024 ne favorise
pas l?émergence d?une filière industrielle française de
retraitement
1.1 L?interdiction, réaffirmée en 2022, de retraiter les DMUU en France est
le principal facteur d?explication de l?absence de filière industrielle sur
le territoire national
[44] Dans un contexte de développement des Dispositifs médicaux à usage unique (DMUU), la
France a interdit dès les années 80 par voie de circulaires leur retraitement. Une première
circulaire en date du 14 avril 1986 rappelle l?interdiction de restériliser du matériel médico-
chirurgical non réutilisable compte tenu des risques inhérents à cette pratique. Cette interdiction
est une nouvelle fois rappelée dans la circulaire du 29 décembre 1994. Cette instruction précise
que des études ont confirmé l?existence de risques liés à la réutilisation de DMUU. Ces risques sont
liés, d?une part, aux dispositifs eux-mêmes (structure semi-cristalline des polymères, multiplicité
des matériaux constitutifs des DM) et, d?autre part, à l?utilisation clinique qui expose le matériel à
une contamination très importante et difficilement réversible au niveau des matériaux
synthétiques. Enfin, cette instruction précise un troisième risque lié au recyclage avec présence
de traces de produits décontaminants et/ou nettoyant pouvant entrainer la formation de
produits de toxiques au cours de la stérilisation. Malgré ces rappels, la re-stérilisation de DMUU
était encore pratiquée. Une clinique localisée à Nîmes avait été poursuivie pour tromperie des
consommateurs sur les qualités des prestations de soins, car elle procédait à la re stérilisation par
l?oxyde d?éthylène de sonde d?électrophysiologie à usage unique.
[45] Alors que l?article 17 du Règlement européen 2017/74558 fournit un cadre pour autoriser le
retraitement des DMUU au niveau national, la France a réaffirmé en 2022 au niveau législatif cette
interdiction. Ce Règlement européen relatif aux dispositifs médicaux (dit RMD) définit le
retraitement, qui doit être autorisé au préalable par la législation nationale, comme « le procédé
dont fait l?objet un dispositif usagé pour en permettre une réutilisation sûre, y compris le nettoyage,
la désinfection, la stérilisation et les procédures connexes (?) le rétablissement de ses
caractéristiques techniques et fonctionnelles en matière de sécurité ». Le RMD prévoit que le
retraitement peut être réalisé par un établissement de santé, ou par une entreprise externe. La
personne physique ou morale qui assure le retraitement d?un DMUU est considérée comme son
fabricant et doit s?acquitter des obligations qui lui incombent à ce titre, dont l?obtention d?un
marquage CE59. Toutefois, le RMD prévoit également la possibilité, pour les seuls DMUU retraités
et utilisés par les établissements de santé, ou retraités par une entreprise externe à la demande
d?un établissement de santé, de ne pas appliquer l?ensemble des règles relatives aux obligations
des fabricants sous réserve que certaines garanties soient respectées (cf. tableau 1). Le respect de
58 Article 17 du Règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 relatif aux
dispositifs médicaux.
59 Le marquage CE fixe les ?exigences essentielles? de santé et de sécurité auxquelles doivent se conformer
les fabricants pour garantir la sécurité et la fiabilité de leurs dispositifs mis sur le marché européen. Le
marquage CE apposé par le fabricant est le garant de cette conformité.
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ces spécifications sanitaires doit faire l?objet d?un audit externe indépendant annuel aux fins de
certification de l?entreprise ou établissement de retraitement par un organisme notifié. Elles sont
définies par le Règlement d?exécution du 19 août 202060 qui s?applique depuis le 26 mai 2021. C?est
sans doute l?entrée en vigueur de ce texte, qui rend accessible le retraitement en dehors du cadre
du marquage CE, qui a incité le Gouvernement français a rappelé en avril 2022, cette fois au niveau
législatif, l?interdiction de retraiter les DMUU ou de commercialiser et utiliser des DMUU retraités
en France61 .
Tableau 8 : Trois options de retraitement prévues par le Règlement 2017/745
Options Où est effectué le
retraitement ?
Qui valide ? Où sont utilisés les
DMUU ?
1 Etablissement de santé Un organisme notifié
certifie la conformité des
procédés de retraitement
aux spécifications
communes
Les DMUU restent la
propriété de
l?établissement de santé
qui les utilise
2 Entreprise externe (à la
demande d?un
établissement de santé)
Un organisme notifié
certifie la conformité des
procédés de retraitement
aux spécifications
communes
Les DMUU restent la
propriété de
l?établissement de santé
qui les utilise
3 Entreprise externe qui a le
statut de fabricant
Les DM retraités sont
conformes aux exigences
essentielles (marquage CE)
du règlement DM, la
conformité est certifiée
par un organisme notifié
Les DMUU sont vendus à
une entreprise externe qui
les retraitent et les vend
ensuite comme nouveau
DM à n?importe quel
établissement de santé
Source : Mission.
60 Règlement d?exécution (UE) 2020/1207 de la Commission du 19 août 2020 portant modalités d?application
du règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les spécifications
communes pour le retraitement des dispositifs à usage unique. Ce texte précise le mode de
contractualisation avec une entreprise externe, les règles en matière de personnels, locaux et équipements,
la validation du procédé de retraitement, la détermination du nombre maximal de cycles, la description de
la documentation technique, l?établissement de procédures des différentes étapes du cycle de retraitement,
la mise en place d?un système de gestion de la qualité ainsi que l?organisation de la traçabilité. La conformité
avec les spécifications communes doit être certifiée par un organisme notifié. À la date de rédaction du
rapport, aucun organisme notifié ne vérifie le respect des spécifications communes.
61 L?article 10 de l?ordonnance n°2022-582 du 20 avril 2022, codifié à l?article L. 5211-3-2 du code de la santé
publique, dispose que « le retraitement de dispositifs à usage unique mentionné à l?article 17 du règlement (UE)
2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017, leur mise sur le marché et leur utilisation sont
interdits ».
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1.2 Les investissements nécessaires à la constitution d?une telle filière
rendent inenvisageable son émergence dans un délai de deux ans, a
fortiori dans un cadre expérimental
[46] Au regard des investissements nécessaires et du délai pour se conformer au cadre juridique
européen, il est improbable qu?une filière industrielle se constitue en France sous deux ans :
? sur le plan opérationnel, il est nécessaire de de mettre en place un processus qui ne
s?assimile pas seulement à une opération de stérilisation mais bien à une opération de « re-
fabrication » ou « remanufacturing » en anglais (cf. infra). Ce processus implique la création
d?une chaîne d?activités dans des locaux adaptés (comprenant des capacités de
stérilisation) et la formation des personnels intervenant aux différentes étapes62 ; DMUU
? sur le plan juridique, une entreprise qui souhaiterait engager une activité de retraitement
en France devrait au préalable obtenir auprès d?un organisme notifié (ON)63, soit un
marquage CE, soit une certification du respect des spécifications communes, ce qui
représente des démarches exigeantes (incluant en particulier la constitution d?une
documentation technique présentant les preuves permettant de démontrer la qualité et la
sécurité du dispositif dans le cas du marquage CE, cf. schéma 1) dont le délai
d?aboutissement est aujourd?hui estimé par les représentants du secteur des DM à environ
deux ans64.
62 Outre la nécessité de disposer de personnels ayant pour certains des qualifications rares, l?industriel devra
investir notamment dans des unités capables d?inspecter, d?assurer la maintenance et la réparation des DM
et de mettre en place des essais de fonctionnalités des DM. La méthode de stérilisation peut, elle aussi,
obliger l?industriel à mettre en place des infrastructures spécifiques particulièrement onéreuses en
investissement et en maintenance. C?est le cas si la stérilisation est réalisée par l?oxyde d?éthylène, substance
classée carcinogène de catégorie 1B et mutagène 1B. Elle doit alors se dérouler dans des chambres étanches
et être suivie d?une phase de dégazage pour éliminer les résidus de gaz toxiques. Cette stérilisation est très
largement utilisée pour les DMUU car elle s?effectue à des niveaux de températures compatibles avec les
matériaux composants le DM. Même s?il existe en France des entreprises qui stérilisent de façon industrielle
les DM, elles ne sont pas équipées pour assurer toutes étapes décrites supra et ne sont pas engagées dans
l?obtention d?un marquage CE.
63 En fonction de la classe de risque du dispositif, un organisme habilité indépendant (dit ?notifié?) intervient
dans le processus de marquage CE. Celui-ci évalue la conformité du dispositif et le système qualité du
fabricant et délivre, en cas d?évaluation satisfaisante, un certificat de conformité permettant au fabricant
d?apposer le marquage CE sur son dispositif. Le marquage CE a une durée de validité limitée. La pertinence
de la documentation technique et l?organisation du fabricant doivent faire l?objet de nouvelles évaluations
périodiques par l?organisme notifié.
64 Ce délai s?explique en partie par le fait que tous les fabricants de DM sont en cours de demande de « re-
marquage CE » par un ON pour continuer de commercialiser les DM en Europe. Les industriels devront avoir
fait une demande formelle avant fin mai 2024 et signé un contrat avec un ON avant fin septembre 2024.
Alors qu?en 2012, 87 ON exerçaient en Europe, à fin décembre 2022, 36 ON avaient été certifiés dont un
seulement en France.
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Schéma 2 : Étapes clés du processus de marquage CE
Source : Snitem.
[47] Par ailleurs, le cadre expérimental retenu en France, inédit en Europe, n?est pas propice à
l?émergence, pourtant souhaitable, d?une filière localisée sur le territoire national. Sur les neuf
États membres de l?UE ayant autorisé le retraitement des DMUU, aucun n?a prévu au préalable
une phase d?expérimentation. Selon l?ensemble des acteurs rencontrés par la mission, en
particulier la Direction générale des entreprises, il n?est pas plausible qu?un acteur engage les
investissements nécessaires pour entrer sur un tel marché sans assurance sur sa pérennité. Or,
l?article 29 de la LFSS 2024, qui crée la possibilité d?expérimenter le retraitement des DM, au plus
tard en novembre 2024 et pour une période de deux ans, renvoie à un rapport d?évaluation de
l?expérimentation « afin notamment de déterminer l?opportunité et, le cas échéant, les conditions
de sa pérennisation et de son extension ». En d?autres termes, aucun industriel ne peut aujourd?hui
tabler sur une généralisation du retraitement des DMUU en France, ni apprécier le périmètre du
marché auquel il pourrait accéder.
[48] Ce constat a été confirmé à la mission lors de l?entretien avec la société Johnson & Johnson
qui réalise le retraitement de DMUU aux Etats-Unis et au Canada (société Sterilmed). Cette
société est également implantée en France, mais ne dispose pas des infrastructures pour réaliser
des opérations de retraitement. Cependant, la possibilité de retraitement inscrite dans le cadre
du règlement européen, a permis d?ouvrir une réflexion de la part de J&J pour s?implanter en
Europe. Une usine pilote située aux Pays-Bas est en réflexion pour 2024.
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2 Vanguard, localisée en Allemagne, est la seule entreprise
susceptible de retraiter des DMUU dans le cadre de
l?expérimentation
2.1 Parmi les trois entreprises allemandes de retraitement, seule Vanguard
possède des références marquées CE commercialisées à l?étranger
[49] En l?absence d?une filière française de retraitement, il est nécessaire de se tourner vers les
entreprises localisées en UE, en l?espèce en Allemagne, qui assurent aujourd?hui une telle activité,
dont seule une, Vanguard, dispose de références marquées CE qu?elle exporte. Le tableau ci-
dessous synthétise les principales informations recueillies par la mission au sujet de ces trois
entreprises, sachant que des contacts n?ont pu être établis qu?avec Vanguard. Il en ressort que
Vanguard est à la fois l?entreprise la plus importante (en nombre de sites, puisqu?elle en possède
trois en Allemagne, et d?employés) mais surtout la seule, a priori, qui dispose de références de
DMUU retraités avec le marquage CE. Selon les représentants de Vanguard, avec lesquels la
mission a échangé le 14 novembre dernier dans le cadre d?une visite du site de retraitement
localisé à Berlin, les deux autres entreprises ne commercialiseraient leurs DMUU retraités
qu?auprès d?établissements de santé allemand car elles s?inscrivent dans le seul cadre des
spécifications communes, et non du marquage CE. À l?inverse, les représentants de Vanguard ont
communiqué à la mission un catalogue de DMUU retraités incluant des références marquées CE
(cf. infra) que l?entreprise exporterait en particulier au Royaume-Uni et en Israël.
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Tableau 9 : Comparatifs des trois entreprises allemandes de retraitement identifiées
par la mission
Vanguard Meditreat Vecomed
Date de création 1998 2009 NC
Sites Berlin
Aschersleben
Friedeburg
Gelnhausen Schönebeck
Nombre d?employés 200 Moins de 50 Moins de 50
Retraitement des DMUU avec
marquage CE
Oui Non NC
Retraitement des DMUU
conformément aux
spécifications communes
Oui Oui NC
Type de DMUU retraités Electrophysiologie et
chirurgie
Electrophysiologie et
sondes oesophagienne
NC
Nombres de DMUU retraités
en 2022
270 000 NC NC
Réalisation de retraitement
pour des pays hors Allemagne
Oui65 Non NC
Source : Mission.
2.2 La mission a observé sur site le processus mis en oeuvre qui consiste à
« re-fabriquer » un DM strictement équivalent au DM neuf
[50] Dans le cadre de son déplacement à Berlin, la mission s?est rendue sur le site de retraitement
de Vanguard, ce qui lui a permis d?observé les différentes étapes du processus mis en oeuvre. En
effet, le « cycle de retraitement » inclut plusieurs étapes, et pour chacune d?elles, une procédure
est écrite et validée. Le système de gestion de la qualité? permet de retrouver l?ensemble des
données enregistrées. Un système de traçage permet l?identification du DMUU tout au long de
leur durée de vie. Il permet en particulier de contrôler le nombre de retraitements. Les dispositifs
retraités (identifiés par leur IUD66, Unique Device Identification) peuvent être reliés au numéro de
lot initial notamment dans le cadre de procédure de matériovigilance.
65 A minima au Royaume-Uni et en Israël.
66 Article 27 du règlement 2017/745. L?identifiant unique des dispositifs (IUD) est un code numérique ou
alphanumérique unique lié à un dispositif médical qui permet l'identification claire et formelle de dispositifs
donnés sur le marché et qui facilite leur traçabilité. L?IUD est constitué des éléments suivants : un identifiant
«dispositif» (IUD-ID) et un identifiant «production» (IUD-IP). Ces éléments permettent d?accéder à des
informations utiles sur le dispositif. La spécificité de l?IUD est d?améliorer la traçabilité des dispositifs, de
faciliter le rappel des dispositifs, de lutter contre la contrefaçon et d?améliorer la sécurité des patients. L?IUD
viendra compléter, et non remplacer, les exigences existantes en matière d?étiquetage des dispositifs
médicaux.
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[51] Les observations réalisées sur site par la mission ne s?assimilent en aucun cas à un audit du
processus ou de l?installation de retraitement. Néanmoins, elles confirment l?idée que le
retraitement est une activité spécifique, distincte de la seule stérilisation. Elles tendent aussi à
laisser penser que les DMUU retraités par Vanguard (i) sont testés et inspectés (ii) répondent aux
spécifications et exigences en matière de nettoyage/biocompatibilité, de performance et de
stérilité (iii) sont tracés par une méthode laser qui grave un numéro de lot enregistré dans une
base de données permettant de suivre le nombre de retraitements effectués.
Tableau 10 : Description des étapes du processus mis en place par Vanguard
Etape Processus
Collecte des DM
souillés
Les établissements de santé placent les DM pré-nettoyés dans la
boite de collecte fournie par Vanguard.
Inspection et
identification
À réception, un suivi informatique avec contrôle des DM est mis en
place grâce au marquage laser avec un numéro d?identification
unique. Il permet le suivi du DM tout au long du processus jusqu?à
son acheminement vers l?établissement de santé.
Les DM non aptes au retraitement ou défectueux sont jetés.
Retraitement L'appareil est démonté, nettoyé puis remonté.
100% des DM sont contrôlés sur les volets sécurité et performance.
Ce processus comprend des contrôles visuels, une inspection
mécanique de toutes les pièces mobiles et la vérification de la
fonctionnalité électrique de l'appareil remis à neuf.
Conditionnement
et stérilisation
Les DMUU remanufacturés sont ensuite emballés dans des sacs de
stérilisation Tyvek® et inspectés visuellement après scellement.
Tous les DM sont traités par stérilisation à basse température
(oxyde d?éthylène) pour protéger les dispositifs/composants
thermolabiles. Tous les appareils passent des tests
microbiologiques avant d'être approuvés pour la libération.
Logistique Après stérilisation, les DM sont placés dans des emballages
protecteurs et étiquetés.
Les produits sont ensuite expédiés vers les établissements de santé.
Source : Mission à partir des documents de Vanguard.
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Schéma 3 : Synthèse du processus de retraitement mis en place par Vanguard
Source : Vanguard.
[52] La robustesse du dispositif de retraitement repose essentiellement sur le nombre de tests
auxquels sont soumis les DM, qui s?élèvent selon Vanguard à une vingtaine en ce qui concerne les
cathéters d?électrophysiologie, affirmation corroborée par les observations sur site de la mission.
Ainsi, outre le procédé de nettoyage permettant d?évacuer de la lumière des cathéters des résidus
de substances, les cathéters subissent en particulier :
? une surveillance volumétrique continue ;
? des tests de fonctionnement (performance de chaque composant) ;
? des tests microbiologiques permettant de confirmer le processus de nettoyage, chaque
cathéter étant vérifié en laboratoire conformément à la norme ISO 1588367 ;
? des contrôles visuels permettant notamment de vérifier tout changement de la forme de
courbure ou tout dommage sur la longueur du cathéter, de la connexion électrique à
l?embout ;
? des contrôles de la fonctionnalité électrique, des capteurs de températures et de capacité
électrique.
67 L'ISO 15883-1:2006 spécifie les exigences générales de performances pour les laveurs désinfecteurs (LD) et
leurs accessoires destinés à être utilisés pour nettoyer et désinfecter des dispositifs médicaux réutilisables
ou tout autre article utilisé dans le contexte d'activités médicales, pharmaceutiques, dentaires et
vétérinaires. Elle spécifie les exigences de performances pour le nettoyage et la désinfection ainsi que pour
les accessoires qui peuvent être nécessaires pour atteindre les performances requises.
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Schéma 4 : Tests réalisés sur les cathéters d?électrophysiologie
Source : Vanguard.
[53] Des tests spécifiques sont aussi réalisés sur les ciseaux à ultrasons. Ils subissent des tests de
compatibilité logicielle, et des tests électroniques et mécaniques des lames. La mission a pu suivre
la réalisation par les techniciens de Vanguard de ces tests et le changement systématique des
tampons présents sur les ciseaux.
Schéma 5 : Tests réalisés sur les ciseaux à ultrasons
Source : Vanguard.
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3 Le périmètre de l?expérimentation devrait être limité à la
soixantaine de références de cathéters d?électrophysiologie
marquées CE et retraitées par Vanguard
3.1 En théorie, sur le plan sanitaire, le futur DCE pourrait prévoir des
critères d?exclusion fondés sur le Règlement européen de 2017
[54] Le Règlement 2017/745 ne précise pas le périmètre des DMUU qui peuvent faire l?objet d?un
retraitement mais dresse une liste de critères d?exclusion susceptibles d?être transposés au niveau
national. Cette approche vise à tenir compte, dans une logique de gestion des risques, de la
construction des DMUU, leurs matériaux, leurs propriétés et leur usage prévu68. Ainsi, l?article 17
du RMD dispose que « seul le retraitement de dispositifs à usage unique réputés sûrs, eu égard aux
données scientifiques les plus récentes, peut être réalisé ». Si l?évaluation de l?aptitude au
retraitement n?y est pas spécifiquement abordée, le RMD regroupe en deux catégories les critères
sur la base desquels un État membre peut exclure un DMUU du retraitement :
? les DMUU présentant un risque élevé de contamination croisée :
? émettant des rayonnements ;
? utilisés pour administrer des médicaments cytostatiques ou radiopharmaceutiques ;
? contenant des substances médicamenteuses ;
? destinés à être utilisés dans des procédures invasives sur le système nerveux central ;
? présentant un risque de transmission d?encéphalopathies spongiformes ;
? implantables ;
? les DMUU susceptibles de défectuosité notamment en raison de leur technicité :
? pour lesquels des incidents graves ont eu lieu après le retraitement et pour lesquels la
cause des incidents est liée au retraitement ou il ne peut être exclu que la cause des
incidents soit liée au retraitement ;
? fonctionnant avec des piles ou batteries qui ne peuvent pas être changées ou qui
présentent un risque de dysfonctionnement après le retraitement ;
? munis d?une mémoire de données interne nécessaire à leur utilisation et qui ne peut
pas être changée ou qui présente un risque de dysfonctionnement après le
retraitement ;
68 Pour évaluer si un dispositif à usage unique se prête au retraitement, la gestion des risques devrait tenir
compte des risques liés à la composition des matériaux, aux matériaux relargables, à la contamination
microbiologique, aux prions et aux agents de l?encéphalopathie spongiforme transmissible, aux endotoxines,
ainsi qu?aux réactions pyrogènes, allergiques et toxiques. Les caractéristiques techniques et les propriétés
géométriques des produits devraient également être prises en considération lors de l?évaluation de
l?aptitude au retraitement des dispositifs à usage unique
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? comportant des lames coupantes ou tranchantes, des forêts ou des composants
soumis à l?usure qui ne sont plus fonctionnels après la première utilisation et qui ne
peuvent pas être changés ou affûtés avant la prochaine intervention médicale.
[55] La majorité des États membres ayant autorisé le retraitement des DMUU ont intégré dans
leur droit les critères d?exclusion définis au niveau européen sans déterminer de liste positive des
DMUU éligibles au retraitement. C?est le cas de la Belgique, l?Espagne, la Suède et le Portugal.
D?autres État ont adopté une approche moins restrictive Ainsi, l?Allemagne exclut uniquement les
DMUU utilisés pour administrer des médicaments cytostatiques ou radiopharmaceutiques.
Toutefois, le retraitement des DM utilisés sur des personnes malades ou suspectées d?être
atteintes de la maladie de Creutzfeld-Jacob ou son variant n?est pas interdit mais fait l?objet
d?exigences précisant un certain nombre de méthodes à suivre ou ne pas suivre (interdiction de
certaines méthodes de stérilisation, par exemple). Les Pays Bas ont adopté une approche par le
risque prion, en interdisant l?usage de tout dispositif ayant été en contact avec les tissus à risque,
des malades à risques ou présentant des symptômes neurologiques non expliqués des DMUU
pouvant être retraités.
3.2 En pratique, sur les 600 références retraitées par Vanguard,
seules 250 sont marquées CE, dont 74 sont des cathéters
d?électrophysiologie utilisés par les hôpitaux français
[56] Compte tenu du fait (i) qu?aucune autre filière de retraitement avec un marquage CE n?est
susceptible d?émerger dans les deux prochaines années et (ii) Vanguard est la seule entreprise
susceptible de retraiter avec un marquage CE des DMUU utilisés en France dans le cadre de
l?expérimentation prévue par la LFSS, le choix des DMUU à retenir dépendra en pratique du
catalogue de l?entreprise. La mission a eu accès à ce catalogue dont l?analyse met en évidence
que :
? 98 % des DMUU retraités (procédure marquage CE ou respect des spécification communes
-SC) sont des DM utilisés au cours d?actes d?électrophysiologie (patch, cathéter de
diagnostic et d?ablation) ;
? sur les 590 références de DMUU retraités figurant au catalogue, environ 40 % (soit
245 références) disposent d?un marquage CE, tandis que les 347 références restantes
seraient conformes aux spécifications communes telles que validées, selon Vanguard, par
un organisme externe mais sans certification par un organisme notifié (à défaut d?organisme
notifié ayant accepté de s?engager dans cette démarche, selon Vanguard) ;
? sur les 245 DMUU retraités marqués CE, 241 DM sont utilisés dans les actes
d?électrophysiologie (EP) et quatre pour des actes de chirurgie.
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Tableau 11 : Catégorisation des DMUU retraités référencés dans le catalogue de
Vanguard à fin octobre 2023
Type de procédure EP Chirurgie Total
Marquage CE 241 4 245
Spécifications
communes
343 4 347
Non précisé 6 0 6
Total 590 8 598
Source : Mission sur la base des données de Vanguard.
[57] En comparant les références marquées CE du catalogue de Vanguard et celles utilisées par
trois CHU69, la mission estime que 74 références de cathéters d?électrophysiologie pourraient
faire l?objet d?un retraitement dans le cadre de l?expérimentation. En effet, au regard du caractère
non certifié par un ON du respect des spécifications communes, et compte tenu du fait que les
DMUU retraités par Vanguard sont classés au niveau de risque le plus élevé (niveau III), la mission
recommande de limiter le périmètre des DMUU retraités à ceux pour lesquels Vanguard a obtenu
le marquage CE. Etant donné que le droit européen exige un renouvellement des marquages CE
pour que les DM puissent être commercialisés jusqu?en 2027, Vanguard devra déposer une
demande d?évaluation auprès d?un organisme notifié avant le 26 mai 2024 et avoir signé le contrat
avec cet organisme notifié au plus tard le 26 septembre 2024. Les représentants de la société ont
indiqué à la mission avoir engagé les démarches nécessaires.
[58] Comme le montre le tableau ci-dessous, ces 74 références concernent deux grands types
de familles de DMUU utilisés dans le cadre de procédures d?électrophysiologie (les cathéters
d?ablation et les cathéters de diagnostics) qui, en moyenne, pourraient être retraités 3,4 fois. À
titre d?exemple, le groupe de cathéters d?ablation 4 pôles comporte 18 DMUU marqués CE
retraitables en moyenne maximum 4 fois.
69 AP-HP, Bordeaux, Clermont-Ferrand.
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Tableau 12 : Groupes de DMUU par type de procédure (marquage CE ou spécifications communes-CS) et nombre maximal de
cycles de retraitement (« reprocessing cycles »)70
Source : Mission à partir des données de Vanguard
Groupe de DMUU
Nombre de OEM
Article Description /
Article family name
Moyenne de Max.
reprocessing
cycles*
Nombre de OEM
Article Description /
Article family name
Moyenne de Max.
reprocessing cycles*
Connection cable, electrical, system 1 12 3 8,0
EP-Ablation Catheter, 3D-mapping 2 3,0
EP-Ablation Catheter, 4-pole 18 4 25 3,7
EP-Ablation Catheter, Cryo 2 2,0
EP-Ablation Catheter, irrigated SF 6 3
EP-Ablation Catheter, irrigated SF, 3D-mapping 2 3
EP-Ablation Catheter, irrigated SF, Contact force, 3D-mapping 5 2
EP-Ablation Catheter, irrigated, 4-pole 6 3
EP-Ablation Catheter, irrigated, Contact force, 3D-mapping 4 2
EP-Ablation Catheter, irrigated, Contact force, 3D-mapping, TactiCath SE 5 3,0
EP-Diagnostic Catheter, 10-pole 8 3,0
EP-Diagnostic Catheter, 4-pole 39 3,6
EP-Diagnostic Catheter, 6-pole 9 3,7
EP-Diagnostic Catheter, 8-pole 1 3,0
EP-Diagnostic Catheter, steerable, 10-pole 11 4
EP-Diagnostic Catheter, steerable, 4-pole 3 4
EP-Diagnostic Catheter, steerable, 6-pole 1 4
EP-Diagnostic Catheter, steerable, 8-pole 4 4
EP-Diagnostic Catheter, steerable/fix, Lasso/Loop, 3D-mapping 2 3 4 3,0
Introducer sheaths 3 1,0
Introducer sheaths, steerable 6 1,0
Package EP-Ablation Catheter, 3D-mapping 2 3,0
Package EP-Ablation Catheter, irrigated SF, Contact force, 3D-mapping 5 2
Package EP-Ablation Catheter, irrigated, Contact force, 3D-mapping 4 2
Package EP-Diagnostic Catheter, steerable/fix, Lasso/Loop, 3D-mapping 2 3
Transseptal needles 20 3,0
Total général 74 3,4 129 3,3
Process (CE, CS)
CE CS
ARTICLES EN MARCHES CHU
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4 Le retraitement engendrera dans les établissements de
santé des économies par rapport au coût annuel des
cathéters neufs circuit comprises entre 35 et 59 %
d?économie selon le circuit choisi
[59] Deux circuits de retraitements dits « ouvert » ou « fermé » sont envisageables dans le
cadre fixé par la LFSS pour 2024 (cf. annexe II). Les calculs présentés ci-dessous sont estimés
pour la réalisation de 25 utilisations d?un cathéter.
4.1 En circuit ouvert, pour 25 utilisations, le retraitement diminue
d?environ 60 % le coût annuel des cathéters
[60] Dans le circuit « ouvert », les établissements de santé, d?une part, vendent71 à l?entreprise
de retraitement les DMUU utilisés et, d?autre part, achètent à cette entreprise des DMUU
retraités, indépendamment du lieu où ces DMUU ont été précédemment utilisés. Dans ce cas,
seul les paramètres du prix d?achat du DM neuf, du prix d?achat du DM retraités et de du
nombre de cathéters sont à prendre en compte.
[61] À titre d?exemple, pour l?achat d?un cathéter d?électrophysiologie de type ablation
vendu neuf au prix de 1 854 ¤ HT, le prix proposé par la société Vanguard est de 755 ¤ HT (soit
une économie de -59 %).
Tableau 13 : Calcul des économies annuelles en circuit ouvert
Prix HT ¤ neuf Prix HT ¤ retraité Quantité Coût ¤
1 854 25 46 350 (B)
755 25 18 875
Économie annuelle 27 475 ¤ (A)
En % (A/B) 59,3
Source : Mission à partir des données transmises par un CHU et par Vanguard.
71 La vente des DMUU utilisés ne nécessite pas de formalités particulières. Le prix de vente doit être agréé
au préalable avec l?entreprise de retraitement.
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4.2 En circuit fermé, les économies obtenues grâce au retraitement sont
plus difficiles à calculer et moindres qu?en circuit « ouvert »
[62] Dans le circuit « fermé », les établissements de santé sous-traitent à une entreprise le
retraitement des DMUU qu?ils ont utilisés, sous le plafond du volume maximal de cycles de
retraitements prévus. Dans ce cas quatre paramètres doivent être pris en compte pour calculer
l?économie : le prix d?achat du DM neuf, le prix d?achat du DM retraité, le nombre de
retraitement prévu et le taux d?échec. Ce taux représente le pourcentage de DM qui, une fois
réceptionnés par la société de retraitement ne peuvent pas être retraités car ils ont été testés
comme défectueux (non conformes) alors qu?ils auraient encore pu subir des retraitements.
Selon la société Vanguard, ce taux d?échec est estimé à 25 % en moyenne
[63] Pour réaliser la comparaison avec le circuit « ouvert », le même prix de vente du cathéter
retraité a été utilisé. Dans cet exemple, le cathéter peut être recyclé 2 fois avec un taux d?échec
de 25 %.
[64] La mission préconise que l?expérimentation se fasse dans le cadre d?un circuit « ouvert »
plutôt que « fermé ».
Tableau 14 : Calcul des économies annuelles en circuit fermé
Paramètre
Prix achat cathéter neuf (HT) 1 854 ¤
Prix achat cathéter recyclé (HT) 755 ¤
Nombre de cycle de retraitement 2
Taux d?échec 25 %
Nombre de cathéters acheté 10
Nombre d?utilisation maximum 20 fois
Nombre d?utilisation en intégrant le taux d?échec 15 fois
Nombre d?utilisation de 10 cathéters 25 fois
Économie 16 485 ¤
Source : Mission à partir des données transmises par un CHU et par Vanguard.
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ANNEXE 2 : Modalités d?expérimentation du
retraitement des DMUU dans quatre
établissements de santé
1 LA PARTICIPATION DES ETABLISSEMENTS DE SANTE A L?EXPERIMENTATION EXIGE EN
PREMIER LIEU L?ADHESION DE L?ENSEMBLE DES PROFESSIONNELS CONCERNES ........ 57
1.1 DIFFERENTS CRITERES SONT ENVISAGEABLES POUR SELECTIONNER LES ETABLISSEMENTS DE SANTE
PARTICIPANT A L?EXPERIMENTATION .............................................................................................. 57
1.2 LA PRIORITE DOIT ETRE ACCORDEE AUX ETABLISSEMENTS ENGAGES DANS UNE DEMARCHE PARTAGEE
DE REDUCTION DE LEUR EMPREINTE ECOLOGIQUE ........................................................................... 58
2 UN MARCHE COMMUN DE RETRAITEMENT OU D?ACHAT DE DMUU DEVRA ETRE
CONCLU DANS LE RESPECT DU CODE DE LA COMMANDE PUBLIQUE .............................. 59
2.1 LES DEUX CIRCUITS POSSIBLES « OUVERT » OU « FERME » DE RETRAITEMENT DES DMUU
PRESENTENT DES AVANTAGES ET INCONVENIENTS RESPECTIFS....................................................... 59
2.2 UN ECHANGE AVEC LES FOURNISSEURS DE DMUU NEUFS DEVRA ETRE ENGAGE ET DEBOUCHER LE
CAS ECHEANT SUR UN AVENANT AU MARCHE INITIAL ..................................................................... 60
3 UN CIRCUIT LOGISTIQUE DEVRA ETRE MIS EN PLACE AVEC UN IMPACT A PRIORI LIMITE
SUR LA CHARGE DE TRAVAIL DES PROFESSIONNELS DE SANTE........................................ 61
3.1 LE CIRCUIT LOGISTIQUE SERA DEFINI AVEC L?ENTREPRISE DE RETRAITEMENT EN TENANT COMPTE DU
CADRE JURIDIQUE APPLICABLE AUX DECHETS .................................................................................. 61
3.2 AU REGARD DE LA SIMPLICITE RELATIVE DE CE CIRCUIT, LA SURCHARGE DE TRAVAIL DEVRAIT RESTER
LIMITEE ........................................................................................................................................... 63
4 LES MODALITES D?INFORMATION DU PATIENT DEVRONT ETRE AJUSTEES POUR NE PAS
FAIRE OBSTACLE A LA MISE EN OEUVRE DE L?EXPERIMENTATION ..................................... 64
4.1 LA LFSS POUR 2024 PREVOIT L?OBLIGATION D?INFORMER LES PATIENTS, QUI PEUVENT S?Y OPPOSER,
QUAND UN DMUU RETRAITE VA ETRE UTILISE ................................................................................ 64
4.2 UNE FOIS CORRECTEMENT INFORME, LE PATIENT POURRAIT S?OPPOSER A L?UTILISATION D?UN
DMUU RETRAITE DANS UNE LOGIQUE D?« OPT OUT » .................................................................... 64
5 LES CREDITS PREVUS PAR LA LFSS 2024 POURRAIENT FINANCER UNE EVALUATION
EXTERNE DE L?EXPERIMENTATION SUR LA BASE DES CRITERES DEFINIS EN CAHIER DES
CHARGES ........................................................................................................................................... 65
5.1 L?EVALUATION DE L?EXPERIMENTATION DOIT ETRE REALISEE PAR UN ACTEUR EXPERT DE L?ANALYSE
DU CYCLE DE VIE DES PRODUITS DE SANTE...................................................................................... 65
5.2 CETTE EVALUATION DEVRA PERMETTRE D?APPRECIER L?INTERET DU RETRAITEMENT SUR LES PLANS
SANITAIRE, ECOLOGIQUE, ECONOMIQUE ET HUMAIN ...................................................................... 66
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[65] L?article 66 de la LFSS pour 2024 autorise et encadre, à titre expérimental, le
retraitement de certains Dispositifs médicaux à usage unique (DMUU), leur mise à disposition
sur le marché et leur utilisation. Cette expérimentation, d?une durée de deux ans, doit débuter
au plus tard le 1er novembre 2024. Le champ et les modalités de mise en oeuvre de cette
expérimentation sont partiellement encadrées au niveau législatif :
? seuls pourront y participer les établissements de santé publics, privés d'intérêt collectif
et privés, au nombre de quatre selon l?étude d?impact, désignés par arrêté du ministre
chargé de la santé ;
? le retraitement ne pourra être réalisé que par une entreprise externe, et non par les
établissements de santé ;
? les DMUU retraités pourront être achetés sur le marché ou correspondre à des DMUU
déjà utilisés au sein des établissement de santé avant leur retraitement ;
? les entreprises externe de retraitement devront a minima respecter les obligations
prévues par l?article 17 du règlement (UE) 2017/745, même si une partie d?entre elles
peuvent être écartées sous réserve de la certification par un organisme notifié du respect
des spécifications communes définies au niveau européen (cf. encadré infra) ;
? aucun DMUU retraité ne pourra être utilisé sans l?information préalable de la personne,
qui peut s?y opposer.
[66] Prévu par la loi, un décret en Conseil d?État devra déterminer autant que de besoin les
modalités de mise en place de cette expérimentation, en particulier :
? le périmètre des DMUU qui pourront être retraités, incluant le cas échéant des
obligations, en particulier de traçabilité, et des restrictions (cf. Annexe III) ;
? les modalités particulières applicables, en matière d?information et d?opposition des
patients, à l?utilisation des DMUU retraités ;
? la méthodologie de l?expérimentation, ses objectifs et les modalités de son pilotage et
de son évaluation, en vue notamment du rapport adressé au Parlement six mois avant le
terme de l?expérimentation qui déterminera l?opportunité et, le cas échéant, les
conditions de sa pérennisation et de son extension.
[67] Cette fiche, qui vise à alimenter le futur cahier des charges de l?expérimentation, précise
les modalités envisageables de mise en oeuvre de l?expérimentation comprenant :
? les critères de choix des quatre établissements de santé qui seront retenus par arrêté ;
? les scénarios de passation d?un marché d?achat de DMUU retraités ou de retraitement de
DMUU utilisés ;
? le circuit logistique à prévoir au sein des établissements de santé qui feront retraiter les
DMUU utilisés ;
? le dispositif d?information et de recueil de l?opposition éventuelle des patients dans le
cadre des soins qui pourraient mobiliser des DMUU retraités ;
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? ses critères et modalités d?évaluation pour pouvoir apprécier à terme l?opportunité de
généraliser voire étendre le retraitement des DMUU.
Modalités de retraitement des DMUU prévues au niveau européen
Le retraitement des DMUU est encadré depuis 2017 par un règlement communautaire qui
prévoit trois modalités possibles selon des standards précisés par un règlement d?exécution.
Le règlement 2017/745 du 5 avril 2017 constitue le cadre global de régulation des DM sur le
marché intérieur européen72. Son article 17 encadre spécifiquement les DMUU et leur
retraitement. Ce cadre repose sur deux modalités possibles de retraitement :
-un retraitement par une personne physique ou morale qui est réputé alors devenir le
fabricant du dispositif retraité, ce qui suppose qu?elle s?acquitte des obligations incombant
aux fabricants (obtention du marquage CE en particulier) ;
-en ce qui concerne les DMUU retraités et utilisés dans un établissement de santé, le
retraitement peut être effectué par l?établissement ou par une entreprise externe dès lors
qu?il est effectué conformément à des spécifications communes définies dans le règlement
d?exécution 2020/120773 : dans ce cas, l?obtention du marquage CE n?est pas nécessaire mais
la conformité avec les certifications communes doit être vérifiée par un organisme notifié.
1 La participation des établissements de santé à
l?expérimentation exige en premier lieu l?adhésion de
l?ensemble des professionnels concernés
1.1 Différents critères sont envisageables pour sélectionner les
établissements de santé participant à l?expérimentation
[68] Le choix des établissements de santé qui participeront à l?expérimentation pourraient
reposer sur au moins trois critères :
? la proximité géographique de ces établissements permettrait en théorie d?optimiser le
circuit de transport des DMUU retraités vers le site de l?entreprise de retraitement : en
pratique, dans la mesure où (i) ce transport ne sera pas sous la responsabilité des
établissements de santé mais sous-traité par l?entreprise de retraitement à un logisticien
(ii) la fréquence et l?optimisation des retraits/livraisons dépendront des choix effectués
par cette entreprise en lien avec chaque établissement de santé, ce critère est en
pratique secondaire ;
72 Il s?est substitué à deux directives de 1990 et 1993. Les dispositifs médicaux implantables actifs et les
dispositifs médicaux de diagnostic in vitro font l?objet d?un encadrement juridique distinct.
73 Ces spécifications détaillent les exigences concernant la gestion des risques, la validation des
procédures pour la totalité du processus, la libération du produit et les tests de performance, le système
de gestion de la qualité, la déclaration d?incidents portant sur les dispositifs retraités, la traçabilité des
dispositifs retraités.
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? la volumétrie de DMUU retraitables (donc de cathéters d?électrophysiologie, cf. Annexe
I) utilisés (cf. tableau 1) : ce critère conditionne l?intérêt de l?entreprise de retraitement
dans la participation au marché ;
? la taille et le statut juridique des établissements : pour apprécier les éventuelles
différences dans le déploiement du retraitement des DMUU entre établissements de
santé en vue, le cas échéant, de sa généralisation, la prise en compte de ces critères
pourrait enfin se justifier.
Tableau 15 : Top 10 des établissements de santé publics et privés ayant réalisé le
plus de traitements par voie vasculaire en 2022
Établissement de santé Statut
Volume de traitements réalisés par voie vasculaire
en 202274
CL PASTEUR TOULOUSE Privé 1 280
INSTITUT MUTUALISTE MONTSOURIS Espic75 970
CHU DE BORDEAUX Public 810
HOPITAL SAINT JOSEPH Marseille Espic 800
HOSPICES CIVILS DE LYON Public 752
CLINIQUE DE LA PLAINE CLERMOND
FERRAND
Privé 747
CLINIQUE CHIRURGICALE AMBROISE
PARE
Privé 701
CHU DE SAINT-ETIENNE Public 667
INFIRMERIE PROTESTANTE Espic 632
CHU DE CLERMONT-FERRAND Public 618
Source : Pôle « data » de l?Igas.
1.2 La priorité doit être accordée aux établissements engagés dans une
démarche partagée de réduction de leur empreinte écologique
[69] Parce que le retraitement des DMUU n?est qu?un levier parmi d?autres pour diminuer
l?empreinte écologique des produits de santé, il est recommandé de favoriser la participation
à l?expérimentation des établissements engagés dans une démarche globale de décarbonation.
En effet, l?existence d?une telle démarche (objectivée par un diagnostic, une feuille de route et
une comitologie dédiée) limite le risque de considérer le retraitement comme un levier isolé,
et in fine modeste à l?échelle de la totalité des émissions recensées, de diminution de
74 Traitements majeurs des troubles du rythme par voie vasculaire : GHS 05K191, 05K192, 05K193, 05K194,
05K19.
75 Espic : Établissement de santé privé d?intérêt collectif.
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l?empreinte écologique (cf. annexe IV). À l?inverse, l?autorisation de retraiter certains DMUU
peut jouer un rôle de catalyseur si d?autres leviers ont déjà été identifiés et engagés
(développement de l?usage multiple, généralisation et renforcement de la portée des clauses
environnementales dans les achats de produits de santé, valorisation des déchets issus des DM,
etc.).
[70] En outre, l?existence d?une stratégie globale, idéalement concertée, de diminution de
l?empreinte écologique favorise un alignement et une adhésion des professionnels vis-à-vis de
l?expérimentation, critère primordial de sélection des établissements de santé. Il est
indispensable que tous les professionnels directement ou indirectement concernés par
l?expérimentation (direction générale, acheteurs en Pharmacie à usage intérieur-PUI, juristes,
hygiénistes, service de stérilisation, professionnels médicaux et paramédicaux utilisant les
DMUU) en comprennent le sens et acceptent de l?endosser.
2 Un marché commun de retraitement ou d?achat de DMUU
devra être conclu dans le respect du code de la commande
publique
2.1 Les deux circuits possibles « ouvert » ou « fermé » de retraitement
des DMUU présentent des avantages et inconvénients respectifs
[71] Deux circuits de retraitements, dits « ouvert » ou « fermé » sont envisageables dans le
cadre fixé par la LFSS pour 2024 :
? dans le circuit « ouvert », les établissements de santé, d?une part, vendent76 à l?entreprise
de retraitement les DMUU utilisés et, d?autre part, achètent à cette entreprise des DMUU
retraités, indépendamment du lieu où ces DMUU ont été précédemment utilisés ;
? dans le circuit « fermé », les établissements de santé sous-traitent à une entreprise le
retraitement des DMUU qu?ils ont utilisés, sous le plafond du volume maximal de cycles
de retraitements prévus (cf. Annexe I).
[72] Dans le cadre de l?expérimentation, il serait préférable que tous les établissements
adoptent le même circuit, qui conditionne la conclusion d?un marché groupé, en se fondant
sur les critères d?appréciation suivants :
? sur le plan opérationnel, le circuit « ouvert » offre plus de flexibilité dans la gestion des
stocks en fonction de son activité : en effet, le volume de DMUU retraités achetés ne
dépend pas du volume de DMUU vendus à l?entreprise de retraitement ; par ailleurs, dans
la mesure où les DMUU retraités marqués CE sont strictement équivalents aux DMUU
76 La vente des DMUU utilisés ne nécessite pas de formalités particulières. Le prix de vente doit être agréé
au préalable avec l?entreprise de retraitement.
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neufs, il n?y a pas d?intérêt du point de vue sanitaire ou des utilisateurs à privilégier des
DMUU retraités déjà utilisés dans le même établissement ;
? sur le plan juridique, la DAJ des ministères sociaux77, saisie par la mission, estime
néanmoins que le circuit « fermé », qui repose sur un marché de prestation, et non sur
un marché d?achat de produits, est moins risqué au regard de l?exclusivité dont peuvent
bénéficier les titulaires des accords-cadres déjà conclus pour la fourniture des DMUU
neufs.
[73] Selon la DAJ des ministères sociaux, la coexistence de deux marchés publics, l?un portant
sur l?achat de DMUU neufs, l?autre sur leur retraitement, est juridiquement possible mais plus
fragile en circuit « ouvert » en l?absence dispositions explicites dans l?accord-cadre avec les
fournisseurs de DMUU neufs78. La DAJ, qui a analysé un exemple d?accord-cadre avec un
fournisseur de cathéters d?électrophysiologie fournis par le CHU de Bordeaux, rappelle que,
les acheteurs restent libres de définir dans un tel accord les limites de leur engagement
contractuel, y compris des exceptions au principe d?exclusivité. L?acheteur doit insérer de
manière expresse, dans les documents contractuels du marché, une clause stipulant qu?il se
réserve la possibilité de recourir à des tiers pour certains types de prestations prévues au
contrat. En l?absence de ces clauses, l?acheteur est tenu, par principe, de garantir au titulaire
l?exclusivité des prestations qui en sont l?objet. Selon la DAJ, dans le cadre du circuit « ouvert »,
l?objet du nouveau marché aurait un objet similaire à celui déjà conclu pour les DMUU neufs. À
l?inverse, dans le circuit « fermé », l?objet du nouveau marché serait différent de celui du
marché initial, ce qui limiterait le risque contentieux. Compte tenu des avantages sur le plan
économique du circuit « ouvert », la mission préconise de le privilégier dans le cadre de
l?expérimentation, même s?il implique un investissement sur le plan juridique.
2.2 Un échange avec les fournisseurs de DMUU neufs devra être engagé
et déboucher le cas échéant sur un avenant au marché initial
[74] Quel que soit le circuit retenu, qui dépendra en particulier des engagements contractuels
pris par les établissements retenus avec leur fournisseur de DMUU neufs, un échange préalable
avec ces derniers, et le cas échéant un avenant à l?accord-cadre, seront nécessaires. En effet,
comme l?a constaté la DAJ sur la base de l?exemplaire d?accord-cadre fourni par le CHU de
Bordeaux, et selon les témoignages d?acheteurs recueillis par la mission, les fabricants de DMUU
neufs, en l?espèce de cathéters d?électrophysiologie, lient souvent la vente de ces DMUU avec
d?autres prestations telles que la mise à disposition d?une console à laquelle est connectée le
cathéter et un service de conseil et de maintenance qui se matérialise par la présence, durant
les interventions, d?un ingénieur travaillant pour le compte du fabricant. Dans son analyse, la
DAJ rappelle que le pouvoir adjudicateur, lorsqu?il suit une procédure régulière, n?est pas
conduit à accepter une prestation qu?il n?a pas demandée et sur laquelle la concurrence n?a
pas porté. Conformément aux règles d?allotissement, la mise à disposition d?équipements et la
77 Note du bureau de la commande et des interventions publiques de la DAJ des ministères sociaux datée
du 20 novembre 2023.
78 L?obligation pour les établissements publics d?établir un marché pour le retraitement des DMUU ne
s?appliquera bien sûr qu?à ceux qui ont la qualité d?acheteur au sens du code la commande publique.
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maintenance pourraient faire l?objet de prestations distinctes de celle de la fourniture de
consommables. En pratique, en cas d?achat de DMUU retraités, il conviendra de s?assurer
auprès du fournisseur de DMUU neufs que (i) la console mise à disposition pourra être aussi
utilisée avec ces cathéters retraités (ii) la prestation de conseil et de maintenance associée aux
cathéters neufs pourra être, soit dissociée dans un support contractuel distincts, soit étendue
à l?utilisation des cathéters retraités.
3 Un circuit logistique devra être mis en place avec un impact
a priori limité sur la charge de travail des professionnels de
santé
3.1 Le circuit logistique sera défini avec l?entreprise de retraitement en
tenant compte du cadre juridique applicable aux déchets
[75] Le retraitement de DMUU qui étaient auparavant directement jetés79 une fois utilisés,
nécessite la mise en place d?un circuit logistique incluant a minima les étapes suivantes :
? le nettoyage, selon le protocole convenu avec l?entreprise de retraitement et en
conformité avec les règles définies par la Société Française d?Hygiène Hospitalière (cf.
Annexe I), par le personnel paramédical (infirmiers, ou aides-soignants a priori) du DMUU
utilisé durant l?intervention dès lors que le nombre maximal de cycles de retraitement
n?est pas atteint80 ;
? le stockage, dans la salle d?intervention, ou à proximité, des DMUU destinés à être
retraités dans un container fourni par l?entreprise de retraitement dont la taille dépendra
(i) du volume hebdomadaire ou mensuel de DMUU utilisés (ii) de la fréquence convenue
de collecte par le prestataire de transport mandaté par l?entreprise de ces derniers ;
? la remise, à la date et heure convenue avec l?entreprise de retraitement, par le personnel
en charge de la logistique, des containers avec les DMUU utilisés ;
? une fois ces DMUU retraités (en circuit « fermé »), ou une fois les DMUU retraités
commandés en fonction de l?évolution du stock de DMUU restants (en circuit « ouvert »),
leur recueil par les services en charge de la logistique pour acheminement vers les salles
d?intervention ;
? lors de leur utilisation, l?inscription, dans le SI quand il existe ou dans un registre papier à
défaut, de l?identifiant unique (UDI)81 du DMUU retraité et du numéro apposé par
79 Certains établissements de santé, comme le CHU de Bordeaux, procèdent néanmoins à l?extraction et
à la vente de la pointe des cathéters auprès d?organismes qui revalorisent les métaux précieux qu?elles
contiennent (cf. Annexe IV).
80 Cette information est lisible à travers le numéro de lot apposé sur le DM par l?entreprise de
retraitement.
81 L?UDI est un code international numérique ou alphanumérique permettant d?identifier chaque DM tout
au long de son cycle de vie.
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l?entreprise de retraitement reliés au numéro d?identification du patient sur qui ce DMUU
retraité a été utilisé.
[76] Concernant spécifiquement l?étape de nettoyage des DMUU82, elle devra être réalisée
selon des standards permettant à la fois de préserver la possibilité de les retraiter et de ne
plus les considérer comme des déchets. En effet, l?analyse réalisée par la DAJ des ministères
sociaux souligne que :
? le code de l?environnement83 prévoit qu?« un déchet cesse d'être un déchet après avoir
été traité et avoir subi une opération de valorisation, notamment de recyclage ou de
préparation en vue de la réutilisation (?) » ;
? si l?on se réfère en particulier à la norme ISO 17664 :201784, le simple nettoyage à l?eau
d?un DMUU ne permettrait pas de faire sortir ce dernier de la catégorie de « déchet » au
sens du code de l?environnement ;
? or, pour que les DMUU retraités puissent circuler librement en UE, ils ne doivent pas être
considérés comme des déchets : en effet, le droit européen85 exige une procédure de
notification et de consentement écrit préalable pour le transfert de déchets ménagers
entre États de l?UE.
82 Ce nettoyage consiste à préparer les DMUU utilisés en intervention en vue de leur retraitement, ce qui
inclut la vérification de leur intégrité (ex : DMUU non visiblement endommagé).
83 Article L. 541-4-3.
84 La norme ISO 17664 :2017 intitulée « Traitement de produits de soins de santé ? Informations relatives
au traitement des dispositifs médicaux à fournir par le fabricant du dispositif » précise que le nettoyage
consiste « à éliminer, généralement à l?aide d?un agent nettoyant et d?eau, les souillures adhérentes (par
exemple, sang, substances protéiques et autres débris) des surfaces, fentes, cannelures, joints et lumières
d?un dispositif médical, par le biais d?un procédé manuel ou automatique qui prépare les produits à une
manipulation en toute sécurité et/ou à la poursuite du traitement ». Ce nettoyage intervient avant tout
procédé de désinfection et/ou de stérilisation postérieur.
85 L?article 33 du Règlement (CE) No 1013/2006 du Parlement Européen Et Du Conseil du 14 juin 2006
établit les conditions de transfert des déchets entre les État membres de l?Union européenne.
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Protocole de nettoyage des DMUU avant retraitement
La mission a eu connaissance d?un projet de contrat entre Vanguard et un CHU qui précise
les modalités de préparation et de vérification des DMUU avant leur envoi pour
retraitement. Ce document indique que seuls les DM complets et non endommagés (sur un
plan mécanique) peuvent être collectés et nettoyés. Certains DM sont exclus de ce
retraitement notamment ceux dont les surfaces externes ont été en contact avec des
médicaments cytostatiques, ou des produits radiopharmaceutiques. Sont également exclus
ceux qui ont été utilisés de manière reconnaissable ou supposée sur des patients atteints de
certaines maladies infectieuses86. Il y est rappelé que le nettoyage préalable doit s?effectuer
en milieu hospitalier juste après l?utilisation des DM afin que les résidus ne sèchent pas et ne
soient pas difficiles à enlever.
Le protocole de nettoyage repose sur un essuyage des surfaces avec un chiffon humide avec
de l?eau froide et claire. Les tiges doivent être essuyées si possible de l?intérieur vers
l?extérieur. Les pièces mobiles doivent être nettoyées dans les deux positions finales. Aucun
désinfectant ni désinfection thermique ne doit être utilisés. Enfin, si le cathéter a une
lumière, les passages doivent être rincés à l?eau froide, aucun liquide ne doit parvenir dans
une pièce à main. Une fois nettoyé, le DM est séché avec une compresse propre ou un
chiffon non pelucheux à usage unique. Le DM peut ensuite être emballé et placé dans les
containers pour enlèvement.
Ce protocole est a priori compatible avec celui préconisé par la SF2H dans son guide relatif
au traitement et à la désinfection des DM réutilisables. Étant donné que le retraitement des
DMUU est interdit en France, ce guide n?aborde pas le nettoyage des DMUU avant
retraitement. Néanmoins, la première étape de pré-désinfection peut être considérée
comme équivalente à celle décrite par le protocole de Vanguard. La SF2H considère que ce
protocole est valable pour l?ensemble des DM, quels que soient le statut sérologique,
bactérien ou viral des patients sur lesquels ils ont été utilisés.
Source : Mission.
3.2 Au regard de la simplicité relative de ce circuit, la surcharge de
travail devrait rester limitée
[77] Sur la base de ses échanges avec les représentants de trois CHU, qui devront être
corroborés au cours de l?expérimentation, la mission estime que la surcharge de travail
associée au retraitement des DMUU devrait être limitée :
? elle est concentrée sur le personnel paramédical, en particulier les infirmiers ou les aides-
soignants qui, au lieu de jeter directement les DMUU utilisés devront les nettoyer pour
un temps estimé à moins de 10 mn par dispositif ;
86 VIH, Hépatites virales, choléra, tuberculose, fièvres hémorragiques, encéphalopathie spongiforme
transmissible (maladie de Creutzfeldt Jakob et ses variants)
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? les acheteurs en PUI seront mobilisés en amont de l?expérimentation pour participer à la
construction d?un éventuel marché groupé avec l?entreprise de retraitement et
renégocier si nécessaire les accords-cadres avec les fournisseurs de DMUU neufs ;
? la surcharge de travail pour les acteurs en charge de la logistique (acheminement des
containers des salles d?intervention vers le lieu de retrait, et réciproquement pour la
collecte des DMUU retraités) est jugée marginale.
4 Les modalités d?information du patient devront être
ajustées pour ne pas faire obstacle à la mise en oeuvre de
l?expérimentation
4.1 La LFSS pour 2024 prévoit l?obligation d?informer les patients, qui
peuvent s?y opposer, quand un DMUU retraité va être utilisé
[78] L?obligation d?informer les patients du caractère retraité d?un DMUU est une quasi-
exception française qui peut s?expliquer par le cadre expérimental retenu. Pourtant, l?article
17 du règlement 2017/745 précise que les États membres « encouragent, et peuvent obliger, les
établissements de santé à fournir aux patients des informations sur les dispositifs médicaux
retraités en leur sein ». En pratique, parmi les pays européens qui autorisent à ce jour le
retraitement, seule l?Espagne prévoit l?obligation d?en informer au préalable les patients (cf.
Annexe III). Un parallèle peut être fait avec les essais cliniques qui requièrent un consentement
éclairé des patients. Toutefois, à la différence des essais cliniques, il est impossible dans le cas
des DMUU retraités de préciser, et a fortiori de quantifier, l?existence d?un risque. À cet égard,
l?obligation d?information prévue par la LFSS pour 2024 est contradictoire avec la
responsabilité des entreprises assurant le retraitement des DMUU dans un cadre, celui du
marquage CE, identique à celui des DMUU neufs pour lesquels aucune information n?est
prévue.
[79] Cette obligation d?information, assortie d?un droit d?opposition, dont les modalités
seront définies dans le futur décret en Conseil d?État, pourrait faire obstacle au bon
déroulement de l?expérimentation. Les représentants des associations de patients rencontrés
par la mission le 27 novembre dernier n?ont pas été consultés dans le cadre de la rédaction de
l?article 66 de LFSS 2024. Leur avis devrait en revanche être recueilli en amont de la
transmission du projet de décret au Conseil d?État. Ces représentants ont souligné auprès de
la mission la nécessité de (i) faire preuve de pédagogie auprès des patients en leur expliquant
les objectifs poursuivis par l?expérimentation (ii) prévoir un dispositif de recueil du
consentement explicite des patients.
4.2 Une fois correctement informé, le patient pourrait s?opposer à
l?utilisation d?un DMUU retraité dans une logique d?« opt out »
[80] Pour trouver un équilibre entre la juste information des patients et le bon déroulement
de l?expérimentation, la mission propose d?abord l?élaboration au niveau national d?une fiche
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informative commune aux quatre établissements qui participeront à l?expérimentation. Cette
fiche, qui serait remise au patient en amont de l?intervention mobilisant un DMUU retraité,
valoriserait (i) le caractère identique du DMUU retraité par rapport au DMUU neuf garanti par
son marquage CE (ii) le double gain écologique et économique associé à son utilisation.
[81] Pour maximiser les chances qu?un patient accepte l?utilisation d?un DMUU retraité, il est
recommandé de privilégier une logique d?« opt out ». Ainsi, une ligne pourrait être ajoutée sur
les documents remis au patient avant une intervention stipulant qu?il accepte par ailleurs
l?utilisation d?un DMUU retraité. L?opposition d?un patient à l?utilisation d?un DMUU retraité
devrait donc être expresse. Elle pourrait être tracée via apposition d?une inscription de la part
des professionnels de santé sur le dossier du patient. Le taux d?« opt out » devra être suivi dans
le cadre de l?expérimentation.
5 Les crédits prévus par la LFSS 2024 pourraient financer une
évaluation externe de l?expérimentation sur la base des
critères définis en cahier des charges
5.1 L?évaluation de l?expérimentation doit être réalisée par un acteur
expert de l?analyse du cycle de vie des produits de santé
[82] La mission recommande de flécher sur l?évaluation de l?expérimentation une partie des
financements prévus pour accompagner l?expérimentation. En effet, l?étude d?impact de la
LFSS pour 2024 prévoit un montant de 890 000¤ pour accompagner les quatre structures sur
les deux années de l?expérimentation tant en moyens humains qu?en ingénierie. Si le montage
du marché avec l?entreprise de retraitement pourrait nécessiter une expertise juridique
externe, la mission n?identifie pas de besoins de financement autres dans le cadre de
l?expérimentation. En revanche, une partie de ces crédits pourraient utilement être allouée au
financement d?une prestation d?évaluation.
[83] Cette prestation d?évaluation devra être confiée à un acteur87 qui maîtrise en particulier
la méthodologie de l?analyse de cycle de vie. En effet, cette méthodologie, qui suppose de
recueillir et de traiter un volume important de données, ne peut pas aujourd?hui être mise en
oeuvre de façon autonome par les établissements de santé, leur tutelle ou les services
d?inspection, dont l?inspection générale des affaires sociales. Or elle est indispensable pour
apprécier l?intérêt écologique du retraitement.
87 La mission a identifié au moins deux sociétés qui réalisent d?ores et déjà ce type d?analyses pour le
compte d?établissements de santé.
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RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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5.2 Cette évaluation devra permettre d?apprécier l?intérêt du
retraitement sur les plans sanitaire, écologique, économique et
humain
[84] En lien avec les représentants des établissements de santé rencontrés, la mission a
identifié un certain nombre de critères qui pourraient être inscrits dans le dispositif de
pilotage et d?évaluation de l?expérimentation :
? nombre de déclarations de matériovigilance recensées ;
? nombre d?événements indésirables associés aux soins ;
? volume de DMUU retraités sur une période donnée rapportée au volume de DMUU neufs
achetés, à comparer au volume acheté avant retraitement ;
? nombre de DMUU envoyés pour retraitement par rapport au nombre de DMUU retraités
acquis sur une période donnée
? nombre de patients ayant manifesté leur opposition à l?utilisation d?un DMUU retraité
rapporté au nombre de patients pour lesquels un DMUU retraité a été utilisé sur une
période donnée ;
? taux de satisfaction de différentes catégories de professionnels de santé (pharmaciens,
paramédicaux, médecins) par rapport au circuit logistique associé au retraitement et,
s?agissant des soignants, à la fonctionnalité des DMUU retraités par rapport aux DMUU
neufs.
[85] Sur un plan plus qualitatif, il est nécessaire que le dispositif de pilotage comme
l?évaluation, qui pourrait exiger un délai supérieur aux 18 mois prévus par la loi, permettent
d?apprécier l?atteinte de l?ensemble des objectifs assignables à l?expérimentation :
? sur le plan financier, est-il possible de quantifier les économies annuelles réalisées grâce
à l?acquisition de DMUU retraités en tenant compte du coût complet sur leur cycle de
vie des DMUU neufs par rapport à celui des DMUU retraités ?
? sur le plan écologique, peut-on objectiver sur leur cycle de vie la diminution de
l?empreinte écologique, et non uniquement des émissions carbone, associées aux DMUU
retraités par rapport aux DMUU neufs ? Quel a été par ailleurs l?effet de l?expérimentation
sur la stratégie globale de décarbonation des D (effet neutre, effet catalyseur ou effet
d?éviction) ?
? enfin, sur un plan humain, en lien avec le circuit logistique mis en place en établissement,
quel est l?impact de l?expérimentation sur (i) la charge et l?organisation du travail des
professionnels concernés (ii) le sens au travail (iii) les relations entre les services ?
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ANNEXE 3 : Éléments de parangonnage
sur le retraitement des DMUU en Europe
1 LE RETRAITEMENT DES DMUU DANS LES NEUF ÉTATS MEMBRES DE L?UE PRESENTE DES
CARACTERISTIQUES DIFFERENTES ............................................................................................. 69
1.1 À FIN OCTOBRE 2023, NEUF ÉTATS MEMBRES ONT AUTORISE LE RETRAITEMENT DES DMUU TANDIS
QUE QUINZE L?ONT INTERDIT .......................................................................................................... 69
1.2 LES MODALITES D?APPLICATION DE L?ARTICLE 17 DU RMD SONT DIFFICILES A APPRECIER ET
GLOBALEMENT HETEROGENES ........................................................................................................ 69
2 FOCUS SUR LA SUEDE, L?ESPAGNE ET LE ROYAUME-UNI A PARTIR DES RETOURS DES
CONSEILLERS AUX AFFAIRES SOCIALES .................................................................................... 71
2.1 HISTORIQUE ET CADRE DU RETRAITEMENT DES DMUU .................................................................. 71
2.2 CRITERES ECONOMIQUES ET ECOLOGIQUES .................................................................................... 72
2.2.1 Critères économiques ....................................................................................................................72
2.2.2 Critères écologiques ......................................................................................................................72
2.3 PERIMETRE DES DMUU ELIGIBLES AU RETRAITEMENT ...................................................................... 73
2.4 ORGANISATION DU RETRAITEMENT ................................................................................................ 75
2.4.1 Espagne ............................................................................................................................................75
2.4.2 Royaume Uni ...................................................................................................................................76
2.4.3 Suède ...............................................................................................................................................77
2.5 FILIERES DE RETRAITEMENT ............................................................................................................. 77
2.6 TRAÇABILITE DES DMUU ............................................................................................................... 77
2.7 INFORMATION DES PATIENTS .......................................................................................................... 78
3 LE RETRAITEMENT DES DMUU EST AUSSI DEVELOPPE EN AMERIQUE DU NORD,
PARTICULIEREMENT AUX USA ..................................................................................................... 79
3.1 ÉTATS-UNIS ................................................................................................................................... 79
3.2 CANADA ........................................................................................................................................ 80
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[86] Cette annexe propose des éléments de parangonnage sur le retraitement des DMUU
dans les États membres de l?Union européenne (UE), avec quelques éclairages sur des pays hors
UE (Grande-Bretagne, États-Unis). Elle se fonde sur des informations recueillies en ligne et, via
une enquête diligentée par la mission, auprès des Conseillers aux affaires sociales de trois pays
(Suède, Espagne, Allemagne).
[87] Pour mémoire (cf. Annexe I), le retraitement des Dispositifs médicaux à usage unique
(DMUU) est encadré au niveau européen par le Règlement 2017/745 du 5 avril 2017 complété
par le Règlement d?exécution 2020/1207 du 19 août 2020 qui précise les spécifications
communes à respecter en dehors du marquage CE. L?article 17 du Règlement 2017/745 (dit
RMD) précise que « le retraitement et la réutilisation de dispositifs à usage unique ne peuvent
avoir lieu que s'ils sont autorisés par la législation nationale et uniquement conformément au
présent article ». L?article 17 fixe donc un cadre a minima qui peut être adapté par les États
membres. Ainsi, "un État membre qui autorise le retraitement de dispositifs à usage unique peut
maintenir ou introduire des dispositions nationales plus strictes que celles prévues par le présent
règlement et qui restreignent ou interdisent sur son territoire ». Ces dispositions doivent en
principe être notifiées à la Commission européenne.
[88] Dans le cadre de son échange avec un représentant de l?unité D3 en charge des DM à la
Commission européenne, la mission a constaté que cette dernière disposait d?informations
très limitées sur la mise en oeuvre de l?article 17 du RMD au sein de l?UE. Si la Commission
recense les législations nationales qui autorisent ou interdisent le retraitement, elle n?est pas
en mesure d?apprécier le périmètre des DMUU retraités, le mode de retraitement choisi (en
établissement de santé ou par une entreprise externe, dans le cadre du marquage CE ou des
spécifications communes) ou encore le volume de DMUU retraités par rapport au total des
DMUU utilisés. En revanche, l?article 17 du RMD prévoit l?élaboration d?un rapport sur son
exécution qui devra être établi avant le 27 mai 2024 et remis au Parlement européen et au
Conseil. Ce rapport, confié à un prestataire sélectionné par la Commission, est en cours
d?élaboration. Il pourrait déboucher sur des propositions d?évolution de l?article 17 du RMD.
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1 Le retraitement des DMUU dans les neuf États membres de
l?UE présente des caractéristiques différentes
1.1 À fin octobre 2023, neuf États membres ont autorisé le retraitement
des DMUU tandis que quinze l?ont interdit
[89] La carte ci-dessous synthétise le choix des États membres sur le retraitement des DMUU.
Carte 2 : Position des États sur le retraitement des DMUU à fin octobre 2023
Source : Mission.
1.2 Les modalités d?application de l?article 17 du RMD sont difficiles à
apprécier et globalement hétérogènes
[90] Le tableau ci-dessous synthétise les modalités de mise en oeuvre du retraitement prévues
par le droit national dans les neuf États qui ont autorisé le retraitement. Il en ressort les constats
suivants :
? si tous les pays ont ouvert le retraitement aux établissements de santé, seuls l?Irlande et
les Pays-Bas imposent un marquage CE aux établissements de santé souhaitant retraiter
les DMUU ;
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? trois États (Croatie, Suède et Slovénie) interdisent le retraitement sur leur territoire aux
entreprises en dehors d?un contexte de sous-traitance ;
? un pays, l?Espagne, impose que l?entreprise qui à laquelle est sous-traité le retraitement
des DMUU ait son siège social en Espagne ;
? en ce qui concerne le périmètre des DMUU éligibles au retraitement, aucun pays n?a
établi de liste positive des DMUU pouvant être retraités mais certains pays comme la
Belgique et l?Espagne, ont exclu les DM répondant aux critères listés par le Règlement
d?exécution de 2020 ; d?autres États, comme l?Irlande, et les Pays Bas, n?excluent aucun
DM, et délèguent aux établissements de santé l?appréciation du risque de retraiter un
DMUU.
Tableau 16 : Modalités d?application de l?article 17 du RMD par pays qui autorise le
retraitement
Pays Par une
entreprise
externe avec
marquage CE
En
établissement
de santé
Par une
entreprise
externe avec
spécifications
communes
Restrictions au
périmètre des
DMUU éligibles
Information
obligatoire
du patient
Belgique Autorisé Autorisé Autorisé Oui Oui
Croatie Non autorisé Autorisé Autorisé Oui Non
Allemagne Autorisé Autorisé Autorisé Non Non
Irlande Autorisé Non autorisé Non autorisé Non Non
Pays-Bas Autorisé Non autorisé Non autorisé Non Non
Suède Non autorisé Autorisé Autorisé Oui Non
Portugal Autorisé Autorisé Autorisé Non Oui88
Espagne Autorisé Autorisé Autorisé Non Oui
Slovénie89 Non autorisé Autorisé Autorisé NC Oui
Source : Mission à partir des données transmises par les conseillers des affaires sociales et mises
en ligne par la Commission européenne.
88 Les établissements de santé informent les professionnels de santé et leurs patients de l?utilisation des
dispositifs médicaux à usage unique retraités et de toute autre information pertinente à leur sujet, et le
comité d?éthique de l?entité responsable concerné doit être impliqué.
89 En cours d?élaboration.
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2 Focus sur la Suède, l?Espagne et le Royaume-Uni à partir des
retours des Conseillers aux affaires sociales
[91] Afin d?objectiver les pratiques de certains États et pour compléter les informations
disponibles sur les sites internet des agences sanitaires et de la Commission Européenne, une
enquête a été menée auprès des Conseillers pour les affaires sociales (CAS) au cours du mois
d?octobre 2023.
[92] La mission a fait le choix de ces trois pays car chacun a autorisé le retraitement des
DMUU. Le Royaume-Uni ne faisant plus partie de l?Union Européenne, il n?est cependant plus
soumis aux règles de l?article 17 du RMD.
2.1 Historique et cadre du retraitement des DMUU
[93] En l?Espagne, l?adoption récente (21 mars 2023) du décret 192/2023 autorisant le
retraitement des DMUU ne permet pas d?avoir suffisamment de recul sur l?application de ses
dispositions, d?autant que celles-ci requièrent la publication d?une « Résolution » du ministère
de la santé, qui précisera les modalités d?application du texte. C?est l?AEMPS, Agence espagnole
du médicament et des produits de santé, qui est acteur-clé dans la mise en oeuvre du décret.
[94] Au Royaume Uni, les pratiques autorisées en matière de re-fabrication et recyclage des
dispositifs médicaux à usage unique sont encadrées par l?Agence de régulation des soins
médicaux (« Medicines & Healthcare products Regulatory Agency » -MHRA). Cette agence
exécutive auprès du ministère de la santé, équivalent de l?ANSM Française, est en charge de la
réglementation des médicaments, les dispositifs médicaux et les composants sanguins destinés
à la transfusion. Ses avis, dont celui relatif au retraitement des dispositifs médicaux à usage
unique, ont donc une portée juridique contraignante. Cette pratique est autorisée depuis 2016
suite à la publication d?un guide : « Single Use Medical Devices : UK Guidance on re-
manufacturing ».
[95] En Suède, la procédure de retraitement est fixée par le règlement d?exécution 2020/2027
de la Commission portant modalités d?application du règlement (UE) 2017/745 du Parlement
européen et du Conseil en ce qui concerne les spécifications communes pour le retraitement
des dispositifs à usage unique. Les autorités responsables du contrôle et de la régulation de ces
produits sont l?Agence du médicament, Läkemedelsverket, et l?inspection pour les soins et le
bien-être, Inspektion för vård och omsorg, IVO90.
90 Nya föreskrifter om reprocessares och externa reprocessares skyldighet att lämna uppgifter om sin
verksamhet och sin produkt | IVO.se.
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2.2 Critères économiques et écologiques
2.2.1 Critères économiques
[96] L?Espagne estime que l?impact économique est limité mais reste positif pour l?économie
en général. En permettant le retraitement de produits à usage unique, l?offre de produits à des
prix plus abordables se développera, influençant directement les dépenses de santé. En outre,
permettre le retraitement augmentera l?offre de produits à des prix plus abordables, ce qui
pourra développer la concurrence, en plus d?impacter directement les dépenses de santé.
Lorsque l?activité de retraitement est réalisée par des fabricants, tant le règlement (UE)
2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 que le projet de décret
imposeront les mêmes exigences à ces « fabricants-retraiteurs » qu?aux fabricants du produit
original, favorisant ainsi la concurrence de deux opérateurs économiques dans des conditions
d'égalité sur le marché, sans imposer de restrictions d'accès inégales ni limiter la libre
concurrence.
[97] La Suède a quant à elle réalisé des évaluations de l?impact économique du retraitement
des cathéters d?électrophysiologie. Ainsi, selon les calculs du conseil pour la santé et le bien-
être, Socialstyrelsen, qui a été chargé d?évaluer les modalités de mise en oeuvre des dispositions
relatives au retraitement des DMUU en Suède, la réutilisation systématique des cathéters
d?électrophysiologie pourrait permettre d?économiser entre 65 et 70 millions de couronnes (de
5,54 à 5,97 millions d?¤).
2.2.2 Critères écologiques
[98] Seul le Royaume Uni a inscrit dans le Plan Green NHS l?objectif de retraitement des
DMUU dans les établissements de santé.
[99] En Suède, la question écologique n?est que peu abordée par les administrations chargées
de la mise en oeuvre des dispositions relatives au retraitement des DMUU. Dans son rapport de
2020 sur les conditions techniques de mise en oeuvre du retraitement des DMUU, le conseil de
la santé et du bien-être, Socialstyrelsen, évoque néanmoins le fait que le retraitement des
DMUU s?insère dans les objectifs de préservation de l?environnement de l?Agenda 2030. À ces
arguments, les organisations professionnelles, opposées à la réutilisation des DMUU, répondent
que les processus de retraitement sont coûteux et ont également un impact sur
l?environnement. Elles soulignent également que le montant des compensations financières
liées aux accidents médicaux causés par des DMUU mal retraités peut être très élevé, et que
des DMUU mal retraités peuvent contribuer à augmenter l?antibiorésistance. Des organisations
de médecins rétorquent à ces arguments que la réutilisation de certains dispositifs, comme les
cathéters, se fait depuis des années sans problème. Ils soulignent par exemple que 60 000
procédures d?ablation par cathéter ont été enregistrées sur la période 2005-2019 sans
complications liées à la réutilisation des produits selon le registre suédois de l?ablation par
cathéter.
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Espagne Royaume Uni Suède
Pas d?analyse des impacts
écologiques à ce stade
disponible
Le retraitement des DMUU
s?inscrit dans l?engagement
gouvernemental en 2019 à
atteindre un objectif "zéro
carbone" d'ici à 2050
nécessitant une réduction
significative des émissions dans
tous les secteurs, et notamment
celui de la santé91. Dans ce
contexte, en 2020 a été lancé un
plan Green NHS. Ce travail, qui
a consisté en une consultation
nationale auprès des patients et
du personnel, a abouti à la
publication d?un rapport,
intitulé " Mettre en place un
service national de santé zéro
émissions net ». Le plan Green
NHS inclut notamment
l?objectif de réduction des
déchets des hôpitaux, et
l?investissement dans des
programmes de recyclage
Dans son rapport de 2020 sur
les conditions techniques de
mise en oeuvre du retraitement
des DMUU, le conseil de la
santé et du bien-être,
Socialstyrelsen, évoque le fait
que le retraitement des DMUU
s?insère dans les objectifs de
préservation de
l?environnement de l?Agenda
2030
Source : Mission à partir des données transmises par les CAS.
2.3 Périmètre des DMUU éligibles au retraitement
[100] Aucun des trois pays interrogés n?a établi de liste de DMUU autorisés au retraitement.
Le principe guidant la possibilité de retraiter est l?étude des risques du DMUU initial, et la
capacité d?un organisme réalisant le retraitement à démontrer la conformé du DMUU retraité
aux exigences essentielles (marquage CE ou respect des recommandations spécifiques).
Espagne Royaume Uni Suède
Aucun DMUU n?est
actuellement retraité. En effet,
le décret du 21 mars 2023
implique l?adoption de mesures
d?application techniques. Il
convient en outre que les
entités effectuant ce
Il n?existe pas de liste de DMUU
autorisés à être retraités. Les re-
fabricants sont autorisés à
retraiter les DMUU dont ils
arrivent à démontrer la
conformité aux exigences de la
Il n?existe pas de liste de DMUU
autorisés à être retraités.
La Suède suit les classifications
de l?Union européenne et ne
dresse pas de liste exhaustive
91 Le système de santé britannique (NHS) est ainsi l'un des principaux émetteurs de dioxyde de carbone
au Royaume-Uni avec 5,4 % des émissions totales de carbone et 40 % de l'ensemble des émissions du
secteur public (NHS).
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retraitement disposent
préalablement d?une
autorisation d?activité
directive sur les dispositifs
médicaux.
Un organisme certifiant est
également en charge de vérifier
que le DMUU reconditionné
réponde clairement à tous les
critères appropriés de la
directive britannique sur les
dispositifs médicaux en termes
de performance et de sécurité ;
il doit confirmer la validité et la
certitude de tous les processus
de fabrication (processus de
conception le cas échéant), et
doit s?assurer qu'ils répondent
aux exigences réglementaires
avant et après la mise sur le
marché. Par ailleurs, il est établi
une différence entre
refabrication et
transformation/remise à neuf :
la législation britannique
autorise la re-fabrication (re-
manufactured SUD), mais pas la
transformation / remise à neuf
des DMUU (« devices which are
reprocessed or fully
refurbished »)
des DMUU pouvant faire l?objet
d?un retraitement
Pour évaluer si un DMUU se
prête au retraitement, la
gestion des risques doit tenir
compte : des risques liés à la
composition des matériaux, aux
matériaux relargables, à la
contamination
microbiologique, aux prions et
aux agents de
l?encéphalopathie spongiforme
transmissible, aux endotoxines,
ainsi qu?aux réactions
pyrogènes, allergiques et
toxiques ; et des
caractéristiques techniques et
les propriétés géométriques des
produits.
Source : Mission à partir des données transmises par les CAS.
[101] Les DMUU exclus du retraitement sont ceux qui au cours des études de risques n?ont pas
montré leur capacité tant sur le plan technique que sécuritaire.
[102] Concernant la justification de la limitation des produits ce sont ceux énumérés par le
règlement d'exécution (UE) 2020/1207 de la Commission du 19 août 2020, définit comme
produits ne pouvant pas être retraités.
[103] L?Espagne a jouté à cette liste les DMUU sur-mesure et ceux de classe I. Pour ces derniers,
à ce jour, aucun organisme notifié n'intervient dans l'évaluation de la conformité. Il s'agit de
produits autocertifiés par le fabricant lui-même. C'est pour cela que, sur la base des risques
découlant de leur retraitement et d'une nouvelle autocertification, le décret exclut le
retraitement de tous les produits à usage unique de classe I. Concernant les produits sur
mesure, bien qu?ils soient fabriqués sur mesure et qu'aucun retraitement éventuel ne soit
prévu, ils sont repris dans la liste afin que toute possibilité de retraitement soit expressément
interdite.
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[104] La Suède a néanmoins étudié des classes de DMUU qui pourraient être retraitées, il s?agit
des DMUU utilisés dans les secteurs de la néphrologie (notamment la dialyse), la cardiologie,
l?orthopédie, la laparoscopie, l?endoscopie, l?urologie et la gynécologie, ainsi que
l?anesthésiologie92 .
Espagne Royaume Uni Suède
L?article 11 du décret 192/2023 du 21 mars
2023 fixe, dans son 2ème paragraphe la liste
des produits exclus, ne pouvant être ni
retraités ni utilisés. Il s?agit de ceux définis
par la règlementation européenne.
L?Espagne a ajouté deux DMUU à cette liste,
les DMUU sur-mesure et les DMUU de classe I
Il n?existe pas de liste
d?exclusion
Il s?agit de ceux définis
par la règlementation
européenne
Source : Mission à partir des données transmises par les CAS.
2.4 Organisation du retraitement
2.4.1 Espagne
[105] Le décret fixe, la liste des acteurs susceptibles d?effectuer des activités de retraitement,
sous réserve de certaines conditions, propres à chaque acteur. Il définit ainsi trois acteurs du
retraitement :
? les fabricants de produits retraités ;
? les hôpitaux ;
? les entreprises de retraitement externes, qui retraitent des DMUU à la demande d?un
hôpital.
[106] Pour conduire cette activité, les fabricants de produits retraités et les hôpitaux doivent
être titulaires d?une autorisation spécifique préalable, délivrée par l?AEMPS.
[107] L?Espagne précise également les conditions d?activité :
? les fabricants de produits retraités [titulaires d?une autorisation délivrée par l?AEMPS] ne
peuvent distribuer directement leurs produits retraités qu?à un hôpital. Ils ne peuvent
commercialiser en Espagne que les DMUU retraités pour lesquels ils ont réalisé eux-
mêmes l?ensemble du cycle de retraitement ;
? pour ce faire, un contrat écrit doit être signé entre le fabricant et l?hôpital, définissant
les responsabilités de chaque partie s?agissant des conditions d?utilisation et de stockage
des unités utilisées, des conditions de retour, de destruction, de surveillance et de
92 Förutsättningar för att reprocessa och återanvända medicintekniska engångsprodukter i Sverige
(socialstyrelsen.se).
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traçabilité des produits. L?hôpital doit retourner le produit retraité, une fois utilisé, au
fabricant qui le lui a remis. Le fabricant doit s?assurer de la destruction du produit retraité
lors que celui-ci arrive au terme du cycle de retraitement ou au terme de sa vie utile ou
quand il ne peut plus assurer que le fonctionnement et la sécurité du produit retraité
sont conformes au produit d?origine ;
? toutefois, les hôpitaux peuvent effectuer cette destruction, si cela figure dans le contrat
avec le fabricant. Les fabricants de produits retraités doivent communiquer au Registre
de commercialisation toutes les informations définies dans le décret, créant ledit
registre. [titulaires d?une autorisation délivrée par l?AEMPS].
[108] En outre l?Espagne précise que ne peuvent être retraités que les DMUU qui ont été utilisés
et retraités dans leurs propres services ou par une entreprise de retraitement externe. Ils ne
peuvent pas vendre ou délivrer les produits retraités à des tiers. Les hôpitaux peuvent sous-
traiter l?activité de retraitement à une entreprise externe de retraitement. Un organisme notifié
certifiera que l?hôpital remplit les conditions fixées par le règlement UE d?exécution
2020/1207.Les audits annuels prévus par ce même règlement doivent être effectués par des
organismes accrédités et les hôpitaux doivent remplir les conditions fixées à l?article 23 du
règlement.
[109] De plus, l?Espagne impose que les entreprises externes de retraitement aient leur siège
social et un établissement en Espagne. Elles ne peuvent pas sous-traiter les activités de
retraitement. Elles doivent respecter les dispositions de l?article 17§3 du règlement UE 2017/745
et de son règlement d?exécution et doivent s?assurer que l?hôpital avec lequel elles traitent
remplit bien les conditions fixées par le décret. Enfin, « il n?est pas permis d?acheter et d?utiliser,
en Espagne, des DMUU qui auraient été envoyés vers un pays tiers pour y être retraités. »
2.4.2 Royaume Uni
[110] Selon l?avis du MHRA, le retraitement doit être assuré par des « re-fabricants »
indépendants extérieurs aux établissements de santé. Ils garantissent la mise à disposition des
bacs de recyclage, leur collecte, et le recyclage des DMUU (déchiquetage, fonte et
transformation en nouveaux produits).
[111] Les entreprises de retraitement ont la responsabilité de déterminer le nombre maximal
de cycles de retraitement auxquels le dispositif peut être soumis tout en conservant l'ensemble
des paramètres de fonctionnalité, de performance et de sécurité du dispositif, et en assurent
le suivi. Le re-fabricant accepte également toutes les responsabilités et obligations liées au
retraitement du DMUU, notamment les documents techniques, la décontamination, le
nettoyage, la stérilisation et charge biologique, l?étiquetage, la gestion des risques, et la
surveillance après la mise sur le marché.
[112] Les dispositifs retraités doivent être fournis aux établissements de santé dans le cadre de
contrats en circuit fermé, ce qui signifie qu?en aucun cas un établissement de santé ou un re-
fabricant ne doit vendre ou fournir un DMUU retraité à une tierce partie. De même, un
établissement de santé doit avoir des contrats avec différents re-fabricants pour différents
DMUU.
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2.4.3 Suède
[113] Les établissements de santé, conjointement, le cas échéant, avec les entreprises de
retraitement externes, sont responsables de la sécurité et des performances du dispositif
retraité. Il convient donc que les établissements de santé et les entreprises de retraitement
externes disposent d?un système de gestion de la qualité garantissant le respect des exigences
applicables.
[114] Les exigences qui s?appliquent aux acteurs de la filière du retraitement sont en large
partie les mêmes que celles qui s?appliquent aux fabricants. Ainsi, le respect des spécifications
communes aux DMUU doit être certifié par un organisme notifié.
[115] Les établissements de santé et les entreprises de retraitement externes dont les activités
incluent des soins de santé doivent soumettre les informations sur leurs activités et les produits
ayant fait l?objet du retraitement à l?Inspection des soins (IVO) pour enregistrement. Depuis le
1er juillet 2023, IVO a créé un registre des DMUU ayant fait l?objet d?un retraitement93.
2.5 Filières de retraitement
[116] Les pays interrogés ne disposent pas de filière de retraitement. En ce qui concerne la
Suède, aucune filière n?a été précisée par le CAS, et la mission, n?en a pas eue connaissance.
Les seules filières connues sont localisées en Allemagne et sont au nombre de trois. Le Royaume
Uni retraite ses DMUU en Allemagne.
Espagne Royaume Uni Suède
Pas de filière de retraitement
des DMUU mais des entreprises
qui stérilisent pour le compte
d?établissement de santé
Pas de filière de retraitement
mais des entreprises qui
recyclent le PVC présents dans
les DMUU (canules nasales,
tubes à oxygène, masques
d'anesthésie et masques à
oxygène)
Peu d?informations sur les
acteurs privés présents sur le
marché du retraitement des
DMUU
Source : Mission à partir des données transmises par les CAS.
2.6 Traçabilité des DMUU
[117] Les réponses apportées par les pays interrogés apportent peu de renseignement sur la
traçabilité mise en place en interne à l?établissement de santé, c?est-à-dire la traçabilité
sanitaire dans le cadre de la matériovigilance (décret du 29 novembre 2006). Cette traçabilité
doit permettre de pouvoir identifier rapidement les patients pour lesquels les dispositifs
médicaux d'un lot ont été utilisés ou les lots de dispositifs médicaux utilisés chez un patient.
93 Nytt IVO-register för reprocessare | IVO.se
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Or les réponses apportées portent sur la traçabilité mise en place par l?entreprise de
retraitement.
[118] Seule la Suède précise qu?un système permettant de retrouver le patient chez qui un
DMUU a été utilisé a été mis en place.
Espagne Royaume Uni Suède
Traçabilité du nombre de cycle
La traçabilité est organisée
conformément aux dispositions
du Règlement d?exécution
2020/1207. Les DMUU retraités
ne pouvant être utilisés que
dans des hôpitaux. L?AEMPS
indique qu?un texte
d?application du ministère de la
santé, à venir, apportera des
précisions
Traçabilité du nombre de cycle
Selon l?avis de la Medical Health
care Regulatory Agency, le
système de traçabilité est assuré
par les entreprises de
retraitement, grâce à des
contrats en circuit fermé.
L?existence d?un seul contrat
pour chaque DMUU permet une
mise en relation unique entre un
établissement de santé et une
entreprise de retraitement
Traçabilité sanitaire
En vue de garantir la sécurité et
les performances des DMUU
retraités, chaque établissement
de santé utilisant des DMUU qui
ont été retraités par
l?établissement de santé lui-
même ou par une entreprise de
retraitement externe à la
demande de cet établissement
de santé devrait mettre en place
un système lui permettant de
collecter des informations sur
les incidents survenant en
rapport avec ces dispositifs et
devrait notifier les incidents
graves à l?autorité compétente
Le fabricant et, le cas échéant,
l?entreprise de retraitement
externe doivent également être
informés des incidents graves
Source : Mission à partir des données transmises par les CAS.
2.7 Information des patients
[119] Seule l?Espagne a inscrit dans sa règlementation l?obligation d?information des patients.
Au Royaume-Uni et en Suède, cette information n?est pas prévue. Néanmoins, elle reste en
débat en Suède. C?est en effet un élément de réflexion éthique soulevé par l?industrie des
produits de santé, s?appuyant sur la loi sur les patients qui prévoit qu?ils doivent pouvoir être
informés des techniques de soins utilisées dans le cadre de leur prise de charge.
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Espagne Royaume Uni Suède
L?article 15 du décret précise
que les hôpitaux doivent
informer leurs patients de
l?utilisation, dans leurs services,
de produits retraités par leur
propre centre hospitalie
L?AEMPS indique qu?un texte
d?application du ministère de la
santé, à venir, apportera des
précisions
L?avis de la Medical Health care
Regulatory Agency ne prévoit
pas l?information des patients
de l?utilisation d?un DMUU
retraité
Il n?existe à ce jour pas de
dispositions spécifiques sur le
droit des patients à être
informés qu?un DMUU retraité
est utilisé dans le cadre de leur
prise en charge
Source : Mission à partir des données transmises par les CAS.
3 Le retraitement des DMUU est aussi développé en
Amérique du Nord, particulièrement aux USA
3.1 États-Unis
[120] Avant les années 2000, le retraitement des DMUU était largement répandu mais sans
réglementation. C?est au cours de cette décennie que la « Food and Drug Administration »
(FDA) a commencé à travailler à l?encadrement de cette pratique, qui a pris forme par la
publication d?un avis favorable en 2008 de la FDA94. Cet avis précise qu?un DM peut être
étiqueté comme étant à usage unique parce que le fabricant estime qu?il ne peut pas être
utilisé plus d?une fois de manière sure et fiable ou parce que le fabricant choisit de ne pas
mener les études nécessaires pour démontrer que le DM peut être réutilisable.
[121] La FDA publie une liste de DMUU qui peuvent être réutilisés, et se fonde sur des études
menées par les fabricants portant notamment sur l?efficacité des méthodes de nettoyage, de
stérilisation et de performances. La stérilisation est l?élément discriminant du process, en effet,
tous les établissements de santé ne peuvent pas mettre en place les niveaux d?exigences décrits
par les industriels et se tournent vers un tiers sous-traitant.
[122] D?après les chiffres disponibles sur le site de l?AMDR (« Association of Medical Device
Reprocessor) », plus de 9 000 établissements de santé (hôpitaux et centres de chirurgie)
utiliseraient des DMUU retraités.
[123] La mission a échangé avec un acteur américain qui envisage de s?implanter sur le
territoire européen.
94 Government accountability office (GAO) ?Reprocessing Single-use Medical devices: FDA oversight has
increased, and available information does note indicate that use presents and elevated health risk?, 2008.
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3.2 Canada
[124] Comme en Europe, trois provinces ont interdit le retraitement des DMUU dits
« critiques95 » mais d?autres ont autorisé ce retraitement sous réserve que les hôpitaux
recourent à une entreprise agréée qui devra répondre aux mêmes exigences que celles
imposées aux fabricants de DMUU neufs.
95 Un dispositif est dit « critique » s?il pénètre dans les tissus stériles de l?organisme notamment l?appareil
vasculaire et qui par conséquent nécessite un nettoyage suivi d?une stérilisation (INSPQ 201)
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ANNEXE 4 : Leviers de réduction de
l?empreinte écologique des dispositifs
médicaux
1 LE RETRAITEMENT DES DM A USAGE UNIQUE EST LE LEVIER DE DECARBONATION MIS EN
EXERGUE PAR LA FEUILLE DE ROUTE « PLANIFICATION ECOLOGIQUE » DU MINISTERE DE
LA SANTE ................................................................................................................................................ 83
1.1 SI LES ETUDES FRANÇAISES SUR L?EMPREINTE ECOLOGIQUE DES DM SONT RARES, ILS REPRESENTERAIENT
20 % DES EMISSIONS CARBONE DU SYSTEME DE SANTE ...................................................................... 83
1.1.1 L?évaluation de l?empreinte écologique des DM repose sur plusieurs méthodes sans
encadrement par le ministère de la santé ....................................................................................... 83
1.1.2 L?empreinte écologique des DM s?explique surtout par le circuit de production de leurs intrants
qui incluent souvent des métaux rares ............................................................................................ 84
1.2 LE RETRAITEMENT DES DM PEUT CONTRIBUER A REDUIRE LEUR EMPREINTE ECOLOGIQUE MAIS N?EST PAS
LE LEVIER LE PLUS IMPACTANT ............................................................................................................. 88
1.2.1 La feuille de route recense plusieurs leviers de décarbonation des DM en accordant une
visibilité particulière à leur retraitement ......................................................................................... 88
1.2.2 La primauté accordée à ce levier est excessive au regard de son impact relatif sur l?empreinte
écologique et de ses modalités de mise en oeuvre......................................................................... 90
2 LA GOUVERNANCE ET LES MOYENS ALLOUES A LA PLANIFICATION ECOLOGIQUE DU
SYSTEME DE SANTE NE SONT PAS A LA HAUTEUR DE L?ENJEU DE DECARBONATION DES
DM ............................................................................................................................................................ 94
2.1 LA FAIBLESSE DU PILOTAGE NATIONAL DE CETTE STRATEGIE ENGENDRE UN RISQUE DE DECALAGE
CROISSANT AVEC LES INITIATIVES CONSTATEES A L?HOPITAL .............................................................. 94
2.1.1 L?Anap assume un rôle d?opérateur de la feuille de route mais son portage reste fragile au sein
de l?administration centrale et déconcentrée ................................................................................ 94
2.1.2 Or les initiatives se développent dans une partie des établissements de santé sans
accompagnement suffisant de la part de l?État .............................................................................. 95
2.2 LA MISE EN OEUVRE D?UNE STRATEGIE CREDIBLE DE REDUCTION DE L?EMPREINTE ECOLOGIQUE DES DM
EXIGE AUSSI UNE COLLABORATION INTERMINISTERIELLE RENFORCEE ................................................... 97
2.2.1 Dans une logique de subsidiarité, le soutien des administrations en charge de la transition
écologique à la décarbonation du système est modeste .............................................................. 97
2.2.2 La DGE assume un leadership fondé sur le double objectif de relocalisation des industries de
santé et de décarbonation................................................................................................................. 98
3 EN PARALLELE DE L?EXPERIMENTATION, LA MISE EN OEUVRE DES AUTRES LEVIERS DE
REDUCTION DE L?EMPREINTE ECOLOGIQUE DES DM EST INDISPENSABLE ET NECESSITE
UN APPUI NATIONAL RENFORCE .................................................................................................... 99
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3.1 CONFORMEMENT AUX DISPOSITIONS INTERMINISTERIELLES, LES ACHATS HOSPITALIERS, QUI
CONSTITUENT UN LEVIER MAJEUR, DOIVENT CONTRIBUER DAVANTAGE A LA REDUCTION DE
L?EMPREINTE ECOLOGIQUE DES DM .................................................................................................... 99
3.1.1 En dépit d?obligations croissantes, le levier des achats reste encore sous-utilisé par les hôpitaux
pour diminuer leur empreinte environnementale .......................................................................... 99
3.1.2 À l?exemple du système de santé britannique, les achats hospitaliers devraient constituer le
principal levier de décarbonation des DM ..................................................................................... 102
3.2 LE RETRAITEMENT DES DM A USAGE UNIQUE, QUI SONT DEFINIS COMME TELS PAR LES SEULS
INDUSTRIELS, DOIT AUSSI S?ACCOMPAGNER DU DEVELOPPEMENT DES DM A USAGE MULTIPLE ........... 104
3.2.1 L?évolution de la part respective des DM à usage unique et des DM à usage multiple ne fait
l?objet d?aucun suivi au niveau national .......................................................................................... 104
3.2.2 Le développement de l?usage multiple est souvent conditionné dans les établissements de
santé à une organisation et des moyens adaptés .......................................................................... 106
3.3 LA FORMATION DES PERSONNELS HOSPITALIERS DOIT CONTRIBUER EN PARTICULIER A FAIRE CONVERGER
DAVANTAGE LES DEMARCHES DE PERTINENCE ET DE SOBRIETE DES SOINS ......................................... 108
3.3.1 Le développement de l?éco-responsabilité en matière de soins peut contribuer à renforcer
l?efficience du système de santé ...................................................................................................... 108
3.3.2 La sensibilisation des personnels hospitaliers aux enjeux liés à la transition écologique dépend
encore largement des directions d?établissement ........................................................................ 109
3.4 ENFIN, LE TRI ET LA REVALORISATION DES DECHETS ISSUS DES DM, QUI DEPENDENT AUJOURD?HUI
LARGEMENT DES DECISIONS LOCALES, DOIVENT FAIRE L?OBJET D?UNE STRATEGIE NATIONALE ........... 109
3.4.1 Les établissements de santé sont soumis à des obligations croissantes en matière de gestion
des déchets, en partie communes au secteur tertiaire ................................................................ 109
3.4.2 Les établissements de santé sont peu incités et accompagnés dans la réduction et la
valorisation des déchets, en particulier ceux issus des DM .......................................................... 110
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1 Le retraitement des DM à usage unique est le levier de
décarbonation mis en exergue par la feuille de route
« planification écologique » du ministère de la santé
1.1 Si les études françaises sur l?empreinte écologique des DM sont rares,
ils représenteraient 20 % des émissions carbone du système de santé
1.1.1 L?évaluation de l?empreinte écologique des DM repose sur plusieurs
méthodes sans encadrement par le ministère de la santé
[125] L?empreinte écologique des dispositifs médicaux (DM) en France est difficile à
appréhender :
? cette donnée, qui est plus englobante que la seule empreinte carbone avec laquelle elle
tend à être confondue, est issu d?un calcul fondé sur la méthode de l?Analyse du cycle de
vie (ACV)96 permettant d?apprécier les différentes catégories d?impact sur l?environnement
(changement climatique, toxicité de eau, épuisement des ressources?) d?une activité ;
? l?ACV, comme le calcul de l?empreinte carbone, font partie de la vingtaine de méthodes
recensées en 2021 par l?Ademe pour apprécier les impacts environnementaux : si ces
méthodes font l?objet de différents standards nationaux ou internationaux, dont des
normes Iso, elles restent complexes à mobiliser et dépendantes de l?objectif recherché ;
? les acteurs du champ de la santé sont globalement peu familiers de ces méthodes dont la
mise en oeuvre tend à être externalisée auprès de prestataires ou de chercheurs, sans qu?ils
disposent toujours de la capacité à apprécier la robustesse des résultats obtenus ;
? concernant plus particulièrement les produits de santé, en particulier les DM, l?évaluation
de leur empreinte écologique suppose en outre d?obtenir des fabricants des informations
(ex : nature exacte des intrants, mode de fabrication, mode d?acheminement vers les lieux
d?assemblage, etc.) dont le recueil est complexifié par le caractère le plus souvent sous-
traité et internationalisé du circuit de production.
96 L?empreinte carbone traduit le volume des émissions directes et indirectes de gaz à effets de serre émises
sur un périmètre donné (une activité, un produit, un établissement, etc.). La capacité de chaque gaz à
renvoyer de l?énergie vers le sol est évalué comparativement au CO2. L?empreinte carbone s?exprime en
tonnes ou kilos d?équivalent CO2. L?empreinte écologique mesure plus globalement la pression qu?exerce
l?activité humaine sur les ressources et les écosystèmes. L?ACV recense et quantifie, tout au long de la vie
d?un produit, les flux physiques de matière et d?énergie associés aux activités humaines. Les résultats sont
ensuite traduits en une quinzaine de catégories d?impact (ex : changement climatique, destruction de la
couche d?ozone, toxicité humaine, acidification, écotoxicité, épuisement de la ressource, etc.). Voir ADEME,
O. RETHORE, C. HUGREL et M. PALLUAU, Bleu Safran, G. AUDARD et P. OSSET, Solinnen. 2020. Guide d?aide
à la sélection des méthodes d?évaluation environnementale.
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[126] Si la complexité des méthodes d?évaluation de l?empreinte écologique d?un DM est un
facteur à prendre en compte dans l?appréciation de l?intérêt du retraitement des DM à usage
unique, elle doit dans son ensemble être relativisée :
? quand il s?agit de comparer l?empreinte écologique de deux produits très similaires (un DM
à usage unique et un DM à usage multiple) , voire identiques (un DM à usage unique neuf et
un DM à usage unique retraité), elle impose une attention particulière sur les choix
méthodologiques effectués et le périmètre des données recueillies qui conditionnent la
robustesse des résultats ;
? en revanche, sur un plan plus macro, par exemple quand il s?agit d?apprécier l?empreinte
écologique des achats de produits de santé d?un établissement, ces biais méthodologiques
sont moins susceptibles de fausser les ordres de grandeur obtenus, qui permettent
d?identifier les principaux postes et étapes de production responsables en particulier des
émissions de carbone.
1.1.2 L?empreinte écologique des DM s?explique surtout par le circuit de
production de leurs intrants qui incluent souvent des métaux rares
[127] La mission a recensé un nombre limité d?études françaises sur l?empreinte écologique des
DM :
? il s?agit pour la plupart de travaux réalisés par des professionnels de santé, en particulier
pharmaciens, travaillant, souvent dans le cadre d?une thèse, en établissement de santé ;
? elles portent sur un périmètre encore étroit de dispositifs médicaux (lames laryngologiques,
dispositifs médicaux utilisés dans le cadre de l?accouchement par voie basse, ancillaires) ;
? elles mobilisent des méthodes assimilables à l?ACV, généralement réalisées en partie par des
prestataires, sans que la mission soit en mesure d?apprécier leur robustesse ;
? elles sont diffusées en ligne mais ne font pas l?objet d?une publication dans une revue
scientifique à comité de lecture ;
? aucune ne porte sur la comparaison entre l?empreinte environnementale d?un DM à usage
unique retraité par rapport à ce même DM à usage unique neuf.
[128] Si la mission n?a pas mené à proprement parler une revue de littérature sur l?empreinte
écologique des DM, elle a néanmoins recensé des études étrangères pertinentes :
? sept études, dont cinq sont publiées dans une revue à comité de lecture, portent
spécifiquement sur le retraitement des cathéters d?électrophysiologie (cf. infra) ;
? au-delà du sujet spécifique du retraitement, la plateforme HealthcareLCA permet d?accéder
à des publications sur l?empreinte environnementale de produits de santé ou d?actes de
soins (cf. exemple infra), classées à partir de différents critères (méthode utilisée, impact
environnemental analysé, postes d?émission pris en compte, etc.).
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Graphique 1 : Vue des publications sur l?empreinte environnementale de dispositifs
médicaux utilisés en urologie sur la plateforme HealthcareLCA
Source : Mission, recherche effectuée le 21 novembre 2023
[129] Les émissions de carbone des DM, estimées par le Shift Project97 à environ 10 tonnes de CO2
équivalent98, soit de l?ordre de 20 % du total des émissions du système de santé français99, sont
du point de vue des établissements de santé des émissions indirectes attribuables à leur circuit
de fabrication. En d?autres termes, les établissements de santé n?ont pas de leviers directs sur ces
émissions qui résultent des choix effectués par les fabricants sur les matières premières utilisées,
les lieux ainsi que les modes de fabrication (en particulier la source l?énergie utilisée). Comme le
montre le schéma 1 ci-dessous relatif à la composition d?un cathéter d?électrophysiologie, il est
possible, à partir des informations fournies par les fabricants, de décomposer l?empreinte carbone
d?un dispositif médical par composant (en l?espèce, l?empreinte carbone de ce DM s?explique
surtout par le recours, quoiqu? en très faible quantité, à des métaux précieux). Par ailleurs, le
97 The Shift Project se définit sur son site Internet comme « un think tank qui oeuvre en faveur d?une économie
libérée de la contrainte carbone ». L?association, créée en 2010, est présidée par Jean-Marc Jancovici. Elle
produit des études sur le lien entre économie et énergie.
98 Les données utilisées correspondent à l?année 2019 et sont celles du Snitem (le chiffre d?affaires des DM
consommés en France était selon le Snitem de 32,4 Md¤ hors taxes). Le chiffre d?affaires des DM importés a
ensuite isolé sur la base de données issues du Centre du commerce international. L?association a distingué
les montants des ventes des laboratoires produisant des DM en France. Ces dépenses ont ensuite été
converties en kgCO2e en appliquant le facteur d?émission défini par l?Ademe. Ce facteur d?émission permet
de convertir une donnée d?activité physique en une quantité d?émissions de gaz à effet de serre (GES).
L?ensemble des GES estimés sont rapportés à une unité commune, le CO2, d?où l?expression « équivalent »
CO2).
99 « Décarboner la santé pour soigner durablement », rapport final V2, avril 2023 (actualisation de la version
publiée en 2021). L?étude estime à 49 M de tonnes de CO2 équivalent l?empreinte carbone du secteur de la
santé. En raison de la marge d?incertitude inhérente à la méthode retenue, la part des émissions du secteur
de la santé représenterait entre 6,6 % et 10 % de l?empreinte carbone de la France.
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schéma 2 illustre le caractère très internationalisé de la chaîne d?approvisionnement d?un
cathéter d?électrophysiologie dont l?assemblage est réalisé en Amérique du Sud à partir d?intrants
provenant en particulier de Chine (semi-conducteurs) et d?Afrique du Sud (platine), tandis qu?il
est stérilisé en Californie avant d?être acheté par un CHU français. Enfin, le tableau 1, issu d?une
analyse de cycle de vie d?un cathéter réalisée par des chercheurs britanniques, montre que plus
de la moitié des émissions de carbone sont liées au processus de production, en particulier les
matières premières utilisées.
Schéma 6 : Composition d?un cathéter d?électrophysiologie (à gauche, le poids
respectif des principaux composants, à droite leur empreinte carbone)100
Source : Josselin Duchateau, institut de rythmologie et de modélisation cardiaque de Bordeaux. La
masse du cathéter est constitué majoritairement de papier et de thermoplastique. En revanche, son
empreinte carbone est majoritairement liée à la présence en très faible volume de métaux précieux
(or, platine, iridium).
100 Dans le graphique de gauche, les termes « thermoset » et « thermoplastic » désignent deux catégories
différentes de plastiques constitués à partir de polymère. Traduction des termes du graphique de droite :
Gold : or ; PT/IR : platine ou iridium ; paper : papier ; HDPE : polyéthylène de haute densité ; ABS : acrylonitrile
butadiène styrène.
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Schéma 7 : Représentation de la provenance des intrants participant à la fabrication
d?un cathéter d?électrophysiologie101
Source : Josselin Duchateau, institut de rythmologie et de modélisation cardiaque de Bordeaux. Ce
schéma permet de distinguer différentes étapes de production (soit la chaîne d?approvisionnement,
« supply chain » en anglais : recherche et développement aux États-Unis, assemblage en Amérique
du Sud, semi-conducteurs produits en Chine) et l?origine des différents intrants (pétrole américain,
platine sud-africain, charbon australien, plastique chinois). Les informations ont été fournies par le
fabricant (Biosense Webster). Le circuit est simplifié car il ne fait pas apparaître l?étape de
stérilisation des cathéters à l?oxyde d?éthylène, qui se fait généralement en Californie.
101 R&D : recherche et développement ; oil : combustibles fossiles ; HQ (headquarters) : siege de la société ;
ASM : assemblage ; SM : semi-conducteurs ; coal : charbon ; Pt : platine.
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Tableau 17 : Répartition des émissions de carbone d?un cathéter d?électrophysiologie
par principal intrant et étape de fabrication102
Source : Meister, J.A.; Sharp, J.Wang, Y.; Nguyen, K.A. Assessing Long-Term Medical Remanufacturing
Emissions with Life Cycle Analysis. Processes 2023, 11, 36. https://doi.org/10.3390/pr110100. La phase
de production du cathéter est responsable de près de 59 % des émissions de CO2e contre moins de
3 % pour la phase de transport. Concernant les matériaux utilisés, le polysulfone (catégorie de
thermoplastique) est le principal émetteur de CO2e. Nota bene : l?empreinte carbone des métaux
précieux n?est pas prise en compte dans le périmètre de cette étude.
1.2 Le retraitement des DM peut contribuer à réduire leur empreinte
écologique mais n?est pas le levier le plus impactant
1.2.1 La feuille de route recense plusieurs leviers de décarbonation des DM en
accordant une visibilité particulière à leur retraitement
[130] La feuille de route « planification écologique du système de santé », publiée en mai 2023
dans le cadre de la démarche interministérielle « France nation verte »103, cible les DM en
particulier à travers l?un de ses sept domaines d?actions, les soins écoresponsables. Initiée par le
102 Le terme anglais « lorry » désigne un camion de transport. Les termes « container ship » désignent un porte-
conteneurs.
103 Lancé en octobre 2022 par la Première ministre, « France nation verte » est le plan d?actions recensant
toutes les actions engagées pour répondre aux objectifs de baisser suffisamment les émissions de gaz à effet
de serre, adapter le pays au changement climatique, restaurer la biodiversité et réduire l?exploitation des
ressources naturelles à un rythme soutenable.
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cabinet de la ministre en charge de l?organisation territoriale et des professions de santé, elle
traduit la volonté de participer à la baisse de 5 % par an des émissions de gaz à effets de serre
jusqu?en 2050. Elle s?appuie pour partie sur des actions qui avaient déjà été engagées, en
particulier dans le cadre du Ségur de la santé104 et du programme « développement durable » de
l?Anap. Concernant les DM, elle cite plusieurs leviers d?actions, dont le retraitement des DM à
usage unique mais également :
? la revalorisation des déchets issus des DM et la mise en place d?une filière de valorisation
des métaux précieux ;
? la construction, en lien avec la Direction générale des entreprises (DGE), d?un référentiel
pour mesurer le bilan carbone dans l?acte d?achats ;
? l?étude, en lien avec l?Assurance maladie, de la mise en place d?un « scoring carbone ».
[131] La visibilité particulière accordée au retraitement des DM à usage unique (DMUU) peut
s?expliquer par la pression exercée en faveur de ce levier par des acteurs issus du monde
hospitalier. Alors que le retraitement des DMUU est interdit en France depuis les années 80105, la
création en avril 2017 au niveau européen d?un cadre juridique106 autorisant sous conditions cette
pratique a pu laisser penser à ces acteurs qu?un revirement serait opéré au niveau national107. Or,
alors même que la crise sanitaire avait souligné l?intérêt, dans un contexte de tensions
d?approvisionnement108, de développer l?usage multiple de certains DM, le Gouvernement
français a choisi en avril 2022109 de rappeler, au niveau législatif, l?interdiction de retraiter les
DMUU. Cette interdiction n?a fait l?objet ni d?une évaluation ni d?une concertation préalables. Les
acteurs rencontrés par la mission ont fait part de leur incompréhension quant à cette décision
104 La mesure 14 du Ségur de la Santé prévoyait le financement jusqu?en 2025 à hauteur de 10 M¤ de 151
postes de Conseillers en transition écologique et énergétique en santé (CTEES) en charge de réaliser des
diagnostics et des plans d?actions pour réduire la consommation énergétique des bâtiments. Ce réseau est
animé par l?Anap.
105 Circulaire DGS n°669 du 14 avril 1986 relative à l?interdiction de restériliser le matériel médico-chirurgical
non réutilisable dit « à usage unique » et circulaire DGS/DH n°51 du 29 décembre 1994 relative à l?utilisation
des dispositifs médicaux stériles à usage unique dans les établissements de santé publics et privés.
106 Article 17 du Règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 relatif aux
dispositifs médicaux.
107 Trois courriers signés par les fédérations hospitalières et le Club des acheteurs en produits de santé (Claps)
ont été adressés entre juin 2018 et janvier 2022 au ministère de la santé en faveur d?une autorisation, au
moins à titre expérimental, du retraitement des DMUU. Une tribune a également été publiée le 7 décembre
2022 dans « Le Monde » par un collectif de professionnels de santé et de représentants de sociétés savantes
en faveur du retraitement des DMUU (« Face aux pénuries de dispositifs médicaux, le retraitement est une
nécessité pour continuer de soigner nos patients »).
108 Voir l?avis du 17 avril 2020 de l?Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé
(ANSM). Sollicitée par des établissements de santé confronté à tensions d?approvisionnement sur les lames
de laryngoscopes à usage unique, l?ANSM a défini une procédure sécurisée afin de permettre la réutilisation
de ces DMUU.
109 L?article 10 de l?ordonnance n°2022-582 du 20 avril 2022, codifié à l?article L. 5211-3-2 du code de la santé
publique, dispose que « le retraitement de dispositifs à usage unique mentionné à l?article 17 du règlement (UE)
2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017, leur mise sur le marché et leur utilisation sont
interdits ».
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perçue comme incohérente avec au moins deux enjeux, celui de l?empreinte écologique des DM
mais également celui de la réduction des tensions d?approvisionnement.
[132] Pour autant, l?inscription en LFSS 2024 d?une expérimentation relative au retraitement des
DMUU ne repose sur aucune évaluation préalable de son intérêt écologique ou économique110.
L?étude d?impact cite certes des études étrangères mettant en avant les économies financières et
la moindre empreinte écologique associées au retraitement de cathéters d?électrophysiologie.
Néanmoins, la question de la transposabilité de ces résultats, très dépendants des DM et du
processus de retraitement retenus, à l?expérimentation française n?est pas soulevée. Par ailleurs,
le choix d?expérimenter pendant deux ans dans quatre établissements de santé un tel
retraitement, plutôt que de le généraliser d?emblée, est justifié par la nécessité de mettre en
oeuvre un dispositif de traçabilité spécifique, sans que son opportunité sur un plan sanitaire soit
précisée.
1.2.2 La primauté accordée à ce levier est excessive au regard de son impact
relatif sur l?empreinte écologique et de ses modalités de mise en oeuvre
[133] La mission a recensé six études111 qui tendent à démontrer l?intérêt écologique du
retraitement des DMUU mais elles doivent être abordées avec précaution :
? les conclusions de ces études s?appliquent à un DMUU donné (en l?espèce, des cathéters
d?électrophysiologie) pour un processus de retraitement donné ;
? leurs résultats sont sensibles à différents paramètres, en particulier le coût et l?empreinte
écologique du DMUU neuf (qui dépendent donc, comme vu supra, de leur processus de
production), les ressources (eau et oxyde d?éthylène notamment) utilisées dans le cadre du
retraitement et le nombre maximal de cycles de retraitement applicables au DMUU ;
? la mission ne dispose pas des compétences pour analyser les éventuels biais
méthodologiques qui mettraient en cause la robustesse de leurs conclusions : à titre
d?exemple, une étude publiée en février 2023 dans la revue « Sustainability »112 met en cause
l?intérêt écologique du retraitement des cathéters d?électrophysiologie ; or, selon plusieurs
110 Voir article 29-1 de la LFSS pour 2024.
111 Bruno de Sousa Martins, João Queiroz e Melo, João Logarinho Monteiro, Graça Rente d Pedro Teixeira
Bastos, ?Reprocessing of Single-Use Medical Devices: Clinical and Financial Results?, Escola de Saúde do
Porto, Associação de Politécnicos do Norte, février 2019; Schulte, A.; Maga, D. Thonemann, N. ?Combining
Life Cycle Assessment and Circularity Assessment to Analyze Environmental Impacts of the Medical
Remanufacturing of Electrophysiology Catheters?. Sustainability 2021, 13, 898
https://doi.org/10.3390/su13020898 ; Geoffroy Ditac et. alii. ?Carbon footprint of atrial fibrillation catheter
ablation?, European Society of Cardiology, septembre 2022; Source : Meister, J.A.; Sharp, J.Wang, Y.;
Nguyen, K.A. Assessing Long-Term Medical Remanufacturing Emissions with Life Cycle Analysis. Processes
2023, 11, 36. https://doi.org/10.3390/pr110100 ; Amanda Andersen, « A case study of the environmental and
economic sustainability of using remanufactured ultrasound catheters?, université d?Aalborg (Danemark),
juin 2022 ; Anthesis (étude commandée par Stryker), ?Comparative Carbon Footprint of Reprocessed Single
Use Medical Devices?, février 2023.
112 Lalman, C.; Karunathilake, H.; Ruparathna, R. ?To Dispose or to Reuse? Analyzing the Life Cycle Impacts
and Costs of Disposal, Sterilization, and Reuse of Electrophysiological Catheters?.Sustainability 2023, 15,
5363. https://doi.org/10.3390/su15065363.
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https://doi.org/10.3390/su13020898
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experts de l?ACV rencontrés par la mission, ses calculs seraient faussés en particulier par une
sous-évaluation du nombre maximal de cathéters pouvant être stérilisés simultanément ;
? la mission n?est pas non plus en mesure d?apprécier les éventuels conflits d?intérêt des
auteurs de ces études qui reposent largement sur des données fournies par les deux
entreprises (Vanguard en Allemagne et Stryker aux Etats-Unis) intervenant sur ce marché
oligopolistique.
[134] Cela étant, les résultats de ces études, à une exception près, sont relativement
convergents : le retraitement des cathéters d?électrophysiologie à usage unique permettrait de
réduire leur empreinte carbone de l?ordre de 50 à 60 % sur leur cycle de vie. C?est en particulier
la conclusion d?une étude menée par des chercheurs de l?université de Brighton en Grande-
Bretagne. Comme le montre le tableau ci-dessous qui compare les émissions de gaz à effet de
serre d?un cathéter neuf par rapport à un cathéter retraité, la réduction de 60 % ici constatée
s?explique essentiellement par le fait que le retraitement (« remanufacturing » en anglais) est
nettement moins émetteur que la production du DMUU neuf, même si on y ajouté les émissions
liées au processus de stérilisation (25 % de l?empreinte carbone du DM retraité vs moins de 10 %
pour le DM neuf). Une autre étude113, allemande cette fois et financée par l?entreprise de
retraitement Vanguard, a également démontré que le retraitement des cathéters
d?électrophysiologie réduisait de 20 % la consommation des ressources abiotiques114 par rapport
à un cathéter neuf, ce qui traduirait une empreinte environnementale (et non uniquement
carbone) positive.
113 Schulte, A.; Maga, D. Thonemann, N. ?Combining Life Cycle Assessment and Circularity Assessment to
Analyze Environmental Impacts of the Medical Remanufacturing of Electrophysiology Catheters?.
Sustainability 2021, 13, 898 https://doi.org/10.3390/su13020898.
114 Les ressources abiotiques sont les ressources naturelles non vivantes, telles que le sol, l?eau, les minerais,
avant transformation éventuelle par l?homme. Il s?agit de ressources épuisables.
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Tableau 18 : Comparaison des émissions de gaz à effet de serre (en kg CO2e) par
intrant et étape de fabrication pour les cathéters neufs (a) et les cathéters retraités
(b)115
Source : Meister, J.A.; Sharp, J.Wang, Y.; Nguyen, K.A. Assessing Long-Term Medical Remanufacturing
Emissions with Life Cycle Analysis. Processes 2023, 11, 36. https://doi.org/10.3390/pr110100.
[135] Pour autant, il est essentiel de remettre en perspective l?intérêt écologique du retraitement
des DMUU avec les autres leviers de décarbonation des DMUU. Sans que la mission ait procédé à
une revue de littérature exhaustive, qui dépassait le périmètre de la commande, elle a identifié
plusieurs travaux hiérarchisant l?impact respectif des différents leviers de décarbonation des DM.
C?est l?objet du schéma ci-dessous qui classe les leviers de décarbonation en fonction de leur
impact environnemental. De façon générale, les études tendent à montrer que, plus tard on
intervient dans le cycle de vie du produit, plus le « gain » environnemental est limité. Ainsi, les
leviers agissant directement sur la composition (par exemple, la réduction du volume d?intrants
ou « material reduction » dans le schéma ci-dessous) et le mode de production d?un DM (par
exemple, le mix énergétique utilisé qui renvoie aussi au lieu de fabrication) ont plus d?impact que
ceux mobilisés en aval de la consommation du DM. C?est aussi le sens du schéma ci-dessous issu
de la stratégie de transition écologique du National Health System (NHS) britannique. Les
réductions attendues des émissions de carbone y sont classées par levier. Les volumes associés
aux leviers réduction des plastiques à usage unique et retraitement (flèches jaunes) sont
nettement inférieurs à ceux liés à la conditionnalité écologique imposée dans le cadre des achats
hospitaliers aux fournisseurs (flèches rouges).
115 Remanufacturing : retraitement (le terme « reprocessing » est aussi utilisé en anglais pour désigner le
retraitement). Packaging : emballage.
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Schéma 8 : Leviers de réduction de l?empreinte écologique des DM classés en
fonction de leur impact116
Source : Amanda Andersen, « A case study of the environmental and economic sustainability of
using remanufactured ultrasound catheters?, université d?Aalborg (Danemark), juin 2022.
Graphique 2 : Extrait du plan de décarbonation du NHS
Source : NHS England, ?Delivering a ?net zero? National Health Service?, juillet 2022.
116 Reuse : réutilisation ; energy recovery : récupération d?énergie.
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2 La gouvernance et les moyens alloués à la planification
écologique du système de santé ne sont pas à la hauteur de
l?enjeu de décarbonation des DM
2.1 La faiblesse du pilotage national de cette stratégie engendre un risque
de décalage croissant avec les initiatives constatées à l?hôpital
2.1.1 L?Anap assume un rôle d?opérateur de la feuille de route mais son portage
reste fragile au sein de l?administration centrale et déconcentrée
[136] La crédibilité de la stratégie française de décarbonation des DM, comme de l?ensemble du
système de santé, est mise en cause par la faiblesse des moyens et de la gouvernance associés
aujourd?hui à cet enjeu. Il n?appartenait pas à proprement parler à la mission d?instruire ce sujet.
Toutefois, au regard de la saisine qui lui a été adressée, qui vise à réduire l?empreinte écologique
des DM, elle estime, sans avoir pleinement instruit ce sujet, que les modalités actuelles de pilotage
de la feuille de route « transition écologique » du ministère de la santé engendrent un risque de
« greenwashing » (ou éco-blanchiment). À titre de comparaison, selon une représentante du
programme « Greener NHS » rencontrée par la mission, environ 80 personnes travaillent au
service de la transition écologique du système de santé en Grande-Bretagne, dont une trentaine
uniquement sur les marchés hospitaliers durables. En France, le pilotage de la stratégie de
transition écologique en santé repose essentiellement aujourd?hui sur le conseiller en charge des
territoires, des élus et de la santé environnementale au cabinet de la ministre déléguée en charge
de l?organisation territoriale et des professions de santé :
? alors que la plupart des leviers concernent au moins deux directions du ministère, seule une
personne, positionnée au cabinet de la DGOS, consacré la moitié de son temps de travail à
la feuille de route ;
? l?Anap a indiqué à la mission mobiliser 5 ETP au sujet du développement durable, qui
assurent en particulier un rôle de suivi global des actions et de pilotage en propre de
plusieurs chantiers ;
? un haut-fonctionnaire en charge du développement durable (et de l?égalité entre les
femmes et les hommes) est responsable au secrétariat général des ministères sociaux du
seul volet interne de la transition écologique (services publics écoresponsables en
particulier) et participe à la comitologie de la feuille de route :
? la Caisse nationale d?assurance maladie a créé en novembre 2023 une Mission nationale
pour la Transition écologique du système de santé et la santé environnementale, centrée
sur la décarbonation des médicaments, et composée d?un ETP117 ;
117 Dans son rapport « charges et produits » pour 2024, la Cnam propose en particulier d?aller vers une prise
en compte de l?empreinte carbone des produits de santé dans leur tarification en lien avec le Comité
économique des produits de santé (CEPS). Un deuxième ETP au sein de cette mission se consacré au volet
interne de la transition écologique au sein du réseau de la Cnam.
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? enfin, selon l?Anap, si une minorité des ARS, comme l?Île-de-France, ont identifié des
personnes en charge de la transition écologique, le rôle des ARS, dont deux participent au
comité de pilotage de la feuille de route, reste dans ce domaine très limité.
2.1.2 Or les initiatives se développent dans une partie des établissements de
santé sans accompagnement suffisant de la part de l?État
[137] L?engagement des établissements de santé dans la transition écologique, en particulier la
décarbonation des produits de santé utilisés, est encadré par des obligations dont la mise en
oeuvre est difficile à apprécier :
? la DGOS estimé à environ 10 % la part des établissements de santé ayant satisfait à ce jour
l?obligation, créée en 2010 et élargie en 2022 au « scope » 3, qui inclut en particulier les
émissions indirectes liées aux achats de produits de santé, de réaliser un bilan des gaz à
effets de serre118 ;
? alors que les établissements de santé sont soumis, comme les autres pouvoirs adjudicateurs,
au Plan national pour des achats durables (PNAD) et que 100 % des marchés publics devront
contenir une clause environnementale à horizon 2026, moins de 10 % des marchés
hospitaliers incluaient en 2022 une telle clause (cf. infra) ;
? depuis 2021, le projet d?établissement les établissements de santé doit comprendre un volet
éco-responsable qui définit des objectifs et une trajectoire afin de réduire le bilan carbone
de l'établissement119 mais moins de la moitié de ceux interrogés par l?Anap120déclaraient
avoir nommé en 2022 un référent sur ce sujet ;
? enfin, les risques environnementaux font partie des critères de certification des
établissements par la Haute autorité de santé (HAS) depuis la V2020121 mais, selon les
interlocuteurs rencontrés par la mission, le défaut de compétences dans ce domaine des
experts en charge de l?évaluation limite la portée de ce critère122.
118 Comme les toutes les personnes morales de droit public de plus de 250 agents (et les personnes morales
de droit privé de plus de 500 salariés), les établissements de santé doivent depuis 2010 réaliser tous les trois
ans (tous les quatre ans dans le privé) un bilan de leurs émissions de GES incluant depuis 2022 le « scope » 3,
c?est-à-dire les émissions indirectes liées en particulier aux achats de produits de santé. Ils doivent également
joindre à ce bilan un plan de transition pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre présentant les
objectifs, moyens et actions envisagés à cette fin et, le cas échéant, les actions mises en oeuvre lors du
précédent bilan.
119 Article L 6143-2 du code la santé publique modifié par l?ordonnance n°2021-1470 du 10 novembre 2021.
120 Rapport national consolidé de la campagne 2022 « Mon observatoire du développement durable », auto-
diagnostic renseigné depuis 2016 par les établissements de santé, sociaux et médico-sociaux volontaires
(2 656 répondants en 2022).
121 Voir critère 3.6.04 « les risques environnementaux et enjeux du développement durable sont maîtrisés »
122 Par ailleurs, la HAS a publié le 28 novembre 2023 une feuille de route santé-environnement dans laquelle
elle s?engage à (i) consolider les critères environnementaux dans l?évaluation des technologies de santé et
développer leur bon usage pour limiter leur impact environnemental (ii) élaborer des recommandations de
bonnes pratiques en encourageant une meilleure prise en compte des enjeux environnementaux (iii)
renforcer les critères liés à la santé-environnement dans la mesure de la qualité des soins et des
accompagnements.
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[138] En pratique, les initiatives recensées par la mission en matière de décarbonation des
produits de santé reposent largement sur la volonté d?un nombre restreints de soignants
mobilisés à titre personnel, avec l?appui de la direction générale de leur établissement. Les
représentants de CHU rencontrés par la mission ont indiqué n?avoir jamais évoqué l?objectif de
réduction de leur empreinte écologique avec leur tutelle en ARS, les CPOM conclus avec ces
dernières ne contenant aucun indicateur sur cet enjeu. L?engagement de certains établissements
de santé, dont la mission n?a pas objectivé le nombre, dans la transition écologique est donc
exclusivement endogène. La remontée de bonnes pratiques organisée par la DGOS dans le cadre
du groupe de travail sur les soins éco-responsables montre la sur-représentation de quelques CHU
(en particulier, Bordeaux, Clermont-Ferrand, Nîmes, Strasbourg). Les échanges de la mission avec
les représentants de ces CHU a mis en exergue des facteurs susceptible d?expliquer un
engagement particulier dans la transition écologique :
? la présence de professionnels de santé mobilisés à titre personnel sur cette question (par
exemple, ayant fait le choix de se former aux enjeux de la transition écologique en santé) et
engagés dans des collectifs nationaux regroupant des professionnels issus de différentes
disciplines, comme le Collectif EcoResponsabilité en Santé (Ceres)123 ou le Comité pour le
développement durable en santé (C2DS)124 ;
? la conviction partagée, parmi ces professionnels, que le système de santé a une
responsabilité particulière en matière de transition écologique en raison (i) du principe
hippocratique « primum non nocere »125 qui doit susciter selon eux une réflexion sur le
rapport entre l?impact environnemental de l?acte de soins rapporté à son bénéfice pour les
patients (ii) de l?afflux prévisible à l?hôpital dans les prochaines années de patients dont les
pathologies seront directement liées au réchauffement climatique126 ;
? la capacité à mobiliser des moyens (appels à projet DGOS127 ou DITP, fonds issus de
l?Association nationale pour la formation permanente du personnel hospitalier) pour
financer les expertises (en particulier, les analyses de cycle de vie de produits) réalisées par
des prestataires spécialisés (en nombre très restreint sur le marché128) ;
123 Créé en 2022, le Ceres se définit comme « un collectif interdisciplinaire, interprofessionnel et en lien direct
avec des patients fortement impliqués dans les thématiques santé et environnement ».
124 Créé il y a une quinzaine d?années, le C2DS se définit comme « une association à but non lucratif qui fédère
des établissements sanitaires et médico-sociaux engagés dans une démarche de développement durable ». Le
réseau revendique 860 structures adhérentes.
125 En premier, ne pas nuire.
126 Selon l?Organisation mondiale de la santé (OMS), entre 2030 et 2050, le changement climatique pourrait
entraîner au niveau mondial près de 250?000 décès supplémentaires par an, dus uniquement à la dénutrition,
au paludisme, à la diarrhée et au stress lié à la chaleur. Principaux repères sur le changement climatique et la
santé (who.int)
127 La mission a recensé un seul appel à projets lancé par la DGOS en lien avec le sujet de la transition
écologique. Lancé en mai 2023 dans le cadre du programme de performance hospitalière pour des achats
responsables (Phare), il vise à réduire les déchets alimentaires et les plastiques à usage unique à l?hôpital. Six
Groupements hospitaliers de territoire (GHT) ont été retenus dans le cadre d?une expérimentation dont la
durée annoncée est d?un an.
128 L?agence « Primum non nocere » est le prestataire le plus souvent cité par les interlocuteurs rencontrés
par la mission.
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https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/climate-change-and-health
https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/climate-change-and-health
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? un alignement entre les professionnels des fonctions supports et du soins (pharmaciens,
médecins, paramédicaux) partageant la volonté de participer à un projet commun de
décarbonation, le cas échéant dans le cadre de l?obtention d?un label environnemental (par
exemple, le label TQSE129 dont l?obtention par la maternité de Clermont-Ferrand s?est
accompagnée d?un travail de réduction du recours aux DM à usage unique durant
l?accouchement).
[139] La faiblesse de l?accompagnement proposé aux établissements de santé par l?État, au
niveau national comme déconcentré, ne favorise ni la hiérarchisation des leviers permettant de
réduire l?empreinte écologique des DM, ni un passage à l?échelle des leviers les plus pertinents. La
DGOS et l?Anap ont certes engagé récemment un chantier de partage de bonnes pratiques en
matière de transition écologique sur la base des remontées effectuées par les établissements de
santé mais (i) cette mise en visibilité ne s?appuie sur aucune appréciation de la pertinence ou de
l?impact des pratiques (ii) ces bonnes pratiques ne font l?objet à ce stade d?aucun regroupement
par nature de levier et ne s?accompagnent pas d?un vademecum qui permettrait aux
établissements intéressés d?apprécier leur transposabilité. Selon les témoignages de
professionnels de santé recueillis par la mission, l?essaimage des bonnes pratiques en matière de
transition écologique a surtout reposé jusqu?ici sur les démarches menées par les fédérations
hospitalières (FHF en particulier), sur les liens de connaissance entre professionnels, en particulier
ceux qui adhèrent aux collectifs évoqués supra130 et sur le recours aux mêmes prestataires.
2.2 La mise en oeuvre d?une stratégie crédible de réduction de l?empreinte
écologique des DM exige aussi une collaboration interministérielle
renforcée
2.2.1 Dans une logique de subsidiarité, le soutien des administrations en charge
de la transition écologique à la décarbonation du système est modeste
[140] Si la feuille de route « planification écologique du système de santé » s?inscrit dans une
logique interministérielle, son élaboration et sa mise en oeuvre ont bénéficié d?une expertise
limitée de la part des administrations en charge de la transition écologique :
? selon les interlocuteurs rencontrés par la mission, l?Ademe, quoique sollicitée à plusieurs
reprises, n?a pas pris part à la « task force » interministérielle mise en place dans le cadre de
la feuille de route, ni participé au premier comité de pilotage, présidée par la ministre, qui
s?est tenu le 22 mai 2023 ;
? le Commissariat général au développement durable (CGDD) ainsi que le Secrétariat général
à la planification écologique (SGPE) participent aux travaux mais, en vertu d?un principe de
subsidiarité, leurs représentants ont indiqué à la mission ne pas s?être positionné sur la
129 Label Très haute qualité sociale et environnementale attribué par un organisme de certification.
130 À titre d?illustration, le CHU de Bordeaux a élaboré un « guide des unités durables » qui recense des bonnes
pratiques en matière de transition écologique sur la base desquelles des unités sont labellisées. Ce guide a
été adressé aux autres établissements de santé (de l?ordre de 200 selon la direction du CHU) qui en ont eu
connaissance et fait la demande.
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pertinence des leviers choisis : en revanche, dans le cadre du « temps II » de la planification
écologique qui s?ouvre en 2024, le SGPE souhaite investir davantage certaines filières, dont
la santé ;
? un projet de convention interministérielle, incluant en particulier le SGPE et le CGDD
(l?Ademe étant citée comme un partenaire à associer), ainsi que les principaux opérateurs
du champ de la santé et les fédérations hospitalières est en cours de finalisation pour
décliner la feuille de route de mai 2023 : il s?agit en réalité de la troisième convention avec
un objet similaire, la dernière s?étant achevée en 2018 sans qu?un bilan des actions prévues,
et notamment de la participation des signataires rattachés à la transition écologique, ait été
réalisé.
[141] Or, concernant en particulier les produits de santé, une telle expertise a un réel intérêt car
elle favoriserait :
? la réalisation au niveau national d?analyses de cycle de vie sur des produits utilisés par
plusieurs établissements de santé, ou à tout le moins le partage de critères d?appréciation
de la robustesse des études existantes ;
? le partage d?éléments de parangonnage sur les leviers de décarbonation utilisés dans
d?autres secteurs et la façon de surmonter les freins rencontrés (par exemple, le défaut de
transparence des fournisseurs) ;
? la hiérarchisation des leviers en fonction notamment de (i) leur degré de faisabilité (ii) leur
impact sur les émissions carbone (iii) leur impact sur la consommation des ressources
abiotiques (iv) leur cohérence avec les autres leviers prévus dans le cadre de « France 2030 ».
2.2.2 La DGE assume un leadership fondé sur le double objectif de relocalisation
des industries de santé et de décarbonation
[142] La Direction générale des entreprises (DGE) prend en charge, en lien avec le ministère de la
santé, les travaux relatifs à l?empreinte carbone des produits de santé en lien avec les industries
de santé. Ce rôle premier de la DGE se fonde sur le contrat stratégique de filière « industries et
technologies de santé » élaboré en 2019 dans le cadre du conseil national de l?industrie131. Si ce
contrat ne faisait pas initialement référence à l?enjeu de décarbonation des produits de santé, ni
à la souveraineté sanitaire, un tournant a été pris à la suite de la crise Covid de 2020. Le plan
« innovation santé 2030 » lancé en 2021 fixe un objectif de soutien à l?industrialisation des
produits de santé sur le territoire français. Une direction de projet « relocalisation des industries
de santé » a été créée à la DGE. Une feuille de route « décarbonation des industries et
technologies de santé », ciblée sur les médicaments, a été élaborée en lien avec la Fédération
française des industries de santé (Fefis). La DGE envisage une feuille de route comparable pour les
131 Créé en 2010, le conseil national de l?industrie est une instance visant à éclairer et conseiller les pouvoirs
publics sur les enjeux de l?industrie en France. Il regroupe 19 Comités stratégiques de filière (CSF). Chaque
CSF est doté d?une gouvernance représentative de la filière portant des projets collectifs structurants qui
engagent de manière réciproque l?État et les acteurs privés.
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RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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dispositifs médicaux, même si le caractère plus atomisé et hétérogène des fabricants de DM
complexifie l?exercice.
[143] Un appel d?offres visant à construire une méthodologie de l?empreinte carbone des
médicaments a été publié par la DGE, en lien avec la DGS, en octobre dernier. Il est attendu du
prestataire, qui devra consulter les fabricants concernés, l?identification des données et la
définition de la méthode nécessaires au calcul d?un « score carbone » des médicaments. Ces
éléments pourraient à terme intégrer une plateforme qui produirait, à l?attention des acteurs
concernés (ex : acheteurs hospitaliers) et à partir des données renseignées par les entreprises, un
« score carbone » par médicament. L?extension de cette démarche aux DM est aussi envisagée.
3 En parallèle de l?expérimentation, la mise en oeuvre des
autres leviers de réduction de l?empreinte écologique des
DM est indispensable et nécessite un appui national renforcé
3.1 Conformément aux dispositions interministérielles, les achats
hospitaliers, qui constituent un levier majeur, doivent contribuer
davantage à la réduction de l?empreinte écologique des DM
3.1.1 En dépit d?obligations croissantes, le levier des achats reste encore sous-
utilisé par les hôpitaux pour diminuer leur empreinte environnementale
[144] Depuis 2016, des dispositions successives, regroupées pour partie dans le plan national pour
des achats durables 2022-2025132, qui fixe l?objectif de 100 % des contrats de la commande
publique133 avec au moins une considération environnementale134, tendent à renforcer la prise en
compte des enjeux environnementaux dans les achats publics :
? la notion de coût de cycle de vie, issue d?une directive européenne, a été intégrée au décret
du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics qui précise qu?elle peut inclure « les coûts
imputés aux externalités environnementales liés au produit, au service ou à l'ouvrage pendant
son cycle de vie, à condition que leur valeur monétaire puisse être déterminée et vérifiée. Ces
coûts peuvent inclure le coût des émissions de gaz à effet de serre et d'autres émissions
polluantes ainsi que d'autres coûts d'atténuation du changement climatique »135 ;
132 Il s?agit de la seconde édition du plan.
133 Contrats notifiés au cours de l?année.
134 Elle est définie par le PNAD comme la prise en compte de la dimension environnementale dans l?acte
d?achats. Elle est entendue au sens large, comme par exemple, la réduction des prélèvements des ressources,
la composition des produits et notamment leur caractère écologique/polluant/toxique, le caractère
réutilisable/recyclé/reconditionné/recyclable des produits, les économies d?énergie, la prévention de la
production des déchets et la valorisation des déchets (etc.) en lien avec la prestation commandée.
135 Voir article 63.
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? des Schémas de promotion des achats publics socialement responsables (Spaser), dont le
seuil en montant d?achats à partir duquel ils sont obligatoires a été progressivement diminué
depuis 2014, doivent dorénavant être adoptés par les établissements de santé réalisant plus
de 50 M¤ d?achats hors taxes ;
? le code de la commande publique prévoit depuis 2018 la possibilité pour l?acheteur
d?imposer que les moyens utilisés pour exécuter tout ou partie d?un marché, pour maintenir
ou pour moderniser les produits acquis soient localisés sur le territoire des Etats membres
de l?UE, afin notamment de prendre en compte des considérations environnementales ;
? la loi « climat et résilience »136 a introduit au niveau légal l?obligation de clauses
environnementales dans les marchés publics et prévu la création d?outils d?analyses du coût
du cycle de vie à destination des pouvoirs adjudicateurs au plus tard le 1er janvier 2025137 ;
? enfin, la loi « industrie verte »138 accélère le calendrier prévu pour l?insertion de clauses
environnementales dans les marchés clés en matière de décarbonation139 et sécurise
juridiquement la possibilité pour les acheteurs de mettre au même niveau, dans la
pondération des critères, les enjeux qualitatifs environnementaux et les critères prix.
[145] S?il n?appartenait pas à la mission d?évaluer la mise en oeuvre de ce levier, quoiqu?il soit
central dans la réduction de l?empreinte écologique des DM, force est de constater que, avec
moins de 10 % des marchés hospitaliers qui incluaient en 2022 une clause environnementale, il
reste sous-utilisé140. Selon les interlocuteurs rencontrés, cette sous-utilisation peut s?expliquer par
différents facteurs dont :
? la difficulté à relier la clause environnementale avec l?objet du marché, en particulier
lorsqu?il s?agit d?acquérir des produits de santé ;
? la difficulté à pondérer la note pondérale, qui tend à représenter une part encore faible de
la note globale attribuable, par rapport aux autres critères de notation utilisés (prix,
expertise, qualité, etc.)141 ;
? le défaut d?expertise des acheteurs publics qui peinent à définir des clauses à la fois
conformes au code de la commande publique et impactantes sur le plan environnemental ;
? le faible niveau de transparence de la part des fournisseurs qui ne souhaitent pas, au-delà
des obligations limitées prévues par la réglementation européenne, sur la composition
exacte des produits de santé et sur leur circuit de fabrication.
136 Article 35 de la loi n°2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et
renforcement de la résilience face à ses effets.
137 Voir article 36.
138 Article 29 de la loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l?industrie verte.
139 Dès juillet 2014, par exemple pour les achats de véhicules neufs.
140 La centrale d?achats hospitaliers Résah a néanmoins publié en mars 2022 un guide sur les achats
responsables à l?attention des acheteurs hospitaliers.
141 À titre d?illustration, 2/3 des établissements de santé ayant participé à l?enquête Solen administrée par la
mission indiquent inclure des clauses environnementales dans leurs marchés, tout en précisant que ces
critères représentent en moyenne entre 10 et 20 % de la note globale (voire entre 2,5 et 5 % pour les CHU).
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Tableau 19 : Évolution de la part des achats hospitaliers incluant une clause
environnementale entre 2020 et 2022
2020 2021 2022
Nombre de marchés 264 6 707 6 098
en % du total 4,2 5,6 9,3
Montant (en ¤) 215 703 523 491 966 149 2 084 673 598
en % du total 1,7 2,9 13,5
Source : Observatoire économique de la commande publique.
Marché du Résah relatif à l?achat de gants en nitriles
La fourniture des gants d?examen, pour lesquels la très forte demande a provoqué une
déstabilisation des marchés à l?échelle mondiale, de l?achat des matières premières à
l?organisation des chaînes de production, a été particulièrement impactée par la crise Covid.
Afin de sécuriser l?approvisionnement des établissements, les autorités ont souhaité mettre en
place des mesures visant à encourager l?émergence de filières européennes de production par
la mise en place d?un dispositif de commande publique adapté.
C?est dans ce contexte que le Resah met en place, à partir du 1er mars 2024, un marché dédié à
la sécurisation et à la continuité d?approvisionnement en gants d?examen en nitrile. Dans le
cadre de la consultation, le Resah a exigé, à titre de condition d?exécution, que les gants objet
du marché soient manufacturés sur le territoire de l?Union européenne.
Quinze points ont ainsi été alloués au critère « performance environnementale et sociétale des
fournitures de leur fabrication à leur distribution », apprécié sur la base d?un questionnaire
imposant aux candidats de fournir et d?exposer :
- les caractéristiques environnementales de la production des gants nitrile s?agissant :
? des rejets d?effluents gazeux (en production et logistique) et liquides ;
? de la consommation globale en énergie et en eau (part fixe et variable suivant le niveau
de production) ;
? des déchets en production, sur le plan logistique amont (matière premières) et aval
(produits finis) et liés aux processus hors production ;
? du bilan carbone des processus de production et d?approvisionnement ;
- en lien avec l?exécution des prestations objet du marché, de la fabrication du produit jusqu?à
la distribution incluse, le niveau d?ambition (objectifs, plan d?actions?) sur les sujets
environnementaux ;
- en lien avec l?exécution des prestations objet du marché, de la fabrication du produit jusqu?à
la distribution incluse, le niveau d?ambition en matière sociétale.
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Le cahier des clauses particulières du marché prévoit un certain nombre de mécanismes
permettant de contrôler le respect des engagements souscrits par le titulaire dans son offre,
s?agissant en particulier du critère « performance environnementale et sociétale des fournitures
de leur fabrication à leur distribution ».
Le titulaire est également tenu d?une obligation de reporting d?activité concernant la qualité
environnementale des produits, en fournissant au Resah un relevé des indicateurs suivants :
- consommation d?eau utilisée pour la production (reporting a minima trimestriel) ;
- rejets d?effluents gazeux et liquides (reporting a minima trimestriel) ;
- bilan carbone des processus de production et d?approvisionnement (bilan annuel des
émissions de GES de l?antenne de production) ;
- déchets produits et matière première inutilisée (reporting a minima trimestriel).
Source : Resah.
3.1.2 À l?exemple du système de santé britannique, les achats hospitaliers
devraient constituer le principal levier de décarbonation des DM
[146] Si la feuille de route du 22 mai 2023 mentionne bien les achats durables comme un levier
de décarbonation, la place relative accordée à ce levier reste faible à l?aune de la stratégie
environnementale du système de santé britannique. Le National health system (NHS) a adopté
dès 2008 une stratégie de décarbonation dite « Greener NHS ». Actualisée en octobre 2020, elle
repose sur un double objectif : la neutralité carbone à horizon 2040 pour les émissions directes
du NHS et à horizon 2050 pour les émissions indirectes. Pour atteindre l?objectif de réduction des
émissions indirectes qui, comme en France, sont liées pour deux tiers aux achats de produits de
santé, un plan spécifique a été élaboré concernant les achats hospitaliers. Ce plan, qui s?appuie
sur un outillage et un accompagnement spécifique à destination des fournisseurs, repose sur des
jalons successifs :
? depuis avril 2023, pour tous les achats d?une valeur supérieure à 5M de £142, les fournisseurs
doivent obligatoirement communiquer un plan de réduction de leurs émissions directes de
carbone ;
? cette obligation sera étendue à l?ensemble des achats, quel que soit leur montant, dès avril
2024 ;
? enfin, à partir d?avril 2027, le plan de décarbonation communiqué par les fournisseurs devra
inclure leurs émissions indirectes.
[147] Les fournisseurs sont accompagnés dans la mise en oeuvre de cette stratégie de
décarbonation via des outils143 leur permettant d?apprécier leur « maturité » par rapport aux
attentes du NHS (cf. schéma ci-dessous). Il est demandé aux entreprises qui revendiquent un
142 5,7 M¤ au 24 novembre 2023.
143 Voir « Evergreen Sustainable Supplier Assessment ».
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niveau de maturité est jugé élevé de faire certifier leur stratégie de décarbonation par une
association indépendante selon des standards internationaux144.
[148] La stratégie britannique de réduction de l?empreinte carbone des produits de santé via le
levier des achats se distingue à plusieurs égards de l?approche qui se dessine en France :
? elle s?appuie sur des moyens (une trentaine d?ETP) et des outils (guide à l?attention des
fournisseurs, outils en ligne d?auto-évaluation, etc.) dont le calibrage peut aussi s?expliquer
par le caractère plus centralisé des achats hospitaliers ;
? elle repose sur une approche par fournisseur, et non par produit, les objectifs de
décarbonation fixés s?appliquant à la totalité de le leur activité, ce qui est plus cohérent
avec la façon dont les entreprises définissent un tel objectif, et rejoint aussi l?approche
retenue par les acheteurs privés (y compris les établissements de santé privés) en France
qui, n?étant pas contraints par le code de la commande publique, sont plus libres de définir
des critères environnementaux sans lien direct avec l?objet du marché ;
? elle se fonde sur des engagements de la part des fournisseurs certifiés le cas échéant selon
des standards internationaux existants, et non sur un mode de calcul de l?empreinte
carbone propre au NHS.
Schéma 9 : Affiche de communication de la stratégie nationale « Greener NHS »
(« Réduisez les émissions, réduisez les admissions », « une planète en meilleure santé, une
population en meilleure santé »)
Source : NHS England.
144 Science Based Targets Initiatives. Lancée en juin 2015, l?initiative Science Based Targets (SBTi ou iSBT en
français) est un projet conjoint du Carbon Disclosure Project (CDP), du Global Compact des Nations Unies,
du World Ressource Institute (WRI) et du World Wildlife Fund (WWF). C?est un organisme de notation qui
offre un label et une reconnaissance aux entreprises qui définissent un plan avec des objectifs fondés sur des
critères scientifiques clairs et transparents pour réduire leur empreinte carbone.
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Schéma 10 : Outil d?appréciation du niveau de maturité des fournisseurs en matière
environnementale
Source : NHS England. Quatre niveaux de maturité sont distingués : (1) un engagement public à
atteindre la neutralité carbone (2) la fixation d?objectifs globaux de décarbonation reposant sur un
plan d?actions (3) la fixation d?un objectif d?atteindre la neutralité carbone en 2050 sur la base d?une
évaluation indépendante en prenant en compte le risque d? « esclavage moderne » (4) la fixation
d?un objectif d?atteindre la neutralité carbone en 2050 sur la totalité des activités et sur la base d?une
cartographie de la chaîne d?approvisionnement et d?enquêtes auprès des sous-traitants comprenant
l?appréciation du risque d? « esclavage moderne ».
3.2 Le retraitement des DM à usage unique, qui sont définis comme tels
par les seuls industriels, doit aussi s?accompagner du développement
des DM à usage multiple
3.2.1 L?évolution de la part respective des DM à usage unique et des DM à usage
multiple ne fait l?objet d?aucun suivi au niveau national
[149] Une partie des DM aujourd?hui définis par les industriels comme étant à usage unique
(DMUU) présentent ou ont présenté dans le passé des alternatives à usage multiple (DMUM). La
mission n?a pas recensé d?études recensant l?évolution de la part respective des DMUU et des
DMUM145. Elle n?a pas non plus identifié de liste des DMUU pour lesquels il existe une alternative
sous la forme d?un DMUM. Néanmoins, les professionnels de santé rencontrés par la mission ont
témoigné de l?augmentation perçue de la part des DMUU utilisés. Cette tendance s?expliquerait
145 Les établissements de santé ayant participé à l?enquête Solen administrée par la mission (cf. Annexe V)
ont indiqué que les DMUU (incluant les DM implantables) représentaient entre 76 et 94 % du total des DM
utilisés.
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par la volonté de réduire les risques sanitaires mais aussi par la réduction des moyens alloués aux
services de stérilisation en particulier, et aux établissements de santé en général. Le
développement des DMUU est aussi favorisé par la liberté dont disposent sur le marché européen
les fabricants de qualifier l?usage unique (par l?apposition sur un DM du label européen consistant
en un deux barré) soit avoir à le justifier.
[150] Alors que ce levier n?est pas identifié en tant que tel par la feuille de route du 22 mai 2023,
la mission a identifié des initiatives visant à substituer des DM à usage unique par des DM à usage
multiple en établissement de santé. Deux initiatives sont synthétisées ci-dessous à titre
d?exemple :
? le CHU de Clermont-Ferrand, sur la base des travaux menés par une interne en pharmacie146,
a démontré que la substitution d?une partie des DMUU utilisés lors de l?accouchement par
voie basse par des DMUM permettait en particulier de diviser par trois leur empreinte
écologique (cf. schéma ci-dessous). Il s?est engagé en 2022 dans une évolution de la
composition des différents « packs » (épisiotomie, suture, sur-mesure) constitués par les
pharmaciens pour les soignants. Un travail comparable a été réalisé sur le set fourni aux
gynécologues au bloc opératoire ;
? le CHU de Nîmes, dans le cadre d?un projet engagé en 2021 de réduction des déchets issus
du bloc opératoire (« Durabloc »), a mené des travaux sur l?ACV comparée des lames de
laryngoscopes à usage unique (LUU) et à usage multiple (LUM)147 soulignant un intérêt
écologique de ces dernières proportionnel au nombre de lames utilisées et pouvant
représenter 26 tonnes de CO2 par an (soit l?équivalent de 120 000 km en voiture). La
substitution des LUU par des LUM a été engagée en 2022.
[151] Alors que le développement de l?usage multiple concerne potentiellement un volume plus
important de DMUU que le retraitement et que son intérêt écologique est démontré, la mission
n?a pas identifié au niveau national de stratégie148. Une telle stratégie, qui devrait associer l?État,
la Cnam, les représentants des fabricants de DM (via le Snitem), l?ANSM et la HAS, impliquerait :
? le recensement de l?ensemble des DMUU pour lesquels il existe déjà aujourd?hui sur le
marché une alternative réutilisable ;
? le recensement de l?ensemble des initiatives en établissements de santé et en ville de
substitution de DMUU par des DMUM ;
? l?identification des DMUU pour lesquels il n?existe pas sur le maché d?alternative réutilisable
alors que les professionnels de santé et les autorités sanitaires estiment qu?une telle
alternative pourrait être commercialisée ;
146 Steffi Calland, « Les dispositifs médicaux de l?accouchement par voie basse : usage unique ou réutilisable ? »,
Sciences pharmaceutiques, 2022.
147 Nathalie Rouvière et. Alii., « Reusable laryngoscope blades: a more eco-responsible and cost-effective
Alternative », Elsevier, 2023.
148 A l?instar des études en cours sur la réutilisation des médicaments non utilisés mais délivrés, une étude
similaire pourrait être menée sur les DM périmés, ou dé stérilisés et non utilisés.
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? un chiffrage du gain écologique associé au passage de l?usage unique vers l?usage multiple,
à l?image du simulateur créé par la société Ecovamed (cf. schéma ci-dessous) ;
? des travaux, sur le plan juridique national et européen, en vue, le cas échéant, (i) d?obliger
les fabricants de DM à justifier la qualification d? « usage unique » dans le cadre de
l?obtention du marquage CF (ii) de mieux prendre en compte l?empreinte environnementale
des DM, liée en particulier à leur potentiel de réutilisation, au moment de leur tarification.
3.2.2 Le développement de l?usage multiple est souvent conditionné dans les
établissements de santé à une organisation et des moyens adaptés
[152] Comme le montrent les exemples du CHU de Clermont-Ferrand et de Nîmes, si l?intérêt
écologique du développement de l?usage multiple est démontré, il doit être mis en regard avec
d?autres critères qui peuvent conditionner sa faisabilité :
? sur le plan économique, le coût complet par acte ou par année (tenant compte en
particulier de leur stérilisation et de la gestion des déchets) des DMUM tend à être proche
de celui des DMUU (légèrement supérieur dans les travaux menés par le CHU de Clermont-
Ferrand, inférieur dans l?étude du CHU de Nîmes) mais la question du financement d?un
surcoût économique en contrepartie d?un bénéfice écologique pourrait le cas échéant être
soulevée ;
? sur le plan des ressources humaines, la surcharge de travail engendrée par le recours à
l?usage multiple par rapport à l?usage unique, ciblée sur le personnel paramédical et les
services de stérilisation, varie selon le type de DM concerné, le processus de nettoyage et
de stérilisation nécessaires et l?organisation propre à l?établissement de santé : des
capacités suffisantes et la proximité géographique du service de stérilisation, qui permet un
approvisionnement plus fluide en DMUM, sont identifiés comme des facteurs de succès ;
? sur le plan managérial, au regard de l?impact qu?est susceptible d?avoir la bascule d?un DMUU
vers un DMUM sur l?organisation des soins et la logistique hospitalière, une adhésion de
l?ensemble des professionnels concernés au projet est un pré-requis ;
? enfin, il convient de rappeler que, avant même d?envisager le passage de l?usage unique à
l?usage multiple, l?opportunité d?utiliser un DM stérile doit systématiquement être vérifiée.
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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Schéma 11 : Synthèse des résultats des travaux menés par le CHU de Clermont-
Ferrand sur la substitution de DM à usage unique par des DM réutilisables dans le cadre
de l?accouchement par voir basse
Source : Steffi Calland, support présenté au webinaire organisé par l?Anap sur la réduction de
l?empreinte écologique des produits de santé le 5 octobre 2023.
Graphique 3 : Répartition comparée des impacts écologiques d?une lame de
laryngoscope à usage unique et d?une lame à usage multiple
Source : Nathalie Rouvière, CHU de Nîmes, support présenté au congrès de la Société française de
stérilisation (SF2S) en septembre 2022. L?impact écologique de la lame à usage multiple est lié à plus
de 60% aux processus de décontamination (« washing process ») et de stérilisation, tandis que celui
de la lame à usage unique est lié aux deux tiers à sa fabrication (« manufacturing »).
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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Schéma 12 : Copie écran du simulateur créé par la société Ecovamed pour comparer
l?empreinte carbone d?un DMUM (à gauche) à celle d?un DMUU (à droite)
Source : Ecovamed (shinyapps.io)
3.3 La formation des personnels hospitaliers doit contribuer en particulier
à faire converger davantage les démarches de pertinence et de
sobriété des soins
3.3.1 Le développement de l?éco-responsabilité en matière de soins peut
contribuer à renforcer l?efficience du système de santé
[153] Au niveau national, les enjeux liés à la transition écologique du système de santé ne sont
pas encore suffisamment liés en pratique à l?objectif de renforcement de son efficience. Cette
convergence des enjeux est certes identifiée par la feuille de route de mai 2023. Elle précise que «
pace qu?il y a un lien entre sobriété et pertinence, les actions de gestion de risque de l?assurance
maladie intègreront les enjeux de transformation écologique ». Elle propose également d?intégrer à
terme des indicateurs spécifiques dans les Contrats d'Amélioration de la Qualité et de l'Efficience
des Soins (Caques)149. Si la DGOS a bien créé en 2023 un groupe de travail visant à faire remonter
les initiatives participant des soins éco-responsables150, la mission n?a pas identifié d?autres
149 Le Caques est un contrat qui lie l?ARS, l?organisme local d?assurance maladie et les établissements de santé.
Il pour objectif l?amélioration des pratiques, la régulation de l?offre de soins et l?efficience des dépenses
d?assurance maladie
150 Un soin éco-responsable est défini par la feuille de route de mai 2023 comme « un acte de soin qui, à
qualité et sécurité égales, engendre un impact moindre sur l?environnement ».
PUBLIÉ
https://ecovamed.shinyapps.io/calculateur-empreinte-carbone/
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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traductions opérationnelles, à ce stade et au niveau de l?administration centrale, de cet objectif
de convergence des démarches.
[154] Au niveau local, en revanche, sans que la mission ait procédé à une enquête exhaustive, elle
a constaté l?existence d?initiatives visant à faire converger l?objectif de réduction de l?empreinte
écologique des actes de soins et celui de leur efficience :
? le CHU de Bordeaux a ainsi recensé dans son « guide des unités durables » différents
parcours ou actes de soins (prise en charge des patients atteints de cancer du rectum,
prescription d?investigations anatomie et cytologie, prescription de pansements, etc.) pour
lesquels des leviers permettant de réduire à la fois leur coût et leur impact écologique ont
été identifiés ;
? le CHU de Nîmes a engagé des études en ACV pour comparer l?empreinte écologique
respective de différents parcours de chirurgie du canal carpien.
3.3.2 La sensibilisation des personnels hospitaliers aux enjeux liés à la transition
écologique dépend encore largement des directions d?établissement
[155] Il n?existe pas de données sur la part des effectifs à l?hôpital qui ont été formés aux enjeux
de la transition écologique ni de stratégie globale de formation alors que cette sensibilisation est,
de l?avis des professionnels rencontrés par la mission, un préalable au changement :
? le ministère de la santé a certes demandé à l?Anap, en lien avec l?EHESP, de former d?ici
fin 2024 tous les directeurs d?hôpital, directeurs des soins ainsi que les présidents de
Commissions médicale d'établissement, soit environ 500 personnes ;
? de son coté, la Direction interministérielle à la transformation publique (DITP), en lien avec
le CGEDD, accompagne le déploiement national d?un dispositif de sensibilisation conçu par
des professionnels de santé (« Plan Health Fair ») avec l?objectif de former 6 500
professionnels encadrants à l?hôpital d?ici fin 2024 ;
? plusieurs établissements de santé, à l?image de l?AP-HP, ont indiqué à la mission vouloir
former eux-mêmes tout ou partie de leurs effectifs, le cas échéant en utilisant également le
dispositif « Plan Health Fair ».
3.4 Enfin, le tri et la revalorisation des déchets issus des DM, qui
dépendent aujourd?hui largement des décisions locales, doivent faire
l?objet d?une stratégie nationale
3.4.1 Les établissements de santé sont soumis à des obligations croissantes en
matière de gestion des déchets, en partie communes au secteur tertiaire
[156] Sous réserve du sujet spécifique des Déchets de soins à risque infectieux (Dasri), les
obligations des établissements de santé en matière de gestion des déchets sont comparables à
celles d?autres entreprises :
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RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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? en dehors d?une note actualisée en 2023 par la FHF, la mission n?a pas identifié de circulaire
nationale rappelant aux établissements de santé ces obligations, et l?accompagnement
dont ils pouvaient éventuellement bénéficier pour les satisfaire ;
? or les établissements de santé font souvent partie, l?échelle d?un territoire, des plus gros
producteurs de déchets ;
? le renforcement des obligations en matière de tri et de valorisation151 implique un travail
important de la part des établissements de santé en matière de sensibilisation des
professionnels, de réorganisation de la logistique et de sélection de prestataire, avec un
potentiel surcoût.
[157] En revanche, le recyclage et la valorisation des DM ne font pas l?objet à ce stade
d?obligations au niveau national :
? aucune des filières à Responsabilité élargie des producteurs (Rep)152 ne prend en charge les
déchets issus des DM utilisés par les établissements de santé153, y compris la filière des
Dispositifs et équipements électriques et électroniques (D3E) dont le périmètre
d?intervention présente des adhérences avec les DM ;
? si certains établissements de santé, dont la mission n?a pu objectiver le nombre, ont pris
l?initiative de valoriser auprès d?organismes de recyclage les métaux précieux présents sur
les cathéters d?électrophysiologie, aucun encadrement n?est prévu au niveau national154.
3.4.2 Les établissements de santé sont peu incités et accompagnés dans la
réduction et la valorisation des déchets, en particulier ceux issus des DM
[158] Un travail a été engagé au niveau national et dans la plupart des établissements de santé
pour réduire le volume des Dasri. En effet, outre qu?elle représente un coût pour l?établissement
de santé, en moyenne, l?incinération d?une tonne de Dasri génère, selon le Shift Project, trois fois
plus d?émissions carbone que celles des déchets ménagers. Cette réduction du volume de Dasri
repose essentiellement sur une amélioration du tri et, dans certains établissements de santé, sur
151 La législation pose depuis 2016 l?obligation du tri 6 flux (étendu depuis 2021 à 7 flxu) correspondant au tri
et à la collecte séparée des déchets de papier / carton, métal, plastique, verre, bois (et de textile à partir du
1er janvier 2025) et des déchets de plâtre et de fractions minérales pour les déchets de la construction et de
la démolition.
152 Les filières à Responsabilité élargie des producteurs (Rep) sont des dispositifs particuliers d?organisation
de la prévention et de la gestion de déchets qui concernent certains types de produits. Ces dispositifs
reposent sur le principe de responsabilité élargie du producteur, selon lequel les producteurs, c?est-à-dire les
personnes responsables de la mise sur le marché de certains produits, peuvent être rendus responsables de
financer ou d?organiser la prévention et la gestion des déchets issus de ces produits en fin de vie. Il existe à
l?heure actuelle douze filières Rep.
153 Il existe en revanche une filière Rep pour les DM perforants utilisés par les patients en auto-traitement.
154 Cette valorisation consiste à découper, après leur utilisation, la pointe des cathéters qui est ensuite
vendue à des organismes spécialisés qui en extraient les métaux précieux pour les réutiliser ou les vendre. À
titre d?illustration, le CHU de Bordeaux a indiqué à la mission obtenir 8¤ par cathéter dont les métaux
précieux sont valorisés. Sel
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le recours à un banaliseur155 qui permet de convertir les Dasri en Déchets assimilés à des ordures
ménagères (DAOM). L?Anap a produit en particulier des outils pour guider les établissements de
santé qui envisagent de s?engager dans la banalisation de leurs Dasri. La DGOS, en lien notamment
avec le Haut conseil de la santé publique, est en train d?élaborer une nouvelle version du guide
sur la gestion des Dasri visant à réduire le périmètre des déchets relevant de cette catégorie.
[159] Cela étant, la réduction du périmètre des Dasri, principal levier investi aujourd?hui au niveau
national, ne répond que partiellement à la problématique écologique liée aux déchets issus en
particulier des produits de santé. Or cette question des déchets, même si elle constitue l?un des
sept domaines d?action de la feuille de route de mai 2023, est encore abordée de façon limitée
au niveau du ministère de la santé, et sans imbrication suffisante avec l?enjeu de décarbonation
du secteur. Les différents leviers de réduction des déchets mentionnés par la feuille de route, qui
concernent en particulier les médicaments et les DM, justifieraient la mise en place d?un
accompagnement spécifique des établissements de santé, ainsi que le cas échéant des incitations
financières. Par ailleurs, une partie de ces leviers (ex : mise en place d?une filière de collecte et de
valorisation des verres médicaux issus des soins, préfiguration d?une filière Rep sur les textiles
sanitaires à usage unique) nécessitent une évolution de la législation qui ne peut être engagée sans
les administrations en charge de la transition écologique.
155 Les banaliseurs de Dasri sont des machines permettant de réduire les déchets en petits morceaux. Les
débris des déchets sont ensuite chauffés à très haute température afin d'éliminer les composants dangereux
qu'ils contiennent. Une fois les Dasri passés dans le banaliseur, ils peuvent être traités comme des déchets
ménagers (inertes) ordinaires.
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ANNEXE 5 : Résultats du questionnaire
adressé par la mission aux établissements
de santé
1 RAPPEL DU CONTEXTE DU QUESTIONNAIRE .............................................................................. 113
2 RESULTATS ............................................................................................................................................ 113
2.1 LES DONNEES DES ETABLISSEMENTS : STATUTS ET ACHATS DE DM .................................................... 114
2.1.1 Nombre d?établissements répondant et leur statut ..................................................................... 114
2.1.2 Les achats de DM................................................................................................................................ 114
2.2 LA POLITIQUE MENEE PAR LES ETABLISSEMENTS SUR LA REDUCTION DES GAZ A EFFET DE SERRE (GES) 116
2.2.1 La réalisation du bilan de gaz à effet de serre................................................................................ 116
2.2.2 Intégration de critères environnementaux dans la politique achat de DM ............................... 117
2.2.3 Le tri des déchets de DM................................................................................................................... 117
2.3 LES ETABLISSEMENTS ET L?EXPERIMENTATION INSCRITE A L?ARTICLE 29 DU PLFSS ............................ 118
2.3.1 Les CHU et les EPBL répondants sont les plus intéressés pour participer à l?expérimentation
.............................................................................................................................................................. 118
2.3.2 Le choix des DM se porte vers les sondes d?électrophysiologie, mais il existe une confusion
entre retraitement et recyclage ....................................................................................................... 119
2.3.3 Les freins identifiés ............................................................................................................................. 119
2.4 LES FACTEURS DE REUSSITE DE CETTE EXPERIMENTATION ................................................................... 119
2.5 LES INDICATEURS DE SUIVI DE L?EXPERIMENTATION ........................................................................... 120
2.6 LES AUTRES LEVIERS PRIORITAIRES POUR DIMINUER L?EMPREINTE CARBONE DES DM .......................... 120
3 CONCLUSION ....................................................................................................................................... 120
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1 Rappel du contexte du questionnaire
[160] Dans le cadre de la mission Igas-Igedd relative à la levée de l?interdiction de la réutilisation
des dispositifs médicaux à usage unique (DMUU), la mission, avec l?aide du pôle numérique, a mis
en place un questionnaire Solen à destination des établissements de santé publics et privés tout
statut : Centres Hospitaliers Universitaires (CHU), Centres Hospitaliers (CH), Etablissements privé
de Santé d?Intérêt collectif (ESPIC), et Etablissements privés à but lucratif (EPBL).
[161] Cette enquête a été annoncée lors des 33ème journées nationales sur les dispositifs médicaux
à Clermont Ferrand du 10 au 12 octobre 2023, et mis en ligne du 19 octobre 2023 au 20 novembre
2023 sur les sites d?Europharmat, de la Fédération de l?Hospitalisation de France (FHF), de la
Fédération de l?Hospitalisation Privée (FHP), et de la Fédération des Etablissements Hospitaliers
et d'Aide à la Personne Privés solidaires (FEHAP).
[162] Cette enquête s?est adressée aux directions et aux pharmacies à usage intérieur (PUI) des
établissements de santé qui devaient remplir ensemble les deux parties du questionnaire. La
mission a souhaité que cette enquête reste anonyme, avec comme objectif que les résultats
permettent de documenter le rapport qui sera transmis aux ministres.
[163] Le questionnaire a été établi par la mission, et a été relu par des professionnels de santé
pharmaciens en charge des dispositifs médicaux, et par un représentant de la FHF.
[164] Il est construit en trois parties :
? la première partie concerne les données de l?établissement ;
? la deuxième partie concerne la politique menée par l?établissement sur la réduction des gaz
à effet de serre (GES) ;
? la troisième partie concerne plus spécifiquement l?expérimentation prévue à l?article 29 de
la LFSS pour 2024.
[165] Enfin, la mission a souhaité connaitre quels pourraient être les leviers à disposition des
établissements de santé pour diminuer l?empreinte carbone des DM, et lesquels seraient
prioritaires.
2 Résultats
[166] Les réponses au questionnaire Solen apportées par les établissements de santé répondants
sont de nature variable en termes de qualité de saisie. Certains établissements de santé n?ont pas
répondu à l?intégralité des questions, et certaines données chiffrées sont approximatives
(notamment concernant les montants des achats de DM) Il a donc été difficile pour la mission
d?en faire une synthèse exhaustive.
[167] Même si le nombre de réponses est important, 1583, peu de réponses sont complètes (tous
les champs renseignés), et ne représentent que 6 % des répondants.
PUBLIÉ
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2.1 Les données des établissements : statuts et achats de DM
2.1.1 Nombre d?établissements répondant et leur statut
[168] 96 établissements de santé tout type de statut ont répondu complètement au
questionnaire. 1 583 réponses étaient partielles et non pas été intégrées aux résultats présentés.
Tableau 20 : Statut des établissements répondant
Statut des établissements Nombre d?établissements
CHU 11
CH 57
Espic 1
EPBL 27
Total 96
Source : Mission.
[169] Au 31 décembre 2020156, le secteur hospitalier français MCO (hors HAD, USLD et psychiatrie)
est constitué de 1 116 entités géographiques du secteur public : 180 centres hospitaliers régionaux
(CHU et CHR) ; 936 centres hospitaliers (CH, y compris les anciens hôpitaux locaux). Les structures
hospitalières privées comprennent 972 cliniques privées à but lucratif et 670 établissements
privés à but non lucratif, dont 20 centres de lutte contre le cancer (CLCC).
[170] Le nombre de répondants n?est pas représentatif du secteur,1/3 des CHU et un très faible
nombre d?établissements de type CH et d?établissements privés à but non lucratif et lucratif ont
participé à l?enquête.
2.1.2 Les achats de DM
[171] Le montant moyen des achats de DM pour ces établissements est d?environ 8,7 millions d?¤,
et celui des DMI est de 3,7 millions d?¤.
[172] A noter que tous les logiciels de gestion des PUI ne sont pas dans la capacité de ventiler les
DMUU et les DMUM dans la part des achats de DM, et certains établissements ont répondu par
une estimation.
[173] Les données présentées dans le tableau ci-dessous sont des moyennes des montants des
achats en M¤ pour l?année 2022.
156 DREES, les établissements de santé, édition 2022
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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Tableau 21 : Moyenne des montants des achats par statut année 2022
Achats DM Dont DMI Dont DMUU Dont DMUM
CHU 12,1 5,2 11,4 0,9
CH 10,4 4,5 9 0,6
ESPIC 1,4 0,5 Non renseigné Non renseigné
EPBL 10,8 4,8 8,2 0,4
Source : Mission.
Graphique 4 : Répartition graphique des moyennes des achats en ¤
Source : Mission.
[174] Les DMUU représentent la part majoritaire des achats de DM pour les établissements quel
que soit leur statut, il convient de préciser que les DMI font partie des DMUU.
Tableau 22 : Part des DMUU, DMI et DMUM dans les achats des établissements de
santé
Part des DMUU / achat
de DM
Part des DMI / achat de
DM
Part des DMUM /
achat de DM
CHU 94 % 43 % 8 %
CH 87 % 44 % 6 %
ESPIC Non renseigné 34 % Non renseigné
EPBL 76 % 44 % 4 %
Source : Mission.
PUBLIÉ
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2.2 La politique menée par les établissements sur la réduction des gaz à
effet de serre (GES)
2.2.1 La réalisation du bilan de gaz à effet de serre
[175] Tous les établissements de santé de plus de 250 agents auraient dû réaliser leur bilan des
gaz à effet de serre (BGES). Dans cette enquête, 60 % des établissements ayant répondus
déclarent avoir réalisé un BGES et 33 % intégrant le scope 3 obligatoire à partir du 1er janvier 2023.
Tableau 23 : Réalisation du BGES par type d?établissement
Nombre
d?établissements
GES scope 1 Dont scope 3
CHU 11 10 91 % 3 30 %
CH 57 35 61 % 10 29%
ESPIC 1 1 100 % 0 0
EPBL 27 12 44 % 6 50 %
Source : Mission.
Graphique 5 : BGES par type d?établissement
Source : Mission.
[176] Les BGES ont été réalisés pour leur majorité en 2021 (13 établissements tout statut), 2022
(10 établissements tout statut) et 2023 (7 établissements tout statut). 13 établissements tout
statut ont réalisé leur BGES entre 2012 et 2020. La règlementation impose que le BGES soit revu
tous les trois ans, la mission n?a pas évalué si les établissements qui avaient réalisés leur BGES
avant 2019 l?ont revu.
10
35
1
12
3
10
0
6
0
5
10
15
20
25
30
35
40
11 57 1 27
CHU CH ESPIC Privé but lucratif
GES scope 1 Dont Scope 3
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2.2.2 Intégration de critères environnementaux dans la politique achat de DM
[177] Concernant les établissements ayant répondu à l?enquête, 67 % déclarent avoir intégré des
critères environnementaux dans les achats de DM.
Tableau 24 : Intégration de critères environnementaux dans les achats de DM
Nombre
d?établissements
Ayant intégré des
critères
environnementaux
% Nbr de marchés de
DM concernés en
2022 et 2023
CHU 11 9 82% Entre 25 et 500
CH 57 38 67% Entre 1 et 200
Espic 1 1 100% NC
EPBL 27 16 59% Entre 2 et 40
Source : Mission.
[178] Les CHU ayant répondu déclarent que les critères environnementaux représentent entre
10% et 20 % de la pondération. Concernant les CH, ils achètent majoritairement via les
groupements hospitaliers de territoires, et ne précisent pas la pondération. Pour ceux qui ont
répondu, la pondération est plus faible que pour les CHU et serait entre 2,5% et 5 %. Aucun
établissement privé n?a précisé la pondération de ces critères (majoritairement les achats sont
faits via une centrale d?achat qui référence des produits pour les établissements).
[179] Pour ceux qui n?auraient pas encore intégré ce type de critères, 4 CH, et 5 EPBL déclarent
les intégrer dans le cadre d?un prochain appel d?offre.
2.2.3 Le tri des déchets de DM
[180] Les établissements répondant précisent que des procédures de gestion sont mises en place
et que les DM sont majoritairement triés dans les filières des déchets d?activité de soins à risques
infectieux (DASRI) ou les déchets assimilés aux ordures ménagères (DAOM). Certaines DASRI sont
banalisées et suivent ensuite le circuit classique avec enfouissement, pour certains DM périmés,
ils sont repris par des industriels.
[181] À noter que certains établissements indiquent qu?aucun tri n?est mis en place et que tous
les DM passent par la filière DASRI.
2.2.3.1 Filières de récupération ou de recyclage des DMUU
[182] Les principales filières mises en place par les établissements sont celles de recyclage de
l?inox des lames de laryngoscopes, et de certains métaux précieux, et des piles pour les DMI actifs
(pacemakers notamment).
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Tableau 25 : Filières de récupération mises en place par type d?établissement
Nombre d?établissements Filière de récupération
CHU 9 /11 Récupération des prothèses de hanche / genou
nettoyées et stockées
Expérimentation pour certains endoscopes à UU et
uthéroscope
Inox des lames de laryngoscope, amalgames dentaires,
piles des DMI actifs, câbles des bistouris
CH 15/57 Inox des lames de laryngoscope, pinces et ciseaux
Piles des DMI actifs, bistouris électriques et électrodes
Si un potentiel de valorisation matière est possible, les
DM peuvent être envoyés en filière D3E, métaux ou
plastiques
ESPIC 1/1 Non précisée
EPBL 16/27 Non précisée
Source : Mission.
2.3 Les établissements et l?expérimentation inscrite à l?article 29 du PLFSS
2.3.1 Les CHU et les EPBL répondants sont les plus intéressés pour participer à
l?expérimentation
[183] Ce sont majoritairement les CHU et les EPBL qui affichent leur intérêt de participer à cette
expérimentation, les CH sont plus mitigés. Ce résultat peut interroger notamment si on prend
comme hypothèse que ce sont les établissements de santé les plus informés de cette
expérimentation qui ont répondu à l?enquête.
Tableau 26 : Établissements intéressés pour participer à l?expérimentation
Oui Non Sans réponse
CHU 7 4 0
CH 26 24 7
Espic 1 0
EPBL 14 11 2
Total 48 39 9
Source : Mission.
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2.3.2 Le choix des DM se porte vers les sondes d?électrophysiologie, mais il
existe une confusion entre retraitement et recyclage
[184] Majoritairement, les établissements de santé répondants orientent leur choix vers les DM
d?électrophysiologie (cathéters de diagnostics et d?ablation) pour des raisons financières et
écologiques car ces DM ont un coût important et contiennent des métaux précieux. Un CHU
évoque des DM utilisés dans des robots de chirurgie (en urologie).
[185] Cependant, des établissements de santé citent, pour cette expérimentation, des DMUU qui
existent également en usage multiple tels que certains endoscopes, les lames de laryngoscopes,
des ciseaux, des pinces ?.ou encore des DM de types protections pour incontinences, tubulures
ou encore perfusions. Ce type de réponse montrent une confusion entre l?expérimentation qui
porte sur le retraitement de DMUU et le recyclage.
2.3.3 Les freins identifiés
Les principaux freins portent sur :
? l?information du patient ;
? la matériovigilance et traçabilité du retraitement ;
? le risque infectieux, et la perte de performance du DM retraité ;
? la logistique des flux (stockage, transport?) ;
? l?absence de service de stérilisation ;
? le manque de temps du personnel soignant.
[186] Enfin, certains établissements soulignent que d?autres projets sont en cours, notamment
des travaux sur les filières de déchets.
2.4 Les facteurs de réussite de cette expérimentation
[187] En interne aux établissements, les principaux facteurs de réussite sont l?acceptation des
patients par l?organisation d?échanges avec les représentants des usagers, la motivation et la
coordination de tous les acteurs au sein de l?établissement de santé, la mise en place d?une filière
à proximité de l?établissement de santé et un accompagnement des établissements de santé qui
pourrait préciser notamment les responsabilités de chaque partie prenante.
[188] Les établissements de santé répondants précisent que la garantie de gains écologique
(disposer d?une analyse du cycle de vie des DMUU retraités) et économique représente aussi un
facteur de réussite, comme le fait de disposer d?un accompagnement méthodologique et
financier (recrutement de ressources pour l?organisation interne et le suivi de l?expérimentation).
[189] Enfin, il est noté la nécessité de disposer d?un positionnement clair des sociétés savantes
sur le retraitement des DMUU.
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2.5 Les indicateurs de suivi de l?expérimentation
[190] Les indicateurs le plus souvent cités sont des indicateurs quantitatifs portant sur le nombre
de DMUU retraités, le nombre de réutilisation, le bilan économique, les délais de livraison du
fournisseur de DMUU retraités.
[191] Cependant, certains centres hospitaliers évoquent des indicateurs plus qualitatifs :
? sur le plan clinique : retour des praticiens en termes d?efficacité, de technicité et de
fonctionnalité du DMUU retraité, et évaluer sa satisfaction ;
? sur la sécurité des soins : taux de complication pendant l?expérimentation ;
? sur le plan écologique : comparer les analyses de cycles de vie du DMUU initial et du DMUU
retraité intégrant le bilan carbone, en eau, les métaux précieux ;
? sur le plan économique : réaliser une analyse en coût complet intégrant une analyse de
sensibilité pour tester la robustesse du modèle.
2.6 Les autres leviers prioritaires pour diminuer l?empreinte carbone des
DM
[192] Les autres leviers principalement cités sont ceux à « la main » des fournisseurs, notamment
concernant la transparence sur l?empreinte carbone du DM afin que celui-ci puisse être intégré
comme critère objectif lors des achats hospitaliers (éco conception des DM et limitation des
emballages, mais également sur la mise à disposition de set ou de trousse de chirurgie adapté aux
besoins des praticiens (pertinence de la composition).
[193] D?autres leviers relèvent plus de l?établissement de santé, comme celui de mener des
travaux sur l?homogénéisation des pratiques de soins, réinterroger les pratiques dans le sens de la
pertinence des soins, de la sobriété des prescriptions et du bon usage (limiter l?utilisation des DM
stériles quand le soin ne s?y prête pas) ; et enfin repasser pour certains DMUU à des DMUM si
l?organisation hospitalière le permet.
[194] Enfin, le développement de filières de tri est un des principaux leviers pour diminuer
l?empreinte carbone des DM.
3 Conclusion
[195] Les résultats de cette enquête ne permettent pas d?établir des réels constats en raison du
faible nombre d?établissements répondants, néanmoins, ils donnent quelques informations.
[196] La part des DMUU dans les achats de DM des hôpitaux est élevée, ce qui tend à confirmer
qu?ils sont très largement utilisés (même si la part des DMI est retranchée) et que l?usage des
DMUM reste encore marginal.
[197] Les établissements s?investissent dans la décarbonation des DM, la mission a pu l?apprécier
lors de ses déplacements dans deux CHU (Clermont Ferrand et Bordeaux) et lors des auditions
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menées avec le CHU de Nîmes et de Strasbourg. De nombreuse actions sont en cours, les résultats
de cette enquête en montrent certaines notamment celles engagée vers une optimisation des
besoins de DM lors de certaines prises en charge, concernant le passage aux DM à usages multiples
quand l?organisation hospitalière le permet, ou encore la diminution des DASRI par une meilleure
gestion du tri ou des achats comportant moins d?emballage inutile.
[198] En ce qui concerne spécifiquement l?expérimentation du retraitement des DMUU inscrite à
l?article 29 du PLFSS, les réponses transmises montrent que les établissements disposent de peu
d?informations, notamment sur le cadrage règlementaire instauré par le nouveau règlement
européen (article 17). Cette méconnaissance entraîne des confusions entre ce qu?est le
retraitement tel que défini par le règlement européen et le recyclage. De plus, ces résultats
montrent que le périmètre de cette expérimentation (retraitement par un tiers et non par une
PUI) n?est pas complètement connu. En effet, certains répondants précisent qu?il n?y a pas de
stérilisation sur le site, ou que la stérilisation ne peut pas prendre plus de matériels.
[199] Bien que le périmètre de cette expérimentation ne soit pas bien connu, les établissements
considèrent que sa mise en place devra s?intégrer dans un projet d?établissement avec toutes les
parties prenantes, de la direction aux professionnels soignants. Ce facteur de réussite nécessite
néanmoins un accompagnement tant sur la méthode que sur les ressources humaines dans un
contexte de tensions hospitalières.
[200] Enfin, la place des industriels est soulignée. Elle s?intègre en amont dans le cadre des
marchés, avec plus de transparence sur l?empreinte carbone des DM, et sur la mise à disposition
de sets de soins plus conformes avec les pratiques des professionnels (limitation des DM non
utilisés).
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PUBLIÉ
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LISTE DES PERSONNES RENCONTRÉES
Cabinets ministériels
Cabinet du ministre de la santé et de la prévention
M. Raymond LE MOIGN, directeur de cabinet
Mme Capucine GREGOIRE, vonseillère financement, protection sociale et produits de santé
Cabinet de la ministre déléguée chargée de l?Organisation territoriale et des Professions de santé
Mme Isabelle EPAILLARD, directrice de cabinet
M. Pierre BRETON, conseiller Santé environnementale, une seule santé et planification écologique
du système de santé
Cabinet du ministre de la Transition écologique, et de la cohésion des territoires
M. Samuel JUST, conseiller économie circulaire et prévention des risques
Ministère en charge de la santé
Secrétariat général des ministères sociaux
M. Pierre PRIBILE, secrétaire général des ministères sociaux
M. Yann DEBOS, chef de service, pôle santé ARS
Direction générale de la santé (DGS)
Dr Grégory EMERY, directeur général adjoint
Mme Hélène MONASSE, sous-directrice, sous-direction Politique des Pratiques (PP)
Mme Esther LEPAICHEUX, cheffe du bureau dispositifs médicaux et autres produits de santé,
Sous-direction Politique des Pratiques (PP)
Mme Mélanie CAILLERET, adjointe à la cheffe de bureau des dispositifs médicaux et autres
produits de santé, Sous-direction Politique des Pratiques (PP)
Direction générale de l?offre de soins (DGOS)
Mme Emmanuelle COHN, sous directrice par intérim, sous-direction du pilotage la performance
des acteurs de l?offre de soins (PF)
Mme Anne LESQELEN, adjointe à la cheffe de bureau des produits de santé (PF2), sous-direction
du pilotage de la performance des acteurs de l?offre de soins (PF)
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RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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Mme Amélie PERINAUD, chargée de mission, bureau des produits de santé (PF2), sous-direction
du pilotage de la performance des acteurs de l?offre de soins (PF)
Mme Hélène GILQUIN, cheffe de projet Elus Territoires et Transition Ecologique du Système de
Santé
M. Raphaël RUANO, responsable du Programme national d?Achats Hospitaliers PHARE
(Performance Hospitalière pour des Achats Responsables)
Mme Véronique CHASSE, adjointe au responsable du Programme national d?Achats Hospitaliers
Direction de la sécurité sociale (DSS)
M. Guillaume CARVAL, adjoint au chef de bureau des produits de santé (1C), sous-direction du
financement du système de soins
Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des Produits de Santé (ANSM)
M. Thierry SIRDEY, directeur de la Direction des dispositifs médicaux, des cosmétiques et des
dispositifs de diagnostic in vitro (DMCDIV)
Mme Gwennaëlle EVEN, adjointe au Directeur de la Direction des dispositifs médicaux, des
cosmétiques et des dispositifs de diagnostic in vitro (DMCDIV)
M. Frédéric DITTENIT, directeur adjoint et délégué à la protection des données, Direction
Réglementation et Déontologie
Caisse Nationale d?Assurance Maladie (Cnam)
M. Grégoire DE LAGASNERIE, responsable du département produit de santé, Direction déléguée
à la gestion et à l?organisation des soins
M. Bertrand PARADIS, responsable adjoint du département produit de santé, Direction déléguée
à la gestion et à l?organisation des soins
Mme Claire TRAON, directrice de mission sur la transition écologique et la santé environnement,
Direction déléguée à la gestion et à l?organisation des soins
Agence Nationale d?Appui à la Performance (Anap)
Mme Emeline FLINOIS, directrice du Pôle RH et du Pôle Investissement, logistique et
développement durable
Mme Hélène EYCHENIE, pharmacienne
Mme Lucile BATTAIS, experte logistique et développement durable
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Ministère en charge de l?Économie
Direction générale des entreprises (DGE)
Mme Roxane SPINARDI, coordinatrice nationale du volet Dispositifs Médicaux France 2030
Mme Charlotte LEUXE-OLIVIER, chargée de mission au bureau des industriels de santé
M. Louis-Samuel PILCER, directeur de projets santé, relocalisation des industries de santé
M. Charles FLAHAULT, chargé de mission décarbonation des industries de santé
Ministère en charge de la transition écologique
Agence de la transition écologique (Ademe)
M. Raphael GUASTAVI, directeur adjoint économie circulaire
Direction générale de la prévention des risques (DGPR)
M. Vincent COISSARD, sous-directeur déchets et économie circulaire
Mme Diane DEWALLE, chargée de mission recyclage
Mme Coralie RAVIER, chargée de mission gestion des déchets dangereux
Direction générale de l?énergie et du climat (DGEC)
M. Florian TIRANA, chargé de mission projection SNBC
Commissariat général au développement durable (CGDD)
Mme Julie HANOT, sous-directrice des entreprises
Secrétariat général à la planification écologique (SGPE)
Mme Cécilia BERTHAUD, secrétaire générale adjointe à la planification écologique, en charge du
pôle « ambition »
Mme Elise BEHM, chargée de mission décarbonation
Interlocuteurs à l?étranger
Secrétariat général, délégation aux affaires européennes et internationales
Mme Catherine BORSI-SERHAN, cabinet du délégué aux affaires européennes et internationales,
responsable du pôle « Pilotage et réseau des conseillers pour les affaires sociales »
Mme Mireille JARRY, conseillère pour les affaires sociales Espagne
Mme Caroline CHAULET, adjointe à la conseillère pour les affaires sociales Espagne
M. Thomas GOUJAT, chargé de mission auprès du conseiller pour les affaires sociales Allemagne
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Mme Valérie MAUROURY, adjointe au conseiller pour les affaires sociales Stockholm,
Copenhague, Oslo et Helsinki
Société VANGUARD
Mme Viola VAHLE, responsable du développement des affaires internationales
Mme Ulrike MARCZAK, CEO, Directrice générale
Dr Hagen THIELECKE, directeur de la recherche et du développement
Clinique du groupe VIVANTES Berlin
Dr EWERSTSEN, médecin électrophysiologiste
Ministère fédéral de la santé allemand
Mme Katharina JAKOB, bureau Droit des dispositifs médicaux
Mme Raphaela WAGNER, bureau des coopérations bilatérales en santé, Direction des affaires
européennes et internationales
Bundersintitut für Arzneimittel und Medinzinprodukte (Bfarm)
M. Joseph ZUNDORF, chef du département des dispositifs médicaux
Mme Anja JACOBSHAGEN, chargée de mission au département des dispositifs médicaux
Représentation permanente de la France auprès de l?Union Européenne
Mme Marie DE LASTELLE, conseillère Santé
M. Antoine ICHAS, attaché Santé
Commission européenne
M. Gabriele CALLIGARO, Directorate-General for Health and Food Safety, Unit D3 ? Medical
Devices
Organisation Mondiale de la Santé (OMS)
Mme Stéphanie SEYDOUX, en charge des affaires multilatérales Cabinet du Directeur général de
l?OMS
National Health System (Grande-Bretagne)
Mme Sarah OUAHNON, Senior Net Zero Delivery NHS
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Établissements de santé et acheteurs hospitaliers
Centre Hospitalier Universitaire de Bordeaux
Pr Frédéric SACHE, praticien hospitalier, chef du service de cardiologie interventionnelle
Dr Josselin DUCHATEAU, praticien hospitalier, médecin en électrophysiologie service de
cardiologie interventionnelle
Dr Noëlle BERNARD, praticien hospitalier copilote de la transformation écologique
Dr Franck BLADOU, chirurgien urologue, chef du pôle de chirurgie
Mme Diane PAPUCHON, cadre de santé en cardiologie interventionnelle
Mme Isabelle PIDOUX, infirmière en cardiologie interventionnelle
Mme Aurélie FRESSELINAT, pharmacienne, Praticien hospitalier responsable du service Pharmacie
des dispositifs médicaux,
M. Sami YENI, pharmacien, Praticien hospitalier service Pharmacie des dispositifs médicaux
M. Raphaël YVEN, secrétaire général du CHU, directeur de la transformation écologique
Mme Agnès LASHERAS-VAUDUIN, responsable de l'unité prévention et contrôle des infections au
service d'hygiène hospitalière et référente hygiène pour la transformation écologique
Mme Cécile ANDICOECHEA, ingénieure transformation écologique
M. Xavier COPPEAUX, référent gestion des déchets
Mme Estelle OUSSAR, directrice Nouvel hôpital et ressources opérationnelles
Centre Hospitalier Universitaire de Clermont Ferrand
Pr Valérie SAUTOU, professeure des Universités, Praticien hospitalier, cheffe de pôle pharmacie,
Gérant de la pharmacie à usage intérieur
Mme Valérie DURAND-ROCHE, directrice générale du CHU de Clermont Ferrand
Mme Christine ROUGIER, directrice générale adjointe du CHU de Clermont Ferrand
Mme Audrey ENGUIX, pharmacienne Praticien hospitalier, Dispositifs médicaux, Coordonnateur
du groupement d?achat PharmAuvergne
M. Adrien BIARD, pharmacien, Praticien hospitalier, Chef du service Dispositifs Médicaux Stériles
Mme Delphine OUDOUL, pharmacienne, Praticien hospitalier, Cheffe de service de la Stérilisation
Mme Steffi CALLAND, pharmacienne assistante spécialiste, service de stérilisation
M. Rudy CHAUVEL, directeur des affaires juridiques et de la transition écologique
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Centre Hospitalier Universitaire de Nîmes
M. Jean-Marie KINOWSKI, pharmacien gérant de la pharmacie à usage intérieur, Praticien
hospitalier
Mme Virginie CHASSEIGNE, pharmacienne, Praticien hospitalier
Mme Ninon ROUVIERE, pharmacienne assistante spécialiste
Centre Hospitalier Universitaire de Strasbourg
Pr Patrick PESSAUX, chirurgien digestif aux Hôpitaux Universitaires de Strasbourg, président de
l?Association Française de Chirurgie
Agence Générale des Equipements et Produits de santé (AGEPS), Assistance Publique, Hôpitaux de
Paris (AH-HP)
M. Renaud CATELAND, directeur de l?AGEP
Mme Estelle PLAN, directrice des achats
Pr Pascal PAUBEL, pharmacien, Professeur des Université, Praticien hospitalier, chef de service
évaluations pharmaceutiques et bon usage
Mme Suzanne HAGHIGHAT, pharmacienne, Praticien hospitalier, responsable de l?évaluation et
achat des dispositifs médicaux
Fédération hospitalière de France (FHF)
M. Rudy CHOUVEL, directeur adjoint du CHU de Clermont Ferrand, chargé de mission transition
écologique à la FHF
M. Jean-François HUSSON, pharmacien, Praticien hospitalier, chef de service de la pharmacie du
Centre Hospitalier de Blois, chargé de mission produits de santé à la FHF
Mme Cécile CHEVANCE, responsable pôle Offre de soins, Finances, FHF Data, Recherche et e-
santé (OFFRES) à la FHF
Mme Dominique GOEURY, pharmacienne, chargée de mission à la FHF
GIP RESAH, réseau des acheteurs hospitaliers
M. Dominique LEGOUGE, président du GIP RESAH
UniHA, la coopérative des acheteurs hospitaliers
M. Walid BEN BRAHIM, directeur général
Mme Véronique BERTRAND, directrice générale adjointe, directrice de l?offre
M. Sami YANI, pharmacien Praticien hospitalier, CHU de Bordeaux
Mme Marion CASTEL-MOLIERES, pharmacienne, Praticien hospitalier, CHU de Toulouse
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Sociétés savantes, syndicats et ordres
Académie Nationale de Pharmacie
M. Pierre-Yves CHAMBRIN, pharmacien Praticien hospitalier, Agence générale des équipements
et des produits de santé (AGEPS), Assistance Publique, Hôpitaux de Paris (AP-HP)
Conseil National de l?ordre des pharmaciens
Mme Carine WOLF-THAL, présidente du Conseil national de l?ordre des pharmaciens
M. Patrick RAMBOURG, président du Conseil central
Mme Anne BERTHELOT, directrice adjointe de l?exercice professionnel et du Cespharm
Personnalité qualifiée
Pr Gilles AULAGNER, pharmacien hospitalier, Professeur des Université, ancien Président de
l?Académie Nationale de Pharmacie
Syndicat Nationale de l?Industrie des technologues Médicales (SNITEM)
Mme Cécile VAUGELADE, directrice affaires technico-règlementaires
Observatoire du médicament, des dispositifs médicaux et de l?innovation thérapeutique (OMEDIT)
Ile de France
Mme Patricia LE GONIDEC, pharmacienne, Praticien hospitalier, Responsable de l?OMEDIT IDF
EURO-PHARMAT
Mme Isabelle LE DU, pharmacienne Hospitalière, Présidente d?Euro-pharmat
M. Dominique THIVEAUD, pharmacien Hospitalier, ex-Président d?Euro-Pharmat
Société Française d?Hygiène Hospitalière (SF2H)
Dr Pierre PARNEIX, président de la SF2H, Centre d?appui à la prévention des infections
nosocomiales (CPIAS), Nouvelle Aquitaine
Société Française des sciences de la stérilisation (SF2S)
M. Christophe LAMBERT, président de la SF2S
M. Marc LAURENT, vice-Président de la SF2S
Autres entreprises et associations
Organisme Notifié GMED ? LNE
M. Lionel DREUX, président du GMED
Mme Béatrice LYS, directrice Technique du GMED
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RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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The Shift Projet
Mme Marie KERNEC, directrice EHESP international, bénévole au Shift Project
Mme Laurie MARRAULT, cheffe de projet santé
Agence Primum Non Nocere
M. Olivier TOMA, fondateur de l?Agence Primum Non Nocere
ECOVAMED
M. Sébastien TAILLEMITE, président d?ECOVAMED
France Assos Santé, la voie des usagers
Mme Catherine SIMONIN, membre du bureau de France Assos Santé
M. Pascal SELLIER, association de familles de Traumatismes Crâniens, Représentant des usagers à
la CNEDIMTS
M. Yann MAZENS, chargé de mission produits et technologies de la santé à France Assos Santé
M. Jean-François THEBAUT, vice-président de la Fédération Française des Diabétiques
M. Gilbert BOUNAUD-DEVILLERS, association des porteurs de défibrillateurs cardiaques
Johnson & Johnson MedTech
Mme Megane PETITJEAN, responsable du département qualité JJ MedTech France
M. Olivier GRUMEL, responsable affaires règlementaires JJ MedTech France
M. François GANDEMET, directeur général JJ MedTech France
Fédération nationale des activités de la dépollution et de l?environnement
Clotilde VERNON : Responsable recyclage et filières REP
Valentine BALOCHE : Chargée de mission collecte
Fédération professionnelle des entreprises de recyclage
Léonard NEUVILLE : Chef de projet recyclage, énergie et décarbonation
DASTRI : éco organisme national
Laurence BOURET : Déléguée générale
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RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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LETTRE DE MISSION
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RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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Synthèse
Recommandations de la mission
Sommaire
Rapport
1 Le périmètre et les modalités de retraitement à titre expérimental des DMUU devront être déterminés en l?absence de filière industrielle en France
1.1 Seule une entreprise, Vanguard, localisée en Allemagne, est susceptible de retraiter des DMUU dans les deux prochaines années
1.1.1 Le cadre expérimental retenu par la LFSS 2024 n?est pas de nature à favoriser l?émergence d?une filière industrielle de retraitement en France
Recommandation n 1 Sur la base de l?évaluation de l?expérimentation inscrite à l?article 66 de la LFSS pour 2024, donner rapidement de la visibilité aux industriels français sur le calendrier et le périmètre d?une éventuelle autorisation pérenne du re...
1.1.2 Vanguard a mis en place depuis une vingtaine d?années un processus spécifique de retraitement de DMUU sur trois sites en Allemagne
1.2 Le périmètre des DMUU à retraiter dans le cadre de l?expérimentation est contraint par le catalogue de Vanguard
1.2.1 Ce catalogue, constitué à 98 % de cathéters d?électrophysiologie, inclut 74 références avec marquage CE utilisées en France
Recommandation n 2 Circonscrire le périmètre des DMUU retraités dans le cadre de l?expérimentation à ceux qui présentent un marquage CE
1.2.2 Le recours à ces cathéters retraités devrait engendrer des économies annuelles allant de 35 à 59 % du coût d?achat de ces DMUU neufs selon le circuit retenu par les établissements de santé
2 Le cahier des charges de l?expérimentation devra préciser les critères de sélection des établissements de santé, le processus d?achat des DM retraités et les modalités d?information des patients
2.1 La participation des établissements de santé doit reposer sur une adhésion des professionnels concernés à l?expérimentation et à une réduction de l?empreinte écologique des DM
2.1.1 Plusieurs critères pourraient être pris en compte pour choisir les quatre établissements de santé qui participeront à l?expérimentation
2.1.2 L?adhésion des professionnels concernés à la démarche dans le cadre une réduction de l?empreinte écologique des DM est un critère prioritaire
Recommandation n 3 Choisir des établissements de santé avec des statuts différents et une activité d?électrophysiologie suffisante, dont les professionnels adhèrent à l?expérimentation dans le cadre d?une réduction de l?empreinte écologique des DM
2.2 Un marché groupé pourrait être envisagé selon des modalités à déterminer après expertise des accords conclus par chaque établissement de santé avec les fabricants de cathéters neufs
2.2.1 La mission préconise que le retraitement des DMUU se fasse en circuit « ouvert » plutôt que « fermé »
2.2.2 Un dialogue devrait être engagé avec les fabricants de cathéters neufs, qui pourrait déboucher le cas échéant sur un avenant aux accords-cadres
Recommandation n 4 Sous réserve de l?expertise juridique des accords-cadres entre chaque établissement de santé et les fabricants de cathéters neufs, privilégier le retraitement en circuit « ouvert » et dissocier les services fournis de l?achat des co...
2.3 Le processus logistique associé au retraitement ne pose pas de difficultés particulières, avec un point d?attention néanmoins concernant l?information des patients
2.3.1 Ce processus, qui devrait a priori représenter une surcharge de travail limitée, doit reposer sur un protocole partagé de décontamination et garantir la traçabilité des DMUU retraités
Recommandation n 5 Assurer la conformité du contrat établi entre les établissements de santé et l?entreprise de retraitement avec le protocole de décontamination établi par la société française d?hygiène hospitalière
Recommandation n 6 Mettre en place un dispositif spécifique de traçabilité permettant le suivi des DMUU retraités utilisés pour chaque patient
2.3.2 Le déploiement de l?expérimentation doit s?accompagner d?un effort global de pédagogie avec un système d?« opt out » pour les patients
Recommandation n 7 Associer les représentants des usagers à l?élaboration d?un document national d?information à partager avec les patients qui devront manifester expressément leur opposition en cas de refus d?utilisation d?un DMUU retraité
3 Le retraitement doit être mis en perspective avec les autres leviers de réduction de l?empreinte écologique des produits de santé qui exigent des moyens et une gouvernance à la hauteur des enjeux
3.1 Des établissements de santé mobilisent de façon encore isolée et non hiérarchisée plusieurs leviers de réduction de l?empreinte écologique des DM
3.1.1 L?évaluation de l?expérimentation inscrite en LFSS 2024 devra en particulier confirmer l?intérêt écologique relatif du retraitement des DMUU
Recommandation n 8 Allouer une partie des financements prévus à l?article 66 de la LFSS pour 2024 à l?évaluation de l?expérimentation par un prestataire maîtrisant la méthodologie de l?analyse de cycle de vie
3.1.2 Le ministère de la santé doit prioriser la mise en oeuvre d?autres leviers de réduction de l?empreinte écologique des DM, et accompagner le cas échéant leur passage à l?échelle
Recommandation n 9 Sur la base d?une expertise de l?intérêt écologique des différentes actions engagées par les établissements de santé, assurer un passage à l?échelle des leviers les plus pertinents de réduction de l?empreinte écologique des DM
3.2 Seuls une gouvernance et des moyens à la hauteur des enjeux crédibiliseront les engagements du ministère de la santé en matière de transition écologique
3.2.1 Le besoin d?accompagnement des établissements de santé justifie des moyens humains et financiers dans le cadre d?une gouvernance qui reste à définir
3.2.2 Au regard de l?expertise nécessaire pour hiérarchiser les leviers de réduction de l?empreinte écologique, cette gouvernance doit avoir une dimension interministérielle plus affirmée
Recommandation n 10 Faire reposer la « task force » sur la transition écologique en santé sur des moyens pérennes dont le calibrage et la gouvernance, à dimension interministérielle, doivent faire l?objet de travaux spécifiques
Recommandation n 11 Élargir aux DM les travaux engagés par la Direction générale des entreprises, en lien avec l?objectif de relocalisation des industries de santé, pour calculer et diminuer l?impact carbone des médicaments
LISTE DES ANNEXES
ANNEXE 1 : Identification d?une filière industrielle de retraitement et périmètre des DMUU éligibles
1 Le cadre expérimental retenu en LFSS pour 2024 ne favorise pas l?émergence d?une filière industrielle française de retraitement
1.1 L?interdiction, réaffirmée en 2022, de retraiter les DMUU en France est le principal facteur d?explication de l?absence de filière industrielle sur le territoire national
1.2 Les investissements nécessaires à la constitution d?une telle filière rendent inenvisageable son émergence dans un délai de deux ans, a fortiori dans un cadre expérimental
2 Vanguard, localisée en Allemagne, est la seule entreprise susceptible de retraiter des DMUU dans le cadre de l?expérimentation
2.1 Parmi les trois entreprises allemandes de retraitement, seule Vanguard possède des références marquées CE commercialisées à l?étranger
2.2 La mission a observé sur site le processus mis en oeuvre qui consiste à « re-fabriquer » un DM strictement équivalent au DM neuf
3 Le périmètre de l?expérimentation devrait être limité à la soixantaine de références de cathéters d?électrophysiologie marquées CE et retraitées par Vanguard
3.1 En théorie, sur le plan sanitaire, le futur DCE pourrait prévoir des critères d?exclusion fondés sur le Règlement européen de 2017
3.2 En pratique, sur les 600 références retraitées par Vanguard, seules 250 sont marquées CE, dont 74 sont des cathéters d?électrophysiologie utilisés par les hôpitaux français
4 Le retraitement engendrera dans les établissements de santé des économies par rapport au coût annuel des cathéters neufs circuit comprises entre 35 et 59 % d?économie selon le circuit choisi
4.1 En circuit ouvert, pour 25 utilisations, le retraitement diminue d?environ 60 % le coût annuel des cathéters
4.2 En circuit fermé, les économies obtenues grâce au retraitement sont plus difficiles à calculer et moindres qu?en circuit « ouvert »
ANNEXE 2 : Modalités d?expérimentation du retraitement des DMUU dans quatre établissements de santé
1 La participation des établissements de santé à l?expérimentation exige en premier lieu l?adhésion de l?ensemble des professionnels concernés
1.1 Différents critères sont envisageables pour sélectionner les établissements de santé participant à l?expérimentation
1.2 La priorité doit être accordée aux établissements engagés dans une démarche partagée de réduction de leur empreinte écologique
2 Un marché commun de retraitement ou d?achat de DMUU devra être conclu dans le respect du code de la commande publique
2.1 Les deux circuits possibles « ouvert » ou « fermé » de retraitement des DMUU présentent des avantages et inconvénients respectifs
2.2 Un échange avec les fournisseurs de DMUU neufs devra être engagé et déboucher le cas échéant sur un avenant au marché initial
3 Un circuit logistique devra être mis en place avec un impact a priori limité sur la charge de travail des professionnels de santé
3.1 Le circuit logistique sera défini avec l?entreprise de retraitement en tenant compte du cadre juridique applicable aux déchets
3.2 Au regard de la simplicité relative de ce circuit, la surcharge de travail devrait rester limitée
4 Les modalités d?information du patient devront être ajustées pour ne pas faire obstacle à la mise en oeuvre de l?expérimentation
4.1 La LFSS pour 2024 prévoit l?obligation d?informer les patients, qui peuvent s?y opposer, quand un DMUU retraité va être utilisé
4.2 Une fois correctement informé, le patient pourrait s?opposer à l?utilisation d?un DMUU retraité dans une logique d?« opt out »
5 Les crédits prévus par la LFSS 2024 pourraient financer une évaluation externe de l?expérimentation sur la base des critères définis en cahier des charges
5.1 L?évaluation de l?expérimentation doit être réalisée par un acteur expert de l?analyse du cycle de vie des produits de santé
5.2 Cette évaluation devra permettre d?apprécier l?intérêt du retraitement sur les plans sanitaire, écologique, économique et humain
ANNEXE 3 : Éléments de parangonnage sur le retraitement des DMUU en Europe
1 Le retraitement des DMUU dans les neuf États membres de l?UE présente des caractéristiques différentes
1.1 À fin octobre 2023, neuf États membres ont autorisé le retraitement des DMUU tandis que quinze l?ont interdit
1.2 Les modalités d?application de l?article 17 du RMD sont difficiles à apprécier et globalement hétérogènes
2 Focus sur la Suède, l?Espagne et le Royaume-Uni à partir des retours des Conseillers aux affaires sociales
2.1 Historique et cadre du retraitement des DMUU
2.2 Critères économiques et écologiques
2.2.1 Critères économiques
2.2.2 Critères écologiques
2.3 Périmètre des DMUU éligibles au retraitement
2.4 Organisation du retraitement
2.4.1 Espagne
2.4.2 Royaume Uni
2.4.3 Suède
2.5 Filières de retraitement
2.6 Traçabilité des DMUU
2.7 Information des patients
3 Le retraitement des DMUU est aussi développé en Amérique du Nord, particulièrement aux USA
3.1 États-Unis
3.2 Canada
ANNEXE 4 : Leviers de réduction de l?empreinte écologique des dispositifs médicaux
1 Le retraitement des DM à usage unique est le levier de décarbonation mis en exergue par la feuille de route « planification écologique » du ministère de la santé
1.1 Si les études françaises sur l?empreinte écologique des DM sont rares, ils représenteraient 20 % des émissions carbone du système de santé
1.1.1 L?évaluation de l?empreinte écologique des DM repose sur plusieurs méthodes sans encadrement par le ministère de la santé
1.1.2 L?empreinte écologique des DM s?explique surtout par le circuit de production de leurs intrants qui incluent souvent des métaux rares
1.2 Le retraitement des DM peut contribuer à réduire leur empreinte écologique mais n?est pas le levier le plus impactant
1.2.1 La feuille de route recense plusieurs leviers de décarbonation des DM en accordant une visibilité particulière à leur retraitement
1.2.2 La primauté accordée à ce levier est excessive au regard de son impact relatif sur l?empreinte écologique et de ses modalités de mise en oeuvre
2 La gouvernance et les moyens alloués à la planification écologique du système de santé ne sont pas à la hauteur de l?enjeu de décarbonation des DM
2.1 La faiblesse du pilotage national de cette stratégie engendre un risque de décalage croissant avec les initiatives constatées à l?hôpital
2.1.1 L?Anap assume un rôle d?opérateur de la feuille de route mais son portage reste fragile au sein de l?administration centrale et déconcentrée
2.1.2 Or les initiatives se développent dans une partie des établissements de santé sans accompagnement suffisant de la part de l?État
2.2 La mise en oeuvre d?une stratégie crédible de réduction de l?empreinte écologique des DM exige aussi une collaboration interministérielle renforcée
2.2.1 Dans une logique de subsidiarité, le soutien des administrations en charge de la transition écologique à la décarbonation du système est modeste
2.2.2 La DGE assume un leadership fondé sur le double objectif de relocalisation des industries de santé et de décarbonation
3 En parallèle de l?expérimentation, la mise en oeuvre des autres leviers de réduction de l?empreinte écologique des DM est indispensable et nécessite un appui national renforcé
3.1 Conformément aux dispositions interministérielles, les achats hospitaliers, qui constituent un levier majeur, doivent contribuer davantage à la réduction de l?empreinte écologique des DM
3.1.1 En dépit d?obligations croissantes, le levier des achats reste encore sous-utilisé par les hôpitaux pour diminuer leur empreinte environnementale
3.1.2 À l?exemple du système de santé britannique, les achats hospitaliers devraient constituer le principal levier de décarbonation des DM
3.2 Le retraitement des DM à usage unique, qui sont définis comme tels par les seuls industriels, doit aussi s?accompagner du développement des DM à usage multiple
3.2.1 L?évolution de la part respective des DM à usage unique et des DM à usage multiple ne fait l?objet d?aucun suivi au niveau national
3.2.2 Le développement de l?usage multiple est souvent conditionné dans les établissements de santé à une organisation et des moyens adaptés
3.3 La formation des personnels hospitaliers doit contribuer en particulier à faire converger davantage les démarches de pertinence et de sobriété des soins
3.3.1 Le développement de l?éco-responsabilité en matière de soins peut contribuer à renforcer l?efficience du système de santé
3.3.2 La sensibilisation des personnels hospitaliers aux enjeux liés à la transition écologique dépend encore largement des directions d?établissement
3.4 Enfin, le tri et la revalorisation des déchets issus des DM, qui dépendent aujourd?hui largement des décisions locales, doivent faire l?objet d?une stratégie nationale
3.4.1 Les établissements de santé sont soumis à des obligations croissantes en matière de gestion des déchets, en partie communes au secteur tertiaire
3.4.2 Les établissements de santé sont peu incités et accompagnés dans la réduction et la valorisation des déchets, en particulier ceux issus des DM
ANNEXE 5 : Résultats du questionnaire adressé par la mission aux établissements de santé
1 Rappel du contexte du questionnaire
2 Résultats
2.1 Les données des établissements : statuts et achats de DM
2.1.1 Nombre d?établissements répondant et leur statut
2.1.2 Les achats de DM
2.2 La politique menée par les établissements sur la réduction des gaz à effet de serre (GES)
2.2.1 La réalisation du bilan de gaz à effet de serre
2.2.2 Intégration de critères environnementaux dans la politique achat de DM
2.2.3 Le tri des déchets de DM
2.2.3.1 Filières de récupération ou de recyclage des DMUU
2.3 Les établissements et l?expérimentation inscrite à l?article 29 du PLFSS
2.3.1 Les CHU et les EPBL répondants sont les plus intéressés pour participer à l?expérimentation
2.3.2 Le choix des DM se porte vers les sondes d?électrophysiologie, mais il existe une confusion entre retraitement et recyclage
2.3.3 Les freins identifiés
2.4 Les facteurs de réussite de cette expérimentation
2.5 Les indicateurs de suivi de l?expérimentation
2.6 Les autres leviers prioritaires pour diminuer l?empreinte carbone des DM
3 Conclusion
Liste des personnes rencontrées
Lettre de mission
(ATTENTION: OPTION t une nouvelle fois rappelée dans la circulaire du 29 décembre 1994. Cette instruction précise
que des études ont confirmé l?existence de risques liés à la réutilisation de DMUU. Ces risques sont
liés, d?une part, aux dispositifs eux-mêmes (structure semi-cristalline des polymères, multiplicité
des matériaux constitutifs des DM) et, d?autre part, à l?utilisation clinique qui expose le matériel à
une contamination très importante et difficilement réversible au niveau des matériaux
synthétiques. Enfin, cette instruction précise un troisième risque lié au recyclage avec présence
de traces de produits décontaminants et/ou nettoyant pouvant entrainer la formation de
produits de toxiques au cours de la stérilisation. Malgré ces rappels, la re-stérilisation de DMUU
était encore pratiquée. Une clinique localisée à Nîmes avait été poursuivie pour tromperie des
consommateurs sur les qualités des prestations de soins, car elle procédait à la re stérilisation par
l?oxyde d?éthylène de sonde d?électrophysiologie à usage unique.
[45] Alors que l?article 17 du Règlement européen 2017/74558 fournit un cadre pour autoriser le
retraitement des DMUU au niveau national, la France a réaffirmé en 2022 au niveau législatif cette
interdiction. Ce Règlement européen relatif aux dispositifs médicaux (dit RMD) définit le
retraitement, qui doit être autorisé au préalable par la législation nationale, comme « le procédé
dont fait l?objet un dispositif usagé pour en permettre une réutilisation sûre, y compris le nettoyage,
la désinfection, la stérilisation et les procédures connexes (?) le rétablissement de ses
caractéristiques techniques et fonctionnelles en matière de sécurité ». Le RMD prévoit que le
retraitement peut être réalisé par un établissement de santé, ou par une entreprise externe. La
personne physique ou morale qui assure le retraitement d?un DMUU est considérée comme son
fabricant et doit s?acquitter des obligations qui lui incombent à ce titre, dont l?obtention d?un
marquage CE59. Toutefois, le RMD prévoit également la possibilité, pour les seuls DMUU retraités
et utilisés par les établissements de santé, ou retraités par une entreprise externe à la demande
d?un établissement de santé, de ne pas appliquer l?ensemble des règles relatives aux obligations
des fabricants sous réserve que certaines garanties soient respectées (cf. tableau 1). Le respect de
58 Article 17 du Règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 relatif aux
dispositifs médicaux.
59 Le marquage CE fixe les ?exigences essentielles? de santé et de sécurité auxquelles doivent se conformer
les fabricants pour garantir la sécurité et la fiabilité de leurs dispositifs mis sur le marché européen. Le
marquage CE apposé par le fabricant est le garant de cette conformité.
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ces spécifications sanitaires doit faire l?objet d?un audit externe indépendant annuel aux fins de
certification de l?entreprise ou établissement de retraitement par un organisme notifié. Elles sont
définies par le Règlement d?exécution du 19 août 202060 qui s?applique depuis le 26 mai 2021. C?est
sans doute l?entrée en vigueur de ce texte, qui rend accessible le retraitement en dehors du cadre
du marquage CE, qui a incité le Gouvernement français a rappelé en avril 2022, cette fois au niveau
législatif, l?interdiction de retraiter les DMUU ou de commercialiser et utiliser des DMUU retraités
en France61 .
Tableau 8 : Trois options de retraitement prévues par le Règlement 2017/745
Options Où est effectué le
retraitement ?
Qui valide ? Où sont utilisés les
DMUU ?
1 Etablissement de santé Un organisme notifié
certifie la conformité des
procédés de retraitement
aux spécifications
communes
Les DMUU restent la
propriété de
l?établissement de santé
qui les utilise
2 Entreprise externe (à la
demande d?un
établissement de santé)
Un organisme notifié
certifie la conformité des
procédés de retraitement
aux spécifications
communes
Les DMUU restent la
propriété de
l?établissement de santé
qui les utilise
3 Entreprise externe qui a le
statut de fabricant
Les DM retraités sont
conformes aux exigences
essentielles (marquage CE)
du règlement DM, la
conformité est certifiée
par un organisme notifié
Les DMUU sont vendus à
une entreprise externe qui
les retraitent et les vend
ensuite comme nouveau
DM à n?importe quel
établissement de santé
Source : Mission.
60 Règlement d?exécution (UE) 2020/1207 de la Commission du 19 août 2020 portant modalités d?application
du règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les spécifications
communes pour le retraitement des dispositifs à usage unique. Ce texte précise le mode de
contractualisation avec une entreprise externe, les règles en matière de personnels, locaux et équipements,
la validation du procédé de retraitement, la détermination du nombre maximal de cycles, la description de
la documentation technique, l?établissement de procédures des différentes étapes du cycle de retraitement,
la mise en place d?un système de gestion de la qualité ainsi que l?organisation de la traçabilité. La conformité
avec les spécifications communes doit être certifiée par un organisme notifié. À la date de rédaction du
rapport, aucun organisme notifié ne vérifie le respect des spécifications communes.
61 L?article 10 de l?ordonnance n°2022-582 du 20 avril 2022, codifié à l?article L. 5211-3-2 du code de la santé
publique, dispose que « le retraitement de dispositifs à usage unique mentionné à l?article 17 du règlement (UE)
2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017, leur mise sur le marché et leur utilisation sont
interdits ».
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1.2 Les investissements nécessaires à la constitution d?une telle filière
rendent inenvisageable son émergence dans un délai de deux ans, a
fortiori dans un cadre expérimental
[46] Au regard des investissements nécessaires et du délai pour se conformer au cadre juridique
européen, il est improbable qu?une filière industrielle se constitue en France sous deux ans :
? sur le plan opérationnel, il est nécessaire de de mettre en place un processus qui ne
s?assimile pas seulement à une opération de stérilisation mais bien à une opération de « re-
fabrication » ou « remanufacturing » en anglais (cf. infra). Ce processus implique la création
d?une chaîne d?activités dans des locaux adaptés (comprenant des capacités de
stérilisation) et la formation des personnels intervenant aux différentes étapes62 ; DMUU
? sur le plan juridique, une entreprise qui souhaiterait engager une activité de retraitement
en France devrait au préalable obtenir auprès d?un organisme notifié (ON)63, soit un
marquage CE, soit une certification du respect des spécifications communes, ce qui
représente des démarches exigeantes (incluant en particulier la constitution d?une
documentation technique présentant les preuves permettant de démontrer la qualité et la
sécurité du dispositif dans le cas du marquage CE, cf. schéma 1) dont le délai
d?aboutissement est aujourd?hui estimé par les représentants du secteur des DM à environ
deux ans64.
62 Outre la nécessité de disposer de personnels ayant pour certains des qualifications rares, l?industriel devra
investir notamment dans des unités capables d?inspecter, d?assurer la maintenance et la réparation des DM
et de mettre en place des essais de fonctionnalités des DM. La méthode de stérilisation peut, elle aussi,
obliger l?industriel à mettre en place des infrastructures spécifiques particulièrement onéreuses en
investissement et en maintenance. C?est le cas si la stérilisation est réalisée par l?oxyde d?éthylène, substance
classée carcinogène de catégorie 1B et mutagène 1B. Elle doit alors se dérouler dans des chambres étanches
et être suivie d?une phase de dégazage pour éliminer les résidus de gaz toxiques. Cette stérilisation est très
largement utilisée pour les DMUU car elle s?effectue à des niveaux de températures compatibles avec les
matériaux composants le DM. Même s?il existe en France des entreprises qui stérilisent de façon industrielle
les DM, elles ne sont pas équipées pour assurer toutes étapes décrites supra et ne sont pas engagées dans
l?obtention d?un marquage CE.
63 En fonction de la classe de risque du dispositif, un organisme habilité indépendant (dit ?notifié?) intervient
dans le processus de marquage CE. Celui-ci évalue la conformité du dispositif et le système qualité du
fabricant et délivre, en cas d?évaluation satisfaisante, un certificat de conformité permettant au fabricant
d?apposer le marquage CE sur son dispositif. Le marquage CE a une durée de validité limitée. La pertinence
de la documentation technique et l?organisation du fabricant doivent faire l?objet de nouvelles évaluations
périodiques par l?organisme notifié.
64 Ce délai s?explique en partie par le fait que tous les fabricants de DM sont en cours de demande de « re-
marquage CE » par un ON pour continuer de commercialiser les DM en Europe. Les industriels devront avoir
fait une demande formelle avant fin mai 2024 et signé un contrat avec un ON avant fin septembre 2024.
Alors qu?en 2012, 87 ON exerçaient en Europe, à fin décembre 2022, 36 ON avaient été certifiés dont un
seulement en France.
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Schéma 2 : Étapes clés du processus de marquage CE
Source : Snitem.
[47] Par ailleurs, le cadre expérimental retenu en France, inédit en Europe, n?est pas propice à
l?émergence, pourtant souhaitable, d?une filière localisée sur le territoire national. Sur les neuf
États membres de l?UE ayant autorisé le retraitement des DMUU, aucun n?a prévu au préalable
une phase d?expérimentation. Selon l?ensemble des acteurs rencontrés par la mission, en
particulier la Direction générale des entreprises, il n?est pas plausible qu?un acteur engage les
investissements nécessaires pour entrer sur un tel marché sans assurance sur sa pérennité. Or,
l?article 29 de la LFSS 2024, qui crée la possibilité d?expérimenter le retraitement des DM, au plus
tard en novembre 2024 et pour une période de deux ans, renvoie à un rapport d?évaluation de
l?expérimentation « afin notamment de déterminer l?opportunité et, le cas échéant, les conditions
de sa pérennisation et de son extension ». En d?autres termes, aucun industriel ne peut aujourd?hui
tabler sur une généralisation du retraitement des DMUU en France, ni apprécier le périmètre du
marché auquel il pourrait accéder.
[48] Ce constat a été confirmé à la mission lors de l?entretien avec la société Johnson & Johnson
qui réalise le retraitement de DMUU aux Etats-Unis et au Canada (société Sterilmed). Cette
société est également implantée en France, mais ne dispose pas des infrastructures pour réaliser
des opérations de retraitement. Cependant, la possibilité de retraitement inscrite dans le cadre
du règlement européen, a permis d?ouvrir une réflexion de la part de J&J pour s?implanter en
Europe. Une usine pilote située aux Pays-Bas est en réflexion pour 2024.
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2 Vanguard, localisée en Allemagne, est la seule entreprise
susceptible de retraiter des DMUU dans le cadre de
l?expérimentation
2.1 Parmi les trois entreprises allemandes de retraitement, seule Vanguard
possède des références marquées CE commercialisées à l?étranger
[49] En l?absence d?une filière française de retraitement, il est nécessaire de se tourner vers les
entreprises localisées en UE, en l?espèce en Allemagne, qui assurent aujourd?hui une telle activité,
dont seule une, Vanguard, dispose de références marquées CE qu?elle exporte. Le tableau ci-
dessous synthétise les principales informations recueillies par la mission au sujet de ces trois
entreprises, sachant que des contacts n?ont pu être établis qu?avec Vanguard. Il en ressort que
Vanguard est à la fois l?entreprise la plus importante (en nombre de sites, puisqu?elle en possède
trois en Allemagne, et d?employés) mais surtout la seule, a priori, qui dispose de références de
DMUU retraités avec le marquage CE. Selon les représentants de Vanguard, avec lesquels la
mission a échangé le 14 novembre dernier dans le cadre d?une visite du site de retraitement
localisé à Berlin, les deux autres entreprises ne commercialiseraient leurs DMUU retraités
qu?auprès d?établissements de santé allemand car elles s?inscrivent dans le seul cadre des
spécifications communes, et non du marquage CE. À l?inverse, les représentants de Vanguard ont
communiqué à la mission un catalogue de DMUU retraités incluant des références marquées CE
(cf. infra) que l?entreprise exporterait en particulier au Royaume-Uni et en Israël.
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Tableau 9 : Comparatifs des trois entreprises allemandes de retraitement identifiées
par la mission
Vanguard Meditreat Vecomed
Date de création 1998 2009 NC
Sites Berlin
Aschersleben
Friedeburg
Gelnhausen Schönebeck
Nombre d?employés 200 Moins de 50 Moins de 50
Retraitement des DMUU avec
marquage CE
Oui Non NC
Retraitement des DMUU
conformément aux
spécifications communes
Oui Oui NC
Type de DMUU retraités Electrophysiologie et
chirurgie
Electrophysiologie et
sondes oesophagienne
NC
Nombres de DMUU retraités
en 2022
270 000 NC NC
Réalisation de retraitement
pour des pays hors Allemagne
Oui65 Non NC
Source : Mission.
2.2 La mission a observé sur site le processus mis en oeuvre qui consiste à
« re-fabriquer » un DM strictement équivalent au DM neuf
[50] Dans le cadre de son déplacement à Berlin, la mission s?est rendue sur le site de retraitement
de Vanguard, ce qui lui a permis d?observé les différentes étapes du processus mis en oeuvre. En
effet, le « cycle de retraitement » inclut plusieurs étapes, et pour chacune d?elles, une procédure
est écrite et validée. Le système de gestion de la qualité? permet de retrouver l?ensemble des
données enregistrées. Un système de traçage permet l?identification du DMUU tout au long de
leur durée de vie. Il permet en particulier de contrôler le nombre de retraitements. Les dispositifs
retraités (identifiés par leur IUD66, Unique Device Identification) peuvent être reliés au numéro de
lot initial notamment dans le cadre de procédure de matériovigilance.
65 A minima au Royaume-Uni et en Israël.
66 Article 27 du règlement 2017/745. L?identifiant unique des dispositifs (IUD) est un code numérique ou
alphanumérique unique lié à un dispositif médical qui permet l'identification claire et formelle de dispositifs
donnés sur le marché et qui facilite leur traçabilité. L?IUD est constitué des éléments suivants : un identifiant
«dispositif» (IUD-ID) et un identifiant «production» (IUD-IP). Ces éléments permettent d?accéder à des
informations utiles sur le dispositif. La spécificité de l?IUD est d?améliorer la traçabilité des dispositifs, de
faciliter le rappel des dispositifs, de lutter contre la contrefaçon et d?améliorer la sécurité des patients. L?IUD
viendra compléter, et non remplacer, les exigences existantes en matière d?étiquetage des dispositifs
médicaux.
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[51] Les observations réalisées sur site par la mission ne s?assimilent en aucun cas à un audit du
processus ou de l?installation de retraitement. Néanmoins, elles confirment l?idée que le
retraitement est une activité spécifique, distincte de la seule stérilisation. Elles tendent aussi à
laisser penser que les DMUU retraités par Vanguard (i) sont testés et inspectés (ii) répondent aux
spécifications et exigences en matière de nettoyage/biocompatibilité, de performance et de
stérilité (iii) sont tracés par une méthode laser qui grave un numéro de lot enregistré dans une
base de données permettant de suivre le nombre de retraitements effectués.
Tableau 10 : Description des étapes du processus mis en place par Vanguard
Etape Processus
Collecte des DM
souillés
Les établissements de santé placent les DM pré-nettoyés dans la
boite de collecte fournie par Vanguard.
Inspection et
identification
À réception, un suivi informatique avec contrôle des DM est mis en
place grâce au marquage laser avec un numéro d?identification
unique. Il permet le suivi du DM tout au long du processus jusqu?à
son acheminement vers l?établissement de santé.
Les DM non aptes au retraitement ou défectueux sont jetés.
Retraitement L'appareil est démonté, nettoyé puis remonté.
100% des DM sont contrôlés sur les volets sécurité et performance.
Ce processus comprend des contrôles visuels, une inspection
mécanique de toutes les pièces mobiles et la vérification de la
fonctionnalité électrique de l'appareil remis à neuf.
Conditionnement
et stérilisation
Les DMUU remanufacturés sont ensuite emballés dans des sacs de
stérilisation Tyvek® et inspectés visuellement après scellement.
Tous les DM sont traités par stérilisation à basse température
(oxyde d?éthylène) pour protéger les dispositifs/composants
thermolabiles. Tous les appareils passent des tests
microbiologiques avant d'être approuvés pour la libération.
Logistique Après stérilisation, les DM sont placés dans des emballages
protecteurs et étiquetés.
Les produits sont ensuite expédiés vers les établissements de santé.
Source : Mission à partir des documents de Vanguard.
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Schéma 3 : Synthèse du processus de retraitement mis en place par Vanguard
Source : Vanguard.
[52] La robustesse du dispositif de retraitement repose essentiellement sur le nombre de tests
auxquels sont soumis les DM, qui s?élèvent selon Vanguard à une vingtaine en ce qui concerne les
cathéters d?électrophysiologie, affirmation corroborée par les observations sur site de la mission.
Ainsi, outre le procédé de nettoyage permettant d?évacuer de la lumière des cathéters des résidus
de substances, les cathéters subissent en particulier :
? une surveillance volumétrique continue ;
? des tests de fonctionnement (performance de chaque composant) ;
? des tests microbiologiques permettant de confirmer le processus de nettoyage, chaque
cathéter étant vérifié en laboratoire conformément à la norme ISO 1588367 ;
? des contrôles visuels permettant notamment de vérifier tout changement de la forme de
courbure ou tout dommage sur la longueur du cathéter, de la connexion électrique à
l?embout ;
? des contrôles de la fonctionnalité électrique, des capteurs de températures et de capacité
électrique.
67 L'ISO 15883-1:2006 spécifie les exigences générales de performances pour les laveurs désinfecteurs (LD) et
leurs accessoires destinés à être utilisés pour nettoyer et désinfecter des dispositifs médicaux réutilisables
ou tout autre article utilisé dans le contexte d'activités médicales, pharmaceutiques, dentaires et
vétérinaires. Elle spécifie les exigences de performances pour le nettoyage et la désinfection ainsi que pour
les accessoires qui peuvent être nécessaires pour atteindre les performances requises.
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Schéma 4 : Tests réalisés sur les cathéters d?électrophysiologie
Source : Vanguard.
[53] Des tests spécifiques sont aussi réalisés sur les ciseaux à ultrasons. Ils subissent des tests de
compatibilité logicielle, et des tests électroniques et mécaniques des lames. La mission a pu suivre
la réalisation par les techniciens de Vanguard de ces tests et le changement systématique des
tampons présents sur les ciseaux.
Schéma 5 : Tests réalisés sur les ciseaux à ultrasons
Source : Vanguard.
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3 Le périmètre de l?expérimentation devrait être limité à la
soixantaine de références de cathéters d?électrophysiologie
marquées CE et retraitées par Vanguard
3.1 En théorie, sur le plan sanitaire, le futur DCE pourrait prévoir des
critères d?exclusion fondés sur le Règlement européen de 2017
[54] Le Règlement 2017/745 ne précise pas le périmètre des DMUU qui peuvent faire l?objet d?un
retraitement mais dresse une liste de critères d?exclusion susceptibles d?être transposés au niveau
national. Cette approche vise à tenir compte, dans une logique de gestion des risques, de la
construction des DMUU, leurs matériaux, leurs propriétés et leur usage prévu68. Ainsi, l?article 17
du RMD dispose que « seul le retraitement de dispositifs à usage unique réputés sûrs, eu égard aux
données scientifiques les plus récentes, peut être réalisé ». Si l?évaluation de l?aptitude au
retraitement n?y est pas spécifiquement abordée, le RMD regroupe en deux catégories les critères
sur la base desquels un État membre peut exclure un DMUU du retraitement :
? les DMUU présentant un risque élevé de contamination croisée :
? émettant des rayonnements ;
? utilisés pour administrer des médicaments cytostatiques ou radiopharmaceutiques ;
? contenant des substances médicamenteuses ;
? destinés à être utilisés dans des procédures invasives sur le système nerveux central ;
? présentant un risque de transmission d?encéphalopathies spongiformes ;
? implantables ;
? les DMUU susceptibles de défectuosité notamment en raison de leur technicité :
? pour lesquels des incidents graves ont eu lieu après le retraitement et pour lesquels la
cause des incidents est liée au retraitement ou il ne peut être exclu que la cause des
incidents soit liée au retraitement ;
? fonctionnant avec des piles ou batteries qui ne peuvent pas être changées ou qui
présentent un risque de dysfonctionnement après le retraitement ;
? munis d?une mémoire de données interne nécessaire à leur utilisation et qui ne peut
pas être changée ou qui présente un risque de dysfonctionnement après le
retraitement ;
68 Pour évaluer si un dispositif à usage unique se prête au retraitement, la gestion des risques devrait tenir
compte des risques liés à la composition des matériaux, aux matériaux relargables, à la contamination
microbiologique, aux prions et aux agents de l?encéphalopathie spongiforme transmissible, aux endotoxines,
ainsi qu?aux réactions pyrogènes, allergiques et toxiques. Les caractéristiques techniques et les propriétés
géométriques des produits devraient également être prises en considération lors de l?évaluation de
l?aptitude au retraitement des dispositifs à usage unique
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? comportant des lames coupantes ou tranchantes, des forêts ou des composants
soumis à l?usure qui ne sont plus fonctionnels après la première utilisation et qui ne
peuvent pas être changés ou affûtés avant la prochaine intervention médicale.
[55] La majorité des États membres ayant autorisé le retraitement des DMUU ont intégré dans
leur droit les critères d?exclusion définis au niveau européen sans déterminer de liste positive des
DMUU éligibles au retraitement. C?est le cas de la Belgique, l?Espagne, la Suède et le Portugal.
D?autres État ont adopté une approche moins restrictive Ainsi, l?Allemagne exclut uniquement les
DMUU utilisés pour administrer des médicaments cytostatiques ou radiopharmaceutiques.
Toutefois, le retraitement des DM utilisés sur des personnes malades ou suspectées d?être
atteintes de la maladie de Creutzfeld-Jacob ou son variant n?est pas interdit mais fait l?objet
d?exigences précisant un certain nombre de méthodes à suivre ou ne pas suivre (interdiction de
certaines méthodes de stérilisation, par exemple). Les Pays Bas ont adopté une approche par le
risque prion, en interdisant l?usage de tout dispositif ayant été en contact avec les tissus à risque,
des malades à risques ou présentant des symptômes neurologiques non expliqués des DMUU
pouvant être retraités.
3.2 En pratique, sur les 600 références retraitées par Vanguard,
seules 250 sont marquées CE, dont 74 sont des cathéters
d?électrophysiologie utilisés par les hôpitaux français
[56] Compte tenu du fait (i) qu?aucune autre filière de retraitement avec un marquage CE n?est
susceptible d?émerger dans les deux prochaines années et (ii) Vanguard est la seule entreprise
susceptible de retraiter avec un marquage CE des DMUU utilisés en France dans le cadre de
l?expérimentation prévue par la LFSS, le choix des DMUU à retenir dépendra en pratique du
catalogue de l?entreprise. La mission a eu accès à ce catalogue dont l?analyse met en évidence
que :
? 98 % des DMUU retraités (procédure marquage CE ou respect des spécification communes
-SC) sont des DM utilisés au cours d?actes d?électrophysiologie (patch, cathéter de
diagnostic et d?ablation) ;
? sur les 590 références de DMUU retraités figurant au catalogue, environ 40 % (soit
245 références) disposent d?un marquage CE, tandis que les 347 références restantes
seraient conformes aux spécifications communes telles que validées, selon Vanguard, par
un organisme externe mais sans certification par un organisme notifié (à défaut d?organisme
notifié ayant accepté de s?engager dans cette démarche, selon Vanguard) ;
? sur les 245 DMUU retraités marqués CE, 241 DM sont utilisés dans les actes
d?électrophysiologie (EP) et quatre pour des actes de chirurgie.
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Tableau 11 : Catégorisation des DMUU retraités référencés dans le catalogue de
Vanguard à fin octobre 2023
Type de procédure EP Chirurgie Total
Marquage CE 241 4 245
Spécifications
communes
343 4 347
Non précisé 6 0 6
Total 590 8 598
Source : Mission sur la base des données de Vanguard.
[57] En comparant les références marquées CE du catalogue de Vanguard et celles utilisées par
trois CHU69, la mission estime que 74 références de cathéters d?électrophysiologie pourraient
faire l?objet d?un retraitement dans le cadre de l?expérimentation. En effet, au regard du caractère
non certifié par un ON du respect des spécifications communes, et compte tenu du fait que les
DMUU retraités par Vanguard sont classés au niveau de risque le plus élevé (niveau III), la mission
recommande de limiter le périmètre des DMUU retraités à ceux pour lesquels Vanguard a obtenu
le marquage CE. Etant donné que le droit européen exige un renouvellement des marquages CE
pour que les DM puissent être commercialisés jusqu?en 2027, Vanguard devra déposer une
demande d?évaluation auprès d?un organisme notifié avant le 26 mai 2024 et avoir signé le contrat
avec cet organisme notifié au plus tard le 26 septembre 2024. Les représentants de la société ont
indiqué à la mission avoir engagé les démarches nécessaires.
[58] Comme le montre le tableau ci-dessous, ces 74 références concernent deux grands types
de familles de DMUU utilisés dans le cadre de procédures d?électrophysiologie (les cathéters
d?ablation et les cathéters de diagnostics) qui, en moyenne, pourraient être retraités 3,4 fois. À
titre d?exemple, le groupe de cathéters d?ablation 4 pôles comporte 18 DMUU marqués CE
retraitables en moyenne maximum 4 fois.
69 AP-HP, Bordeaux, Clermont-Ferrand.
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Tableau 12 : Groupes de DMUU par type de procédure (marquage CE ou spécifications communes-CS) et nombre maximal de
cycles de retraitement (« reprocessing cycles »)70
Source : Mission à partir des données de Vanguard
Groupe de DMUU
Nombre de OEM
Article Description /
Article family name
Moyenne de Max.
reprocessing
cycles*
Nombre de OEM
Article Description /
Article family name
Moyenne de Max.
reprocessing cycles*
Connection cable, electrical, system 1 12 3 8,0
EP-Ablation Catheter, 3D-mapping 2 3,0
EP-Ablation Catheter, 4-pole 18 4 25 3,7
EP-Ablation Catheter, Cryo 2 2,0
EP-Ablation Catheter, irrigated SF 6 3
EP-Ablation Catheter, irrigated SF, 3D-mapping 2 3
EP-Ablation Catheter, irrigated SF, Contact force, 3D-mapping 5 2
EP-Ablation Catheter, irrigated, 4-pole 6 3
EP-Ablation Catheter, irrigated, Contact force, 3D-mapping 4 2
EP-Ablation Catheter, irrigated, Contact force, 3D-mapping, TactiCath SE 5 3,0
EP-Diagnostic Catheter, 10-pole 8 3,0
EP-Diagnostic Catheter, 4-pole 39 3,6
EP-Diagnostic Catheter, 6-pole 9 3,7
EP-Diagnostic Catheter, 8-pole 1 3,0
EP-Diagnostic Catheter, steerable, 10-pole 11 4
EP-Diagnostic Catheter, steerable, 4-pole 3 4
EP-Diagnostic Catheter, steerable, 6-pole 1 4
EP-Diagnostic Catheter, steerable, 8-pole 4 4
EP-Diagnostic Catheter, steerable/fix, Lasso/Loop, 3D-mapping 2 3 4 3,0
Introducer sheaths 3 1,0
Introducer sheaths, steerable 6 1,0
Package EP-Ablation Catheter, 3D-mapping 2 3,0
Package EP-Ablation Catheter, irrigated SF, Contact force, 3D-mapping 5 2
Package EP-Ablation Catheter, irrigated, Contact force, 3D-mapping 4 2
Package EP-Diagnostic Catheter, steerable/fix, Lasso/Loop, 3D-mapping 2 3
Transseptal needles 20 3,0
Total général 74 3,4 129 3,3
Process (CE, CS)
CE CS
ARTICLES EN MARCHES CHU
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4 Le retraitement engendrera dans les établissements de
santé des économies par rapport au coût annuel des
cathéters neufs circuit comprises entre 35 et 59 %
d?économie selon le circuit choisi
[59] Deux circuits de retraitements dits « ouvert » ou « fermé » sont envisageables dans le
cadre fixé par la LFSS pour 2024 (cf. annexe II). Les calculs présentés ci-dessous sont estimés
pour la réalisation de 25 utilisations d?un cathéter.
4.1 En circuit ouvert, pour 25 utilisations, le retraitement diminue
d?environ 60 % le coût annuel des cathéters
[60] Dans le circuit « ouvert », les établissements de santé, d?une part, vendent71 à l?entreprise
de retraitement les DMUU utilisés et, d?autre part, achètent à cette entreprise des DMUU
retraités, indépendamment du lieu où ces DMUU ont été précédemment utilisés. Dans ce cas,
seul les paramètres du prix d?achat du DM neuf, du prix d?achat du DM retraités et de du
nombre de cathéters sont à prendre en compte.
[61] À titre d?exemple, pour l?achat d?un cathéter d?électrophysiologie de type ablation
vendu neuf au prix de 1 854 ¤ HT, le prix proposé par la société Vanguard est de 755 ¤ HT (soit
une économie de -59 %).
Tableau 13 : Calcul des économies annuelles en circuit ouvert
Prix HT ¤ neuf Prix HT ¤ retraité Quantité Coût ¤
1 854 25 46 350 (B)
755 25 18 875
Économie annuelle 27 475 ¤ (A)
En % (A/B) 59,3
Source : Mission à partir des données transmises par un CHU et par Vanguard.
71 La vente des DMUU utilisés ne nécessite pas de formalités particulières. Le prix de vente doit être agréé
au préalable avec l?entreprise de retraitement.
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4.2 En circuit fermé, les économies obtenues grâce au retraitement sont
plus difficiles à calculer et moindres qu?en circuit « ouvert »
[62] Dans le circuit « fermé », les établissements de santé sous-traitent à une entreprise le
retraitement des DMUU qu?ils ont utilisés, sous le plafond du volume maximal de cycles de
retraitements prévus. Dans ce cas quatre paramètres doivent être pris en compte pour calculer
l?économie : le prix d?achat du DM neuf, le prix d?achat du DM retraité, le nombre de
retraitement prévu et le taux d?échec. Ce taux représente le pourcentage de DM qui, une fois
réceptionnés par la société de retraitement ne peuvent pas être retraités car ils ont été testés
comme défectueux (non conformes) alors qu?ils auraient encore pu subir des retraitements.
Selon la société Vanguard, ce taux d?échec est estimé à 25 % en moyenne
[63] Pour réaliser la comparaison avec le circuit « ouvert », le même prix de vente du cathéter
retraité a été utilisé. Dans cet exemple, le cathéter peut être recyclé 2 fois avec un taux d?échec
de 25 %.
[64] La mission préconise que l?expérimentation se fasse dans le cadre d?un circuit « ouvert »
plutôt que « fermé ».
Tableau 14 : Calcul des économies annuelles en circuit fermé
Paramètre
Prix achat cathéter neuf (HT) 1 854 ¤
Prix achat cathéter recyclé (HT) 755 ¤
Nombre de cycle de retraitement 2
Taux d?échec 25 %
Nombre de cathéters acheté 10
Nombre d?utilisation maximum 20 fois
Nombre d?utilisation en intégrant le taux d?échec 15 fois
Nombre d?utilisation de 10 cathéters 25 fois
Économie 16 485 ¤
Source : Mission à partir des données transmises par un CHU et par Vanguard.
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ANNEXE 2 : Modalités d?expérimentation du
retraitement des DMUU dans quatre
établissements de santé
1 LA PARTICIPATION DES ETABLISSEMENTS DE SANTE A L?EXPERIMENTATION EXIGE EN
PREMIER LIEU L?ADHESION DE L?ENSEMBLE DES PROFESSIONNELS CONCERNES ........ 57
1.1 DIFFERENTS CRITERES SONT ENVISAGEABLES POUR SELECTIONNER LES ETABLISSEMENTS DE SANTE
PARTICIPANT A L?EXPERIMENTATION .............................................................................................. 57
1.2 LA PRIORITE DOIT ETRE ACCORDEE AUX ETABLISSEMENTS ENGAGES DANS UNE DEMARCHE PARTAGEE
DE REDUCTION DE LEUR EMPREINTE ECOLOGIQUE ........................................................................... 58
2 UN MARCHE COMMUN DE RETRAITEMENT OU D?ACHAT DE DMUU DEVRA ETRE
CONCLU DANS LE RESPECT DU CODE DE LA COMMANDE PUBLIQUE .............................. 59
2.1 LES DEUX CIRCUITS POSSIBLES « OUVERT » OU « FERME » DE RETRAITEMENT DES DMUU
PRESENTENT DES AVANTAGES ET INCONVENIENTS RESPECTIFS....................................................... 59
2.2 UN ECHANGE AVEC LES FOURNISSEURS DE DMUU NEUFS DEVRA ETRE ENGAGE ET DEBOUCHER LE
CAS ECHEANT SUR UN AVENANT AU MARCHE INITIAL ..................................................................... 60
3 UN CIRCUIT LOGISTIQUE DEVRA ETRE MIS EN PLACE AVEC UN IMPACT A PRIORI LIMITE
SUR LA CHARGE DE TRAVAIL DES PROFESSIONNELS DE SANTE........................................ 61
3.1 LE CIRCUIT LOGISTIQUE SERA DEFINI AVEC L?ENTREPRISE DE RETRAITEMENT EN TENANT COMPTE DU
CADRE JURIDIQUE APPLICABLE AUX DECHETS .................................................................................. 61
3.2 AU REGARD DE LA SIMPLICITE RELATIVE DE CE CIRCUIT, LA SURCHARGE DE TRAVAIL DEVRAIT RESTER
LIMITEE ........................................................................................................................................... 63
4 LES MODALITES D?INFORMATION DU PATIENT DEVRONT ETRE AJUSTEES POUR NE PAS
FAIRE OBSTACLE A LA MISE EN OEUVRE DE L?EXPERIMENTATION ..................................... 64
4.1 LA LFSS POUR 2024 PREVOIT L?OBLIGATION D?INFORMER LES PATIENTS, QUI PEUVENT S?Y OPPOSER,
QUAND UN DMUU RETRAITE VA ETRE UTILISE ................................................................................ 64
4.2 UNE FOIS CORRECTEMENT INFORME, LE PATIENT POURRAIT S?OPPOSER A L?UTILISATION D?UN
DMUU RETRAITE DANS UNE LOGIQUE D?« OPT OUT » .................................................................... 64
5 LES CREDITS PREVUS PAR LA LFSS 2024 POURRAIENT FINANCER UNE EVALUATION
EXTERNE DE L?EXPERIMENTATION SUR LA BASE DES CRITERES DEFINIS EN CAHIER DES
CHARGES ........................................................................................................................................... 65
5.1 L?EVALUATION DE L?EXPERIMENTATION DOIT ETRE REALISEE PAR UN ACTEUR EXPERT DE L?ANALYSE
DU CYCLE DE VIE DES PRODUITS DE SANTE...................................................................................... 65
5.2 CETTE EVALUATION DEVRA PERMETTRE D?APPRECIER L?INTERET DU RETRAITEMENT SUR LES PLANS
SANITAIRE, ECOLOGIQUE, ECONOMIQUE ET HUMAIN ...................................................................... 66
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[65] L?article 66 de la LFSS pour 2024 autorise et encadre, à titre expérimental, le
retraitement de certains Dispositifs médicaux à usage unique (DMUU), leur mise à disposition
sur le marché et leur utilisation. Cette expérimentation, d?une durée de deux ans, doit débuter
au plus tard le 1er novembre 2024. Le champ et les modalités de mise en oeuvre de cette
expérimentation sont partiellement encadrées au niveau législatif :
? seuls pourront y participer les établissements de santé publics, privés d'intérêt collectif
et privés, au nombre de quatre selon l?étude d?impact, désignés par arrêté du ministre
chargé de la santé ;
? le retraitement ne pourra être réalisé que par une entreprise externe, et non par les
établissements de santé ;
? les DMUU retraités pourront être achetés sur le marché ou correspondre à des DMUU
déjà utilisés au sein des établissement de santé avant leur retraitement ;
? les entreprises externe de retraitement devront a minima respecter les obligations
prévues par l?article 17 du règlement (UE) 2017/745, même si une partie d?entre elles
peuvent être écartées sous réserve de la certification par un organisme notifié du respect
des spécifications communes définies au niveau européen (cf. encadré infra) ;
? aucun DMUU retraité ne pourra être utilisé sans l?information préalable de la personne,
qui peut s?y opposer.
[66] Prévu par la loi, un décret en Conseil d?État devra déterminer autant que de besoin les
modalités de mise en place de cette expérimentation, en particulier :
? le périmètre des DMUU qui pourront être retraités, incluant le cas échéant des
obligations, en particulier de traçabilité, et des restrictions (cf. Annexe III) ;
? les modalités particulières applicables, en matière d?information et d?opposition des
patients, à l?utilisation des DMUU retraités ;
? la méthodologie de l?expérimentation, ses objectifs et les modalités de son pilotage et
de son évaluation, en vue notamment du rapport adressé au Parlement six mois avant le
terme de l?expérimentation qui déterminera l?opportunité et, le cas échéant, les
conditions de sa pérennisation et de son extension.
[67] Cette fiche, qui vise à alimenter le futur cahier des charges de l?expérimentation, précise
les modalités envisageables de mise en oeuvre de l?expérimentation comprenant :
? les critères de choix des quatre établissements de santé qui seront retenus par arrêté ;
? les scénarios de passation d?un marché d?achat de DMUU retraités ou de retraitement de
DMUU utilisés ;
? le circuit logistique à prévoir au sein des établissements de santé qui feront retraiter les
DMUU utilisés ;
? le dispositif d?information et de recueil de l?opposition éventuelle des patients dans le
cadre des soins qui pourraient mobiliser des DMUU retraités ;
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? ses critères et modalités d?évaluation pour pouvoir apprécier à terme l?opportunité de
généraliser voire étendre le retraitement des DMUU.
Modalités de retraitement des DMUU prévues au niveau européen
Le retraitement des DMUU est encadré depuis 2017 par un règlement communautaire qui
prévoit trois modalités possibles selon des standards précisés par un règlement d?exécution.
Le règlement 2017/745 du 5 avril 2017 constitue le cadre global de régulation des DM sur le
marché intérieur européen72. Son article 17 encadre spécifiquement les DMUU et leur
retraitement. Ce cadre repose sur deux modalités possibles de retraitement :
-un retraitement par une personne physique ou morale qui est réputé alors devenir le
fabricant du dispositif retraité, ce qui suppose qu?elle s?acquitte des obligations incombant
aux fabricants (obtention du marquage CE en particulier) ;
-en ce qui concerne les DMUU retraités et utilisés dans un établissement de santé, le
retraitement peut être effectué par l?établissement ou par une entreprise externe dès lors
qu?il est effectué conformément à des spécifications communes définies dans le règlement
d?exécution 2020/120773 : dans ce cas, l?obtention du marquage CE n?est pas nécessaire mais
la conformité avec les certifications communes doit être vérifiée par un organisme notifié.
1 La participation des établissements de santé à
l?expérimentation exige en premier lieu l?adhésion de
l?ensemble des professionnels concernés
1.1 Différents critères sont envisageables pour sélectionner les
établissements de santé participant à l?expérimentation
[68] Le choix des établissements de santé qui participeront à l?expérimentation pourraient
reposer sur au moins trois critères :
? la proximité géographique de ces établissements permettrait en théorie d?optimiser le
circuit de transport des DMUU retraités vers le site de l?entreprise de retraitement : en
pratique, dans la mesure où (i) ce transport ne sera pas sous la responsabilité des
établissements de santé mais sous-traité par l?entreprise de retraitement à un logisticien
(ii) la fréquence et l?optimisation des retraits/livraisons dépendront des choix effectués
par cette entreprise en lien avec chaque établissement de santé, ce critère est en
pratique secondaire ;
72 Il s?est substitué à deux directives de 1990 et 1993. Les dispositifs médicaux implantables actifs et les
dispositifs médicaux de diagnostic in vitro font l?objet d?un encadrement juridique distinct.
73 Ces spécifications détaillent les exigences concernant la gestion des risques, la validation des
procédures pour la totalité du processus, la libération du produit et les tests de performance, le système
de gestion de la qualité, la déclaration d?incidents portant sur les dispositifs retraités, la traçabilité des
dispositifs retraités.
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? la volumétrie de DMUU retraitables (donc de cathéters d?électrophysiologie, cf. Annexe
I) utilisés (cf. tableau 1) : ce critère conditionne l?intérêt de l?entreprise de retraitement
dans la participation au marché ;
? la taille et le statut juridique des établissements : pour apprécier les éventuelles
différences dans le déploiement du retraitement des DMUU entre établissements de
santé en vue, le cas échéant, de sa généralisation, la prise en compte de ces critères
pourrait enfin se justifier.
Tableau 15 : Top 10 des établissements de santé publics et privés ayant réalisé le
plus de traitements par voie vasculaire en 2022
Établissement de santé Statut
Volume de traitements réalisés par voie vasculaire
en 202274
CL PASTEUR TOULOUSE Privé 1 280
INSTITUT MUTUALISTE MONTSOURIS Espic75 970
CHU DE BORDEAUX Public 810
HOPITAL SAINT JOSEPH Marseille Espic 800
HOSPICES CIVILS DE LYON Public 752
CLINIQUE DE LA PLAINE CLERMOND
FERRAND
Privé 747
CLINIQUE CHIRURGICALE AMBROISE
PARE
Privé 701
CHU DE SAINT-ETIENNE Public 667
INFIRMERIE PROTESTANTE Espic 632
CHU DE CLERMONT-FERRAND Public 618
Source : Pôle « data » de l?Igas.
1.2 La priorité doit être accordée aux établissements engagés dans une
démarche partagée de réduction de leur empreinte écologique
[69] Parce que le retraitement des DMUU n?est qu?un levier parmi d?autres pour diminuer
l?empreinte écologique des produits de santé, il est recommandé de favoriser la participation
à l?expérimentation des établissements engagés dans une démarche globale de décarbonation.
En effet, l?existence d?une telle démarche (objectivée par un diagnostic, une feuille de route et
une comitologie dédiée) limite le risque de considérer le retraitement comme un levier isolé,
et in fine modeste à l?échelle de la totalité des émissions recensées, de diminution de
74 Traitements majeurs des troubles du rythme par voie vasculaire : GHS 05K191, 05K192, 05K193, 05K194,
05K19.
75 Espic : Établissement de santé privé d?intérêt collectif.
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l?empreinte écologique (cf. annexe IV). À l?inverse, l?autorisation de retraiter certains DMUU
peut jouer un rôle de catalyseur si d?autres leviers ont déjà été identifiés et engagés
(développement de l?usage multiple, généralisation et renforcement de la portée des clauses
environnementales dans les achats de produits de santé, valorisation des déchets issus des DM,
etc.).
[70] En outre, l?existence d?une stratégie globale, idéalement concertée, de diminution de
l?empreinte écologique favorise un alignement et une adhésion des professionnels vis-à-vis de
l?expérimentation, critère primordial de sélection des établissements de santé. Il est
indispensable que tous les professionnels directement ou indirectement concernés par
l?expérimentation (direction générale, acheteurs en Pharmacie à usage intérieur-PUI, juristes,
hygiénistes, service de stérilisation, professionnels médicaux et paramédicaux utilisant les
DMUU) en comprennent le sens et acceptent de l?endosser.
2 Un marché commun de retraitement ou d?achat de DMUU
devra être conclu dans le respect du code de la commande
publique
2.1 Les deux circuits possibles « ouvert » ou « fermé » de retraitement
des DMUU présentent des avantages et inconvénients respectifs
[71] Deux circuits de retraitements, dits « ouvert » ou « fermé » sont envisageables dans le
cadre fixé par la LFSS pour 2024 :
? dans le circuit « ouvert », les établissements de santé, d?une part, vendent76 à l?entreprise
de retraitement les DMUU utilisés et, d?autre part, achètent à cette entreprise des DMUU
retraités, indépendamment du lieu où ces DMUU ont été précédemment utilisés ;
? dans le circuit « fermé », les établissements de santé sous-traitent à une entreprise le
retraitement des DMUU qu?ils ont utilisés, sous le plafond du volume maximal de cycles
de retraitements prévus (cf. Annexe I).
[72] Dans le cadre de l?expérimentation, il serait préférable que tous les établissements
adoptent le même circuit, qui conditionne la conclusion d?un marché groupé, en se fondant
sur les critères d?appréciation suivants :
? sur le plan opérationnel, le circuit « ouvert » offre plus de flexibilité dans la gestion des
stocks en fonction de son activité : en effet, le volume de DMUU retraités achetés ne
dépend pas du volume de DMUU vendus à l?entreprise de retraitement ; par ailleurs, dans
la mesure où les DMUU retraités marqués CE sont strictement équivalents aux DMUU
76 La vente des DMUU utilisés ne nécessite pas de formalités particulières. Le prix de vente doit être agréé
au préalable avec l?entreprise de retraitement.
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neufs, il n?y a pas d?intérêt du point de vue sanitaire ou des utilisateurs à privilégier des
DMUU retraités déjà utilisés dans le même établissement ;
? sur le plan juridique, la DAJ des ministères sociaux77, saisie par la mission, estime
néanmoins que le circuit « fermé », qui repose sur un marché de prestation, et non sur
un marché d?achat de produits, est moins risqué au regard de l?exclusivité dont peuvent
bénéficier les titulaires des accords-cadres déjà conclus pour la fourniture des DMUU
neufs.
[73] Selon la DAJ des ministères sociaux, la coexistence de deux marchés publics, l?un portant
sur l?achat de DMUU neufs, l?autre sur leur retraitement, est juridiquement possible mais plus
fragile en circuit « ouvert » en l?absence dispositions explicites dans l?accord-cadre avec les
fournisseurs de DMUU neufs78. La DAJ, qui a analysé un exemple d?accord-cadre avec un
fournisseur de cathéters d?électrophysiologie fournis par le CHU de Bordeaux, rappelle que,
les acheteurs restent libres de définir dans un tel accord les limites de leur engagement
contractuel, y compris des exceptions au principe d?exclusivité. L?acheteur doit insérer de
manière expresse, dans les documents contractuels du marché, une clause stipulant qu?il se
réserve la possibilité de recourir à des tiers pour certains types de prestations prévues au
contrat. En l?absence de ces clauses, l?acheteur est tenu, par principe, de garantir au titulaire
l?exclusivité des prestations qui en sont l?objet. Selon la DAJ, dans le cadre du circuit « ouvert »,
l?objet du nouveau marché aurait un objet similaire à celui déjà conclu pour les DMUU neufs. À
l?inverse, dans le circuit « fermé », l?objet du nouveau marché serait différent de celui du
marché initial, ce qui limiterait le risque contentieux. Compte tenu des avantages sur le plan
économique du circuit « ouvert », la mission préconise de le privilégier dans le cadre de
l?expérimentation, même s?il implique un investissement sur le plan juridique.
2.2 Un échange avec les fournisseurs de DMUU neufs devra être engagé
et déboucher le cas échéant sur un avenant au marché initial
[74] Quel que soit le circuit retenu, qui dépendra en particulier des engagements contractuels
pris par les établissements retenus avec leur fournisseur de DMUU neufs, un échange préalable
avec ces derniers, et le cas échéant un avenant à l?accord-cadre, seront nécessaires. En effet,
comme l?a constaté la DAJ sur la base de l?exemplaire d?accord-cadre fourni par le CHU de
Bordeaux, et selon les témoignages d?acheteurs recueillis par la mission, les fabricants de DMUU
neufs, en l?espèce de cathéters d?électrophysiologie, lient souvent la vente de ces DMUU avec
d?autres prestations telles que la mise à disposition d?une console à laquelle est connectée le
cathéter et un service de conseil et de maintenance qui se matérialise par la présence, durant
les interventions, d?un ingénieur travaillant pour le compte du fabricant. Dans son analyse, la
DAJ rappelle que le pouvoir adjudicateur, lorsqu?il suit une procédure régulière, n?est pas
conduit à accepter une prestation qu?il n?a pas demandée et sur laquelle la concurrence n?a
pas porté. Conformément aux règles d?allotissement, la mise à disposition d?équipements et la
77 Note du bureau de la commande et des interventions publiques de la DAJ des ministères sociaux datée
du 20 novembre 2023.
78 L?obligation pour les établissements publics d?établir un marché pour le retraitement des DMUU ne
s?appliquera bien sûr qu?à ceux qui ont la qualité d?acheteur au sens du code la commande publique.
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maintenance pourraient faire l?objet de prestations distinctes de celle de la fourniture de
consommables. En pratique, en cas d?achat de DMUU retraités, il conviendra de s?assurer
auprès du fournisseur de DMUU neufs que (i) la console mise à disposition pourra être aussi
utilisée avec ces cathéters retraités (ii) la prestation de conseil et de maintenance associée aux
cathéters neufs pourra être, soit dissociée dans un support contractuel distincts, soit étendue
à l?utilisation des cathéters retraités.
3 Un circuit logistique devra être mis en place avec un impact
a priori limité sur la charge de travail des professionnels de
santé
3.1 Le circuit logistique sera défini avec l?entreprise de retraitement en
tenant compte du cadre juridique applicable aux déchets
[75] Le retraitement de DMUU qui étaient auparavant directement jetés79 une fois utilisés,
nécessite la mise en place d?un circuit logistique incluant a minima les étapes suivantes :
? le nettoyage, selon le protocole convenu avec l?entreprise de retraitement et en
conformité avec les règles définies par la Société Française d?Hygiène Hospitalière (cf.
Annexe I), par le personnel paramédical (infirmiers, ou aides-soignants a priori) du DMUU
utilisé durant l?intervention dès lors que le nombre maximal de cycles de retraitement
n?est pas atteint80 ;
? le stockage, dans la salle d?intervention, ou à proximité, des DMUU destinés à être
retraités dans un container fourni par l?entreprise de retraitement dont la taille dépendra
(i) du volume hebdomadaire ou mensuel de DMUU utilisés (ii) de la fréquence convenue
de collecte par le prestataire de transport mandaté par l?entreprise de ces derniers ;
? la remise, à la date et heure convenue avec l?entreprise de retraitement, par le personnel
en charge de la logistique, des containers avec les DMUU utilisés ;
? une fois ces DMUU retraités (en circuit « fermé »), ou une fois les DMUU retraités
commandés en fonction de l?évolution du stock de DMUU restants (en circuit « ouvert »),
leur recueil par les services en charge de la logistique pour acheminement vers les salles
d?intervention ;
? lors de leur utilisation, l?inscription, dans le SI quand il existe ou dans un registre papier à
défaut, de l?identifiant unique (UDI)81 du DMUU retraité et du numéro apposé par
79 Certains établissements de santé, comme le CHU de Bordeaux, procèdent néanmoins à l?extraction et
à la vente de la pointe des cathéters auprès d?organismes qui revalorisent les métaux précieux qu?elles
contiennent (cf. Annexe IV).
80 Cette information est lisible à travers le numéro de lot apposé sur le DM par l?entreprise de
retraitement.
81 L?UDI est un code international numérique ou alphanumérique permettant d?identifier chaque DM tout
au long de son cycle de vie.
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l?entreprise de retraitement reliés au numéro d?identification du patient sur qui ce DMUU
retraité a été utilisé.
[76] Concernant spécifiquement l?étape de nettoyage des DMUU82, elle devra être réalisée
selon des standards permettant à la fois de préserver la possibilité de les retraiter et de ne
plus les considérer comme des déchets. En effet, l?analyse réalisée par la DAJ des ministères
sociaux souligne que :
? le code de l?environnement83 prévoit qu?« un déchet cesse d'être un déchet après avoir
été traité et avoir subi une opération de valorisation, notamment de recyclage ou de
préparation en vue de la réutilisation (?) » ;
? si l?on se réfère en particulier à la norme ISO 17664 :201784, le simple nettoyage à l?eau
d?un DMUU ne permettrait pas de faire sortir ce dernier de la catégorie de « déchet » au
sens du code de l?environnement ;
? or, pour que les DMUU retraités puissent circuler librement en UE, ils ne doivent pas être
considérés comme des déchets : en effet, le droit européen85 exige une procédure de
notification et de consentement écrit préalable pour le transfert de déchets ménagers
entre États de l?UE.
82 Ce nettoyage consiste à préparer les DMUU utilisés en intervention en vue de leur retraitement, ce qui
inclut la vérification de leur intégrité (ex : DMUU non visiblement endommagé).
83 Article L. 541-4-3.
84 La norme ISO 17664 :2017 intitulée « Traitement de produits de soins de santé ? Informations relatives
au traitement des dispositifs médicaux à fournir par le fabricant du dispositif » précise que le nettoyage
consiste « à éliminer, généralement à l?aide d?un agent nettoyant et d?eau, les souillures adhérentes (par
exemple, sang, substances protéiques et autres débris) des surfaces, fentes, cannelures, joints et lumières
d?un dispositif médical, par le biais d?un procédé manuel ou automatique qui prépare les produits à une
manipulation en toute sécurité et/ou à la poursuite du traitement ». Ce nettoyage intervient avant tout
procédé de désinfection et/ou de stérilisation postérieur.
85 L?article 33 du Règlement (CE) No 1013/2006 du Parlement Européen Et Du Conseil du 14 juin 2006
établit les conditions de transfert des déchets entre les État membres de l?Union européenne.
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Protocole de nettoyage des DMUU avant retraitement
La mission a eu connaissance d?un projet de contrat entre Vanguard et un CHU qui précise
les modalités de préparation et de vérification des DMUU avant leur envoi pour
retraitement. Ce document indique que seuls les DM complets et non endommagés (sur un
plan mécanique) peuvent être collectés et nettoyés. Certains DM sont exclus de ce
retraitement notamment ceux dont les surfaces externes ont été en contact avec des
médicaments cytostatiques, ou des produits radiopharmaceutiques. Sont également exclus
ceux qui ont été utilisés de manière reconnaissable ou supposée sur des patients atteints de
certaines maladies infectieuses86. Il y est rappelé que le nettoyage préalable doit s?effectuer
en milieu hospitalier juste après l?utilisation des DM afin que les résidus ne sèchent pas et ne
soient pas difficiles à enlever.
Le protocole de nettoyage repose sur un essuyage des surfaces avec un chiffon humide avec
de l?eau froide et claire. Les tiges doivent être essuyées si possible de l?intérieur vers
l?extérieur. Les pièces mobiles doivent être nettoyées dans les deux positions finales. Aucun
désinfectant ni désinfection thermique ne doit être utilisés. Enfin, si le cathéter a une
lumière, les passages doivent être rincés à l?eau froide, aucun liquide ne doit parvenir dans
une pièce à main. Une fois nettoyé, le DM est séché avec une compresse propre ou un
chiffon non pelucheux à usage unique. Le DM peut ensuite être emballé et placé dans les
containers pour enlèvement.
Ce protocole est a priori compatible avec celui préconisé par la SF2H dans son guide relatif
au traitement et à la désinfection des DM réutilisables. Étant donné que le retraitement des
DMUU est interdit en France, ce guide n?aborde pas le nettoyage des DMUU avant
retraitement. Néanmoins, la première étape de pré-désinfection peut être considérée
comme équivalente à celle décrite par le protocole de Vanguard. La SF2H considère que ce
protocole est valable pour l?ensemble des DM, quels que soient le statut sérologique,
bactérien ou viral des patients sur lesquels ils ont été utilisés.
Source : Mission.
3.2 Au regard de la simplicité relative de ce circuit, la surcharge de
travail devrait rester limitée
[77] Sur la base de ses échanges avec les représentants de trois CHU, qui devront être
corroborés au cours de l?expérimentation, la mission estime que la surcharge de travail
associée au retraitement des DMUU devrait être limitée :
? elle est concentrée sur le personnel paramédical, en particulier les infirmiers ou les aides-
soignants qui, au lieu de jeter directement les DMUU utilisés devront les nettoyer pour
un temps estimé à moins de 10 mn par dispositif ;
86 VIH, Hépatites virales, choléra, tuberculose, fièvres hémorragiques, encéphalopathie spongiforme
transmissible (maladie de Creutzfeldt Jakob et ses variants)
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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? les acheteurs en PUI seront mobilisés en amont de l?expérimentation pour participer à la
construction d?un éventuel marché groupé avec l?entreprise de retraitement et
renégocier si nécessaire les accords-cadres avec les fournisseurs de DMUU neufs ;
? la surcharge de travail pour les acteurs en charge de la logistique (acheminement des
containers des salles d?intervention vers le lieu de retrait, et réciproquement pour la
collecte des DMUU retraités) est jugée marginale.
4 Les modalités d?information du patient devront être
ajustées pour ne pas faire obstacle à la mise en oeuvre de
l?expérimentation
4.1 La LFSS pour 2024 prévoit l?obligation d?informer les patients, qui
peuvent s?y opposer, quand un DMUU retraité va être utilisé
[78] L?obligation d?informer les patients du caractère retraité d?un DMUU est une quasi-
exception française qui peut s?expliquer par le cadre expérimental retenu. Pourtant, l?article
17 du règlement 2017/745 précise que les États membres « encouragent, et peuvent obliger, les
établissements de santé à fournir aux patients des informations sur les dispositifs médicaux
retraités en leur sein ». En pratique, parmi les pays européens qui autorisent à ce jour le
retraitement, seule l?Espagne prévoit l?obligation d?en informer au préalable les patients (cf.
Annexe III). Un parallèle peut être fait avec les essais cliniques qui requièrent un consentement
éclairé des patients. Toutefois, à la différence des essais cliniques, il est impossible dans le cas
des DMUU retraités de préciser, et a fortiori de quantifier, l?existence d?un risque. À cet égard,
l?obligation d?information prévue par la LFSS pour 2024 est contradictoire avec la
responsabilité des entreprises assurant le retraitement des DMUU dans un cadre, celui du
marquage CE, identique à celui des DMUU neufs pour lesquels aucune information n?est
prévue.
[79] Cette obligation d?information, assortie d?un droit d?opposition, dont les modalités
seront définies dans le futur décret en Conseil d?État, pourrait faire obstacle au bon
déroulement de l?expérimentation. Les représentants des associations de patients rencontrés
par la mission le 27 novembre dernier n?ont pas été consultés dans le cadre de la rédaction de
l?article 66 de LFSS 2024. Leur avis devrait en revanche être recueilli en amont de la
transmission du projet de décret au Conseil d?État. Ces représentants ont souligné auprès de
la mission la nécessité de (i) faire preuve de pédagogie auprès des patients en leur expliquant
les objectifs poursuivis par l?expérimentation (ii) prévoir un dispositif de recueil du
consentement explicite des patients.
4.2 Une fois correctement informé, le patient pourrait s?opposer à
l?utilisation d?un DMUU retraité dans une logique d?« opt out »
[80] Pour trouver un équilibre entre la juste information des patients et le bon déroulement
de l?expérimentation, la mission propose d?abord l?élaboration au niveau national d?une fiche
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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informative commune aux quatre établissements qui participeront à l?expérimentation. Cette
fiche, qui serait remise au patient en amont de l?intervention mobilisant un DMUU retraité,
valoriserait (i) le caractère identique du DMUU retraité par rapport au DMUU neuf garanti par
son marquage CE (ii) le double gain écologique et économique associé à son utilisation.
[81] Pour maximiser les chances qu?un patient accepte l?utilisation d?un DMUU retraité, il est
recommandé de privilégier une logique d?« opt out ». Ainsi, une ligne pourrait être ajoutée sur
les documents remis au patient avant une intervention stipulant qu?il accepte par ailleurs
l?utilisation d?un DMUU retraité. L?opposition d?un patient à l?utilisation d?un DMUU retraité
devrait donc être expresse. Elle pourrait être tracée via apposition d?une inscription de la part
des professionnels de santé sur le dossier du patient. Le taux d?« opt out » devra être suivi dans
le cadre de l?expérimentation.
5 Les crédits prévus par la LFSS 2024 pourraient financer une
évaluation externe de l?expérimentation sur la base des
critères définis en cahier des charges
5.1 L?évaluation de l?expérimentation doit être réalisée par un acteur
expert de l?analyse du cycle de vie des produits de santé
[82] La mission recommande de flécher sur l?évaluation de l?expérimentation une partie des
financements prévus pour accompagner l?expérimentation. En effet, l?étude d?impact de la
LFSS pour 2024 prévoit un montant de 890 000¤ pour accompagner les quatre structures sur
les deux années de l?expérimentation tant en moyens humains qu?en ingénierie. Si le montage
du marché avec l?entreprise de retraitement pourrait nécessiter une expertise juridique
externe, la mission n?identifie pas de besoins de financement autres dans le cadre de
l?expérimentation. En revanche, une partie de ces crédits pourraient utilement être allouée au
financement d?une prestation d?évaluation.
[83] Cette prestation d?évaluation devra être confiée à un acteur87 qui maîtrise en particulier
la méthodologie de l?analyse de cycle de vie. En effet, cette méthodologie, qui suppose de
recueillir et de traiter un volume important de données, ne peut pas aujourd?hui être mise en
oeuvre de façon autonome par les établissements de santé, leur tutelle ou les services
d?inspection, dont l?inspection générale des affaires sociales. Or elle est indispensable pour
apprécier l?intérêt écologique du retraitement.
87 La mission a identifié au moins deux sociétés qui réalisent d?ores et déjà ce type d?analyses pour le
compte d?établissements de santé.
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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5.2 Cette évaluation devra permettre d?apprécier l?intérêt du
retraitement sur les plans sanitaire, écologique, économique et
humain
[84] En lien avec les représentants des établissements de santé rencontrés, la mission a
identifié un certain nombre de critères qui pourraient être inscrits dans le dispositif de
pilotage et d?évaluation de l?expérimentation :
? nombre de déclarations de matériovigilance recensées ;
? nombre d?événements indésirables associés aux soins ;
? volume de DMUU retraités sur une période donnée rapportée au volume de DMUU neufs
achetés, à comparer au volume acheté avant retraitement ;
? nombre de DMUU envoyés pour retraitement par rapport au nombre de DMUU retraités
acquis sur une période donnée
? nombre de patients ayant manifesté leur opposition à l?utilisation d?un DMUU retraité
rapporté au nombre de patients pour lesquels un DMUU retraité a été utilisé sur une
période donnée ;
? taux de satisfaction de différentes catégories de professionnels de santé (pharmaciens,
paramédicaux, médecins) par rapport au circuit logistique associé au retraitement et,
s?agissant des soignants, à la fonctionnalité des DMUU retraités par rapport aux DMUU
neufs.
[85] Sur un plan plus qualitatif, il est nécessaire que le dispositif de pilotage comme
l?évaluation, qui pourrait exiger un délai supérieur aux 18 mois prévus par la loi, permettent
d?apprécier l?atteinte de l?ensemble des objectifs assignables à l?expérimentation :
? sur le plan financier, est-il possible de quantifier les économies annuelles réalisées grâce
à l?acquisition de DMUU retraités en tenant compte du coût complet sur leur cycle de
vie des DMUU neufs par rapport à celui des DMUU retraités ?
? sur le plan écologique, peut-on objectiver sur leur cycle de vie la diminution de
l?empreinte écologique, et non uniquement des émissions carbone, associées aux DMUU
retraités par rapport aux DMUU neufs ? Quel a été par ailleurs l?effet de l?expérimentation
sur la stratégie globale de décarbonation des D (effet neutre, effet catalyseur ou effet
d?éviction) ?
? enfin, sur un plan humain, en lien avec le circuit logistique mis en place en établissement,
quel est l?impact de l?expérimentation sur (i) la charge et l?organisation du travail des
professionnels concernés (ii) le sens au travail (iii) les relations entre les services ?
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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ANNEXE 3 : Éléments de parangonnage
sur le retraitement des DMUU en Europe
1 LE RETRAITEMENT DES DMUU DANS LES NEUF ÉTATS MEMBRES DE L?UE PRESENTE DES
CARACTERISTIQUES DIFFERENTES ............................................................................................. 69
1.1 À FIN OCTOBRE 2023, NEUF ÉTATS MEMBRES ONT AUTORISE LE RETRAITEMENT DES DMUU TANDIS
QUE QUINZE L?ONT INTERDIT .......................................................................................................... 69
1.2 LES MODALITES D?APPLICATION DE L?ARTICLE 17 DU RMD SONT DIFFICILES A APPRECIER ET
GLOBALEMENT HETEROGENES ........................................................................................................ 69
2 FOCUS SUR LA SUEDE, L?ESPAGNE ET LE ROYAUME-UNI A PARTIR DES RETOURS DES
CONSEILLERS AUX AFFAIRES SOCIALES .................................................................................... 71
2.1 HISTORIQUE ET CADRE DU RETRAITEMENT DES DMUU .................................................................. 71
2.2 CRITERES ECONOMIQUES ET ECOLOGIQUES .................................................................................... 72
2.2.1 Critères économiques ....................................................................................................................72
2.2.2 Critères écologiques ......................................................................................................................72
2.3 PERIMETRE DES DMUU ELIGIBLES AU RETRAITEMENT ...................................................................... 73
2.4 ORGANISATION DU RETRAITEMENT ................................................................................................ 75
2.4.1 Espagne ............................................................................................................................................75
2.4.2 Royaume Uni ...................................................................................................................................76
2.4.3 Suède ...............................................................................................................................................77
2.5 FILIERES DE RETRAITEMENT ............................................................................................................. 77
2.6 TRAÇABILITE DES DMUU ............................................................................................................... 77
2.7 INFORMATION DES PATIENTS .......................................................................................................... 78
3 LE RETRAITEMENT DES DMUU EST AUSSI DEVELOPPE EN AMERIQUE DU NORD,
PARTICULIEREMENT AUX USA ..................................................................................................... 79
3.1 ÉTATS-UNIS ................................................................................................................................... 79
3.2 CANADA ........................................................................................................................................ 80
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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[86] Cette annexe propose des éléments de parangonnage sur le retraitement des DMUU
dans les États membres de l?Union européenne (UE), avec quelques éclairages sur des pays hors
UE (Grande-Bretagne, États-Unis). Elle se fonde sur des informations recueillies en ligne et, via
une enquête diligentée par la mission, auprès des Conseillers aux affaires sociales de trois pays
(Suède, Espagne, Allemagne).
[87] Pour mémoire (cf. Annexe I), le retraitement des Dispositifs médicaux à usage unique
(DMUU) est encadré au niveau européen par le Règlement 2017/745 du 5 avril 2017 complété
par le Règlement d?exécution 2020/1207 du 19 août 2020 qui précise les spécifications
communes à respecter en dehors du marquage CE. L?article 17 du Règlement 2017/745 (dit
RMD) précise que « le retraitement et la réutilisation de dispositifs à usage unique ne peuvent
avoir lieu que s'ils sont autorisés par la législation nationale et uniquement conformément au
présent article ». L?article 17 fixe donc un cadre a minima qui peut être adapté par les États
membres. Ainsi, "un État membre qui autorise le retraitement de dispositifs à usage unique peut
maintenir ou introduire des dispositions nationales plus strictes que celles prévues par le présent
règlement et qui restreignent ou interdisent sur son territoire ». Ces dispositions doivent en
principe être notifiées à la Commission européenne.
[88] Dans le cadre de son échange avec un représentant de l?unité D3 en charge des DM à la
Commission européenne, la mission a constaté que cette dernière disposait d?informations
très limitées sur la mise en oeuvre de l?article 17 du RMD au sein de l?UE. Si la Commission
recense les législations nationales qui autorisent ou interdisent le retraitement, elle n?est pas
en mesure d?apprécier le périmètre des DMUU retraités, le mode de retraitement choisi (en
établissement de santé ou par une entreprise externe, dans le cadre du marquage CE ou des
spécifications communes) ou encore le volume de DMUU retraités par rapport au total des
DMUU utilisés. En revanche, l?article 17 du RMD prévoit l?élaboration d?un rapport sur son
exécution qui devra être établi avant le 27 mai 2024 et remis au Parlement européen et au
Conseil. Ce rapport, confié à un prestataire sélectionné par la Commission, est en cours
d?élaboration. Il pourrait déboucher sur des propositions d?évolution de l?article 17 du RMD.
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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1 Le retraitement des DMUU dans les neuf États membres de
l?UE présente des caractéristiques différentes
1.1 À fin octobre 2023, neuf États membres ont autorisé le retraitement
des DMUU tandis que quinze l?ont interdit
[89] La carte ci-dessous synthétise le choix des États membres sur le retraitement des DMUU.
Carte 2 : Position des États sur le retraitement des DMUU à fin octobre 2023
Source : Mission.
1.2 Les modalités d?application de l?article 17 du RMD sont difficiles à
apprécier et globalement hétérogènes
[90] Le tableau ci-dessous synthétise les modalités de mise en oeuvre du retraitement prévues
par le droit national dans les neuf États qui ont autorisé le retraitement. Il en ressort les constats
suivants :
? si tous les pays ont ouvert le retraitement aux établissements de santé, seuls l?Irlande et
les Pays-Bas imposent un marquage CE aux établissements de santé souhaitant retraiter
les DMUU ;
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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? trois États (Croatie, Suède et Slovénie) interdisent le retraitement sur leur territoire aux
entreprises en dehors d?un contexte de sous-traitance ;
? un pays, l?Espagne, impose que l?entreprise qui à laquelle est sous-traité le retraitement
des DMUU ait son siège social en Espagne ;
? en ce qui concerne le périmètre des DMUU éligibles au retraitement, aucun pays n?a
établi de liste positive des DMUU pouvant être retraités mais certains pays comme la
Belgique et l?Espagne, ont exclu les DM répondant aux critères listés par le Règlement
d?exécution de 2020 ; d?autres États, comme l?Irlande, et les Pays Bas, n?excluent aucun
DM, et délèguent aux établissements de santé l?appréciation du risque de retraiter un
DMUU.
Tableau 16 : Modalités d?application de l?article 17 du RMD par pays qui autorise le
retraitement
Pays Par une
entreprise
externe avec
marquage CE
En
établissement
de santé
Par une
entreprise
externe avec
spécifications
communes
Restrictions au
périmètre des
DMUU éligibles
Information
obligatoire
du patient
Belgique Autorisé Autorisé Autorisé Oui Oui
Croatie Non autorisé Autorisé Autorisé Oui Non
Allemagne Autorisé Autorisé Autorisé Non Non
Irlande Autorisé Non autorisé Non autorisé Non Non
Pays-Bas Autorisé Non autorisé Non autorisé Non Non
Suède Non autorisé Autorisé Autorisé Oui Non
Portugal Autorisé Autorisé Autorisé Non Oui88
Espagne Autorisé Autorisé Autorisé Non Oui
Slovénie89 Non autorisé Autorisé Autorisé NC Oui
Source : Mission à partir des données transmises par les conseillers des affaires sociales et mises
en ligne par la Commission européenne.
88 Les établissements de santé informent les professionnels de santé et leurs patients de l?utilisation des
dispositifs médicaux à usage unique retraités et de toute autre information pertinente à leur sujet, et le
comité d?éthique de l?entité responsable concerné doit être impliqué.
89 En cours d?élaboration.
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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2 Focus sur la Suède, l?Espagne et le Royaume-Uni à partir des
retours des Conseillers aux affaires sociales
[91] Afin d?objectiver les pratiques de certains États et pour compléter les informations
disponibles sur les sites internet des agences sanitaires et de la Commission Européenne, une
enquête a été menée auprès des Conseillers pour les affaires sociales (CAS) au cours du mois
d?octobre 2023.
[92] La mission a fait le choix de ces trois pays car chacun a autorisé le retraitement des
DMUU. Le Royaume-Uni ne faisant plus partie de l?Union Européenne, il n?est cependant plus
soumis aux règles de l?article 17 du RMD.
2.1 Historique et cadre du retraitement des DMUU
[93] En l?Espagne, l?adoption récente (21 mars 2023) du décret 192/2023 autorisant le
retraitement des DMUU ne permet pas d?avoir suffisamment de recul sur l?application de ses
dispositions, d?autant que celles-ci requièrent la publication d?une « Résolution » du ministère
de la santé, qui précisera les modalités d?application du texte. C?est l?AEMPS, Agence espagnole
du médicament et des produits de santé, qui est acteur-clé dans la mise en oeuvre du décret.
[94] Au Royaume Uni, les pratiques autorisées en matière de re-fabrication et recyclage des
dispositifs médicaux à usage unique sont encadrées par l?Agence de régulation des soins
médicaux (« Medicines & Healthcare products Regulatory Agency » -MHRA). Cette agence
exécutive auprès du ministère de la santé, équivalent de l?ANSM Française, est en charge de la
réglementation des médicaments, les dispositifs médicaux et les composants sanguins destinés
à la transfusion. Ses avis, dont celui relatif au retraitement des dispositifs médicaux à usage
unique, ont donc une portée juridique contraignante. Cette pratique est autorisée depuis 2016
suite à la publication d?un guide : « Single Use Medical Devices : UK Guidance on re-
manufacturing ».
[95] En Suède, la procédure de retraitement est fixée par le règlement d?exécution 2020/2027
de la Commission portant modalités d?application du règlement (UE) 2017/745 du Parlement
européen et du Conseil en ce qui concerne les spécifications communes pour le retraitement
des dispositifs à usage unique. Les autorités responsables du contrôle et de la régulation de ces
produits sont l?Agence du médicament, Läkemedelsverket, et l?inspection pour les soins et le
bien-être, Inspektion för vård och omsorg, IVO90.
90 Nya föreskrifter om reprocessares och externa reprocessares skyldighet att lämna uppgifter om sin
verksamhet och sin produkt | IVO.se.
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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2.2 Critères économiques et écologiques
2.2.1 Critères économiques
[96] L?Espagne estime que l?impact économique est limité mais reste positif pour l?économie
en général. En permettant le retraitement de produits à usage unique, l?offre de produits à des
prix plus abordables se développera, influençant directement les dépenses de santé. En outre,
permettre le retraitement augmentera l?offre de produits à des prix plus abordables, ce qui
pourra développer la concurrence, en plus d?impacter directement les dépenses de santé.
Lorsque l?activité de retraitement est réalisée par des fabricants, tant le règlement (UE)
2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 que le projet de décret
imposeront les mêmes exigences à ces « fabricants-retraiteurs » qu?aux fabricants du produit
original, favorisant ainsi la concurrence de deux opérateurs économiques dans des conditions
d'égalité sur le marché, sans imposer de restrictions d'accès inégales ni limiter la libre
concurrence.
[97] La Suède a quant à elle réalisé des évaluations de l?impact économique du retraitement
des cathéters d?électrophysiologie. Ainsi, selon les calculs du conseil pour la santé et le bien-
être, Socialstyrelsen, qui a été chargé d?évaluer les modalités de mise en oeuvre des dispositions
relatives au retraitement des DMUU en Suède, la réutilisation systématique des cathéters
d?électrophysiologie pourrait permettre d?économiser entre 65 et 70 millions de couronnes (de
5,54 à 5,97 millions d?¤).
2.2.2 Critères écologiques
[98] Seul le Royaume Uni a inscrit dans le Plan Green NHS l?objectif de retraitement des
DMUU dans les établissements de santé.
[99] En Suède, la question écologique n?est que peu abordée par les administrations chargées
de la mise en oeuvre des dispositions relatives au retraitement des DMUU. Dans son rapport de
2020 sur les conditions techniques de mise en oeuvre du retraitement des DMUU, le conseil de
la santé et du bien-être, Socialstyrelsen, évoque néanmoins le fait que le retraitement des
DMUU s?insère dans les objectifs de préservation de l?environnement de l?Agenda 2030. À ces
arguments, les organisations professionnelles, opposées à la réutilisation des DMUU, répondent
que les processus de retraitement sont coûteux et ont également un impact sur
l?environnement. Elles soulignent également que le montant des compensations financières
liées aux accidents médicaux causés par des DMUU mal retraités peut être très élevé, et que
des DMUU mal retraités peuvent contribuer à augmenter l?antibiorésistance. Des organisations
de médecins rétorquent à ces arguments que la réutilisation de certains dispositifs, comme les
cathéters, se fait depuis des années sans problème. Ils soulignent par exemple que 60 000
procédures d?ablation par cathéter ont été enregistrées sur la période 2005-2019 sans
complications liées à la réutilisation des produits selon le registre suédois de l?ablation par
cathéter.
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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Espagne Royaume Uni Suède
Pas d?analyse des impacts
écologiques à ce stade
disponible
Le retraitement des DMUU
s?inscrit dans l?engagement
gouvernemental en 2019 à
atteindre un objectif "zéro
carbone" d'ici à 2050
nécessitant une réduction
significative des émissions dans
tous les secteurs, et notamment
celui de la santé91. Dans ce
contexte, en 2020 a été lancé un
plan Green NHS. Ce travail, qui
a consisté en une consultation
nationale auprès des patients et
du personnel, a abouti à la
publication d?un rapport,
intitulé " Mettre en place un
service national de santé zéro
émissions net ». Le plan Green
NHS inclut notamment
l?objectif de réduction des
déchets des hôpitaux, et
l?investissement dans des
programmes de recyclage
Dans son rapport de 2020 sur
les conditions techniques de
mise en oeuvre du retraitement
des DMUU, le conseil de la
santé et du bien-être,
Socialstyrelsen, évoque le fait
que le retraitement des DMUU
s?insère dans les objectifs de
préservation de
l?environnement de l?Agenda
2030
Source : Mission à partir des données transmises par les CAS.
2.3 Périmètre des DMUU éligibles au retraitement
[100] Aucun des trois pays interrogés n?a établi de liste de DMUU autorisés au retraitement.
Le principe guidant la possibilité de retraiter est l?étude des risques du DMUU initial, et la
capacité d?un organisme réalisant le retraitement à démontrer la conformé du DMUU retraité
aux exigences essentielles (marquage CE ou respect des recommandations spécifiques).
Espagne Royaume Uni Suède
Aucun DMUU n?est
actuellement retraité. En effet,
le décret du 21 mars 2023
implique l?adoption de mesures
d?application techniques. Il
convient en outre que les
entités effectuant ce
Il n?existe pas de liste de DMUU
autorisés à être retraités. Les re-
fabricants sont autorisés à
retraiter les DMUU dont ils
arrivent à démontrer la
conformité aux exigences de la
Il n?existe pas de liste de DMUU
autorisés à être retraités.
La Suède suit les classifications
de l?Union européenne et ne
dresse pas de liste exhaustive
91 Le système de santé britannique (NHS) est ainsi l'un des principaux émetteurs de dioxyde de carbone
au Royaume-Uni avec 5,4 % des émissions totales de carbone et 40 % de l'ensemble des émissions du
secteur public (NHS).
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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retraitement disposent
préalablement d?une
autorisation d?activité
directive sur les dispositifs
médicaux.
Un organisme certifiant est
également en charge de vérifier
que le DMUU reconditionné
réponde clairement à tous les
critères appropriés de la
directive britannique sur les
dispositifs médicaux en termes
de performance et de sécurité ;
il doit confirmer la validité et la
certitude de tous les processus
de fabrication (processus de
conception le cas échéant), et
doit s?assurer qu'ils répondent
aux exigences réglementaires
avant et après la mise sur le
marché. Par ailleurs, il est établi
une différence entre
refabrication et
transformation/remise à neuf :
la législation britannique
autorise la re-fabrication (re-
manufactured SUD), mais pas la
transformation / remise à neuf
des DMUU (« devices which are
reprocessed or fully
refurbished »)
des DMUU pouvant faire l?objet
d?un retraitement
Pour évaluer si un DMUU se
prête au retraitement, la
gestion des risques doit tenir
compte : des risques liés à la
composition des matériaux, aux
matériaux relargables, à la
contamination
microbiologique, aux prions et
aux agents de
l?encéphalopathie spongiforme
transmissible, aux endotoxines,
ainsi qu?aux réactions
pyrogènes, allergiques et
toxiques ; et des
caractéristiques techniques et
les propriétés géométriques des
produits.
Source : Mission à partir des données transmises par les CAS.
[101] Les DMUU exclus du retraitement sont ceux qui au cours des études de risques n?ont pas
montré leur capacité tant sur le plan technique que sécuritaire.
[102] Concernant la justification de la limitation des produits ce sont ceux énumérés par le
règlement d'exécution (UE) 2020/1207 de la Commission du 19 août 2020, définit comme
produits ne pouvant pas être retraités.
[103] L?Espagne a jouté à cette liste les DMUU sur-mesure et ceux de classe I. Pour ces derniers,
à ce jour, aucun organisme notifié n'intervient dans l'évaluation de la conformité. Il s'agit de
produits autocertifiés par le fabricant lui-même. C'est pour cela que, sur la base des risques
découlant de leur retraitement et d'une nouvelle autocertification, le décret exclut le
retraitement de tous les produits à usage unique de classe I. Concernant les produits sur
mesure, bien qu?ils soient fabriqués sur mesure et qu'aucun retraitement éventuel ne soit
prévu, ils sont repris dans la liste afin que toute possibilité de retraitement soit expressément
interdite.
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[104] La Suède a néanmoins étudié des classes de DMUU qui pourraient être retraitées, il s?agit
des DMUU utilisés dans les secteurs de la néphrologie (notamment la dialyse), la cardiologie,
l?orthopédie, la laparoscopie, l?endoscopie, l?urologie et la gynécologie, ainsi que
l?anesthésiologie92 .
Espagne Royaume Uni Suède
L?article 11 du décret 192/2023 du 21 mars
2023 fixe, dans son 2ème paragraphe la liste
des produits exclus, ne pouvant être ni
retraités ni utilisés. Il s?agit de ceux définis
par la règlementation européenne.
L?Espagne a ajouté deux DMUU à cette liste,
les DMUU sur-mesure et les DMUU de classe I
Il n?existe pas de liste
d?exclusion
Il s?agit de ceux définis
par la règlementation
européenne
Source : Mission à partir des données transmises par les CAS.
2.4 Organisation du retraitement
2.4.1 Espagne
[105] Le décret fixe, la liste des acteurs susceptibles d?effectuer des activités de retraitement,
sous réserve de certaines conditions, propres à chaque acteur. Il définit ainsi trois acteurs du
retraitement :
? les fabricants de produits retraités ;
? les hôpitaux ;
? les entreprises de retraitement externes, qui retraitent des DMUU à la demande d?un
hôpital.
[106] Pour conduire cette activité, les fabricants de produits retraités et les hôpitaux doivent
être titulaires d?une autorisation spécifique préalable, délivrée par l?AEMPS.
[107] L?Espagne précise également les conditions d?activité :
? les fabricants de produits retraités [titulaires d?une autorisation délivrée par l?AEMPS] ne
peuvent distribuer directement leurs produits retraités qu?à un hôpital. Ils ne peuvent
commercialiser en Espagne que les DMUU retraités pour lesquels ils ont réalisé eux-
mêmes l?ensemble du cycle de retraitement ;
? pour ce faire, un contrat écrit doit être signé entre le fabricant et l?hôpital, définissant
les responsabilités de chaque partie s?agissant des conditions d?utilisation et de stockage
des unités utilisées, des conditions de retour, de destruction, de surveillance et de
92 Förutsättningar för att reprocessa och återanvända medicintekniska engångsprodukter i Sverige
(socialstyrelsen.se).
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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traçabilité des produits. L?hôpital doit retourner le produit retraité, une fois utilisé, au
fabricant qui le lui a remis. Le fabricant doit s?assurer de la destruction du produit retraité
lors que celui-ci arrive au terme du cycle de retraitement ou au terme de sa vie utile ou
quand il ne peut plus assurer que le fonctionnement et la sécurité du produit retraité
sont conformes au produit d?origine ;
? toutefois, les hôpitaux peuvent effectuer cette destruction, si cela figure dans le contrat
avec le fabricant. Les fabricants de produits retraités doivent communiquer au Registre
de commercialisation toutes les informations définies dans le décret, créant ledit
registre. [titulaires d?une autorisation délivrée par l?AEMPS].
[108] En outre l?Espagne précise que ne peuvent être retraités que les DMUU qui ont été utilisés
et retraités dans leurs propres services ou par une entreprise de retraitement externe. Ils ne
peuvent pas vendre ou délivrer les produits retraités à des tiers. Les hôpitaux peuvent sous-
traiter l?activité de retraitement à une entreprise externe de retraitement. Un organisme notifié
certifiera que l?hôpital remplit les conditions fixées par le règlement UE d?exécution
2020/1207.Les audits annuels prévus par ce même règlement doivent être effectués par des
organismes accrédités et les hôpitaux doivent remplir les conditions fixées à l?article 23 du
règlement.
[109] De plus, l?Espagne impose que les entreprises externes de retraitement aient leur siège
social et un établissement en Espagne. Elles ne peuvent pas sous-traiter les activités de
retraitement. Elles doivent respecter les dispositions de l?article 17§3 du règlement UE 2017/745
et de son règlement d?exécution et doivent s?assurer que l?hôpital avec lequel elles traitent
remplit bien les conditions fixées par le décret. Enfin, « il n?est pas permis d?acheter et d?utiliser,
en Espagne, des DMUU qui auraient été envoyés vers un pays tiers pour y être retraités. »
2.4.2 Royaume Uni
[110] Selon l?avis du MHRA, le retraitement doit être assuré par des « re-fabricants »
indépendants extérieurs aux établissements de santé. Ils garantissent la mise à disposition des
bacs de recyclage, leur collecte, et le recyclage des DMUU (déchiquetage, fonte et
transformation en nouveaux produits).
[111] Les entreprises de retraitement ont la responsabilité de déterminer le nombre maximal
de cycles de retraitement auxquels le dispositif peut être soumis tout en conservant l'ensemble
des paramètres de fonctionnalité, de performance et de sécurité du dispositif, et en assurent
le suivi. Le re-fabricant accepte également toutes les responsabilités et obligations liées au
retraitement du DMUU, notamment les documents techniques, la décontamination, le
nettoyage, la stérilisation et charge biologique, l?étiquetage, la gestion des risques, et la
surveillance après la mise sur le marché.
[112] Les dispositifs retraités doivent être fournis aux établissements de santé dans le cadre de
contrats en circuit fermé, ce qui signifie qu?en aucun cas un établissement de santé ou un re-
fabricant ne doit vendre ou fournir un DMUU retraité à une tierce partie. De même, un
établissement de santé doit avoir des contrats avec différents re-fabricants pour différents
DMUU.
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RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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2.4.3 Suède
[113] Les établissements de santé, conjointement, le cas échéant, avec les entreprises de
retraitement externes, sont responsables de la sécurité et des performances du dispositif
retraité. Il convient donc que les établissements de santé et les entreprises de retraitement
externes disposent d?un système de gestion de la qualité garantissant le respect des exigences
applicables.
[114] Les exigences qui s?appliquent aux acteurs de la filière du retraitement sont en large
partie les mêmes que celles qui s?appliquent aux fabricants. Ainsi, le respect des spécifications
communes aux DMUU doit être certifié par un organisme notifié.
[115] Les établissements de santé et les entreprises de retraitement externes dont les activités
incluent des soins de santé doivent soumettre les informations sur leurs activités et les produits
ayant fait l?objet du retraitement à l?Inspection des soins (IVO) pour enregistrement. Depuis le
1er juillet 2023, IVO a créé un registre des DMUU ayant fait l?objet d?un retraitement93.
2.5 Filières de retraitement
[116] Les pays interrogés ne disposent pas de filière de retraitement. En ce qui concerne la
Suède, aucune filière n?a été précisée par le CAS, et la mission, n?en a pas eue connaissance.
Les seules filières connues sont localisées en Allemagne et sont au nombre de trois. Le Royaume
Uni retraite ses DMUU en Allemagne.
Espagne Royaume Uni Suède
Pas de filière de retraitement
des DMUU mais des entreprises
qui stérilisent pour le compte
d?établissement de santé
Pas de filière de retraitement
mais des entreprises qui
recyclent le PVC présents dans
les DMUU (canules nasales,
tubes à oxygène, masques
d'anesthésie et masques à
oxygène)
Peu d?informations sur les
acteurs privés présents sur le
marché du retraitement des
DMUU
Source : Mission à partir des données transmises par les CAS.
2.6 Traçabilité des DMUU
[117] Les réponses apportées par les pays interrogés apportent peu de renseignement sur la
traçabilité mise en place en interne à l?établissement de santé, c?est-à-dire la traçabilité
sanitaire dans le cadre de la matériovigilance (décret du 29 novembre 2006). Cette traçabilité
doit permettre de pouvoir identifier rapidement les patients pour lesquels les dispositifs
médicaux d'un lot ont été utilisés ou les lots de dispositifs médicaux utilisés chez un patient.
93 Nytt IVO-register för reprocessare | IVO.se
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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Or les réponses apportées portent sur la traçabilité mise en place par l?entreprise de
retraitement.
[118] Seule la Suède précise qu?un système permettant de retrouver le patient chez qui un
DMUU a été utilisé a été mis en place.
Espagne Royaume Uni Suède
Traçabilité du nombre de cycle
La traçabilité est organisée
conformément aux dispositions
du Règlement d?exécution
2020/1207. Les DMUU retraités
ne pouvant être utilisés que
dans des hôpitaux. L?AEMPS
indique qu?un texte
d?application du ministère de la
santé, à venir, apportera des
précisions
Traçabilité du nombre de cycle
Selon l?avis de la Medical Health
care Regulatory Agency, le
système de traçabilité est assuré
par les entreprises de
retraitement, grâce à des
contrats en circuit fermé.
L?existence d?un seul contrat
pour chaque DMUU permet une
mise en relation unique entre un
établissement de santé et une
entreprise de retraitement
Traçabilité sanitaire
En vue de garantir la sécurité et
les performances des DMUU
retraités, chaque établissement
de santé utilisant des DMUU qui
ont été retraités par
l?établissement de santé lui-
même ou par une entreprise de
retraitement externe à la
demande de cet établissement
de santé devrait mettre en place
un système lui permettant de
collecter des informations sur
les incidents survenant en
rapport avec ces dispositifs et
devrait notifier les incidents
graves à l?autorité compétente
Le fabricant et, le cas échéant,
l?entreprise de retraitement
externe doivent également être
informés des incidents graves
Source : Mission à partir des données transmises par les CAS.
2.7 Information des patients
[119] Seule l?Espagne a inscrit dans sa règlementation l?obligation d?information des patients.
Au Royaume-Uni et en Suède, cette information n?est pas prévue. Néanmoins, elle reste en
débat en Suède. C?est en effet un élément de réflexion éthique soulevé par l?industrie des
produits de santé, s?appuyant sur la loi sur les patients qui prévoit qu?ils doivent pouvoir être
informés des techniques de soins utilisées dans le cadre de leur prise de charge.
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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Espagne Royaume Uni Suède
L?article 15 du décret précise
que les hôpitaux doivent
informer leurs patients de
l?utilisation, dans leurs services,
de produits retraités par leur
propre centre hospitalie
L?AEMPS indique qu?un texte
d?application du ministère de la
santé, à venir, apportera des
précisions
L?avis de la Medical Health care
Regulatory Agency ne prévoit
pas l?information des patients
de l?utilisation d?un DMUU
retraité
Il n?existe à ce jour pas de
dispositions spécifiques sur le
droit des patients à être
informés qu?un DMUU retraité
est utilisé dans le cadre de leur
prise en charge
Source : Mission à partir des données transmises par les CAS.
3 Le retraitement des DMUU est aussi développé en
Amérique du Nord, particulièrement aux USA
3.1 États-Unis
[120] Avant les années 2000, le retraitement des DMUU était largement répandu mais sans
réglementation. C?est au cours de cette décennie que la « Food and Drug Administration »
(FDA) a commencé à travailler à l?encadrement de cette pratique, qui a pris forme par la
publication d?un avis favorable en 2008 de la FDA94. Cet avis précise qu?un DM peut être
étiqueté comme étant à usage unique parce que le fabricant estime qu?il ne peut pas être
utilisé plus d?une fois de manière sure et fiable ou parce que le fabricant choisit de ne pas
mener les études nécessaires pour démontrer que le DM peut être réutilisable.
[121] La FDA publie une liste de DMUU qui peuvent être réutilisés, et se fonde sur des études
menées par les fabricants portant notamment sur l?efficacité des méthodes de nettoyage, de
stérilisation et de performances. La stérilisation est l?élément discriminant du process, en effet,
tous les établissements de santé ne peuvent pas mettre en place les niveaux d?exigences décrits
par les industriels et se tournent vers un tiers sous-traitant.
[122] D?après les chiffres disponibles sur le site de l?AMDR (« Association of Medical Device
Reprocessor) », plus de 9 000 établissements de santé (hôpitaux et centres de chirurgie)
utiliseraient des DMUU retraités.
[123] La mission a échangé avec un acteur américain qui envisage de s?implanter sur le
territoire européen.
94 Government accountability office (GAO) ?Reprocessing Single-use Medical devices: FDA oversight has
increased, and available information does note indicate that use presents and elevated health risk?, 2008.
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RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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3.2 Canada
[124] Comme en Europe, trois provinces ont interdit le retraitement des DMUU dits
« critiques95 » mais d?autres ont autorisé ce retraitement sous réserve que les hôpitaux
recourent à une entreprise agréée qui devra répondre aux mêmes exigences que celles
imposées aux fabricants de DMUU neufs.
95 Un dispositif est dit « critique » s?il pénètre dans les tissus stériles de l?organisme notamment l?appareil
vasculaire et qui par conséquent nécessite un nettoyage suivi d?une stérilisation (INSPQ 201)
PUBLIÉ
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ANNEXE 4 : Leviers de réduction de
l?empreinte écologique des dispositifs
médicaux
1 LE RETRAITEMENT DES DM A USAGE UNIQUE EST LE LEVIER DE DECARBONATION MIS EN
EXERGUE PAR LA FEUILLE DE ROUTE « PLANIFICATION ECOLOGIQUE » DU MINISTERE DE
LA SANTE ................................................................................................................................................ 83
1.1 SI LES ETUDES FRANÇAISES SUR L?EMPREINTE ECOLOGIQUE DES DM SONT RARES, ILS REPRESENTERAIENT
20 % DES EMISSIONS CARBONE DU SYSTEME DE SANTE ...................................................................... 83
1.1.1 L?évaluation de l?empreinte écologique des DM repose sur plusieurs méthodes sans
encadrement par le ministère de la santé ....................................................................................... 83
1.1.2 L?empreinte écologique des DM s?explique surtout par le circuit de production de leurs intrants
qui incluent souvent des métaux rares ............................................................................................ 84
1.2 LE RETRAITEMENT DES DM PEUT CONTRIBUER A REDUIRE LEUR EMPREINTE ECOLOGIQUE MAIS N?EST PAS
LE LEVIER LE PLUS IMPACTANT ............................................................................................................. 88
1.2.1 La feuille de route recense plusieurs leviers de décarbonation des DM en accordant une
visibilité particulière à leur retraitement ......................................................................................... 88
1.2.2 La primauté accordée à ce levier est excessive au regard de son impact relatif sur l?empreinte
écologique et de ses modalités de mise en oeuvre......................................................................... 90
2 LA GOUVERNANCE ET LES MOYENS ALLOUES A LA PLANIFICATION ECOLOGIQUE DU
SYSTEME DE SANTE NE SONT PAS A LA HAUTEUR DE L?ENJEU DE DECARBONATION DES
DM ............................................................................................................................................................ 94
2.1 LA FAIBLESSE DU PILOTAGE NATIONAL DE CETTE STRATEGIE ENGENDRE UN RISQUE DE DECALAGE
CROISSANT AVEC LES INITIATIVES CONSTATEES A L?HOPITAL .............................................................. 94
2.1.1 L?Anap assume un rôle d?opérateur de la feuille de route mais son portage reste fragile au sein
de l?administration centrale et déconcentrée ................................................................................ 94
2.1.2 Or les initiatives se développent dans une partie des établissements de santé sans
accompagnement suffisant de la part de l?État .............................................................................. 95
2.2 LA MISE EN OEUVRE D?UNE STRATEGIE CREDIBLE DE REDUCTION DE L?EMPREINTE ECOLOGIQUE DES DM
EXIGE AUSSI UNE COLLABORATION INTERMINISTERIELLE RENFORCEE ................................................... 97
2.2.1 Dans une logique de subsidiarité, le soutien des administrations en charge de la transition
écologique à la décarbonation du système est modeste .............................................................. 97
2.2.2 La DGE assume un leadership fondé sur le double objectif de relocalisation des industries de
santé et de décarbonation................................................................................................................. 98
3 EN PARALLELE DE L?EXPERIMENTATION, LA MISE EN OEUVRE DES AUTRES LEVIERS DE
REDUCTION DE L?EMPREINTE ECOLOGIQUE DES DM EST INDISPENSABLE ET NECESSITE
UN APPUI NATIONAL RENFORCE .................................................................................................... 99
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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3.1 CONFORMEMENT AUX DISPOSITIONS INTERMINISTERIELLES, LES ACHATS HOSPITALIERS, QUI
CONSTITUENT UN LEVIER MAJEUR, DOIVENT CONTRIBUER DAVANTAGE A LA REDUCTION DE
L?EMPREINTE ECOLOGIQUE DES DM .................................................................................................... 99
3.1.1 En dépit d?obligations croissantes, le levier des achats reste encore sous-utilisé par les hôpitaux
pour diminuer leur empreinte environnementale .......................................................................... 99
3.1.2 À l?exemple du système de santé britannique, les achats hospitaliers devraient constituer le
principal levier de décarbonation des DM ..................................................................................... 102
3.2 LE RETRAITEMENT DES DM A USAGE UNIQUE, QUI SONT DEFINIS COMME TELS PAR LES SEULS
INDUSTRIELS, DOIT AUSSI S?ACCOMPAGNER DU DEVELOPPEMENT DES DM A USAGE MULTIPLE ........... 104
3.2.1 L?évolution de la part respective des DM à usage unique et des DM à usage multiple ne fait
l?objet d?aucun suivi au niveau national .......................................................................................... 104
3.2.2 Le développement de l?usage multiple est souvent conditionné dans les établissements de
santé à une organisation et des moyens adaptés .......................................................................... 106
3.3 LA FORMATION DES PERSONNELS HOSPITALIERS DOIT CONTRIBUER EN PARTICULIER A FAIRE CONVERGER
DAVANTAGE LES DEMARCHES DE PERTINENCE ET DE SOBRIETE DES SOINS ......................................... 108
3.3.1 Le développement de l?éco-responsabilité en matière de soins peut contribuer à renforcer
l?efficience du système de santé ...................................................................................................... 108
3.3.2 La sensibilisation des personnels hospitaliers aux enjeux liés à la transition écologique dépend
encore largement des directions d?établissement ........................................................................ 109
3.4 ENFIN, LE TRI ET LA REVALORISATION DES DECHETS ISSUS DES DM, QUI DEPENDENT AUJOURD?HUI
LARGEMENT DES DECISIONS LOCALES, DOIVENT FAIRE L?OBJET D?UNE STRATEGIE NATIONALE ........... 109
3.4.1 Les établissements de santé sont soumis à des obligations croissantes en matière de gestion
des déchets, en partie communes au secteur tertiaire ................................................................ 109
3.4.2 Les établissements de santé sont peu incités et accompagnés dans la réduction et la
valorisation des déchets, en particulier ceux issus des DM .......................................................... 110
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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1 Le retraitement des DM à usage unique est le levier de
décarbonation mis en exergue par la feuille de route
« planification écologique » du ministère de la santé
1.1 Si les études françaises sur l?empreinte écologique des DM sont rares,
ils représenteraient 20 % des émissions carbone du système de santé
1.1.1 L?évaluation de l?empreinte écologique des DM repose sur plusieurs
méthodes sans encadrement par le ministère de la santé
[125] L?empreinte écologique des dispositifs médicaux (DM) en France est difficile à
appréhender :
? cette donnée, qui est plus englobante que la seule empreinte carbone avec laquelle elle
tend à être confondue, est issu d?un calcul fondé sur la méthode de l?Analyse du cycle de
vie (ACV)96 permettant d?apprécier les différentes catégories d?impact sur l?environnement
(changement climatique, toxicité de eau, épuisement des ressources?) d?une activité ;
? l?ACV, comme le calcul de l?empreinte carbone, font partie de la vingtaine de méthodes
recensées en 2021 par l?Ademe pour apprécier les impacts environnementaux : si ces
méthodes font l?objet de différents standards nationaux ou internationaux, dont des
normes Iso, elles restent complexes à mobiliser et dépendantes de l?objectif recherché ;
? les acteurs du champ de la santé sont globalement peu familiers de ces méthodes dont la
mise en oeuvre tend à être externalisée auprès de prestataires ou de chercheurs, sans qu?ils
disposent toujours de la capacité à apprécier la robustesse des résultats obtenus ;
? concernant plus particulièrement les produits de santé, en particulier les DM, l?évaluation
de leur empreinte écologique suppose en outre d?obtenir des fabricants des informations
(ex : nature exacte des intrants, mode de fabrication, mode d?acheminement vers les lieux
d?assemblage, etc.) dont le recueil est complexifié par le caractère le plus souvent sous-
traité et internationalisé du circuit de production.
96 L?empreinte carbone traduit le volume des émissions directes et indirectes de gaz à effets de serre émises
sur un périmètre donné (une activité, un produit, un établissement, etc.). La capacité de chaque gaz à
renvoyer de l?énergie vers le sol est évalué comparativement au CO2. L?empreinte carbone s?exprime en
tonnes ou kilos d?équivalent CO2. L?empreinte écologique mesure plus globalement la pression qu?exerce
l?activité humaine sur les ressources et les écosystèmes. L?ACV recense et quantifie, tout au long de la vie
d?un produit, les flux physiques de matière et d?énergie associés aux activités humaines. Les résultats sont
ensuite traduits en une quinzaine de catégories d?impact (ex : changement climatique, destruction de la
couche d?ozone, toxicité humaine, acidification, écotoxicité, épuisement de la ressource, etc.). Voir ADEME,
O. RETHORE, C. HUGREL et M. PALLUAU, Bleu Safran, G. AUDARD et P. OSSET, Solinnen. 2020. Guide d?aide
à la sélection des méthodes d?évaluation environnementale.
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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[126] Si la complexité des méthodes d?évaluation de l?empreinte écologique d?un DM est un
facteur à prendre en compte dans l?appréciation de l?intérêt du retraitement des DM à usage
unique, elle doit dans son ensemble être relativisée :
? quand il s?agit de comparer l?empreinte écologique de deux produits très similaires (un DM
à usage unique et un DM à usage multiple) , voire identiques (un DM à usage unique neuf et
un DM à usage unique retraité), elle impose une attention particulière sur les choix
méthodologiques effectués et le périmètre des données recueillies qui conditionnent la
robustesse des résultats ;
? en revanche, sur un plan plus macro, par exemple quand il s?agit d?apprécier l?empreinte
écologique des achats de produits de santé d?un établissement, ces biais méthodologiques
sont moins susceptibles de fausser les ordres de grandeur obtenus, qui permettent
d?identifier les principaux postes et étapes de production responsables en particulier des
émissions de carbone.
1.1.2 L?empreinte écologique des DM s?explique surtout par le circuit de
production de leurs intrants qui incluent souvent des métaux rares
[127] La mission a recensé un nombre limité d?études françaises sur l?empreinte écologique des
DM :
? il s?agit pour la plupart de travaux réalisés par des professionnels de santé, en particulier
pharmaciens, travaillant, souvent dans le cadre d?une thèse, en établissement de santé ;
? elles portent sur un périmètre encore étroit de dispositifs médicaux (lames laryngologiques,
dispositifs médicaux utilisés dans le cadre de l?accouchement par voie basse, ancillaires) ;
? elles mobilisent des méthodes assimilables à l?ACV, généralement réalisées en partie par des
prestataires, sans que la mission soit en mesure d?apprécier leur robustesse ;
? elles sont diffusées en ligne mais ne font pas l?objet d?une publication dans une revue
scientifique à comité de lecture ;
? aucune ne porte sur la comparaison entre l?empreinte environnementale d?un DM à usage
unique retraité par rapport à ce même DM à usage unique neuf.
[128] Si la mission n?a pas mené à proprement parler une revue de littérature sur l?empreinte
écologique des DM, elle a néanmoins recensé des études étrangères pertinentes :
? sept études, dont cinq sont publiées dans une revue à comité de lecture, portent
spécifiquement sur le retraitement des cathéters d?électrophysiologie (cf. infra) ;
? au-delà du sujet spécifique du retraitement, la plateforme HealthcareLCA permet d?accéder
à des publications sur l?empreinte environnementale de produits de santé ou d?actes de
soins (cf. exemple infra), classées à partir de différents critères (méthode utilisée, impact
environnemental analysé, postes d?émission pris en compte, etc.).
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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Graphique 1 : Vue des publications sur l?empreinte environnementale de dispositifs
médicaux utilisés en urologie sur la plateforme HealthcareLCA
Source : Mission, recherche effectuée le 21 novembre 2023
[129] Les émissions de carbone des DM, estimées par le Shift Project97 à environ 10 tonnes de CO2
équivalent98, soit de l?ordre de 20 % du total des émissions du système de santé français99, sont
du point de vue des établissements de santé des émissions indirectes attribuables à leur circuit
de fabrication. En d?autres termes, les établissements de santé n?ont pas de leviers directs sur ces
émissions qui résultent des choix effectués par les fabricants sur les matières premières utilisées,
les lieux ainsi que les modes de fabrication (en particulier la source l?énergie utilisée). Comme le
montre le schéma 1 ci-dessous relatif à la composition d?un cathéter d?électrophysiologie, il est
possible, à partir des informations fournies par les fabricants, de décomposer l?empreinte carbone
d?un dispositif médical par composant (en l?espèce, l?empreinte carbone de ce DM s?explique
surtout par le recours, quoiqu? en très faible quantité, à des métaux précieux). Par ailleurs, le
97 The Shift Project se définit sur son site Internet comme « un think tank qui oeuvre en faveur d?une économie
libérée de la contrainte carbone ». L?association, créée en 2010, est présidée par Jean-Marc Jancovici. Elle
produit des études sur le lien entre économie et énergie.
98 Les données utilisées correspondent à l?année 2019 et sont celles du Snitem (le chiffre d?affaires des DM
consommés en France était selon le Snitem de 32,4 Md¤ hors taxes). Le chiffre d?affaires des DM importés a
ensuite isolé sur la base de données issues du Centre du commerce international. L?association a distingué
les montants des ventes des laboratoires produisant des DM en France. Ces dépenses ont ensuite été
converties en kgCO2e en appliquant le facteur d?émission défini par l?Ademe. Ce facteur d?émission permet
de convertir une donnée d?activité physique en une quantité d?émissions de gaz à effet de serre (GES).
L?ensemble des GES estimés sont rapportés à une unité commune, le CO2, d?où l?expression « équivalent »
CO2).
99 « Décarboner la santé pour soigner durablement », rapport final V2, avril 2023 (actualisation de la version
publiée en 2021). L?étude estime à 49 M de tonnes de CO2 équivalent l?empreinte carbone du secteur de la
santé. En raison de la marge d?incertitude inhérente à la méthode retenue, la part des émissions du secteur
de la santé représenterait entre 6,6 % et 10 % de l?empreinte carbone de la France.
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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schéma 2 illustre le caractère très internationalisé de la chaîne d?approvisionnement d?un
cathéter d?électrophysiologie dont l?assemblage est réalisé en Amérique du Sud à partir d?intrants
provenant en particulier de Chine (semi-conducteurs) et d?Afrique du Sud (platine), tandis qu?il
est stérilisé en Californie avant d?être acheté par un CHU français. Enfin, le tableau 1, issu d?une
analyse de cycle de vie d?un cathéter réalisée par des chercheurs britanniques, montre que plus
de la moitié des émissions de carbone sont liées au processus de production, en particulier les
matières premières utilisées.
Schéma 6 : Composition d?un cathéter d?électrophysiologie (à gauche, le poids
respectif des principaux composants, à droite leur empreinte carbone)100
Source : Josselin Duchateau, institut de rythmologie et de modélisation cardiaque de Bordeaux. La
masse du cathéter est constitué majoritairement de papier et de thermoplastique. En revanche, son
empreinte carbone est majoritairement liée à la présence en très faible volume de métaux précieux
(or, platine, iridium).
100 Dans le graphique de gauche, les termes « thermoset » et « thermoplastic » désignent deux catégories
différentes de plastiques constitués à partir de polymère. Traduction des termes du graphique de droite :
Gold : or ; PT/IR : platine ou iridium ; paper : papier ; HDPE : polyéthylène de haute densité ; ABS : acrylonitrile
butadiène styrène.
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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Schéma 7 : Représentation de la provenance des intrants participant à la fabrication
d?un cathéter d?électrophysiologie101
Source : Josselin Duchateau, institut de rythmologie et de modélisation cardiaque de Bordeaux. Ce
schéma permet de distinguer différentes étapes de production (soit la chaîne d?approvisionnement,
« supply chain » en anglais : recherche et développement aux États-Unis, assemblage en Amérique
du Sud, semi-conducteurs produits en Chine) et l?origine des différents intrants (pétrole américain,
platine sud-africain, charbon australien, plastique chinois). Les informations ont été fournies par le
fabricant (Biosense Webster). Le circuit est simplifié car il ne fait pas apparaître l?étape de
stérilisation des cathéters à l?oxyde d?éthylène, qui se fait généralement en Californie.
101 R&D : recherche et développement ; oil : combustibles fossiles ; HQ (headquarters) : siege de la société ;
ASM : assemblage ; SM : semi-conducteurs ; coal : charbon ; Pt : platine.
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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Tableau 17 : Répartition des émissions de carbone d?un cathéter d?électrophysiologie
par principal intrant et étape de fabrication102
Source : Meister, J.A.; Sharp, J.Wang, Y.; Nguyen, K.A. Assessing Long-Term Medical Remanufacturing
Emissions with Life Cycle Analysis. Processes 2023, 11, 36. https://doi.org/10.3390/pr110100. La phase
de production du cathéter est responsable de près de 59 % des émissions de CO2e contre moins de
3 % pour la phase de transport. Concernant les matériaux utilisés, le polysulfone (catégorie de
thermoplastique) est le principal émetteur de CO2e. Nota bene : l?empreinte carbone des métaux
précieux n?est pas prise en compte dans le périmètre de cette étude.
1.2 Le retraitement des DM peut contribuer à réduire leur empreinte
écologique mais n?est pas le levier le plus impactant
1.2.1 La feuille de route recense plusieurs leviers de décarbonation des DM en
accordant une visibilité particulière à leur retraitement
[130] La feuille de route « planification écologique du système de santé », publiée en mai 2023
dans le cadre de la démarche interministérielle « France nation verte »103, cible les DM en
particulier à travers l?un de ses sept domaines d?actions, les soins écoresponsables. Initiée par le
102 Le terme anglais « lorry » désigne un camion de transport. Les termes « container ship » désignent un porte-
conteneurs.
103 Lancé en octobre 2022 par la Première ministre, « France nation verte » est le plan d?actions recensant
toutes les actions engagées pour répondre aux objectifs de baisser suffisamment les émissions de gaz à effet
de serre, adapter le pays au changement climatique, restaurer la biodiversité et réduire l?exploitation des
ressources naturelles à un rythme soutenable.
PUBLIÉ
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cabinet de la ministre en charge de l?organisation territoriale et des professions de santé, elle
traduit la volonté de participer à la baisse de 5 % par an des émissions de gaz à effets de serre
jusqu?en 2050. Elle s?appuie pour partie sur des actions qui avaient déjà été engagées, en
particulier dans le cadre du Ségur de la santé104 et du programme « développement durable » de
l?Anap. Concernant les DM, elle cite plusieurs leviers d?actions, dont le retraitement des DM à
usage unique mais également :
? la revalorisation des déchets issus des DM et la mise en place d?une filière de valorisation
des métaux précieux ;
? la construction, en lien avec la Direction générale des entreprises (DGE), d?un référentiel
pour mesurer le bilan carbone dans l?acte d?achats ;
? l?étude, en lien avec l?Assurance maladie, de la mise en place d?un « scoring carbone ».
[131] La visibilité particulière accordée au retraitement des DM à usage unique (DMUU) peut
s?expliquer par la pression exercée en faveur de ce levier par des acteurs issus du monde
hospitalier. Alors que le retraitement des DMUU est interdit en France depuis les années 80105, la
création en avril 2017 au niveau européen d?un cadre juridique106 autorisant sous conditions cette
pratique a pu laisser penser à ces acteurs qu?un revirement serait opéré au niveau national107. Or,
alors même que la crise sanitaire avait souligné l?intérêt, dans un contexte de tensions
d?approvisionnement108, de développer l?usage multiple de certains DM, le Gouvernement
français a choisi en avril 2022109 de rappeler, au niveau législatif, l?interdiction de retraiter les
DMUU. Cette interdiction n?a fait l?objet ni d?une évaluation ni d?une concertation préalables. Les
acteurs rencontrés par la mission ont fait part de leur incompréhension quant à cette décision
104 La mesure 14 du Ségur de la Santé prévoyait le financement jusqu?en 2025 à hauteur de 10 M¤ de 151
postes de Conseillers en transition écologique et énergétique en santé (CTEES) en charge de réaliser des
diagnostics et des plans d?actions pour réduire la consommation énergétique des bâtiments. Ce réseau est
animé par l?Anap.
105 Circulaire DGS n°669 du 14 avril 1986 relative à l?interdiction de restériliser le matériel médico-chirurgical
non réutilisable dit « à usage unique » et circulaire DGS/DH n°51 du 29 décembre 1994 relative à l?utilisation
des dispositifs médicaux stériles à usage unique dans les établissements de santé publics et privés.
106 Article 17 du Règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 relatif aux
dispositifs médicaux.
107 Trois courriers signés par les fédérations hospitalières et le Club des acheteurs en produits de santé (Claps)
ont été adressés entre juin 2018 et janvier 2022 au ministère de la santé en faveur d?une autorisation, au
moins à titre expérimental, du retraitement des DMUU. Une tribune a également été publiée le 7 décembre
2022 dans « Le Monde » par un collectif de professionnels de santé et de représentants de sociétés savantes
en faveur du retraitement des DMUU (« Face aux pénuries de dispositifs médicaux, le retraitement est une
nécessité pour continuer de soigner nos patients »).
108 Voir l?avis du 17 avril 2020 de l?Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé
(ANSM). Sollicitée par des établissements de santé confronté à tensions d?approvisionnement sur les lames
de laryngoscopes à usage unique, l?ANSM a défini une procédure sécurisée afin de permettre la réutilisation
de ces DMUU.
109 L?article 10 de l?ordonnance n°2022-582 du 20 avril 2022, codifié à l?article L. 5211-3-2 du code de la santé
publique, dispose que « le retraitement de dispositifs à usage unique mentionné à l?article 17 du règlement (UE)
2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017, leur mise sur le marché et leur utilisation sont
interdits ».
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perçue comme incohérente avec au moins deux enjeux, celui de l?empreinte écologique des DM
mais également celui de la réduction des tensions d?approvisionnement.
[132] Pour autant, l?inscription en LFSS 2024 d?une expérimentation relative au retraitement des
DMUU ne repose sur aucune évaluation préalable de son intérêt écologique ou économique110.
L?étude d?impact cite certes des études étrangères mettant en avant les économies financières et
la moindre empreinte écologique associées au retraitement de cathéters d?électrophysiologie.
Néanmoins, la question de la transposabilité de ces résultats, très dépendants des DM et du
processus de retraitement retenus, à l?expérimentation française n?est pas soulevée. Par ailleurs,
le choix d?expérimenter pendant deux ans dans quatre établissements de santé un tel
retraitement, plutôt que de le généraliser d?emblée, est justifié par la nécessité de mettre en
oeuvre un dispositif de traçabilité spécifique, sans que son opportunité sur un plan sanitaire soit
précisée.
1.2.2 La primauté accordée à ce levier est excessive au regard de son impact
relatif sur l?empreinte écologique et de ses modalités de mise en oeuvre
[133] La mission a recensé six études111 qui tendent à démontrer l?intérêt écologique du
retraitement des DMUU mais elles doivent être abordées avec précaution :
? les conclusions de ces études s?appliquent à un DMUU donné (en l?espèce, des cathéters
d?électrophysiologie) pour un processus de retraitement donné ;
? leurs résultats sont sensibles à différents paramètres, en particulier le coût et l?empreinte
écologique du DMUU neuf (qui dépendent donc, comme vu supra, de leur processus de
production), les ressources (eau et oxyde d?éthylène notamment) utilisées dans le cadre du
retraitement et le nombre maximal de cycles de retraitement applicables au DMUU ;
? la mission ne dispose pas des compétences pour analyser les éventuels biais
méthodologiques qui mettraient en cause la robustesse de leurs conclusions : à titre
d?exemple, une étude publiée en février 2023 dans la revue « Sustainability »112 met en cause
l?intérêt écologique du retraitement des cathéters d?électrophysiologie ; or, selon plusieurs
110 Voir article 29-1 de la LFSS pour 2024.
111 Bruno de Sousa Martins, João Queiroz e Melo, João Logarinho Monteiro, Graça Rente d Pedro Teixeira
Bastos, ?Reprocessing of Single-Use Medical Devices: Clinical and Financial Results?, Escola de Saúde do
Porto, Associação de Politécnicos do Norte, février 2019; Schulte, A.; Maga, D. Thonemann, N. ?Combining
Life Cycle Assessment and Circularity Assessment to Analyze Environmental Impacts of the Medical
Remanufacturing of Electrophysiology Catheters?. Sustainability 2021, 13, 898
https://doi.org/10.3390/su13020898 ; Geoffroy Ditac et. alii. ?Carbon footprint of atrial fibrillation catheter
ablation?, European Society of Cardiology, septembre 2022; Source : Meister, J.A.; Sharp, J.Wang, Y.;
Nguyen, K.A. Assessing Long-Term Medical Remanufacturing Emissions with Life Cycle Analysis. Processes
2023, 11, 36. https://doi.org/10.3390/pr110100 ; Amanda Andersen, « A case study of the environmental and
economic sustainability of using remanufactured ultrasound catheters?, université d?Aalborg (Danemark),
juin 2022 ; Anthesis (étude commandée par Stryker), ?Comparative Carbon Footprint of Reprocessed Single
Use Medical Devices?, février 2023.
112 Lalman, C.; Karunathilake, H.; Ruparathna, R. ?To Dispose or to Reuse? Analyzing the Life Cycle Impacts
and Costs of Disposal, Sterilization, and Reuse of Electrophysiological Catheters?.Sustainability 2023, 15,
5363. https://doi.org/10.3390/su15065363.
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experts de l?ACV rencontrés par la mission, ses calculs seraient faussés en particulier par une
sous-évaluation du nombre maximal de cathéters pouvant être stérilisés simultanément ;
? la mission n?est pas non plus en mesure d?apprécier les éventuels conflits d?intérêt des
auteurs de ces études qui reposent largement sur des données fournies par les deux
entreprises (Vanguard en Allemagne et Stryker aux Etats-Unis) intervenant sur ce marché
oligopolistique.
[134] Cela étant, les résultats de ces études, à une exception près, sont relativement
convergents : le retraitement des cathéters d?électrophysiologie à usage unique permettrait de
réduire leur empreinte carbone de l?ordre de 50 à 60 % sur leur cycle de vie. C?est en particulier
la conclusion d?une étude menée par des chercheurs de l?université de Brighton en Grande-
Bretagne. Comme le montre le tableau ci-dessous qui compare les émissions de gaz à effet de
serre d?un cathéter neuf par rapport à un cathéter retraité, la réduction de 60 % ici constatée
s?explique essentiellement par le fait que le retraitement (« remanufacturing » en anglais) est
nettement moins émetteur que la production du DMUU neuf, même si on y ajouté les émissions
liées au processus de stérilisation (25 % de l?empreinte carbone du DM retraité vs moins de 10 %
pour le DM neuf). Une autre étude113, allemande cette fois et financée par l?entreprise de
retraitement Vanguard, a également démontré que le retraitement des cathéters
d?électrophysiologie réduisait de 20 % la consommation des ressources abiotiques114 par rapport
à un cathéter neuf, ce qui traduirait une empreinte environnementale (et non uniquement
carbone) positive.
113 Schulte, A.; Maga, D. Thonemann, N. ?Combining Life Cycle Assessment and Circularity Assessment to
Analyze Environmental Impacts of the Medical Remanufacturing of Electrophysiology Catheters?.
Sustainability 2021, 13, 898 https://doi.org/10.3390/su13020898.
114 Les ressources abiotiques sont les ressources naturelles non vivantes, telles que le sol, l?eau, les minerais,
avant transformation éventuelle par l?homme. Il s?agit de ressources épuisables.
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Tableau 18 : Comparaison des émissions de gaz à effet de serre (en kg CO2e) par
intrant et étape de fabrication pour les cathéters neufs (a) et les cathéters retraités
(b)115
Source : Meister, J.A.; Sharp, J.Wang, Y.; Nguyen, K.A. Assessing Long-Term Medical Remanufacturing
Emissions with Life Cycle Analysis. Processes 2023, 11, 36. https://doi.org/10.3390/pr110100.
[135] Pour autant, il est essentiel de remettre en perspective l?intérêt écologique du retraitement
des DMUU avec les autres leviers de décarbonation des DMUU. Sans que la mission ait procédé à
une revue de littérature exhaustive, qui dépassait le périmètre de la commande, elle a identifié
plusieurs travaux hiérarchisant l?impact respectif des différents leviers de décarbonation des DM.
C?est l?objet du schéma ci-dessous qui classe les leviers de décarbonation en fonction de leur
impact environnemental. De façon générale, les études tendent à montrer que, plus tard on
intervient dans le cycle de vie du produit, plus le « gain » environnemental est limité. Ainsi, les
leviers agissant directement sur la composition (par exemple, la réduction du volume d?intrants
ou « material reduction » dans le schéma ci-dessous) et le mode de production d?un DM (par
exemple, le mix énergétique utilisé qui renvoie aussi au lieu de fabrication) ont plus d?impact que
ceux mobilisés en aval de la consommation du DM. C?est aussi le sens du schéma ci-dessous issu
de la stratégie de transition écologique du National Health System (NHS) britannique. Les
réductions attendues des émissions de carbone y sont classées par levier. Les volumes associés
aux leviers réduction des plastiques à usage unique et retraitement (flèches jaunes) sont
nettement inférieurs à ceux liés à la conditionnalité écologique imposée dans le cadre des achats
hospitaliers aux fournisseurs (flèches rouges).
115 Remanufacturing : retraitement (le terme « reprocessing » est aussi utilisé en anglais pour désigner le
retraitement). Packaging : emballage.
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Schéma 8 : Leviers de réduction de l?empreinte écologique des DM classés en
fonction de leur impact116
Source : Amanda Andersen, « A case study of the environmental and economic sustainability of
using remanufactured ultrasound catheters?, université d?Aalborg (Danemark), juin 2022.
Graphique 2 : Extrait du plan de décarbonation du NHS
Source : NHS England, ?Delivering a ?net zero? National Health Service?, juillet 2022.
116 Reuse : réutilisation ; energy recovery : récupération d?énergie.
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2 La gouvernance et les moyens alloués à la planification
écologique du système de santé ne sont pas à la hauteur de
l?enjeu de décarbonation des DM
2.1 La faiblesse du pilotage national de cette stratégie engendre un risque
de décalage croissant avec les initiatives constatées à l?hôpital
2.1.1 L?Anap assume un rôle d?opérateur de la feuille de route mais son portage
reste fragile au sein de l?administration centrale et déconcentrée
[136] La crédibilité de la stratégie française de décarbonation des DM, comme de l?ensemble du
système de santé, est mise en cause par la faiblesse des moyens et de la gouvernance associés
aujourd?hui à cet enjeu. Il n?appartenait pas à proprement parler à la mission d?instruire ce sujet.
Toutefois, au regard de la saisine qui lui a été adressée, qui vise à réduire l?empreinte écologique
des DM, elle estime, sans avoir pleinement instruit ce sujet, que les modalités actuelles de pilotage
de la feuille de route « transition écologique » du ministère de la santé engendrent un risque de
« greenwashing » (ou éco-blanchiment). À titre de comparaison, selon une représentante du
programme « Greener NHS » rencontrée par la mission, environ 80 personnes travaillent au
service de la transition écologique du système de santé en Grande-Bretagne, dont une trentaine
uniquement sur les marchés hospitaliers durables. En France, le pilotage de la stratégie de
transition écologique en santé repose essentiellement aujourd?hui sur le conseiller en charge des
territoires, des élus et de la santé environnementale au cabinet de la ministre déléguée en charge
de l?organisation territoriale et des professions de santé :
? alors que la plupart des leviers concernent au moins deux directions du ministère, seule une
personne, positionnée au cabinet de la DGOS, consacré la moitié de son temps de travail à
la feuille de route ;
? l?Anap a indiqué à la mission mobiliser 5 ETP au sujet du développement durable, qui
assurent en particulier un rôle de suivi global des actions et de pilotage en propre de
plusieurs chantiers ;
? un haut-fonctionnaire en charge du développement durable (et de l?égalité entre les
femmes et les hommes) est responsable au secrétariat général des ministères sociaux du
seul volet interne de la transition écologique (services publics écoresponsables en
particulier) et participe à la comitologie de la feuille de route :
? la Caisse nationale d?assurance maladie a créé en novembre 2023 une Mission nationale
pour la Transition écologique du système de santé et la santé environnementale, centrée
sur la décarbonation des médicaments, et composée d?un ETP117 ;
117 Dans son rapport « charges et produits » pour 2024, la Cnam propose en particulier d?aller vers une prise
en compte de l?empreinte carbone des produits de santé dans leur tarification en lien avec le Comité
économique des produits de santé (CEPS). Un deuxième ETP au sein de cette mission se consacré au volet
interne de la transition écologique au sein du réseau de la Cnam.
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? enfin, selon l?Anap, si une minorité des ARS, comme l?Île-de-France, ont identifié des
personnes en charge de la transition écologique, le rôle des ARS, dont deux participent au
comité de pilotage de la feuille de route, reste dans ce domaine très limité.
2.1.2 Or les initiatives se développent dans une partie des établissements de
santé sans accompagnement suffisant de la part de l?État
[137] L?engagement des établissements de santé dans la transition écologique, en particulier la
décarbonation des produits de santé utilisés, est encadré par des obligations dont la mise en
oeuvre est difficile à apprécier :
? la DGOS estimé à environ 10 % la part des établissements de santé ayant satisfait à ce jour
l?obligation, créée en 2010 et élargie en 2022 au « scope » 3, qui inclut en particulier les
émissions indirectes liées aux achats de produits de santé, de réaliser un bilan des gaz à
effets de serre118 ;
? alors que les établissements de santé sont soumis, comme les autres pouvoirs adjudicateurs,
au Plan national pour des achats durables (PNAD) et que 100 % des marchés publics devront
contenir une clause environnementale à horizon 2026, moins de 10 % des marchés
hospitaliers incluaient en 2022 une telle clause (cf. infra) ;
? depuis 2021, le projet d?établissement les établissements de santé doit comprendre un volet
éco-responsable qui définit des objectifs et une trajectoire afin de réduire le bilan carbone
de l'établissement119 mais moins de la moitié de ceux interrogés par l?Anap120déclaraient
avoir nommé en 2022 un référent sur ce sujet ;
? enfin, les risques environnementaux font partie des critères de certification des
établissements par la Haute autorité de santé (HAS) depuis la V2020121 mais, selon les
interlocuteurs rencontrés par la mission, le défaut de compétences dans ce domaine des
experts en charge de l?évaluation limite la portée de ce critère122.
118 Comme les toutes les personnes morales de droit public de plus de 250 agents (et les personnes morales
de droit privé de plus de 500 salariés), les établissements de santé doivent depuis 2010 réaliser tous les trois
ans (tous les quatre ans dans le privé) un bilan de leurs émissions de GES incluant depuis 2022 le « scope » 3,
c?est-à-dire les émissions indirectes liées en particulier aux achats de produits de santé. Ils doivent également
joindre à ce bilan un plan de transition pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre présentant les
objectifs, moyens et actions envisagés à cette fin et, le cas échéant, les actions mises en oeuvre lors du
précédent bilan.
119 Article L 6143-2 du code la santé publique modifié par l?ordonnance n°2021-1470 du 10 novembre 2021.
120 Rapport national consolidé de la campagne 2022 « Mon observatoire du développement durable », auto-
diagnostic renseigné depuis 2016 par les établissements de santé, sociaux et médico-sociaux volontaires
(2 656 répondants en 2022).
121 Voir critère 3.6.04 « les risques environnementaux et enjeux du développement durable sont maîtrisés »
122 Par ailleurs, la HAS a publié le 28 novembre 2023 une feuille de route santé-environnement dans laquelle
elle s?engage à (i) consolider les critères environnementaux dans l?évaluation des technologies de santé et
développer leur bon usage pour limiter leur impact environnemental (ii) élaborer des recommandations de
bonnes pratiques en encourageant une meilleure prise en compte des enjeux environnementaux (iii)
renforcer les critères liés à la santé-environnement dans la mesure de la qualité des soins et des
accompagnements.
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[138] En pratique, les initiatives recensées par la mission en matière de décarbonation des
produits de santé reposent largement sur la volonté d?un nombre restreints de soignants
mobilisés à titre personnel, avec l?appui de la direction générale de leur établissement. Les
représentants de CHU rencontrés par la mission ont indiqué n?avoir jamais évoqué l?objectif de
réduction de leur empreinte écologique avec leur tutelle en ARS, les CPOM conclus avec ces
dernières ne contenant aucun indicateur sur cet enjeu. L?engagement de certains établissements
de santé, dont la mission n?a pas objectivé le nombre, dans la transition écologique est donc
exclusivement endogène. La remontée de bonnes pratiques organisée par la DGOS dans le cadre
du groupe de travail sur les soins éco-responsables montre la sur-représentation de quelques CHU
(en particulier, Bordeaux, Clermont-Ferrand, Nîmes, Strasbourg). Les échanges de la mission avec
les représentants de ces CHU a mis en exergue des facteurs susceptible d?expliquer un
engagement particulier dans la transition écologique :
? la présence de professionnels de santé mobilisés à titre personnel sur cette question (par
exemple, ayant fait le choix de se former aux enjeux de la transition écologique en santé) et
engagés dans des collectifs nationaux regroupant des professionnels issus de différentes
disciplines, comme le Collectif EcoResponsabilité en Santé (Ceres)123 ou le Comité pour le
développement durable en santé (C2DS)124 ;
? la conviction partagée, parmi ces professionnels, que le système de santé a une
responsabilité particulière en matière de transition écologique en raison (i) du principe
hippocratique « primum non nocere »125 qui doit susciter selon eux une réflexion sur le
rapport entre l?impact environnemental de l?acte de soins rapporté à son bénéfice pour les
patients (ii) de l?afflux prévisible à l?hôpital dans les prochaines années de patients dont les
pathologies seront directement liées au réchauffement climatique126 ;
? la capacité à mobiliser des moyens (appels à projet DGOS127 ou DITP, fonds issus de
l?Association nationale pour la formation permanente du personnel hospitalier) pour
financer les expertises (en particulier, les analyses de cycle de vie de produits) réalisées par
des prestataires spécialisés (en nombre très restreint sur le marché128) ;
123 Créé en 2022, le Ceres se définit comme « un collectif interdisciplinaire, interprofessionnel et en lien direct
avec des patients fortement impliqués dans les thématiques santé et environnement ».
124 Créé il y a une quinzaine d?années, le C2DS se définit comme « une association à but non lucratif qui fédère
des établissements sanitaires et médico-sociaux engagés dans une démarche de développement durable ». Le
réseau revendique 860 structures adhérentes.
125 En premier, ne pas nuire.
126 Selon l?Organisation mondiale de la santé (OMS), entre 2030 et 2050, le changement climatique pourrait
entraîner au niveau mondial près de 250?000 décès supplémentaires par an, dus uniquement à la dénutrition,
au paludisme, à la diarrhée et au stress lié à la chaleur. Principaux repères sur le changement climatique et la
santé (who.int)
127 La mission a recensé un seul appel à projets lancé par la DGOS en lien avec le sujet de la transition
écologique. Lancé en mai 2023 dans le cadre du programme de performance hospitalière pour des achats
responsables (Phare), il vise à réduire les déchets alimentaires et les plastiques à usage unique à l?hôpital. Six
Groupements hospitaliers de territoire (GHT) ont été retenus dans le cadre d?une expérimentation dont la
durée annoncée est d?un an.
128 L?agence « Primum non nocere » est le prestataire le plus souvent cité par les interlocuteurs rencontrés
par la mission.
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https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/climate-change-and-health
https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/climate-change-and-health
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? un alignement entre les professionnels des fonctions supports et du soins (pharmaciens,
médecins, paramédicaux) partageant la volonté de participer à un projet commun de
décarbonation, le cas échéant dans le cadre de l?obtention d?un label environnemental (par
exemple, le label TQSE129 dont l?obtention par la maternité de Clermont-Ferrand s?est
accompagnée d?un travail de réduction du recours aux DM à usage unique durant
l?accouchement).
[139] La faiblesse de l?accompagnement proposé aux établissements de santé par l?État, au
niveau national comme déconcentré, ne favorise ni la hiérarchisation des leviers permettant de
réduire l?empreinte écologique des DM, ni un passage à l?échelle des leviers les plus pertinents. La
DGOS et l?Anap ont certes engagé récemment un chantier de partage de bonnes pratiques en
matière de transition écologique sur la base des remontées effectuées par les établissements de
santé mais (i) cette mise en visibilité ne s?appuie sur aucune appréciation de la pertinence ou de
l?impact des pratiques (ii) ces bonnes pratiques ne font l?objet à ce stade d?aucun regroupement
par nature de levier et ne s?accompagnent pas d?un vademecum qui permettrait aux
établissements intéressés d?apprécier leur transposabilité. Selon les témoignages de
professionnels de santé recueillis par la mission, l?essaimage des bonnes pratiques en matière de
transition écologique a surtout reposé jusqu?ici sur les démarches menées par les fédérations
hospitalières (FHF en particulier), sur les liens de connaissance entre professionnels, en particulier
ceux qui adhèrent aux collectifs évoqués supra130 et sur le recours aux mêmes prestataires.
2.2 La mise en oeuvre d?une stratégie crédible de réduction de l?empreinte
écologique des DM exige aussi une collaboration interministérielle
renforcée
2.2.1 Dans une logique de subsidiarité, le soutien des administrations en charge
de la transition écologique à la décarbonation du système est modeste
[140] Si la feuille de route « planification écologique du système de santé » s?inscrit dans une
logique interministérielle, son élaboration et sa mise en oeuvre ont bénéficié d?une expertise
limitée de la part des administrations en charge de la transition écologique :
? selon les interlocuteurs rencontrés par la mission, l?Ademe, quoique sollicitée à plusieurs
reprises, n?a pas pris part à la « task force » interministérielle mise en place dans le cadre de
la feuille de route, ni participé au premier comité de pilotage, présidée par la ministre, qui
s?est tenu le 22 mai 2023 ;
? le Commissariat général au développement durable (CGDD) ainsi que le Secrétariat général
à la planification écologique (SGPE) participent aux travaux mais, en vertu d?un principe de
subsidiarité, leurs représentants ont indiqué à la mission ne pas s?être positionné sur la
129 Label Très haute qualité sociale et environnementale attribué par un organisme de certification.
130 À titre d?illustration, le CHU de Bordeaux a élaboré un « guide des unités durables » qui recense des bonnes
pratiques en matière de transition écologique sur la base desquelles des unités sont labellisées. Ce guide a
été adressé aux autres établissements de santé (de l?ordre de 200 selon la direction du CHU) qui en ont eu
connaissance et fait la demande.
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RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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pertinence des leviers choisis : en revanche, dans le cadre du « temps II » de la planification
écologique qui s?ouvre en 2024, le SGPE souhaite investir davantage certaines filières, dont
la santé ;
? un projet de convention interministérielle, incluant en particulier le SGPE et le CGDD
(l?Ademe étant citée comme un partenaire à associer), ainsi que les principaux opérateurs
du champ de la santé et les fédérations hospitalières est en cours de finalisation pour
décliner la feuille de route de mai 2023 : il s?agit en réalité de la troisième convention avec
un objet similaire, la dernière s?étant achevée en 2018 sans qu?un bilan des actions prévues,
et notamment de la participation des signataires rattachés à la transition écologique, ait été
réalisé.
[141] Or, concernant en particulier les produits de santé, une telle expertise a un réel intérêt car
elle favoriserait :
? la réalisation au niveau national d?analyses de cycle de vie sur des produits utilisés par
plusieurs établissements de santé, ou à tout le moins le partage de critères d?appréciation
de la robustesse des études existantes ;
? le partage d?éléments de parangonnage sur les leviers de décarbonation utilisés dans
d?autres secteurs et la façon de surmonter les freins rencontrés (par exemple, le défaut de
transparence des fournisseurs) ;
? la hiérarchisation des leviers en fonction notamment de (i) leur degré de faisabilité (ii) leur
impact sur les émissions carbone (iii) leur impact sur la consommation des ressources
abiotiques (iv) leur cohérence avec les autres leviers prévus dans le cadre de « France 2030 ».
2.2.2 La DGE assume un leadership fondé sur le double objectif de relocalisation
des industries de santé et de décarbonation
[142] La Direction générale des entreprises (DGE) prend en charge, en lien avec le ministère de la
santé, les travaux relatifs à l?empreinte carbone des produits de santé en lien avec les industries
de santé. Ce rôle premier de la DGE se fonde sur le contrat stratégique de filière « industries et
technologies de santé » élaboré en 2019 dans le cadre du conseil national de l?industrie131. Si ce
contrat ne faisait pas initialement référence à l?enjeu de décarbonation des produits de santé, ni
à la souveraineté sanitaire, un tournant a été pris à la suite de la crise Covid de 2020. Le plan
« innovation santé 2030 » lancé en 2021 fixe un objectif de soutien à l?industrialisation des
produits de santé sur le territoire français. Une direction de projet « relocalisation des industries
de santé » a été créée à la DGE. Une feuille de route « décarbonation des industries et
technologies de santé », ciblée sur les médicaments, a été élaborée en lien avec la Fédération
française des industries de santé (Fefis). La DGE envisage une feuille de route comparable pour les
131 Créé en 2010, le conseil national de l?industrie est une instance visant à éclairer et conseiller les pouvoirs
publics sur les enjeux de l?industrie en France. Il regroupe 19 Comités stratégiques de filière (CSF). Chaque
CSF est doté d?une gouvernance représentative de la filière portant des projets collectifs structurants qui
engagent de manière réciproque l?État et les acteurs privés.
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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dispositifs médicaux, même si le caractère plus atomisé et hétérogène des fabricants de DM
complexifie l?exercice.
[143] Un appel d?offres visant à construire une méthodologie de l?empreinte carbone des
médicaments a été publié par la DGE, en lien avec la DGS, en octobre dernier. Il est attendu du
prestataire, qui devra consulter les fabricants concernés, l?identification des données et la
définition de la méthode nécessaires au calcul d?un « score carbone » des médicaments. Ces
éléments pourraient à terme intégrer une plateforme qui produirait, à l?attention des acteurs
concernés (ex : acheteurs hospitaliers) et à partir des données renseignées par les entreprises, un
« score carbone » par médicament. L?extension de cette démarche aux DM est aussi envisagée.
3 En parallèle de l?expérimentation, la mise en oeuvre des
autres leviers de réduction de l?empreinte écologique des
DM est indispensable et nécessite un appui national renforcé
3.1 Conformément aux dispositions interministérielles, les achats
hospitaliers, qui constituent un levier majeur, doivent contribuer
davantage à la réduction de l?empreinte écologique des DM
3.1.1 En dépit d?obligations croissantes, le levier des achats reste encore sous-
utilisé par les hôpitaux pour diminuer leur empreinte environnementale
[144] Depuis 2016, des dispositions successives, regroupées pour partie dans le plan national pour
des achats durables 2022-2025132, qui fixe l?objectif de 100 % des contrats de la commande
publique133 avec au moins une considération environnementale134, tendent à renforcer la prise en
compte des enjeux environnementaux dans les achats publics :
? la notion de coût de cycle de vie, issue d?une directive européenne, a été intégrée au décret
du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics qui précise qu?elle peut inclure « les coûts
imputés aux externalités environnementales liés au produit, au service ou à l'ouvrage pendant
son cycle de vie, à condition que leur valeur monétaire puisse être déterminée et vérifiée. Ces
coûts peuvent inclure le coût des émissions de gaz à effet de serre et d'autres émissions
polluantes ainsi que d'autres coûts d'atténuation du changement climatique »135 ;
132 Il s?agit de la seconde édition du plan.
133 Contrats notifiés au cours de l?année.
134 Elle est définie par le PNAD comme la prise en compte de la dimension environnementale dans l?acte
d?achats. Elle est entendue au sens large, comme par exemple, la réduction des prélèvements des ressources,
la composition des produits et notamment leur caractère écologique/polluant/toxique, le caractère
réutilisable/recyclé/reconditionné/recyclable des produits, les économies d?énergie, la prévention de la
production des déchets et la valorisation des déchets (etc.) en lien avec la prestation commandée.
135 Voir article 63.
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RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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? des Schémas de promotion des achats publics socialement responsables (Spaser), dont le
seuil en montant d?achats à partir duquel ils sont obligatoires a été progressivement diminué
depuis 2014, doivent dorénavant être adoptés par les établissements de santé réalisant plus
de 50 M¤ d?achats hors taxes ;
? le code de la commande publique prévoit depuis 2018 la possibilité pour l?acheteur
d?imposer que les moyens utilisés pour exécuter tout ou partie d?un marché, pour maintenir
ou pour moderniser les produits acquis soient localisés sur le territoire des Etats membres
de l?UE, afin notamment de prendre en compte des considérations environnementales ;
? la loi « climat et résilience »136 a introduit au niveau légal l?obligation de clauses
environnementales dans les marchés publics et prévu la création d?outils d?analyses du coût
du cycle de vie à destination des pouvoirs adjudicateurs au plus tard le 1er janvier 2025137 ;
? enfin, la loi « industrie verte »138 accélère le calendrier prévu pour l?insertion de clauses
environnementales dans les marchés clés en matière de décarbonation139 et sécurise
juridiquement la possibilité pour les acheteurs de mettre au même niveau, dans la
pondération des critères, les enjeux qualitatifs environnementaux et les critères prix.
[145] S?il n?appartenait pas à la mission d?évaluer la mise en oeuvre de ce levier, quoiqu?il soit
central dans la réduction de l?empreinte écologique des DM, force est de constater que, avec
moins de 10 % des marchés hospitaliers qui incluaient en 2022 une clause environnementale, il
reste sous-utilisé140. Selon les interlocuteurs rencontrés, cette sous-utilisation peut s?expliquer par
différents facteurs dont :
? la difficulté à relier la clause environnementale avec l?objet du marché, en particulier
lorsqu?il s?agit d?acquérir des produits de santé ;
? la difficulté à pondérer la note pondérale, qui tend à représenter une part encore faible de
la note globale attribuable, par rapport aux autres critères de notation utilisés (prix,
expertise, qualité, etc.)141 ;
? le défaut d?expertise des acheteurs publics qui peinent à définir des clauses à la fois
conformes au code de la commande publique et impactantes sur le plan environnemental ;
? le faible niveau de transparence de la part des fournisseurs qui ne souhaitent pas, au-delà
des obligations limitées prévues par la réglementation européenne, sur la composition
exacte des produits de santé et sur leur circuit de fabrication.
136 Article 35 de la loi n°2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et
renforcement de la résilience face à ses effets.
137 Voir article 36.
138 Article 29 de la loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l?industrie verte.
139 Dès juillet 2014, par exemple pour les achats de véhicules neufs.
140 La centrale d?achats hospitaliers Résah a néanmoins publié en mars 2022 un guide sur les achats
responsables à l?attention des acheteurs hospitaliers.
141 À titre d?illustration, 2/3 des établissements de santé ayant participé à l?enquête Solen administrée par la
mission indiquent inclure des clauses environnementales dans leurs marchés, tout en précisant que ces
critères représentent en moyenne entre 10 et 20 % de la note globale (voire entre 2,5 et 5 % pour les CHU).
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Tableau 19 : Évolution de la part des achats hospitaliers incluant une clause
environnementale entre 2020 et 2022
2020 2021 2022
Nombre de marchés 264 6 707 6 098
en % du total 4,2 5,6 9,3
Montant (en ¤) 215 703 523 491 966 149 2 084 673 598
en % du total 1,7 2,9 13,5
Source : Observatoire économique de la commande publique.
Marché du Résah relatif à l?achat de gants en nitriles
La fourniture des gants d?examen, pour lesquels la très forte demande a provoqué une
déstabilisation des marchés à l?échelle mondiale, de l?achat des matières premières à
l?organisation des chaînes de production, a été particulièrement impactée par la crise Covid.
Afin de sécuriser l?approvisionnement des établissements, les autorités ont souhaité mettre en
place des mesures visant à encourager l?émergence de filières européennes de production par
la mise en place d?un dispositif de commande publique adapté.
C?est dans ce contexte que le Resah met en place, à partir du 1er mars 2024, un marché dédié à
la sécurisation et à la continuité d?approvisionnement en gants d?examen en nitrile. Dans le
cadre de la consultation, le Resah a exigé, à titre de condition d?exécution, que les gants objet
du marché soient manufacturés sur le territoire de l?Union européenne.
Quinze points ont ainsi été alloués au critère « performance environnementale et sociétale des
fournitures de leur fabrication à leur distribution », apprécié sur la base d?un questionnaire
imposant aux candidats de fournir et d?exposer :
- les caractéristiques environnementales de la production des gants nitrile s?agissant :
? des rejets d?effluents gazeux (en production et logistique) et liquides ;
? de la consommation globale en énergie et en eau (part fixe et variable suivant le niveau
de production) ;
? des déchets en production, sur le plan logistique amont (matière premières) et aval
(produits finis) et liés aux processus hors production ;
? du bilan carbone des processus de production et d?approvisionnement ;
- en lien avec l?exécution des prestations objet du marché, de la fabrication du produit jusqu?à
la distribution incluse, le niveau d?ambition (objectifs, plan d?actions?) sur les sujets
environnementaux ;
- en lien avec l?exécution des prestations objet du marché, de la fabrication du produit jusqu?à
la distribution incluse, le niveau d?ambition en matière sociétale.
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Le cahier des clauses particulières du marché prévoit un certain nombre de mécanismes
permettant de contrôler le respect des engagements souscrits par le titulaire dans son offre,
s?agissant en particulier du critère « performance environnementale et sociétale des fournitures
de leur fabrication à leur distribution ».
Le titulaire est également tenu d?une obligation de reporting d?activité concernant la qualité
environnementale des produits, en fournissant au Resah un relevé des indicateurs suivants :
- consommation d?eau utilisée pour la production (reporting a minima trimestriel) ;
- rejets d?effluents gazeux et liquides (reporting a minima trimestriel) ;
- bilan carbone des processus de production et d?approvisionnement (bilan annuel des
émissions de GES de l?antenne de production) ;
- déchets produits et matière première inutilisée (reporting a minima trimestriel).
Source : Resah.
3.1.2 À l?exemple du système de santé britannique, les achats hospitaliers
devraient constituer le principal levier de décarbonation des DM
[146] Si la feuille de route du 22 mai 2023 mentionne bien les achats durables comme un levier
de décarbonation, la place relative accordée à ce levier reste faible à l?aune de la stratégie
environnementale du système de santé britannique. Le National health system (NHS) a adopté
dès 2008 une stratégie de décarbonation dite « Greener NHS ». Actualisée en octobre 2020, elle
repose sur un double objectif : la neutralité carbone à horizon 2040 pour les émissions directes
du NHS et à horizon 2050 pour les émissions indirectes. Pour atteindre l?objectif de réduction des
émissions indirectes qui, comme en France, sont liées pour deux tiers aux achats de produits de
santé, un plan spécifique a été élaboré concernant les achats hospitaliers. Ce plan, qui s?appuie
sur un outillage et un accompagnement spécifique à destination des fournisseurs, repose sur des
jalons successifs :
? depuis avril 2023, pour tous les achats d?une valeur supérieure à 5M de £142, les fournisseurs
doivent obligatoirement communiquer un plan de réduction de leurs émissions directes de
carbone ;
? cette obligation sera étendue à l?ensemble des achats, quel que soit leur montant, dès avril
2024 ;
? enfin, à partir d?avril 2027, le plan de décarbonation communiqué par les fournisseurs devra
inclure leurs émissions indirectes.
[147] Les fournisseurs sont accompagnés dans la mise en oeuvre de cette stratégie de
décarbonation via des outils143 leur permettant d?apprécier leur « maturité » par rapport aux
attentes du NHS (cf. schéma ci-dessous). Il est demandé aux entreprises qui revendiquent un
142 5,7 M¤ au 24 novembre 2023.
143 Voir « Evergreen Sustainable Supplier Assessment ».
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RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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niveau de maturité est jugé élevé de faire certifier leur stratégie de décarbonation par une
association indépendante selon des standards internationaux144.
[148] La stratégie britannique de réduction de l?empreinte carbone des produits de santé via le
levier des achats se distingue à plusieurs égards de l?approche qui se dessine en France :
? elle s?appuie sur des moyens (une trentaine d?ETP) et des outils (guide à l?attention des
fournisseurs, outils en ligne d?auto-évaluation, etc.) dont le calibrage peut aussi s?expliquer
par le caractère plus centralisé des achats hospitaliers ;
? elle repose sur une approche par fournisseur, et non par produit, les objectifs de
décarbonation fixés s?appliquant à la totalité de le leur activité, ce qui est plus cohérent
avec la façon dont les entreprises définissent un tel objectif, et rejoint aussi l?approche
retenue par les acheteurs privés (y compris les établissements de santé privés) en France
qui, n?étant pas contraints par le code de la commande publique, sont plus libres de définir
des critères environnementaux sans lien direct avec l?objet du marché ;
? elle se fonde sur des engagements de la part des fournisseurs certifiés le cas échéant selon
des standards internationaux existants, et non sur un mode de calcul de l?empreinte
carbone propre au NHS.
Schéma 9 : Affiche de communication de la stratégie nationale « Greener NHS »
(« Réduisez les émissions, réduisez les admissions », « une planète en meilleure santé, une
population en meilleure santé »)
Source : NHS England.
144 Science Based Targets Initiatives. Lancée en juin 2015, l?initiative Science Based Targets (SBTi ou iSBT en
français) est un projet conjoint du Carbon Disclosure Project (CDP), du Global Compact des Nations Unies,
du World Ressource Institute (WRI) et du World Wildlife Fund (WWF). C?est un organisme de notation qui
offre un label et une reconnaissance aux entreprises qui définissent un plan avec des objectifs fondés sur des
critères scientifiques clairs et transparents pour réduire leur empreinte carbone.
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Schéma 10 : Outil d?appréciation du niveau de maturité des fournisseurs en matière
environnementale
Source : NHS England. Quatre niveaux de maturité sont distingués : (1) un engagement public à
atteindre la neutralité carbone (2) la fixation d?objectifs globaux de décarbonation reposant sur un
plan d?actions (3) la fixation d?un objectif d?atteindre la neutralité carbone en 2050 sur la base d?une
évaluation indépendante en prenant en compte le risque d? « esclavage moderne » (4) la fixation
d?un objectif d?atteindre la neutralité carbone en 2050 sur la totalité des activités et sur la base d?une
cartographie de la chaîne d?approvisionnement et d?enquêtes auprès des sous-traitants comprenant
l?appréciation du risque d? « esclavage moderne ».
3.2 Le retraitement des DM à usage unique, qui sont définis comme tels
par les seuls industriels, doit aussi s?accompagner du développement
des DM à usage multiple
3.2.1 L?évolution de la part respective des DM à usage unique et des DM à usage
multiple ne fait l?objet d?aucun suivi au niveau national
[149] Une partie des DM aujourd?hui définis par les industriels comme étant à usage unique
(DMUU) présentent ou ont présenté dans le passé des alternatives à usage multiple (DMUM). La
mission n?a pas recensé d?études recensant l?évolution de la part respective des DMUU et des
DMUM145. Elle n?a pas non plus identifié de liste des DMUU pour lesquels il existe une alternative
sous la forme d?un DMUM. Néanmoins, les professionnels de santé rencontrés par la mission ont
témoigné de l?augmentation perçue de la part des DMUU utilisés. Cette tendance s?expliquerait
145 Les établissements de santé ayant participé à l?enquête Solen administrée par la mission (cf. Annexe V)
ont indiqué que les DMUU (incluant les DM implantables) représentaient entre 76 et 94 % du total des DM
utilisés.
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par la volonté de réduire les risques sanitaires mais aussi par la réduction des moyens alloués aux
services de stérilisation en particulier, et aux établissements de santé en général. Le
développement des DMUU est aussi favorisé par la liberté dont disposent sur le marché européen
les fabricants de qualifier l?usage unique (par l?apposition sur un DM du label européen consistant
en un deux barré) soit avoir à le justifier.
[150] Alors que ce levier n?est pas identifié en tant que tel par la feuille de route du 22 mai 2023,
la mission a identifié des initiatives visant à substituer des DM à usage unique par des DM à usage
multiple en établissement de santé. Deux initiatives sont synthétisées ci-dessous à titre
d?exemple :
? le CHU de Clermont-Ferrand, sur la base des travaux menés par une interne en pharmacie146,
a démontré que la substitution d?une partie des DMUU utilisés lors de l?accouchement par
voie basse par des DMUM permettait en particulier de diviser par trois leur empreinte
écologique (cf. schéma ci-dessous). Il s?est engagé en 2022 dans une évolution de la
composition des différents « packs » (épisiotomie, suture, sur-mesure) constitués par les
pharmaciens pour les soignants. Un travail comparable a été réalisé sur le set fourni aux
gynécologues au bloc opératoire ;
? le CHU de Nîmes, dans le cadre d?un projet engagé en 2021 de réduction des déchets issus
du bloc opératoire (« Durabloc »), a mené des travaux sur l?ACV comparée des lames de
laryngoscopes à usage unique (LUU) et à usage multiple (LUM)147 soulignant un intérêt
écologique de ces dernières proportionnel au nombre de lames utilisées et pouvant
représenter 26 tonnes de CO2 par an (soit l?équivalent de 120 000 km en voiture). La
substitution des LUU par des LUM a été engagée en 2022.
[151] Alors que le développement de l?usage multiple concerne potentiellement un volume plus
important de DMUU que le retraitement et que son intérêt écologique est démontré, la mission
n?a pas identifié au niveau national de stratégie148. Une telle stratégie, qui devrait associer l?État,
la Cnam, les représentants des fabricants de DM (via le Snitem), l?ANSM et la HAS, impliquerait :
? le recensement de l?ensemble des DMUU pour lesquels il existe déjà aujourd?hui sur le
marché une alternative réutilisable ;
? le recensement de l?ensemble des initiatives en établissements de santé et en ville de
substitution de DMUU par des DMUM ;
? l?identification des DMUU pour lesquels il n?existe pas sur le maché d?alternative réutilisable
alors que les professionnels de santé et les autorités sanitaires estiment qu?une telle
alternative pourrait être commercialisée ;
146 Steffi Calland, « Les dispositifs médicaux de l?accouchement par voie basse : usage unique ou réutilisable ? »,
Sciences pharmaceutiques, 2022.
147 Nathalie Rouvière et. Alii., « Reusable laryngoscope blades: a more eco-responsible and cost-effective
Alternative », Elsevier, 2023.
148 A l?instar des études en cours sur la réutilisation des médicaments non utilisés mais délivrés, une étude
similaire pourrait être menée sur les DM périmés, ou dé stérilisés et non utilisés.
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? un chiffrage du gain écologique associé au passage de l?usage unique vers l?usage multiple,
à l?image du simulateur créé par la société Ecovamed (cf. schéma ci-dessous) ;
? des travaux, sur le plan juridique national et européen, en vue, le cas échéant, (i) d?obliger
les fabricants de DM à justifier la qualification d? « usage unique » dans le cadre de
l?obtention du marquage CF (ii) de mieux prendre en compte l?empreinte environnementale
des DM, liée en particulier à leur potentiel de réutilisation, au moment de leur tarification.
3.2.2 Le développement de l?usage multiple est souvent conditionné dans les
établissements de santé à une organisation et des moyens adaptés
[152] Comme le montrent les exemples du CHU de Clermont-Ferrand et de Nîmes, si l?intérêt
écologique du développement de l?usage multiple est démontré, il doit être mis en regard avec
d?autres critères qui peuvent conditionner sa faisabilité :
? sur le plan économique, le coût complet par acte ou par année (tenant compte en
particulier de leur stérilisation et de la gestion des déchets) des DMUM tend à être proche
de celui des DMUU (légèrement supérieur dans les travaux menés par le CHU de Clermont-
Ferrand, inférieur dans l?étude du CHU de Nîmes) mais la question du financement d?un
surcoût économique en contrepartie d?un bénéfice écologique pourrait le cas échéant être
soulevée ;
? sur le plan des ressources humaines, la surcharge de travail engendrée par le recours à
l?usage multiple par rapport à l?usage unique, ciblée sur le personnel paramédical et les
services de stérilisation, varie selon le type de DM concerné, le processus de nettoyage et
de stérilisation nécessaires et l?organisation propre à l?établissement de santé : des
capacités suffisantes et la proximité géographique du service de stérilisation, qui permet un
approvisionnement plus fluide en DMUM, sont identifiés comme des facteurs de succès ;
? sur le plan managérial, au regard de l?impact qu?est susceptible d?avoir la bascule d?un DMUU
vers un DMUM sur l?organisation des soins et la logistique hospitalière, une adhésion de
l?ensemble des professionnels concernés au projet est un pré-requis ;
? enfin, il convient de rappeler que, avant même d?envisager le passage de l?usage unique à
l?usage multiple, l?opportunité d?utiliser un DM stérile doit systématiquement être vérifiée.
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Schéma 11 : Synthèse des résultats des travaux menés par le CHU de Clermont-
Ferrand sur la substitution de DM à usage unique par des DM réutilisables dans le cadre
de l?accouchement par voir basse
Source : Steffi Calland, support présenté au webinaire organisé par l?Anap sur la réduction de
l?empreinte écologique des produits de santé le 5 octobre 2023.
Graphique 3 : Répartition comparée des impacts écologiques d?une lame de
laryngoscope à usage unique et d?une lame à usage multiple
Source : Nathalie Rouvière, CHU de Nîmes, support présenté au congrès de la Société française de
stérilisation (SF2S) en septembre 2022. L?impact écologique de la lame à usage multiple est lié à plus
de 60% aux processus de décontamination (« washing process ») et de stérilisation, tandis que celui
de la lame à usage unique est lié aux deux tiers à sa fabrication (« manufacturing »).
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Schéma 12 : Copie écran du simulateur créé par la société Ecovamed pour comparer
l?empreinte carbone d?un DMUM (à gauche) à celle d?un DMUU (à droite)
Source : Ecovamed (shinyapps.io)
3.3 La formation des personnels hospitaliers doit contribuer en particulier
à faire converger davantage les démarches de pertinence et de
sobriété des soins
3.3.1 Le développement de l?éco-responsabilité en matière de soins peut
contribuer à renforcer l?efficience du système de santé
[153] Au niveau national, les enjeux liés à la transition écologique du système de santé ne sont
pas encore suffisamment liés en pratique à l?objectif de renforcement de son efficience. Cette
convergence des enjeux est certes identifiée par la feuille de route de mai 2023. Elle précise que «
pace qu?il y a un lien entre sobriété et pertinence, les actions de gestion de risque de l?assurance
maladie intègreront les enjeux de transformation écologique ». Elle propose également d?intégrer à
terme des indicateurs spécifiques dans les Contrats d'Amélioration de la Qualité et de l'Efficience
des Soins (Caques)149. Si la DGOS a bien créé en 2023 un groupe de travail visant à faire remonter
les initiatives participant des soins éco-responsables150, la mission n?a pas identifié d?autres
149 Le Caques est un contrat qui lie l?ARS, l?organisme local d?assurance maladie et les établissements de santé.
Il pour objectif l?amélioration des pratiques, la régulation de l?offre de soins et l?efficience des dépenses
d?assurance maladie
150 Un soin éco-responsable est défini par la feuille de route de mai 2023 comme « un acte de soin qui, à
qualité et sécurité égales, engendre un impact moindre sur l?environnement ».
PUBLIÉ
https://ecovamed.shinyapps.io/calculateur-empreinte-carbone/
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traductions opérationnelles, à ce stade et au niveau de l?administration centrale, de cet objectif
de convergence des démarches.
[154] Au niveau local, en revanche, sans que la mission ait procédé à une enquête exhaustive, elle
a constaté l?existence d?initiatives visant à faire converger l?objectif de réduction de l?empreinte
écologique des actes de soins et celui de leur efficience :
? le CHU de Bordeaux a ainsi recensé dans son « guide des unités durables » différents
parcours ou actes de soins (prise en charge des patients atteints de cancer du rectum,
prescription d?investigations anatomie et cytologie, prescription de pansements, etc.) pour
lesquels des leviers permettant de réduire à la fois leur coût et leur impact écologique ont
été identifiés ;
? le CHU de Nîmes a engagé des études en ACV pour comparer l?empreinte écologique
respective de différents parcours de chirurgie du canal carpien.
3.3.2 La sensibilisation des personnels hospitaliers aux enjeux liés à la transition
écologique dépend encore largement des directions d?établissement
[155] Il n?existe pas de données sur la part des effectifs à l?hôpital qui ont été formés aux enjeux
de la transition écologique ni de stratégie globale de formation alors que cette sensibilisation est,
de l?avis des professionnels rencontrés par la mission, un préalable au changement :
? le ministère de la santé a certes demandé à l?Anap, en lien avec l?EHESP, de former d?ici
fin 2024 tous les directeurs d?hôpital, directeurs des soins ainsi que les présidents de
Commissions médicale d'établissement, soit environ 500 personnes ;
? de son coté, la Direction interministérielle à la transformation publique (DITP), en lien avec
le CGEDD, accompagne le déploiement national d?un dispositif de sensibilisation conçu par
des professionnels de santé (« Plan Health Fair ») avec l?objectif de former 6 500
professionnels encadrants à l?hôpital d?ici fin 2024 ;
? plusieurs établissements de santé, à l?image de l?AP-HP, ont indiqué à la mission vouloir
former eux-mêmes tout ou partie de leurs effectifs, le cas échéant en utilisant également le
dispositif « Plan Health Fair ».
3.4 Enfin, le tri et la revalorisation des déchets issus des DM, qui
dépendent aujourd?hui largement des décisions locales, doivent faire
l?objet d?une stratégie nationale
3.4.1 Les établissements de santé sont soumis à des obligations croissantes en
matière de gestion des déchets, en partie communes au secteur tertiaire
[156] Sous réserve du sujet spécifique des Déchets de soins à risque infectieux (Dasri), les
obligations des établissements de santé en matière de gestion des déchets sont comparables à
celles d?autres entreprises :
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? en dehors d?une note actualisée en 2023 par la FHF, la mission n?a pas identifié de circulaire
nationale rappelant aux établissements de santé ces obligations, et l?accompagnement
dont ils pouvaient éventuellement bénéficier pour les satisfaire ;
? or les établissements de santé font souvent partie, l?échelle d?un territoire, des plus gros
producteurs de déchets ;
? le renforcement des obligations en matière de tri et de valorisation151 implique un travail
important de la part des établissements de santé en matière de sensibilisation des
professionnels, de réorganisation de la logistique et de sélection de prestataire, avec un
potentiel surcoût.
[157] En revanche, le recyclage et la valorisation des DM ne font pas l?objet à ce stade
d?obligations au niveau national :
? aucune des filières à Responsabilité élargie des producteurs (Rep)152 ne prend en charge les
déchets issus des DM utilisés par les établissements de santé153, y compris la filière des
Dispositifs et équipements électriques et électroniques (D3E) dont le périmètre
d?intervention présente des adhérences avec les DM ;
? si certains établissements de santé, dont la mission n?a pu objectiver le nombre, ont pris
l?initiative de valoriser auprès d?organismes de recyclage les métaux précieux présents sur
les cathéters d?électrophysiologie, aucun encadrement n?est prévu au niveau national154.
3.4.2 Les établissements de santé sont peu incités et accompagnés dans la
réduction et la valorisation des déchets, en particulier ceux issus des DM
[158] Un travail a été engagé au niveau national et dans la plupart des établissements de santé
pour réduire le volume des Dasri. En effet, outre qu?elle représente un coût pour l?établissement
de santé, en moyenne, l?incinération d?une tonne de Dasri génère, selon le Shift Project, trois fois
plus d?émissions carbone que celles des déchets ménagers. Cette réduction du volume de Dasri
repose essentiellement sur une amélioration du tri et, dans certains établissements de santé, sur
151 La législation pose depuis 2016 l?obligation du tri 6 flux (étendu depuis 2021 à 7 flxu) correspondant au tri
et à la collecte séparée des déchets de papier / carton, métal, plastique, verre, bois (et de textile à partir du
1er janvier 2025) et des déchets de plâtre et de fractions minérales pour les déchets de la construction et de
la démolition.
152 Les filières à Responsabilité élargie des producteurs (Rep) sont des dispositifs particuliers d?organisation
de la prévention et de la gestion de déchets qui concernent certains types de produits. Ces dispositifs
reposent sur le principe de responsabilité élargie du producteur, selon lequel les producteurs, c?est-à-dire les
personnes responsables de la mise sur le marché de certains produits, peuvent être rendus responsables de
financer ou d?organiser la prévention et la gestion des déchets issus de ces produits en fin de vie. Il existe à
l?heure actuelle douze filières Rep.
153 Il existe en revanche une filière Rep pour les DM perforants utilisés par les patients en auto-traitement.
154 Cette valorisation consiste à découper, après leur utilisation, la pointe des cathéters qui est ensuite
vendue à des organismes spécialisés qui en extraient les métaux précieux pour les réutiliser ou les vendre. À
titre d?illustration, le CHU de Bordeaux a indiqué à la mission obtenir 8¤ par cathéter dont les métaux
précieux sont valorisés. Sel
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le recours à un banaliseur155 qui permet de convertir les Dasri en Déchets assimilés à des ordures
ménagères (DAOM). L?Anap a produit en particulier des outils pour guider les établissements de
santé qui envisagent de s?engager dans la banalisation de leurs Dasri. La DGOS, en lien notamment
avec le Haut conseil de la santé publique, est en train d?élaborer une nouvelle version du guide
sur la gestion des Dasri visant à réduire le périmètre des déchets relevant de cette catégorie.
[159] Cela étant, la réduction du périmètre des Dasri, principal levier investi aujourd?hui au niveau
national, ne répond que partiellement à la problématique écologique liée aux déchets issus en
particulier des produits de santé. Or cette question des déchets, même si elle constitue l?un des
sept domaines d?action de la feuille de route de mai 2023, est encore abordée de façon limitée
au niveau du ministère de la santé, et sans imbrication suffisante avec l?enjeu de décarbonation
du secteur. Les différents leviers de réduction des déchets mentionnés par la feuille de route, qui
concernent en particulier les médicaments et les DM, justifieraient la mise en place d?un
accompagnement spécifique des établissements de santé, ainsi que le cas échéant des incitations
financières. Par ailleurs, une partie de ces leviers (ex : mise en place d?une filière de collecte et de
valorisation des verres médicaux issus des soins, préfiguration d?une filière Rep sur les textiles
sanitaires à usage unique) nécessitent une évolution de la législation qui ne peut être engagée sans
les administrations en charge de la transition écologique.
155 Les banaliseurs de Dasri sont des machines permettant de réduire les déchets en petits morceaux. Les
débris des déchets sont ensuite chauffés à très haute température afin d'éliminer les composants dangereux
qu'ils contiennent. Une fois les Dasri passés dans le banaliseur, ils peuvent être traités comme des déchets
ménagers (inertes) ordinaires.
PUBLIÉ
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ANNEXE 5 : Résultats du questionnaire
adressé par la mission aux établissements
de santé
1 RAPPEL DU CONTEXTE DU QUESTIONNAIRE .............................................................................. 113
2 RESULTATS ............................................................................................................................................ 113
2.1 LES DONNEES DES ETABLISSEMENTS : STATUTS ET ACHATS DE DM .................................................... 114
2.1.1 Nombre d?établissements répondant et leur statut ..................................................................... 114
2.1.2 Les achats de DM................................................................................................................................ 114
2.2 LA POLITIQUE MENEE PAR LES ETABLISSEMENTS SUR LA REDUCTION DES GAZ A EFFET DE SERRE (GES) 116
2.2.1 La réalisation du bilan de gaz à effet de serre................................................................................ 116
2.2.2 Intégration de critères environnementaux dans la politique achat de DM ............................... 117
2.2.3 Le tri des déchets de DM................................................................................................................... 117
2.3 LES ETABLISSEMENTS ET L?EXPERIMENTATION INSCRITE A L?ARTICLE 29 DU PLFSS ............................ 118
2.3.1 Les CHU et les EPBL répondants sont les plus intéressés pour participer à l?expérimentation
.............................................................................................................................................................. 118
2.3.2 Le choix des DM se porte vers les sondes d?électrophysiologie, mais il existe une confusion
entre retraitement et recyclage ....................................................................................................... 119
2.3.3 Les freins identifiés ............................................................................................................................. 119
2.4 LES FACTEURS DE REUSSITE DE CETTE EXPERIMENTATION ................................................................... 119
2.5 LES INDICATEURS DE SUIVI DE L?EXPERIMENTATION ........................................................................... 120
2.6 LES AUTRES LEVIERS PRIORITAIRES POUR DIMINUER L?EMPREINTE CARBONE DES DM .......................... 120
3 CONCLUSION ....................................................................................................................................... 120
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1 Rappel du contexte du questionnaire
[160] Dans le cadre de la mission Igas-Igedd relative à la levée de l?interdiction de la réutilisation
des dispositifs médicaux à usage unique (DMUU), la mission, avec l?aide du pôle numérique, a mis
en place un questionnaire Solen à destination des établissements de santé publics et privés tout
statut : Centres Hospitaliers Universitaires (CHU), Centres Hospitaliers (CH), Etablissements privé
de Santé d?Intérêt collectif (ESPIC), et Etablissements privés à but lucratif (EPBL).
[161] Cette enquête a été annoncée lors des 33ème journées nationales sur les dispositifs médicaux
à Clermont Ferrand du 10 au 12 octobre 2023, et mis en ligne du 19 octobre 2023 au 20 novembre
2023 sur les sites d?Europharmat, de la Fédération de l?Hospitalisation de France (FHF), de la
Fédération de l?Hospitalisation Privée (FHP), et de la Fédération des Etablissements Hospitaliers
et d'Aide à la Personne Privés solidaires (FEHAP).
[162] Cette enquête s?est adressée aux directions et aux pharmacies à usage intérieur (PUI) des
établissements de santé qui devaient remplir ensemble les deux parties du questionnaire. La
mission a souhaité que cette enquête reste anonyme, avec comme objectif que les résultats
permettent de documenter le rapport qui sera transmis aux ministres.
[163] Le questionnaire a été établi par la mission, et a été relu par des professionnels de santé
pharmaciens en charge des dispositifs médicaux, et par un représentant de la FHF.
[164] Il est construit en trois parties :
? la première partie concerne les données de l?établissement ;
? la deuxième partie concerne la politique menée par l?établissement sur la réduction des gaz
à effet de serre (GES) ;
? la troisième partie concerne plus spécifiquement l?expérimentation prévue à l?article 29 de
la LFSS pour 2024.
[165] Enfin, la mission a souhaité connaitre quels pourraient être les leviers à disposition des
établissements de santé pour diminuer l?empreinte carbone des DM, et lesquels seraient
prioritaires.
2 Résultats
[166] Les réponses au questionnaire Solen apportées par les établissements de santé répondants
sont de nature variable en termes de qualité de saisie. Certains établissements de santé n?ont pas
répondu à l?intégralité des questions, et certaines données chiffrées sont approximatives
(notamment concernant les montants des achats de DM) Il a donc été difficile pour la mission
d?en faire une synthèse exhaustive.
[167] Même si le nombre de réponses est important, 1583, peu de réponses sont complètes (tous
les champs renseignés), et ne représentent que 6 % des répondants.
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2.1 Les données des établissements : statuts et achats de DM
2.1.1 Nombre d?établissements répondant et leur statut
[168] 96 établissements de santé tout type de statut ont répondu complètement au
questionnaire. 1 583 réponses étaient partielles et non pas été intégrées aux résultats présentés.
Tableau 20 : Statut des établissements répondant
Statut des établissements Nombre d?établissements
CHU 11
CH 57
Espic 1
EPBL 27
Total 96
Source : Mission.
[169] Au 31 décembre 2020156, le secteur hospitalier français MCO (hors HAD, USLD et psychiatrie)
est constitué de 1 116 entités géographiques du secteur public : 180 centres hospitaliers régionaux
(CHU et CHR) ; 936 centres hospitaliers (CH, y compris les anciens hôpitaux locaux). Les structures
hospitalières privées comprennent 972 cliniques privées à but lucratif et 670 établissements
privés à but non lucratif, dont 20 centres de lutte contre le cancer (CLCC).
[170] Le nombre de répondants n?est pas représentatif du secteur,1/3 des CHU et un très faible
nombre d?établissements de type CH et d?établissements privés à but non lucratif et lucratif ont
participé à l?enquête.
2.1.2 Les achats de DM
[171] Le montant moyen des achats de DM pour ces établissements est d?environ 8,7 millions d?¤,
et celui des DMI est de 3,7 millions d?¤.
[172] A noter que tous les logiciels de gestion des PUI ne sont pas dans la capacité de ventiler les
DMUU et les DMUM dans la part des achats de DM, et certains établissements ont répondu par
une estimation.
[173] Les données présentées dans le tableau ci-dessous sont des moyennes des montants des
achats en M¤ pour l?année 2022.
156 DREES, les établissements de santé, édition 2022
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RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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Tableau 21 : Moyenne des montants des achats par statut année 2022
Achats DM Dont DMI Dont DMUU Dont DMUM
CHU 12,1 5,2 11,4 0,9
CH 10,4 4,5 9 0,6
ESPIC 1,4 0,5 Non renseigné Non renseigné
EPBL 10,8 4,8 8,2 0,4
Source : Mission.
Graphique 4 : Répartition graphique des moyennes des achats en ¤
Source : Mission.
[174] Les DMUU représentent la part majoritaire des achats de DM pour les établissements quel
que soit leur statut, il convient de préciser que les DMI font partie des DMUU.
Tableau 22 : Part des DMUU, DMI et DMUM dans les achats des établissements de
santé
Part des DMUU / achat
de DM
Part des DMI / achat de
DM
Part des DMUM /
achat de DM
CHU 94 % 43 % 8 %
CH 87 % 44 % 6 %
ESPIC Non renseigné 34 % Non renseigné
EPBL 76 % 44 % 4 %
Source : Mission.
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2.2 La politique menée par les établissements sur la réduction des gaz à
effet de serre (GES)
2.2.1 La réalisation du bilan de gaz à effet de serre
[175] Tous les établissements de santé de plus de 250 agents auraient dû réaliser leur bilan des
gaz à effet de serre (BGES). Dans cette enquête, 60 % des établissements ayant répondus
déclarent avoir réalisé un BGES et 33 % intégrant le scope 3 obligatoire à partir du 1er janvier 2023.
Tableau 23 : Réalisation du BGES par type d?établissement
Nombre
d?établissements
GES scope 1 Dont scope 3
CHU 11 10 91 % 3 30 %
CH 57 35 61 % 10 29%
ESPIC 1 1 100 % 0 0
EPBL 27 12 44 % 6 50 %
Source : Mission.
Graphique 5 : BGES par type d?établissement
Source : Mission.
[176] Les BGES ont été réalisés pour leur majorité en 2021 (13 établissements tout statut), 2022
(10 établissements tout statut) et 2023 (7 établissements tout statut). 13 établissements tout
statut ont réalisé leur BGES entre 2012 et 2020. La règlementation impose que le BGES soit revu
tous les trois ans, la mission n?a pas évalué si les établissements qui avaient réalisés leur BGES
avant 2019 l?ont revu.
10
35
1
12
3
10
0
6
0
5
10
15
20
25
30
35
40
11 57 1 27
CHU CH ESPIC Privé but lucratif
GES scope 1 Dont Scope 3
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2.2.2 Intégration de critères environnementaux dans la politique achat de DM
[177] Concernant les établissements ayant répondu à l?enquête, 67 % déclarent avoir intégré des
critères environnementaux dans les achats de DM.
Tableau 24 : Intégration de critères environnementaux dans les achats de DM
Nombre
d?établissements
Ayant intégré des
critères
environnementaux
% Nbr de marchés de
DM concernés en
2022 et 2023
CHU 11 9 82% Entre 25 et 500
CH 57 38 67% Entre 1 et 200
Espic 1 1 100% NC
EPBL 27 16 59% Entre 2 et 40
Source : Mission.
[178] Les CHU ayant répondu déclarent que les critères environnementaux représentent entre
10% et 20 % de la pondération. Concernant les CH, ils achètent majoritairement via les
groupements hospitaliers de territoires, et ne précisent pas la pondération. Pour ceux qui ont
répondu, la pondération est plus faible que pour les CHU et serait entre 2,5% et 5 %. Aucun
établissement privé n?a précisé la pondération de ces critères (majoritairement les achats sont
faits via une centrale d?achat qui référence des produits pour les établissements).
[179] Pour ceux qui n?auraient pas encore intégré ce type de critères, 4 CH, et 5 EPBL déclarent
les intégrer dans le cadre d?un prochain appel d?offre.
2.2.3 Le tri des déchets de DM
[180] Les établissements répondant précisent que des procédures de gestion sont mises en place
et que les DM sont majoritairement triés dans les filières des déchets d?activité de soins à risques
infectieux (DASRI) ou les déchets assimilés aux ordures ménagères (DAOM). Certaines DASRI sont
banalisées et suivent ensuite le circuit classique avec enfouissement, pour certains DM périmés,
ils sont repris par des industriels.
[181] À noter que certains établissements indiquent qu?aucun tri n?est mis en place et que tous
les DM passent par la filière DASRI.
2.2.3.1 Filières de récupération ou de recyclage des DMUU
[182] Les principales filières mises en place par les établissements sont celles de recyclage de
l?inox des lames de laryngoscopes, et de certains métaux précieux, et des piles pour les DMI actifs
(pacemakers notamment).
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Tableau 25 : Filières de récupération mises en place par type d?établissement
Nombre d?établissements Filière de récupération
CHU 9 /11 Récupération des prothèses de hanche / genou
nettoyées et stockées
Expérimentation pour certains endoscopes à UU et
uthéroscope
Inox des lames de laryngoscope, amalgames dentaires,
piles des DMI actifs, câbles des bistouris
CH 15/57 Inox des lames de laryngoscope, pinces et ciseaux
Piles des DMI actifs, bistouris électriques et électrodes
Si un potentiel de valorisation matière est possible, les
DM peuvent être envoyés en filière D3E, métaux ou
plastiques
ESPIC 1/1 Non précisée
EPBL 16/27 Non précisée
Source : Mission.
2.3 Les établissements et l?expérimentation inscrite à l?article 29 du PLFSS
2.3.1 Les CHU et les EPBL répondants sont les plus intéressés pour participer à
l?expérimentation
[183] Ce sont majoritairement les CHU et les EPBL qui affichent leur intérêt de participer à cette
expérimentation, les CH sont plus mitigés. Ce résultat peut interroger notamment si on prend
comme hypothèse que ce sont les établissements de santé les plus informés de cette
expérimentation qui ont répondu à l?enquête.
Tableau 26 : Établissements intéressés pour participer à l?expérimentation
Oui Non Sans réponse
CHU 7 4 0
CH 26 24 7
Espic 1 0
EPBL 14 11 2
Total 48 39 9
Source : Mission.
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2.3.2 Le choix des DM se porte vers les sondes d?électrophysiologie, mais il
existe une confusion entre retraitement et recyclage
[184] Majoritairement, les établissements de santé répondants orientent leur choix vers les DM
d?électrophysiologie (cathéters de diagnostics et d?ablation) pour des raisons financières et
écologiques car ces DM ont un coût important et contiennent des métaux précieux. Un CHU
évoque des DM utilisés dans des robots de chirurgie (en urologie).
[185] Cependant, des établissements de santé citent, pour cette expérimentation, des DMUU qui
existent également en usage multiple tels que certains endoscopes, les lames de laryngoscopes,
des ciseaux, des pinces ?.ou encore des DM de types protections pour incontinences, tubulures
ou encore perfusions. Ce type de réponse montrent une confusion entre l?expérimentation qui
porte sur le retraitement de DMUU et le recyclage.
2.3.3 Les freins identifiés
Les principaux freins portent sur :
? l?information du patient ;
? la matériovigilance et traçabilité du retraitement ;
? le risque infectieux, et la perte de performance du DM retraité ;
? la logistique des flux (stockage, transport?) ;
? l?absence de service de stérilisation ;
? le manque de temps du personnel soignant.
[186] Enfin, certains établissements soulignent que d?autres projets sont en cours, notamment
des travaux sur les filières de déchets.
2.4 Les facteurs de réussite de cette expérimentation
[187] En interne aux établissements, les principaux facteurs de réussite sont l?acceptation des
patients par l?organisation d?échanges avec les représentants des usagers, la motivation et la
coordination de tous les acteurs au sein de l?établissement de santé, la mise en place d?une filière
à proximité de l?établissement de santé et un accompagnement des établissements de santé qui
pourrait préciser notamment les responsabilités de chaque partie prenante.
[188] Les établissements de santé répondants précisent que la garantie de gains écologique
(disposer d?une analyse du cycle de vie des DMUU retraités) et économique représente aussi un
facteur de réussite, comme le fait de disposer d?un accompagnement méthodologique et
financier (recrutement de ressources pour l?organisation interne et le suivi de l?expérimentation).
[189] Enfin, il est noté la nécessité de disposer d?un positionnement clair des sociétés savantes
sur le retraitement des DMUU.
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2.5 Les indicateurs de suivi de l?expérimentation
[190] Les indicateurs le plus souvent cités sont des indicateurs quantitatifs portant sur le nombre
de DMUU retraités, le nombre de réutilisation, le bilan économique, les délais de livraison du
fournisseur de DMUU retraités.
[191] Cependant, certains centres hospitaliers évoquent des indicateurs plus qualitatifs :
? sur le plan clinique : retour des praticiens en termes d?efficacité, de technicité et de
fonctionnalité du DMUU retraité, et évaluer sa satisfaction ;
? sur la sécurité des soins : taux de complication pendant l?expérimentation ;
? sur le plan écologique : comparer les analyses de cycles de vie du DMUU initial et du DMUU
retraité intégrant le bilan carbone, en eau, les métaux précieux ;
? sur le plan économique : réaliser une analyse en coût complet intégrant une analyse de
sensibilité pour tester la robustesse du modèle.
2.6 Les autres leviers prioritaires pour diminuer l?empreinte carbone des
DM
[192] Les autres leviers principalement cités sont ceux à « la main » des fournisseurs, notamment
concernant la transparence sur l?empreinte carbone du DM afin que celui-ci puisse être intégré
comme critère objectif lors des achats hospitaliers (éco conception des DM et limitation des
emballages, mais également sur la mise à disposition de set ou de trousse de chirurgie adapté aux
besoins des praticiens (pertinence de la composition).
[193] D?autres leviers relèvent plus de l?établissement de santé, comme celui de mener des
travaux sur l?homogénéisation des pratiques de soins, réinterroger les pratiques dans le sens de la
pertinence des soins, de la sobriété des prescriptions et du bon usage (limiter l?utilisation des DM
stériles quand le soin ne s?y prête pas) ; et enfin repasser pour certains DMUU à des DMUM si
l?organisation hospitalière le permet.
[194] Enfin, le développement de filières de tri est un des principaux leviers pour diminuer
l?empreinte carbone des DM.
3 Conclusion
[195] Les résultats de cette enquête ne permettent pas d?établir des réels constats en raison du
faible nombre d?établissements répondants, néanmoins, ils donnent quelques informations.
[196] La part des DMUU dans les achats de DM des hôpitaux est élevée, ce qui tend à confirmer
qu?ils sont très largement utilisés (même si la part des DMI est retranchée) et que l?usage des
DMUM reste encore marginal.
[197] Les établissements s?investissent dans la décarbonation des DM, la mission a pu l?apprécier
lors de ses déplacements dans deux CHU (Clermont Ferrand et Bordeaux) et lors des auditions
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RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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menées avec le CHU de Nîmes et de Strasbourg. De nombreuse actions sont en cours, les résultats
de cette enquête en montrent certaines notamment celles engagée vers une optimisation des
besoins de DM lors de certaines prises en charge, concernant le passage aux DM à usages multiples
quand l?organisation hospitalière le permet, ou encore la diminution des DASRI par une meilleure
gestion du tri ou des achats comportant moins d?emballage inutile.
[198] En ce qui concerne spécifiquement l?expérimentation du retraitement des DMUU inscrite à
l?article 29 du PLFSS, les réponses transmises montrent que les établissements disposent de peu
d?informations, notamment sur le cadrage règlementaire instauré par le nouveau règlement
européen (article 17). Cette méconnaissance entraîne des confusions entre ce qu?est le
retraitement tel que défini par le règlement européen et le recyclage. De plus, ces résultats
montrent que le périmètre de cette expérimentation (retraitement par un tiers et non par une
PUI) n?est pas complètement connu. En effet, certains répondants précisent qu?il n?y a pas de
stérilisation sur le site, ou que la stérilisation ne peut pas prendre plus de matériels.
[199] Bien que le périmètre de cette expérimentation ne soit pas bien connu, les établissements
considèrent que sa mise en place devra s?intégrer dans un projet d?établissement avec toutes les
parties prenantes, de la direction aux professionnels soignants. Ce facteur de réussite nécessite
néanmoins un accompagnement tant sur la méthode que sur les ressources humaines dans un
contexte de tensions hospitalières.
[200] Enfin, la place des industriels est soulignée. Elle s?intègre en amont dans le cadre des
marchés, avec plus de transparence sur l?empreinte carbone des DM, et sur la mise à disposition
de sets de soins plus conformes avec les pratiques des professionnels (limitation des DM non
utilisés).
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LISTE DES PERSONNES RENCONTRÉES
Cabinets ministériels
Cabinet du ministre de la santé et de la prévention
M. Raymond LE MOIGN, directeur de cabinet
Mme Capucine GREGOIRE, vonseillère financement, protection sociale et produits de santé
Cabinet de la ministre déléguée chargée de l?Organisation territoriale et des Professions de santé
Mme Isabelle EPAILLARD, directrice de cabinet
M. Pierre BRETON, conseiller Santé environnementale, une seule santé et planification écologique
du système de santé
Cabinet du ministre de la Transition écologique, et de la cohésion des territoires
M. Samuel JUST, conseiller économie circulaire et prévention des risques
Ministère en charge de la santé
Secrétariat général des ministères sociaux
M. Pierre PRIBILE, secrétaire général des ministères sociaux
M. Yann DEBOS, chef de service, pôle santé ARS
Direction générale de la santé (DGS)
Dr Grégory EMERY, directeur général adjoint
Mme Hélène MONASSE, sous-directrice, sous-direction Politique des Pratiques (PP)
Mme Esther LEPAICHEUX, cheffe du bureau dispositifs médicaux et autres produits de santé,
Sous-direction Politique des Pratiques (PP)
Mme Mélanie CAILLERET, adjointe à la cheffe de bureau des dispositifs médicaux et autres
produits de santé, Sous-direction Politique des Pratiques (PP)
Direction générale de l?offre de soins (DGOS)
Mme Emmanuelle COHN, sous directrice par intérim, sous-direction du pilotage la performance
des acteurs de l?offre de soins (PF)
Mme Anne LESQELEN, adjointe à la cheffe de bureau des produits de santé (PF2), sous-direction
du pilotage de la performance des acteurs de l?offre de soins (PF)
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Mme Amélie PERINAUD, chargée de mission, bureau des produits de santé (PF2), sous-direction
du pilotage de la performance des acteurs de l?offre de soins (PF)
Mme Hélène GILQUIN, cheffe de projet Elus Territoires et Transition Ecologique du Système de
Santé
M. Raphaël RUANO, responsable du Programme national d?Achats Hospitaliers PHARE
(Performance Hospitalière pour des Achats Responsables)
Mme Véronique CHASSE, adjointe au responsable du Programme national d?Achats Hospitaliers
Direction de la sécurité sociale (DSS)
M. Guillaume CARVAL, adjoint au chef de bureau des produits de santé (1C), sous-direction du
financement du système de soins
Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des Produits de Santé (ANSM)
M. Thierry SIRDEY, directeur de la Direction des dispositifs médicaux, des cosmétiques et des
dispositifs de diagnostic in vitro (DMCDIV)
Mme Gwennaëlle EVEN, adjointe au Directeur de la Direction des dispositifs médicaux, des
cosmétiques et des dispositifs de diagnostic in vitro (DMCDIV)
M. Frédéric DITTENIT, directeur adjoint et délégué à la protection des données, Direction
Réglementation et Déontologie
Caisse Nationale d?Assurance Maladie (Cnam)
M. Grégoire DE LAGASNERIE, responsable du département produit de santé, Direction déléguée
à la gestion et à l?organisation des soins
M. Bertrand PARADIS, responsable adjoint du département produit de santé, Direction déléguée
à la gestion et à l?organisation des soins
Mme Claire TRAON, directrice de mission sur la transition écologique et la santé environnement,
Direction déléguée à la gestion et à l?organisation des soins
Agence Nationale d?Appui à la Performance (Anap)
Mme Emeline FLINOIS, directrice du Pôle RH et du Pôle Investissement, logistique et
développement durable
Mme Hélène EYCHENIE, pharmacienne
Mme Lucile BATTAIS, experte logistique et développement durable
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Ministère en charge de l?Économie
Direction générale des entreprises (DGE)
Mme Roxane SPINARDI, coordinatrice nationale du volet Dispositifs Médicaux France 2030
Mme Charlotte LEUXE-OLIVIER, chargée de mission au bureau des industriels de santé
M. Louis-Samuel PILCER, directeur de projets santé, relocalisation des industries de santé
M. Charles FLAHAULT, chargé de mission décarbonation des industries de santé
Ministère en charge de la transition écologique
Agence de la transition écologique (Ademe)
M. Raphael GUASTAVI, directeur adjoint économie circulaire
Direction générale de la prévention des risques (DGPR)
M. Vincent COISSARD, sous-directeur déchets et économie circulaire
Mme Diane DEWALLE, chargée de mission recyclage
Mme Coralie RAVIER, chargée de mission gestion des déchets dangereux
Direction générale de l?énergie et du climat (DGEC)
M. Florian TIRANA, chargé de mission projection SNBC
Commissariat général au développement durable (CGDD)
Mme Julie HANOT, sous-directrice des entreprises
Secrétariat général à la planification écologique (SGPE)
Mme Cécilia BERTHAUD, secrétaire générale adjointe à la planification écologique, en charge du
pôle « ambition »
Mme Elise BEHM, chargée de mission décarbonation
Interlocuteurs à l?étranger
Secrétariat général, délégation aux affaires européennes et internationales
Mme Catherine BORSI-SERHAN, cabinet du délégué aux affaires européennes et internationales,
responsable du pôle « Pilotage et réseau des conseillers pour les affaires sociales »
Mme Mireille JARRY, conseillère pour les affaires sociales Espagne
Mme Caroline CHAULET, adjointe à la conseillère pour les affaires sociales Espagne
M. Thomas GOUJAT, chargé de mission auprès du conseiller pour les affaires sociales Allemagne
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
- 126 -
Mme Valérie MAUROURY, adjointe au conseiller pour les affaires sociales Stockholm,
Copenhague, Oslo et Helsinki
Société VANGUARD
Mme Viola VAHLE, responsable du développement des affaires internationales
Mme Ulrike MARCZAK, CEO, Directrice générale
Dr Hagen THIELECKE, directeur de la recherche et du développement
Clinique du groupe VIVANTES Berlin
Dr EWERSTSEN, médecin électrophysiologiste
Ministère fédéral de la santé allemand
Mme Katharina JAKOB, bureau Droit des dispositifs médicaux
Mme Raphaela WAGNER, bureau des coopérations bilatérales en santé, Direction des affaires
européennes et internationales
Bundersintitut für Arzneimittel und Medinzinprodukte (Bfarm)
M. Joseph ZUNDORF, chef du département des dispositifs médicaux
Mme Anja JACOBSHAGEN, chargée de mission au département des dispositifs médicaux
Représentation permanente de la France auprès de l?Union Européenne
Mme Marie DE LASTELLE, conseillère Santé
M. Antoine ICHAS, attaché Santé
Commission européenne
M. Gabriele CALLIGARO, Directorate-General for Health and Food Safety, Unit D3 ? Medical
Devices
Organisation Mondiale de la Santé (OMS)
Mme Stéphanie SEYDOUX, en charge des affaires multilatérales Cabinet du Directeur général de
l?OMS
National Health System (Grande-Bretagne)
Mme Sarah OUAHNON, Senior Net Zero Delivery NHS
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
- 127 -
Établissements de santé et acheteurs hospitaliers
Centre Hospitalier Universitaire de Bordeaux
Pr Frédéric SACHE, praticien hospitalier, chef du service de cardiologie interventionnelle
Dr Josselin DUCHATEAU, praticien hospitalier, médecin en électrophysiologie service de
cardiologie interventionnelle
Dr Noëlle BERNARD, praticien hospitalier copilote de la transformation écologique
Dr Franck BLADOU, chirurgien urologue, chef du pôle de chirurgie
Mme Diane PAPUCHON, cadre de santé en cardiologie interventionnelle
Mme Isabelle PIDOUX, infirmière en cardiologie interventionnelle
Mme Aurélie FRESSELINAT, pharmacienne, Praticien hospitalier responsable du service Pharmacie
des dispositifs médicaux,
M. Sami YENI, pharmacien, Praticien hospitalier service Pharmacie des dispositifs médicaux
M. Raphaël YVEN, secrétaire général du CHU, directeur de la transformation écologique
Mme Agnès LASHERAS-VAUDUIN, responsable de l'unité prévention et contrôle des infections au
service d'hygiène hospitalière et référente hygiène pour la transformation écologique
Mme Cécile ANDICOECHEA, ingénieure transformation écologique
M. Xavier COPPEAUX, référent gestion des déchets
Mme Estelle OUSSAR, directrice Nouvel hôpital et ressources opérationnelles
Centre Hospitalier Universitaire de Clermont Ferrand
Pr Valérie SAUTOU, professeure des Universités, Praticien hospitalier, cheffe de pôle pharmacie,
Gérant de la pharmacie à usage intérieur
Mme Valérie DURAND-ROCHE, directrice générale du CHU de Clermont Ferrand
Mme Christine ROUGIER, directrice générale adjointe du CHU de Clermont Ferrand
Mme Audrey ENGUIX, pharmacienne Praticien hospitalier, Dispositifs médicaux, Coordonnateur
du groupement d?achat PharmAuvergne
M. Adrien BIARD, pharmacien, Praticien hospitalier, Chef du service Dispositifs Médicaux Stériles
Mme Delphine OUDOUL, pharmacienne, Praticien hospitalier, Cheffe de service de la Stérilisation
Mme Steffi CALLAND, pharmacienne assistante spécialiste, service de stérilisation
M. Rudy CHAUVEL, directeur des affaires juridiques et de la transition écologique
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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Centre Hospitalier Universitaire de Nîmes
M. Jean-Marie KINOWSKI, pharmacien gérant de la pharmacie à usage intérieur, Praticien
hospitalier
Mme Virginie CHASSEIGNE, pharmacienne, Praticien hospitalier
Mme Ninon ROUVIERE, pharmacienne assistante spécialiste
Centre Hospitalier Universitaire de Strasbourg
Pr Patrick PESSAUX, chirurgien digestif aux Hôpitaux Universitaires de Strasbourg, président de
l?Association Française de Chirurgie
Agence Générale des Equipements et Produits de santé (AGEPS), Assistance Publique, Hôpitaux de
Paris (AH-HP)
M. Renaud CATELAND, directeur de l?AGEP
Mme Estelle PLAN, directrice des achats
Pr Pascal PAUBEL, pharmacien, Professeur des Université, Praticien hospitalier, chef de service
évaluations pharmaceutiques et bon usage
Mme Suzanne HAGHIGHAT, pharmacienne, Praticien hospitalier, responsable de l?évaluation et
achat des dispositifs médicaux
Fédération hospitalière de France (FHF)
M. Rudy CHOUVEL, directeur adjoint du CHU de Clermont Ferrand, chargé de mission transition
écologique à la FHF
M. Jean-François HUSSON, pharmacien, Praticien hospitalier, chef de service de la pharmacie du
Centre Hospitalier de Blois, chargé de mission produits de santé à la FHF
Mme Cécile CHEVANCE, responsable pôle Offre de soins, Finances, FHF Data, Recherche et e-
santé (OFFRES) à la FHF
Mme Dominique GOEURY, pharmacienne, chargée de mission à la FHF
GIP RESAH, réseau des acheteurs hospitaliers
M. Dominique LEGOUGE, président du GIP RESAH
UniHA, la coopérative des acheteurs hospitaliers
M. Walid BEN BRAHIM, directeur général
Mme Véronique BERTRAND, directrice générale adjointe, directrice de l?offre
M. Sami YANI, pharmacien Praticien hospitalier, CHU de Bordeaux
Mme Marion CASTEL-MOLIERES, pharmacienne, Praticien hospitalier, CHU de Toulouse
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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Sociétés savantes, syndicats et ordres
Académie Nationale de Pharmacie
M. Pierre-Yves CHAMBRIN, pharmacien Praticien hospitalier, Agence générale des équipements
et des produits de santé (AGEPS), Assistance Publique, Hôpitaux de Paris (AP-HP)
Conseil National de l?ordre des pharmaciens
Mme Carine WOLF-THAL, présidente du Conseil national de l?ordre des pharmaciens
M. Patrick RAMBOURG, président du Conseil central
Mme Anne BERTHELOT, directrice adjointe de l?exercice professionnel et du Cespharm
Personnalité qualifiée
Pr Gilles AULAGNER, pharmacien hospitalier, Professeur des Université, ancien Président de
l?Académie Nationale de Pharmacie
Syndicat Nationale de l?Industrie des technologues Médicales (SNITEM)
Mme Cécile VAUGELADE, directrice affaires technico-règlementaires
Observatoire du médicament, des dispositifs médicaux et de l?innovation thérapeutique (OMEDIT)
Ile de France
Mme Patricia LE GONIDEC, pharmacienne, Praticien hospitalier, Responsable de l?OMEDIT IDF
EURO-PHARMAT
Mme Isabelle LE DU, pharmacienne Hospitalière, Présidente d?Euro-pharmat
M. Dominique THIVEAUD, pharmacien Hospitalier, ex-Président d?Euro-Pharmat
Société Française d?Hygiène Hospitalière (SF2H)
Dr Pierre PARNEIX, président de la SF2H, Centre d?appui à la prévention des infections
nosocomiales (CPIAS), Nouvelle Aquitaine
Société Française des sciences de la stérilisation (SF2S)
M. Christophe LAMBERT, président de la SF2S
M. Marc LAURENT, vice-Président de la SF2S
Autres entreprises et associations
Organisme Notifié GMED ? LNE
M. Lionel DREUX, président du GMED
Mme Béatrice LYS, directrice Technique du GMED
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RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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The Shift Projet
Mme Marie KERNEC, directrice EHESP international, bénévole au Shift Project
Mme Laurie MARRAULT, cheffe de projet santé
Agence Primum Non Nocere
M. Olivier TOMA, fondateur de l?Agence Primum Non Nocere
ECOVAMED
M. Sébastien TAILLEMITE, président d?ECOVAMED
France Assos Santé, la voie des usagers
Mme Catherine SIMONIN, membre du bureau de France Assos Santé
M. Pascal SELLIER, association de familles de Traumatismes Crâniens, Représentant des usagers à
la CNEDIMTS
M. Yann MAZENS, chargé de mission produits et technologies de la santé à France Assos Santé
M. Jean-François THEBAUT, vice-président de la Fédération Française des Diabétiques
M. Gilbert BOUNAUD-DEVILLERS, association des porteurs de défibrillateurs cardiaques
Johnson & Johnson MedTech
Mme Megane PETITJEAN, responsable du département qualité JJ MedTech France
M. Olivier GRUMEL, responsable affaires règlementaires JJ MedTech France
M. François GANDEMET, directeur général JJ MedTech France
Fédération nationale des activités de la dépollution et de l?environnement
Clotilde VERNON : Responsable recyclage et filières REP
Valentine BALOCHE : Chargée de mission collecte
Fédération professionnelle des entreprises de recyclage
Léonard NEUVILLE : Chef de projet recyclage, énergie et décarbonation
DASTRI : éco organisme national
Laurence BOURET : Déléguée générale
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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LETTRE DE MISSION
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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PUBLIÉ
Synthèse
Recommandations de la mission
Sommaire
Rapport
1 Le périmètre et les modalités de retraitement à titre expérimental des DMUU devront être déterminés en l?absence de filière industrielle en France
1.1 Seule une entreprise, Vanguard, localisée en Allemagne, est susceptible de retraiter des DMUU dans les deux prochaines années
1.1.1 Le cadre expérimental retenu par la LFSS 2024 n?est pas de nature à favoriser l?émergence d?une filière industrielle de retraitement en France
Recommandation n 1 Sur la base de l?évaluation de l?expérimentation inscrite à l?article 66 de la LFSS pour 2024, donner rapidement de la visibilité aux industriels français sur le calendrier et le périmètre d?une éventuelle autorisation pérenne du re...
1.1.2 Vanguard a mis en place depuis une vingtaine d?années un processus spécifique de retraitement de DMUU sur trois sites en Allemagne
1.2 Le périmètre des DMUU à retraiter dans le cadre de l?expérimentation est contraint par le catalogue de Vanguard
1.2.1 Ce catalogue, constitué à 98 % de cathéters d?électrophysiologie, inclut 74 références avec marquage CE utilisées en France
Recommandation n 2 Circonscrire le périmètre des DMUU retraités dans le cadre de l?expérimentation à ceux qui présentent un marquage CE
1.2.2 Le recours à ces cathéters retraités devrait engendrer des économies annuelles allant de 35 à 59 % du coût d?achat de ces DMUU neufs selon le circuit retenu par les établissements de santé
2 Le cahier des charges de l?expérimentation devra préciser les critères de sélection des établissements de santé, le processus d?achat des DM retraités et les modalités d?information des patients
2.1 La participation des établissements de santé doit reposer sur une adhésion des professionnels concernés à l?expérimentation et à une réduction de l?empreinte écologique des DM
2.1.1 Plusieurs critères pourraient être pris en compte pour choisir les quatre établissements de santé qui participeront à l?expérimentation
2.1.2 L?adhésion des professionnels concernés à la démarche dans le cadre une réduction de l?empreinte écologique des DM est un critère prioritaire
Recommandation n 3 Choisir des établissements de santé avec des statuts différents et une activité d?électrophysiologie suffisante, dont les professionnels adhèrent à l?expérimentation dans le cadre d?une réduction de l?empreinte écologique des DM
2.2 Un marché groupé pourrait être envisagé selon des modalités à déterminer après expertise des accords conclus par chaque établissement de santé avec les fabricants de cathéters neufs
2.2.1 La mission préconise que le retraitement des DMUU se fasse en circuit « ouvert » plutôt que « fermé »
2.2.2 Un dialogue devrait être engagé avec les fabricants de cathéters neufs, qui pourrait déboucher le cas échéant sur un avenant aux accords-cadres
Recommandation n 4 Sous réserve de l?expertise juridique des accords-cadres entre chaque établissement de santé et les fabricants de cathéters neufs, privilégier le retraitement en circuit « ouvert » et dissocier les services fournis de l?achat des co...
2.3 Le processus logistique associé au retraitement ne pose pas de difficultés particulières, avec un point d?attention néanmoins concernant l?information des patients
2.3.1 Ce processus, qui devrait a priori représenter une surcharge de travail limitée, doit reposer sur un protocole partagé de décontamination et garantir la traçabilité des DMUU retraités
Recommandation n 5 Assurer la conformité du contrat établi entre les établissements de santé et l?entreprise de retraitement avec le protocole de décontamination établi par la société française d?hygiène hospitalière
Recommandation n 6 Mettre en place un dispositif spécifique de traçabilité permettant le suivi des DMUU retraités utilisés pour chaque patient
2.3.2 Le déploiement de l?expérimentation doit s?accompagner d?un effort global de pédagogie avec un système d?« opt out » pour les patients
Recommandation n 7 Associer les représentants des usagers à l?élaboration d?un document national d?information à partager avec les patients qui devront manifester expressément leur opposition en cas de refus d?utilisation d?un DMUU retraité
3 Le retraitement doit être mis en perspective avec les autres leviers de réduction de l?empreinte écologique des produits de santé qui exigent des moyens et une gouvernance à la hauteur des enjeux
3.1 Des établissements de santé mobilisent de façon encore isolée et non hiérarchisée plusieurs leviers de réduction de l?empreinte écologique des DM
3.1.1 L?évaluation de l?expérimentation inscrite en LFSS 2024 devra en particulier confirmer l?intérêt écologique relatif du retraitement des DMUU
Recommandation n 8 Allouer une partie des financements prévus à l?article 66 de la LFSS pour 2024 à l?évaluation de l?expérimentation par un prestataire maîtrisant la méthodologie de l?analyse de cycle de vie
3.1.2 Le ministère de la santé doit prioriser la mise en oeuvre d?autres leviers de réduction de l?empreinte écologique des DM, et accompagner le cas échéant leur passage à l?échelle
Recommandation n 9 Sur la base d?une expertise de l?intérêt écologique des différentes actions engagées par les établissements de santé, assurer un passage à l?échelle des leviers les plus pertinents de réduction de l?empreinte écologique des DM
3.2 Seuls une gouvernance et des moyens à la hauteur des enjeux crédibiliseront les engagements du ministère de la santé en matière de transition écologique
3.2.1 Le besoin d?accompagnement des établissements de santé justifie des moyens humains et financiers dans le cadre d?une gouvernance qui reste à définir
3.2.2 Au regard de l?expertise nécessaire pour hiérarchiser les leviers de réduction de l?empreinte écologique, cette gouvernance doit avoir une dimension interministérielle plus affirmée
Recommandation n 10 Faire reposer la « task force » sur la transition écologique en santé sur des moyens pérennes dont le calibrage et la gouvernance, à dimension interministérielle, doivent faire l?objet de travaux spécifiques
Recommandation n 11 Élargir aux DM les travaux engagés par la Direction générale des entreprises, en lien avec l?objectif de relocalisation des industries de santé, pour calculer et diminuer l?impact carbone des médicaments
LISTE DES ANNEXES
ANNEXE 1 : Identification d?une filière industrielle de retraitement et périmètre des DMUU éligibles
1 Le cadre expérimental retenu en LFSS pour 2024 ne favorise pas l?émergence d?une filière industrielle française de retraitement
1.1 L?interdiction, réaffirmée en 2022, de retraiter les DMUU en France est le principal facteur d?explication de l?absence de filière industrielle sur le territoire national
1.2 Les investissements nécessaires à la constitution d?une telle filière rendent inenvisageable son émergence dans un délai de deux ans, a fortiori dans un cadre expérimental
2 Vanguard, localisée en Allemagne, est la seule entreprise susceptible de retraiter des DMUU dans le cadre de l?expérimentation
2.1 Parmi les trois entreprises allemandes de retraitement, seule Vanguard possède des références marquées CE commercialisées à l?étranger
2.2 La mission a observé sur site le processus mis en oeuvre qui consiste à « re-fabriquer » un DM strictement équivalent au DM neuf
3 Le périmètre de l?expérimentation devrait être limité à la soixantaine de références de cathéters d?électrophysiologie marquées CE et retraitées par Vanguard
3.1 En théorie, sur le plan sanitaire, le futur DCE pourrait prévoir des critères d?exclusion fondés sur le Règlement européen de 2017
3.2 En pratique, sur les 600 références retraitées par Vanguard, seules 250 sont marquées CE, dont 74 sont des cathéters d?électrophysiologie utilisés par les hôpitaux français
4 Le retraitement engendrera dans les établissements de santé des économies par rapport au coût annuel des cathéters neufs circuit comprises entre 35 et 59 % d?économie selon le circuit choisi
4.1 En circuit ouvert, pour 25 utilisations, le retraitement diminue d?environ 60 % le coût annuel des cathéters
4.2 En circuit fermé, les économies obtenues grâce au retraitement sont plus difficiles à calculer et moindres qu?en circuit « ouvert »
ANNEXE 2 : Modalités d?expérimentation du retraitement des DMUU dans quatre établissements de santé
1 La participation des établissements de santé à l?expérimentation exige en premier lieu l?adhésion de l?ensemble des professionnels concernés
1.1 Différents critères sont envisageables pour sélectionner les établissements de santé participant à l?expérimentation
1.2 La priorité doit être accordée aux établissements engagés dans une démarche partagée de réduction de leur empreinte écologique
2 Un marché commun de retraitement ou d?achat de DMUU devra être conclu dans le respect du code de la commande publique
2.1 Les deux circuits possibles « ouvert » ou « fermé » de retraitement des DMUU présentent des avantages et inconvénients respectifs
2.2 Un échange avec les fournisseurs de DMUU neufs devra être engagé et déboucher le cas échéant sur un avenant au marché initial
3 Un circuit logistique devra être mis en place avec un impact a priori limité sur la charge de travail des professionnels de santé
3.1 Le circuit logistique sera défini avec l?entreprise de retraitement en tenant compte du cadre juridique applicable aux déchets
3.2 Au regard de la simplicité relative de ce circuit, la surcharge de travail devrait rester limitée
4 Les modalités d?information du patient devront être ajustées pour ne pas faire obstacle à la mise en oeuvre de l?expérimentation
4.1 La LFSS pour 2024 prévoit l?obligation d?informer les patients, qui peuvent s?y opposer, quand un DMUU retraité va être utilisé
4.2 Une fois correctement informé, le patient pourrait s?opposer à l?utilisation d?un DMUU retraité dans une logique d?« opt out »
5 Les crédits prévus par la LFSS 2024 pourraient financer une évaluation externe de l?expérimentation sur la base des critères définis en cahier des charges
5.1 L?évaluation de l?expérimentation doit être réalisée par un acteur expert de l?analyse du cycle de vie des produits de santé
5.2 Cette évaluation devra permettre d?apprécier l?intérêt du retraitement sur les plans sanitaire, écologique, économique et humain
ANNEXE 3 : Éléments de parangonnage sur le retraitement des DMUU en Europe
1 Le retraitement des DMUU dans les neuf États membres de l?UE présente des caractéristiques différentes
1.1 À fin octobre 2023, neuf États membres ont autorisé le retraitement des DMUU tandis que quinze l?ont interdit
1.2 Les modalités d?application de l?article 17 du RMD sont difficiles à apprécier et globalement hétérogènes
2 Focus sur la Suède, l?Espagne et le Royaume-Uni à partir des retours des Conseillers aux affaires sociales
2.1 Historique et cadre du retraitement des DMUU
2.2 Critères économiques et écologiques
2.2.1 Critères économiques
2.2.2 Critères écologiques
2.3 Périmètre des DMUU éligibles au retraitement
2.4 Organisation du retraitement
2.4.1 Espagne
2.4.2 Royaume Uni
2.4.3 Suède
2.5 Filières de retraitement
2.6 Traçabilité des DMUU
2.7 Information des patients
3 Le retraitement des DMUU est aussi développé en Amérique du Nord, particulièrement aux USA
3.1 États-Unis
3.2 Canada
ANNEXE 4 : Leviers de réduction de l?empreinte écologique des dispositifs médicaux
1 Le retraitement des DM à usage unique est le levier de décarbonation mis en exergue par la feuille de route « planification écologique » du ministère de la santé
1.1 Si les études françaises sur l?empreinte écologique des DM sont rares, ils représenteraient 20 % des émissions carbone du système de santé
1.1.1 L?évaluation de l?empreinte écologique des DM repose sur plusieurs méthodes sans encadrement par le ministère de la santé
1.1.2 L?empreinte écologique des DM s?explique surtout par le circuit de production de leurs intrants qui incluent souvent des métaux rares
1.2 Le retraitement des DM peut contribuer à réduire leur empreinte écologique mais n?est pas le levier le plus impactant
1.2.1 La feuille de route recense plusieurs leviers de décarbonation des DM en accordant une visibilité particulière à leur retraitement
1.2.2 La primauté accordée à ce levier est excessive au regard de son impact relatif sur l?empreinte écologique et de ses modalités de mise en oeuvre
2 La gouvernance et les moyens alloués à la planification écologique du système de santé ne sont pas à la hauteur de l?enjeu de décarbonation des DM
2.1 La faiblesse du pilotage national de cette stratégie engendre un risque de décalage croissant avec les initiatives constatées à l?hôpital
2.1.1 L?Anap assume un rôle d?opérateur de la feuille de route mais son portage reste fragile au sein de l?administration centrale et déconcentrée
2.1.2 Or les initiatives se développent dans une partie des établissements de santé sans accompagnement suffisant de la part de l?État
2.2 La mise en oeuvre d?une stratégie crédible de réduction de l?empreinte écologique des DM exige aussi une collaboration interministérielle renforcée
2.2.1 Dans une logique de subsidiarité, le soutien des administrations en charge de la transition écologique à la décarbonation du système est modeste
2.2.2 La DGE assume un leadership fondé sur le double objectif de relocalisation des industries de santé et de décarbonation
3 En parallèle de l?expérimentation, la mise en oeuvre des autres leviers de réduction de l?empreinte écologique des DM est indispensable et nécessite un appui national renforcé
3.1 Conformément aux dispositions interministérielles, les achats hospitaliers, qui constituent un levier majeur, doivent contribuer davantage à la réduction de l?empreinte écologique des DM
3.1.1 En dépit d?obligations croissantes, le levier des achats reste encore sous-utilisé par les hôpitaux pour diminuer leur empreinte environnementale
3.1.2 À l?exemple du système de santé britannique, les achats hospitaliers devraient constituer le principal levier de décarbonation des DM
3.2 Le retraitement des DM à usage unique, qui sont définis comme tels par les seuls industriels, doit aussi s?accompagner du développement des DM à usage multiple
3.2.1 L?évolution de la part respective des DM à usage unique et des DM à usage multiple ne fait l?objet d?aucun suivi au niveau national
3.2.2 Le développement de l?usage multiple est souvent conditionné dans les établissements de santé à une organisation et des moyens adaptés
3.3 La formation des personnels hospitaliers doit contribuer en particulier à faire converger davantage les démarches de pertinence et de sobriété des soins
3.3.1 Le développement de l?éco-responsabilité en matière de soins peut contribuer à renforcer l?efficience du système de santé
3.3.2 La sensibilisation des personnels hospitaliers aux enjeux liés à la transition écologique dépend encore largement des directions d?établissement
3.4 Enfin, le tri et la revalorisation des déchets issus des DM, qui dépendent aujourd?hui largement des décisions locales, doivent faire l?objet d?une stratégie nationale
3.4.1 Les établissements de santé sont soumis à des obligations croissantes en matière de gestion des déchets, en partie communes au secteur tertiaire
3.4.2 Les établissements de santé sont peu incités et accompagnés dans la réduction et la valorisation des déchets, en particulier ceux issus des DM
ANNEXE 5 : Résultats du questionnaire adressé par la mission aux établissements de santé
1 Rappel du contexte du questionnaire
2 Résultats
2.1 Les données des établissements : statuts et achats de DM
2.1.1 Nombre d?établissements répondant et leur statut
2.1.2 Les achats de DM
2.2 La politique menée par les établissements sur la réduction des gaz à effet de serre (GES)
2.2.1 La réalisation du bilan de gaz à effet de serre
2.2.2 Intégration de critères environnementaux dans la politique achat de DM
2.2.3 Le tri des déchets de DM
2.2.3.1 Filières de récupération ou de recyclage des DMUU
2.3 Les établissements et l?expérimentation inscrite à l?article 29 du PLFSS
2.3.1 Les CHU et les EPBL répondants sont les plus intéressés pour participer à l?expérimentation
2.3.2 Le choix des DM se porte vers les sondes d?électrophysiologie, mais il existe une confusion entre retraitement et recyclage
2.3.3 Les freins identifiés
2.4 Les facteurs de réussite de cette expérimentation
2.5 Les indicateurs de suivi de l?expérimentation
2.6 Les autres leviers prioritaires pour diminuer l?empreinte carbone des DM
3 Conclusion
Liste des personnes rencontrées
Lettre de mission
INVALIDE) (ATTENTION: OPTION sont
liés, d?une part, aux dispositifs eux-mêmes (structure semi-cristalline des polymères, multiplicité
des matériaux constitutifs des DM) et, d?autre part, à l?utilisation clinique qui expose le matériel à
une contamination très importante et difficilement réversible au niveau des matériaux
synthétiques. Enfin, cette instruction précise un troisième risque lié au recyclage avec présence
de traces de produits décontaminants et/ou nettoyant pouvant entrainer la formation de
produits de toxiques au cours de la stérilisation. Malgré ces rappels, la re-stérilisation de DMUU
était encore pratiquée. Une clinique localisée à Nîmes avait été poursuivie pour tromperie des
consommateurs sur les qualités des prestations de soins, car elle procédait à la re stérilisation par
l?oxyde d?éthylène de sonde d?électrophysiologie à usage unique.
[45] Alors que l?article 17 du Règlement européen 2017/74558 fournit un cadre pour autoriser le
retraitement des DMUU au niveau national, la France a réaffirmé en 2022 au niveau législatif cette
interdiction. Ce Règlement européen relatif aux dispositifs médicaux (dit RMD) définit le
retraitement, qui doit être autorisé au préalable par la législation nationale, comme « le procédé
dont fait l?objet un dispositif usagé pour en permettre une réutilisation sûre, y compris le nettoyage,
la désinfection, la stérilisation et les procédures connexes (?) le rétablissement de ses
caractéristiques techniques et fonctionnelles en matière de sécurité ». Le RMD prévoit que le
retraitement peut être réalisé par un établissement de santé, ou par une entreprise externe. La
personne physique ou morale qui assure le retraitement d?un DMUU est considérée comme son
fabricant et doit s?acquitter des obligations qui lui incombent à ce titre, dont l?obtention d?un
marquage CE59. Toutefois, le RMD prévoit également la possibilité, pour les seuls DMUU retraités
et utilisés par les établissements de santé, ou retraités par une entreprise externe à la demande
d?un établissement de santé, de ne pas appliquer l?ensemble des règles relatives aux obligations
des fabricants sous réserve que certaines garanties soient respectées (cf. tableau 1). Le respect de
58 Article 17 du Règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 relatif aux
dispositifs médicaux.
59 Le marquage CE fixe les ?exigences essentielles? de santé et de sécurité auxquelles doivent se conformer
les fabricants pour garantir la sécurité et la fiabilité de leurs dispositifs mis sur le marché européen. Le
marquage CE apposé par le fabricant est le garant de cette conformité.
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
- 41 -
ces spécifications sanitaires doit faire l?objet d?un audit externe indépendant annuel aux fins de
certification de l?entreprise ou établissement de retraitement par un organisme notifié. Elles sont
définies par le Règlement d?exécution du 19 août 202060 qui s?applique depuis le 26 mai 2021. C?est
sans doute l?entrée en vigueur de ce texte, qui rend accessible le retraitement en dehors du cadre
du marquage CE, qui a incité le Gouvernement français a rappelé en avril 2022, cette fois au niveau
législatif, l?interdiction de retraiter les DMUU ou de commercialiser et utiliser des DMUU retraités
en France61 .
Tableau 8 : Trois options de retraitement prévues par le Règlement 2017/745
Options Où est effectué le
retraitement ?
Qui valide ? Où sont utilisés les
DMUU ?
1 Etablissement de santé Un organisme notifié
certifie la conformité des
procédés de retraitement
aux spécifications
communes
Les DMUU restent la
propriété de
l?établissement de santé
qui les utilise
2 Entreprise externe (à la
demande d?un
établissement de santé)
Un organisme notifié
certifie la conformité des
procédés de retraitement
aux spécifications
communes
Les DMUU restent la
propriété de
l?établissement de santé
qui les utilise
3 Entreprise externe qui a le
statut de fabricant
Les DM retraités sont
conformes aux exigences
essentielles (marquage CE)
du règlement DM, la
conformité est certifiée
par un organisme notifié
Les DMUU sont vendus à
une entreprise externe qui
les retraitent et les vend
ensuite comme nouveau
DM à n?importe quel
établissement de santé
Source : Mission.
60 Règlement d?exécution (UE) 2020/1207 de la Commission du 19 août 2020 portant modalités d?application
du règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les spécifications
communes pour le retraitement des dispositifs à usage unique. Ce texte précise le mode de
contractualisation avec une entreprise externe, les règles en matière de personnels, locaux et équipements,
la validation du procédé de retraitement, la détermination du nombre maximal de cycles, la description de
la documentation technique, l?établissement de procédures des différentes étapes du cycle de retraitement,
la mise en place d?un système de gestion de la qualité ainsi que l?organisation de la traçabilité. La conformité
avec les spécifications communes doit être certifiée par un organisme notifié. À la date de rédaction du
rapport, aucun organisme notifié ne vérifie le respect des spécifications communes.
61 L?article 10 de l?ordonnance n°2022-582 du 20 avril 2022, codifié à l?article L. 5211-3-2 du code de la santé
publique, dispose que « le retraitement de dispositifs à usage unique mentionné à l?article 17 du règlement (UE)
2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017, leur mise sur le marché et leur utilisation sont
interdits ».
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1.2 Les investissements nécessaires à la constitution d?une telle filière
rendent inenvisageable son émergence dans un délai de deux ans, a
fortiori dans un cadre expérimental
[46] Au regard des investissements nécessaires et du délai pour se conformer au cadre juridique
européen, il est improbable qu?une filière industrielle se constitue en France sous deux ans :
? sur le plan opérationnel, il est nécessaire de de mettre en place un processus qui ne
s?assimile pas seulement à une opération de stérilisation mais bien à une opération de « re-
fabrication » ou « remanufacturing » en anglais (cf. infra). Ce processus implique la création
d?une chaîne d?activités dans des locaux adaptés (comprenant des capacités de
stérilisation) et la formation des personnels intervenant aux différentes étapes62 ; DMUU
? sur le plan juridique, une entreprise qui souhaiterait engager une activité de retraitement
en France devrait au préalable obtenir auprès d?un organisme notifié (ON)63, soit un
marquage CE, soit une certification du respect des spécifications communes, ce qui
représente des démarches exigeantes (incluant en particulier la constitution d?une
documentation technique présentant les preuves permettant de démontrer la qualité et la
sécurité du dispositif dans le cas du marquage CE, cf. schéma 1) dont le délai
d?aboutissement est aujourd?hui estimé par les représentants du secteur des DM à environ
deux ans64.
62 Outre la nécessité de disposer de personnels ayant pour certains des qualifications rares, l?industriel devra
investir notamment dans des unités capables d?inspecter, d?assurer la maintenance et la réparation des DM
et de mettre en place des essais de fonctionnalités des DM. La méthode de stérilisation peut, elle aussi,
obliger l?industriel à mettre en place des infrastructures spécifiques particulièrement onéreuses en
investissement et en maintenance. C?est le cas si la stérilisation est réalisée par l?oxyde d?éthylène, substance
classée carcinogène de catégorie 1B et mutagène 1B. Elle doit alors se dérouler dans des chambres étanches
et être suivie d?une phase de dégazage pour éliminer les résidus de gaz toxiques. Cette stérilisation est très
largement utilisée pour les DMUU car elle s?effectue à des niveaux de températures compatibles avec les
matériaux composants le DM. Même s?il existe en France des entreprises qui stérilisent de façon industrielle
les DM, elles ne sont pas équipées pour assurer toutes étapes décrites supra et ne sont pas engagées dans
l?obtention d?un marquage CE.
63 En fonction de la classe de risque du dispositif, un organisme habilité indépendant (dit ?notifié?) intervient
dans le processus de marquage CE. Celui-ci évalue la conformité du dispositif et le système qualité du
fabricant et délivre, en cas d?évaluation satisfaisante, un certificat de conformité permettant au fabricant
d?apposer le marquage CE sur son dispositif. Le marquage CE a une durée de validité limitée. La pertinence
de la documentation technique et l?organisation du fabricant doivent faire l?objet de nouvelles évaluations
périodiques par l?organisme notifié.
64 Ce délai s?explique en partie par le fait que tous les fabricants de DM sont en cours de demande de « re-
marquage CE » par un ON pour continuer de commercialiser les DM en Europe. Les industriels devront avoir
fait une demande formelle avant fin mai 2024 et signé un contrat avec un ON avant fin septembre 2024.
Alors qu?en 2012, 87 ON exerçaient en Europe, à fin décembre 2022, 36 ON avaient été certifiés dont un
seulement en France.
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Schéma 2 : Étapes clés du processus de marquage CE
Source : Snitem.
[47] Par ailleurs, le cadre expérimental retenu en France, inédit en Europe, n?est pas propice à
l?émergence, pourtant souhaitable, d?une filière localisée sur le territoire national. Sur les neuf
États membres de l?UE ayant autorisé le retraitement des DMUU, aucun n?a prévu au préalable
une phase d?expérimentation. Selon l?ensemble des acteurs rencontrés par la mission, en
particulier la Direction générale des entreprises, il n?est pas plausible qu?un acteur engage les
investissements nécessaires pour entrer sur un tel marché sans assurance sur sa pérennité. Or,
l?article 29 de la LFSS 2024, qui crée la possibilité d?expérimenter le retraitement des DM, au plus
tard en novembre 2024 et pour une période de deux ans, renvoie à un rapport d?évaluation de
l?expérimentation « afin notamment de déterminer l?opportunité et, le cas échéant, les conditions
de sa pérennisation et de son extension ». En d?autres termes, aucun industriel ne peut aujourd?hui
tabler sur une généralisation du retraitement des DMUU en France, ni apprécier le périmètre du
marché auquel il pourrait accéder.
[48] Ce constat a été confirmé à la mission lors de l?entretien avec la société Johnson & Johnson
qui réalise le retraitement de DMUU aux Etats-Unis et au Canada (société Sterilmed). Cette
société est également implantée en France, mais ne dispose pas des infrastructures pour réaliser
des opérations de retraitement. Cependant, la possibilité de retraitement inscrite dans le cadre
du règlement européen, a permis d?ouvrir une réflexion de la part de J&J pour s?implanter en
Europe. Une usine pilote située aux Pays-Bas est en réflexion pour 2024.
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2 Vanguard, localisée en Allemagne, est la seule entreprise
susceptible de retraiter des DMUU dans le cadre de
l?expérimentation
2.1 Parmi les trois entreprises allemandes de retraitement, seule Vanguard
possède des références marquées CE commercialisées à l?étranger
[49] En l?absence d?une filière française de retraitement, il est nécessaire de se tourner vers les
entreprises localisées en UE, en l?espèce en Allemagne, qui assurent aujourd?hui une telle activité,
dont seule une, Vanguard, dispose de références marquées CE qu?elle exporte. Le tableau ci-
dessous synthétise les principales informations recueillies par la mission au sujet de ces trois
entreprises, sachant que des contacts n?ont pu être établis qu?avec Vanguard. Il en ressort que
Vanguard est à la fois l?entreprise la plus importante (en nombre de sites, puisqu?elle en possède
trois en Allemagne, et d?employés) mais surtout la seule, a priori, qui dispose de références de
DMUU retraités avec le marquage CE. Selon les représentants de Vanguard, avec lesquels la
mission a échangé le 14 novembre dernier dans le cadre d?une visite du site de retraitement
localisé à Berlin, les deux autres entreprises ne commercialiseraient leurs DMUU retraités
qu?auprès d?établissements de santé allemand car elles s?inscrivent dans le seul cadre des
spécifications communes, et non du marquage CE. À l?inverse, les représentants de Vanguard ont
communiqué à la mission un catalogue de DMUU retraités incluant des références marquées CE
(cf. infra) que l?entreprise exporterait en particulier au Royaume-Uni et en Israël.
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Tableau 9 : Comparatifs des trois entreprises allemandes de retraitement identifiées
par la mission
Vanguard Meditreat Vecomed
Date de création 1998 2009 NC
Sites Berlin
Aschersleben
Friedeburg
Gelnhausen Schönebeck
Nombre d?employés 200 Moins de 50 Moins de 50
Retraitement des DMUU avec
marquage CE
Oui Non NC
Retraitement des DMUU
conformément aux
spécifications communes
Oui Oui NC
Type de DMUU retraités Electrophysiologie et
chirurgie
Electrophysiologie et
sondes oesophagienne
NC
Nombres de DMUU retraités
en 2022
270 000 NC NC
Réalisation de retraitement
pour des pays hors Allemagne
Oui65 Non NC
Source : Mission.
2.2 La mission a observé sur site le processus mis en oeuvre qui consiste à
« re-fabriquer » un DM strictement équivalent au DM neuf
[50] Dans le cadre de son déplacement à Berlin, la mission s?est rendue sur le site de retraitement
de Vanguard, ce qui lui a permis d?observé les différentes étapes du processus mis en oeuvre. En
effet, le « cycle de retraitement » inclut plusieurs étapes, et pour chacune d?elles, une procédure
est écrite et validée. Le système de gestion de la qualité? permet de retrouver l?ensemble des
données enregistrées. Un système de traçage permet l?identification du DMUU tout au long de
leur durée de vie. Il permet en particulier de contrôler le nombre de retraitements. Les dispositifs
retraités (identifiés par leur IUD66, Unique Device Identification) peuvent être reliés au numéro de
lot initial notamment dans le cadre de procédure de matériovigilance.
65 A minima au Royaume-Uni et en Israël.
66 Article 27 du règlement 2017/745. L?identifiant unique des dispositifs (IUD) est un code numérique ou
alphanumérique unique lié à un dispositif médical qui permet l'identification claire et formelle de dispositifs
donnés sur le marché et qui facilite leur traçabilité. L?IUD est constitué des éléments suivants : un identifiant
«dispositif» (IUD-ID) et un identifiant «production» (IUD-IP). Ces éléments permettent d?accéder à des
informations utiles sur le dispositif. La spécificité de l?IUD est d?améliorer la traçabilité des dispositifs, de
faciliter le rappel des dispositifs, de lutter contre la contrefaçon et d?améliorer la sécurité des patients. L?IUD
viendra compléter, et non remplacer, les exigences existantes en matière d?étiquetage des dispositifs
médicaux.
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[51] Les observations réalisées sur site par la mission ne s?assimilent en aucun cas à un audit du
processus ou de l?installation de retraitement. Néanmoins, elles confirment l?idée que le
retraitement est une activité spécifique, distincte de la seule stérilisation. Elles tendent aussi à
laisser penser que les DMUU retraités par Vanguard (i) sont testés et inspectés (ii) répondent aux
spécifications et exigences en matière de nettoyage/biocompatibilité, de performance et de
stérilité (iii) sont tracés par une méthode laser qui grave un numéro de lot enregistré dans une
base de données permettant de suivre le nombre de retraitements effectués.
Tableau 10 : Description des étapes du processus mis en place par Vanguard
Etape Processus
Collecte des DM
souillés
Les établissements de santé placent les DM pré-nettoyés dans la
boite de collecte fournie par Vanguard.
Inspection et
identification
À réception, un suivi informatique avec contrôle des DM est mis en
place grâce au marquage laser avec un numéro d?identification
unique. Il permet le suivi du DM tout au long du processus jusqu?à
son acheminement vers l?établissement de santé.
Les DM non aptes au retraitement ou défectueux sont jetés.
Retraitement L'appareil est démonté, nettoyé puis remonté.
100% des DM sont contrôlés sur les volets sécurité et performance.
Ce processus comprend des contrôles visuels, une inspection
mécanique de toutes les pièces mobiles et la vérification de la
fonctionnalité électrique de l'appareil remis à neuf.
Conditionnement
et stérilisation
Les DMUU remanufacturés sont ensuite emballés dans des sacs de
stérilisation Tyvek® et inspectés visuellement après scellement.
Tous les DM sont traités par stérilisation à basse température
(oxyde d?éthylène) pour protéger les dispositifs/composants
thermolabiles. Tous les appareils passent des tests
microbiologiques avant d'être approuvés pour la libération.
Logistique Après stérilisation, les DM sont placés dans des emballages
protecteurs et étiquetés.
Les produits sont ensuite expédiés vers les établissements de santé.
Source : Mission à partir des documents de Vanguard.
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Schéma 3 : Synthèse du processus de retraitement mis en place par Vanguard
Source : Vanguard.
[52] La robustesse du dispositif de retraitement repose essentiellement sur le nombre de tests
auxquels sont soumis les DM, qui s?élèvent selon Vanguard à une vingtaine en ce qui concerne les
cathéters d?électrophysiologie, affirmation corroborée par les observations sur site de la mission.
Ainsi, outre le procédé de nettoyage permettant d?évacuer de la lumière des cathéters des résidus
de substances, les cathéters subissent en particulier :
? une surveillance volumétrique continue ;
? des tests de fonctionnement (performance de chaque composant) ;
? des tests microbiologiques permettant de confirmer le processus de nettoyage, chaque
cathéter étant vérifié en laboratoire conformément à la norme ISO 1588367 ;
? des contrôles visuels permettant notamment de vérifier tout changement de la forme de
courbure ou tout dommage sur la longueur du cathéter, de la connexion électrique à
l?embout ;
? des contrôles de la fonctionnalité électrique, des capteurs de températures et de capacité
électrique.
67 L'ISO 15883-1:2006 spécifie les exigences générales de performances pour les laveurs désinfecteurs (LD) et
leurs accessoires destinés à être utilisés pour nettoyer et désinfecter des dispositifs médicaux réutilisables
ou tout autre article utilisé dans le contexte d'activités médicales, pharmaceutiques, dentaires et
vétérinaires. Elle spécifie les exigences de performances pour le nettoyage et la désinfection ainsi que pour
les accessoires qui peuvent être nécessaires pour atteindre les performances requises.
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Schéma 4 : Tests réalisés sur les cathéters d?électrophysiologie
Source : Vanguard.
[53] Des tests spécifiques sont aussi réalisés sur les ciseaux à ultrasons. Ils subissent des tests de
compatibilité logicielle, et des tests électroniques et mécaniques des lames. La mission a pu suivre
la réalisation par les techniciens de Vanguard de ces tests et le changement systématique des
tampons présents sur les ciseaux.
Schéma 5 : Tests réalisés sur les ciseaux à ultrasons
Source : Vanguard.
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3 Le périmètre de l?expérimentation devrait être limité à la
soixantaine de références de cathéters d?électrophysiologie
marquées CE et retraitées par Vanguard
3.1 En théorie, sur le plan sanitaire, le futur DCE pourrait prévoir des
critères d?exclusion fondés sur le Règlement européen de 2017
[54] Le Règlement 2017/745 ne précise pas le périmètre des DMUU qui peuvent faire l?objet d?un
retraitement mais dresse une liste de critères d?exclusion susceptibles d?être transposés au niveau
national. Cette approche vise à tenir compte, dans une logique de gestion des risques, de la
construction des DMUU, leurs matériaux, leurs propriétés et leur usage prévu68. Ainsi, l?article 17
du RMD dispose que « seul le retraitement de dispositifs à usage unique réputés sûrs, eu égard aux
données scientifiques les plus récentes, peut être réalisé ». Si l?évaluation de l?aptitude au
retraitement n?y est pas spécifiquement abordée, le RMD regroupe en deux catégories les critères
sur la base desquels un État membre peut exclure un DMUU du retraitement :
? les DMUU présentant un risque élevé de contamination croisée :
? émettant des rayonnements ;
? utilisés pour administrer des médicaments cytostatiques ou radiopharmaceutiques ;
? contenant des substances médicamenteuses ;
? destinés à être utilisés dans des procédures invasives sur le système nerveux central ;
? présentant un risque de transmission d?encéphalopathies spongiformes ;
? implantables ;
? les DMUU susceptibles de défectuosité notamment en raison de leur technicité :
? pour lesquels des incidents graves ont eu lieu après le retraitement et pour lesquels la
cause des incidents est liée au retraitement ou il ne peut être exclu que la cause des
incidents soit liée au retraitement ;
? fonctionnant avec des piles ou batteries qui ne peuvent pas être changées ou qui
présentent un risque de dysfonctionnement après le retraitement ;
? munis d?une mémoire de données interne nécessaire à leur utilisation et qui ne peut
pas être changée ou qui présente un risque de dysfonctionnement après le
retraitement ;
68 Pour évaluer si un dispositif à usage unique se prête au retraitement, la gestion des risques devrait tenir
compte des risques liés à la composition des matériaux, aux matériaux relargables, à la contamination
microbiologique, aux prions et aux agents de l?encéphalopathie spongiforme transmissible, aux endotoxines,
ainsi qu?aux réactions pyrogènes, allergiques et toxiques. Les caractéristiques techniques et les propriétés
géométriques des produits devraient également être prises en considération lors de l?évaluation de
l?aptitude au retraitement des dispositifs à usage unique
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? comportant des lames coupantes ou tranchantes, des forêts ou des composants
soumis à l?usure qui ne sont plus fonctionnels après la première utilisation et qui ne
peuvent pas être changés ou affûtés avant la prochaine intervention médicale.
[55] La majorité des États membres ayant autorisé le retraitement des DMUU ont intégré dans
leur droit les critères d?exclusion définis au niveau européen sans déterminer de liste positive des
DMUU éligibles au retraitement. C?est le cas de la Belgique, l?Espagne, la Suède et le Portugal.
D?autres État ont adopté une approche moins restrictive Ainsi, l?Allemagne exclut uniquement les
DMUU utilisés pour administrer des médicaments cytostatiques ou radiopharmaceutiques.
Toutefois, le retraitement des DM utilisés sur des personnes malades ou suspectées d?être
atteintes de la maladie de Creutzfeld-Jacob ou son variant n?est pas interdit mais fait l?objet
d?exigences précisant un certain nombre de méthodes à suivre ou ne pas suivre (interdiction de
certaines méthodes de stérilisation, par exemple). Les Pays Bas ont adopté une approche par le
risque prion, en interdisant l?usage de tout dispositif ayant été en contact avec les tissus à risque,
des malades à risques ou présentant des symptômes neurologiques non expliqués des DMUU
pouvant être retraités.
3.2 En pratique, sur les 600 références retraitées par Vanguard,
seules 250 sont marquées CE, dont 74 sont des cathéters
d?électrophysiologie utilisés par les hôpitaux français
[56] Compte tenu du fait (i) qu?aucune autre filière de retraitement avec un marquage CE n?est
susceptible d?émerger dans les deux prochaines années et (ii) Vanguard est la seule entreprise
susceptible de retraiter avec un marquage CE des DMUU utilisés en France dans le cadre de
l?expérimentation prévue par la LFSS, le choix des DMUU à retenir dépendra en pratique du
catalogue de l?entreprise. La mission a eu accès à ce catalogue dont l?analyse met en évidence
que :
? 98 % des DMUU retraités (procédure marquage CE ou respect des spécification communes
-SC) sont des DM utilisés au cours d?actes d?électrophysiologie (patch, cathéter de
diagnostic et d?ablation) ;
? sur les 590 références de DMUU retraités figurant au catalogue, environ 40 % (soit
245 références) disposent d?un marquage CE, tandis que les 347 références restantes
seraient conformes aux spécifications communes telles que validées, selon Vanguard, par
un organisme externe mais sans certification par un organisme notifié (à défaut d?organisme
notifié ayant accepté de s?engager dans cette démarche, selon Vanguard) ;
? sur les 245 DMUU retraités marqués CE, 241 DM sont utilisés dans les actes
d?électrophysiologie (EP) et quatre pour des actes de chirurgie.
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Tableau 11 : Catégorisation des DMUU retraités référencés dans le catalogue de
Vanguard à fin octobre 2023
Type de procédure EP Chirurgie Total
Marquage CE 241 4 245
Spécifications
communes
343 4 347
Non précisé 6 0 6
Total 590 8 598
Source : Mission sur la base des données de Vanguard.
[57] En comparant les références marquées CE du catalogue de Vanguard et celles utilisées par
trois CHU69, la mission estime que 74 références de cathéters d?électrophysiologie pourraient
faire l?objet d?un retraitement dans le cadre de l?expérimentation. En effet, au regard du caractère
non certifié par un ON du respect des spécifications communes, et compte tenu du fait que les
DMUU retraités par Vanguard sont classés au niveau de risque le plus élevé (niveau III), la mission
recommande de limiter le périmètre des DMUU retraités à ceux pour lesquels Vanguard a obtenu
le marquage CE. Etant donné que le droit européen exige un renouvellement des marquages CE
pour que les DM puissent être commercialisés jusqu?en 2027, Vanguard devra déposer une
demande d?évaluation auprès d?un organisme notifié avant le 26 mai 2024 et avoir signé le contrat
avec cet organisme notifié au plus tard le 26 septembre 2024. Les représentants de la société ont
indiqué à la mission avoir engagé les démarches nécessaires.
[58] Comme le montre le tableau ci-dessous, ces 74 références concernent deux grands types
de familles de DMUU utilisés dans le cadre de procédures d?électrophysiologie (les cathéters
d?ablation et les cathéters de diagnostics) qui, en moyenne, pourraient être retraités 3,4 fois. À
titre d?exemple, le groupe de cathéters d?ablation 4 pôles comporte 18 DMUU marqués CE
retraitables en moyenne maximum 4 fois.
69 AP-HP, Bordeaux, Clermont-Ferrand.
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Tableau 12 : Groupes de DMUU par type de procédure (marquage CE ou spécifications communes-CS) et nombre maximal de
cycles de retraitement (« reprocessing cycles »)70
Source : Mission à partir des données de Vanguard
Groupe de DMUU
Nombre de OEM
Article Description /
Article family name
Moyenne de Max.
reprocessing
cycles*
Nombre de OEM
Article Description /
Article family name
Moyenne de Max.
reprocessing cycles*
Connection cable, electrical, system 1 12 3 8,0
EP-Ablation Catheter, 3D-mapping 2 3,0
EP-Ablation Catheter, 4-pole 18 4 25 3,7
EP-Ablation Catheter, Cryo 2 2,0
EP-Ablation Catheter, irrigated SF 6 3
EP-Ablation Catheter, irrigated SF, 3D-mapping 2 3
EP-Ablation Catheter, irrigated SF, Contact force, 3D-mapping 5 2
EP-Ablation Catheter, irrigated, 4-pole 6 3
EP-Ablation Catheter, irrigated, Contact force, 3D-mapping 4 2
EP-Ablation Catheter, irrigated, Contact force, 3D-mapping, TactiCath SE 5 3,0
EP-Diagnostic Catheter, 10-pole 8 3,0
EP-Diagnostic Catheter, 4-pole 39 3,6
EP-Diagnostic Catheter, 6-pole 9 3,7
EP-Diagnostic Catheter, 8-pole 1 3,0
EP-Diagnostic Catheter, steerable, 10-pole 11 4
EP-Diagnostic Catheter, steerable, 4-pole 3 4
EP-Diagnostic Catheter, steerable, 6-pole 1 4
EP-Diagnostic Catheter, steerable, 8-pole 4 4
EP-Diagnostic Catheter, steerable/fix, Lasso/Loop, 3D-mapping 2 3 4 3,0
Introducer sheaths 3 1,0
Introducer sheaths, steerable 6 1,0
Package EP-Ablation Catheter, 3D-mapping 2 3,0
Package EP-Ablation Catheter, irrigated SF, Contact force, 3D-mapping 5 2
Package EP-Ablation Catheter, irrigated, Contact force, 3D-mapping 4 2
Package EP-Diagnostic Catheter, steerable/fix, Lasso/Loop, 3D-mapping 2 3
Transseptal needles 20 3,0
Total général 74 3,4 129 3,3
Process (CE, CS)
CE CS
ARTICLES EN MARCHES CHU
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4 Le retraitement engendrera dans les établissements de
santé des économies par rapport au coût annuel des
cathéters neufs circuit comprises entre 35 et 59 %
d?économie selon le circuit choisi
[59] Deux circuits de retraitements dits « ouvert » ou « fermé » sont envisageables dans le
cadre fixé par la LFSS pour 2024 (cf. annexe II). Les calculs présentés ci-dessous sont estimés
pour la réalisation de 25 utilisations d?un cathéter.
4.1 En circuit ouvert, pour 25 utilisations, le retraitement diminue
d?environ 60 % le coût annuel des cathéters
[60] Dans le circuit « ouvert », les établissements de santé, d?une part, vendent71 à l?entreprise
de retraitement les DMUU utilisés et, d?autre part, achètent à cette entreprise des DMUU
retraités, indépendamment du lieu où ces DMUU ont été précédemment utilisés. Dans ce cas,
seul les paramètres du prix d?achat du DM neuf, du prix d?achat du DM retraités et de du
nombre de cathéters sont à prendre en compte.
[61] À titre d?exemple, pour l?achat d?un cathéter d?électrophysiologie de type ablation
vendu neuf au prix de 1 854 ¤ HT, le prix proposé par la société Vanguard est de 755 ¤ HT (soit
une économie de -59 %).
Tableau 13 : Calcul des économies annuelles en circuit ouvert
Prix HT ¤ neuf Prix HT ¤ retraité Quantité Coût ¤
1 854 25 46 350 (B)
755 25 18 875
Économie annuelle 27 475 ¤ (A)
En % (A/B) 59,3
Source : Mission à partir des données transmises par un CHU et par Vanguard.
71 La vente des DMUU utilisés ne nécessite pas de formalités particulières. Le prix de vente doit être agréé
au préalable avec l?entreprise de retraitement.
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4.2 En circuit fermé, les économies obtenues grâce au retraitement sont
plus difficiles à calculer et moindres qu?en circuit « ouvert »
[62] Dans le circuit « fermé », les établissements de santé sous-traitent à une entreprise le
retraitement des DMUU qu?ils ont utilisés, sous le plafond du volume maximal de cycles de
retraitements prévus. Dans ce cas quatre paramètres doivent être pris en compte pour calculer
l?économie : le prix d?achat du DM neuf, le prix d?achat du DM retraité, le nombre de
retraitement prévu et le taux d?échec. Ce taux représente le pourcentage de DM qui, une fois
réceptionnés par la société de retraitement ne peuvent pas être retraités car ils ont été testés
comme défectueux (non conformes) alors qu?ils auraient encore pu subir des retraitements.
Selon la société Vanguard, ce taux d?échec est estimé à 25 % en moyenne
[63] Pour réaliser la comparaison avec le circuit « ouvert », le même prix de vente du cathéter
retraité a été utilisé. Dans cet exemple, le cathéter peut être recyclé 2 fois avec un taux d?échec
de 25 %.
[64] La mission préconise que l?expérimentation se fasse dans le cadre d?un circuit « ouvert »
plutôt que « fermé ».
Tableau 14 : Calcul des économies annuelles en circuit fermé
Paramètre
Prix achat cathéter neuf (HT) 1 854 ¤
Prix achat cathéter recyclé (HT) 755 ¤
Nombre de cycle de retraitement 2
Taux d?échec 25 %
Nombre de cathéters acheté 10
Nombre d?utilisation maximum 20 fois
Nombre d?utilisation en intégrant le taux d?échec 15 fois
Nombre d?utilisation de 10 cathéters 25 fois
Économie 16 485 ¤
Source : Mission à partir des données transmises par un CHU et par Vanguard.
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ANNEXE 2 : Modalités d?expérimentation du
retraitement des DMUU dans quatre
établissements de santé
1 LA PARTICIPATION DES ETABLISSEMENTS DE SANTE A L?EXPERIMENTATION EXIGE EN
PREMIER LIEU L?ADHESION DE L?ENSEMBLE DES PROFESSIONNELS CONCERNES ........ 57
1.1 DIFFERENTS CRITERES SONT ENVISAGEABLES POUR SELECTIONNER LES ETABLISSEMENTS DE SANTE
PARTICIPANT A L?EXPERIMENTATION .............................................................................................. 57
1.2 LA PRIORITE DOIT ETRE ACCORDEE AUX ETABLISSEMENTS ENGAGES DANS UNE DEMARCHE PARTAGEE
DE REDUCTION DE LEUR EMPREINTE ECOLOGIQUE ........................................................................... 58
2 UN MARCHE COMMUN DE RETRAITEMENT OU D?ACHAT DE DMUU DEVRA ETRE
CONCLU DANS LE RESPECT DU CODE DE LA COMMANDE PUBLIQUE .............................. 59
2.1 LES DEUX CIRCUITS POSSIBLES « OUVERT » OU « FERME » DE RETRAITEMENT DES DMUU
PRESENTENT DES AVANTAGES ET INCONVENIENTS RESPECTIFS....................................................... 59
2.2 UN ECHANGE AVEC LES FOURNISSEURS DE DMUU NEUFS DEVRA ETRE ENGAGE ET DEBOUCHER LE
CAS ECHEANT SUR UN AVENANT AU MARCHE INITIAL ..................................................................... 60
3 UN CIRCUIT LOGISTIQUE DEVRA ETRE MIS EN PLACE AVEC UN IMPACT A PRIORI LIMITE
SUR LA CHARGE DE TRAVAIL DES PROFESSIONNELS DE SANTE........................................ 61
3.1 LE CIRCUIT LOGISTIQUE SERA DEFINI AVEC L?ENTREPRISE DE RETRAITEMENT EN TENANT COMPTE DU
CADRE JURIDIQUE APPLICABLE AUX DECHETS .................................................................................. 61
3.2 AU REGARD DE LA SIMPLICITE RELATIVE DE CE CIRCUIT, LA SURCHARGE DE TRAVAIL DEVRAIT RESTER
LIMITEE ........................................................................................................................................... 63
4 LES MODALITES D?INFORMATION DU PATIENT DEVRONT ETRE AJUSTEES POUR NE PAS
FAIRE OBSTACLE A LA MISE EN OEUVRE DE L?EXPERIMENTATION ..................................... 64
4.1 LA LFSS POUR 2024 PREVOIT L?OBLIGATION D?INFORMER LES PATIENTS, QUI PEUVENT S?Y OPPOSER,
QUAND UN DMUU RETRAITE VA ETRE UTILISE ................................................................................ 64
4.2 UNE FOIS CORRECTEMENT INFORME, LE PATIENT POURRAIT S?OPPOSER A L?UTILISATION D?UN
DMUU RETRAITE DANS UNE LOGIQUE D?« OPT OUT » .................................................................... 64
5 LES CREDITS PREVUS PAR LA LFSS 2024 POURRAIENT FINANCER UNE EVALUATION
EXTERNE DE L?EXPERIMENTATION SUR LA BASE DES CRITERES DEFINIS EN CAHIER DES
CHARGES ........................................................................................................................................... 65
5.1 L?EVALUATION DE L?EXPERIMENTATION DOIT ETRE REALISEE PAR UN ACTEUR EXPERT DE L?ANALYSE
DU CYCLE DE VIE DES PRODUITS DE SANTE...................................................................................... 65
5.2 CETTE EVALUATION DEVRA PERMETTRE D?APPRECIER L?INTERET DU RETRAITEMENT SUR LES PLANS
SANITAIRE, ECOLOGIQUE, ECONOMIQUE ET HUMAIN ...................................................................... 66
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[65] L?article 66 de la LFSS pour 2024 autorise et encadre, à titre expérimental, le
retraitement de certains Dispositifs médicaux à usage unique (DMUU), leur mise à disposition
sur le marché et leur utilisation. Cette expérimentation, d?une durée de deux ans, doit débuter
au plus tard le 1er novembre 2024. Le champ et les modalités de mise en oeuvre de cette
expérimentation sont partiellement encadrées au niveau législatif :
? seuls pourront y participer les établissements de santé publics, privés d'intérêt collectif
et privés, au nombre de quatre selon l?étude d?impact, désignés par arrêté du ministre
chargé de la santé ;
? le retraitement ne pourra être réalisé que par une entreprise externe, et non par les
établissements de santé ;
? les DMUU retraités pourront être achetés sur le marché ou correspondre à des DMUU
déjà utilisés au sein des établissement de santé avant leur retraitement ;
? les entreprises externe de retraitement devront a minima respecter les obligations
prévues par l?article 17 du règlement (UE) 2017/745, même si une partie d?entre elles
peuvent être écartées sous réserve de la certification par un organisme notifié du respect
des spécifications communes définies au niveau européen (cf. encadré infra) ;
? aucun DMUU retraité ne pourra être utilisé sans l?information préalable de la personne,
qui peut s?y opposer.
[66] Prévu par la loi, un décret en Conseil d?État devra déterminer autant que de besoin les
modalités de mise en place de cette expérimentation, en particulier :
? le périmètre des DMUU qui pourront être retraités, incluant le cas échéant des
obligations, en particulier de traçabilité, et des restrictions (cf. Annexe III) ;
? les modalités particulières applicables, en matière d?information et d?opposition des
patients, à l?utilisation des DMUU retraités ;
? la méthodologie de l?expérimentation, ses objectifs et les modalités de son pilotage et
de son évaluation, en vue notamment du rapport adressé au Parlement six mois avant le
terme de l?expérimentation qui déterminera l?opportunité et, le cas échéant, les
conditions de sa pérennisation et de son extension.
[67] Cette fiche, qui vise à alimenter le futur cahier des charges de l?expérimentation, précise
les modalités envisageables de mise en oeuvre de l?expérimentation comprenant :
? les critères de choix des quatre établissements de santé qui seront retenus par arrêté ;
? les scénarios de passation d?un marché d?achat de DMUU retraités ou de retraitement de
DMUU utilisés ;
? le circuit logistique à prévoir au sein des établissements de santé qui feront retraiter les
DMUU utilisés ;
? le dispositif d?information et de recueil de l?opposition éventuelle des patients dans le
cadre des soins qui pourraient mobiliser des DMUU retraités ;
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? ses critères et modalités d?évaluation pour pouvoir apprécier à terme l?opportunité de
généraliser voire étendre le retraitement des DMUU.
Modalités de retraitement des DMUU prévues au niveau européen
Le retraitement des DMUU est encadré depuis 2017 par un règlement communautaire qui
prévoit trois modalités possibles selon des standards précisés par un règlement d?exécution.
Le règlement 2017/745 du 5 avril 2017 constitue le cadre global de régulation des DM sur le
marché intérieur européen72. Son article 17 encadre spécifiquement les DMUU et leur
retraitement. Ce cadre repose sur deux modalités possibles de retraitement :
-un retraitement par une personne physique ou morale qui est réputé alors devenir le
fabricant du dispositif retraité, ce qui suppose qu?elle s?acquitte des obligations incombant
aux fabricants (obtention du marquage CE en particulier) ;
-en ce qui concerne les DMUU retraités et utilisés dans un établissement de santé, le
retraitement peut être effectué par l?établissement ou par une entreprise externe dès lors
qu?il est effectué conformément à des spécifications communes définies dans le règlement
d?exécution 2020/120773 : dans ce cas, l?obtention du marquage CE n?est pas nécessaire mais
la conformité avec les certifications communes doit être vérifiée par un organisme notifié.
1 La participation des établissements de santé à
l?expérimentation exige en premier lieu l?adhésion de
l?ensemble des professionnels concernés
1.1 Différents critères sont envisageables pour sélectionner les
établissements de santé participant à l?expérimentation
[68] Le choix des établissements de santé qui participeront à l?expérimentation pourraient
reposer sur au moins trois critères :
? la proximité géographique de ces établissements permettrait en théorie d?optimiser le
circuit de transport des DMUU retraités vers le site de l?entreprise de retraitement : en
pratique, dans la mesure où (i) ce transport ne sera pas sous la responsabilité des
établissements de santé mais sous-traité par l?entreprise de retraitement à un logisticien
(ii) la fréquence et l?optimisation des retraits/livraisons dépendront des choix effectués
par cette entreprise en lien avec chaque établissement de santé, ce critère est en
pratique secondaire ;
72 Il s?est substitué à deux directives de 1990 et 1993. Les dispositifs médicaux implantables actifs et les
dispositifs médicaux de diagnostic in vitro font l?objet d?un encadrement juridique distinct.
73 Ces spécifications détaillent les exigences concernant la gestion des risques, la validation des
procédures pour la totalité du processus, la libération du produit et les tests de performance, le système
de gestion de la qualité, la déclaration d?incidents portant sur les dispositifs retraités, la traçabilité des
dispositifs retraités.
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? la volumétrie de DMUU retraitables (donc de cathéters d?électrophysiologie, cf. Annexe
I) utilisés (cf. tableau 1) : ce critère conditionne l?intérêt de l?entreprise de retraitement
dans la participation au marché ;
? la taille et le statut juridique des établissements : pour apprécier les éventuelles
différences dans le déploiement du retraitement des DMUU entre établissements de
santé en vue, le cas échéant, de sa généralisation, la prise en compte de ces critères
pourrait enfin se justifier.
Tableau 15 : Top 10 des établissements de santé publics et privés ayant réalisé le
plus de traitements par voie vasculaire en 2022
Établissement de santé Statut
Volume de traitements réalisés par voie vasculaire
en 202274
CL PASTEUR TOULOUSE Privé 1 280
INSTITUT MUTUALISTE MONTSOURIS Espic75 970
CHU DE BORDEAUX Public 810
HOPITAL SAINT JOSEPH Marseille Espic 800
HOSPICES CIVILS DE LYON Public 752
CLINIQUE DE LA PLAINE CLERMOND
FERRAND
Privé 747
CLINIQUE CHIRURGICALE AMBROISE
PARE
Privé 701
CHU DE SAINT-ETIENNE Public 667
INFIRMERIE PROTESTANTE Espic 632
CHU DE CLERMONT-FERRAND Public 618
Source : Pôle « data » de l?Igas.
1.2 La priorité doit être accordée aux établissements engagés dans une
démarche partagée de réduction de leur empreinte écologique
[69] Parce que le retraitement des DMUU n?est qu?un levier parmi d?autres pour diminuer
l?empreinte écologique des produits de santé, il est recommandé de favoriser la participation
à l?expérimentation des établissements engagés dans une démarche globale de décarbonation.
En effet, l?existence d?une telle démarche (objectivée par un diagnostic, une feuille de route et
une comitologie dédiée) limite le risque de considérer le retraitement comme un levier isolé,
et in fine modeste à l?échelle de la totalité des émissions recensées, de diminution de
74 Traitements majeurs des troubles du rythme par voie vasculaire : GHS 05K191, 05K192, 05K193, 05K194,
05K19.
75 Espic : Établissement de santé privé d?intérêt collectif.
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l?empreinte écologique (cf. annexe IV). À l?inverse, l?autorisation de retraiter certains DMUU
peut jouer un rôle de catalyseur si d?autres leviers ont déjà été identifiés et engagés
(développement de l?usage multiple, généralisation et renforcement de la portée des clauses
environnementales dans les achats de produits de santé, valorisation des déchets issus des DM,
etc.).
[70] En outre, l?existence d?une stratégie globale, idéalement concertée, de diminution de
l?empreinte écologique favorise un alignement et une adhésion des professionnels vis-à-vis de
l?expérimentation, critère primordial de sélection des établissements de santé. Il est
indispensable que tous les professionnels directement ou indirectement concernés par
l?expérimentation (direction générale, acheteurs en Pharmacie à usage intérieur-PUI, juristes,
hygiénistes, service de stérilisation, professionnels médicaux et paramédicaux utilisant les
DMUU) en comprennent le sens et acceptent de l?endosser.
2 Un marché commun de retraitement ou d?achat de DMUU
devra être conclu dans le respect du code de la commande
publique
2.1 Les deux circuits possibles « ouvert » ou « fermé » de retraitement
des DMUU présentent des avantages et inconvénients respectifs
[71] Deux circuits de retraitements, dits « ouvert » ou « fermé » sont envisageables dans le
cadre fixé par la LFSS pour 2024 :
? dans le circuit « ouvert », les établissements de santé, d?une part, vendent76 à l?entreprise
de retraitement les DMUU utilisés et, d?autre part, achètent à cette entreprise des DMUU
retraités, indépendamment du lieu où ces DMUU ont été précédemment utilisés ;
? dans le circuit « fermé », les établissements de santé sous-traitent à une entreprise le
retraitement des DMUU qu?ils ont utilisés, sous le plafond du volume maximal de cycles
de retraitements prévus (cf. Annexe I).
[72] Dans le cadre de l?expérimentation, il serait préférable que tous les établissements
adoptent le même circuit, qui conditionne la conclusion d?un marché groupé, en se fondant
sur les critères d?appréciation suivants :
? sur le plan opérationnel, le circuit « ouvert » offre plus de flexibilité dans la gestion des
stocks en fonction de son activité : en effet, le volume de DMUU retraités achetés ne
dépend pas du volume de DMUU vendus à l?entreprise de retraitement ; par ailleurs, dans
la mesure où les DMUU retraités marqués CE sont strictement équivalents aux DMUU
76 La vente des DMUU utilisés ne nécessite pas de formalités particulières. Le prix de vente doit être agréé
au préalable avec l?entreprise de retraitement.
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neufs, il n?y a pas d?intérêt du point de vue sanitaire ou des utilisateurs à privilégier des
DMUU retraités déjà utilisés dans le même établissement ;
? sur le plan juridique, la DAJ des ministères sociaux77, saisie par la mission, estime
néanmoins que le circuit « fermé », qui repose sur un marché de prestation, et non sur
un marché d?achat de produits, est moins risqué au regard de l?exclusivité dont peuvent
bénéficier les titulaires des accords-cadres déjà conclus pour la fourniture des DMUU
neufs.
[73] Selon la DAJ des ministères sociaux, la coexistence de deux marchés publics, l?un portant
sur l?achat de DMUU neufs, l?autre sur leur retraitement, est juridiquement possible mais plus
fragile en circuit « ouvert » en l?absence dispositions explicites dans l?accord-cadre avec les
fournisseurs de DMUU neufs78. La DAJ, qui a analysé un exemple d?accord-cadre avec un
fournisseur de cathéters d?électrophysiologie fournis par le CHU de Bordeaux, rappelle que,
les acheteurs restent libres de définir dans un tel accord les limites de leur engagement
contractuel, y compris des exceptions au principe d?exclusivité. L?acheteur doit insérer de
manière expresse, dans les documents contractuels du marché, une clause stipulant qu?il se
réserve la possibilité de recourir à des tiers pour certains types de prestations prévues au
contrat. En l?absence de ces clauses, l?acheteur est tenu, par principe, de garantir au titulaire
l?exclusivité des prestations qui en sont l?objet. Selon la DAJ, dans le cadre du circuit « ouvert »,
l?objet du nouveau marché aurait un objet similaire à celui déjà conclu pour les DMUU neufs. À
l?inverse, dans le circuit « fermé », l?objet du nouveau marché serait différent de celui du
marché initial, ce qui limiterait le risque contentieux. Compte tenu des avantages sur le plan
économique du circuit « ouvert », la mission préconise de le privilégier dans le cadre de
l?expérimentation, même s?il implique un investissement sur le plan juridique.
2.2 Un échange avec les fournisseurs de DMUU neufs devra être engagé
et déboucher le cas échéant sur un avenant au marché initial
[74] Quel que soit le circuit retenu, qui dépendra en particulier des engagements contractuels
pris par les établissements retenus avec leur fournisseur de DMUU neufs, un échange préalable
avec ces derniers, et le cas échéant un avenant à l?accord-cadre, seront nécessaires. En effet,
comme l?a constaté la DAJ sur la base de l?exemplaire d?accord-cadre fourni par le CHU de
Bordeaux, et selon les témoignages d?acheteurs recueillis par la mission, les fabricants de DMUU
neufs, en l?espèce de cathéters d?électrophysiologie, lient souvent la vente de ces DMUU avec
d?autres prestations telles que la mise à disposition d?une console à laquelle est connectée le
cathéter et un service de conseil et de maintenance qui se matérialise par la présence, durant
les interventions, d?un ingénieur travaillant pour le compte du fabricant. Dans son analyse, la
DAJ rappelle que le pouvoir adjudicateur, lorsqu?il suit une procédure régulière, n?est pas
conduit à accepter une prestation qu?il n?a pas demandée et sur laquelle la concurrence n?a
pas porté. Conformément aux règles d?allotissement, la mise à disposition d?équipements et la
77 Note du bureau de la commande et des interventions publiques de la DAJ des ministères sociaux datée
du 20 novembre 2023.
78 L?obligation pour les établissements publics d?établir un marché pour le retraitement des DMUU ne
s?appliquera bien sûr qu?à ceux qui ont la qualité d?acheteur au sens du code la commande publique.
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maintenance pourraient faire l?objet de prestations distinctes de celle de la fourniture de
consommables. En pratique, en cas d?achat de DMUU retraités, il conviendra de s?assurer
auprès du fournisseur de DMUU neufs que (i) la console mise à disposition pourra être aussi
utilisée avec ces cathéters retraités (ii) la prestation de conseil et de maintenance associée aux
cathéters neufs pourra être, soit dissociée dans un support contractuel distincts, soit étendue
à l?utilisation des cathéters retraités.
3 Un circuit logistique devra être mis en place avec un impact
a priori limité sur la charge de travail des professionnels de
santé
3.1 Le circuit logistique sera défini avec l?entreprise de retraitement en
tenant compte du cadre juridique applicable aux déchets
[75] Le retraitement de DMUU qui étaient auparavant directement jetés79 une fois utilisés,
nécessite la mise en place d?un circuit logistique incluant a minima les étapes suivantes :
? le nettoyage, selon le protocole convenu avec l?entreprise de retraitement et en
conformité avec les règles définies par la Société Française d?Hygiène Hospitalière (cf.
Annexe I), par le personnel paramédical (infirmiers, ou aides-soignants a priori) du DMUU
utilisé durant l?intervention dès lors que le nombre maximal de cycles de retraitement
n?est pas atteint80 ;
? le stockage, dans la salle d?intervention, ou à proximité, des DMUU destinés à être
retraités dans un container fourni par l?entreprise de retraitement dont la taille dépendra
(i) du volume hebdomadaire ou mensuel de DMUU utilisés (ii) de la fréquence convenue
de collecte par le prestataire de transport mandaté par l?entreprise de ces derniers ;
? la remise, à la date et heure convenue avec l?entreprise de retraitement, par le personnel
en charge de la logistique, des containers avec les DMUU utilisés ;
? une fois ces DMUU retraités (en circuit « fermé »), ou une fois les DMUU retraités
commandés en fonction de l?évolution du stock de DMUU restants (en circuit « ouvert »),
leur recueil par les services en charge de la logistique pour acheminement vers les salles
d?intervention ;
? lors de leur utilisation, l?inscription, dans le SI quand il existe ou dans un registre papier à
défaut, de l?identifiant unique (UDI)81 du DMUU retraité et du numéro apposé par
79 Certains établissements de santé, comme le CHU de Bordeaux, procèdent néanmoins à l?extraction et
à la vente de la pointe des cathéters auprès d?organismes qui revalorisent les métaux précieux qu?elles
contiennent (cf. Annexe IV).
80 Cette information est lisible à travers le numéro de lot apposé sur le DM par l?entreprise de
retraitement.
81 L?UDI est un code international numérique ou alphanumérique permettant d?identifier chaque DM tout
au long de son cycle de vie.
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l?entreprise de retraitement reliés au numéro d?identification du patient sur qui ce DMUU
retraité a été utilisé.
[76] Concernant spécifiquement l?étape de nettoyage des DMUU82, elle devra être réalisée
selon des standards permettant à la fois de préserver la possibilité de les retraiter et de ne
plus les considérer comme des déchets. En effet, l?analyse réalisée par la DAJ des ministères
sociaux souligne que :
? le code de l?environnement83 prévoit qu?« un déchet cesse d'être un déchet après avoir
été traité et avoir subi une opération de valorisation, notamment de recyclage ou de
préparation en vue de la réutilisation (?) » ;
? si l?on se réfère en particulier à la norme ISO 17664 :201784, le simple nettoyage à l?eau
d?un DMUU ne permettrait pas de faire sortir ce dernier de la catégorie de « déchet » au
sens du code de l?environnement ;
? or, pour que les DMUU retraités puissent circuler librement en UE, ils ne doivent pas être
considérés comme des déchets : en effet, le droit européen85 exige une procédure de
notification et de consentement écrit préalable pour le transfert de déchets ménagers
entre États de l?UE.
82 Ce nettoyage consiste à préparer les DMUU utilisés en intervention en vue de leur retraitement, ce qui
inclut la vérification de leur intégrité (ex : DMUU non visiblement endommagé).
83 Article L. 541-4-3.
84 La norme ISO 17664 :2017 intitulée « Traitement de produits de soins de santé ? Informations relatives
au traitement des dispositifs médicaux à fournir par le fabricant du dispositif » précise que le nettoyage
consiste « à éliminer, généralement à l?aide d?un agent nettoyant et d?eau, les souillures adhérentes (par
exemple, sang, substances protéiques et autres débris) des surfaces, fentes, cannelures, joints et lumières
d?un dispositif médical, par le biais d?un procédé manuel ou automatique qui prépare les produits à une
manipulation en toute sécurité et/ou à la poursuite du traitement ». Ce nettoyage intervient avant tout
procédé de désinfection et/ou de stérilisation postérieur.
85 L?article 33 du Règlement (CE) No 1013/2006 du Parlement Européen Et Du Conseil du 14 juin 2006
établit les conditions de transfert des déchets entre les État membres de l?Union européenne.
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Protocole de nettoyage des DMUU avant retraitement
La mission a eu connaissance d?un projet de contrat entre Vanguard et un CHU qui précise
les modalités de préparation et de vérification des DMUU avant leur envoi pour
retraitement. Ce document indique que seuls les DM complets et non endommagés (sur un
plan mécanique) peuvent être collectés et nettoyés. Certains DM sont exclus de ce
retraitement notamment ceux dont les surfaces externes ont été en contact avec des
médicaments cytostatiques, ou des produits radiopharmaceutiques. Sont également exclus
ceux qui ont été utilisés de manière reconnaissable ou supposée sur des patients atteints de
certaines maladies infectieuses86. Il y est rappelé que le nettoyage préalable doit s?effectuer
en milieu hospitalier juste après l?utilisation des DM afin que les résidus ne sèchent pas et ne
soient pas difficiles à enlever.
Le protocole de nettoyage repose sur un essuyage des surfaces avec un chiffon humide avec
de l?eau froide et claire. Les tiges doivent être essuyées si possible de l?intérieur vers
l?extérieur. Les pièces mobiles doivent être nettoyées dans les deux positions finales. Aucun
désinfectant ni désinfection thermique ne doit être utilisés. Enfin, si le cathéter a une
lumière, les passages doivent être rincés à l?eau froide, aucun liquide ne doit parvenir dans
une pièce à main. Une fois nettoyé, le DM est séché avec une compresse propre ou un
chiffon non pelucheux à usage unique. Le DM peut ensuite être emballé et placé dans les
containers pour enlèvement.
Ce protocole est a priori compatible avec celui préconisé par la SF2H dans son guide relatif
au traitement et à la désinfection des DM réutilisables. Étant donné que le retraitement des
DMUU est interdit en France, ce guide n?aborde pas le nettoyage des DMUU avant
retraitement. Néanmoins, la première étape de pré-désinfection peut être considérée
comme équivalente à celle décrite par le protocole de Vanguard. La SF2H considère que ce
protocole est valable pour l?ensemble des DM, quels que soient le statut sérologique,
bactérien ou viral des patients sur lesquels ils ont été utilisés.
Source : Mission.
3.2 Au regard de la simplicité relative de ce circuit, la surcharge de
travail devrait rester limitée
[77] Sur la base de ses échanges avec les représentants de trois CHU, qui devront être
corroborés au cours de l?expérimentation, la mission estime que la surcharge de travail
associée au retraitement des DMUU devrait être limitée :
? elle est concentrée sur le personnel paramédical, en particulier les infirmiers ou les aides-
soignants qui, au lieu de jeter directement les DMUU utilisés devront les nettoyer pour
un temps estimé à moins de 10 mn par dispositif ;
86 VIH, Hépatites virales, choléra, tuberculose, fièvres hémorragiques, encéphalopathie spongiforme
transmissible (maladie de Creutzfeldt Jakob et ses variants)
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? les acheteurs en PUI seront mobilisés en amont de l?expérimentation pour participer à la
construction d?un éventuel marché groupé avec l?entreprise de retraitement et
renégocier si nécessaire les accords-cadres avec les fournisseurs de DMUU neufs ;
? la surcharge de travail pour les acteurs en charge de la logistique (acheminement des
containers des salles d?intervention vers le lieu de retrait, et réciproquement pour la
collecte des DMUU retraités) est jugée marginale.
4 Les modalités d?information du patient devront être
ajustées pour ne pas faire obstacle à la mise en oeuvre de
l?expérimentation
4.1 La LFSS pour 2024 prévoit l?obligation d?informer les patients, qui
peuvent s?y opposer, quand un DMUU retraité va être utilisé
[78] L?obligation d?informer les patients du caractère retraité d?un DMUU est une quasi-
exception française qui peut s?expliquer par le cadre expérimental retenu. Pourtant, l?article
17 du règlement 2017/745 précise que les États membres « encouragent, et peuvent obliger, les
établissements de santé à fournir aux patients des informations sur les dispositifs médicaux
retraités en leur sein ». En pratique, parmi les pays européens qui autorisent à ce jour le
retraitement, seule l?Espagne prévoit l?obligation d?en informer au préalable les patients (cf.
Annexe III). Un parallèle peut être fait avec les essais cliniques qui requièrent un consentement
éclairé des patients. Toutefois, à la différence des essais cliniques, il est impossible dans le cas
des DMUU retraités de préciser, et a fortiori de quantifier, l?existence d?un risque. À cet égard,
l?obligation d?information prévue par la LFSS pour 2024 est contradictoire avec la
responsabilité des entreprises assurant le retraitement des DMUU dans un cadre, celui du
marquage CE, identique à celui des DMUU neufs pour lesquels aucune information n?est
prévue.
[79] Cette obligation d?information, assortie d?un droit d?opposition, dont les modalités
seront définies dans le futur décret en Conseil d?État, pourrait faire obstacle au bon
déroulement de l?expérimentation. Les représentants des associations de patients rencontrés
par la mission le 27 novembre dernier n?ont pas été consultés dans le cadre de la rédaction de
l?article 66 de LFSS 2024. Leur avis devrait en revanche être recueilli en amont de la
transmission du projet de décret au Conseil d?État. Ces représentants ont souligné auprès de
la mission la nécessité de (i) faire preuve de pédagogie auprès des patients en leur expliquant
les objectifs poursuivis par l?expérimentation (ii) prévoir un dispositif de recueil du
consentement explicite des patients.
4.2 Une fois correctement informé, le patient pourrait s?opposer à
l?utilisation d?un DMUU retraité dans une logique d?« opt out »
[80] Pour trouver un équilibre entre la juste information des patients et le bon déroulement
de l?expérimentation, la mission propose d?abord l?élaboration au niveau national d?une fiche
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informative commune aux quatre établissements qui participeront à l?expérimentation. Cette
fiche, qui serait remise au patient en amont de l?intervention mobilisant un DMUU retraité,
valoriserait (i) le caractère identique du DMUU retraité par rapport au DMUU neuf garanti par
son marquage CE (ii) le double gain écologique et économique associé à son utilisation.
[81] Pour maximiser les chances qu?un patient accepte l?utilisation d?un DMUU retraité, il est
recommandé de privilégier une logique d?« opt out ». Ainsi, une ligne pourrait être ajoutée sur
les documents remis au patient avant une intervention stipulant qu?il accepte par ailleurs
l?utilisation d?un DMUU retraité. L?opposition d?un patient à l?utilisation d?un DMUU retraité
devrait donc être expresse. Elle pourrait être tracée via apposition d?une inscription de la part
des professionnels de santé sur le dossier du patient. Le taux d?« opt out » devra être suivi dans
le cadre de l?expérimentation.
5 Les crédits prévus par la LFSS 2024 pourraient financer une
évaluation externe de l?expérimentation sur la base des
critères définis en cahier des charges
5.1 L?évaluation de l?expérimentation doit être réalisée par un acteur
expert de l?analyse du cycle de vie des produits de santé
[82] La mission recommande de flécher sur l?évaluation de l?expérimentation une partie des
financements prévus pour accompagner l?expérimentation. En effet, l?étude d?impact de la
LFSS pour 2024 prévoit un montant de 890 000¤ pour accompagner les quatre structures sur
les deux années de l?expérimentation tant en moyens humains qu?en ingénierie. Si le montage
du marché avec l?entreprise de retraitement pourrait nécessiter une expertise juridique
externe, la mission n?identifie pas de besoins de financement autres dans le cadre de
l?expérimentation. En revanche, une partie de ces crédits pourraient utilement être allouée au
financement d?une prestation d?évaluation.
[83] Cette prestation d?évaluation devra être confiée à un acteur87 qui maîtrise en particulier
la méthodologie de l?analyse de cycle de vie. En effet, cette méthodologie, qui suppose de
recueillir et de traiter un volume important de données, ne peut pas aujourd?hui être mise en
oeuvre de façon autonome par les établissements de santé, leur tutelle ou les services
d?inspection, dont l?inspection générale des affaires sociales. Or elle est indispensable pour
apprécier l?intérêt écologique du retraitement.
87 La mission a identifié au moins deux sociétés qui réalisent d?ores et déjà ce type d?analyses pour le
compte d?établissements de santé.
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5.2 Cette évaluation devra permettre d?apprécier l?intérêt du
retraitement sur les plans sanitaire, écologique, économique et
humain
[84] En lien avec les représentants des établissements de santé rencontrés, la mission a
identifié un certain nombre de critères qui pourraient être inscrits dans le dispositif de
pilotage et d?évaluation de l?expérimentation :
? nombre de déclarations de matériovigilance recensées ;
? nombre d?événements indésirables associés aux soins ;
? volume de DMUU retraités sur une période donnée rapportée au volume de DMUU neufs
achetés, à comparer au volume acheté avant retraitement ;
? nombre de DMUU envoyés pour retraitement par rapport au nombre de DMUU retraités
acquis sur une période donnée
? nombre de patients ayant manifesté leur opposition à l?utilisation d?un DMUU retraité
rapporté au nombre de patients pour lesquels un DMUU retraité a été utilisé sur une
période donnée ;
? taux de satisfaction de différentes catégories de professionnels de santé (pharmaciens,
paramédicaux, médecins) par rapport au circuit logistique associé au retraitement et,
s?agissant des soignants, à la fonctionnalité des DMUU retraités par rapport aux DMUU
neufs.
[85] Sur un plan plus qualitatif, il est nécessaire que le dispositif de pilotage comme
l?évaluation, qui pourrait exiger un délai supérieur aux 18 mois prévus par la loi, permettent
d?apprécier l?atteinte de l?ensemble des objectifs assignables à l?expérimentation :
? sur le plan financier, est-il possible de quantifier les économies annuelles réalisées grâce
à l?acquisition de DMUU retraités en tenant compte du coût complet sur leur cycle de
vie des DMUU neufs par rapport à celui des DMUU retraités ?
? sur le plan écologique, peut-on objectiver sur leur cycle de vie la diminution de
l?empreinte écologique, et non uniquement des émissions carbone, associées aux DMUU
retraités par rapport aux DMUU neufs ? Quel a été par ailleurs l?effet de l?expérimentation
sur la stratégie globale de décarbonation des D (effet neutre, effet catalyseur ou effet
d?éviction) ?
? enfin, sur un plan humain, en lien avec le circuit logistique mis en place en établissement,
quel est l?impact de l?expérimentation sur (i) la charge et l?organisation du travail des
professionnels concernés (ii) le sens au travail (iii) les relations entre les services ?
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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ANNEXE 3 : Éléments de parangonnage
sur le retraitement des DMUU en Europe
1 LE RETRAITEMENT DES DMUU DANS LES NEUF ÉTATS MEMBRES DE L?UE PRESENTE DES
CARACTERISTIQUES DIFFERENTES ............................................................................................. 69
1.1 À FIN OCTOBRE 2023, NEUF ÉTATS MEMBRES ONT AUTORISE LE RETRAITEMENT DES DMUU TANDIS
QUE QUINZE L?ONT INTERDIT .......................................................................................................... 69
1.2 LES MODALITES D?APPLICATION DE L?ARTICLE 17 DU RMD SONT DIFFICILES A APPRECIER ET
GLOBALEMENT HETEROGENES ........................................................................................................ 69
2 FOCUS SUR LA SUEDE, L?ESPAGNE ET LE ROYAUME-UNI A PARTIR DES RETOURS DES
CONSEILLERS AUX AFFAIRES SOCIALES .................................................................................... 71
2.1 HISTORIQUE ET CADRE DU RETRAITEMENT DES DMUU .................................................................. 71
2.2 CRITERES ECONOMIQUES ET ECOLOGIQUES .................................................................................... 72
2.2.1 Critères économiques ....................................................................................................................72
2.2.2 Critères écologiques ......................................................................................................................72
2.3 PERIMETRE DES DMUU ELIGIBLES AU RETRAITEMENT ...................................................................... 73
2.4 ORGANISATION DU RETRAITEMENT ................................................................................................ 75
2.4.1 Espagne ............................................................................................................................................75
2.4.2 Royaume Uni ...................................................................................................................................76
2.4.3 Suède ...............................................................................................................................................77
2.5 FILIERES DE RETRAITEMENT ............................................................................................................. 77
2.6 TRAÇABILITE DES DMUU ............................................................................................................... 77
2.7 INFORMATION DES PATIENTS .......................................................................................................... 78
3 LE RETRAITEMENT DES DMUU EST AUSSI DEVELOPPE EN AMERIQUE DU NORD,
PARTICULIEREMENT AUX USA ..................................................................................................... 79
3.1 ÉTATS-UNIS ................................................................................................................................... 79
3.2 CANADA ........................................................................................................................................ 80
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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[86] Cette annexe propose des éléments de parangonnage sur le retraitement des DMUU
dans les États membres de l?Union européenne (UE), avec quelques éclairages sur des pays hors
UE (Grande-Bretagne, États-Unis). Elle se fonde sur des informations recueillies en ligne et, via
une enquête diligentée par la mission, auprès des Conseillers aux affaires sociales de trois pays
(Suède, Espagne, Allemagne).
[87] Pour mémoire (cf. Annexe I), le retraitement des Dispositifs médicaux à usage unique
(DMUU) est encadré au niveau européen par le Règlement 2017/745 du 5 avril 2017 complété
par le Règlement d?exécution 2020/1207 du 19 août 2020 qui précise les spécifications
communes à respecter en dehors du marquage CE. L?article 17 du Règlement 2017/745 (dit
RMD) précise que « le retraitement et la réutilisation de dispositifs à usage unique ne peuvent
avoir lieu que s'ils sont autorisés par la législation nationale et uniquement conformément au
présent article ». L?article 17 fixe donc un cadre a minima qui peut être adapté par les États
membres. Ainsi, "un État membre qui autorise le retraitement de dispositifs à usage unique peut
maintenir ou introduire des dispositions nationales plus strictes que celles prévues par le présent
règlement et qui restreignent ou interdisent sur son territoire ». Ces dispositions doivent en
principe être notifiées à la Commission européenne.
[88] Dans le cadre de son échange avec un représentant de l?unité D3 en charge des DM à la
Commission européenne, la mission a constaté que cette dernière disposait d?informations
très limitées sur la mise en oeuvre de l?article 17 du RMD au sein de l?UE. Si la Commission
recense les législations nationales qui autorisent ou interdisent le retraitement, elle n?est pas
en mesure d?apprécier le périmètre des DMUU retraités, le mode de retraitement choisi (en
établissement de santé ou par une entreprise externe, dans le cadre du marquage CE ou des
spécifications communes) ou encore le volume de DMUU retraités par rapport au total des
DMUU utilisés. En revanche, l?article 17 du RMD prévoit l?élaboration d?un rapport sur son
exécution qui devra être établi avant le 27 mai 2024 et remis au Parlement européen et au
Conseil. Ce rapport, confié à un prestataire sélectionné par la Commission, est en cours
d?élaboration. Il pourrait déboucher sur des propositions d?évolution de l?article 17 du RMD.
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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1 Le retraitement des DMUU dans les neuf États membres de
l?UE présente des caractéristiques différentes
1.1 À fin octobre 2023, neuf États membres ont autorisé le retraitement
des DMUU tandis que quinze l?ont interdit
[89] La carte ci-dessous synthétise le choix des États membres sur le retraitement des DMUU.
Carte 2 : Position des États sur le retraitement des DMUU à fin octobre 2023
Source : Mission.
1.2 Les modalités d?application de l?article 17 du RMD sont difficiles à
apprécier et globalement hétérogènes
[90] Le tableau ci-dessous synthétise les modalités de mise en oeuvre du retraitement prévues
par le droit national dans les neuf États qui ont autorisé le retraitement. Il en ressort les constats
suivants :
? si tous les pays ont ouvert le retraitement aux établissements de santé, seuls l?Irlande et
les Pays-Bas imposent un marquage CE aux établissements de santé souhaitant retraiter
les DMUU ;
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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? trois États (Croatie, Suède et Slovénie) interdisent le retraitement sur leur territoire aux
entreprises en dehors d?un contexte de sous-traitance ;
? un pays, l?Espagne, impose que l?entreprise qui à laquelle est sous-traité le retraitement
des DMUU ait son siège social en Espagne ;
? en ce qui concerne le périmètre des DMUU éligibles au retraitement, aucun pays n?a
établi de liste positive des DMUU pouvant être retraités mais certains pays comme la
Belgique et l?Espagne, ont exclu les DM répondant aux critères listés par le Règlement
d?exécution de 2020 ; d?autres États, comme l?Irlande, et les Pays Bas, n?excluent aucun
DM, et délèguent aux établissements de santé l?appréciation du risque de retraiter un
DMUU.
Tableau 16 : Modalités d?application de l?article 17 du RMD par pays qui autorise le
retraitement
Pays Par une
entreprise
externe avec
marquage CE
En
établissement
de santé
Par une
entreprise
externe avec
spécifications
communes
Restrictions au
périmètre des
DMUU éligibles
Information
obligatoire
du patient
Belgique Autorisé Autorisé Autorisé Oui Oui
Croatie Non autorisé Autorisé Autorisé Oui Non
Allemagne Autorisé Autorisé Autorisé Non Non
Irlande Autorisé Non autorisé Non autorisé Non Non
Pays-Bas Autorisé Non autorisé Non autorisé Non Non
Suède Non autorisé Autorisé Autorisé Oui Non
Portugal Autorisé Autorisé Autorisé Non Oui88
Espagne Autorisé Autorisé Autorisé Non Oui
Slovénie89 Non autorisé Autorisé Autorisé NC Oui
Source : Mission à partir des données transmises par les conseillers des affaires sociales et mises
en ligne par la Commission européenne.
88 Les établissements de santé informent les professionnels de santé et leurs patients de l?utilisation des
dispositifs médicaux à usage unique retraités et de toute autre information pertinente à leur sujet, et le
comité d?éthique de l?entité responsable concerné doit être impliqué.
89 En cours d?élaboration.
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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2 Focus sur la Suède, l?Espagne et le Royaume-Uni à partir des
retours des Conseillers aux affaires sociales
[91] Afin d?objectiver les pratiques de certains États et pour compléter les informations
disponibles sur les sites internet des agences sanitaires et de la Commission Européenne, une
enquête a été menée auprès des Conseillers pour les affaires sociales (CAS) au cours du mois
d?octobre 2023.
[92] La mission a fait le choix de ces trois pays car chacun a autorisé le retraitement des
DMUU. Le Royaume-Uni ne faisant plus partie de l?Union Européenne, il n?est cependant plus
soumis aux règles de l?article 17 du RMD.
2.1 Historique et cadre du retraitement des DMUU
[93] En l?Espagne, l?adoption récente (21 mars 2023) du décret 192/2023 autorisant le
retraitement des DMUU ne permet pas d?avoir suffisamment de recul sur l?application de ses
dispositions, d?autant que celles-ci requièrent la publication d?une « Résolution » du ministère
de la santé, qui précisera les modalités d?application du texte. C?est l?AEMPS, Agence espagnole
du médicament et des produits de santé, qui est acteur-clé dans la mise en oeuvre du décret.
[94] Au Royaume Uni, les pratiques autorisées en matière de re-fabrication et recyclage des
dispositifs médicaux à usage unique sont encadrées par l?Agence de régulation des soins
médicaux (« Medicines & Healthcare products Regulatory Agency » -MHRA). Cette agence
exécutive auprès du ministère de la santé, équivalent de l?ANSM Française, est en charge de la
réglementation des médicaments, les dispositifs médicaux et les composants sanguins destinés
à la transfusion. Ses avis, dont celui relatif au retraitement des dispositifs médicaux à usage
unique, ont donc une portée juridique contraignante. Cette pratique est autorisée depuis 2016
suite à la publication d?un guide : « Single Use Medical Devices : UK Guidance on re-
manufacturing ».
[95] En Suède, la procédure de retraitement est fixée par le règlement d?exécution 2020/2027
de la Commission portant modalités d?application du règlement (UE) 2017/745 du Parlement
européen et du Conseil en ce qui concerne les spécifications communes pour le retraitement
des dispositifs à usage unique. Les autorités responsables du contrôle et de la régulation de ces
produits sont l?Agence du médicament, Läkemedelsverket, et l?inspection pour les soins et le
bien-être, Inspektion för vård och omsorg, IVO90.
90 Nya föreskrifter om reprocessares och externa reprocessares skyldighet att lämna uppgifter om sin
verksamhet och sin produkt | IVO.se.
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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2.2 Critères économiques et écologiques
2.2.1 Critères économiques
[96] L?Espagne estime que l?impact économique est limité mais reste positif pour l?économie
en général. En permettant le retraitement de produits à usage unique, l?offre de produits à des
prix plus abordables se développera, influençant directement les dépenses de santé. En outre,
permettre le retraitement augmentera l?offre de produits à des prix plus abordables, ce qui
pourra développer la concurrence, en plus d?impacter directement les dépenses de santé.
Lorsque l?activité de retraitement est réalisée par des fabricants, tant le règlement (UE)
2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 que le projet de décret
imposeront les mêmes exigences à ces « fabricants-retraiteurs » qu?aux fabricants du produit
original, favorisant ainsi la concurrence de deux opérateurs économiques dans des conditions
d'égalité sur le marché, sans imposer de restrictions d'accès inégales ni limiter la libre
concurrence.
[97] La Suède a quant à elle réalisé des évaluations de l?impact économique du retraitement
des cathéters d?électrophysiologie. Ainsi, selon les calculs du conseil pour la santé et le bien-
être, Socialstyrelsen, qui a été chargé d?évaluer les modalités de mise en oeuvre des dispositions
relatives au retraitement des DMUU en Suède, la réutilisation systématique des cathéters
d?électrophysiologie pourrait permettre d?économiser entre 65 et 70 millions de couronnes (de
5,54 à 5,97 millions d?¤).
2.2.2 Critères écologiques
[98] Seul le Royaume Uni a inscrit dans le Plan Green NHS l?objectif de retraitement des
DMUU dans les établissements de santé.
[99] En Suède, la question écologique n?est que peu abordée par les administrations chargées
de la mise en oeuvre des dispositions relatives au retraitement des DMUU. Dans son rapport de
2020 sur les conditions techniques de mise en oeuvre du retraitement des DMUU, le conseil de
la santé et du bien-être, Socialstyrelsen, évoque néanmoins le fait que le retraitement des
DMUU s?insère dans les objectifs de préservation de l?environnement de l?Agenda 2030. À ces
arguments, les organisations professionnelles, opposées à la réutilisation des DMUU, répondent
que les processus de retraitement sont coûteux et ont également un impact sur
l?environnement. Elles soulignent également que le montant des compensations financières
liées aux accidents médicaux causés par des DMUU mal retraités peut être très élevé, et que
des DMUU mal retraités peuvent contribuer à augmenter l?antibiorésistance. Des organisations
de médecins rétorquent à ces arguments que la réutilisation de certains dispositifs, comme les
cathéters, se fait depuis des années sans problème. Ils soulignent par exemple que 60 000
procédures d?ablation par cathéter ont été enregistrées sur la période 2005-2019 sans
complications liées à la réutilisation des produits selon le registre suédois de l?ablation par
cathéter.
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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Espagne Royaume Uni Suède
Pas d?analyse des impacts
écologiques à ce stade
disponible
Le retraitement des DMUU
s?inscrit dans l?engagement
gouvernemental en 2019 à
atteindre un objectif "zéro
carbone" d'ici à 2050
nécessitant une réduction
significative des émissions dans
tous les secteurs, et notamment
celui de la santé91. Dans ce
contexte, en 2020 a été lancé un
plan Green NHS. Ce travail, qui
a consisté en une consultation
nationale auprès des patients et
du personnel, a abouti à la
publication d?un rapport,
intitulé " Mettre en place un
service national de santé zéro
émissions net ». Le plan Green
NHS inclut notamment
l?objectif de réduction des
déchets des hôpitaux, et
l?investissement dans des
programmes de recyclage
Dans son rapport de 2020 sur
les conditions techniques de
mise en oeuvre du retraitement
des DMUU, le conseil de la
santé et du bien-être,
Socialstyrelsen, évoque le fait
que le retraitement des DMUU
s?insère dans les objectifs de
préservation de
l?environnement de l?Agenda
2030
Source : Mission à partir des données transmises par les CAS.
2.3 Périmètre des DMUU éligibles au retraitement
[100] Aucun des trois pays interrogés n?a établi de liste de DMUU autorisés au retraitement.
Le principe guidant la possibilité de retraiter est l?étude des risques du DMUU initial, et la
capacité d?un organisme réalisant le retraitement à démontrer la conformé du DMUU retraité
aux exigences essentielles (marquage CE ou respect des recommandations spécifiques).
Espagne Royaume Uni Suède
Aucun DMUU n?est
actuellement retraité. En effet,
le décret du 21 mars 2023
implique l?adoption de mesures
d?application techniques. Il
convient en outre que les
entités effectuant ce
Il n?existe pas de liste de DMUU
autorisés à être retraités. Les re-
fabricants sont autorisés à
retraiter les DMUU dont ils
arrivent à démontrer la
conformité aux exigences de la
Il n?existe pas de liste de DMUU
autorisés à être retraités.
La Suède suit les classifications
de l?Union européenne et ne
dresse pas de liste exhaustive
91 Le système de santé britannique (NHS) est ainsi l'un des principaux émetteurs de dioxyde de carbone
au Royaume-Uni avec 5,4 % des émissions totales de carbone et 40 % de l'ensemble des émissions du
secteur public (NHS).
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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retraitement disposent
préalablement d?une
autorisation d?activité
directive sur les dispositifs
médicaux.
Un organisme certifiant est
également en charge de vérifier
que le DMUU reconditionné
réponde clairement à tous les
critères appropriés de la
directive britannique sur les
dispositifs médicaux en termes
de performance et de sécurité ;
il doit confirmer la validité et la
certitude de tous les processus
de fabrication (processus de
conception le cas échéant), et
doit s?assurer qu'ils répondent
aux exigences réglementaires
avant et après la mise sur le
marché. Par ailleurs, il est établi
une différence entre
refabrication et
transformation/remise à neuf :
la législation britannique
autorise la re-fabrication (re-
manufactured SUD), mais pas la
transformation / remise à neuf
des DMUU (« devices which are
reprocessed or fully
refurbished »)
des DMUU pouvant faire l?objet
d?un retraitement
Pour évaluer si un DMUU se
prête au retraitement, la
gestion des risques doit tenir
compte : des risques liés à la
composition des matériaux, aux
matériaux relargables, à la
contamination
microbiologique, aux prions et
aux agents de
l?encéphalopathie spongiforme
transmissible, aux endotoxines,
ainsi qu?aux réactions
pyrogènes, allergiques et
toxiques ; et des
caractéristiques techniques et
les propriétés géométriques des
produits.
Source : Mission à partir des données transmises par les CAS.
[101] Les DMUU exclus du retraitement sont ceux qui au cours des études de risques n?ont pas
montré leur capacité tant sur le plan technique que sécuritaire.
[102] Concernant la justification de la limitation des produits ce sont ceux énumérés par le
règlement d'exécution (UE) 2020/1207 de la Commission du 19 août 2020, définit comme
produits ne pouvant pas être retraités.
[103] L?Espagne a jouté à cette liste les DMUU sur-mesure et ceux de classe I. Pour ces derniers,
à ce jour, aucun organisme notifié n'intervient dans l'évaluation de la conformité. Il s'agit de
produits autocertifiés par le fabricant lui-même. C'est pour cela que, sur la base des risques
découlant de leur retraitement et d'une nouvelle autocertification, le décret exclut le
retraitement de tous les produits à usage unique de classe I. Concernant les produits sur
mesure, bien qu?ils soient fabriqués sur mesure et qu'aucun retraitement éventuel ne soit
prévu, ils sont repris dans la liste afin que toute possibilité de retraitement soit expressément
interdite.
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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[104] La Suède a néanmoins étudié des classes de DMUU qui pourraient être retraitées, il s?agit
des DMUU utilisés dans les secteurs de la néphrologie (notamment la dialyse), la cardiologie,
l?orthopédie, la laparoscopie, l?endoscopie, l?urologie et la gynécologie, ainsi que
l?anesthésiologie92 .
Espagne Royaume Uni Suède
L?article 11 du décret 192/2023 du 21 mars
2023 fixe, dans son 2ème paragraphe la liste
des produits exclus, ne pouvant être ni
retraités ni utilisés. Il s?agit de ceux définis
par la règlementation européenne.
L?Espagne a ajouté deux DMUU à cette liste,
les DMUU sur-mesure et les DMUU de classe I
Il n?existe pas de liste
d?exclusion
Il s?agit de ceux définis
par la règlementation
européenne
Source : Mission à partir des données transmises par les CAS.
2.4 Organisation du retraitement
2.4.1 Espagne
[105] Le décret fixe, la liste des acteurs susceptibles d?effectuer des activités de retraitement,
sous réserve de certaines conditions, propres à chaque acteur. Il définit ainsi trois acteurs du
retraitement :
? les fabricants de produits retraités ;
? les hôpitaux ;
? les entreprises de retraitement externes, qui retraitent des DMUU à la demande d?un
hôpital.
[106] Pour conduire cette activité, les fabricants de produits retraités et les hôpitaux doivent
être titulaires d?une autorisation spécifique préalable, délivrée par l?AEMPS.
[107] L?Espagne précise également les conditions d?activité :
? les fabricants de produits retraités [titulaires d?une autorisation délivrée par l?AEMPS] ne
peuvent distribuer directement leurs produits retraités qu?à un hôpital. Ils ne peuvent
commercialiser en Espagne que les DMUU retraités pour lesquels ils ont réalisé eux-
mêmes l?ensemble du cycle de retraitement ;
? pour ce faire, un contrat écrit doit être signé entre le fabricant et l?hôpital, définissant
les responsabilités de chaque partie s?agissant des conditions d?utilisation et de stockage
des unités utilisées, des conditions de retour, de destruction, de surveillance et de
92 Förutsättningar för att reprocessa och återanvända medicintekniska engångsprodukter i Sverige
(socialstyrelsen.se).
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RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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traçabilité des produits. L?hôpital doit retourner le produit retraité, une fois utilisé, au
fabricant qui le lui a remis. Le fabricant doit s?assurer de la destruction du produit retraité
lors que celui-ci arrive au terme du cycle de retraitement ou au terme de sa vie utile ou
quand il ne peut plus assurer que le fonctionnement et la sécurité du produit retraité
sont conformes au produit d?origine ;
? toutefois, les hôpitaux peuvent effectuer cette destruction, si cela figure dans le contrat
avec le fabricant. Les fabricants de produits retraités doivent communiquer au Registre
de commercialisation toutes les informations définies dans le décret, créant ledit
registre. [titulaires d?une autorisation délivrée par l?AEMPS].
[108] En outre l?Espagne précise que ne peuvent être retraités que les DMUU qui ont été utilisés
et retraités dans leurs propres services ou par une entreprise de retraitement externe. Ils ne
peuvent pas vendre ou délivrer les produits retraités à des tiers. Les hôpitaux peuvent sous-
traiter l?activité de retraitement à une entreprise externe de retraitement. Un organisme notifié
certifiera que l?hôpital remplit les conditions fixées par le règlement UE d?exécution
2020/1207.Les audits annuels prévus par ce même règlement doivent être effectués par des
organismes accrédités et les hôpitaux doivent remplir les conditions fixées à l?article 23 du
règlement.
[109] De plus, l?Espagne impose que les entreprises externes de retraitement aient leur siège
social et un établissement en Espagne. Elles ne peuvent pas sous-traiter les activités de
retraitement. Elles doivent respecter les dispositions de l?article 17§3 du règlement UE 2017/745
et de son règlement d?exécution et doivent s?assurer que l?hôpital avec lequel elles traitent
remplit bien les conditions fixées par le décret. Enfin, « il n?est pas permis d?acheter et d?utiliser,
en Espagne, des DMUU qui auraient été envoyés vers un pays tiers pour y être retraités. »
2.4.2 Royaume Uni
[110] Selon l?avis du MHRA, le retraitement doit être assuré par des « re-fabricants »
indépendants extérieurs aux établissements de santé. Ils garantissent la mise à disposition des
bacs de recyclage, leur collecte, et le recyclage des DMUU (déchiquetage, fonte et
transformation en nouveaux produits).
[111] Les entreprises de retraitement ont la responsabilité de déterminer le nombre maximal
de cycles de retraitement auxquels le dispositif peut être soumis tout en conservant l'ensemble
des paramètres de fonctionnalité, de performance et de sécurité du dispositif, et en assurent
le suivi. Le re-fabricant accepte également toutes les responsabilités et obligations liées au
retraitement du DMUU, notamment les documents techniques, la décontamination, le
nettoyage, la stérilisation et charge biologique, l?étiquetage, la gestion des risques, et la
surveillance après la mise sur le marché.
[112] Les dispositifs retraités doivent être fournis aux établissements de santé dans le cadre de
contrats en circuit fermé, ce qui signifie qu?en aucun cas un établissement de santé ou un re-
fabricant ne doit vendre ou fournir un DMUU retraité à une tierce partie. De même, un
établissement de santé doit avoir des contrats avec différents re-fabricants pour différents
DMUU.
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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2.4.3 Suède
[113] Les établissements de santé, conjointement, le cas échéant, avec les entreprises de
retraitement externes, sont responsables de la sécurité et des performances du dispositif
retraité. Il convient donc que les établissements de santé et les entreprises de retraitement
externes disposent d?un système de gestion de la qualité garantissant le respect des exigences
applicables.
[114] Les exigences qui s?appliquent aux acteurs de la filière du retraitement sont en large
partie les mêmes que celles qui s?appliquent aux fabricants. Ainsi, le respect des spécifications
communes aux DMUU doit être certifié par un organisme notifié.
[115] Les établissements de santé et les entreprises de retraitement externes dont les activités
incluent des soins de santé doivent soumettre les informations sur leurs activités et les produits
ayant fait l?objet du retraitement à l?Inspection des soins (IVO) pour enregistrement. Depuis le
1er juillet 2023, IVO a créé un registre des DMUU ayant fait l?objet d?un retraitement93.
2.5 Filières de retraitement
[116] Les pays interrogés ne disposent pas de filière de retraitement. En ce qui concerne la
Suède, aucune filière n?a été précisée par le CAS, et la mission, n?en a pas eue connaissance.
Les seules filières connues sont localisées en Allemagne et sont au nombre de trois. Le Royaume
Uni retraite ses DMUU en Allemagne.
Espagne Royaume Uni Suède
Pas de filière de retraitement
des DMUU mais des entreprises
qui stérilisent pour le compte
d?établissement de santé
Pas de filière de retraitement
mais des entreprises qui
recyclent le PVC présents dans
les DMUU (canules nasales,
tubes à oxygène, masques
d'anesthésie et masques à
oxygène)
Peu d?informations sur les
acteurs privés présents sur le
marché du retraitement des
DMUU
Source : Mission à partir des données transmises par les CAS.
2.6 Traçabilité des DMUU
[117] Les réponses apportées par les pays interrogés apportent peu de renseignement sur la
traçabilité mise en place en interne à l?établissement de santé, c?est-à-dire la traçabilité
sanitaire dans le cadre de la matériovigilance (décret du 29 novembre 2006). Cette traçabilité
doit permettre de pouvoir identifier rapidement les patients pour lesquels les dispositifs
médicaux d'un lot ont été utilisés ou les lots de dispositifs médicaux utilisés chez un patient.
93 Nytt IVO-register för reprocessare | IVO.se
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Or les réponses apportées portent sur la traçabilité mise en place par l?entreprise de
retraitement.
[118] Seule la Suède précise qu?un système permettant de retrouver le patient chez qui un
DMUU a été utilisé a été mis en place.
Espagne Royaume Uni Suède
Traçabilité du nombre de cycle
La traçabilité est organisée
conformément aux dispositions
du Règlement d?exécution
2020/1207. Les DMUU retraités
ne pouvant être utilisés que
dans des hôpitaux. L?AEMPS
indique qu?un texte
d?application du ministère de la
santé, à venir, apportera des
précisions
Traçabilité du nombre de cycle
Selon l?avis de la Medical Health
care Regulatory Agency, le
système de traçabilité est assuré
par les entreprises de
retraitement, grâce à des
contrats en circuit fermé.
L?existence d?un seul contrat
pour chaque DMUU permet une
mise en relation unique entre un
établissement de santé et une
entreprise de retraitement
Traçabilité sanitaire
En vue de garantir la sécurité et
les performances des DMUU
retraités, chaque établissement
de santé utilisant des DMUU qui
ont été retraités par
l?établissement de santé lui-
même ou par une entreprise de
retraitement externe à la
demande de cet établissement
de santé devrait mettre en place
un système lui permettant de
collecter des informations sur
les incidents survenant en
rapport avec ces dispositifs et
devrait notifier les incidents
graves à l?autorité compétente
Le fabricant et, le cas échéant,
l?entreprise de retraitement
externe doivent également être
informés des incidents graves
Source : Mission à partir des données transmises par les CAS.
2.7 Information des patients
[119] Seule l?Espagne a inscrit dans sa règlementation l?obligation d?information des patients.
Au Royaume-Uni et en Suède, cette information n?est pas prévue. Néanmoins, elle reste en
débat en Suède. C?est en effet un élément de réflexion éthique soulevé par l?industrie des
produits de santé, s?appuyant sur la loi sur les patients qui prévoit qu?ils doivent pouvoir être
informés des techniques de soins utilisées dans le cadre de leur prise de charge.
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RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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Espagne Royaume Uni Suède
L?article 15 du décret précise
que les hôpitaux doivent
informer leurs patients de
l?utilisation, dans leurs services,
de produits retraités par leur
propre centre hospitalie
L?AEMPS indique qu?un texte
d?application du ministère de la
santé, à venir, apportera des
précisions
L?avis de la Medical Health care
Regulatory Agency ne prévoit
pas l?information des patients
de l?utilisation d?un DMUU
retraité
Il n?existe à ce jour pas de
dispositions spécifiques sur le
droit des patients à être
informés qu?un DMUU retraité
est utilisé dans le cadre de leur
prise en charge
Source : Mission à partir des données transmises par les CAS.
3 Le retraitement des DMUU est aussi développé en
Amérique du Nord, particulièrement aux USA
3.1 États-Unis
[120] Avant les années 2000, le retraitement des DMUU était largement répandu mais sans
réglementation. C?est au cours de cette décennie que la « Food and Drug Administration »
(FDA) a commencé à travailler à l?encadrement de cette pratique, qui a pris forme par la
publication d?un avis favorable en 2008 de la FDA94. Cet avis précise qu?un DM peut être
étiqueté comme étant à usage unique parce que le fabricant estime qu?il ne peut pas être
utilisé plus d?une fois de manière sure et fiable ou parce que le fabricant choisit de ne pas
mener les études nécessaires pour démontrer que le DM peut être réutilisable.
[121] La FDA publie une liste de DMUU qui peuvent être réutilisés, et se fonde sur des études
menées par les fabricants portant notamment sur l?efficacité des méthodes de nettoyage, de
stérilisation et de performances. La stérilisation est l?élément discriminant du process, en effet,
tous les établissements de santé ne peuvent pas mettre en place les niveaux d?exigences décrits
par les industriels et se tournent vers un tiers sous-traitant.
[122] D?après les chiffres disponibles sur le site de l?AMDR (« Association of Medical Device
Reprocessor) », plus de 9 000 établissements de santé (hôpitaux et centres de chirurgie)
utiliseraient des DMUU retraités.
[123] La mission a échangé avec un acteur américain qui envisage de s?implanter sur le
territoire européen.
94 Government accountability office (GAO) ?Reprocessing Single-use Medical devices: FDA oversight has
increased, and available information does note indicate that use presents and elevated health risk?, 2008.
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RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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3.2 Canada
[124] Comme en Europe, trois provinces ont interdit le retraitement des DMUU dits
« critiques95 » mais d?autres ont autorisé ce retraitement sous réserve que les hôpitaux
recourent à une entreprise agréée qui devra répondre aux mêmes exigences que celles
imposées aux fabricants de DMUU neufs.
95 Un dispositif est dit « critique » s?il pénètre dans les tissus stériles de l?organisme notamment l?appareil
vasculaire et qui par conséquent nécessite un nettoyage suivi d?une stérilisation (INSPQ 201)
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ANNEXE 4 : Leviers de réduction de
l?empreinte écologique des dispositifs
médicaux
1 LE RETRAITEMENT DES DM A USAGE UNIQUE EST LE LEVIER DE DECARBONATION MIS EN
EXERGUE PAR LA FEUILLE DE ROUTE « PLANIFICATION ECOLOGIQUE » DU MINISTERE DE
LA SANTE ................................................................................................................................................ 83
1.1 SI LES ETUDES FRANÇAISES SUR L?EMPREINTE ECOLOGIQUE DES DM SONT RARES, ILS REPRESENTERAIENT
20 % DES EMISSIONS CARBONE DU SYSTEME DE SANTE ...................................................................... 83
1.1.1 L?évaluation de l?empreinte écologique des DM repose sur plusieurs méthodes sans
encadrement par le ministère de la santé ....................................................................................... 83
1.1.2 L?empreinte écologique des DM s?explique surtout par le circuit de production de leurs intrants
qui incluent souvent des métaux rares ............................................................................................ 84
1.2 LE RETRAITEMENT DES DM PEUT CONTRIBUER A REDUIRE LEUR EMPREINTE ECOLOGIQUE MAIS N?EST PAS
LE LEVIER LE PLUS IMPACTANT ............................................................................................................. 88
1.2.1 La feuille de route recense plusieurs leviers de décarbonation des DM en accordant une
visibilité particulière à leur retraitement ......................................................................................... 88
1.2.2 La primauté accordée à ce levier est excessive au regard de son impact relatif sur l?empreinte
écologique et de ses modalités de mise en oeuvre......................................................................... 90
2 LA GOUVERNANCE ET LES MOYENS ALLOUES A LA PLANIFICATION ECOLOGIQUE DU
SYSTEME DE SANTE NE SONT PAS A LA HAUTEUR DE L?ENJEU DE DECARBONATION DES
DM ............................................................................................................................................................ 94
2.1 LA FAIBLESSE DU PILOTAGE NATIONAL DE CETTE STRATEGIE ENGENDRE UN RISQUE DE DECALAGE
CROISSANT AVEC LES INITIATIVES CONSTATEES A L?HOPITAL .............................................................. 94
2.1.1 L?Anap assume un rôle d?opérateur de la feuille de route mais son portage reste fragile au sein
de l?administration centrale et déconcentrée ................................................................................ 94
2.1.2 Or les initiatives se développent dans une partie des établissements de santé sans
accompagnement suffisant de la part de l?État .............................................................................. 95
2.2 LA MISE EN OEUVRE D?UNE STRATEGIE CREDIBLE DE REDUCTION DE L?EMPREINTE ECOLOGIQUE DES DM
EXIGE AUSSI UNE COLLABORATION INTERMINISTERIELLE RENFORCEE ................................................... 97
2.2.1 Dans une logique de subsidiarité, le soutien des administrations en charge de la transition
écologique à la décarbonation du système est modeste .............................................................. 97
2.2.2 La DGE assume un leadership fondé sur le double objectif de relocalisation des industries de
santé et de décarbonation................................................................................................................. 98
3 EN PARALLELE DE L?EXPERIMENTATION, LA MISE EN OEUVRE DES AUTRES LEVIERS DE
REDUCTION DE L?EMPREINTE ECOLOGIQUE DES DM EST INDISPENSABLE ET NECESSITE
UN APPUI NATIONAL RENFORCE .................................................................................................... 99
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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3.1 CONFORMEMENT AUX DISPOSITIONS INTERMINISTERIELLES, LES ACHATS HOSPITALIERS, QUI
CONSTITUENT UN LEVIER MAJEUR, DOIVENT CONTRIBUER DAVANTAGE A LA REDUCTION DE
L?EMPREINTE ECOLOGIQUE DES DM .................................................................................................... 99
3.1.1 En dépit d?obligations croissantes, le levier des achats reste encore sous-utilisé par les hôpitaux
pour diminuer leur empreinte environnementale .......................................................................... 99
3.1.2 À l?exemple du système de santé britannique, les achats hospitaliers devraient constituer le
principal levier de décarbonation des DM ..................................................................................... 102
3.2 LE RETRAITEMENT DES DM A USAGE UNIQUE, QUI SONT DEFINIS COMME TELS PAR LES SEULS
INDUSTRIELS, DOIT AUSSI S?ACCOMPAGNER DU DEVELOPPEMENT DES DM A USAGE MULTIPLE ........... 104
3.2.1 L?évolution de la part respective des DM à usage unique et des DM à usage multiple ne fait
l?objet d?aucun suivi au niveau national .......................................................................................... 104
3.2.2 Le développement de l?usage multiple est souvent conditionné dans les établissements de
santé à une organisation et des moyens adaptés .......................................................................... 106
3.3 LA FORMATION DES PERSONNELS HOSPITALIERS DOIT CONTRIBUER EN PARTICULIER A FAIRE CONVERGER
DAVANTAGE LES DEMARCHES DE PERTINENCE ET DE SOBRIETE DES SOINS ......................................... 108
3.3.1 Le développement de l?éco-responsabilité en matière de soins peut contribuer à renforcer
l?efficience du système de santé ...................................................................................................... 108
3.3.2 La sensibilisation des personnels hospitaliers aux enjeux liés à la transition écologique dépend
encore largement des directions d?établissement ........................................................................ 109
3.4 ENFIN, LE TRI ET LA REVALORISATION DES DECHETS ISSUS DES DM, QUI DEPENDENT AUJOURD?HUI
LARGEMENT DES DECISIONS LOCALES, DOIVENT FAIRE L?OBJET D?UNE STRATEGIE NATIONALE ........... 109
3.4.1 Les établissements de santé sont soumis à des obligations croissantes en matière de gestion
des déchets, en partie communes au secteur tertiaire ................................................................ 109
3.4.2 Les établissements de santé sont peu incités et accompagnés dans la réduction et la
valorisation des déchets, en particulier ceux issus des DM .......................................................... 110
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RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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1 Le retraitement des DM à usage unique est le levier de
décarbonation mis en exergue par la feuille de route
« planification écologique » du ministère de la santé
1.1 Si les études françaises sur l?empreinte écologique des DM sont rares,
ils représenteraient 20 % des émissions carbone du système de santé
1.1.1 L?évaluation de l?empreinte écologique des DM repose sur plusieurs
méthodes sans encadrement par le ministère de la santé
[125] L?empreinte écologique des dispositifs médicaux (DM) en France est difficile à
appréhender :
? cette donnée, qui est plus englobante que la seule empreinte carbone avec laquelle elle
tend à être confondue, est issu d?un calcul fondé sur la méthode de l?Analyse du cycle de
vie (ACV)96 permettant d?apprécier les différentes catégories d?impact sur l?environnement
(changement climatique, toxicité de eau, épuisement des ressources?) d?une activité ;
? l?ACV, comme le calcul de l?empreinte carbone, font partie de la vingtaine de méthodes
recensées en 2021 par l?Ademe pour apprécier les impacts environnementaux : si ces
méthodes font l?objet de différents standards nationaux ou internationaux, dont des
normes Iso, elles restent complexes à mobiliser et dépendantes de l?objectif recherché ;
? les acteurs du champ de la santé sont globalement peu familiers de ces méthodes dont la
mise en oeuvre tend à être externalisée auprès de prestataires ou de chercheurs, sans qu?ils
disposent toujours de la capacité à apprécier la robustesse des résultats obtenus ;
? concernant plus particulièrement les produits de santé, en particulier les DM, l?évaluation
de leur empreinte écologique suppose en outre d?obtenir des fabricants des informations
(ex : nature exacte des intrants, mode de fabrication, mode d?acheminement vers les lieux
d?assemblage, etc.) dont le recueil est complexifié par le caractère le plus souvent sous-
traité et internationalisé du circuit de production.
96 L?empreinte carbone traduit le volume des émissions directes et indirectes de gaz à effets de serre émises
sur un périmètre donné (une activité, un produit, un établissement, etc.). La capacité de chaque gaz à
renvoyer de l?énergie vers le sol est évalué comparativement au CO2. L?empreinte carbone s?exprime en
tonnes ou kilos d?équivalent CO2. L?empreinte écologique mesure plus globalement la pression qu?exerce
l?activité humaine sur les ressources et les écosystèmes. L?ACV recense et quantifie, tout au long de la vie
d?un produit, les flux physiques de matière et d?énergie associés aux activités humaines. Les résultats sont
ensuite traduits en une quinzaine de catégories d?impact (ex : changement climatique, destruction de la
couche d?ozone, toxicité humaine, acidification, écotoxicité, épuisement de la ressource, etc.). Voir ADEME,
O. RETHORE, C. HUGREL et M. PALLUAU, Bleu Safran, G. AUDARD et P. OSSET, Solinnen. 2020. Guide d?aide
à la sélection des méthodes d?évaluation environnementale.
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[126] Si la complexité des méthodes d?évaluation de l?empreinte écologique d?un DM est un
facteur à prendre en compte dans l?appréciation de l?intérêt du retraitement des DM à usage
unique, elle doit dans son ensemble être relativisée :
? quand il s?agit de comparer l?empreinte écologique de deux produits très similaires (un DM
à usage unique et un DM à usage multiple) , voire identiques (un DM à usage unique neuf et
un DM à usage unique retraité), elle impose une attention particulière sur les choix
méthodologiques effectués et le périmètre des données recueillies qui conditionnent la
robustesse des résultats ;
? en revanche, sur un plan plus macro, par exemple quand il s?agit d?apprécier l?empreinte
écologique des achats de produits de santé d?un établissement, ces biais méthodologiques
sont moins susceptibles de fausser les ordres de grandeur obtenus, qui permettent
d?identifier les principaux postes et étapes de production responsables en particulier des
émissions de carbone.
1.1.2 L?empreinte écologique des DM s?explique surtout par le circuit de
production de leurs intrants qui incluent souvent des métaux rares
[127] La mission a recensé un nombre limité d?études françaises sur l?empreinte écologique des
DM :
? il s?agit pour la plupart de travaux réalisés par des professionnels de santé, en particulier
pharmaciens, travaillant, souvent dans le cadre d?une thèse, en établissement de santé ;
? elles portent sur un périmètre encore étroit de dispositifs médicaux (lames laryngologiques,
dispositifs médicaux utilisés dans le cadre de l?accouchement par voie basse, ancillaires) ;
? elles mobilisent des méthodes assimilables à l?ACV, généralement réalisées en partie par des
prestataires, sans que la mission soit en mesure d?apprécier leur robustesse ;
? elles sont diffusées en ligne mais ne font pas l?objet d?une publication dans une revue
scientifique à comité de lecture ;
? aucune ne porte sur la comparaison entre l?empreinte environnementale d?un DM à usage
unique retraité par rapport à ce même DM à usage unique neuf.
[128] Si la mission n?a pas mené à proprement parler une revue de littérature sur l?empreinte
écologique des DM, elle a néanmoins recensé des études étrangères pertinentes :
? sept études, dont cinq sont publiées dans une revue à comité de lecture, portent
spécifiquement sur le retraitement des cathéters d?électrophysiologie (cf. infra) ;
? au-delà du sujet spécifique du retraitement, la plateforme HealthcareLCA permet d?accéder
à des publications sur l?empreinte environnementale de produits de santé ou d?actes de
soins (cf. exemple infra), classées à partir de différents critères (méthode utilisée, impact
environnemental analysé, postes d?émission pris en compte, etc.).
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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Graphique 1 : Vue des publications sur l?empreinte environnementale de dispositifs
médicaux utilisés en urologie sur la plateforme HealthcareLCA
Source : Mission, recherche effectuée le 21 novembre 2023
[129] Les émissions de carbone des DM, estimées par le Shift Project97 à environ 10 tonnes de CO2
équivalent98, soit de l?ordre de 20 % du total des émissions du système de santé français99, sont
du point de vue des établissements de santé des émissions indirectes attribuables à leur circuit
de fabrication. En d?autres termes, les établissements de santé n?ont pas de leviers directs sur ces
émissions qui résultent des choix effectués par les fabricants sur les matières premières utilisées,
les lieux ainsi que les modes de fabrication (en particulier la source l?énergie utilisée). Comme le
montre le schéma 1 ci-dessous relatif à la composition d?un cathéter d?électrophysiologie, il est
possible, à partir des informations fournies par les fabricants, de décomposer l?empreinte carbone
d?un dispositif médical par composant (en l?espèce, l?empreinte carbone de ce DM s?explique
surtout par le recours, quoiqu? en très faible quantité, à des métaux précieux). Par ailleurs, le
97 The Shift Project se définit sur son site Internet comme « un think tank qui oeuvre en faveur d?une économie
libérée de la contrainte carbone ». L?association, créée en 2010, est présidée par Jean-Marc Jancovici. Elle
produit des études sur le lien entre économie et énergie.
98 Les données utilisées correspondent à l?année 2019 et sont celles du Snitem (le chiffre d?affaires des DM
consommés en France était selon le Snitem de 32,4 Md¤ hors taxes). Le chiffre d?affaires des DM importés a
ensuite isolé sur la base de données issues du Centre du commerce international. L?association a distingué
les montants des ventes des laboratoires produisant des DM en France. Ces dépenses ont ensuite été
converties en kgCO2e en appliquant le facteur d?émission défini par l?Ademe. Ce facteur d?émission permet
de convertir une donnée d?activité physique en une quantité d?émissions de gaz à effet de serre (GES).
L?ensemble des GES estimés sont rapportés à une unité commune, le CO2, d?où l?expression « équivalent »
CO2).
99 « Décarboner la santé pour soigner durablement », rapport final V2, avril 2023 (actualisation de la version
publiée en 2021). L?étude estime à 49 M de tonnes de CO2 équivalent l?empreinte carbone du secteur de la
santé. En raison de la marge d?incertitude inhérente à la méthode retenue, la part des émissions du secteur
de la santé représenterait entre 6,6 % et 10 % de l?empreinte carbone de la France.
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schéma 2 illustre le caractère très internationalisé de la chaîne d?approvisionnement d?un
cathéter d?électrophysiologie dont l?assemblage est réalisé en Amérique du Sud à partir d?intrants
provenant en particulier de Chine (semi-conducteurs) et d?Afrique du Sud (platine), tandis qu?il
est stérilisé en Californie avant d?être acheté par un CHU français. Enfin, le tableau 1, issu d?une
analyse de cycle de vie d?un cathéter réalisée par des chercheurs britanniques, montre que plus
de la moitié des émissions de carbone sont liées au processus de production, en particulier les
matières premières utilisées.
Schéma 6 : Composition d?un cathéter d?électrophysiologie (à gauche, le poids
respectif des principaux composants, à droite leur empreinte carbone)100
Source : Josselin Duchateau, institut de rythmologie et de modélisation cardiaque de Bordeaux. La
masse du cathéter est constitué majoritairement de papier et de thermoplastique. En revanche, son
empreinte carbone est majoritairement liée à la présence en très faible volume de métaux précieux
(or, platine, iridium).
100 Dans le graphique de gauche, les termes « thermoset » et « thermoplastic » désignent deux catégories
différentes de plastiques constitués à partir de polymère. Traduction des termes du graphique de droite :
Gold : or ; PT/IR : platine ou iridium ; paper : papier ; HDPE : polyéthylène de haute densité ; ABS : acrylonitrile
butadiène styrène.
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Schéma 7 : Représentation de la provenance des intrants participant à la fabrication
d?un cathéter d?électrophysiologie101
Source : Josselin Duchateau, institut de rythmologie et de modélisation cardiaque de Bordeaux. Ce
schéma permet de distinguer différentes étapes de production (soit la chaîne d?approvisionnement,
« supply chain » en anglais : recherche et développement aux États-Unis, assemblage en Amérique
du Sud, semi-conducteurs produits en Chine) et l?origine des différents intrants (pétrole américain,
platine sud-africain, charbon australien, plastique chinois). Les informations ont été fournies par le
fabricant (Biosense Webster). Le circuit est simplifié car il ne fait pas apparaître l?étape de
stérilisation des cathéters à l?oxyde d?éthylène, qui se fait généralement en Californie.
101 R&D : recherche et développement ; oil : combustibles fossiles ; HQ (headquarters) : siege de la société ;
ASM : assemblage ; SM : semi-conducteurs ; coal : charbon ; Pt : platine.
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Tableau 17 : Répartition des émissions de carbone d?un cathéter d?électrophysiologie
par principal intrant et étape de fabrication102
Source : Meister, J.A.; Sharp, J.Wang, Y.; Nguyen, K.A. Assessing Long-Term Medical Remanufacturing
Emissions with Life Cycle Analysis. Processes 2023, 11, 36. https://doi.org/10.3390/pr110100. La phase
de production du cathéter est responsable de près de 59 % des émissions de CO2e contre moins de
3 % pour la phase de transport. Concernant les matériaux utilisés, le polysulfone (catégorie de
thermoplastique) est le principal émetteur de CO2e. Nota bene : l?empreinte carbone des métaux
précieux n?est pas prise en compte dans le périmètre de cette étude.
1.2 Le retraitement des DM peut contribuer à réduire leur empreinte
écologique mais n?est pas le levier le plus impactant
1.2.1 La feuille de route recense plusieurs leviers de décarbonation des DM en
accordant une visibilité particulière à leur retraitement
[130] La feuille de route « planification écologique du système de santé », publiée en mai 2023
dans le cadre de la démarche interministérielle « France nation verte »103, cible les DM en
particulier à travers l?un de ses sept domaines d?actions, les soins écoresponsables. Initiée par le
102 Le terme anglais « lorry » désigne un camion de transport. Les termes « container ship » désignent un porte-
conteneurs.
103 Lancé en octobre 2022 par la Première ministre, « France nation verte » est le plan d?actions recensant
toutes les actions engagées pour répondre aux objectifs de baisser suffisamment les émissions de gaz à effet
de serre, adapter le pays au changement climatique, restaurer la biodiversité et réduire l?exploitation des
ressources naturelles à un rythme soutenable.
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cabinet de la ministre en charge de l?organisation territoriale et des professions de santé, elle
traduit la volonté de participer à la baisse de 5 % par an des émissions de gaz à effets de serre
jusqu?en 2050. Elle s?appuie pour partie sur des actions qui avaient déjà été engagées, en
particulier dans le cadre du Ségur de la santé104 et du programme « développement durable » de
l?Anap. Concernant les DM, elle cite plusieurs leviers d?actions, dont le retraitement des DM à
usage unique mais également :
? la revalorisation des déchets issus des DM et la mise en place d?une filière de valorisation
des métaux précieux ;
? la construction, en lien avec la Direction générale des entreprises (DGE), d?un référentiel
pour mesurer le bilan carbone dans l?acte d?achats ;
? l?étude, en lien avec l?Assurance maladie, de la mise en place d?un « scoring carbone ».
[131] La visibilité particulière accordée au retraitement des DM à usage unique (DMUU) peut
s?expliquer par la pression exercée en faveur de ce levier par des acteurs issus du monde
hospitalier. Alors que le retraitement des DMUU est interdit en France depuis les années 80105, la
création en avril 2017 au niveau européen d?un cadre juridique106 autorisant sous conditions cette
pratique a pu laisser penser à ces acteurs qu?un revirement serait opéré au niveau national107. Or,
alors même que la crise sanitaire avait souligné l?intérêt, dans un contexte de tensions
d?approvisionnement108, de développer l?usage multiple de certains DM, le Gouvernement
français a choisi en avril 2022109 de rappeler, au niveau législatif, l?interdiction de retraiter les
DMUU. Cette interdiction n?a fait l?objet ni d?une évaluation ni d?une concertation préalables. Les
acteurs rencontrés par la mission ont fait part de leur incompréhension quant à cette décision
104 La mesure 14 du Ségur de la Santé prévoyait le financement jusqu?en 2025 à hauteur de 10 M¤ de 151
postes de Conseillers en transition écologique et énergétique en santé (CTEES) en charge de réaliser des
diagnostics et des plans d?actions pour réduire la consommation énergétique des bâtiments. Ce réseau est
animé par l?Anap.
105 Circulaire DGS n°669 du 14 avril 1986 relative à l?interdiction de restériliser le matériel médico-chirurgical
non réutilisable dit « à usage unique » et circulaire DGS/DH n°51 du 29 décembre 1994 relative à l?utilisation
des dispositifs médicaux stériles à usage unique dans les établissements de santé publics et privés.
106 Article 17 du Règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 relatif aux
dispositifs médicaux.
107 Trois courriers signés par les fédérations hospitalières et le Club des acheteurs en produits de santé (Claps)
ont été adressés entre juin 2018 et janvier 2022 au ministère de la santé en faveur d?une autorisation, au
moins à titre expérimental, du retraitement des DMUU. Une tribune a également été publiée le 7 décembre
2022 dans « Le Monde » par un collectif de professionnels de santé et de représentants de sociétés savantes
en faveur du retraitement des DMUU (« Face aux pénuries de dispositifs médicaux, le retraitement est une
nécessité pour continuer de soigner nos patients »).
108 Voir l?avis du 17 avril 2020 de l?Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé
(ANSM). Sollicitée par des établissements de santé confronté à tensions d?approvisionnement sur les lames
de laryngoscopes à usage unique, l?ANSM a défini une procédure sécurisée afin de permettre la réutilisation
de ces DMUU.
109 L?article 10 de l?ordonnance n°2022-582 du 20 avril 2022, codifié à l?article L. 5211-3-2 du code de la santé
publique, dispose que « le retraitement de dispositifs à usage unique mentionné à l?article 17 du règlement (UE)
2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017, leur mise sur le marché et leur utilisation sont
interdits ».
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perçue comme incohérente avec au moins deux enjeux, celui de l?empreinte écologique des DM
mais également celui de la réduction des tensions d?approvisionnement.
[132] Pour autant, l?inscription en LFSS 2024 d?une expérimentation relative au retraitement des
DMUU ne repose sur aucune évaluation préalable de son intérêt écologique ou économique110.
L?étude d?impact cite certes des études étrangères mettant en avant les économies financières et
la moindre empreinte écologique associées au retraitement de cathéters d?électrophysiologie.
Néanmoins, la question de la transposabilité de ces résultats, très dépendants des DM et du
processus de retraitement retenus, à l?expérimentation française n?est pas soulevée. Par ailleurs,
le choix d?expérimenter pendant deux ans dans quatre établissements de santé un tel
retraitement, plutôt que de le généraliser d?emblée, est justifié par la nécessité de mettre en
oeuvre un dispositif de traçabilité spécifique, sans que son opportunité sur un plan sanitaire soit
précisée.
1.2.2 La primauté accordée à ce levier est excessive au regard de son impact
relatif sur l?empreinte écologique et de ses modalités de mise en oeuvre
[133] La mission a recensé six études111 qui tendent à démontrer l?intérêt écologique du
retraitement des DMUU mais elles doivent être abordées avec précaution :
? les conclusions de ces études s?appliquent à un DMUU donné (en l?espèce, des cathéters
d?électrophysiologie) pour un processus de retraitement donné ;
? leurs résultats sont sensibles à différents paramètres, en particulier le coût et l?empreinte
écologique du DMUU neuf (qui dépendent donc, comme vu supra, de leur processus de
production), les ressources (eau et oxyde d?éthylène notamment) utilisées dans le cadre du
retraitement et le nombre maximal de cycles de retraitement applicables au DMUU ;
? la mission ne dispose pas des compétences pour analyser les éventuels biais
méthodologiques qui mettraient en cause la robustesse de leurs conclusions : à titre
d?exemple, une étude publiée en février 2023 dans la revue « Sustainability »112 met en cause
l?intérêt écologique du retraitement des cathéters d?électrophysiologie ; or, selon plusieurs
110 Voir article 29-1 de la LFSS pour 2024.
111 Bruno de Sousa Martins, João Queiroz e Melo, João Logarinho Monteiro, Graça Rente d Pedro Teixeira
Bastos, ?Reprocessing of Single-Use Medical Devices: Clinical and Financial Results?, Escola de Saúde do
Porto, Associação de Politécnicos do Norte, février 2019; Schulte, A.; Maga, D. Thonemann, N. ?Combining
Life Cycle Assessment and Circularity Assessment to Analyze Environmental Impacts of the Medical
Remanufacturing of Electrophysiology Catheters?. Sustainability 2021, 13, 898
https://doi.org/10.3390/su13020898 ; Geoffroy Ditac et. alii. ?Carbon footprint of atrial fibrillation catheter
ablation?, European Society of Cardiology, septembre 2022; Source : Meister, J.A.; Sharp, J.Wang, Y.;
Nguyen, K.A. Assessing Long-Term Medical Remanufacturing Emissions with Life Cycle Analysis. Processes
2023, 11, 36. https://doi.org/10.3390/pr110100 ; Amanda Andersen, « A case study of the environmental and
economic sustainability of using remanufactured ultrasound catheters?, université d?Aalborg (Danemark),
juin 2022 ; Anthesis (étude commandée par Stryker), ?Comparative Carbon Footprint of Reprocessed Single
Use Medical Devices?, février 2023.
112 Lalman, C.; Karunathilake, H.; Ruparathna, R. ?To Dispose or to Reuse? Analyzing the Life Cycle Impacts
and Costs of Disposal, Sterilization, and Reuse of Electrophysiological Catheters?.Sustainability 2023, 15,
5363. https://doi.org/10.3390/su15065363.
PUBLIÉ
https://doi.org/10.3390/su13020898
https://doi.org/10.3390/pr110100
https://doi.org/10.3390/su15065363
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experts de l?ACV rencontrés par la mission, ses calculs seraient faussés en particulier par une
sous-évaluation du nombre maximal de cathéters pouvant être stérilisés simultanément ;
? la mission n?est pas non plus en mesure d?apprécier les éventuels conflits d?intérêt des
auteurs de ces études qui reposent largement sur des données fournies par les deux
entreprises (Vanguard en Allemagne et Stryker aux Etats-Unis) intervenant sur ce marché
oligopolistique.
[134] Cela étant, les résultats de ces études, à une exception près, sont relativement
convergents : le retraitement des cathéters d?électrophysiologie à usage unique permettrait de
réduire leur empreinte carbone de l?ordre de 50 à 60 % sur leur cycle de vie. C?est en particulier
la conclusion d?une étude menée par des chercheurs de l?université de Brighton en Grande-
Bretagne. Comme le montre le tableau ci-dessous qui compare les émissions de gaz à effet de
serre d?un cathéter neuf par rapport à un cathéter retraité, la réduction de 60 % ici constatée
s?explique essentiellement par le fait que le retraitement (« remanufacturing » en anglais) est
nettement moins émetteur que la production du DMUU neuf, même si on y ajouté les émissions
liées au processus de stérilisation (25 % de l?empreinte carbone du DM retraité vs moins de 10 %
pour le DM neuf). Une autre étude113, allemande cette fois et financée par l?entreprise de
retraitement Vanguard, a également démontré que le retraitement des cathéters
d?électrophysiologie réduisait de 20 % la consommation des ressources abiotiques114 par rapport
à un cathéter neuf, ce qui traduirait une empreinte environnementale (et non uniquement
carbone) positive.
113 Schulte, A.; Maga, D. Thonemann, N. ?Combining Life Cycle Assessment and Circularity Assessment to
Analyze Environmental Impacts of the Medical Remanufacturing of Electrophysiology Catheters?.
Sustainability 2021, 13, 898 https://doi.org/10.3390/su13020898.
114 Les ressources abiotiques sont les ressources naturelles non vivantes, telles que le sol, l?eau, les minerais,
avant transformation éventuelle par l?homme. Il s?agit de ressources épuisables.
PUBLIÉ
https://doi.org/10.3390/su13020898
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Tableau 18 : Comparaison des émissions de gaz à effet de serre (en kg CO2e) par
intrant et étape de fabrication pour les cathéters neufs (a) et les cathéters retraités
(b)115
Source : Meister, J.A.; Sharp, J.Wang, Y.; Nguyen, K.A. Assessing Long-Term Medical Remanufacturing
Emissions with Life Cycle Analysis. Processes 2023, 11, 36. https://doi.org/10.3390/pr110100.
[135] Pour autant, il est essentiel de remettre en perspective l?intérêt écologique du retraitement
des DMUU avec les autres leviers de décarbonation des DMUU. Sans que la mission ait procédé à
une revue de littérature exhaustive, qui dépassait le périmètre de la commande, elle a identifié
plusieurs travaux hiérarchisant l?impact respectif des différents leviers de décarbonation des DM.
C?est l?objet du schéma ci-dessous qui classe les leviers de décarbonation en fonction de leur
impact environnemental. De façon générale, les études tendent à montrer que, plus tard on
intervient dans le cycle de vie du produit, plus le « gain » environnemental est limité. Ainsi, les
leviers agissant directement sur la composition (par exemple, la réduction du volume d?intrants
ou « material reduction » dans le schéma ci-dessous) et le mode de production d?un DM (par
exemple, le mix énergétique utilisé qui renvoie aussi au lieu de fabrication) ont plus d?impact que
ceux mobilisés en aval de la consommation du DM. C?est aussi le sens du schéma ci-dessous issu
de la stratégie de transition écologique du National Health System (NHS) britannique. Les
réductions attendues des émissions de carbone y sont classées par levier. Les volumes associés
aux leviers réduction des plastiques à usage unique et retraitement (flèches jaunes) sont
nettement inférieurs à ceux liés à la conditionnalité écologique imposée dans le cadre des achats
hospitaliers aux fournisseurs (flèches rouges).
115 Remanufacturing : retraitement (le terme « reprocessing » est aussi utilisé en anglais pour désigner le
retraitement). Packaging : emballage.
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Schéma 8 : Leviers de réduction de l?empreinte écologique des DM classés en
fonction de leur impact116
Source : Amanda Andersen, « A case study of the environmental and economic sustainability of
using remanufactured ultrasound catheters?, université d?Aalborg (Danemark), juin 2022.
Graphique 2 : Extrait du plan de décarbonation du NHS
Source : NHS England, ?Delivering a ?net zero? National Health Service?, juillet 2022.
116 Reuse : réutilisation ; energy recovery : récupération d?énergie.
PUBLIÉ
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2 La gouvernance et les moyens alloués à la planification
écologique du système de santé ne sont pas à la hauteur de
l?enjeu de décarbonation des DM
2.1 La faiblesse du pilotage national de cette stratégie engendre un risque
de décalage croissant avec les initiatives constatées à l?hôpital
2.1.1 L?Anap assume un rôle d?opérateur de la feuille de route mais son portage
reste fragile au sein de l?administration centrale et déconcentrée
[136] La crédibilité de la stratégie française de décarbonation des DM, comme de l?ensemble du
système de santé, est mise en cause par la faiblesse des moyens et de la gouvernance associés
aujourd?hui à cet enjeu. Il n?appartenait pas à proprement parler à la mission d?instruire ce sujet.
Toutefois, au regard de la saisine qui lui a été adressée, qui vise à réduire l?empreinte écologique
des DM, elle estime, sans avoir pleinement instruit ce sujet, que les modalités actuelles de pilotage
de la feuille de route « transition écologique » du ministère de la santé engendrent un risque de
« greenwashing » (ou éco-blanchiment). À titre de comparaison, selon une représentante du
programme « Greener NHS » rencontrée par la mission, environ 80 personnes travaillent au
service de la transition écologique du système de santé en Grande-Bretagne, dont une trentaine
uniquement sur les marchés hospitaliers durables. En France, le pilotage de la stratégie de
transition écologique en santé repose essentiellement aujourd?hui sur le conseiller en charge des
territoires, des élus et de la santé environnementale au cabinet de la ministre déléguée en charge
de l?organisation territoriale et des professions de santé :
? alors que la plupart des leviers concernent au moins deux directions du ministère, seule une
personne, positionnée au cabinet de la DGOS, consacré la moitié de son temps de travail à
la feuille de route ;
? l?Anap a indiqué à la mission mobiliser 5 ETP au sujet du développement durable, qui
assurent en particulier un rôle de suivi global des actions et de pilotage en propre de
plusieurs chantiers ;
? un haut-fonctionnaire en charge du développement durable (et de l?égalité entre les
femmes et les hommes) est responsable au secrétariat général des ministères sociaux du
seul volet interne de la transition écologique (services publics écoresponsables en
particulier) et participe à la comitologie de la feuille de route :
? la Caisse nationale d?assurance maladie a créé en novembre 2023 une Mission nationale
pour la Transition écologique du système de santé et la santé environnementale, centrée
sur la décarbonation des médicaments, et composée d?un ETP117 ;
117 Dans son rapport « charges et produits » pour 2024, la Cnam propose en particulier d?aller vers une prise
en compte de l?empreinte carbone des produits de santé dans leur tarification en lien avec le Comité
économique des produits de santé (CEPS). Un deuxième ETP au sein de cette mission se consacré au volet
interne de la transition écologique au sein du réseau de la Cnam.
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? enfin, selon l?Anap, si une minorité des ARS, comme l?Île-de-France, ont identifié des
personnes en charge de la transition écologique, le rôle des ARS, dont deux participent au
comité de pilotage de la feuille de route, reste dans ce domaine très limité.
2.1.2 Or les initiatives se développent dans une partie des établissements de
santé sans accompagnement suffisant de la part de l?État
[137] L?engagement des établissements de santé dans la transition écologique, en particulier la
décarbonation des produits de santé utilisés, est encadré par des obligations dont la mise en
oeuvre est difficile à apprécier :
? la DGOS estimé à environ 10 % la part des établissements de santé ayant satisfait à ce jour
l?obligation, créée en 2010 et élargie en 2022 au « scope » 3, qui inclut en particulier les
émissions indirectes liées aux achats de produits de santé, de réaliser un bilan des gaz à
effets de serre118 ;
? alors que les établissements de santé sont soumis, comme les autres pouvoirs adjudicateurs,
au Plan national pour des achats durables (PNAD) et que 100 % des marchés publics devront
contenir une clause environnementale à horizon 2026, moins de 10 % des marchés
hospitaliers incluaient en 2022 une telle clause (cf. infra) ;
? depuis 2021, le projet d?établissement les établissements de santé doit comprendre un volet
éco-responsable qui définit des objectifs et une trajectoire afin de réduire le bilan carbone
de l'établissement119 mais moins de la moitié de ceux interrogés par l?Anap120déclaraient
avoir nommé en 2022 un référent sur ce sujet ;
? enfin, les risques environnementaux font partie des critères de certification des
établissements par la Haute autorité de santé (HAS) depuis la V2020121 mais, selon les
interlocuteurs rencontrés par la mission, le défaut de compétences dans ce domaine des
experts en charge de l?évaluation limite la portée de ce critère122.
118 Comme les toutes les personnes morales de droit public de plus de 250 agents (et les personnes morales
de droit privé de plus de 500 salariés), les établissements de santé doivent depuis 2010 réaliser tous les trois
ans (tous les quatre ans dans le privé) un bilan de leurs émissions de GES incluant depuis 2022 le « scope » 3,
c?est-à-dire les émissions indirectes liées en particulier aux achats de produits de santé. Ils doivent également
joindre à ce bilan un plan de transition pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre présentant les
objectifs, moyens et actions envisagés à cette fin et, le cas échéant, les actions mises en oeuvre lors du
précédent bilan.
119 Article L 6143-2 du code la santé publique modifié par l?ordonnance n°2021-1470 du 10 novembre 2021.
120 Rapport national consolidé de la campagne 2022 « Mon observatoire du développement durable », auto-
diagnostic renseigné depuis 2016 par les établissements de santé, sociaux et médico-sociaux volontaires
(2 656 répondants en 2022).
121 Voir critère 3.6.04 « les risques environnementaux et enjeux du développement durable sont maîtrisés »
122 Par ailleurs, la HAS a publié le 28 novembre 2023 une feuille de route santé-environnement dans laquelle
elle s?engage à (i) consolider les critères environnementaux dans l?évaluation des technologies de santé et
développer leur bon usage pour limiter leur impact environnemental (ii) élaborer des recommandations de
bonnes pratiques en encourageant une meilleure prise en compte des enjeux environnementaux (iii)
renforcer les critères liés à la santé-environnement dans la mesure de la qualité des soins et des
accompagnements.
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[138] En pratique, les initiatives recensées par la mission en matière de décarbonation des
produits de santé reposent largement sur la volonté d?un nombre restreints de soignants
mobilisés à titre personnel, avec l?appui de la direction générale de leur établissement. Les
représentants de CHU rencontrés par la mission ont indiqué n?avoir jamais évoqué l?objectif de
réduction de leur empreinte écologique avec leur tutelle en ARS, les CPOM conclus avec ces
dernières ne contenant aucun indicateur sur cet enjeu. L?engagement de certains établissements
de santé, dont la mission n?a pas objectivé le nombre, dans la transition écologique est donc
exclusivement endogène. La remontée de bonnes pratiques organisée par la DGOS dans le cadre
du groupe de travail sur les soins éco-responsables montre la sur-représentation de quelques CHU
(en particulier, Bordeaux, Clermont-Ferrand, Nîmes, Strasbourg). Les échanges de la mission avec
les représentants de ces CHU a mis en exergue des facteurs susceptible d?expliquer un
engagement particulier dans la transition écologique :
? la présence de professionnels de santé mobilisés à titre personnel sur cette question (par
exemple, ayant fait le choix de se former aux enjeux de la transition écologique en santé) et
engagés dans des collectifs nationaux regroupant des professionnels issus de différentes
disciplines, comme le Collectif EcoResponsabilité en Santé (Ceres)123 ou le Comité pour le
développement durable en santé (C2DS)124 ;
? la conviction partagée, parmi ces professionnels, que le système de santé a une
responsabilité particulière en matière de transition écologique en raison (i) du principe
hippocratique « primum non nocere »125 qui doit susciter selon eux une réflexion sur le
rapport entre l?impact environnemental de l?acte de soins rapporté à son bénéfice pour les
patients (ii) de l?afflux prévisible à l?hôpital dans les prochaines années de patients dont les
pathologies seront directement liées au réchauffement climatique126 ;
? la capacité à mobiliser des moyens (appels à projet DGOS127 ou DITP, fonds issus de
l?Association nationale pour la formation permanente du personnel hospitalier) pour
financer les expertises (en particulier, les analyses de cycle de vie de produits) réalisées par
des prestataires spécialisés (en nombre très restreint sur le marché128) ;
123 Créé en 2022, le Ceres se définit comme « un collectif interdisciplinaire, interprofessionnel et en lien direct
avec des patients fortement impliqués dans les thématiques santé et environnement ».
124 Créé il y a une quinzaine d?années, le C2DS se définit comme « une association à but non lucratif qui fédère
des établissements sanitaires et médico-sociaux engagés dans une démarche de développement durable ». Le
réseau revendique 860 structures adhérentes.
125 En premier, ne pas nuire.
126 Selon l?Organisation mondiale de la santé (OMS), entre 2030 et 2050, le changement climatique pourrait
entraîner au niveau mondial près de 250?000 décès supplémentaires par an, dus uniquement à la dénutrition,
au paludisme, à la diarrhée et au stress lié à la chaleur. Principaux repères sur le changement climatique et la
santé (who.int)
127 La mission a recensé un seul appel à projets lancé par la DGOS en lien avec le sujet de la transition
écologique. Lancé en mai 2023 dans le cadre du programme de performance hospitalière pour des achats
responsables (Phare), il vise à réduire les déchets alimentaires et les plastiques à usage unique à l?hôpital. Six
Groupements hospitaliers de territoire (GHT) ont été retenus dans le cadre d?une expérimentation dont la
durée annoncée est d?un an.
128 L?agence « Primum non nocere » est le prestataire le plus souvent cité par les interlocuteurs rencontrés
par la mission.
PUBLIÉ
https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/climate-change-and-health
https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/climate-change-and-health
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? un alignement entre les professionnels des fonctions supports et du soins (pharmaciens,
médecins, paramédicaux) partageant la volonté de participer à un projet commun de
décarbonation, le cas échéant dans le cadre de l?obtention d?un label environnemental (par
exemple, le label TQSE129 dont l?obtention par la maternité de Clermont-Ferrand s?est
accompagnée d?un travail de réduction du recours aux DM à usage unique durant
l?accouchement).
[139] La faiblesse de l?accompagnement proposé aux établissements de santé par l?État, au
niveau national comme déconcentré, ne favorise ni la hiérarchisation des leviers permettant de
réduire l?empreinte écologique des DM, ni un passage à l?échelle des leviers les plus pertinents. La
DGOS et l?Anap ont certes engagé récemment un chantier de partage de bonnes pratiques en
matière de transition écologique sur la base des remontées effectuées par les établissements de
santé mais (i) cette mise en visibilité ne s?appuie sur aucune appréciation de la pertinence ou de
l?impact des pratiques (ii) ces bonnes pratiques ne font l?objet à ce stade d?aucun regroupement
par nature de levier et ne s?accompagnent pas d?un vademecum qui permettrait aux
établissements intéressés d?apprécier leur transposabilité. Selon les témoignages de
professionnels de santé recueillis par la mission, l?essaimage des bonnes pratiques en matière de
transition écologique a surtout reposé jusqu?ici sur les démarches menées par les fédérations
hospitalières (FHF en particulier), sur les liens de connaissance entre professionnels, en particulier
ceux qui adhèrent aux collectifs évoqués supra130 et sur le recours aux mêmes prestataires.
2.2 La mise en oeuvre d?une stratégie crédible de réduction de l?empreinte
écologique des DM exige aussi une collaboration interministérielle
renforcée
2.2.1 Dans une logique de subsidiarité, le soutien des administrations en charge
de la transition écologique à la décarbonation du système est modeste
[140] Si la feuille de route « planification écologique du système de santé » s?inscrit dans une
logique interministérielle, son élaboration et sa mise en oeuvre ont bénéficié d?une expertise
limitée de la part des administrations en charge de la transition écologique :
? selon les interlocuteurs rencontrés par la mission, l?Ademe, quoique sollicitée à plusieurs
reprises, n?a pas pris part à la « task force » interministérielle mise en place dans le cadre de
la feuille de route, ni participé au premier comité de pilotage, présidée par la ministre, qui
s?est tenu le 22 mai 2023 ;
? le Commissariat général au développement durable (CGDD) ainsi que le Secrétariat général
à la planification écologique (SGPE) participent aux travaux mais, en vertu d?un principe de
subsidiarité, leurs représentants ont indiqué à la mission ne pas s?être positionné sur la
129 Label Très haute qualité sociale et environnementale attribué par un organisme de certification.
130 À titre d?illustration, le CHU de Bordeaux a élaboré un « guide des unités durables » qui recense des bonnes
pratiques en matière de transition écologique sur la base desquelles des unités sont labellisées. Ce guide a
été adressé aux autres établissements de santé (de l?ordre de 200 selon la direction du CHU) qui en ont eu
connaissance et fait la demande.
PUBLIÉ
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pertinence des leviers choisis : en revanche, dans le cadre du « temps II » de la planification
écologique qui s?ouvre en 2024, le SGPE souhaite investir davantage certaines filières, dont
la santé ;
? un projet de convention interministérielle, incluant en particulier le SGPE et le CGDD
(l?Ademe étant citée comme un partenaire à associer), ainsi que les principaux opérateurs
du champ de la santé et les fédérations hospitalières est en cours de finalisation pour
décliner la feuille de route de mai 2023 : il s?agit en réalité de la troisième convention avec
un objet similaire, la dernière s?étant achevée en 2018 sans qu?un bilan des actions prévues,
et notamment de la participation des signataires rattachés à la transition écologique, ait été
réalisé.
[141] Or, concernant en particulier les produits de santé, une telle expertise a un réel intérêt car
elle favoriserait :
? la réalisation au niveau national d?analyses de cycle de vie sur des produits utilisés par
plusieurs établissements de santé, ou à tout le moins le partage de critères d?appréciation
de la robustesse des études existantes ;
? le partage d?éléments de parangonnage sur les leviers de décarbonation utilisés dans
d?autres secteurs et la façon de surmonter les freins rencontrés (par exemple, le défaut de
transparence des fournisseurs) ;
? la hiérarchisation des leviers en fonction notamment de (i) leur degré de faisabilité (ii) leur
impact sur les émissions carbone (iii) leur impact sur la consommation des ressources
abiotiques (iv) leur cohérence avec les autres leviers prévus dans le cadre de « France 2030 ».
2.2.2 La DGE assume un leadership fondé sur le double objectif de relocalisation
des industries de santé et de décarbonation
[142] La Direction générale des entreprises (DGE) prend en charge, en lien avec le ministère de la
santé, les travaux relatifs à l?empreinte carbone des produits de santé en lien avec les industries
de santé. Ce rôle premier de la DGE se fonde sur le contrat stratégique de filière « industries et
technologies de santé » élaboré en 2019 dans le cadre du conseil national de l?industrie131. Si ce
contrat ne faisait pas initialement référence à l?enjeu de décarbonation des produits de santé, ni
à la souveraineté sanitaire, un tournant a été pris à la suite de la crise Covid de 2020. Le plan
« innovation santé 2030 » lancé en 2021 fixe un objectif de soutien à l?industrialisation des
produits de santé sur le territoire français. Une direction de projet « relocalisation des industries
de santé » a été créée à la DGE. Une feuille de route « décarbonation des industries et
technologies de santé », ciblée sur les médicaments, a été élaborée en lien avec la Fédération
française des industries de santé (Fefis). La DGE envisage une feuille de route comparable pour les
131 Créé en 2010, le conseil national de l?industrie est une instance visant à éclairer et conseiller les pouvoirs
publics sur les enjeux de l?industrie en France. Il regroupe 19 Comités stratégiques de filière (CSF). Chaque
CSF est doté d?une gouvernance représentative de la filière portant des projets collectifs structurants qui
engagent de manière réciproque l?État et les acteurs privés.
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dispositifs médicaux, même si le caractère plus atomisé et hétérogène des fabricants de DM
complexifie l?exercice.
[143] Un appel d?offres visant à construire une méthodologie de l?empreinte carbone des
médicaments a été publié par la DGE, en lien avec la DGS, en octobre dernier. Il est attendu du
prestataire, qui devra consulter les fabricants concernés, l?identification des données et la
définition de la méthode nécessaires au calcul d?un « score carbone » des médicaments. Ces
éléments pourraient à terme intégrer une plateforme qui produirait, à l?attention des acteurs
concernés (ex : acheteurs hospitaliers) et à partir des données renseignées par les entreprises, un
« score carbone » par médicament. L?extension de cette démarche aux DM est aussi envisagée.
3 En parallèle de l?expérimentation, la mise en oeuvre des
autres leviers de réduction de l?empreinte écologique des
DM est indispensable et nécessite un appui national renforcé
3.1 Conformément aux dispositions interministérielles, les achats
hospitaliers, qui constituent un levier majeur, doivent contribuer
davantage à la réduction de l?empreinte écologique des DM
3.1.1 En dépit d?obligations croissantes, le levier des achats reste encore sous-
utilisé par les hôpitaux pour diminuer leur empreinte environnementale
[144] Depuis 2016, des dispositions successives, regroupées pour partie dans le plan national pour
des achats durables 2022-2025132, qui fixe l?objectif de 100 % des contrats de la commande
publique133 avec au moins une considération environnementale134, tendent à renforcer la prise en
compte des enjeux environnementaux dans les achats publics :
? la notion de coût de cycle de vie, issue d?une directive européenne, a été intégrée au décret
du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics qui précise qu?elle peut inclure « les coûts
imputés aux externalités environnementales liés au produit, au service ou à l'ouvrage pendant
son cycle de vie, à condition que leur valeur monétaire puisse être déterminée et vérifiée. Ces
coûts peuvent inclure le coût des émissions de gaz à effet de serre et d'autres émissions
polluantes ainsi que d'autres coûts d'atténuation du changement climatique »135 ;
132 Il s?agit de la seconde édition du plan.
133 Contrats notifiés au cours de l?année.
134 Elle est définie par le PNAD comme la prise en compte de la dimension environnementale dans l?acte
d?achats. Elle est entendue au sens large, comme par exemple, la réduction des prélèvements des ressources,
la composition des produits et notamment leur caractère écologique/polluant/toxique, le caractère
réutilisable/recyclé/reconditionné/recyclable des produits, les économies d?énergie, la prévention de la
production des déchets et la valorisation des déchets (etc.) en lien avec la prestation commandée.
135 Voir article 63.
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? des Schémas de promotion des achats publics socialement responsables (Spaser), dont le
seuil en montant d?achats à partir duquel ils sont obligatoires a été progressivement diminué
depuis 2014, doivent dorénavant être adoptés par les établissements de santé réalisant plus
de 50 M¤ d?achats hors taxes ;
? le code de la commande publique prévoit depuis 2018 la possibilité pour l?acheteur
d?imposer que les moyens utilisés pour exécuter tout ou partie d?un marché, pour maintenir
ou pour moderniser les produits acquis soient localisés sur le territoire des Etats membres
de l?UE, afin notamment de prendre en compte des considérations environnementales ;
? la loi « climat et résilience »136 a introduit au niveau légal l?obligation de clauses
environnementales dans les marchés publics et prévu la création d?outils d?analyses du coût
du cycle de vie à destination des pouvoirs adjudicateurs au plus tard le 1er janvier 2025137 ;
? enfin, la loi « industrie verte »138 accélère le calendrier prévu pour l?insertion de clauses
environnementales dans les marchés clés en matière de décarbonation139 et sécurise
juridiquement la possibilité pour les acheteurs de mettre au même niveau, dans la
pondération des critères, les enjeux qualitatifs environnementaux et les critères prix.
[145] S?il n?appartenait pas à la mission d?évaluer la mise en oeuvre de ce levier, quoiqu?il soit
central dans la réduction de l?empreinte écologique des DM, force est de constater que, avec
moins de 10 % des marchés hospitaliers qui incluaient en 2022 une clause environnementale, il
reste sous-utilisé140. Selon les interlocuteurs rencontrés, cette sous-utilisation peut s?expliquer par
différents facteurs dont :
? la difficulté à relier la clause environnementale avec l?objet du marché, en particulier
lorsqu?il s?agit d?acquérir des produits de santé ;
? la difficulté à pondérer la note pondérale, qui tend à représenter une part encore faible de
la note globale attribuable, par rapport aux autres critères de notation utilisés (prix,
expertise, qualité, etc.)141 ;
? le défaut d?expertise des acheteurs publics qui peinent à définir des clauses à la fois
conformes au code de la commande publique et impactantes sur le plan environnemental ;
? le faible niveau de transparence de la part des fournisseurs qui ne souhaitent pas, au-delà
des obligations limitées prévues par la réglementation européenne, sur la composition
exacte des produits de santé et sur leur circuit de fabrication.
136 Article 35 de la loi n°2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et
renforcement de la résilience face à ses effets.
137 Voir article 36.
138 Article 29 de la loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l?industrie verte.
139 Dès juillet 2014, par exemple pour les achats de véhicules neufs.
140 La centrale d?achats hospitaliers Résah a néanmoins publié en mars 2022 un guide sur les achats
responsables à l?attention des acheteurs hospitaliers.
141 À titre d?illustration, 2/3 des établissements de santé ayant participé à l?enquête Solen administrée par la
mission indiquent inclure des clauses environnementales dans leurs marchés, tout en précisant que ces
critères représentent en moyenne entre 10 et 20 % de la note globale (voire entre 2,5 et 5 % pour les CHU).
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Tableau 19 : Évolution de la part des achats hospitaliers incluant une clause
environnementale entre 2020 et 2022
2020 2021 2022
Nombre de marchés 264 6 707 6 098
en % du total 4,2 5,6 9,3
Montant (en ¤) 215 703 523 491 966 149 2 084 673 598
en % du total 1,7 2,9 13,5
Source : Observatoire économique de la commande publique.
Marché du Résah relatif à l?achat de gants en nitriles
La fourniture des gants d?examen, pour lesquels la très forte demande a provoqué une
déstabilisation des marchés à l?échelle mondiale, de l?achat des matières premières à
l?organisation des chaînes de production, a été particulièrement impactée par la crise Covid.
Afin de sécuriser l?approvisionnement des établissements, les autorités ont souhaité mettre en
place des mesures visant à encourager l?émergence de filières européennes de production par
la mise en place d?un dispositif de commande publique adapté.
C?est dans ce contexte que le Resah met en place, à partir du 1er mars 2024, un marché dédié à
la sécurisation et à la continuité d?approvisionnement en gants d?examen en nitrile. Dans le
cadre de la consultation, le Resah a exigé, à titre de condition d?exécution, que les gants objet
du marché soient manufacturés sur le territoire de l?Union européenne.
Quinze points ont ainsi été alloués au critère « performance environnementale et sociétale des
fournitures de leur fabrication à leur distribution », apprécié sur la base d?un questionnaire
imposant aux candidats de fournir et d?exposer :
- les caractéristiques environnementales de la production des gants nitrile s?agissant :
? des rejets d?effluents gazeux (en production et logistique) et liquides ;
? de la consommation globale en énergie et en eau (part fixe et variable suivant le niveau
de production) ;
? des déchets en production, sur le plan logistique amont (matière premières) et aval
(produits finis) et liés aux processus hors production ;
? du bilan carbone des processus de production et d?approvisionnement ;
- en lien avec l?exécution des prestations objet du marché, de la fabrication du produit jusqu?à
la distribution incluse, le niveau d?ambition (objectifs, plan d?actions?) sur les sujets
environnementaux ;
- en lien avec l?exécution des prestations objet du marché, de la fabrication du produit jusqu?à
la distribution incluse, le niveau d?ambition en matière sociétale.
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Le cahier des clauses particulières du marché prévoit un certain nombre de mécanismes
permettant de contrôler le respect des engagements souscrits par le titulaire dans son offre,
s?agissant en particulier du critère « performance environnementale et sociétale des fournitures
de leur fabrication à leur distribution ».
Le titulaire est également tenu d?une obligation de reporting d?activité concernant la qualité
environnementale des produits, en fournissant au Resah un relevé des indicateurs suivants :
- consommation d?eau utilisée pour la production (reporting a minima trimestriel) ;
- rejets d?effluents gazeux et liquides (reporting a minima trimestriel) ;
- bilan carbone des processus de production et d?approvisionnement (bilan annuel des
émissions de GES de l?antenne de production) ;
- déchets produits et matière première inutilisée (reporting a minima trimestriel).
Source : Resah.
3.1.2 À l?exemple du système de santé britannique, les achats hospitaliers
devraient constituer le principal levier de décarbonation des DM
[146] Si la feuille de route du 22 mai 2023 mentionne bien les achats durables comme un levier
de décarbonation, la place relative accordée à ce levier reste faible à l?aune de la stratégie
environnementale du système de santé britannique. Le National health system (NHS) a adopté
dès 2008 une stratégie de décarbonation dite « Greener NHS ». Actualisée en octobre 2020, elle
repose sur un double objectif : la neutralité carbone à horizon 2040 pour les émissions directes
du NHS et à horizon 2050 pour les émissions indirectes. Pour atteindre l?objectif de réduction des
émissions indirectes qui, comme en France, sont liées pour deux tiers aux achats de produits de
santé, un plan spécifique a été élaboré concernant les achats hospitaliers. Ce plan, qui s?appuie
sur un outillage et un accompagnement spécifique à destination des fournisseurs, repose sur des
jalons successifs :
? depuis avril 2023, pour tous les achats d?une valeur supérieure à 5M de £142, les fournisseurs
doivent obligatoirement communiquer un plan de réduction de leurs émissions directes de
carbone ;
? cette obligation sera étendue à l?ensemble des achats, quel que soit leur montant, dès avril
2024 ;
? enfin, à partir d?avril 2027, le plan de décarbonation communiqué par les fournisseurs devra
inclure leurs émissions indirectes.
[147] Les fournisseurs sont accompagnés dans la mise en oeuvre de cette stratégie de
décarbonation via des outils143 leur permettant d?apprécier leur « maturité » par rapport aux
attentes du NHS (cf. schéma ci-dessous). Il est demandé aux entreprises qui revendiquent un
142 5,7 M¤ au 24 novembre 2023.
143 Voir « Evergreen Sustainable Supplier Assessment ».
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niveau de maturité est jugé élevé de faire certifier leur stratégie de décarbonation par une
association indépendante selon des standards internationaux144.
[148] La stratégie britannique de réduction de l?empreinte carbone des produits de santé via le
levier des achats se distingue à plusieurs égards de l?approche qui se dessine en France :
? elle s?appuie sur des moyens (une trentaine d?ETP) et des outils (guide à l?attention des
fournisseurs, outils en ligne d?auto-évaluation, etc.) dont le calibrage peut aussi s?expliquer
par le caractère plus centralisé des achats hospitaliers ;
? elle repose sur une approche par fournisseur, et non par produit, les objectifs de
décarbonation fixés s?appliquant à la totalité de le leur activité, ce qui est plus cohérent
avec la façon dont les entreprises définissent un tel objectif, et rejoint aussi l?approche
retenue par les acheteurs privés (y compris les établissements de santé privés) en France
qui, n?étant pas contraints par le code de la commande publique, sont plus libres de définir
des critères environnementaux sans lien direct avec l?objet du marché ;
? elle se fonde sur des engagements de la part des fournisseurs certifiés le cas échéant selon
des standards internationaux existants, et non sur un mode de calcul de l?empreinte
carbone propre au NHS.
Schéma 9 : Affiche de communication de la stratégie nationale « Greener NHS »
(« Réduisez les émissions, réduisez les admissions », « une planète en meilleure santé, une
population en meilleure santé »)
Source : NHS England.
144 Science Based Targets Initiatives. Lancée en juin 2015, l?initiative Science Based Targets (SBTi ou iSBT en
français) est un projet conjoint du Carbon Disclosure Project (CDP), du Global Compact des Nations Unies,
du World Ressource Institute (WRI) et du World Wildlife Fund (WWF). C?est un organisme de notation qui
offre un label et une reconnaissance aux entreprises qui définissent un plan avec des objectifs fondés sur des
critères scientifiques clairs et transparents pour réduire leur empreinte carbone.
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Schéma 10 : Outil d?appréciation du niveau de maturité des fournisseurs en matière
environnementale
Source : NHS England. Quatre niveaux de maturité sont distingués : (1) un engagement public à
atteindre la neutralité carbone (2) la fixation d?objectifs globaux de décarbonation reposant sur un
plan d?actions (3) la fixation d?un objectif d?atteindre la neutralité carbone en 2050 sur la base d?une
évaluation indépendante en prenant en compte le risque d? « esclavage moderne » (4) la fixation
d?un objectif d?atteindre la neutralité carbone en 2050 sur la totalité des activités et sur la base d?une
cartographie de la chaîne d?approvisionnement et d?enquêtes auprès des sous-traitants comprenant
l?appréciation du risque d? « esclavage moderne ».
3.2 Le retraitement des DM à usage unique, qui sont définis comme tels
par les seuls industriels, doit aussi s?accompagner du développement
des DM à usage multiple
3.2.1 L?évolution de la part respective des DM à usage unique et des DM à usage
multiple ne fait l?objet d?aucun suivi au niveau national
[149] Une partie des DM aujourd?hui définis par les industriels comme étant à usage unique
(DMUU) présentent ou ont présenté dans le passé des alternatives à usage multiple (DMUM). La
mission n?a pas recensé d?études recensant l?évolution de la part respective des DMUU et des
DMUM145. Elle n?a pas non plus identifié de liste des DMUU pour lesquels il existe une alternative
sous la forme d?un DMUM. Néanmoins, les professionnels de santé rencontrés par la mission ont
témoigné de l?augmentation perçue de la part des DMUU utilisés. Cette tendance s?expliquerait
145 Les établissements de santé ayant participé à l?enquête Solen administrée par la mission (cf. Annexe V)
ont indiqué que les DMUU (incluant les DM implantables) représentaient entre 76 et 94 % du total des DM
utilisés.
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par la volonté de réduire les risques sanitaires mais aussi par la réduction des moyens alloués aux
services de stérilisation en particulier, et aux établissements de santé en général. Le
développement des DMUU est aussi favorisé par la liberté dont disposent sur le marché européen
les fabricants de qualifier l?usage unique (par l?apposition sur un DM du label européen consistant
en un deux barré) soit avoir à le justifier.
[150] Alors que ce levier n?est pas identifié en tant que tel par la feuille de route du 22 mai 2023,
la mission a identifié des initiatives visant à substituer des DM à usage unique par des DM à usage
multiple en établissement de santé. Deux initiatives sont synthétisées ci-dessous à titre
d?exemple :
? le CHU de Clermont-Ferrand, sur la base des travaux menés par une interne en pharmacie146,
a démontré que la substitution d?une partie des DMUU utilisés lors de l?accouchement par
voie basse par des DMUM permettait en particulier de diviser par trois leur empreinte
écologique (cf. schéma ci-dessous). Il s?est engagé en 2022 dans une évolution de la
composition des différents « packs » (épisiotomie, suture, sur-mesure) constitués par les
pharmaciens pour les soignants. Un travail comparable a été réalisé sur le set fourni aux
gynécologues au bloc opératoire ;
? le CHU de Nîmes, dans le cadre d?un projet engagé en 2021 de réduction des déchets issus
du bloc opératoire (« Durabloc »), a mené des travaux sur l?ACV comparée des lames de
laryngoscopes à usage unique (LUU) et à usage multiple (LUM)147 soulignant un intérêt
écologique de ces dernières proportionnel au nombre de lames utilisées et pouvant
représenter 26 tonnes de CO2 par an (soit l?équivalent de 120 000 km en voiture). La
substitution des LUU par des LUM a été engagée en 2022.
[151] Alors que le développement de l?usage multiple concerne potentiellement un volume plus
important de DMUU que le retraitement et que son intérêt écologique est démontré, la mission
n?a pas identifié au niveau national de stratégie148. Une telle stratégie, qui devrait associer l?État,
la Cnam, les représentants des fabricants de DM (via le Snitem), l?ANSM et la HAS, impliquerait :
? le recensement de l?ensemble des DMUU pour lesquels il existe déjà aujourd?hui sur le
marché une alternative réutilisable ;
? le recensement de l?ensemble des initiatives en établissements de santé et en ville de
substitution de DMUU par des DMUM ;
? l?identification des DMUU pour lesquels il n?existe pas sur le maché d?alternative réutilisable
alors que les professionnels de santé et les autorités sanitaires estiment qu?une telle
alternative pourrait être commercialisée ;
146 Steffi Calland, « Les dispositifs médicaux de l?accouchement par voie basse : usage unique ou réutilisable ? »,
Sciences pharmaceutiques, 2022.
147 Nathalie Rouvière et. Alii., « Reusable laryngoscope blades: a more eco-responsible and cost-effective
Alternative », Elsevier, 2023.
148 A l?instar des études en cours sur la réutilisation des médicaments non utilisés mais délivrés, une étude
similaire pourrait être menée sur les DM périmés, ou dé stérilisés et non utilisés.
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? un chiffrage du gain écologique associé au passage de l?usage unique vers l?usage multiple,
à l?image du simulateur créé par la société Ecovamed (cf. schéma ci-dessous) ;
? des travaux, sur le plan juridique national et européen, en vue, le cas échéant, (i) d?obliger
les fabricants de DM à justifier la qualification d? « usage unique » dans le cadre de
l?obtention du marquage CF (ii) de mieux prendre en compte l?empreinte environnementale
des DM, liée en particulier à leur potentiel de réutilisation, au moment de leur tarification.
3.2.2 Le développement de l?usage multiple est souvent conditionné dans les
établissements de santé à une organisation et des moyens adaptés
[152] Comme le montrent les exemples du CHU de Clermont-Ferrand et de Nîmes, si l?intérêt
écologique du développement de l?usage multiple est démontré, il doit être mis en regard avec
d?autres critères qui peuvent conditionner sa faisabilité :
? sur le plan économique, le coût complet par acte ou par année (tenant compte en
particulier de leur stérilisation et de la gestion des déchets) des DMUM tend à être proche
de celui des DMUU (légèrement supérieur dans les travaux menés par le CHU de Clermont-
Ferrand, inférieur dans l?étude du CHU de Nîmes) mais la question du financement d?un
surcoût économique en contrepartie d?un bénéfice écologique pourrait le cas échéant être
soulevée ;
? sur le plan des ressources humaines, la surcharge de travail engendrée par le recours à
l?usage multiple par rapport à l?usage unique, ciblée sur le personnel paramédical et les
services de stérilisation, varie selon le type de DM concerné, le processus de nettoyage et
de stérilisation nécessaires et l?organisation propre à l?établissement de santé : des
capacités suffisantes et la proximité géographique du service de stérilisation, qui permet un
approvisionnement plus fluide en DMUM, sont identifiés comme des facteurs de succès ;
? sur le plan managérial, au regard de l?impact qu?est susceptible d?avoir la bascule d?un DMUU
vers un DMUM sur l?organisation des soins et la logistique hospitalière, une adhésion de
l?ensemble des professionnels concernés au projet est un pré-requis ;
? enfin, il convient de rappeler que, avant même d?envisager le passage de l?usage unique à
l?usage multiple, l?opportunité d?utiliser un DM stérile doit systématiquement être vérifiée.
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Schéma 11 : Synthèse des résultats des travaux menés par le CHU de Clermont-
Ferrand sur la substitution de DM à usage unique par des DM réutilisables dans le cadre
de l?accouchement par voir basse
Source : Steffi Calland, support présenté au webinaire organisé par l?Anap sur la réduction de
l?empreinte écologique des produits de santé le 5 octobre 2023.
Graphique 3 : Répartition comparée des impacts écologiques d?une lame de
laryngoscope à usage unique et d?une lame à usage multiple
Source : Nathalie Rouvière, CHU de Nîmes, support présenté au congrès de la Société française de
stérilisation (SF2S) en septembre 2022. L?impact écologique de la lame à usage multiple est lié à plus
de 60% aux processus de décontamination (« washing process ») et de stérilisation, tandis que celui
de la lame à usage unique est lié aux deux tiers à sa fabrication (« manufacturing »).
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Schéma 12 : Copie écran du simulateur créé par la société Ecovamed pour comparer
l?empreinte carbone d?un DMUM (à gauche) à celle d?un DMUU (à droite)
Source : Ecovamed (shinyapps.io)
3.3 La formation des personnels hospitaliers doit contribuer en particulier
à faire converger davantage les démarches de pertinence et de
sobriété des soins
3.3.1 Le développement de l?éco-responsabilité en matière de soins peut
contribuer à renforcer l?efficience du système de santé
[153] Au niveau national, les enjeux liés à la transition écologique du système de santé ne sont
pas encore suffisamment liés en pratique à l?objectif de renforcement de son efficience. Cette
convergence des enjeux est certes identifiée par la feuille de route de mai 2023. Elle précise que «
pace qu?il y a un lien entre sobriété et pertinence, les actions de gestion de risque de l?assurance
maladie intègreront les enjeux de transformation écologique ». Elle propose également d?intégrer à
terme des indicateurs spécifiques dans les Contrats d'Amélioration de la Qualité et de l'Efficience
des Soins (Caques)149. Si la DGOS a bien créé en 2023 un groupe de travail visant à faire remonter
les initiatives participant des soins éco-responsables150, la mission n?a pas identifié d?autres
149 Le Caques est un contrat qui lie l?ARS, l?organisme local d?assurance maladie et les établissements de santé.
Il pour objectif l?amélioration des pratiques, la régulation de l?offre de soins et l?efficience des dépenses
d?assurance maladie
150 Un soin éco-responsable est défini par la feuille de route de mai 2023 comme « un acte de soin qui, à
qualité et sécurité égales, engendre un impact moindre sur l?environnement ».
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https://ecovamed.shinyapps.io/calculateur-empreinte-carbone/
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traductions opérationnelles, à ce stade et au niveau de l?administration centrale, de cet objectif
de convergence des démarches.
[154] Au niveau local, en revanche, sans que la mission ait procédé à une enquête exhaustive, elle
a constaté l?existence d?initiatives visant à faire converger l?objectif de réduction de l?empreinte
écologique des actes de soins et celui de leur efficience :
? le CHU de Bordeaux a ainsi recensé dans son « guide des unités durables » différents
parcours ou actes de soins (prise en charge des patients atteints de cancer du rectum,
prescription d?investigations anatomie et cytologie, prescription de pansements, etc.) pour
lesquels des leviers permettant de réduire à la fois leur coût et leur impact écologique ont
été identifiés ;
? le CHU de Nîmes a engagé des études en ACV pour comparer l?empreinte écologique
respective de différents parcours de chirurgie du canal carpien.
3.3.2 La sensibilisation des personnels hospitaliers aux enjeux liés à la transition
écologique dépend encore largement des directions d?établissement
[155] Il n?existe pas de données sur la part des effectifs à l?hôpital qui ont été formés aux enjeux
de la transition écologique ni de stratégie globale de formation alors que cette sensibilisation est,
de l?avis des professionnels rencontrés par la mission, un préalable au changement :
? le ministère de la santé a certes demandé à l?Anap, en lien avec l?EHESP, de former d?ici
fin 2024 tous les directeurs d?hôpital, directeurs des soins ainsi que les présidents de
Commissions médicale d'établissement, soit environ 500 personnes ;
? de son coté, la Direction interministérielle à la transformation publique (DITP), en lien avec
le CGEDD, accompagne le déploiement national d?un dispositif de sensibilisation conçu par
des professionnels de santé (« Plan Health Fair ») avec l?objectif de former 6 500
professionnels encadrants à l?hôpital d?ici fin 2024 ;
? plusieurs établissements de santé, à l?image de l?AP-HP, ont indiqué à la mission vouloir
former eux-mêmes tout ou partie de leurs effectifs, le cas échéant en utilisant également le
dispositif « Plan Health Fair ».
3.4 Enfin, le tri et la revalorisation des déchets issus des DM, qui
dépendent aujourd?hui largement des décisions locales, doivent faire
l?objet d?une stratégie nationale
3.4.1 Les établissements de santé sont soumis à des obligations croissantes en
matière de gestion des déchets, en partie communes au secteur tertiaire
[156] Sous réserve du sujet spécifique des Déchets de soins à risque infectieux (Dasri), les
obligations des établissements de santé en matière de gestion des déchets sont comparables à
celles d?autres entreprises :
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? en dehors d?une note actualisée en 2023 par la FHF, la mission n?a pas identifié de circulaire
nationale rappelant aux établissements de santé ces obligations, et l?accompagnement
dont ils pouvaient éventuellement bénéficier pour les satisfaire ;
? or les établissements de santé font souvent partie, l?échelle d?un territoire, des plus gros
producteurs de déchets ;
? le renforcement des obligations en matière de tri et de valorisation151 implique un travail
important de la part des établissements de santé en matière de sensibilisation des
professionnels, de réorganisation de la logistique et de sélection de prestataire, avec un
potentiel surcoût.
[157] En revanche, le recyclage et la valorisation des DM ne font pas l?objet à ce stade
d?obligations au niveau national :
? aucune des filières à Responsabilité élargie des producteurs (Rep)152 ne prend en charge les
déchets issus des DM utilisés par les établissements de santé153, y compris la filière des
Dispositifs et équipements électriques et électroniques (D3E) dont le périmètre
d?intervention présente des adhérences avec les DM ;
? si certains établissements de santé, dont la mission n?a pu objectiver le nombre, ont pris
l?initiative de valoriser auprès d?organismes de recyclage les métaux précieux présents sur
les cathéters d?électrophysiologie, aucun encadrement n?est prévu au niveau national154.
3.4.2 Les établissements de santé sont peu incités et accompagnés dans la
réduction et la valorisation des déchets, en particulier ceux issus des DM
[158] Un travail a été engagé au niveau national et dans la plupart des établissements de santé
pour réduire le volume des Dasri. En effet, outre qu?elle représente un coût pour l?établissement
de santé, en moyenne, l?incinération d?une tonne de Dasri génère, selon le Shift Project, trois fois
plus d?émissions carbone que celles des déchets ménagers. Cette réduction du volume de Dasri
repose essentiellement sur une amélioration du tri et, dans certains établissements de santé, sur
151 La législation pose depuis 2016 l?obligation du tri 6 flux (étendu depuis 2021 à 7 flxu) correspondant au tri
et à la collecte séparée des déchets de papier / carton, métal, plastique, verre, bois (et de textile à partir du
1er janvier 2025) et des déchets de plâtre et de fractions minérales pour les déchets de la construction et de
la démolition.
152 Les filières à Responsabilité élargie des producteurs (Rep) sont des dispositifs particuliers d?organisation
de la prévention et de la gestion de déchets qui concernent certains types de produits. Ces dispositifs
reposent sur le principe de responsabilité élargie du producteur, selon lequel les producteurs, c?est-à-dire les
personnes responsables de la mise sur le marché de certains produits, peuvent être rendus responsables de
financer ou d?organiser la prévention et la gestion des déchets issus de ces produits en fin de vie. Il existe à
l?heure actuelle douze filières Rep.
153 Il existe en revanche une filière Rep pour les DM perforants utilisés par les patients en auto-traitement.
154 Cette valorisation consiste à découper, après leur utilisation, la pointe des cathéters qui est ensuite
vendue à des organismes spécialisés qui en extraient les métaux précieux pour les réutiliser ou les vendre. À
titre d?illustration, le CHU de Bordeaux a indiqué à la mission obtenir 8¤ par cathéter dont les métaux
précieux sont valorisés. Sel
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le recours à un banaliseur155 qui permet de convertir les Dasri en Déchets assimilés à des ordures
ménagères (DAOM). L?Anap a produit en particulier des outils pour guider les établissements de
santé qui envisagent de s?engager dans la banalisation de leurs Dasri. La DGOS, en lien notamment
avec le Haut conseil de la santé publique, est en train d?élaborer une nouvelle version du guide
sur la gestion des Dasri visant à réduire le périmètre des déchets relevant de cette catégorie.
[159] Cela étant, la réduction du périmètre des Dasri, principal levier investi aujourd?hui au niveau
national, ne répond que partiellement à la problématique écologique liée aux déchets issus en
particulier des produits de santé. Or cette question des déchets, même si elle constitue l?un des
sept domaines d?action de la feuille de route de mai 2023, est encore abordée de façon limitée
au niveau du ministère de la santé, et sans imbrication suffisante avec l?enjeu de décarbonation
du secteur. Les différents leviers de réduction des déchets mentionnés par la feuille de route, qui
concernent en particulier les médicaments et les DM, justifieraient la mise en place d?un
accompagnement spécifique des établissements de santé, ainsi que le cas échéant des incitations
financières. Par ailleurs, une partie de ces leviers (ex : mise en place d?une filière de collecte et de
valorisation des verres médicaux issus des soins, préfiguration d?une filière Rep sur les textiles
sanitaires à usage unique) nécessitent une évolution de la législation qui ne peut être engagée sans
les administrations en charge de la transition écologique.
155 Les banaliseurs de Dasri sont des machines permettant de réduire les déchets en petits morceaux. Les
débris des déchets sont ensuite chauffés à très haute température afin d'éliminer les composants dangereux
qu'ils contiennent. Une fois les Dasri passés dans le banaliseur, ils peuvent être traités comme des déchets
ménagers (inertes) ordinaires.
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ANNEXE 5 : Résultats du questionnaire
adressé par la mission aux établissements
de santé
1 RAPPEL DU CONTEXTE DU QUESTIONNAIRE .............................................................................. 113
2 RESULTATS ............................................................................................................................................ 113
2.1 LES DONNEES DES ETABLISSEMENTS : STATUTS ET ACHATS DE DM .................................................... 114
2.1.1 Nombre d?établissements répondant et leur statut ..................................................................... 114
2.1.2 Les achats de DM................................................................................................................................ 114
2.2 LA POLITIQUE MENEE PAR LES ETABLISSEMENTS SUR LA REDUCTION DES GAZ A EFFET DE SERRE (GES) 116
2.2.1 La réalisation du bilan de gaz à effet de serre................................................................................ 116
2.2.2 Intégration de critères environnementaux dans la politique achat de DM ............................... 117
2.2.3 Le tri des déchets de DM................................................................................................................... 117
2.3 LES ETABLISSEMENTS ET L?EXPERIMENTATION INSCRITE A L?ARTICLE 29 DU PLFSS ............................ 118
2.3.1 Les CHU et les EPBL répondants sont les plus intéressés pour participer à l?expérimentation
.............................................................................................................................................................. 118
2.3.2 Le choix des DM se porte vers les sondes d?électrophysiologie, mais il existe une confusion
entre retraitement et recyclage ....................................................................................................... 119
2.3.3 Les freins identifiés ............................................................................................................................. 119
2.4 LES FACTEURS DE REUSSITE DE CETTE EXPERIMENTATION ................................................................... 119
2.5 LES INDICATEURS DE SUIVI DE L?EXPERIMENTATION ........................................................................... 120
2.6 LES AUTRES LEVIERS PRIORITAIRES POUR DIMINUER L?EMPREINTE CARBONE DES DM .......................... 120
3 CONCLUSION ....................................................................................................................................... 120
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1 Rappel du contexte du questionnaire
[160] Dans le cadre de la mission Igas-Igedd relative à la levée de l?interdiction de la réutilisation
des dispositifs médicaux à usage unique (DMUU), la mission, avec l?aide du pôle numérique, a mis
en place un questionnaire Solen à destination des établissements de santé publics et privés tout
statut : Centres Hospitaliers Universitaires (CHU), Centres Hospitaliers (CH), Etablissements privé
de Santé d?Intérêt collectif (ESPIC), et Etablissements privés à but lucratif (EPBL).
[161] Cette enquête a été annoncée lors des 33ème journées nationales sur les dispositifs médicaux
à Clermont Ferrand du 10 au 12 octobre 2023, et mis en ligne du 19 octobre 2023 au 20 novembre
2023 sur les sites d?Europharmat, de la Fédération de l?Hospitalisation de France (FHF), de la
Fédération de l?Hospitalisation Privée (FHP), et de la Fédération des Etablissements Hospitaliers
et d'Aide à la Personne Privés solidaires (FEHAP).
[162] Cette enquête s?est adressée aux directions et aux pharmacies à usage intérieur (PUI) des
établissements de santé qui devaient remplir ensemble les deux parties du questionnaire. La
mission a souhaité que cette enquête reste anonyme, avec comme objectif que les résultats
permettent de documenter le rapport qui sera transmis aux ministres.
[163] Le questionnaire a été établi par la mission, et a été relu par des professionnels de santé
pharmaciens en charge des dispositifs médicaux, et par un représentant de la FHF.
[164] Il est construit en trois parties :
? la première partie concerne les données de l?établissement ;
? la deuxième partie concerne la politique menée par l?établissement sur la réduction des gaz
à effet de serre (GES) ;
? la troisième partie concerne plus spécifiquement l?expérimentation prévue à l?article 29 de
la LFSS pour 2024.
[165] Enfin, la mission a souhaité connaitre quels pourraient être les leviers à disposition des
établissements de santé pour diminuer l?empreinte carbone des DM, et lesquels seraient
prioritaires.
2 Résultats
[166] Les réponses au questionnaire Solen apportées par les établissements de santé répondants
sont de nature variable en termes de qualité de saisie. Certains établissements de santé n?ont pas
répondu à l?intégralité des questions, et certaines données chiffrées sont approximatives
(notamment concernant les montants des achats de DM) Il a donc été difficile pour la mission
d?en faire une synthèse exhaustive.
[167] Même si le nombre de réponses est important, 1583, peu de réponses sont complètes (tous
les champs renseignés), et ne représentent que 6 % des répondants.
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2.1 Les données des établissements : statuts et achats de DM
2.1.1 Nombre d?établissements répondant et leur statut
[168] 96 établissements de santé tout type de statut ont répondu complètement au
questionnaire. 1 583 réponses étaient partielles et non pas été intégrées aux résultats présentés.
Tableau 20 : Statut des établissements répondant
Statut des établissements Nombre d?établissements
CHU 11
CH 57
Espic 1
EPBL 27
Total 96
Source : Mission.
[169] Au 31 décembre 2020156, le secteur hospitalier français MCO (hors HAD, USLD et psychiatrie)
est constitué de 1 116 entités géographiques du secteur public : 180 centres hospitaliers régionaux
(CHU et CHR) ; 936 centres hospitaliers (CH, y compris les anciens hôpitaux locaux). Les structures
hospitalières privées comprennent 972 cliniques privées à but lucratif et 670 établissements
privés à but non lucratif, dont 20 centres de lutte contre le cancer (CLCC).
[170] Le nombre de répondants n?est pas représentatif du secteur,1/3 des CHU et un très faible
nombre d?établissements de type CH et d?établissements privés à but non lucratif et lucratif ont
participé à l?enquête.
2.1.2 Les achats de DM
[171] Le montant moyen des achats de DM pour ces établissements est d?environ 8,7 millions d?¤,
et celui des DMI est de 3,7 millions d?¤.
[172] A noter que tous les logiciels de gestion des PUI ne sont pas dans la capacité de ventiler les
DMUU et les DMUM dans la part des achats de DM, et certains établissements ont répondu par
une estimation.
[173] Les données présentées dans le tableau ci-dessous sont des moyennes des montants des
achats en M¤ pour l?année 2022.
156 DREES, les établissements de santé, édition 2022
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
- 115 -
Tableau 21 : Moyenne des montants des achats par statut année 2022
Achats DM Dont DMI Dont DMUU Dont DMUM
CHU 12,1 5,2 11,4 0,9
CH 10,4 4,5 9 0,6
ESPIC 1,4 0,5 Non renseigné Non renseigné
EPBL 10,8 4,8 8,2 0,4
Source : Mission.
Graphique 4 : Répartition graphique des moyennes des achats en ¤
Source : Mission.
[174] Les DMUU représentent la part majoritaire des achats de DM pour les établissements quel
que soit leur statut, il convient de préciser que les DMI font partie des DMUU.
Tableau 22 : Part des DMUU, DMI et DMUM dans les achats des établissements de
santé
Part des DMUU / achat
de DM
Part des DMI / achat de
DM
Part des DMUM /
achat de DM
CHU 94 % 43 % 8 %
CH 87 % 44 % 6 %
ESPIC Non renseigné 34 % Non renseigné
EPBL 76 % 44 % 4 %
Source : Mission.
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
- 116 -
2.2 La politique menée par les établissements sur la réduction des gaz à
effet de serre (GES)
2.2.1 La réalisation du bilan de gaz à effet de serre
[175] Tous les établissements de santé de plus de 250 agents auraient dû réaliser leur bilan des
gaz à effet de serre (BGES). Dans cette enquête, 60 % des établissements ayant répondus
déclarent avoir réalisé un BGES et 33 % intégrant le scope 3 obligatoire à partir du 1er janvier 2023.
Tableau 23 : Réalisation du BGES par type d?établissement
Nombre
d?établissements
GES scope 1 Dont scope 3
CHU 11 10 91 % 3 30 %
CH 57 35 61 % 10 29%
ESPIC 1 1 100 % 0 0
EPBL 27 12 44 % 6 50 %
Source : Mission.
Graphique 5 : BGES par type d?établissement
Source : Mission.
[176] Les BGES ont été réalisés pour leur majorité en 2021 (13 établissements tout statut), 2022
(10 établissements tout statut) et 2023 (7 établissements tout statut). 13 établissements tout
statut ont réalisé leur BGES entre 2012 et 2020. La règlementation impose que le BGES soit revu
tous les trois ans, la mission n?a pas évalué si les établissements qui avaient réalisés leur BGES
avant 2019 l?ont revu.
10
35
1
12
3
10
0
6
0
5
10
15
20
25
30
35
40
11 57 1 27
CHU CH ESPIC Privé but lucratif
GES scope 1 Dont Scope 3
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- 117 -
2.2.2 Intégration de critères environnementaux dans la politique achat de DM
[177] Concernant les établissements ayant répondu à l?enquête, 67 % déclarent avoir intégré des
critères environnementaux dans les achats de DM.
Tableau 24 : Intégration de critères environnementaux dans les achats de DM
Nombre
d?établissements
Ayant intégré des
critères
environnementaux
% Nbr de marchés de
DM concernés en
2022 et 2023
CHU 11 9 82% Entre 25 et 500
CH 57 38 67% Entre 1 et 200
Espic 1 1 100% NC
EPBL 27 16 59% Entre 2 et 40
Source : Mission.
[178] Les CHU ayant répondu déclarent que les critères environnementaux représentent entre
10% et 20 % de la pondération. Concernant les CH, ils achètent majoritairement via les
groupements hospitaliers de territoires, et ne précisent pas la pondération. Pour ceux qui ont
répondu, la pondération est plus faible que pour les CHU et serait entre 2,5% et 5 %. Aucun
établissement privé n?a précisé la pondération de ces critères (majoritairement les achats sont
faits via une centrale d?achat qui référence des produits pour les établissements).
[179] Pour ceux qui n?auraient pas encore intégré ce type de critères, 4 CH, et 5 EPBL déclarent
les intégrer dans le cadre d?un prochain appel d?offre.
2.2.3 Le tri des déchets de DM
[180] Les établissements répondant précisent que des procédures de gestion sont mises en place
et que les DM sont majoritairement triés dans les filières des déchets d?activité de soins à risques
infectieux (DASRI) ou les déchets assimilés aux ordures ménagères (DAOM). Certaines DASRI sont
banalisées et suivent ensuite le circuit classique avec enfouissement, pour certains DM périmés,
ils sont repris par des industriels.
[181] À noter que certains établissements indiquent qu?aucun tri n?est mis en place et que tous
les DM passent par la filière DASRI.
2.2.3.1 Filières de récupération ou de recyclage des DMUU
[182] Les principales filières mises en place par les établissements sont celles de recyclage de
l?inox des lames de laryngoscopes, et de certains métaux précieux, et des piles pour les DMI actifs
(pacemakers notamment).
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- 118 -
Tableau 25 : Filières de récupération mises en place par type d?établissement
Nombre d?établissements Filière de récupération
CHU 9 /11 Récupération des prothèses de hanche / genou
nettoyées et stockées
Expérimentation pour certains endoscopes à UU et
uthéroscope
Inox des lames de laryngoscope, amalgames dentaires,
piles des DMI actifs, câbles des bistouris
CH 15/57 Inox des lames de laryngoscope, pinces et ciseaux
Piles des DMI actifs, bistouris électriques et électrodes
Si un potentiel de valorisation matière est possible, les
DM peuvent être envoyés en filière D3E, métaux ou
plastiques
ESPIC 1/1 Non précisée
EPBL 16/27 Non précisée
Source : Mission.
2.3 Les établissements et l?expérimentation inscrite à l?article 29 du PLFSS
2.3.1 Les CHU et les EPBL répondants sont les plus intéressés pour participer à
l?expérimentation
[183] Ce sont majoritairement les CHU et les EPBL qui affichent leur intérêt de participer à cette
expérimentation, les CH sont plus mitigés. Ce résultat peut interroger notamment si on prend
comme hypothèse que ce sont les établissements de santé les plus informés de cette
expérimentation qui ont répondu à l?enquête.
Tableau 26 : Établissements intéressés pour participer à l?expérimentation
Oui Non Sans réponse
CHU 7 4 0
CH 26 24 7
Espic 1 0
EPBL 14 11 2
Total 48 39 9
Source : Mission.
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2.3.2 Le choix des DM se porte vers les sondes d?électrophysiologie, mais il
existe une confusion entre retraitement et recyclage
[184] Majoritairement, les établissements de santé répondants orientent leur choix vers les DM
d?électrophysiologie (cathéters de diagnostics et d?ablation) pour des raisons financières et
écologiques car ces DM ont un coût important et contiennent des métaux précieux. Un CHU
évoque des DM utilisés dans des robots de chirurgie (en urologie).
[185] Cependant, des établissements de santé citent, pour cette expérimentation, des DMUU qui
existent également en usage multiple tels que certains endoscopes, les lames de laryngoscopes,
des ciseaux, des pinces ?.ou encore des DM de types protections pour incontinences, tubulures
ou encore perfusions. Ce type de réponse montrent une confusion entre l?expérimentation qui
porte sur le retraitement de DMUU et le recyclage.
2.3.3 Les freins identifiés
Les principaux freins portent sur :
? l?information du patient ;
? la matériovigilance et traçabilité du retraitement ;
? le risque infectieux, et la perte de performance du DM retraité ;
? la logistique des flux (stockage, transport?) ;
? l?absence de service de stérilisation ;
? le manque de temps du personnel soignant.
[186] Enfin, certains établissements soulignent que d?autres projets sont en cours, notamment
des travaux sur les filières de déchets.
2.4 Les facteurs de réussite de cette expérimentation
[187] En interne aux établissements, les principaux facteurs de réussite sont l?acceptation des
patients par l?organisation d?échanges avec les représentants des usagers, la motivation et la
coordination de tous les acteurs au sein de l?établissement de santé, la mise en place d?une filière
à proximité de l?établissement de santé et un accompagnement des établissements de santé qui
pourrait préciser notamment les responsabilités de chaque partie prenante.
[188] Les établissements de santé répondants précisent que la garantie de gains écologique
(disposer d?une analyse du cycle de vie des DMUU retraités) et économique représente aussi un
facteur de réussite, comme le fait de disposer d?un accompagnement méthodologique et
financier (recrutement de ressources pour l?organisation interne et le suivi de l?expérimentation).
[189] Enfin, il est noté la nécessité de disposer d?un positionnement clair des sociétés savantes
sur le retraitement des DMUU.
PUBLIÉ
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- 120 -
2.5 Les indicateurs de suivi de l?expérimentation
[190] Les indicateurs le plus souvent cités sont des indicateurs quantitatifs portant sur le nombre
de DMUU retraités, le nombre de réutilisation, le bilan économique, les délais de livraison du
fournisseur de DMUU retraités.
[191] Cependant, certains centres hospitaliers évoquent des indicateurs plus qualitatifs :
? sur le plan clinique : retour des praticiens en termes d?efficacité, de technicité et de
fonctionnalité du DMUU retraité, et évaluer sa satisfaction ;
? sur la sécurité des soins : taux de complication pendant l?expérimentation ;
? sur le plan écologique : comparer les analyses de cycles de vie du DMUU initial et du DMUU
retraité intégrant le bilan carbone, en eau, les métaux précieux ;
? sur le plan économique : réaliser une analyse en coût complet intégrant une analyse de
sensibilité pour tester la robustesse du modèle.
2.6 Les autres leviers prioritaires pour diminuer l?empreinte carbone des
DM
[192] Les autres leviers principalement cités sont ceux à « la main » des fournisseurs, notamment
concernant la transparence sur l?empreinte carbone du DM afin que celui-ci puisse être intégré
comme critère objectif lors des achats hospitaliers (éco conception des DM et limitation des
emballages, mais également sur la mise à disposition de set ou de trousse de chirurgie adapté aux
besoins des praticiens (pertinence de la composition).
[193] D?autres leviers relèvent plus de l?établissement de santé, comme celui de mener des
travaux sur l?homogénéisation des pratiques de soins, réinterroger les pratiques dans le sens de la
pertinence des soins, de la sobriété des prescriptions et du bon usage (limiter l?utilisation des DM
stériles quand le soin ne s?y prête pas) ; et enfin repasser pour certains DMUU à des DMUM si
l?organisation hospitalière le permet.
[194] Enfin, le développement de filières de tri est un des principaux leviers pour diminuer
l?empreinte carbone des DM.
3 Conclusion
[195] Les résultats de cette enquête ne permettent pas d?établir des réels constats en raison du
faible nombre d?établissements répondants, néanmoins, ils donnent quelques informations.
[196] La part des DMUU dans les achats de DM des hôpitaux est élevée, ce qui tend à confirmer
qu?ils sont très largement utilisés (même si la part des DMI est retranchée) et que l?usage des
DMUM reste encore marginal.
[197] Les établissements s?investissent dans la décarbonation des DM, la mission a pu l?apprécier
lors de ses déplacements dans deux CHU (Clermont Ferrand et Bordeaux) et lors des auditions
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RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
- 121 -
menées avec le CHU de Nîmes et de Strasbourg. De nombreuse actions sont en cours, les résultats
de cette enquête en montrent certaines notamment celles engagée vers une optimisation des
besoins de DM lors de certaines prises en charge, concernant le passage aux DM à usages multiples
quand l?organisation hospitalière le permet, ou encore la diminution des DASRI par une meilleure
gestion du tri ou des achats comportant moins d?emballage inutile.
[198] En ce qui concerne spécifiquement l?expérimentation du retraitement des DMUU inscrite à
l?article 29 du PLFSS, les réponses transmises montrent que les établissements disposent de peu
d?informations, notamment sur le cadrage règlementaire instauré par le nouveau règlement
européen (article 17). Cette méconnaissance entraîne des confusions entre ce qu?est le
retraitement tel que défini par le règlement européen et le recyclage. De plus, ces résultats
montrent que le périmètre de cette expérimentation (retraitement par un tiers et non par une
PUI) n?est pas complètement connu. En effet, certains répondants précisent qu?il n?y a pas de
stérilisation sur le site, ou que la stérilisation ne peut pas prendre plus de matériels.
[199] Bien que le périmètre de cette expérimentation ne soit pas bien connu, les établissements
considèrent que sa mise en place devra s?intégrer dans un projet d?établissement avec toutes les
parties prenantes, de la direction aux professionnels soignants. Ce facteur de réussite nécessite
néanmoins un accompagnement tant sur la méthode que sur les ressources humaines dans un
contexte de tensions hospitalières.
[200] Enfin, la place des industriels est soulignée. Elle s?intègre en amont dans le cadre des
marchés, avec plus de transparence sur l?empreinte carbone des DM, et sur la mise à disposition
de sets de soins plus conformes avec les pratiques des professionnels (limitation des DM non
utilisés).
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PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
- 123 -
LISTE DES PERSONNES RENCONTRÉES
Cabinets ministériels
Cabinet du ministre de la santé et de la prévention
M. Raymond LE MOIGN, directeur de cabinet
Mme Capucine GREGOIRE, vonseillère financement, protection sociale et produits de santé
Cabinet de la ministre déléguée chargée de l?Organisation territoriale et des Professions de santé
Mme Isabelle EPAILLARD, directrice de cabinet
M. Pierre BRETON, conseiller Santé environnementale, une seule santé et planification écologique
du système de santé
Cabinet du ministre de la Transition écologique, et de la cohésion des territoires
M. Samuel JUST, conseiller économie circulaire et prévention des risques
Ministère en charge de la santé
Secrétariat général des ministères sociaux
M. Pierre PRIBILE, secrétaire général des ministères sociaux
M. Yann DEBOS, chef de service, pôle santé ARS
Direction générale de la santé (DGS)
Dr Grégory EMERY, directeur général adjoint
Mme Hélène MONASSE, sous-directrice, sous-direction Politique des Pratiques (PP)
Mme Esther LEPAICHEUX, cheffe du bureau dispositifs médicaux et autres produits de santé,
Sous-direction Politique des Pratiques (PP)
Mme Mélanie CAILLERET, adjointe à la cheffe de bureau des dispositifs médicaux et autres
produits de santé, Sous-direction Politique des Pratiques (PP)
Direction générale de l?offre de soins (DGOS)
Mme Emmanuelle COHN, sous directrice par intérim, sous-direction du pilotage la performance
des acteurs de l?offre de soins (PF)
Mme Anne LESQELEN, adjointe à la cheffe de bureau des produits de santé (PF2), sous-direction
du pilotage de la performance des acteurs de l?offre de soins (PF)
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- 124 -
Mme Amélie PERINAUD, chargée de mission, bureau des produits de santé (PF2), sous-direction
du pilotage de la performance des acteurs de l?offre de soins (PF)
Mme Hélène GILQUIN, cheffe de projet Elus Territoires et Transition Ecologique du Système de
Santé
M. Raphaël RUANO, responsable du Programme national d?Achats Hospitaliers PHARE
(Performance Hospitalière pour des Achats Responsables)
Mme Véronique CHASSE, adjointe au responsable du Programme national d?Achats Hospitaliers
Direction de la sécurité sociale (DSS)
M. Guillaume CARVAL, adjoint au chef de bureau des produits de santé (1C), sous-direction du
financement du système de soins
Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des Produits de Santé (ANSM)
M. Thierry SIRDEY, directeur de la Direction des dispositifs médicaux, des cosmétiques et des
dispositifs de diagnostic in vitro (DMCDIV)
Mme Gwennaëlle EVEN, adjointe au Directeur de la Direction des dispositifs médicaux, des
cosmétiques et des dispositifs de diagnostic in vitro (DMCDIV)
M. Frédéric DITTENIT, directeur adjoint et délégué à la protection des données, Direction
Réglementation et Déontologie
Caisse Nationale d?Assurance Maladie (Cnam)
M. Grégoire DE LAGASNERIE, responsable du département produit de santé, Direction déléguée
à la gestion et à l?organisation des soins
M. Bertrand PARADIS, responsable adjoint du département produit de santé, Direction déléguée
à la gestion et à l?organisation des soins
Mme Claire TRAON, directrice de mission sur la transition écologique et la santé environnement,
Direction déléguée à la gestion et à l?organisation des soins
Agence Nationale d?Appui à la Performance (Anap)
Mme Emeline FLINOIS, directrice du Pôle RH et du Pôle Investissement, logistique et
développement durable
Mme Hélène EYCHENIE, pharmacienne
Mme Lucile BATTAIS, experte logistique et développement durable
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- 125 -
Ministère en charge de l?Économie
Direction générale des entreprises (DGE)
Mme Roxane SPINARDI, coordinatrice nationale du volet Dispositifs Médicaux France 2030
Mme Charlotte LEUXE-OLIVIER, chargée de mission au bureau des industriels de santé
M. Louis-Samuel PILCER, directeur de projets santé, relocalisation des industries de santé
M. Charles FLAHAULT, chargé de mission décarbonation des industries de santé
Ministère en charge de la transition écologique
Agence de la transition écologique (Ademe)
M. Raphael GUASTAVI, directeur adjoint économie circulaire
Direction générale de la prévention des risques (DGPR)
M. Vincent COISSARD, sous-directeur déchets et économie circulaire
Mme Diane DEWALLE, chargée de mission recyclage
Mme Coralie RAVIER, chargée de mission gestion des déchets dangereux
Direction générale de l?énergie et du climat (DGEC)
M. Florian TIRANA, chargé de mission projection SNBC
Commissariat général au développement durable (CGDD)
Mme Julie HANOT, sous-directrice des entreprises
Secrétariat général à la planification écologique (SGPE)
Mme Cécilia BERTHAUD, secrétaire générale adjointe à la planification écologique, en charge du
pôle « ambition »
Mme Elise BEHM, chargée de mission décarbonation
Interlocuteurs à l?étranger
Secrétariat général, délégation aux affaires européennes et internationales
Mme Catherine BORSI-SERHAN, cabinet du délégué aux affaires européennes et internationales,
responsable du pôle « Pilotage et réseau des conseillers pour les affaires sociales »
Mme Mireille JARRY, conseillère pour les affaires sociales Espagne
Mme Caroline CHAULET, adjointe à la conseillère pour les affaires sociales Espagne
M. Thomas GOUJAT, chargé de mission auprès du conseiller pour les affaires sociales Allemagne
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- 126 -
Mme Valérie MAUROURY, adjointe au conseiller pour les affaires sociales Stockholm,
Copenhague, Oslo et Helsinki
Société VANGUARD
Mme Viola VAHLE, responsable du développement des affaires internationales
Mme Ulrike MARCZAK, CEO, Directrice générale
Dr Hagen THIELECKE, directeur de la recherche et du développement
Clinique du groupe VIVANTES Berlin
Dr EWERSTSEN, médecin électrophysiologiste
Ministère fédéral de la santé allemand
Mme Katharina JAKOB, bureau Droit des dispositifs médicaux
Mme Raphaela WAGNER, bureau des coopérations bilatérales en santé, Direction des affaires
européennes et internationales
Bundersintitut für Arzneimittel und Medinzinprodukte (Bfarm)
M. Joseph ZUNDORF, chef du département des dispositifs médicaux
Mme Anja JACOBSHAGEN, chargée de mission au département des dispositifs médicaux
Représentation permanente de la France auprès de l?Union Européenne
Mme Marie DE LASTELLE, conseillère Santé
M. Antoine ICHAS, attaché Santé
Commission européenne
M. Gabriele CALLIGARO, Directorate-General for Health and Food Safety, Unit D3 ? Medical
Devices
Organisation Mondiale de la Santé (OMS)
Mme Stéphanie SEYDOUX, en charge des affaires multilatérales Cabinet du Directeur général de
l?OMS
National Health System (Grande-Bretagne)
Mme Sarah OUAHNON, Senior Net Zero Delivery NHS
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- 127 -
Établissements de santé et acheteurs hospitaliers
Centre Hospitalier Universitaire de Bordeaux
Pr Frédéric SACHE, praticien hospitalier, chef du service de cardiologie interventionnelle
Dr Josselin DUCHATEAU, praticien hospitalier, médecin en électrophysiologie service de
cardiologie interventionnelle
Dr Noëlle BERNARD, praticien hospitalier copilote de la transformation écologique
Dr Franck BLADOU, chirurgien urologue, chef du pôle de chirurgie
Mme Diane PAPUCHON, cadre de santé en cardiologie interventionnelle
Mme Isabelle PIDOUX, infirmière en cardiologie interventionnelle
Mme Aurélie FRESSELINAT, pharmacienne, Praticien hospitalier responsable du service Pharmacie
des dispositifs médicaux,
M. Sami YENI, pharmacien, Praticien hospitalier service Pharmacie des dispositifs médicaux
M. Raphaël YVEN, secrétaire général du CHU, directeur de la transformation écologique
Mme Agnès LASHERAS-VAUDUIN, responsable de l'unité prévention et contrôle des infections au
service d'hygiène hospitalière et référente hygiène pour la transformation écologique
Mme Cécile ANDICOECHEA, ingénieure transformation écologique
M. Xavier COPPEAUX, référent gestion des déchets
Mme Estelle OUSSAR, directrice Nouvel hôpital et ressources opérationnelles
Centre Hospitalier Universitaire de Clermont Ferrand
Pr Valérie SAUTOU, professeure des Universités, Praticien hospitalier, cheffe de pôle pharmacie,
Gérant de la pharmacie à usage intérieur
Mme Valérie DURAND-ROCHE, directrice générale du CHU de Clermont Ferrand
Mme Christine ROUGIER, directrice générale adjointe du CHU de Clermont Ferrand
Mme Audrey ENGUIX, pharmacienne Praticien hospitalier, Dispositifs médicaux, Coordonnateur
du groupement d?achat PharmAuvergne
M. Adrien BIARD, pharmacien, Praticien hospitalier, Chef du service Dispositifs Médicaux Stériles
Mme Delphine OUDOUL, pharmacienne, Praticien hospitalier, Cheffe de service de la Stérilisation
Mme Steffi CALLAND, pharmacienne assistante spécialiste, service de stérilisation
M. Rudy CHAUVEL, directeur des affaires juridiques et de la transition écologique
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- 128 -
Centre Hospitalier Universitaire de Nîmes
M. Jean-Marie KINOWSKI, pharmacien gérant de la pharmacie à usage intérieur, Praticien
hospitalier
Mme Virginie CHASSEIGNE, pharmacienne, Praticien hospitalier
Mme Ninon ROUVIERE, pharmacienne assistante spécialiste
Centre Hospitalier Universitaire de Strasbourg
Pr Patrick PESSAUX, chirurgien digestif aux Hôpitaux Universitaires de Strasbourg, président de
l?Association Française de Chirurgie
Agence Générale des Equipements et Produits de santé (AGEPS), Assistance Publique, Hôpitaux de
Paris (AH-HP)
M. Renaud CATELAND, directeur de l?AGEP
Mme Estelle PLAN, directrice des achats
Pr Pascal PAUBEL, pharmacien, Professeur des Université, Praticien hospitalier, chef de service
évaluations pharmaceutiques et bon usage
Mme Suzanne HAGHIGHAT, pharmacienne, Praticien hospitalier, responsable de l?évaluation et
achat des dispositifs médicaux
Fédération hospitalière de France (FHF)
M. Rudy CHOUVEL, directeur adjoint du CHU de Clermont Ferrand, chargé de mission transition
écologique à la FHF
M. Jean-François HUSSON, pharmacien, Praticien hospitalier, chef de service de la pharmacie du
Centre Hospitalier de Blois, chargé de mission produits de santé à la FHF
Mme Cécile CHEVANCE, responsable pôle Offre de soins, Finances, FHF Data, Recherche et e-
santé (OFFRES) à la FHF
Mme Dominique GOEURY, pharmacienne, chargée de mission à la FHF
GIP RESAH, réseau des acheteurs hospitaliers
M. Dominique LEGOUGE, président du GIP RESAH
UniHA, la coopérative des acheteurs hospitaliers
M. Walid BEN BRAHIM, directeur général
Mme Véronique BERTRAND, directrice générale adjointe, directrice de l?offre
M. Sami YANI, pharmacien Praticien hospitalier, CHU de Bordeaux
Mme Marion CASTEL-MOLIERES, pharmacienne, Praticien hospitalier, CHU de Toulouse
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Sociétés savantes, syndicats et ordres
Académie Nationale de Pharmacie
M. Pierre-Yves CHAMBRIN, pharmacien Praticien hospitalier, Agence générale des équipements
et des produits de santé (AGEPS), Assistance Publique, Hôpitaux de Paris (AP-HP)
Conseil National de l?ordre des pharmaciens
Mme Carine WOLF-THAL, présidente du Conseil national de l?ordre des pharmaciens
M. Patrick RAMBOURG, président du Conseil central
Mme Anne BERTHELOT, directrice adjointe de l?exercice professionnel et du Cespharm
Personnalité qualifiée
Pr Gilles AULAGNER, pharmacien hospitalier, Professeur des Université, ancien Président de
l?Académie Nationale de Pharmacie
Syndicat Nationale de l?Industrie des technologues Médicales (SNITEM)
Mme Cécile VAUGELADE, directrice affaires technico-règlementaires
Observatoire du médicament, des dispositifs médicaux et de l?innovation thérapeutique (OMEDIT)
Ile de France
Mme Patricia LE GONIDEC, pharmacienne, Praticien hospitalier, Responsable de l?OMEDIT IDF
EURO-PHARMAT
Mme Isabelle LE DU, pharmacienne Hospitalière, Présidente d?Euro-pharmat
M. Dominique THIVEAUD, pharmacien Hospitalier, ex-Président d?Euro-Pharmat
Société Française d?Hygiène Hospitalière (SF2H)
Dr Pierre PARNEIX, président de la SF2H, Centre d?appui à la prévention des infections
nosocomiales (CPIAS), Nouvelle Aquitaine
Société Française des sciences de la stérilisation (SF2S)
M. Christophe LAMBERT, président de la SF2S
M. Marc LAURENT, vice-Président de la SF2S
Autres entreprises et associations
Organisme Notifié GMED ? LNE
M. Lionel DREUX, président du GMED
Mme Béatrice LYS, directrice Technique du GMED
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The Shift Projet
Mme Marie KERNEC, directrice EHESP international, bénévole au Shift Project
Mme Laurie MARRAULT, cheffe de projet santé
Agence Primum Non Nocere
M. Olivier TOMA, fondateur de l?Agence Primum Non Nocere
ECOVAMED
M. Sébastien TAILLEMITE, président d?ECOVAMED
France Assos Santé, la voie des usagers
Mme Catherine SIMONIN, membre du bureau de France Assos Santé
M. Pascal SELLIER, association de familles de Traumatismes Crâniens, Représentant des usagers à
la CNEDIMTS
M. Yann MAZENS, chargé de mission produits et technologies de la santé à France Assos Santé
M. Jean-François THEBAUT, vice-président de la Fédération Française des Diabétiques
M. Gilbert BOUNAUD-DEVILLERS, association des porteurs de défibrillateurs cardiaques
Johnson & Johnson MedTech
Mme Megane PETITJEAN, responsable du département qualité JJ MedTech France
M. Olivier GRUMEL, responsable affaires règlementaires JJ MedTech France
M. François GANDEMET, directeur général JJ MedTech France
Fédération nationale des activités de la dépollution et de l?environnement
Clotilde VERNON : Responsable recyclage et filières REP
Valentine BALOCHE : Chargée de mission collecte
Fédération professionnelle des entreprises de recyclage
Léonard NEUVILLE : Chef de projet recyclage, énergie et décarbonation
DASTRI : éco organisme national
Laurence BOURET : Déléguée générale
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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LETTRE DE MISSION
PUBLIÉ
RAPPORT IGAS N°2023-085R/IGEDD N°015247-01
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PUBLIÉ
Synthèse
Recommandations de la mission
Sommaire
Rapport
1 Le périmètre et les modalités de retraitement à titre expérimental des DMUU devront être déterminés en l?absence de filière industrielle en France
1.1 Seule une entreprise, Vanguard, localisée en Allemagne, est susceptible de retraiter des DMUU dans les deux prochaines années
1.1.1 Le cadre expérimental retenu par la LFSS 2024 n?est pas de nature à favoriser l?émergence d?une filière industrielle de retraitement en France
Recommandation n 1 Sur la base de l?évaluation de l?expérimentation inscrite à l?article 66 de la LFSS pour 2024, donner rapidement de la visibilité aux industriels français sur le calendrier et le périmètre d?une éventuelle autorisation pérenne du re...
1.1.2 Vanguard a mis en place depuis une vingtaine d?années un processus spécifique de retraitement de DMUU sur trois sites en Allemagne
1.2 Le périmètre des DMUU à retraiter dans le cadre de l?expérimentation est contraint par le catalogue de Vanguard
1.2.1 Ce catalogue, constitué à 98 % de cathéters d?électrophysiologie, inclut 74 références avec marquage CE utilisées en France
Recommandation n 2 Circonscrire le périmètre des DMUU retraités dans le cadre de l?expérimentation à ceux qui présentent un marquage CE
1.2.2 Le recours à ces cathéters retraités devrait engendrer des économies annuelles allant de 35 à 59 % du coût d?achat de ces DMUU neufs selon le circuit retenu par les établissements de santé
2 Le cahier des charges de l?expérimentation devra préciser les critères de sélection des établissements de santé, le processus d?achat des DM retraités et les modalités d?information des patients
2.1 La participation des établissements de santé doit reposer sur une adhésion des professionnels concernés à l?expérimentation et à une réduction de l?empreinte écologique des DM
2.1.1 Plusieurs critères pourraient être pris en compte pour choisir les quatre établissements de santé qui participeront à l?expérimentation
2.1.2 L?adhésion des professionnels concernés à la démarche dans le cadre une réduction de l?empreinte écologique des DM est un critère prioritaire
Recommandation n 3 Choisir des établissements de santé avec des statuts différents et une activité d?électrophysiologie suffisante, dont les professionnels adhèrent à l?expérimentation dans le cadre d?une réduction de l?empreinte écologique des DM
2.2 Un marché groupé pourrait être envisagé selon des modalités à déterminer après expertise des accords conclus par chaque établissement de santé avec les fabricants de cathéters neufs
2.2.1 La mission préconise que le retraitement des DMUU se fasse en circuit « ouvert » plutôt que « fermé »
2.2.2 Un dialogue devrait être engagé avec les fabricants de cathéters neufs, qui pourrait déboucher le cas échéant sur un avenant aux accords-cadres
Recommandation n 4 Sous réserve de l?expertise juridique des accords-cadres entre chaque établissement de santé et les fabricants de cathéters neufs, privilégier le retraitement en circuit « ouvert » et dissocier les services fournis de l?achat des co...
2.3 Le processus logistique associé au retraitement ne pose pas de difficultés particulières, avec un point d?attention néanmoins concernant l?information des patients
2.3.1 Ce processus, qui devrait a priori représenter une surcharge de travail limitée, doit reposer sur un protocole partagé de décontamination et garantir la traçabilité des DMUU retraités
Recommandation n 5 Assurer la conformité du contrat établi entre les établissements de santé et l?entreprise de retraitement avec le protocole de décontamination établi par la société française d?hygiène hospitalière
Recommandation n 6 Mettre en place un dispositif spécifique de traçabilité permettant le suivi des DMUU retraités utilisés pour chaque patient
2.3.2 Le déploiement de l?expérimentation doit s?accompagner d?un effort global de pédagogie avec un système d?« opt out » pour les patients
Recommandation n 7 Associer les représentants des usagers à l?élaboration d?un document national d?information à partager avec les patients qui devront manifester expressément leur opposition en cas de refus d?utilisation d?un DMUU retraité
3 Le retraitement doit être mis en perspective avec les autres leviers de réduction de l?empreinte écologique des produits de santé qui exigent des moyens et une gouvernance à la hauteur des enjeux
3.1 Des établissements de santé mobilisent de façon encore isolée et non hiérarchisée plusieurs leviers de réduction de l?empreinte écologique des DM
3.1.1 L?évaluation de l?expérimentation inscrite en LFSS 2024 devra en particulier confirmer l?intérêt écologique relatif du retraitement des DMUU
Recommandation n 8 Allouer une partie des financements prévus à l?article 66 de la LFSS pour 2024 à l?évaluation de l?expérimentation par un prestataire maîtrisant la méthodologie de l?analyse de cycle de vie
3.1.2 Le ministère de la santé doit prioriser la mise en oeuvre d?autres leviers de réduction de l?empreinte écologique des DM, et accompagner le cas échéant leur passage à l?échelle
Recommandation n 9 Sur la base d?une expertise de l?intérêt écologique des différentes actions engagées par les établissements de santé, assurer un passage à l?échelle des leviers les plus pertinents de réduction de l?empreinte écologique des DM
3.2 Seuls une gouvernance et des moyens à la hauteur des enjeux crédibiliseront les engagements du ministère de la santé en matière de transition écologique
3.2.1 Le besoin d?accompagnement des établissements de santé justifie des moyens humains et financiers dans le cadre d?une gouvernance qui reste à définir
3.2.2 Au regard de l?expertise nécessaire pour hiérarchiser les leviers de réduction de l?empreinte écologique, cette gouvernance doit avoir une dimension interministérielle plus affirmée
Recommandation n 10 Faire reposer la « task force » sur la transition écologique en santé sur des moyens pérennes dont le calibrage et la gouvernance, à dimension interministérielle, doivent faire l?objet de travaux spécifiques
Recommandation n 11 Élargir aux DM les travaux engagés par la Direction générale des entreprises, en lien avec l?objectif de relocalisation des industries de santé, pour calculer et diminuer l?impact carbone des médicaments
LISTE DES ANNEXES
ANNEXE 1 : Identification d?une filière industrielle de retraitement et périmètre des DMUU éligibles
1 Le cadre expérimental retenu en LFSS pour 2024 ne favorise pas l?émergence d?une filière industrielle française de retraitement
1.1 L?interdiction, réaffirmée en 2022, de retraiter les DMUU en France est le principal facteur d?explication de l?absence de filière industrielle sur le territoire national
1.2 Les investissements nécessaires à la constitution d?une telle filière rendent inenvisageable son émergence dans un délai de deux ans, a fortiori dans un cadre expérimental
2 Vanguard, localisée en Allemagne, est la seule entreprise susceptible de retraiter des DMUU dans le cadre de l?expérimentation
2.1 Parmi les trois entreprises allemandes de retraitement, seule Vanguard possède des références marquées CE commercialisées à l?étranger
2.2 La mission a observé sur site le processus mis en oeuvre qui consiste à « re-fabriquer » un DM strictement équivalent au DM neuf
3 Le périmètre de l?expérimentation devrait être limité à la soixantaine de références de cathéters d?électrophysiologie marquées CE et retraitées par Vanguard
3.1 En théorie, sur le plan sanitaire, le futur DCE pourrait prévoir des critères d?exclusion fondés sur le Règlement européen de 2017
3.2 En pratique, sur les 600 références retraitées par Vanguard, seules 250 sont marquées CE, dont 74 sont des cathéters d?électrophysiologie utilisés par les hôpitaux français
4 Le retraitement engendrera dans les établissements de santé des économies par rapport au coût annuel des cathéters neufs circuit comprises entre 35 et 59 % d?économie selon le circuit choisi
4.1 En circuit ouvert, pour 25 utilisations, le retraitement diminue d?environ 60 % le coût annuel des cathéters
4.2 En circuit fermé, les économies obtenues grâce au retraitement sont plus difficiles à calculer et moindres qu?en circuit « ouvert »
ANNEXE 2 : Modalités d?expérimentation du retraitement des DMUU dans quatre établissements de santé
1 La participation des établissements de santé à l?expérimentation exige en premier lieu l?adhésion de l?ensemble des professionnels concernés
1.1 Différents critères sont envisageables pour sélectionner les établissements de santé participant à l?expérimentation
1.2 La priorité doit être accordée aux établissements engagés dans une démarche partagée de réduction de leur empreinte écologique
2 Un marché commun de retraitement ou d?achat de DMUU devra être conclu dans le respect du code de la commande publique
2.1 Les deux circuits possibles « ouvert » ou « fermé » de retraitement des DMUU présentent des avantages et inconvénients respectifs
2.2 Un échange avec les fournisseurs de DMUU neufs devra être engagé et déboucher le cas échéant sur un avenant au marché initial
3 Un circuit logistique devra être mis en place avec un impact a priori limité sur la charge de travail des professionnels de santé
3.1 Le circuit logistique sera défini avec l?entreprise de retraitement en tenant compte du cadre juridique applicable aux déchets
3.2 Au regard de la simplicité relative de ce circuit, la surcharge de travail devrait rester limitée
4 Les modalités d?information du patient devront être ajustées pour ne pas faire obstacle à la mise en oeuvre de l?expérimentation
4.1 La LFSS pour 2024 prévoit l?obligation d?informer les patients, qui peuvent s?y opposer, quand un DMUU retraité va être utilisé
4.2 Une fois correctement informé, le patient pourrait s?opposer à l?utilisation d?un DMUU retraité dans une logique d?« opt out »
5 Les crédits prévus par la LFSS 2024 pourraient financer une évaluation externe de l?expérimentation sur la base des critères définis en cahier des charges
5.1 L?évaluation de l?expérimentation doit être réalisée par un acteur expert de l?analyse du cycle de vie des produits de santé
5.2 Cette évaluation devra permettre d?apprécier l?intérêt du retraitement sur les plans sanitaire, écologique, économique et humain
ANNEXE 3 : Éléments de parangonnage sur le retraitement des DMUU en Europe
1 Le retraitement des DMUU dans les neuf États membres de l?UE présente des caractéristiques différentes
1.1 À fin octobre 2023, neuf États membres ont autorisé le retraitement des DMUU tandis que quinze l?ont interdit
1.2 Les modalités d?application de l?article 17 du RMD sont difficiles à apprécier et globalement hétérogènes
2 Focus sur la Suède, l?Espagne et le Royaume-Uni à partir des retours des Conseillers aux affaires sociales
2.1 Historique et cadre du retraitement des DMUU
2.2 Critères économiques et écologiques
2.2.1 Critères économiques
2.2.2 Critères écologiques
2.3 Périmètre des DMUU éligibles au retraitement
2.4 Organisation du retraitement
2.4.1 Espagne
2.4.2 Royaume Uni
2.4.3 Suède
2.5 Filières de retraitement
2.6 Traçabilité des DMUU
2.7 Information des patients
3 Le retraitement des DMUU est aussi développé en Amérique du Nord, particulièrement aux USA
3.1 États-Unis
3.2 Canada
ANNEXE 4 : Leviers de réduction de l?empreinte écologique des dispositifs médicaux
1 Le retraitement des DM à usage unique est le levier de décarbonation mis en exergue par la feuille de route « planification écologique » du ministère de la santé
1.1 Si les études françaises sur l?empreinte écologique des DM sont rares, ils représenteraient 20 % des émissions carbone du système de santé
1.1.1 L?évaluation de l?empreinte écologique des DM repose sur plusieurs méthodes sans encadrement par le ministère de la santé
1.1.2 L?empreinte écologique des DM s?explique surtout par le circuit de production de leurs intrants qui incluent souvent des métaux rares
1.2 Le retraitement des DM peut contribuer à réduire leur empreinte écologique mais n?est pas le levier le plus impactant
1.2.1 La feuille de route recense plusieurs leviers de décarbonation des DM en accordant une visibilité particulière à leur retraitement
1.2.2 La primauté accordée à ce levier est excessive au regard de son impact relatif sur l?empreinte écologique et de ses modalités de mise en oeuvre
2 La gouvernance et les moyens alloués à la planification écologique du système de santé ne sont pas à la hauteur de l?enjeu de décarbonation des DM
2.1 La faiblesse du pilotage national de cette stratégie engendre un risque de décalage croissant avec les initiatives constatées à l?hôpital
2.1.1 L?Anap assume un rôle d?opérateur de la feuille de route mais son portage reste fragile au sein de l?administration centrale et déconcentrée
2.1.2 Or les initiatives se développent dans une partie des établissements de santé sans accompagnement suffisant de la part de l?État
2.2 La mise en oeuvre d?une stratégie crédible de réduction de l?empreinte écologique des DM exige aussi une collaboration interministérielle renforcée
2.2.1 Dans une logique de subsidiarité, le soutien des administrations en charge de la transition écologique à la décarbonation du système est modeste
2.2.2 La DGE assume un leadership fondé sur le double objectif de relocalisation des industries de santé et de décarbonation
3 En parallèle de l?expérimentation, la mise en oeuvre des autres leviers de réduction de l?empreinte écologique des DM est indispensable et nécessite un appui national renforcé
3.1 Conformément aux dispositions interministérielles, les achats hospitaliers, qui constituent un levier majeur, doivent contribuer davantage à la réduction de l?empreinte écologique des DM
3.1.1 En dépit d?obligations croissantes, le levier des achats reste encore sous-utilisé par les hôpitaux pour diminuer leur empreinte environnementale
3.1.2 À l?exemple du système de santé britannique, les achats hospitaliers devraient constituer le principal levier de décarbonation des DM
3.2 Le retraitement des DM à usage unique, qui sont définis comme tels par les seuls industriels, doit aussi s?accompagner du développement des DM à usage multiple
3.2.1 L?évolution de la part respective des DM à usage unique et des DM à usage multiple ne fait l?objet d?aucun suivi au niveau national
3.2.2 Le développement de l?usage multiple est souvent conditionné dans les établissements de santé à une organisation et des moyens adaptés
3.3 La formation des personnels hospitaliers doit contribuer en particulier à faire converger davantage les démarches de pertinence et de sobriété des soins
3.3.1 Le développement de l?éco-responsabilité en matière de soins peut contribuer à renforcer l?efficience du système de santé
3.3.2 La sensibilisation des personnels hospitaliers aux enjeux liés à la transition écologique dépend encore largement des directions d?établissement
3.4 Enfin, le tri et la revalorisation des déchets issus des DM, qui dépendent aujourd?hui largement des décisions locales, doivent faire l?objet d?une stratégie nationale
3.4.1 Les établissements de santé sont soumis à des obligations croissantes en matière de gestion des déchets, en partie communes au secteur tertiaire
3.4.2 Les établissements de santé sont peu incités et accompagnés dans la réduction et la valorisation des déchets, en particulier ceux issus des DM
ANNEXE 5 : Résultats du questionnaire adressé par la mission aux établissements de santé
1 Rappel du contexte du questionnaire
2 Résultats
2.1 Les données des établissements : statuts et achats de DM
2.1.1 Nombre d?établissements répondant et leur statut
2.1.2 Les achats de DM
2.2 La politique menée par les établissements sur la réduction des gaz à effet de serre (GES)
2.2.1 La réalisation du bilan de gaz à effet de serre
2.2.2 Intégration de critères environnementaux dans la politique achat de DM
2.2.3 Le tri des déchets de DM
2.2.3.1 Filières de récupération ou de recyclage des DMUU
2.3 Les établissements et l?expérimentation inscrite à l?article 29 du PLFSS
2.3.1 Les CHU et les EPBL répondants sont les plus intéressés pour participer à l?expérimentation
2.3.2 Le choix des DM se porte vers les sondes d?électrophysiologie, mais il existe une confusion entre retraitement et recyclage
2.3.3 Les freins identifiés
2.4 Les facteurs de réussite de cette expérimentation
2.5 Les indicateurs de suivi de l?expérimentation
2.6 Les autres leviers prioritaires pour diminuer l?empreinte carbone des DM
3 Conclusion
Liste des personnes rencontrées
Lettre de mission
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