Appui à François Decoster, maire de Saint-Omer, pour sa mission relative à l'amélioration de l'aménagement des bassins versants, du dispositif de gestion des cours d'eau et de la prévention des inondations au sein de sa commune

TOURJANSKY, Laure

Auteur moral
France. Inspection générale de l'environnement et du développement durable (IGEDD)
Auteur secondaire
Résumé
<div style="text-align: justify;">Les précipitations continues du mois de novembre 2023 dans la suite de la tempête « Ciaran » puis en janvier 2024, ont engendré, dans le département du Pas-de-Calais et dans l'ouest du département du Nord, des inondations exceptionnelles, 303 communes ayant été reconnues comme relevant du dispositif « catastrophes naturelles ». La combinaison de pluies, ruissellements et inondations a eu des conséquences lourdes pour de nombreux habitants inondés plusieurs semaines, pour des activités économiques, bâtiments, équipements publics et infrastructures, y compris les cours d'eau et canaux, et pour l'environnement. Le territoire du delta de l'Aa et plus largement la Flandre maritime française, présentent des caractéristiques géographiques et physiques de vulnérabilité au risque d'inondation et de submersion marine, une partie du territoire étant située en-dessous du niveau de la mer, protégé par de cordons dunaires et des digues à la mer. Dans ce contexte et à la suite du déplacement du Président de la République, le 14 novembre, dans les territoires sinistrés, une mission a été confiée au maire de Saint-Omer pour mener une mission de parangonnage avec des territoires comparables riverains de la mer du Nord, aux Pays-Bas et en Belgique. Elle a eu pour vocation de formuler des premières recommandations contribuant à une réflexion plus large sur les évolutions à apporter à l'aménagement de l'ensemble des bassins versants affectés par ces inondations et au dispositif de gestion de l'eau et de prévention des inondations, évolutions tant techniques qu'en matière de gouvernance et de financement des aménagements et infrastructures. La mission a été centrée sur les enjeux liés aux inondations terrestres, la submersion marine et les risques de sécheresse croissants étant abordés à l'occasion, comme composantes d'une approche systémique sans pouvoir être systématique. Elle a permis de mettre en avant des évolutions historiques qui présentent des convergences dans les approches, mais les vulnérabilités plus apparentes du territoire néerlandais ou le choc de la « water bomb » de juillet 2021 en Belgique ont conduit les autorités nationales et régionales de ces pays à réaliser des inflexions dans leurs politiques qui peuvent inspirer une accélération de la prise en compte de l'impact du dérèglement climatique pour notre propre politique de prévention, la rendre plus robuste et l'articuler à la fois dans les urgences et le temps long nécessaire pour réaliser aménagements et investissements. La brutalité et la durée des inondations de ces dernières semaines ont aussi réinterrogé notre gestion de crise : les parallèles avec la gestion de crise des inondations meurtrières de juillet 2021 en Wallonie et la réflexion en cours pour l'amender sont aussi des inspirations pour préparer notre pays à une très probable multiplication des catastrophes climatiques que subiront nos territoires.</div>
Editeur
IGEDD
Descripteur Urbamet
changement climatique ; inondation ; climatologie ; prévention des risques ; risques naturels ; aménagement régional ; gestion de l'eau
Descripteur écoplanete
résilience ; gestion de crise ; catastrophe naturelle
Thème
Environnement - Paysage ; Ressources - Nuisances
Texte intégral
Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France François Decoster Maire de Saint-Omer Avec l?appui de Laure Tourjansky Inspection générale de l?environnement et du développement durable P U B L I É Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 2/107 Sommaire Sommaire ................................................................................................................................. 2 Liste des recommandations ................................................................................................. 6 Introduction.............................................................................................................................. 8 1 Des inondations longues, liées à des pluies exceptionnelles, sur un territoire de polder ............................................................................................................................ 10 1.1 Des épisodes de pluie d?occurrence parfois centennale sur les sois humides du polder ........................................................................................................................... 10 1.2 Des inondations importantes et longues sur plusieurs bassins .............................. 11 1.3 Une implication historique forte dans la gestion de l?eau mais des évolutions récentes de nature à aggraver les inondations ........................................................ 14 1.3.1 Un système de drainage mis en place depuis le Moyen-âge ........................ 14 1.3.2 Une action structurée de l?Etat et des collectivités dans la prévention des inondations ......................................................................................................... 15 1.3.3 Une gestion de l?eau qui mobilise de nombreux acteurs ............................... 18 1.4 Le climat change, le territoire aussi ........................................................................... 20 1.5 Les questions soulevées à l?issue de ces épisodes d?inondation ........................... 21 2 Des similitudes avec les pays voisins qui font socle, des différences qui peuvent être inspirantes ................................................................................................. 22 2.1 Des axes d?action complémentaires et une implication de tous les niveaux ......... 23 2.1.1 La prévention des inondations s?inscrit dans le cadre européen et le rythme et l?intensité de ses évolutions sont marqués par les grandes catastrophes ............................................................................................................................. 23 2.1.2 La prévention des inondations est partenariale par nature ........................... 23 2.1.3 La prévention des inondations prend le pas sur la protection à des rythmes différents selon les pays ................................................................................... 25 2.1.4 La gestion de crise est organisée en fonction de la gravité de la catastrophe ............................................................................................................................. 26 2.1.5 Des coopérations sont une condition première de la prévention des inondations ......................................................................................................... 26 2.2 Des différences dans le portage stratégique de la prévention des inondations .... 27 2.2.1 La capacité à faire de la prévention des inondations une priorité ................. 27 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 3/107 2.2.2 La pondération des axes d?action .................................................................... 28 2.2.3 La posture en gestion de crise ......................................................................... 30 2.2.4 L?engagement dans l?adaptation au changement climatique ........................ 31 3 Les actions et axes de progrès qui se dégagent ....................................................... 34 3.1 Croiser le retour des inondations de fin 2023 - début 2024 et les bonnes pratiques de nos voisins ............................................................................................. 34 3.1.1 Des leviers pour améliorer la gestion de crise ................................................ 34 3.1.2 Etablir un diagnostic partagé de l?état des cours d?eaux, canaux, fossés .... 36 3.2 Renforcer le portage de la prévention par les collectivités locales compétentes.. 36 3.3 Anticiper les modalités du relèvement et l?accompagner par une structure spécifique ..................................................................................................................... 37 3.4 Renforcer les coopérations transfrontalières ............................................................ 37 3.5 Installer une institution stratège et pérenne, au plus haut niveau de l?Etat, pour orienter et soutenir l?adaptation au changement climatique .................................... 39 3.5.1 Structurer le portage politique de l?adaptation au changement climatique au plus haut niveau ........................................................................................... 39 3.5.2 Une action à lancer : représenter l?inondation et informer ............................. 40 Conclusion ............................................................................................................................. 45 Annexes .................................................................................................................................. 46 Annexe 1. Lettre de mission ............................................................................................... 47 Annexe 2. Agenda des déplacements et liste des personnes rencontrées .............. 49 Annexe 3. La prévention des inondations aux Pays-Bas ............................................. 52 Annexe 3.1. Les catastrophes, moments fondateurs des politiques de prévention contre les inondations ................................................................................................. 52 Annexe 3.2. Des protections des premiers Plans Delta au Commissaire du Delta ..... 57 Annexe 3.2.1 La défense contre la mer .................................................................... 57 Annexe 3.2.2 La protection contre les inondations fluviales ................................... 58 Annexe 3.2.3 L?articulation avec la place pour le fleuve, et le changement de cap opéré dans le contexte du changement climatique ........................................ 58 Annexe 3.3. Organisation de la prévention des inondations .......................................... 60 Annexe 3.3.1 Une gestion de l?eau et du risque intégrée à l?échelle ministérielle 60 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 4/107 Annexe 3.3.2 Une organisation spécifique pour la gestion de l?eau aux échelons territoriaux .......................................................................................................... 60 Annexe 3.3.3 Un financement des protections et de la prévention organisé dans une logique de subsidiarité ............................................................................... 61 Annexe 3.4. Une gestion de crise fondée sur des principes clairs et partagés ............ 63 Annexe 3.5. De la prévention des inondations à l?adaptation au changement climatique ..................................................................................................................... 65 Annexe 4. La prévention des inondations en Belgique ................................................ 68 Annexe 4.1. Mise en perspective historique et géographique ....................................... 68 Annexe 4.1.1 Un pays présentant des enjeux différenciés du point de vue de la prévention des inondations ............................................................................... 68 Annexe 4.1.2 Des enjeux transfrontaliers majeurs .................................................. 69 Annexe 4.2. La gestion de l?eau dans le système fédéral belge .................................... 70 Annexe 4.2.1 Le rôle important des régions ............................................................. 70 Annexe 4.2.2 Une organisation de la gestion de crise par niveaux de gravité ..... 71 Annexe 4.2.3 Un système assuranciel présenté comme fragile............................. 72 Annexe 4.2.4 Le choc des inondations de juillet 2021 ............................................ 73 Annexe 4.3. Les Flandres : une structuration par grand bassin, en cours d?inflexion . 73 Annexe 4.3.1 L?équilibre entre protection et aménagement du territoire ............... 74 Annexe 4.3.2 L?adoption de nouveaux grands plans structurants .......................... 77 Annexe 4.4. La Wallonie : le choc des inondations de juillet 2021 ................................ 80 Annexe 4.4.1 Quelques éléments sur le cadre général de la prévention des inondations ......................................................................................................... 80 Annexe 4.4.2 Mise en place d?un dispositif spécifique de reconstruction .............. 80 Annexe 5. Rapport de la Commission d?enquête parlementaire chargée d?examiner les causes et d?évaluer la gestion des inondations de juillet 2021 en Wallonie du 22 mars 2022 ......................................................................................... 84 Annexe 6. Revue de presse ................................................................................................ 96 Annexe 7. Eléments de bibliographie ............................................................................. 107 PUBLIÉ PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 6/107 Liste des recommandations Recommandation 1. : Proposer une place réelle pour des élus dans la gestion de crises inondation, notamment au sein des cellules de crise, dans le partage de la vision globale de l'information sur le la gestion des événements liés à la crise et des données sur l'ensemble du territoire en crise (travail à mener sous pilotage de la DGSCGC en lien avec les préfectures, des représentants des EPTB, des EPCI et des maires, en lien avec la DGPR d?ici fin 2024, pour préciser la feuille de route et engager les premières actions). ................................................................................................. 34 Recommandation 2. : Evaluer et revoir en profondeur le schéma d?évacuation à la mer des crues extrêmes, par voie gravitaire et par pompage, notamment par la mise en place d?un système de pompage de renfort efficient pour ces inondations dans le delta de l?Aa, travail à mener sous l?égide de la préfecture du Pas-de-Calais, avec les Syndicats mixtes concernés et le conseil départemental, d?ici l?automne, pour préciser la feuille de route et engager les premières actions avant l?hiver. .............. 35 Recommandation 3. : Expérimenter une participation citoyenne à la gestion de crise, sur la base de réseaux de volontaires formés, travail à mener sous l?égide de la DGSCGC en lien avec l?AMF, sous un an, et développer la culture du risque pour les populations des territoires impactés, notamment par une appropriation des gestes et des réflexes en situation de crise. ............................................................................... 35 Recommandation 4. : Organiser sur les principaux bassins versants du Pas-de-Calais des séminaires de retour d?expérience des inondations, sous l?égide des préfets, en lien avec les élus locaux, à l?été 2024, quelques mois après la sortie de crise. ........ 35 Recommandation 5. : Prévoir dans le calendrier des exercices nationaux, une démarche de stress test, sur la base par exemple d?un scénario de type « water bomb », sous l?égide de la DGSCGC............................................................................ 36 Recommandation 6. : Etablir un état global des lieux des fossés, canaux, cours d?eau, berges et digues en associant les parties prenantes, évaluer et revoir la périodicité et l'organisation des contrôles des obligations de leur entretien et évaluer toutes les options favorisant l'évacuation gravitaire de l'eau à la mer, y compris les canaux ne présentant plus d'utilité pour la navigation, en vue d?établir un programme pluriannuel de suivi et d?entretien. Un travail préalable, sous pilotage de la DREAL de bassin Artois Picardie, sera nécessaire pour préciser les modalités de cette démarche. Assurer une veille régulière de l'état de ces infrastructures, le cas échéant en y associant des citoyens volontaires formés à cet effet. ..................................................................... 36 Recommandation 7. : S?appuyer sur la mission des inspections en cours sur la gouvernance pour rendre plus robuste et efficace la mise en oeuvre de la Gemapi dans les bassins versants touchés par les inondations, dans ses aspects organisationnels et financiers, afin de gagner en simplicité, lisibilité et efficacité, et créer une approche opérationnelle cohérente de l?amont jusqu?à l?aval. .................. 37 Recommandation 8. : Dans la suite des inondations de novembre 2023, mettre en place une structure technique spécifique de relèvement (commissariat de la reconstruction doté d'une équipe pluridisciplinaire et placé auprès d'une autorité politique), dans le cadre d?une expérimentation : pour une durée pertinente, de l?ordre de plusieurs mois, elle apporte aux préfets et à leurs services un soutien opérationnel au relèvement, pour intégrer la réduction de la vulnérabilité dans tout l?aménagement du territoire. Si l?expérimentation est réussie, cette structure a vocation à être pérennisée pour capitaliser du retour d'expérience et être mobilisée rapidement en gestion post-catastrophe dans le futur dans tout le territoire national. ..................................................................... 37 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 7/107 Recommandation 9. Accentuer les coopérations transfrontalières dans le domaine de la gestion de l'eau et la prévention des inondations pour développer le partage des bonnes pratiques et les réflexes de gestion commune des crises. ........................... 38 Recommandation 10. : Dans le contexte des inondations dans le Pas-de-Calais et le Nord, mettre en place une nouvelle institution, qui assure dans la durée et au plus haut niveau de l?Etat, le portage politique de l?anticipation au changement climatique, dans une logique d?appui scientifique et technique, de coordination, de médiation. De taille réduite, elle a vocation à mobiliser les administrations et opérateurs de l?Etat et à être un soutien des élus locaux . ...................................................................... 40 Recommandation 11. Engager l?élaboration d?une cartographie nationale des inondations, permettant de développer des outils pédagogiques. Cela demande une expression politique claire sur la gravité des scénarios d?inondation à traiter et sur le type d?inondation à aborder, et un travail structuré et partenarial pour publier un résultat découlant d?une approche partagée entre différents services ministériels, les opérateurs concernés, les représentants des collectivités locales, les associations impliquées et certains partenaires comme la Caisse centrale de réassurance.................................................... 43 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 8/107 Introduction Les précipitations importantes et continues du mois de novembre 2023 dans la suite de le tempête « Ciaran » puis en janvier 2024, ont engendré, dans le département du Pas-de-Calais et dans l?ouest du département du Nord, des inondations exceptionnelles, avec un pic de crue le 11 no- vembre. 303 communes ont été reconnues comme relevant du dispositif « cat nat1 ». La combinai- son de pluies, ruissellements et inondations a eu des conséquences lourdes pour de nombreux habitants qui sont restés inondés plusieurs semaines, pour des activités économiques, bâtiments, équipements publics et infrastructures, y compris les cours d?eau et canaux, et pour l?environne- ment. Le territoire du delta de l'Aa, et plus largement la Flandre maritime française, présentent des ca- ractéristiques géographiques et physiques qui les rendent vulnérables au risque d'inondation et de submersion marine : une partie du territoire est située en-dessous du niveau de la mer, protégé par de cordons dunaires et des digues à la mer. Les bassins hydrographiques sont courts, les pentes très faibles à l'aval, les sols très peu perméables. Depuis des siècles, la gestion de l?eau de ce polder a été organisée par l'homme, sur la base en particulier d?un réseau de fossés et canaux, les wateringues ou watergangs, complété par des stations de pompage, qui contribuent à l?éva- cuation de l?eau vers les fleuves souvent canalisés puis vers la mer. Les effets attendus du changement climatique, avec une possible concentration de pluies très im- portantes sur certaines périodes alternant avec des périodes de sécheresse prolongée, couplées à une élévation tendancielle du niveau de la mer due au réchauffement, accroissent l?exposition du territoire. L?évolution de son aménagement a été de nature à le rendre plus vulnérable. C?est dans ce contexte que, dans la suite du déplacement du Président de la République, le 14 novembre, dans les territoires sinistrés, une mission a été confiée au maire de Saint-Omer2 pour mener une mission de parangonnage avec des territoires comparables riverains de la mer du Nord, aux Pays-Bas et en Belgique. Les inondations dramatiques des 14 et 15 juillet 2021 en Wallonie fournissent également un retour d?expérience récent sur les mesures prises après la catastrophe et leur articulation avec les actions à mener dans la durée quand bien même ces inondations se sont déroulées dans un contexte météorologique et territorial très différent. La démarche de parangonnage a vocation à formuler des premières recommandations et à contri- buer à une réflexion plus large sur les évolutions à apporter à l'aménagement de l?ensemble des bassins versants affectés par ces inondations3 et au dispositif de gestion de l'eau et de prévention des inondations, évolutions tant techniques qu'en matière de gouvernance et de financement des aménagements et infrastructures. Plusieurs déplacements ont été organisés en Belgique et aux Pays-Bas, qui ont permis, avec le 1 Le terme « Cat Nat », recouvre le régime d?indemnisation des catastrophes naturelles, créé par la loi du 13 juillet 1982, qui a permis de pallier une carence de couverture des risques naturels qui n?étaient que très peu assurés jusqu?alors. L?assuré est indemnisé des dégâts causés par une catastrophe naturelle si la commune, sur demande du maire, est reconnue, sur des bases scientifiques et par arrêté, comme étant en état de catastrophe naturelle et si les biens de l?assuré sont garantis en assurance de dommages. L?assurance « catastrophe naturelle » est une extension de garantie obligatoire pour tous ces contrats. Elle donne lieu au paiement d'une surprime uniforme sur l'ensemble du territoire et permet un système de réassurance des assureurs, auprès de la Caisse centrale de réassurance (CCR), l?Etat étant assureur en dernier recours. 2 Lettre du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires du 28 novembre, voir annexe 1. 3 La durée des inondations et la spécificité des territoires affectés en termes d?organisation de la gestion de l?eau ont justifié également un travail approfondi sur la gouvernance d?une part et la proposition de premiers axes d?un plan de résilience d?autre part. Cette mission a été confiée à trois inspections ministérielles, IGEED, IGA, CGAER. Les constats et recommandations du travail de parangonnage ont ainsi vocation à alimenter cette mission interministérielle, qui visera également à rendre opérationnelles les pistes dégagées. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 9/107 soutien des services des ambassades, de rencontrer les autorités politiques ainsi que les services techniques concernés, à différents échelons territoriaux, et d?aller sur le terrain (annexe 2). La qua- lité de l?accueil et la richesse des échanges méritent d?être soulignées. En début de mission, le maire de Saint-Omer a organisé une session d?échange avec ses conci- toyens par le biais d?une rencontre Facebook live et, avant la remise de son rapport, a partagé des observations avec les acteurs locaux et opérateurs du territoire. Il avait invité également l?ensemble des participants au comité de suivi ministériel à lui proposer des angles d?approche et des ques- tionnements avant ses déplacements. Un échange a eu lieu avec eux lors de la réunion du 23 janvier du comité de suivi ministériel en présence de Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, en préfecture du Pas-de-Calais. Le travail de parangonnage ne vise pas à identifier des solutions « clé en main ». La prévention des inondations est, en effet, étroitement liée à la géographie et l?histoire de chaque Etat ou région, à la structuration de leurs institutions, à leur culture, aux catastrophes qui ont fait date pour eux. Elle permet de comprendre comment l?amélioration de la résilience y est recherchée et comment l?adaptation au changement climatique la complète progressivement. C?est l?analyse de l?ensemble des outils et dispositifs mis en place dans chaque cas qui permet de faire ressortir des démarches exemplaires, des similitudes ou des différences qui peuvent être utiles aux travaux menés en France. La mission a été centrée sur les enjeux liés aux inondations terrestres, la submersion marine et les risques de sécheresse croissants étant abordés à l?occasion, comme composantes d?une approche systémique indispensable qui n?a pu être systématique. Concernant le périmètre de comparaison, le choix initial d?un parangonnage avec la Belgique et les Pays-Bas oriente les travaux sur la question spécifique de la prévention des inondations dans les terrains très plats ou sous le niveau de la mer que sont les polders. Pour autant, des pistes de réflexion, par exemple quand elles concernent des améliorations de la gestion de crise, peuvent être utiles en France au-delà du seul bassin de l?Aa. Les rédactions relatives à la France peuvent donc, selon les parties, être ciblées sur les polders, ou plus largement sur le Pas-de-Calais et le Nord, voire être de portée nationale. La mission a permis de mettre en avant des évolutions historiques qui présentent des convergences dans les approches, mais les vulnérabilités plus apparentes du territoire néerlandais ou le choc de la « water bomb » de juillet 2021 en Belgique ont conduit les autorités nationales et régionales de ces pays à réaliser des inflexions dans leurs politiques qui peuvent inspirer une accélération de la prise en compte de l?impact du dérèglement climatique pour notre propre politique de prévention, la rendre plus robuste et l?articuler à la fois dans les urgences et le temps long nécessaire pour réaliser aménagements et investissements. La brutalité et la durée des inondations de ces dernières semaines ont aussi réinterrogé notre gestion de crise : les parallèles avec la gestion de crise des inondations meurtrières de juillet 2021 en Wallonie et la réflexion en cours pour l?amender sont aussi des inspirations pour préparer notre pays à une très probable multiplication des catastrophes climatiques que subiront nos territoires. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 10/107 1 Des inondations longues, liées à des pluies exception- nelles, sur un territoire de polder 1.1 Des épisodes de pluie d?occurrence parfois centennale sur les sois humides du polder La France a connu neuf épisodes distincts et successifs de dépressions météorologiques entre le 18 octobre 2023 et le début janvier 2024, qui ont entrainé des phénomènes pluvieux quasiment continus, en particulier sur le nord de la France4. Avec une moyenne de 440 mm de précipitations sur les deux départements du Nord et du Pas-de-Calais entre le 15 octobre et le 5 janvier, le cumul a dépassé le précédent record, avec des disparités importantes selon les territoires. Sur la partie ouest, les cumuls de précipitations de novembre ont par endroit dépassé de 500 % la moyenne des cumuls de la période de référence 1991-2020. La particularité de cette fin d?année 2023 n?est donc tant un cumul extrême de précipitations un jour particulier, mais la succession de plusieurs jours de précipitations intenses. Les valeurs maximales de cumul de précipitations sur 15 jours vont bien au-delà des cumuls de période de retour de 100 ans. Si les sols étaient particulièrement secs début octobre 2023, ils ont atteint le 10 novembre un niveau record d?humidité pour cette période de l?année, puis se sont maintenus à la saturation de leur capacité de rétention en eau. Les contextes géologiques et géomorphologiques ont joué sur la forme et la durée des crues. Le rôle des nappes d?eau souterraine, variable selon les secteurs, est globalement plus important sur les secteurs crayeux (Canche, Amont du delta de l?Aa, Haute Lys). Les inondations ont, notamment, frappé la plaine maritime flamande française, dont l?organisation actuelle est le résultat d?une action anthropique ancienne de protection et de drainage. De Saint- Omer à Watten, l?Aa traverse le marais audomarois, territoire de niveau inférieur à celui des pleines mers de vives-eaux et distant de plus de trente kilomètres de la mer. Ainsi, dans son étude prospective 5 , l?Institution intercommunale des Wateringues fait elle le diagnostic synthétique suivant : « Le territoire est fortement et historiquement soumis aux inondations continentales dans la plaine du delta de l?Aa, qui conjugue faible altimétrie (qui limite l?écoulement gravitaire des eaux du réseau hydrographique et hydraulique) et faible déclivité (propice à l ?étalement des débordements des cours d?eau et canaux sur des surfaces importantes) : - 3 500 hectares inondables sur le delta par une crue centennale ; - les principaux secteurs exposés sont ceux de Saint-Omer et de Calais et du Canal des Pierrettes ; - des dommages observés dès les épisodes de période de retour biennale, qui peuvent dépasser 10 M¤ pour Q100 ; - des inondations à hauteurs d?eau et vitesse faibles mais qui peuvent être longues (plusieurs semaines) ; - des enjeux divers et épars, qu?il est donc difficile de protéger par des ouvrages offrant une protection globale. » 4 De nouveaux épisodes pluvieux ont frappé le nord de la France en février. 5 IIW, 2023 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 11/107 1.2 Des inondations importantes et longues sur plusieurs bassins Ces précipitations intenses, atteignant des sols rapidement saturés, se sont traduites par des crues exceptionnelles sur plusieurs bassins, notamment ceux de l?Aa et de son affluent la Hem, mais aussi, sur d?autres bassins-versants voisins, de la Liane et de la Canche. Sur ces trois secteurs, des vigilances Crues de niveau orange, puis rouge, ont été activées par le réseau Vigicrues dès le 2 novembre. La vigilance a été rouge pendant six jours d?affilée en novembre. En particulier, sur le bassin de l?Aa et de la Hem, les périodes de retour des débits lors de l?évènement de novembre 2023 sont supérieures à 100 ans. Sans être aussi intenses que ceux de novembre, les épisodes pluvieux de décembre, puis de début janvier ont entretenu ces crues. Encadré 1 : une évaluation des dégâts qui reste à préciser et consolider 303 communes ont été reconnues en état de catastrophe naturelle à la suite des inondations de novembre 2023- janvier 2024 selon la procédure accélérée. Fin janvier, la Caisse centrale de réassurance a estimé à 645 millions d?euros le coût des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France, pris en charge dans le cadre du régime de catastrophe naturelle. Cette estimation, qui n?est pas encore totalement stabilisée, concerne les biens assurés des particuliers, des collectivités et des entreprises. Au 1er février, 116 collectivités ont déposé un dossier de demande de subvention, en cours d?instruction, ou une lettre d?intention, pour un montant déclaré de plus de plus de 33 millions d?euros au titre de la « Dotation de solidarité en faveur de l?équipement des collectivités territoriales touchées et de leurs groupements touchés par des événe- ments climatiques ou géologiques » (DSEC). Concernant le secteur agricole, les pertes de fonds (éligibles au régime des calamités agricoles) sont évaluées à 700 000¤ sur 113 communes dans le Nord et 12,7 M¤ sur 845 communes dans le Pas-de-Calais6. Des pertes de récolte assurables, essentiellement en grandes cultures et cultures légumières, sont signalées sur un périmètre de 422 communes dans le Nord et 845 communes dans le Pas-de-Calais7. Ces premiers ordres de grandeur devront être complétés par les pertes d?activités directes et indirectes des entre- prises (données chômage partiel...) et les impacts psychologiques et sanitaires pour les personnes dont les habi- tations ont été inondées plusieurs semaines. Selon les données de la sécurité civile, 8752 maisons ont été touchées en novembre et 2768 en janvier. Mi-février, il y aurait eu une cinquantaine de demandes d?information au titre du rachat de maisons dans le cadre du FPRNM. Les inondations n?ont heureusement pas fait aucune victime. Durant l?épisode de crue de cet hiver, les inondations dans les plaines ont été alimentées par le ruissellement des collines crayeuses de l?Artois et les sources des coteaux crayeux, et éventuelle- ment par artésianisme de la nappe de la craie. Un certain nombre d?habitants n?ont pas été inondés par la crue mais par la montée en charge des nappes : ils n?étaient d?ailleurs pas assurés pour ce type de risque. Cet apport massif d?eau venant de l?amont a dépassé les capacités d?évacuation des eaux à la mer à l?aval. Il est admis que le bassin amont de l?Aa (y compris la Hem) a eu un débit de 120 à 200 m3 / seconde, très au-delà des capacités de pompage habituelles et renforcées. La topographie, le contexte artificialisé des bassins versants et la nature argileuse des sols de la plaine maritime flandrienne ont été des facteurs aggravants, influençant l?intensité et la durée des épisodes de crue D?un point de vue général sur l?ensemble des secteurs concernés, les phénomènes de ruisselle- ment et d?érosion des sols sont importants. Les témoignages d?habitants rappellent que, par le passé, si les fortes pluviométries de l?amont de l?Aa pouvaient mettre de 12 à 24 heures pour par- venir jusqu?à Saint-Omer, aujourd?hui, s?il pleut le soir, le bief du Haut-Pont sur Saint-Omer est marron dès le lendemain matin. Il manque de prairies et de haies sur le bassin amont. Replanter des haies ou des banquettes boisées, remettre des prairies nécessitera un travail partenarial avec l?agriculture au travers de contrats solides et rémunérateurs pour les agriculteurs concernés. Encadré 2 : 2002, une crue qui fait référence dans les mémoires 6 source DGPE 7 source DGPE PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 12/107 La crue de 2002 est souvent décrite dans le bassin de l?Aa comme une « crue centennale », Une comparaison détaillée des données disponibles pour ces deux évènements montre pourtant que les précipitations et les crues de 2023 excèdent très largement l?épisode de 2002. Ainsi, les valeurs maximales des cumuls de précipitations sur 15 jours sont plus élevées de 50 à près de 300 % en novembre 2023 par rapport aux valeurs de février 2002. A Wizernes, l?Aa a atteint la côte 1,93 m en 2002, et un maximum de 2,81 m en 2023, pour des débits de près de 60 m3/s en 2002 et de 90 m3/s pour l?épisode récent. Sur la Hem, affluent de l?Aa, les débits n?ont pas atteint les 15 m3/s en 2002, mais ont dépassé les 50 m3/s en novembre 2023. Dans ce contexte, l?évacuation de l?eau à la mer a été au centre de toutes les attentions, ce qui s?est traduit par trois questions récurrentes relatives au système de pompage, à l?état des canaux et des fossés, et au rôle de VNF dans la gestion de crise. - Durant les inondations l?une des deux pompes de 10 m3/s dépendant du Grand port maritime de Dunkerque, à Mardyck, opérée pour le compte de l?institution intercommunale des Wateringues, était en maintenance, prévue, et l?autre sortait de maintenance. Cela a conduit à diminuer la capacité de pompage et a nécessité l?apport de moyens supplémentaires. La Direction générale de sécurité civile a fait appel à des moyens nationaux. A Cuinchy, des pompes appartenant à la Sécurité Civil, à Voies Navigables de France (VNF) et à des entreprises privées réquisitionnées par le préfet du Pas-de-Calais ont permis une capacité d?évacuation d?environ 7 000m3 d'eau par heure. Le déploiement de ces moyens demande de 3 à 4 jours, avec un travail de positionnement des équipements et une logistique importante. La totalité du parc de renfort français a été utilisée ; sur cinq pompes, trois ont été endommagées. Le coût du pompage a fait partie des soutiens apportés par l?Etat après la crise. Une demande forte, compte tenu de la récurrence des épisodes pluviaux, a été le maintien sur site des pompes de renfort, ce qui soulève, par ailleurs, des questions de maintenance des équipements. L?activation du Mécanisme européen de protection civile, réclamée par le maire de Saint-Omer, a finalement permis de déployer des renforts néerlandais en novembre, puis néerlandais, tchèques et slovaques en janvier. L?appel à la solidarité européenne a donné lieu à des hésitations de la part de certains acteurs au sein des services de l?Etat, là où le réflexe européen pourrait être encore développé. Encadré 3 : « Inondations dans le Pas-de-Calais : quatre giga-pompes néerlandaises déployées dans la région8 « C'est la priorité des autorités, 2 semaines après le début des inondations dans le Pas-de-Calais : évacuer le plus possible l'eau du delta de l'Aa. D'importants moyens de pompage sont donc mis en oeuvre. Deux giga-pompes (5 400m3/heure chacune) de la Sécurité Civile fonctionnent à Mardyck depuis le 9 novembre. Deux autres giga- pompes venues de Rotterdam, aux Pays-Bas, de même capacité, sont en cours d'installation ce mardi. Le gouvernement français a fait appel à la solidarité européenne pour faire face aux inondations dans le Nord-Pas- de-Calais. Les Pays-Bas envoient quatre pompes à grande capacité qui sont en cours de déploiement à Dunkerque et Calais. "Ces renforts néerlandais vont permettre d'évacuer environ 30% de capacité supplémentaire, explique François-Xavier Bieuville, le sous-préfet de Dunkerque. C'est plus de 50 000 piscines olympiques qui ont déjà été évacuées" (depuis le 9 novembre) grâce à ces renforts. Le sous-préfet évoque des résultats visibles : les niveaux de l'eau ont baissé dans la vallée de la Lys et le marais audomarrois. "Tant que l'eau n'a pas été totalement éva- cuée, on continuera à travailler", ajoute le sous-préfet. Le savoir-faire néerlandais Les Pays-Bas ont logiquement répondu à l'appel à la solidarité européenne lancé par le gouvernement français. Tous les moyens de pompage nationaux de notre pays ont en effet été envoyés dans le Nord-Pas-de-Calais et ils ne suffisent pas vu la situation. "Les Pays-Bas sont en grande partie sous le niveau de la mer donc si si nous avons un petit problème c'est tout de suite d'énormes quantités d'eau, raconte Remco Van Rijn, technicien au Ministère des infrastructures maritimes néerlandaises. Je suis honoré de pouvoir vous aider !" Une dizaine de pompiers du Nord ont été chargés de raccorder les giga-pompes aux tuyaux d'évacuation d'eau. Des pompes en complément de celles des wateringues Il y a les pompes habituelles, dont la plupart sont gérées par l'institution intercommunale des wateringues, ce réseau de canaux datant du Moyen-Âge destiné à permettre l'agriculture dans cette partie humide de la région. A l'écluse de Mardyck, sept pompes permettent d'évacuer 30m3/seconde. La 8ème pompe est en panne depuis plusieurs mois, sa réparation coûterait 2 millions d'euros. » - Un deuxième sujet de tension a été l?état des canaux et fossés et leur impact sur la gravité des inondations, ce qui a conduit le préfet de région à diffuser une circulaire du 29 novembre, rappelant 8 Stéphane Barbereau France Bleu Nord Mardi 21 novembre 2023 PUBLIÉ https://www.francebleu.fr/les-equipes/stephane-barbereau https://www.francebleu.fr/nord Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 13/107 le cadre réglementaire pour procéder à leur entretien et leur curage, les responsabilités et la né- cessaire prise en compte de l?amont et de l?aval dans ces opérations9. Il reste que les responsabi- lités méritent d?être bien identifiées et rappelées régulièrement. Des évolutions pourraient être en- visagées pour faciliter cet entretien. Sur l?Audomarois, aux 170 kilomètres de wateringues, s?ajou- tent 560 kilomètres de fossés et une évolution du plan de gestion de la section de wateringues pourrait faciliter son intervention chez des particuliers. Encadré 4 : Inondations dans le Pas-de-Calais : les travaux d'urgence débutent ce lundi sur les cours d'eau et les canaux10 Les travaux d'urgence de nettoyage et de curage des cours d'eau en crue, début janvier, débutent ce lundi 15 janvier dans le Nord-Pas-de-Calais. Les inondations ont fragilisé nombre de berges et de digues. Les cicatrices des inondations historiques qui ont touché le Pas-de-Calais en novembre 2023 et janvier 2024 sont extrêmement nombreuses. On ne compte plus les berges effondrées, les digues fragilisées, les cours d'eau et leurs bords envahis de branches et de troncs d'arbres mais aussi de nombreux déchets charriés par les eaux. Les élus locaux, les habitants réclament des travaux d'urgence. L'État les a entendus et va donc les mener dès ce lundi. Une "machine de guerre" Cette situation pourrait entrainer de nouvelles inondations si des travaux de consolidation ou de déblaiement ne sont pas menés rapidement. "Nous voulons éviter une troisième vague d'inondations, insiste le préfet du Pas-de- Calais, Jacques Billant. Une task force a été mise en place dans chaque bassin, au plus près du territoire pour traiter les problèmes liés aux assurances, au pompage, au relogement, au soutien aux acteurs économiques". Ces task forces se réuniront chaque semaine. Jacques Billant parle ainsi d'une "sorte de machine de guerre" pour apporter les réponses à toutes les difficultés des habitants. À commencer donc par les travaux d'urgence menés à partir de cette semaine dans six communes réparties sur trois bassins : Thérouanne (la Lys), Blendecques, Arques et Clairmarais (L'Aa) et La Madelaine-sous- Montreuil et La Calotterie (La Canche). De précédents travaux avaient été menées au lendemain de la première vague d'inondations de novembre, précise le préfet. Nettoyage des fossés, passerelle enlevée Dans le détail, à La Madelaine-sous-Montreuil, on va renforcer la digue au niveau du restaurant du chef étoilé Alexandre Gauthier, "La Grenouillère". La passerelle qui enjambe la Canche va être enlevée, elle bloquait l'écou- lement des eaux en cas de crue, les troncs et branches s'accumulant contre l'ouvrage. On va également enlever les différents déchets accumulés sur la Course, au niveau du moulin d'Estréelles mais aussi à la confluence de la Dordonne et de la Canche. À Saint-Omer, c'est le réseau d'eaux pluviales bouché qui va être nettoyé. Des déversoirs, des champs d'expansion de crue vont être débarrassés de leurs déchets. Dans le Calaisis, des opérations de curage du canal d'Audruicq débutent ce lundi. Des opérations de fauchage et de débroussaillage auront lieu au canal des Pierrettes, à Hames-Boucres. Le dragage des canaux d'Ardres et Guînes devrait être réalisé un peu plus tard, d'ici la fin janvier. De manière connexe aux préoccupations relatives à l?entretien et au curage des fossés, des débats, sur le territoire, ont porté sur le niveau d?eau dans les canaux gérés par Voies navigables de France (VNF) avant et pendant les inondations ? qui, en pratique, dépend des instructions du préfet en charge de la gestion de crise -, et sur les sédiments accusés d?avoir diminué la capacité d?évacua- tion des eaux, en particulier dans les canaux non navigués. D?un autre côté, les apports d?eau aux canaux ont été regardés comme difficiles à gérer au plus près compte tenu d?effets de ruissellement vers le canal très variables selon les secteurs d?une part et des apports de pompages sans centra- lisation des volumes en cause, issus notamment des actions menées par des sections de wate- ringues. 9. Le ministre en charge de l?environnement a également demandé, le 1er février une « mission flash » à l?IGEDD et au CGAER sur la simplification du cadre législatif et réglementaire et applicable à l?entretien des cours d?eau, à l?horizon de mi-avril 2024 10 Stéphane Barbereau France Bleu Nord Dimanche 24 janvier PUBLIÉ https://www.francebleu.fr/les-equipes/stephane-barbereau https://www.francebleu.fr/nord Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 14/107 1.3 Une implication historique forte dans la gestion de l?eau mais des évolutions récentes de nature à aggraver les inondations 1.3.1 Un système de drainage mis en place depuis le Moyen-âge Le drainage de la plaine maritime flamande française remonte au XIIème siècle ; le terme wateringues apparait au XIIIème siècle11. Les sections de wateringues sont créées par décret impérial en 1806 pour celles du Nord, et en 1809 pour celles du Pas-de-Calais. Leur administration, jusqu?à aujourd?hui, est conçue pour en confier la gestion à ceux qui sont les plus intéressés par leur fonctionnement, et donc a priori les plus motivés pour l?entretien des différents ouvrages. Les propriétaires des fossés et watergangs sont regroupés dans onze associations syndicales autorisées, appelées « sections de wateringues », territorialement et administrativement indépendantes. Elles gèrent et entretiennent 1400 km de fossés et une centaine de stations de relevage. Ces propriétaires, qui sont principalement des agriculteurs, ont pour priorité de maintenir l?asséchement des terres et permettre ainsi la culture 12. Ces associations syndicales autorisées se trouvent, de fait, impliquées dans l?évacuation des eaux à la mer en cas de crue, sans que la coordination de leurs actions ne soit clairement anticipée, même s?il existe un conseil consultatif des wateringues. Ce point doit être corrigé dans une approche globale du bassin versant. Pour assurer l?entretien des watergangs et des pompes, les sections de wateringues lèvent, auprès de tous les propriétaires situés dans le périmètre, une « redevance wateringue », de l?ordre de 30 ¤/ha/an. Cette redevance, justifiée pour le fonctionnement et l?entretien des watergangs, ne fait pas obstacle à ce que les intercommunalités membres mettent également en place la taxe Gemapi. A la suite des inondations de 1953, qui ont marqué l?ensemble des polders du nord de l?Europe compte tenu du nombre de victimes et de l?ampleur des dégâts, la nécessité de mieux maîtriser les eaux s?est imposée. La mobilisation des crédits européens (FEOGA), a permis de lancer, dans les années 1970, le premier grand programme de drainage et de relèvement des eaux par pompage. Aujourd?hui, près de la moitié des sections est asséchée par pompage, ce qui a conduit à transformer des herbages en cultures et à assécher des zones humides. L?Institution interdépartementale des Wateringues a été créée à la suite des crues de de 1974 et 1975 dans l?Audomarois. En trente ans, elle a construit onze stations de pompage d?une capacité totale de plus de 100 m3/s et réalisé des travaux de modernisation des ouvrages et de réhabilitation des principaux canaux. L?Institution interdépartementale a été transformée en Institution intercommunale des Wateringues (IIW), en 201613. C?est un syndicat mixte fermé, constitué de six intercommunalités. Ses recettes de fonctionnement s?élèvent à 4,3 M¤ en 2022.Il intervient, principalement, dans l?évacuation des eaux à la mer, pour maintenir hors d?eau le polder situé dans le triangle Saint-Omer, Calais, Dunkerque, comptant 430 000 habitants. Il garde la compétence historique de l?ancienne institution interdépartementale de gestion des ouvrages d?évacuation des eaux à la mer et d?entretien de 150 km de canaux. Récemment l?IIW a repris l?animation du Programme d?actions et de prévention des inondations (PAPI) du delta de l?Aa. Ses statuts ont été modifiés en 2022, pour lui permettre d?être un acteur de la mise en oeuvre de la gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (Gemapi) sur le territoire. Le syndicat devrait à moyen terme connaître une nouvelle phase de développement pour prendre en charge la défense contre la mer, actuellement portée par le pôle métropolitain de la côte d?Opale (PMCO), pour le compte des EPCI. 11 Source : AGUR, IIW, 2023 12 Source Chambre régionale des comptes, 2023 13 Source : Chambre régionale des comptes, 2023 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 15/107 1.3.2 Une action structurée de l?Etat et des collectivités dans la prévention des inondations Le territoire impacté par les inondations compte, dans son ensemble, plusieurs Plans de prévention des risques d?inondations (PPRi), réalisés par l?Etat, en concertation avec les collectivités et les parties prenantes, qui visent à éviter l?augmentation de la vulnérabilité en empêchant la construction dans les zones les plus exposées et en soutenant les travaux de réduction de la vulnérabilité sur le bâti historique. Les intercommunalités, grâce peut-être à l?expérience de l?institution Inter-départementale de wateringues, se sont approprié rapidement la compétence Gemapi et ont presque toutes mis en place la taxe Gemapi, qui va de 2 et 29¤ selon les EPCI, par rapport au plafond réglementaire de 40 ¤/habitant14. Les EPCI les plus sensibles au risque ont tendance à porter plus haut le niveau de la taxe. Une approche globale, favorisant la solidarité réciproque entre l?amont et l?aval doit être favorisée. Les 24 EPCI du territoire ont transféré leur compétence en tout ou partie à un syndicat mixte, de manière à articuler aménagement urbain et prévention des inondations à l?échelle des bassins versants, conformément à l?esprit des textes. Sept syndicats mixtes « fermés » couvrent le territoire, dont deux EPTB15 et deux EPAGE16. Le bassin de l?Aa est couvert par trois syndicats mixtes : SMAGEAa, SYMVAHEM, IIW. Le bassin de la Lys est couvert par le seul SYMSAGEL (EPTB). Les côtiers finissant leur cours dans la Manche sont gérés par le SYMSAGEB (EPTB) pour la vallée de la Liane, par le SYMCEA pour la Canche et l?Authie. On constate cependant une grande diversité dans le transfert et la mise en oeuvre des compétences transférées, même si le bassin Artois-Picardie est probablement le seul, au plan national, à être entièrement couvert par des SAGE. Carte 1 : gouvernance de la prévention des inondations (source : DREAL) 14 Seule, la Communauté de commune du Haut Pays du Montreuillois ne prélève pas cette taxe. 15 Etablissement Public territorial de Bassin 16 Etablissement Public de Gestion de l?Eau PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 16/107 Encadré 5 : la Gemapi, une réforme qui clarifie les compétences des collectivités et les responsa- bilités des élus17 Afin de mieux structurer l'action publique en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inon- dations (Gemapi), la loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (Maptam) du 27 janvier 2014 a attribué au bloc communal une compétence exclusive et obligatoire relative à la Gemapi. La création et l'attribution de la compétence Gemapi au bloc communal clarifie les responsabilités que les maires assumaient déjà partiellement en la matière et fournit les outils juridiques et financiers nécessaires pour leur exer- cice. La mise en oeuvre de la réforme concentre dans les mains du bloc communal des compétences auparavant mor- celées. Celui-ci peut ainsi concilier urbanisme (meilleure intégration du risque d'inondation dans l'aménagement de son territoire et dans les documents d'urbanisme), prévention des inondations (gérer les ouvrages de protection) et gestion des milieux aquatiques (assurer l'écoulement des eaux et gérer les zones d'expansion des crues). Un renforcement de la solidarité territoriale La réforme conforte également la solidarité territoriale : elle facilite le regroupement des EPCI à fiscalité propre au sein de structures ayant les capacités techniques et financières suffisantes pour exercer ces compétences, syndi- cats mixtes constitués ou non sous forme d?Epage (Etablissement public d?aménagement et de gestion de l?eau) ou d?EPTB (établissement public territorial de bassin). « La taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (GEMAPI) est une taxe facultative levée par les EPCI à fiscalité propre et qui a permis aux collectivités locales de percevoir 274,9 M¤ en 2021, soit 7,5 ¤ par habitant assujetti. Son produit augmente sensiblement depuis son instauration : il a été multiplié par 11 entre 2017 et 2021 et a augmenté de 35 % entre 2020 et 2021. La progression de la taxe GEMAPI depuis 2017 s?explique à la fois par le nombre toujours croissant d?EPCI à FP la mettant en oeuvre et par le prélèvement d?un produit moyen par habitant de plus en plus élevé dans ces EPCI. Toutefois, cet outil de financement conserve encore un potentiel de développement puisqu?en 2021, près de la moitié des groupements à fiscalité propre ne la prélève toujours pas, et ceux qui la prélèvent n?atteignent pas le plafond réglementaire de 40¤ par habitant. 18». Carte 1 - EPCI à FP décidant de prélever la taxe GEMAPI, année après année, entre 2017 et 2021 Tous les territoires sont dotés d?un Programme d?actions de prévention des inondations (PAPI), soit 17 Source : Ministère de la transition écologique, 2020, quel effet pour les collectivités locales au 1er janvier 2018 en matière d?ouvrages de protection 18 Source : DGCL, 2023 ? 04, La taxe Gemapi, une ressource en croissance pour les collectivités, bulletin d?information statistique n°174, 12 p. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 17/107 sept en tout, parfois de 2ème ou 3ème génération, portés par ces syndicats mixtes ou EPTB. A l?échelle des sous bassins, des Schémas d?aménagement et de gestion des eaux (SAGE) ont été élaborés par des Commissions locales de l?eau (CLE19) et approuvés par le Préfet. Ils apportent une approche globale de la gestion de l?eau, pour tous les types d?enjeux (quantité, qualité, milieux aquatiques?). Ces stratégies s?inscrivent respectivement dans le Plan de gestion des risques d?inondation (PGRI) et dans le schéma directeur d?aménagement et de gestion de eaux (SDAGE) du Bassin Artois Picardie. La structuration institutionnelle ainsi que les différents stratégies et programmes d?action portés sur le territoire font qu?il existe de nombreuses instances de concertation, consultation ou coordination, à commencer par le comité de bassin Artois-Picardie et les instances de gouvernance des EPCI et des différents syndicats, mais également les commissions locales de l?eau (CLE) et les comités de pilotage des PAPI. Encadré 6 : La prévention des inondations dans les territoires impactés Le socle de la prévention des inondations en France a été posé par la Loi Barnier, en1995, avec la mise en place concomitante des servitudes d?utilité publique contraignant l?urbanisme, les Plans de prévention des risques naturels (PPRN), pour limiter l?augmentation des biens exposés aux risques, et, à partir de là, d?un soutien financier, le Fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM)20, pour réduire la vulnérabilité du bâti? existant. La réalisation des PPRN, PPRi pour l?inondation, a été faite en premier lieu dans les zones présentant les plus forts croisements aléas/ enjeux, les zones où le risque est le plus fort. La réalisation des PPR est ainsi l?outil de priorisation de la prévention des inondations : les soutiens financiers de l?État sont liés à la prescription ou l?approbation d?un PPRi en premier lieu. Entre 2009 et 2020, les engagements financiers totaux de FPRNM, de 2 Md d?euros, se sont principalement orientés vers la prévention des inondations au sens large, à raison de 57 % pour les inondations et 15 % pour les submersions marines. Cette concentration des moyens financiers s?explique par l?importance en nombre et en intensité des phénomènes d?inondation qui ont endeuillé le territoire national au cours des dix années passées, déclenchant une mobilisation des élus locaux pour déployer des programmes d?actions de prévention des inondations (PAPI) mais aussi par la densification de la législation européenne (mise en oeuvre de la Directive Inondation).21 Les Hauts-de France sont la septième région mobilisatrice par ordre d?importance22. La prévention des inondations été améliorée avec la mise en place, en 2003, d?un cadre contractuel de travail entre l?Etat et les collectivités locales, pour mener les actions à l?échelle pertinente des bassins versants : les Programmes d?action de prévention des inondations. Le cahier des charges PAPI, mis en place par l?Etat, en lien avec la Commission Mixte inondation23, donne un cadre pour élaborer une stratégie de territoire. Il intègre un diagnostic complet en termes d?aléas mais aussi d?acteurs. Il vise à mobiliser l?ensemble des leviers possibles, dans des combinaisons adaptées à chaque bassin versant. A ce titre, il comporte nécessairement sept axes : amélioration la connaissance et la conscience du risque, prévision des crues et des inondations, alerte et gestion de crise, prise en compte du risque d?inondation dans l?urbanisme, réduction de la vulnérabilité des personnes et des bien, gestion des écoulements, et gestion des ouvrages hydrauliques. La conformité à ce cahier des charges permet des co-financements des actions menées par le Fonds de prévention des risques naturels majeurs. Donner des ordres de grandeurs de montants. Dans la suite de la tempête Xynthia, l?identification de la compétence Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (Gemapi) a permis d?assurer, que tout système d?endiguement en France a un responsable identifié, l?EPCI-FP où il se situe, à qui incombe désormais les choix de niveau de protection, en tenant compte de l?ensemble des axes de travail proposés dans le PAPI (urbanisme, gestion de crise ?). Elle traduit également le lien étroit entre les enjeux de gestion de milieux et de prévention des inondations. Celle-ci repose donc également 19 La CLE est composée de représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements, de représentants des usagers, de représentants de l?Etat (Art L 212-4 du code de l?environnement) 20 Le FPRNM a été appuyé sur les primes d?assurances jusqu? en 2021, date à laquelle le fonds a été budgétisé. 21Présentation du FPRNM, dit également Fonds Barnier : https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Plaquette%20FPRNM.pdf 22 Source : La prévention des catastrophes naturelles par le fonds de prévention des risques naturels majeurs, édition 2023, 59 p. 23 Crée en juillet 2011, la Commission mixte inondation émane du Comité d?orientation pour la prévention des risques naturels majeur et du Conseil national de l?eau. Elle est le lieu de dialogue et d?échange, à l?échelle nationale, des différents acteurs concernés par la prévention des inondations, et les liens avec la gestion de l?eau, l?urbanisme et l?aménagement du territoire. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 18/107 sur les stratégies définies et les actions mises en oeuvre dans le cadre des SAGE et des SDAGE. L?Etat est quant à lui responsable de la gestion de crise, et veille, notamment, à la bonne application des protocoles de gestion entre les différents acteurs du polder. Le constat d?un engagement ancien et fort des collectivités locales dans la prévention des inondations ne peut signifier que le territoire est protégé de toute catastrophe. Les inondations de 2023 ont affecté un territoire résolument engagé dans la prévention des inondations, mais qui a été confronté à des phénomènes qui ont dépassé le niveau de protection décidé et mis en oeuvre dans le cadre des différents Programmes d?action de prévention des inondations du territoire, appuyés notamment sur le retour d?expérience des inondations de 2002. Ces inondations longues et répétées suscitent légitimement une demande forte d?action, pour relever le territoire rapidement et réduire sa vulnérabilité. L?échéance de l?hiver prochain est généralement envisagée comme une échéance à cibler. Une protection structurelle aux événements le plus graves ou rares serait sans doute à la fois très coûteuse et très contraignante pour l?aménagement des territoires. C?est bien le sens de la stratégie des PAPI que de choisir un niveau de protection au regard d?analyses coûts - bénéfices et d?articuler des axes complémentaires dont la culture du risque et la gestion de crise. Cette analyse coût-bénéfice est réinterrogée, en particulier par les habitants les plus directement impactés, au regard de la catastrophe subie depuis novembre, et il sera indispensable de préparer l?évolution des engagements des collectivités et de l?Etat en en tenant compte. Encadré 7 : des communes de petite taille et un panorama politique différencié Le territoire est caractérisé par des communes de taille petite et moyenne. Le département du Pas-de-Calais est constitué de 890 communes, dont neuf sur dix ont moins de 3500 habitants selon l?INSEE (2018) et celui du Nord en possède 648, ces chiffres plaçant ces deux départements en tête du classement national quant au nombre de communes. Les communes, en charge de l?élaboration des Plans communaux de sauvegarde, et impliquées dans la prévention des inondations, et plus largement dans l?urbanisme et l?aménagement du territoire au sein des struc- tures spécifiques mises en place, ont donc, très souvent, des moyens très limités. La prévention des inondations et plus largement la gestion de l?eau demandent un travail à une échelle hydrogra- phique cohérente, c?est-à-dire celle des bassins versants. La carte politique des élus locaux et la volonté ou l?ab- sence de volonté de porter politiquement ces enjeux sont toutefois des éléments qui peuvent interférer dans l?or- ganisation très spécifique de ces coopérations dictées par la géographie physique. Cette clé de lecture est importante et mérite d?être rappelée dans une période où l?enjeu qui se confirme est de passer de la prévention des risques naturels à l?adaptation au changement clima- tique qui peut accroître ces risques. 1.3.3 Une gestion de l?eau qui mobilise de nombreux acteurs Le réseau hydraulique des wateringues s?appuie sur un réseau de canaux de navigation, de canaux domaniaux non navigables, de watergangs d?environ 1 600 km, et d?infrastructures et ouvrages. Tels que décrits dans l?étude prospective de l?IIW24, « les écoulements sur le bassin versant de l?Aa se font par un réseau largement anthropisé : une infrastructure complexe été développée initialement pour drainer le territoire et s?est progressivement densifiée et complexifiée. Elle est aujourd?hui structurée autour des éléments suivants : - les canaux de navigation (canal de Calais, canal de Bourbourg, canal à grand gabarit, canal de jonction, canal de Bergues) et les ouvrages associés ; - les canaux domaniaux non navigables (Haute-Colme, canal des Pierrettes, de Marck, du Houlet, le Mardyck, le fossé des fortifications à Gravelines?) ; - le réseau des watergangs, soit environ 1500 km de fossés et canaux servant au drainage et à l?irrigation des terres des Wateringues. Ce réseau est équipé d?ouvrages pour en assurer la gestion, présentés ci-dessous de l?amont vers l?aval : 24 Source IIW, 2024 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 19/107 - le partiteur de Holque-Watten permet en période de crue de transférer l'excédent d'eau vers le Canal à Grand Gabarit, permettant ainsi de réduire les volumes envoyés vers l ?Aa canalisée ; - les écluses assurent le passage de bateaux et permettent la régulation du niveau d ?eau dans les biefs navigables ; l?aqueduc de l?écluse des Fontinettes permet sous certaines conditions le transfert des eaux du bassin de la Lys vers le bassin versant de l ?Aa, par le Canal à Grand gabarit ; - une centaine de stations de pompage intermédiaires, gérées par les Sections de Wateringues, permettent de relever les volumes d?eau drainés par les watergangs vers les canaux principaux ; - 4 stations de relevage intermédiaires (4 écluses à Basse Colme, Houtgracht et Langhegracht) sont gérées par l?IIW ; - 7 portes à la mer (d?est en ouest : Tixier, Mardyck, rivière d?Oye, Marck, Batellerie, Canal de Calais, des Pierrettes) permettent l?évacuation gravitaire des eaux lorsque la marée est basse par ouverture des portes, et l?évacuation par pompage après fermeture des portes en période de crue, pour éviter les débordements des canaux. Par ailleurs, le littoral est artificialisé par des ouvrages de défense côtière devant les secteurs urbanisés (Sangatte, Leffrinckoucke, Zuydcotte, Bray-Dunes). » Figure 1 : principe d?assèchement du polder, source : site internet de l?IIW Ces installations appartiennent ou sont gérées par une multitude d?acteurs, ce qui rend complexe la gouvernance liée à la gestion hydraulique du territoire. Outre l?Etat, les collectivités locales et les syndicats mixtes « gémapiens » dont l?IIW, les acteurs suivants sont concernés25 : - Voies navigables de France (VNF), établissement public administratif dont l?objet, en premier lieu, est d?assurer la navigation intérieure. Dans le Nord-Pas-de-Calais, il gère, exploite, et entretient 680 km de voies d?eau, dont 250 km sur le canal à grand gabarit, 90 écluses, 100 ouvrages de régulation des niveaux d?eau, 2 000 hectares de domaine public fluvial et 160 maisons éclusières. Pour permettre la navigation, il est donneur d?ordres des manoeuvres sur certains ouvrages exploités par l?IIW. VNF agit selon les termes de son Contrat d?Objectifs et de performances ; sa mission première est la navigation ? et il n?est pas compétent en matière de gestion des inondations. En revanche, en crise, et sous le pilotage du préfet en charge, il abaisse la côte d?eau dans ses ouvrages au maximum avant la crue et tamponne autant d?eau que possible, les limites dans les deux cas étant le maintien de l?intégrité des infrastructures. Un des enjeux, en crise, pour gérer au plus près le niveau d?eau dans les canaux est la part d?incertitude liée aux apports par ruissellement ou apports d?eaux issus de pompages non intégrés dans le système de suivi utilisé lors de ces crises. La question de l?entretien de canaux qui ne sont plus utilisés pour la navigation mais qui restent de la responsabilité de VNF a fait l?objet de débats et d?interrogations : la gestion de l?après- crise devra expliciter la responsabilité de l?entretien de ces canaux, dont certains d?entre eux 25 Source : Chambre régionale des comptes, 2023 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 20/107 pourraient améliorer significativement l?évacuation gravitaire vers la mer. Cela nécessiterait de nouveaux moyens pour VNF s?il était confirmé que cette mission revient à l?établissement public. - Les autorités portuaires assurent l?exploitation et la maintenance d?ouvrages. Trois autorités portuaires agissent sur le territoire des Wateringues : une collectivité territoriale (la région Hauts- de-France, pour le port de Calais), un établissement public de coopération intercommunale (la communauté urbaine de Dunkerque, pour celui de Gravelines-Grand-Fort-Philippe), et un établissement public de l?État (le grand port maritime de Dunkerque - GPMD). Du fait de l?utilisation d?ouvrages aux fonctions partagées, les autorités portuaires interviennent dans l?évacuation des eaux à la mer. L?IIW leur a confié, dans le cadre d?une procédure négociée, sans publicité et sans mise en concurrence, l?exploitation et la maintenance de ces ouvrages à la double vocation. La région est donc chargée de l?exploitation de la station des Pierrettes (à Calais), la station de la Batellerie (à Marck), et du barrage fluvial du canal de Marck. Le GPMD assure le suivi des installations d?écoulement et de pompage du site Tixier, et des stations des Moëres, de Mardyck, et des pompes Bergeron de l?écluse de Mardyck. L?IIW a, en revanche, confié à un opérateur privé l?exploitation de l?exutoire du Schelfvliet, de la station de pompage de la rivière d?Oye, et des écluses 63 et 63 bis du Port de Gravelines. 1.4 Le climat change, le territoire aussi Après des inondations, une attention particulière est accordée, de manière à la fois normale et indispensable, à la caractérisation de l?évènement. Pour autant, le risque se définit comme le croisement d?aléas et d?enjeux, et toute analyse de la situation doit également tenir compte des caractéristiques du territoire et de ses évolutions. Sans viser une description exhaustive on peut retenir dans les grandes lignes : - une urbanisation croissante du littoral autour des ports de Dunkerque et de Calais ainsi que des vallées rurales de l?Aa, de la Hem et de la Lys même si elle y est plus discontinue, - une intensification des cultures dans la plaine des wateringues et sur les coteaux, un recul relatif de l?élevage et des prairies, - plus généralement, l?arrivée sur le territoire d?activités consommatrices en eau, avec des concurrences d?usage qui pourraient s?accroitre, - un manque de vue d?ensemble sur l?état des différentes composantes du réseau hydrographique, naturelles ou anthropiques et sur l?état des équipements d?évacuation de l?eau à la mer... Ainsi, la Chambre régionale des comptes26 indique « Le territoire des Wateringues compte environ 430 000 habitants. Il s?étend sur 85 communes du Nord et du Pas-de-Calais, regroupées en six intercommunalités adhérentes du syndicat mixte. Il comprend trois pôles urbains. Ceux de Dunkerque (194 655 habitants, 649 habitants/km2) et Calais (103 893 habitants, 564 habitants/km2), situés sur le littoral, sont densément peuplés. Celui de Saint-Omer (105 142 habitants, soit 193 habitants/km2) l?est moins. Il accueille d?importants centres industrialo-portuaires et la centrale nucléaire de Gravelines. Il est maillé par des infrastructures routières de niveau européen, dont l?entrée du tunnel sous la Manche. En retrait du littoral, le territoire plutôt rural est dominé par la culture de blé, de la pomme de terre et de la betterave. La gestion des eaux doit en tenir compte. En hiver, le territoire doit être maintenu hors d?eau pour permettre les récoltes. Au printemps et en été, il doit disposer de suffisamment d?eau pour permettre l?irrigation. En conclusion, les enjeux liés au maintien hors d?eau de ce territoire sont multiples. Il faut préserver 26 Source : Chambre régionale des comptes, 2023 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 21/107 l?habitat et les populations, tout en adoptant une gestion permettant le développement des activités économiques. » Après des inondations, il est courant que telle ou telle cause quasi univoque soit pointée ? souvent l?imperméabilisation des sols, ici, le curage des fossés, voire des canaux ou des rivières. Or, c?est bien l?ensemble des facteurs de risque qu?il convient de chercher à diminuer, l?aléa étant exogène, et c?est sous cet angle que la démarche de parangonnage a été entreprise. 1.5 Les questions soulevées à l?issue de ces épisodes d?inondation Les inondations de la fin 2023 dans le Nord et le Pas-de-Calais, par leur durée en particulier, ont donné lieu à une incompréhension de la part des populations, et dans certains cas des élus, et ont soulevé différents types de questions : - Pourquoi le territoire a-t-il été impacté de la sorte ? Les analyses présentées ci-dessus, quoique succinctes, indiquent que les précipitations ont eu un caractère exceptionnel, sur un territoire préparé par des mesures structurelles visant à être efficaces pour des évènements de moindre ampleur que ces épisodes d?occurrence centennale. Une question de compréhension sous-jacente, sur laquelle un travail sera nécessaire pour reprendre le travail de prévention, est celle de la réalité et de la portée éventuelle des dysfonctionnements allégués ? curage, pompage, rôle de VNF. - Pourquoi les avancées de la prévention des inondations ne sont pas plus rapides ? Cette question sous-tend des questions d?efficacité de la gouvernance d?une part, de moyens mis en oeuvre d?autre part. - Comment reconstruire de manière plus résiliente ? Cette question, qui cible en premier lieu les quartiers qui ont été inondés plusieurs fois s?articule avec le besoin de réflexion plus large de l?aménagement du territoire, en particulier une plus grande prise en compte des caractéristiques des sols, et de l?urbanisme qui doit accélérer les actions de désimperméabilisation là où elles sont possibles. - Ces inondations ont été très largement regardées comme liées au dérèglement climatique, dans une région où les tensions sur les usages de l?eau se font jour : comment passer de la prévention des inondations à l?adaptation au changement climatique ? Ces interrogations concernent donc différentes temporalités : comment se préparer mieux à une nouvelle inondation qui surviendrait dans l?année à venir ; comment renforcer et accélérer la mise en oeuvre de la prévention des inondations à moyen terme ; comment se préparer à une évolution du climat ? Elles portent aussi sur le rôle des acteurs, avec des attentes fortes de l?action de l?Etat parfois en relative méconnaissance des actions de prévention menées de longue date, en partenariat avec les collectivités, compétentes en matière de prévention des inondations et d?aménagement du territoire, notamment grâce aux soutiens financiers du Fonds Barnier, du Fonds vert, des subventions de l?Agence de l?Eau ... Lors de son déplacement, en février, le Premier ministre a indiqué que le soutien financier suite aux inondations s?élevait, alors, à 510 M d?euros PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 22/107 2 Des similitudes avec les pays voisins qui font socle, des différences qui peuvent être inspirantes La prévention des inondations aux Pays- Bas est depuis toujours au centre des politiques publiques. Un adage populaire indique que « Dieu a créé le monde, mais les Néerlandais ont bâti les Pays- Bas ». La mise en place des systèmes de drainage du polder est présentée comme intrinsèquement liée à la mise en place de la démocratie ; « La clef de notre réussite réside moins dans les ouvrages mêmes que dans notre système organisationnel, légal et financier 27». Compte tenu de l?enjeu existentiel que représente la prévention des inondations aux Pays-Bas et de la géographie du territoire, l?Etat est engagé de longue date, et plus particulièrement depuis 1953, dans une stratégie de protection du territoire qui s?est matérialisée par d?importants travaux d?endiguement, en premier lieu de digues à la mer, mais aussi de digues fluviales, ainsi que dans la définition des niveaux de protection de ces ouvrages (exprimés en probabilités de rupture) au regard des enjeux à protéger. Dans le même temps, les collectivités locales historiques, collectivités à part entière dédiées à la gestion de l?eau (en quantité, en qualité et en risque), se restructuraient pour passer du nombre de 2 650 (correspondant à de petits bassins hydrographiques ou à des polders indépendants) en 1953 à 21 aujourd?hui. Cette première approche de protection a été complétée, à partir des années 2010, par le recours croissant à des solutions fondées sur la nature. « Ce que nous voulons, c?est un environnement [?] où il y a assez de place pour la nature, et où la vie, le travail et les loisirs sont possibles par des infrastructures de haute qualité » 28. Alors que le pays est confronté à une crise du logement et qu?est envisagé le recours à l?urbanisation d?espaces ouverts, la question d?une meilleure prise en compte des contraintes liées à l?eau et au sous-sol commence à se poser. En complément des attributions qui sont siennes, le Commissaire du Delta travaille, depuis le début des années 2010, à établir des lignes directrices pour l?adaptation du territoire national au changement climatique, dans une approche concertée. Les échanges avec les Néerlandais, comme la documentation consultée, mettent en avant les conditions de réussite que sont un portage politique fort, un esprit de coopération de tous les acteurs et le souci de fonder toute politique sur des connaissances scientifiques et techniques, renommées. En Belgique, la prévention des inondations, comme l?aménagement du territoire, est de la compétence des régions, sauf pour ce qui relève de la submersion marine. En Flandre, elle s?appuie sur une approche dite « multicouches » qui donne une place croissante aux efforts pour laisser de la place aux cours d?eau. Elle concerne différents niveaux de collectivités, qui mobilisent un opérateur (VMM). Ces dernières années, un important travail a été engagé pour définir une stratégie de résilience, ce qui a contribué à une grande réactivité dans les suites des inondations qui ont également touché la Flandre en novembre 2023. En Wallonie, les inondations dramatiques du 14 juillet 2021 ? dites « water bomb » conduisent à revoir et renforcer la prévention des inondations dans toutes ses composantes. L?organisation et les moyens mise en oeuvre aux Pays-Bas et en Belgique sont présentés plus largement en annexes 4 et 5. 27 R. Slomp,2012 28 Deltacommissie, 2008, p.37 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 23/107 2.1 Des axes d?action complémentaires et une implication de tous les niveaux 2.1.1 La prévention des inondations s?inscrit dans le cadre européen et le rythme et l?intensité de ses évolutions sont marqués par les grandes catastrophes - Les politiques de prévention des inondations s?inscrivent dans des principes fondamentaux inscrits dans la constitution. Le 21e droit fondamental dans la constitution néerlandaise prévoit, depuis 1983, que : « La puissance publique s?attache à l?habitabilité du territoire et à la protection du cadre de vie » ; en France, la Charte de l?environnement dans son article 1er défini un principe de même type29. - Elles ressortent du même cadre européen : la directive cadre sur l?eau (2000/60/CE) et la directive relative à l?évaluation et à la gestion des risques d?inondation (2007/60/CE). Ce sont ces textes qui, en particulier, préconisent de mener les politiques de prévention des inondations, et plus largement de gestion des milieux aquatiques et de l?eau, à l?échelle des bassins versants. - Les catastrophes marquent les grandes étapes de la prévention des inondations. Sans viser l?exhaustivité, on peut citer : - aux Pays-Bas, les inondations par submersion de 1916 et 1953. Cette dernière a fait plus de 1800 morts et motivé le premier Plan Delta. Elle a aussi touché le nord de la France et la Belgique. Les inondations fluviales de 1993 et 1995 ont également motivé des étapes fortes en matière de prévention des inondations, tant par des travaux sur les digues, que par des évolutions dans les principes de la prévention, avec une reconnaissance accrue de la place à rendre au fleuve. - En Belgique, et particulièrement en Wallonie, la « water bomb » de juillet 2021 a constitué un choc majeur qui a motivé plusieurs plans d?actions, pour structurer la reconstruction, en la cherchant plus résiliente, et pour améliorer la prévention à moyen et long terme. - La France a été marquée par les crues du Var en 1994, du Rhône en 2003, la tempête Xynthia sur le littoral atlantique en février 2010 (29 morts en Vendée), la crue dans le Var, en juin 2010 (23 morts, 1 Md¤ de dégâts), les pluies orageuses dans les Alpes-Maritimes (20 morts, 1,2 Md¤ de dégâts) et les inondations dans l?Aude en octobre 2018 (14 morts, 200 M¤ de dégâts), la tempête Alex en 2020 (10 morts, 8 disparus, plus de 1 Md de dégâts). Les grandes étapes de la prévention des inondations rejoignent ce calendrier, avec la mise en place des PPRi et du FPRNM en 1995, des PAPI en 2003, de la Commission mixte inondation en 2011. Chaque retour d?expérience est l?occasion d?apporter des améliorations à la prévention des inondations. Les inondations de fin 2023 constituent ainsi un moment fort de mobilisation pour améliorer la prévention des inondations et plus largement la résilience des territoires touchés, dont il faut se saisir. Les actions mises en oeuvre pourront servir également pour d?autres territoires français. 2.1.2 La prévention des inondations est partenariale par nature - Dans les trois pays, l?ensemble ou la majeure partie des niveaux politico-administratifs est 29 Art. 1er. - Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 24/107 impliqué dans la prévention des inondations d?une façon ou d?une autre. Aux Pays-Bas, « Pour gérer la compétence eau, c?est « la décentralisation quand c?est possible, la centralisation quand c?est nécessaire ». Une spécificité de l?organisation néerlandaise est de rassembler, d?une certaine façon, décentralisation et déconcentration. « Le système de gouvernance de l?eau est également un facteur de réussite : la gestion de l ?eau est régie par un groupe d?acteurs restreint, étroitement coordonnés entre eux. Les principales autorités responsables, les Waterschappen, se distinguent par leur système de démocratie fonctionnelle : les représentants de leurs assemblées sont élus lors d?élections au suffrage universel direct. Ces organisations semblent également pouvoir assurer leur pérennité grâce à un système de financement unique, qui permet le recouvrement intégral des coûts engendrés30. » En Belgique, la prévention des inondations est une compétence régionale, ce qui peut se traduire par des différences dans l?organisation fine entre régions. Aux Pays-Bas et en France, l?approche par bassins hydrographiques et bassins versants tient une place majeure dans la politique de gestion de l?eau dans ses différentes composantes ; en Belgique, elle est mentionnée comme composante de la mise en oeuvre de la directive inondation. De même, ces politiques mobilisent des moyens financiers nationaux et locaux. Aux Pays-Bas, on retient des échanges avec les acteurs rencontrés que « vivre sous le niveau de la mer coûte environ 1 euro par jour par foyer ». Les moyens consacrés à la prévention, paraissent plus importants qu?en France avec environ 200 euros par maison et par an pour l?assainissement, 50 euros pour la gestion d?eau dans les zones protégées, 50 euros pour les stations de pompage, et 50 euros pour les investissements (50% provenant de fonds nationaux, 50% des fonds locaux à deux niveaux de responsabilité (40 + 10)). La taxe doit recouvrir les frais, et vient en contrepartie d?un service. Cette comparaison doit être mise en perspective à différents titres : - les compétences couvertes par la taxe varient d?un pays à l?autre : les « 400 euros » par an, souvent cités au regard d?une taxe Gemapi plafonnée à 40 euros, ne couvrent pas que la prévention des inondations mais également l?assainissement ; - cette taxe néerlandaise est conçue comme couvrant un service rendu. Or, « un kilomètre de digue31, c'est 2 millions d'euros »32. Autrement dit, le coût de la prévention peut largement varier selon le niveau de protection recherché et les moyens mobilisés, selon les caractéristiques du territoire ; - en France, la taxe Gemapi est de plus en plus mise en oeuvre par les collectivités compétentes, mais rarement au niveau plafond. Pour ce qui concerne les investissements en matière de prévention des inondations, la mobilisation des moyens par les collectivités dans le cadre de PAPI donne lieu, dès lors qu?il s?agit d?actions éligibles au Fonds Barnier, à un soutien de l?Etat. D?autres soutiens sont mobilisables (mesures soutenues par les Agences de l?eau, Fonds vert,?). Les montants alloués à la prévention des inondations sont donc bien supérieurs à ce qui ressort de la seule taxe Gemapi. 30 « L?eau en ville, en France et aux Pays-Bas : dans quelle mesure les politiques urbaines de l?eau des Pays-Bas peuvent faire figure d?exemple au regard du cas français, pour la réalisation d?un paysage urbain adapté à l?épreuve du changement climatique et de la montée des eaux ? Les exemples de Nantes et Amsterdam », Gaëlle Duffieux (2019) 31 En France, depuis la mise en place de la Gemapi, on parle de système d?endiguement et non plus de digue, un système d?endiguement étant hydrauliquement cohérent et relevant d?un responsable identifié. Il n?y a, en théorie, pas de « digue privée ». Les échanges internationaux conduisent à utiliser le terme digue, sans avoir pu apprécier ce qu?il en est dans les autres Etats. 32 Site de France Digues 21 février 2024, propos du Vice-Président du Conseil départemental de la Savoie PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 25/107 2.1.3 La prévention des inondations prend le pas sur la protection à des rythmes différents selon les pays - La prévention des inondations passe toujours par des actions nombreuses, articulant plusieurs axes de travail. Aux Pays-Bas, « nous avons une approche des inondations à trois niveaux : prévention, protection, gestion. Depuis le Programme Delta de 2014, la prévention prime clairement sur les deux autres ». En Flandre, la ligne directrice de la prévention des inondations est qu?il est nécessaire de mobiliser une combinaison de mesures pour faire face aux inondations critiques : ce sont les « 3P », protection, prévention, préparation. Aux Pays-Bas comme en Flandre et en Wallonie, des plans structurants récents organisent ces complémentarités : le programme Delta dans ses versions les plus récentes, l?avis « Resilient Waterland » ou les travaux du Commissariat spécial à la reconstruction. L?évolution des mesures prises conduit à donner une place croissante aux enjeux de place donnée aux cours d?eau et à l?infiltration de l?eau, et moins exclusivement aux protections. La pondération entre ces axes et les méthodes déployées pour travailler sur chacun de ces axes et les articuler diffèrent d?un cas à l?autre (le cadre contractuel français des PAPI apparaissant comme précurseur et abouti). - Concernant les ouvrages de protection : - les niveaux de protection des digues sont toujours établis en recherchant une proportionnalité aux enjeux protégés, dans une logique d?analyse coûts-bénéfices, elle-même appuyée sur des méthodologies transparentes. Aux Pays-Bas, les digues ont été conçues et renforcées d?abord en tenant compte de la crue la plus récente (avec une marge de 50 ou 100 cm), puis sur la base d?analyses de probabilité de l?aléa, et maintenant au regard de la probabilité de décès d?un habitant de la zone protégée (qui depuis 2017 doit être en deçà de 1 chance sur 100 000 par an partout aux Pays-Bas). Cela se traduit à l?échelle du tronçon de digue ou ouvrage primaire (protégeant des submersions marines et des inondations des grands fleuves Rhin, Escaut et Meuse) en probabilités de rupture variant de 1/500 à 1/100 000. Les autres protections (celles qui ne sont pas « primaires ») doivent aussi répondre à des normes de sécurité, qui varient d?un risque de rupture de 1/100 (zones urbanisées) à 1/10 (pâturages).. Pour des cours d?eau et digues régionaux, comme la Geul et la Roer, les « standards » génériques de protection, en durées de retour des événements de crues, sont de 10 ans pour des prairies, 25 ans pour des cultures, 50 ans pour l?horticulture, 100 ans pour les zones urbanisées. Dans le sud du Limburg, avec une population dense et des vallées pentues (pour les Pays-Bas), certaines zones urbaines comme Valkenburg par exemple, sont protégées contre des crues de période de retour 25 ans, notamment pour des raisons de coûts des ouvrages. Ces zones ont été exposées en juillet 2021 à des crues plus que centennales. En Flandre, comme en France c?est l?autorité compétente qui fixe le niveau de protection. En France, une analyse coûts-bénéfices est obligatoire pour bénéficier du soutien du FPRNM sur tout projet d?ouvrage hydraulique, et donne lieu à une analyse par des services identifiés pour leurs compétences économiques. - en France comme aux Pays-Bas, il ne doit y avoir qu?un seul responsable pour chaque système d?endiguement : c?était une motivation forte de la mise en place de la réforme « Gemapi ». - La prise en compte du changement climatique dans les démarches de prévention des inondations se fait, aux Pays-Bas comme en France pour le risque submersion marine, avec une surcote de 60 cm pour le niveau de la mer. Aux Pays-Bas, il est également retenu une augmentation du débit des cours d?eau, avec un coefficient d?incertitude, pour le fluvial, ainsi qu?une concentration de la pluviométrie. C?est un travail qui est en cours en France. - Une évolution tendancielle dans le temps long met en avant les limites d?une approche appuyée PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 26/107 essentiellement sur la protection pour donner de plus en plus de place, de manière complémentaire, à des solutions fondées sur la nature, sous des noms différents. Au Pays-Bas a été mis en oeuvre dans la période 2001-2015 le programme Ruimte voor de rivier (« De l?espace pour le fleuve »). Cette approche a donné lieu à un programme de travaux du Rhin et de la Meuse qui vise non à renforcer les digues mais à mettre en place des zones d?expansion des crues. « Il faut réapprendre à vivre avec la nature ». L?écartement des digues de la Meuse a montré ses effets positifs (en termes de hauteur d?eau et de nuisances pour les activités humaines) en juillet 2021, avec des débits encore jamais mesurés sur le cours néerlandais amont du fleuve. En France, c?est, depuis 2003, un des axes des PAPI. - Partout, la culture du risque est à la fois regardée comme le socle de toute politique de préven- tion et comme étant insuffisante, ce qui demande des efforts constants. « C?est le paradoxe du Delta : la vulnérabilité n?empêche pas la qualité de vie ». La démarche d?information acquéreur locataire française connaît des développements de même type en Belgique et aux Pays-Bas. En France, le code de ?environnement comporte une partie spécifique sur l?information préventive. 2.1.4 La gestion de crise est organisée en fonction de la gravité de la catastrophe - La gestion de crise montre des structurations proches, avec une mobilisation par emboîtement en fonction de la gravité de la crise et des outils d?information et de vigilance en ligne plus ou moins développés : aux Pays-Bas, tout le réseau hydrographique est modélisé ; en France, le site Vigicrue offre une bonne qualité de service à tous, avec un programme de développement à moyen terme. Il reste quelques secteurs complexes à couvrir et surtout des enjeux forts sur la prévision de la submersion marine ; tandis qu?en Belgique, c?est l?une des recommandations du rapport parlementaire de Wallonie postérieur à la « Water Bomb » que d?améliorer cette information. Dans les trois Etats, le pompage, ainsi que le pompage d?urgence, relève en premier lieu des gestionnaires concernés avec une possibilité de solliciter un niveau supérieur, régional et/ou national selon les pays : le Centre national de coordination opérationnel aux Pays-Bas, le NCCN en Belgique? qui planifie mais ne dispose pas des équipements, la Sécurité civile en France. Dans les principes généraux, chaque niveau supporte ses coûts, mais il est fait mention d?une prise en charge possible par l?Etat en cas de crises graves et coûteuses pour les collectivités. En termes de parc d?équipements, les Pays-Bas ont mené une analyse de leurs besoins, sur la période 2003- 2007. Ce travail a conduit, par exemple, à renoncer à des systèmes flottants et à privilégier des conteneurs. La capacité des pompes d?urgence est sans commune mesure avec celle des pompes pérennes, sur lesquelles les investissements sont largement privilégiés. La Belgique a lancé un inventaire de ses moyens après la « water bomb », avec le projet de mieux connaître et optimiser le parc. En France, une des suites des inondations de 2023 pourrait être de renforcer les moyens de pompage de la sécurité civile. 2.1.5 Des coopérations sont une condition première de la prévention des inondations - Dans les trois Etats, les temporalités longues de la prévention des inondations sont mises en avant, car il est nécessaire de s?appuyer sur des études scientifiques d?aléa robustes, de mettre en oeuvre l?ingénierie adaptée aux mesures envisagée, de prendre le temps de la concertation, de l?appropriation et de l?adhésion, notamment pour accéder au foncier, ce qui est souvent un facteur bloquant. « La construction de notre politique se fait par la concertation : l?idée d?un agriculteur vaut celle d?un technicien », « Ce dont nous avons besoin, c?est plus d?une organisation collective que d?une approche individuelle » ; « Pour protéger leurs lieux de vie, il est indispensable de travailler avec les habitants ». Ainsi, les Pays-Bas ont-ils mis en place des outils numériques de simulation des circulations d?eau PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 27/107 pour que chacun puisse visualiser les impacts prévisibles de « son idée » sur l?amont et l?aval de son territoire ; dans le programme de reconstruction mis en place à la suite des inondations de juillet 2021, le gouvernement de la Wallonie a mis en place une équipe qui comporte des ingénieurs mais également des personnes en charge de la médiation. Dans la suite des crues de 2019 dans le Var et du plan mis en place pour accélérer la mise en oeuvre de PAPI, la France a multiplié par deux les soutiens de l?Etat à l?animation de ces programmes. Des lieux de discussion et des démarches de coopération sont regardés comme indispensables pour se préparer au changement climatique, par exemple entre territoires amont et aval, ou entre milieu urbain et milieu rural, et pour élaborer des priorisations d?actions partagées. Ils sont nécessaires pour travailler efficacement sur les différents leviers et leurs articulations : prévenir les inondations, anticiper des crises plus fréquentes ou plus extrêmes, les gérer, mettre en oeuvre un relèvement rapide mais qui ne soit pas « à l?identique » et permette ainsi de réduire la vulnérabilité des territoires. De telles démarches de coopération sont particulièrement abouties en post-crise de juillet 2021 en Belgique et aux Pays-Bas, et constituent un socle structuré, régulièrement réaffirmé aux Pays-Bas. 2.2 Des différences dans le portage stratégique de la prévention des inondations La prévention des risques naturels est un enjeu parfois diminué, voire occulté, hors des périodes de crise. Il est symbolique, par exemple, que l?opposition récurrente aux Plans de prévention des risques d?inondation s?appuie sur la crainte que l?information donnée sur le risque diminue la valeur des biens les plus exposés : la priorité semble être alors de nier le risque pour éviter cette décote, plutôt que de l?afficher de manière à mettre en oeuvre des leviers de réduction de la vulnérabilité. La capacité à inscrire les travaux de prévention dans une stratégie claire, partagée, comprise, et à mobiliser un portage politique fort, à différentes échelles de territoire, apparaît comme un levier majeur d?efficacité des actions mises en oeuvre. La mission a entendu aux Pays-Bas que « la sécurité hydraulique, c?est une question de sécurité nationale », ou encore que « L?eau et le sol sont les deux éléments essentiels de notre politique en matière d?aménagement du territoire ». En Belgique, l?évolution de la prévention se traduit dans la synthèse des enjeux d?aménagement du territoire : « Il nous faut passer de la passoire à l?éponge ». 2.2.1 La capacité à faire de la prévention des inondations une priorité La construction et la formulation d?une approche stratégique varient selon les pays, les époques : la manière dont une stratégie est inscrite dans la durée et dont ses composantes sont mises en oeuvre dans les états voisins est un des enseignements majeurs de la démarche de parangonnage. - Aux Pays-Bas, la place donnée à la prévention contre les inondations s?inscrit dans une analyse de risque générale, alors que dans les autres pays, c?est une politique parmi d?autres, qui donne lieu à un engagement fort mais moins explicité par le bénéfice collectif qui en découle, ou motivé par un caractère prioritaire. Après les inondations de 1953, un travail scientifique et réglementaire a été mené pour définir des niveaux de protection des différents territoires en fonction des enjeux, et mettre en oeuvre les travaux considérables requis. Ce travail s?est inscrit dans une approche plus générale qui classe chaque type de menace en fonction de sa plausibilité et de ses conséquences sur la sécurité nationale aux Pays-Bas. La probabilité d?une inondation majeure dans l?Ouest des Pays-Bas est relativement faible (environ 1/10 000 à 1/100 000 par an), mais les conséquences seraient destructrices pour les Pays-Bas. Une telle catastrophe, si elle touchait ne serait-ce que la Province de Hollande méridionale, serait d?ampleur trop importante pour être gérable au niveau national.33 . L?engagement dans la prévention est motivé par une évaluation de la priorité à donner à sujet, qui prend en compte les coûts évités découlant d?une catastrophe majeure. C?est dans ce cadre que sont menées des démarches de stress tests 33 Sources : R. Slomp, 2012 ; IGEDD, nov. 2023 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 28/107 territoriaux, qui incluent notamment les risques d?inondations mais aussi la gestion de l?eau hors inondations. - L?importance de la gestion de l?eau et son poids dans les institutions sont également inscrits dans l?histoire du pays, et plus particulièrement des wateringues, dont la mise en place est présentée comme la naissance d?un gouvernement démocratique : « Personne ne peut construire une digue seul, lutter ensemble contre les inondations, cela a été la naissance de la démocratie aux Pays-Bas ». La structuration de la gouvernance locale de la gestion de l?eau est plus ou moins intégrée et présente des efficacités diverses. Aux Pays- Bas, la gestion de l?eau dans toutes ses composantes repose désormais sur 21 autorités régionales de l?eau, constituées à partir de 2500 wateringues historiques. Cette concentration, qui confère aux autorités une certaine robustesse, a pris 70 ans. Ces autorités correspondent à des bassins hydrographiques. En effet, « L?eau ne respecte pas les limites virtuelles » ; « rien ne doit être fait qui n?ait un impact négatif sur les autres : c?est le lien entre l?amont et l?aval. Il faut une approche intégrée » ; ou encore « Les réalités hydrauliques ne suivent pas les frontières administratives ». Elles ont une grande légitimité, en particulier en raison de leur gouvernance : leur conseil est élu au suffrage universel pour 5 ans et leur président nommé par la Couronne. Elles portent une approche intégrée de toute la gestion de l?eau. Leurs moyens financiers reposent sur des taxes locales, dont le montant est évalué au regard des services rendus, avec un soutien de l?Etat pour les investissements. En Belgique, les présentations entendues reconnaissent que le système fédéral belge a conduit historiquement à une répartition complexe entre les différents niveaux politiques et structures administratives des compétences mises en jeu par la prévention des inondations, entendu au sens large. En Belgique, comme au Pays-Bas, des opérateurs jouent un rôle important dans l?entretien des ouvrages, quels qu?en soient les propriétaires En France, la prévention des inondations est une compétence des EPCI à fiscalité propre. La structuration de la Gemapi identifie cette compétence et l?organise de manière à lier les différents axes de la prévention des inondations que sont l?urbanisme et les actions de gestion de l?eau menées à l?échelle du bassin versant. L?exercice de cette compétence est ainsi structuré dans le cadre de syndicats à qui les EPCI peuvent déléguer ou transférer tout ou partie des compétences. Cette approche présente plusieurs avantages : elle s?appuie, comme cela a été fait en France depuis la création des Agences de l?eau en 1964, sur les bassins versants ; elle est intégratrice de trois composantes majeures : urbanisme, compétence historique des collectivités locales, gestion des milieux aquatiques, prévention des inondations. En revanche, la gouvernance et les solidarités nécessaires ne se construisent que progressivement, et les organisations qui en résultent sont également parfois complexes. 2.2.2 La pondération des axes d?action - La prise en compte de l?urbanisme dans la prévention des risques d?inondation est plus ancienne et plus structurée en France. Les PPRi, établis par l?Etat, après concertation, sont des servitudes d?utilité publique qui s?imposent à l?urbanisme. Ils visent à empêcher une augmentation des enjeux dans les zones les plus exposées, et prescrire des mesures de réduction de la vulnérabilité dans les zones exposées. Dans ce cadre, un accompagnement financier des territoires est mis en place, priorisé sur les territoires les plus exposés qui sont ceux qui donnent lieu à des PPRi, et conditionné à un programme de prévention mené à l?échelle des bassins versants. En France, on considère que, dans le long terme, une digue est toujours faillible et qu?un ouvrage de protection ne peut se justifier PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 29/107 pour un aménagement nouveau, mais uniquement pour protéger l?existant34. Aux Pays-Bas l?interdiction de construire concerne uniquement les espaces entre le cours d?eau et la digue, et derrière les digues (ce qui est également le cas en France). Les règles de construction font, par ailleurs, référence à des obligations génériques de stabilité dont le respect relève du maitre d?ouvrage ; les maisons flottantes sont construites « aux risques et périls des habitants ». Les différences d?approche historiques peuvent sans doute s?expliquer par des contraintes spatiales et des densités différentes. En Belgique, comme aux Pays-Bas, des cartes d?aléa existent ou sont en cours d?élaboration, qui relèvent d?une démarche de porter-à-connaissance, voire d?information acquéreur locataire, telle qu?elle existe en France 35. Encadré 8 : Des systèmes assuranciels très différents Le système d?assurance est plus protecteur en France, où l?assurance contre les inondations est liée à l?assurance habitation, avec une surprime obligatoire, qui permet, en cas de catastrophe majeure, une prise en charge par l?assurance et par la réassurance. Le système français apparait ainsi comme marqué par un niveau de solidarité plus important en France qu ?en Belgique et aux Pays-Bas. Cela soulève deux types de questions différentes : - un effet parfois peu incitatif à ne pas s?exposer ; - une évolution possible de ce système dans le contexte de catastrophes répétées, avec des primes modulées ou des risque nouveaux de refus d?assurance. C?est un sujet de forte préoccupation des collectivités locales et des habitants En juillet 2022, le gouvernement de la région wallonne communiquait dans les termes suivants : « Dès le lendemain de la catastrophe le Gouvernement a négocié avec les compagnies d ?assurance pour permettre aux personnes sinistrées assurées de bénéficier d?une indemnisation complète en fonction des clauses de leur police d?assurance et des accords avec les experts. Une loi fédérale permet en effet aux assureurs de limiter les indemnisations versées aux sinistrés en cas de catastrophe de grande ampleur. Dans le cas des inondations de juillet dernier les assurés n?auraient touché que 20% du montant des dégâts estimés par leur assureur. A la lumière du drame humain que représentaient les inondations le Gouvernement a décidé d ?accomplir un effort financier sans précédent d?un milliard d?euros pour permettre l?indemnisation complète des personnes sinistrées assurées. Après négociation, les assureurs ont quasiment doublé leur plafond d?intervention. C?est ainsi qu?à ce stade les assureurs interviennent à raison de 41% et le Gouvernement à raison de 59%. » Les personnes qui n?étaient pas assurées ont reçu l?aide d?un « fonds des calamités », mis en place par le gouvernement pour éviter à tout prix qu?une partie de la population non assurée ne tombe dans la précarité totale. » Aux Pays Bas, l?opérateur (RVO) chargé d?indemniser les victimes publiait en juillet 2022 le bilan suivant : « Exactement 1 an après les fortes pluies et inondations dans le Limbourg et le Brabant du Nord en juillet 2021 nous avons déterminé 1 518 demandes de victimes. Plus de 34 millions d'euros ont été versés dans le cadre du programme WTS de juillet 2021. » « L'assurance volontaire contre les dommages causés par les inondations de la mer et des rivières aux habitations a été proposée dans des produits successifs entre 2012 et 2020 par un assureur (Pays-Bas). Le porteur de risque s'est depuis retiré et il n'existe actuellement aucun assureur aux Pays-Bas qui offre une assurance contre les inondations d'origine maritime et fluviale (percée des défenses primaires contre les inondations) à l'exception des produits destinés à un certain nombre de multinationales et à quelques particuliers très fortunés. L'Association néerlandaise des assureurs indique que cela est dû à une sensibilisation insuffisante (les Néerlandais se sentent relativement en sécurité) à l'anti-sélection et au risque d'accumulation. » Les interlocuteurs administratifs de la mission lui ont confirmé que les dégâts liés aux inondations n?étaient indemnisés que par des fonds publics, que la mise en oeuvre de tels fonds était décidée au cas par cas par le gouvernement et qu?un principe 34https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Modalit%C3%A9s%20d%E2%80%99application%20du%20d%C3 %A9cret%20PPRi%20%E2%80%93%20Novembre%202019.pdf 35 https://www.google.com/search?client=firefox-b-e&q=ERRIAL PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 30/107 général était que l?indemnisation ne couvre pas la totalité des coûts, afin d?inciter à la prudence ceux qui construisent ou résident en zone inondable36. - Dans la suite de la « Water Bomb » de juillet 2021, le gouvernement de Wallonie a mis en place une équipe projet « agile », afin de gérer au mieux les réponses immédiates à la catastrophe et la préparation d?un urbanisme plus résilient qui n?a pas encore d?équivalent en France. Le Commissariat spécial à la reconstruction a été mis en place dès le 26 juillet 2021. Cette équipe pluridisciplinaire d?une dizaine de personnes a été mobilisée pendant un an pour répondre de manière pragmatique aux besoins des 3 grands bassins versants belges sinistrés, en particulier la vallée de la Vesdre. Il s?agissait d?avoir des réflexions sur des aménagements adaptés à la situation. Le Commissariat spécial à la reconstruction n?est pas une autorité mais un ensemblier. C?est une cellule placée auprès du président du gouvernement wallon, ce qui lui donne du poids. Des enjeux forts ont été la gestion de la temporalité entre l?urgence (aide à la réparation, avec un soutien public pour ce qui n?était pas couvert par les assurances) après crise et la reconstruction résiliente, ou encore la priorisation pour cibler l?action sur les neuf communes les plus touchées. Il s?agissait, selon les termes des personnes rencontrées, de réfléchir avant de reconstruire, sans empêcher les mesures immédiates qui donnent du « confort ». Le travail a porté aussi sur la trame agricole, les haies, le sens du labour, le couvert forestier, qui impactent la gravité des inondations. - La gestion des fossés, canaux, cours d?eau diffère dans les trois pays. Si en France, la responsabilité des riverains est affirmée, dans une logique d?association de tous les intéressés à la gestion de l?eau, les Pays-Bas ont explicitement dissocié propriété et gestion ? celle-ci étant, le plus souvent confiée à un opérateur, sans exclure, par exemple pour les wateringues, que des agriculteurs en prennent en charge une partie. Les comparaisons quant aux doctrines et modalités de gestion sont difficiles, compte tenu de la limite ténue entre entretien et curage. Pour autant, il ressort qu?en Flandre comme au Pays-Bas, les modalités de gestion dépendent toujours de l?objet visé, avec une différence possible entre ce qui est navigable et ce qui ne l?est pas, et donnent lieu à une préparation d?ensemble (guides d?entretien territoriaux) et à des interventions régulières. Ces programmes sont assurés et financés par les riverains, le cas échéant sous contrôle de l?autorité compétente pour la gestion de l?eau, sauf pour les infrastructures majeures. 2.2.3 La posture en gestion de crise - Des points de différence dans la gestion de crise, dans les modalités d?anticipation, de communication et dans la place des élus locaux d?une part, de bénévoles d?autres part. Aux-Pays-Bas, compte tenu du rôle majeur des digues dans la protection, des vérifications et manoeuvres spécifiques sont nécessaires en prévision d?épisodes de crue intense. L?ensemble de ces actions prennent habituellement 5 jours de travail. De ce fait, un préavis fixe est demandé aux services de prévision météorologique et de prévision des crues. En France, c?est le système des vigilances qui permet non seulement l?information du public mais aussi celle des services de gestion de crise de l?Etat, sans exclure des échanges informels, mais qui ne relèvent pas d?un cadre systématique. « La communication est une partie essentielle de la gestion de crise ». Les témoignages de gestion de crise, en Belgique comme aux Pays-Bas, soulignent l?importance de partager des règles claires de communication qui se résument aux principes suivants : c?est l?autorité qui gère la crise qui communique, les autres autorités étant les porteuses d?une démultiplication des informations ainsi diffusées ? ce qui suppose qu?elles en disposent régulièrement et facilement. L?accent est mis aussi sur la nécessité d?une veille sur les rumeurs (sur les réseaux sociaux en particulier) pour y apporter des réponses rapides. C?est aussi un des points de recommandations du rapport parlementaire après les crues de Wallonie. Un corollaire de cette approche est, en Belgique comme aux Pays-Bas, une association étroite 36 IGEDD, 2023 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 31/107 des élus locaux à la gestion de crise ? y compris par leur accès, en lecture au moins, aux systèmes d?information de gestion de crise. Aux Pays-Bas, ce sont les autorités régionales de l?eau qui sont associées à la gestion de crise des inondations. Enfin, certaines autorités régionales de l?eau, aux Pays-Bas, recourent à des bénévoles, qui constituent un réseau de plusieurs milliers de personnes, pour la surveillance des digues mais aussi, conjointement avec leur personnel administratif, pour la fermeture de certains batardeaux et pour le renforcement de digues en cas d?urgence (sacs de sable). Pour la préparation aux situations de crise mais aussi pour l?inspection des digues, des formations sont prodiguées par les autorités régionales de l?eau en mobilisant le cas échéant des entreprises qualifiées. Cette démarche, qui est recommandée en Wallonie, dans le rapport postérieur aux inondations de juillet 2021, présente de nombreux intérêts, à commencer par la mobilisation de soutiens formés en période de crise, mais également, au long des années, des occasions de travail en réseau entre autorités et ainsi de soutien à la culture du risque dans la population. La mobilisation de volontaires pour la surveillance des digues, réunis une fois par an, est un vecteur de sensibilisation de la population au comportement de ces ouvrages et à leurs limites. Aux Pays-Bas, un des retours d?expérience de la crise de juillet 2021 a été de réaffirmer la nécessi té que les informations météorologiques soient interprétées par l?autorité compétente pour la gestion de l?eau, seule habilitée à recommander aux municipalités l?évacuation (principe de « point unique d?alerte ») ; cela afin d?éviter les évacuations superfétatoires non éclairées. 2.2.4 L?engagement dans l?adaptation au changement climatique - Une première approche de l?adaptation au changement climatique est l?articulation d?enjeux comme la gestion mieux articulée des risques d?inondation et de sécheresse. Elle apparait hétérogène et, dans l?ensemble, non stabilisée. Aux Pays-Bas, les inondations de novembre 2023 ont à nouveau posé la question : au lieu d?évacuer le plus vite possible l?eau à la mer, un nouvel enjeu, au regard des risques de sécheresse, ne serait-il pas de la retenir ? Le premier moyen pour cela identifié aux Pays-Bas est l?infiltration dans les sols et la recharge des nappes, et non la création de bassins de rétention, qui, de toutes façons sont difficiles à gérer car ils ont potentiellement deux objectifs considérés comme non compatibles (en fonction des saisonnalités des événements et des enjeux en présence) : écrêter les crues et retenir l?eau pour en disposer l?été. En Flandre, la visite de la zone d?expansion des crues de Blanckaert a illustré le fonctionnement d?une immense zone, qui n?a pas vocation à garder l?eau pour l?été. En Wallonie, ont été évoquée les limites d?une approche de rétention de l?eau qui a finalement peu d?impact sur des crues importantes, et apporte peu de réponse au regard des besoins en eau, notamment de certains sites industriels gros consommateurs. - De manière plus structurelle, le travail d?adaptation repose sur la structuration de démarches organisées et pilotées d?anticipation des changements à venir et des mesures à prendre, dans un calendrier réfléchi et partagé. L?adaptation au changement climatique, en France, passe par la réalisation régulière du Plan national d?adaptation au changement climatique (PNACC)37 qui liste des actions à mener, mais n?est pas nécessairement identifié par les élus locaux ou le grand public comme dégageant des lignes stratégiques fortes claires et partagées, comme a pu le faire, sur le seul sujet de la prévention des inondations, la Stratégie nationale de gestion des risques d?inondation (SNGRI) après Xynthia. 37 La Stratégie nationale d?adaptation au changement climatique exprime le point de vue de l?État sur la manière d?aborder la question de l?adaptation au changement climatique. Cette stratégie a été élaborée dans le cadre d?une large concertation, menée par l?Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique (ONERC), impliquant les différents secteurs d?activités et la société civile sous la responsabilité du délégué interministériel au développement durable. Elle a été validée par le Comité interministériel pour le développement durable réuni le 13 novembre 2006 par le Premier ministre. La France s?est dotée en 2011 de son premier Plan national d?adaptation au changement climatique (PNACC) pour une période de 5 ans. Le 3ème devrait être approuvé en 2024. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 32/107 Encadré 9 : La Stratégie nationale de gestion des risques d?inondation (SNGRI) Face au bilan catastrophique des inondations en Europe, notamment les grandes crues de l?été 2012 en Europe centrale et du printemps 2013, le gouvernement a adopté en 2014 la Stratégie nationale de gestion des risques d?inondation. Elle poursuit trois objectifs prioritaires, dont l?atteinte par les différents acteurs est à analyser sur le long terme, à 20 ou 30 ans par une mise en oeuvre progressive, en conduisant une évaluation quantifiée des performances actuelles et futures. ? Augmenter la sécurité des populations exposées ? Stabiliser à court terme, et réduire à moyen terme, le coût des dommages liés à l?inondation ? Raccourcir fortement le délai de retour à la normale des territoires sinistrés Les principes directeurs au service des objectifs sont le principe de solidarité, le principe de subsidiarité et de synergie des politiques publiques, et le principe de priorisation et d?amélioration continue. Les quatre défis à relever sont : ? Développer la gouvernance et les maîtrises d?ouvrage ? Aménager durablement les territoires ? Mieux savoir pour mieux agir ? Apprendre à vivre avec les inondations. En Belgique, des travaux importants et de natures différentes ont été organisées après la « water bomb » : en Wallonie, le cadre est donné par le rapport parlementaire qui comporte 161 recommandations (annexe 7). En Flandre, à la suite de ces inondations, le gouvernement a souhaité revoir la prévention des inondations sur son territoire en cas d?épisode météorologique aussi grave. Le travail pluridisciplinaire, dont le pilotage a été confié à un universitaire néerlandais, a conduit à l?avis « Résilient Waterland » qui comporte dix recommandations, que, de fait, apparaissent comme le passage de la prévention des inondations à l?adaptation au changement climatique. Ce travail apparait également, dans les échanges, comme de nature à faciliter de mobilisation collective en temps utile, et notamment dans la suite des inondations de 2023, pour mettre en place dans des délais courts, les suites adaptées à cette crise. Les Pays-Bas sont engagés depuis le début des années 2000 dans des travaux sur leur adaptation au changement climatique. « Nous vivons dans un delta, nous devons nous adapter continuellement », « La stratégie pour les siècles à venir repose sur deux piliers : la protection contre les inondations et la durabilité », ou encore « Le choix d?accepter l?eau comme une opportunité et non plus comme une menace est fait, soit un changement radical dans la philosophie de ce pays conquis par la pelle et la sueur. » Le Commissariat au Programme Delta, historiquement tourné vers les grands travaux d?infrastructure, puis peu à peu également vers ceux visant à redonner de la place aux cours d?eau, a connu une nouvelle étape à partir de 2012 avec la création du Commissaire du Delta dont les travaux visent l?anticipation du changement climatique, dans une démarche stratégique, de planification spatiale, et une approche partenariale. Il s?agit de travailler sur les limites que nous donne la nature, limites qui sont atteintes. Une priorité identifiée depuis 2021 est de mieux prendre en compte l?eau et les sols. Cela a été porté par le gouvernement entré en fonction en janvier 2022, puis a donné lieu à une stratégie gouvernementale transmise au parlement en date du 25 novembre 2022, présentant les actions prévues en grandes lignes, à une revue scientifique, et à des discussions avec tous les niveaux de gouvernement. Encadré 10 : ce qu?un expert néerlandais propose de retenir dans un processus de parangonnage38 « Les Pays-Bas sont souvent mis en avant en raison de leurs prouesses techniques dans le domaine de la maîtrise de l?eau. Mais celles-ci sont le résultat de siècles d?évolution et d?un profond ancrage de cette question dans la culture néerlandaise. Elles sont également spécifiques de la géographie et des enjeux propres à ce pays et, de ce fait, ne sont pas forcément adaptées pour pouvoir être exportées telles quelles dans d?autres pays. (?) Le risque d?inondation est très présent dans l?inconscient collectif néerlandais depuis des siècles ; la maîtrise de ce risque est acceptée, car elle constitue un enjeu fondamental de la survie même du pays. De ce fait, des mesures ont été prises pour lui donner une place spécifique dans les processus décisionnels, qui la met à l?abri des aléas et des contraintes politiques. 38 R.Slomp Y. Friocourt, 2023, Quelles leçons peuvent tirer les autres pays de l?exemple des Pays-Bas ? Annales des mines 107. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 33/107 Par ailleurs, la société et le modèle politique néerlandais reposent fortement sur le principe du compromis, ce que l?on appelle le « modèle du polder » : avant qu?une décision soit prise, il est important que les opinions des uns et des autres soient attentivement écoutées, afin de pouvoir prendre la décision qui causera le moins de frictions. Ce modèle ne facilite pas la rapidité dans la prise de décision, mais il permet à chacun de se sentir écouté et respecté. Appliqué dans le domaine de la maîtrise de l?eau, il encourage chacun à essayer de trouver des solutions techniques pratiques, qui respectent les différents enjeux, et de mise en oeuvre très décentralisée. Cette approche marquée par la lenteur nécessite d?anticiper, de se poser le plus tôt possible des questions fondamentales, sans forcément y apporter de réponse immédiate. Et cela est spécifiquement le but du programme de recherche portant sur les conséquences de la hausse du niveau de la mer : il n?est pas question de trouver immédiatement des mesures qui mettront les Pays-Bas directement à l?abri de ce risque, mais plutôt de comprendre jusqu?à quand les principes de base actuels de la gestion sont tenables et quelles options sont possibles pour le futur. Par la suite, chaque direction identifiée sera étudiée plus en détail et fera l?objet d?études d?impact et de consultations publiques, avant que des décisions ne soient prises. Et chaque nouvelle inondation ou épisode de sécheresse inattendus apporteront leur lot de découvertes et de déconvenues qui seront, elles aussi, intégrées dans le processus décisionnel. De plus, la pérennité des solutions aux Pays-Bas est indéniablement interdépendante des choix que les pays voi- sins pourront faire, particulièrement dans les bassins versants des fleuves Rhin, Meuse et Escaut. L?adaptation au changement climatique ne se fera que via la collaboration internationale et le soutien actif de la société tout entière, chacun dans son domaine de compétence. Les autorités nationales et locales peuvent définir des principes de base et des réglementations, mais ce sont les citoyens et les entreprises qui, finalement, vont décider ou non d?accepter un risque et de participer à l?effort com- mun. Dans les régions où le risque d?inondation existe depuis des générations, cette volonté est déjà présente dans l?inconscient collectif. Mais pour les habitants des autres régions, il est important de les éduquer et de leur en expliquer les raisons, afin de rendre chacun d?eux partie prenante dans l?appréhension du problème et surtout dans l?élaboration des solutions y répondant. L?allocation structurelle de budgets pérennes en est un ingrédient essentiel. La croissance économique progressant beaucoup plus rapidement que la période de réfection des milliers de kilomètres de digues qui dure typiquement trente à quarante ans, on estime que le risque d?inondation aux Pays-Bas est resté à peu près constant en termes financiers depuis 1953, la dernière inondation catastrophique enregistrée. Cela suggère a contrario que ce risque pourrait avoir fortement augmenté dans les pays qui n?ont pris aucune mesure particulière et prouve ainsi l?ampleur du défi qui nous attend ». PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 34/107 3 Les actions et axes de progrès qui se dégagent Les comparaisons avec nos voisins offrent l?occasion de constater que, dans un cadre commun donné par les directives européennes, et parfois le vécu des mêmes catastrophes quoique d?amplitudes différentes, chaque Etat, ou région, a construit une prévention des inondations qui fait système avec des avancées sur différents points. Les pistes d?amélioration qui en ressortent sont de natures différentes : celles qui tiennent à des actions ponctuelles, de nature à renforcer des démarches en cours, et celles qui sont plus structurelles. Dans certains cas, les territoires touchés par les inondations de 2023 pourraient être expérimentateurs, en vue d?une diffusion des bonnes pratiques identifiées ailleurs sur le territoire national. 3.1 Croiser le retour des inondations de fin 2023 - début 2024 et les bonnes pratiques de nos voisins 3.1.1 Des leviers pour améliorer la gestion de crise 3.1.1.1 Organiser une participation accrue des élus à la gestion de crise - Identifier le niveau de participation pertinent ? entre EPCI et EPTB et structurer une participation efficace à la gestion de crise avec comme axes de travail : - le développement de dispositifs de surveillance du réseau et de systèmes d?information partagés, en interface avec les autorités préfectorales gestionnaires de la crise, - la participation, proportionnée, organisée et anticipée de ces élus ou de leurs services à la gestion de crise ? avec par exemple l?accès en lecture aux informations continues, la participation à des exercices telle que prévue dans les circulaires du ministère de l?intérieur?. Cet axe de travail peut être lié à des dispositifs de formation des élus renforcés. - l?amélioration des protocoles de communication pour répondre aux attentes des populations aux plus près du terrain, et éviter les rumeurs. Recommandation 1. : Proposer une place réelle pour des élus dans la gestion de crises inondation, notamment au sein des cellules de crise, dans le partage de la vision globale de l'information sur le la gestion des événements liés à la crise et des données sur l'ensemble du territoire en crise (travail à mener sous pilotage de la DGSCGC en lien avec les préfectures, des représentants des EPTB, des EPCI et des maires, en lien avec la DGPR d?ici fin 2024, pour préciser la feuille de route et engager les premières actions). 3.1.1.2 Mieux anticiper les moyens de pompage en crise Si les dispositifs de pompage pérennes et de secours semblent très organisés aux Pays-Bas, le retour d?expérience des crues de 2023 en France comme dans en Flandre a témoigné d?une capacité à mettre en place et déployer dans les meilleurs délais des dispositifs qui n?étaient pas prévus au niveau requis. Dans la suite de ce déploiement, il parait nécessaire que le re tour d?expérience conduise à : - intégrer ce qui a été efficace dans les plans Orsec, et compléter ce retour d?expérience, si nécessaire, avec d?autres scénarios de crises ; - identifier les infrastructures requises ? plates-formes, apports d?énergies, les éventuels travaux PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 35/107 structurels à mener, et à identifier ce qui relève de l?axe gestion de crise des PAPI et ce qui relève des moyens des SDIS, et de ceux de la sécurité civile ; - prévoir dans la programmation nationale les pompes de secours utiles à l?échelle nationale. Recommandation 2. : Evaluer et revoir en profondeur le schéma d?évacuation à la mer des crues extrêmes, par voie gravitaire et par pompage, notamment par la mise en place d?un système de pompage de renfort efficient pour ces inondations dans le delta de l?Aa, travail à mener sous l?égide de la préfecture du Pas-de-Calais, avec les Syndicats mixtes concernés et le conseil départemental, d?ici l?automne, pour préciser la feuille de route et engager les premières actions avant l?hiver. 3.1.1.3 Expérimenter des dispositifs de participation citoyenne Des dispositifs de mobilisation citoyenne, comme il en existe en Belgique et aux Pays-Bas, préparés et animés à l?avance, participent de l?efficacité de la gestion de crise et contribuent à la culture du risque (cf : supervision de l?état des digues, rapport IGEDD) 39. Ils demandent un travail spécifique, notamment si les bénévoles ont vocation à être mobilisés en crise (assurances). Recommandation 3. : Expérimenter une participation citoyenne à la gestion de crise, sur la base de réseaux de volontaires formés, travail à mener sous l?égide de la DGSCGC en lien avec l?AMF, sous un an, et développer la culture du risque pour les populations des territoires impactés, notamment par une appropriation des gestes et des réflexes en situation de crise. 3.1.1.4 Deux pistes concrètes pour poursuivre et renforcer un travail permanent sur la culture du risque Chacun des Etats met en avant la nécessité de travailler en permanence la culture du risque. Il y a aussi un accord sur la période spécifique de sensibilisation que représentent les mois qui suivent une inondation. Au regard des actions menées dans les pays voisins, deux actions méritent attention : Il a été souvent constaté à la fois une incompréhension des événements inattendus que sont les inondations majeures, et la nécessité d?appréhender les nécessaires solidarités pour la gestion de l?eau à l?échelle des bassins versants. Dans la suite des crues de Wallonie, a été organisée une démarche d?explication du phénomène, de la manière dont il a été géré, et des suites envisagées. Recommandation 4. : Organiser sur les principaux bassins versants du Pas-de-Calais des séminaires de retour d?expérience des inondations, sous l?égide des préfets, en lien avec les élus locaux, à l?été 2024, quelques mois après la sortie de crise. Dans la suite des crues de Wallonie, la question a été posée, en Flandre, de ce que cette pluie aurait donné sur son territoire. Les exercices de stress test, y compris dans une démarche 39 Le rapport de l?IGEDD de 2023 consacré au retour d?expérience des crues de juillet 2021 cite par exemple le séminaire qui s?est tenu à Longuyon, pour le bassin de la Chiers (Haut pays meurthe-et-mosellan, secteur de Longwy). PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 36/107 transfrontalière, sont à la fois un moyen d?objectiver les risques inhérents au changement climatique et de s?exercer. Recommandation 5. : Prévoir dans le calendrier des exercices nationaux, une démarche de stress test, sur la base par exemple d?un scénario de type « water bomb », sous l?égide de la DGSCGC. 3.1.2 Etablir un diagnostic partagé de l?état des cours d?eaux, canaux, fossés La question de l?état des fossés, canaux, navigués ou non, voire cours d?eau a été au coeur de nombreuses discussions dans le Pas-de-Calais, centrées sur des demandes de simplifications ou de moyens financiers de rattrapage, mais qui ont fait également ressortir un manque de connaissance des responsabilités, de vue d?ensemble, de doctrines partagées sur l?utilité et les inconvénients potentiels des différents types d?intervention, voire de moyens adaptés. Dans les pays voisins, il existe des plans d?entretien, adaptés aux différentes situations. Une fois passée la phase de curages et entretiens requis après la crise, une vue d?ensemble et une programmation d?interventions nécessaires semblent se justifier, qui permettront aussi de calibrer les moyens requis. Recommandation 6. : Etablir un état global des lieux des fossés, canaux, cours d?eau, berges et digues en associant les parties prenantes, évaluer et revoir la périodicité et l'organisation des contrôles des obligations de leur entretien et évaluer toutes les options favorisant l'évacuation gravitaire de l'eau à la mer, y compris les canaux ne présentant plus d'utilité pour la navigation, en vue d?établir un programme pluriannuel de suivi et d?entretien. Un travail préalable, sous pilotage de la DREAL de bassin Artois Picardie, sera nécessaire pour préciser les modalités de cette démarche. Assurer une veille régulière de l'état de ces infrastructures, le cas échéant en y associant des citoyens volontaires formés à cet effet. Etablir un état des lieux suppose un travail préalable de méthodologie : à quelle échelle le mener, selon quelles modalités ? à quelle fréquence le mettre à jour ? comment partager les résultats ? Cet état des lieux pourrait concerner la cartographie, le fonctionnement hydrologique, les actions prévues dans des SAGE, des PAPI, contrats d?objectifs ou protocoles, le niveau d?entretien attendu, la partage des informations, la communication, l?évaluation des moyens requis ? . 3.2 Renforcer le portage de la prévention par les collectivités locales compétentes En France, la mise en place de la Gemapi conduit à organiser la gestion des enjeux liés à l?eau à l?échelle de territoires hydrologiquement pertinents, par transfert ou délégation de compétences à des syndicats intercommunaux. Sur les territoires impactés par les inondations de novembre 2023, se pose la question de leur taille critique, soit au regard de la taille des équipes et des moyens requis pour une action efficace, soit au regard du fonctionnement des bassins versants. Une meilleure structuration apparait comme un « pré requis » à un accélération de l?action, qui ne peut venir que des élus locaux, le cas échéant sous l?impulsion du préfet coordinateur de bassin. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 37/107 Elle devra aller dans le sens de la simplification et de la lisibilité, y compris dans l?articulation des structures gemapiennes avec les sections de Wateringues et contribuer à une meilleure mobilisation des moyens financiers prévus, dans une logique de solidarité. Sans aller jusqu?à l?intégration complète néerlandaise, peut-être non adaptée au contexte français, d?éventuelles évolutions peuvent viser une meilleure association de toutes les parties prenantes et des financeurs potentiels. Les parties impliquées, au regard de l?exemple néerlandais, pourraient également intégrer la nécessité d?un portage politique coopératif et fort des enjeux de gestion de l?eau. Recommandation 7. : S?appuyer sur la mission des inspections en cours sur la gouvernance pour rendre plus robuste et efficace la mise en oeuvre de la Gemapi dans les bassins versants touchés par les inondations, dans ses aspects organisationnels et financiers, afin de gagner en simplicité, lisibilité et efficacité, et créer une approche opérationnelle cohérente de l?amont jusqu?à l?aval. 3.3 Anticiper les modalités du relèvement et l?accompagner par une structure spécifique Un Commissariat spécial à la reconstruction a été mis en place auprès du gouverneur de Wallonie après les crues de Wallonie. En France, après des catastrophes, un préfet ou un sous-préfet peut être mobilisé en position de chef de projet de la période post-crise, ce qui facilite les réponses immédiates, sans toutefois aller jusqu?à faciliter une stratégie de reconstruction résiliente, portée par les acteurs locaux. Recommandation 8. : Dans la suite des inondations de novembre 2023, mettre en place une structure technique spécifique de relèvement (commissariat de la reconstruction doté d'une équipe pluridisciplinaire et placé auprès d'une autorité politique), dans le cadre d?une expérimentation : pour une durée pertinente, de l?ordre de plusieurs mois, elle apporte aux préfets et à leurs services un soutien opérationnel au relèvement, pour intégrer la réduction de la vulnérabilité dans tout l?aménagement du territoire. Si l?expérimentation est réussie, cette structure a vocation à être pérennisée pour capitaliser du retour d'expérience et être mobilisée rapidement en gestion post-catastrophe dans le futur dans tout le territoire national. 3.4 Renforcer les coopérations transfrontalières En raison des inondations exceptionnelles dans les Flandres intérieures en novembre 2023, sur sollicitation du gouverneur des Flandres, le dispositif et les ouvrages du projet MAGETEAUX ont été activés pour évacuer un maximum d?eau via le canal de Furnes directement à la mer par Dunkerque, avant même la finalisation totale du protocole ? ce qui été salué dans les échanges. L?eau a toujours constitué, pour ce secteur en dessous du niveau de la mer, un sujet de coopération prioritaire et fait l?objet de nombreux échanges dans le cadre de groupes de travail au sein de nombreux organismes, dont celui du groupement européen de coopération territoriale) West- Vlaanderen / Flandre-Dunkerque-Côte d?Opale. La convention-protocole sur le secteur des Flandres française et belge avait fait l?objet d?une réunion conclusive à Bruges le 8 mars 2023, présidée par le gouverneur de la Province de Flandre occidentale et en présence de la secrétaire générale de la préfecture du Nord, qui présidait la délégation française. Le texte a ensuite été envoyé par le préfet de région Hauts-de-France, au Ministère de l?Europe et des Affaires étrangères en vue de sa ratification. La Flandre a procédé au PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 38/107 même envoi auprès de son ministère concerné en Région flamande. Plusieurs personnalités rencontrées en Belgique ont souligné la nécessité d?aller au bout de ce processus. Par ailleurs, depuis 1994, la signature de l?Accord sur la protection de l?Escaut (accord de Charleville-Mézières) et la création Commission Internationale pour la Protection de l?Escaut (CIPE), les gouvernements de la République française, de la Fédération Wallonie-Bruxelles, de la Région Flamande, de la Région de Bruxelles-Capitale et du Royaume des Pays-Bas travaillent ensemble sur ce bassin. En 2001, cette coopération transfrontalière a évolué avec la délimitation du district hydrographique international Escaut, l?affiliation de l?État fédéral belge à l?Accord, la réalisation, d?un seul plan de gestion de bassin versant pour l?Escaut ainsi qu?une réflexion multilatérale au sein de la CIPE, visant à établir des mesures d?atténuation des effets des inondations et des périodes de sécheresse. L?accord de Gand du 3 décembre 2002 formalise ces évolutions. La CIPE devient alors la Commission Internationale de l?Escaut (CIE). Les Parties Contractantes à l?Accord de Gand s?efforcent de réaliser une gestion de l?eau durable et intégrée pour le district hydrographique international de l?Escaut (district de l?Escaut). Dans ce cadre, la CIE est le forum international de coordination des directives européennes sur l?eau dans le district. Elle traite en particulier de la coordination internationale de la directive cadre sur l?eau (2000/60/CE), de la directive relative à l?évaluation et à la gestion des risques d?inondation (2007/60/CE), de l?adaptation au changement climatique (notamment la prévention des effets dus aux sécheresses) et de la lutte transfrontalière contre les pollutions accidentelles survenant dans les eaux du district de l?Escaut. Des échanges en décembre 2023 entre la DREAL Hauts-de-France et l?agence de l?environnement de Flandre (VMM) qui représentent respectivement la France et la Flandre dans la CIE portent notamment sur les propositions formulées dans le cadre de la task force créée par le gouvernement flamand. Les parties sont habituées à collaborer pour la mise en place d?accords. Enfin, la province du Hainaut a mobilisé une pompe de moyen gabarit qui a été employée à Calais durant quelques jours durant les inondations dans le Pas-de-Calais. Ensuite, c'est le mécanisme européen de solidarité qui a été activé par le ministre (samedi) et qui a conduit à l'acheminement de quatre pompes hollandaises de grand gabarit. Le Ministère néerlandais des Infrastructures et de la Gestion de l?eau a souhaité souligner l?importance des coopérations transfrontalières dans la prévention des inondations fluviales et de la gestion des crises. Ses représentants appellent de leurs voeux une plus grande participation des autorités françaises, nationales ou régionales, dans les cadres existants et dans le contexte de l?Union Benelux+. En ce sens, la candidature de la Région Hauts-de-France au statut d?observateur de l?Union Benelux+, au même titre que le Land de Rhénanie du Nord-Westphalie, devrait permettre le renforcement de la coopération transfrontalière dans le domaine de l?eau, ainsi que la signature, le 3 avril, d?une feuille de route de la coopération entre la Région Hauts-de-France et les Pays-Bas, alors que l?exécutif régional vient de se doter d?une vice-présidence en charge de l?eau. Recommandation 9. Accentuer les coopérations transfrontalières dans le domaine de la gestion de l'eau et la prévention des inondations pour développer le partage des bonnes pratiques et les réflexes de gestion commune des crises. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 39/107 3.5 Installer une institution stratège et pérenne, au plus haut niveau de l?Etat, pour orienter et soutenir l?adaptation au changement climatique 3.5.1 Structurer le portage politique de l?adaptation au changement climatique au plus haut niveau Les inondations de fin 2023 ont été perçues, peut-être pour la première fois dans le Nord de la France, comme la marque du changement climatique, faisant ressortir à la fois le besoin d?amé- liorer la prévention des inondations pour ne pas se retrouver, de manière de plus en plus fré- quente, dans la même situation, mais aussi d?élargir le champ, de rapprocher les sujets : inon- dation, submersion et élévation du niveau de la mer, inondation et sécheresse, utilisation du foncier et enjeux de désartificialisation ou de recherche de zones d?expansion des crues ? La mise en place, en 2012, aux Pays-Bas, du Commissaire du Delta marque aux Pays-Bas un tournant qui est de ne plus travailler seulement sur la base du retour d?expérience des crues mais de chercher à anticiper en intégrant le changement climatique. Encadré 10 : Le Commissaire du Delta aux Pays-Bas, un gardien de la sécurité hydraulique du pays Fonction créée par la loi Delta entrée en vigueur le 1er janvier 2012, le Commissaire du Delta aux Pays-Bas assume un rôle crucial dans la gestion de l?eau, axé notamment sur la protection contre les inondations et la préservation des ressources hydrauliques. Nommé pour une durée de 7 ans (renouvelable une fois) par le gouvernement, le Commissaire du Delta (épaulé par une équipe d?une quinzaine de personnes) dispose de l?autorité requise pour faciliter la coopération interministérielle et la cohérence des actions initiées par les dif- férents niveaux de gouvernance. Sa visibilité contribue en outre à sensibiliser l?opinion publique à la nécessité de mieux prendre en compte les effets du changement climatique. Chaque année, dans le cadre de la procédure budgétaire, le commissaire soumet de nouvelles recommanda- tions et mesures pour le programme Delta. Il fait le lien avec les organes administratifs concernés, les entre- prises et la société civile, suit l?avancement de la mise en oeuvre du programme Delta, mais n?en porte pas la responsabilité politique qui incombe au ministre de l?Infrastructure et de la Gestion de l?eau. Le Commissaire peut participer, en tant qu?expert, au Conseil de l?environnement, présidé par le Premier ministre et comprenant une dizaine de ministres dont notamment les ministres chargés de l?infrastructure et de la gestion de l?eau, de l?agriculture et de l?environnement. Le Commissaire du Delta, dispose d?un budget propre, et a pour mission d?assurer une bonne coordination entre les organismes d?Etat, les autorités régionales de l?eau (« Waterschappen ») les provinces et les munici- palités, et le cas échéant, les acteurs concernés de l?énergie, du tourisme ou de l?écologie. Il supervise le Programme Delta, qui se décline en 7 sous-programmes régionaux (Littoral « Kust », Delta d?Escaut « Zuid Westelijke Delta », mer autour des Îles de la Frise « Waddenzee », fleuves Rhin et Meuse « Rivieren », Delta Rhin-Meuse « Rijnmond Drechtsteden », Grands Lacs « IJsselmeergebied ») et trois sous-programmes natio- naux (analyse des risques d?inondation, gestion de l?eau, urbanisme et aménagement du territoire : « Nieuwbouw en Herstructurering » ). Si l?ordre du jour le justifie, le Commissaire du Delta peut participer au Conseil des Ministres pour évoquer le Programme Delta. Le Commissaire du Delta aux Pays-Bas incarne l?engagement continu du pays à protéger ses terres et ses habitants contre les inondations, tout en cherchant des solutions innovantes et durables pour faire face aux défis actuels et futurs liés à l?eau. Depuis 2012, trois personnalités se sont succédées à cette fonction. Wim Kuijken fut le premier Commissaire du Delta du 1er février 2010 au 1er janvier 2019, date à laquelle il a pris sa retraite. Peter Glas lui succéda jusqu?à sa propre retraite, le 30 novembre 2023. Co Verdaas est le nouveau commissaire depuis le 1er décembre 2023. Co Verdaas possède une vaste expérience des défis liés à l?eau aux Pays-Bas. Il a été auparavant membre du Parlement néerlandais (200362006), député de la province de Gueldre (2007-2012) et pendant une courte période secrétaire d?État à l?économie dans le cabinet Rutte II. Il a étudié l?urbanisme à l?Université Radboud PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 40/107 de Nimègue et enseigne le développement régional comme professeur à temps partiel à l?Université technique de Delft. Lors de sa prise de fonction, Co Verdaas a estimé qu?il était « important que l?eau ne soit pas consi- dérée comme une tâche isolée et qu?elle soit liée aux défis liés au logement, à la nature et à la durabilité de l?économie. (?) Nous avons une tradition de protection contre l?eau et l?ambition de vivre avec l?eau ». . Recommandation 10. : Dans le contexte des inondations dans le Pas-de-Calais et le Nord, mettre en place une nouvelle institution, qui assure dans la durée et au plus haut niveau de l?Etat, le portage politique de l?anticipation au changement climatique, dans une logique d?appui scientifique et technique, de coordination, de médiation. De taille réduite, elle a vocation à mobiliser les administrations et opérateurs de l?Etat et à être un soutien des élus locaux 40. Une première étape, sous un an, est de configurer cette structure, et le cas échéant son articulation avec les comités de bassin, et de la mandater pour travailler y compris sur les sols. « Le plus difficile, c?est de faire avec l?incertitude », « Je n?ai pas de réel pouvoir, mais tout le monde écoute ce que dit le Commissaire du Delta », « Le commissaire du Delta, c?est un peu la vigie néerlandaise contre les inondations, à l?image de ce que constitue pour nous contre les accidents de la route, le Délégué interministériel pour la sécurité routière et la Prévention routière. » Les échanges avec le gouvernement flamand témoignent d?un intérêt pour des coopérations trans- frontalières entre les autorités sui seront en charge de l?adaptation au changement climatique. 3.5.2 Une action à lancer : représenter l?inondation et informer Les Pays-Bas ont mis en place un système d?information et de pédagogie en ligne qui repose sur deux outils une carte qui présente une information localisée sur tous les risques et en particulier l?inondation, et de outils de communication et de pédagogie. 3.5.2.1 Une carte des provinces, qui offre une information localisée sur tous les risques (avec un accès dans différentes langues dont le Français) PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 41/107 Figure 2 : site néerlandais, page de garde et carte du risque d'inondation par la mer, un lac ou une rivière (source Homepage | Risicokaart) Ce site est l?équivalent du portail Géorisques français dans son principe. Une différence importante réside dans l?information donnée sur les inondations. Figure 3 : portail Géorisques Aux Pays-Bas, l?information porte sur l?ensemble des cours d?eau, pour différents scénarios d?aléa. La mise à disposition de ces couches d?information résulte d?un travail de longue haleine, plus de 10 ans et de l?ordre de 70 M d?euros, qui a permis d?utiliser, notamment, les données sous-jacentes à la prévision pour établir des scénarios d?inondations pour tous les cours d?eau. En pratique, PUBLIÉ https://www.risicokaart.nl/ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 42/107 chaque province disposait auparavant de données d?inondation, mais non homogènes. Plus précisément, les grande lignes étaient uniformes mais chaque province avait fait ses choix quant aux modélisations hydrauliques utilisées et les hypothèses sur le rôle des ouvrages (routes, chemin de fer ? ), aptes ou non à servir de digue. - Une première étape déterminante a été de déterminer, à l?échelle nationale, les scénarios d?inondations sur lesquelles l?Etat souhaitait diffuser des informations : il a été retenu de présenter les zones inondées de crue décennale à la crue millénale et même encore moins probable. Il s?agit notamment de faire comprendre l?emprise spatiale de différentes crues, surcotes ou combinaisons, des plus fréquentes aux plus extrêmes. Ce choix doit être assumé politiquement, homogène sur le territoire et accompagné. - Ensuite, il a fallu mettre en place les coopérations nécessaires pour établir la cartographie en mobilisant les différents ministères, opérateurs et autorités locales concernés. En effet, faire la carte idéale mettrait très longtemps cat il faudrait développer toutes les modélisations : il a donc été choisi, dans un premier temps, de rassembler les données existantes de chaque province pour les mettre en cohérence avant de les publier. La coopération est, ainsi, la deuxième condition forte de cet exercice. Elle s?est matérialisée par un comité de pilotage rassemblant des représentants des partenaires concernés d?une part, et des engagements de contribution aux travaux par la mise à disposition des hommes/jour et des financements nécessaires par chaque organisme. Les travaux se poursuivent, sur la base de cette première étape pragmatique mais structurée, pour aller vers des cartes homogènes dans leur conception même. Mais il a été utile de passer par cette première phase, appuyée sur les données existantes, qui a permis d?aller plus vite et de donner à voir un résultat satisfaisant cat fiable et partagé, utilisable par tout un chacun car mis à disposition en ligne. En France, il existe, de par l?historique de la prévention des inondations, différents types de cartes les représentant : - les cartes des Plans de prévention des risques d?inondation (PPRi) représentent la crue la plus importante connue ou la crue centennale modélisée. Elles reposent, depuis 2019, sur un corpus de méthodes homogènes quant à la prise en compte des ouvrages de protection. Elles sont liées à des zonages réglementaires, qui s?imposent à l?urbanisme. Elles ne constituent pas un continuum puisque les PPRi sont réalisés là où il y a les plus forts croisements aléas-enjeux. Elles sont la base de la procédure en ligne « Information acquéreur locataire » (IAL) ; - les Atlas de zones inondables (AZI), réalisés dans les années 2000 puis laissés de côté, font parfois référence localement, sans constituer un continuum le long du réseau hydrographique ; - les zones inondées potentielles (ZIP)i ont été mises en place pour la gestion de crise, avec différents scénarios d?inondation pour guider les autorités, qui ne recouvrent donc pas nécessairement les hypothèses et méthodes utilisées pour les élaborer les cartes des PPRi. Elles sont préparées, progressivement, au droit des stations de mesure du réseau Vigicrues, elles ne font pas un continuum. Un travail est en cours pour les mettre en ligne sur le site Vigicrues fin 2024-début 2025. Ce sera une avancée importante pour l?information du public, avec une vigilance pour expliquer que les cartes de PPRi et les ZIP sont différentes dans leur élaboration, leurs finalités et leurs portées, mais toutes justes. Ce sont les scénarios des cartes de ZIP qui s?approchent le plus de la démarche d?information néerlandaise (les Pays-Bas n?ayant pas mis en place l?équivalent des PPRi) - les cartes qui figurent dans les Plans de gestion du risque inondation (PGRI), à l?échelle des bassins hydrographiques, dans l?Evaluation primaire des risques d?inondation (EPRI), en application de la Directive inondation. Elles présentent obligatoirement des crues extrêmes, couvrent tout le réseau hydrographique principal, mais ne sont pas « zoomables ». Il faut rappeler que lors de la première réalisation de ces cartes, il avait été choisi, dans certains bassins, de ne pas les diffuser. La compréhension du risque inondation demande en effet un accompagnement spécifique pour expliciter les différents scénarios représentés. Les cartes de l?EPRI constituent également une approche de la démarche néerlandaise ; PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 43/107 - enfin, dans certains cas, pour la préparation de PPRL par exemple, quelques DDT ont fait développer des représentations dynamiques de l?effet d?une inondation sur un territoire. Il existe des cas dans le nord de la France, sans que les résultats aient été présentés au public. Dans certains cas, et dans le cadre des PAPI, certaines collectivités ont également développé des outils de simulation, en réalité augmentée. 3.5.2.2 Des outils de communication pour former aux comportements qui sauvent Les cartes diffusées au Pays-Bas permettent également, à partir de ces mêmes couches de données, de visualiser, pour un bâtiment, l?effet de différents scénarios d?inondation. A chaque scénario sont liés des conseils de préparation et de comportement, avec une image stylisée représentant une maison. L?ouverture de l?application sur téléphone portable permet de mettre la photographie de son habitation à la place du dessin indicatif. En France, dans certaines régions, ont été développées des applications permettant de visualiser en réalité augmentée une rue inondée. Cela relève, par exemple, d?action de culture du risque développées dans les PAPI. Des conseils de comportements figurent sur le site Géorisques de manière générique ; ils sont repris et amplifiés dans des actions ciblées et récurrentes comme la « Campagne cévenole ». Lors d?événements importants, certains assureurs envoient dorénavant des SMS à leurs clients sur le risque encouru. Il est également possible de s ?abonner à Vigicrues pour recevoir des informations sur la station à proximité de chez soi. Avancer sur une cartographie nationale homogène et partagée permettrait de développer des outils de sensibilisation personnalisés de manière beaucoup plus sytématique. Figure 4 : exemple d?outils pédagogique (source https://overstroomik.nl/) Alors que le secteur des assurances se dote de cartographies visant à identifier les zones les plus à risque, avancer sur une cartographie nationale homogène des risques d?inondation permettrait de disposer et de diffuser une information publique sur différents scénarios d?inondation, fondement de la culture du risque. Recommandation 11. Engager l?élaboration d?une cartographie nationale des inondations, permettant de développer des outils pédagogiques. Cela demande une expression politique claire sur la gravité des scénarios d?inondation à traiter et sur le type d?inondation à aborder, et un travail structuré et partenarial pour publier un résultat découlant d?une approche partagée entre différents services ministériels, les opérateurs concernés, les représentants des collec tivités locales, les associations impliquées et certains partenaires comme la Caisse centrale de réassurance. PUBLIÉ https://overstroomik.nl/ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 44/107 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 45/107 Conclusion La France dispose d?un socle de prévention des inondations ancien, qui mobilise Etat et collectivités locales, mais il y a bien sûr toujours des améliorations possibles, notamment identifiées dans l'exercice de parangonnage qui est très utile. Le contexte du changement climatique doit conduire à renforcer en efficacité et en ambition les efforts en la matière, et à structurer de nouveaux travaux d?anticipation. Les échanges menés dans le cadre de la mission de parangonnage ont été fructueux ; il y a un intérêt pour une réciprocité ou des suites à ce travail, notamment dans la cadre des échanges sur les sujets transfrontaliers, mais plus largement : - Les conditions d'avancées de la prévention des inondations ont des composantes techniques ou organisationnelles mais relèvent en premiers lieux de questions de posture : un portage politique fort à tous les niveaux, la mise en oeuvre de coopérations sont des conditions premières à des avancées significatives. Chaque autorité a une place dans l?approche française, du maire qui est le contact de proximité des habitants et le responsable de la sécurité sur le territoire de la commune à l?Etat en passant par l?EPCI, échelle de l?aménagement, ou du syndicat en charge de la Gemapi : l?engagement de chacun et la fluidité de leurs relations sont un gage d?efficacité - Les avancées se font dans la durée car elles reposent sur des évolutions exigeantes, qu?il s?agisse d?aménagement du territoire ou d?évolution de comportements: il convient, pour les différentes autorités en charge, chercher les actions sans regrets, avancer à petits pas, développer une approche plus agile, ou encore lancer, dans un format réfléchi, les travaux les plus nouveaux et complexes sur l?adaptation. - La questions des moyens se pose toujours : les coopérations demandent du temps et des compétences. Des structures nouvelles ad hoc sont nécessaires, l?une pour faciliter le relèvement après de nouvelles catastrophes qui surviendront, et l?autre pour le portage politique et concret de l'adaptation au changement climatique, qui demanderont des effectifs. Dans un contexte de tension budgétaire, il faut comparer le coût de la préparation avec le coût de la réparation, documenter la non action, par exemple au regard des risques sur le système assuranciel, les impacts sociaux pour les populations et les activités exposées. Il est stratégique de renforcer et structurer les moyens, dans des dispositifs efficaces, dans le contexte du changement climatique. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 46/107 Annexes PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 47/107 Annexe 1. Lettre de mission PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 48/107 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 49/107 Annexe 2. Agenda des déplacements et liste des personnes rencontrées Déplacement aux Pays-Bas Ambassade de France : M. François Alabrune Ambassadeur de France aux Pays-Bas Mme Aude Robin-Mitrevski, cheffe du Service économique régional M. Samy Ouahsine, conseiller développement durable et industrie Mme Clotilde Maral, attachée environnement 24 janvier 2024, Pays-Bas, la Haye - Entretien avec M. René Vrugt, Directeur des sols, de l?aménagement du territoire et de l?adap- tation au climat, Ministère de l?Infrastructure et de la Gestion de l?eau - Mme Wieke Tas, cheffe du service Adaptation au changement climatique et gouvernance, « Dé- termination de la politique d?aménagement par les sols et l'eau » - M. Jan Kruijshoop, responsable des affaires internationales, Rijkswaterstaat WVL Retour d?expérience sur les inondations de juillet 2021 au Benelux et en Allemagne, mise en place d?une coopération quadrilatérale - M. Robert Slomp, expert de la gestion de l?eau et de la relation bilatérale avec la France Rijkswa- terstaat WVL - Mme Mariette van Empel, Ambassade des Pays-Bas en France - M. Math Reumers, chargé de la coopération bilatérale avec la France, ministère I&W - Mme Jean-Marie Stam, Affaires internationales, Rijkswaterstaat WVL - Mme Babette Gräber, responsable du programme KAWI, mission internationale pour l?adapta- tion au changement climatique et pour l?eau, Ministère de l?Infrastructure et de la Gestion de l?eau - Café-entretien avec M. Kleis Jager, journaliste néerlandais - Dîner avec SE M. l?Ambassadeur François Alabrune 25 janvier - Rencontre avec M. Co Verdaas, Commissaire pour le programme pour le Delta, M. Dolf Kern, Conseiller pour le programme pour le Delta, M. Jan Bonjer, Président du Waterschap Hollandse Delta, M. Remco van Rijn, Expert en pompes d'urgence chez Hollandse Delta M. Remco Belonje, conseiller spécial de M. Bonjer Et en présence de deux membres supplémentaires de la délégation française : Mme Florence Bariseau, VP eau Région Hauts-de-France, Mme Aude Prestaux, conseillère. - Visite du centre de Gestion de l?eau de Lelystad - Présentations sur la gestion de crise - M. Hans de Vries, président du Comité national de coordination des menaces d'inondation (LCO) et du Comité national de coordination pour la distribution de l'eau (LCW), VWM - M. Jan Kruijshoop, responsable des Affaires internationales à la DG eau et sols, ministère I&W - M. Robert Slomp, expert de la gestion de l?eau et de la relation bilatérale avec la France Rijkswa- terstaat WVL - Mme Marion Wierda, directrice Stratégie et Politique Agence régionale de l?eau Rivierenland - M. Tom Vereijken, membre de l?exécutif de l?autorité régionale de l?eau Zuiderzeeland (où se trouve la station de pompage). PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 50/107 - Visite de la station de pompage Wortman à Lelystad, accueil par M. Jan-Willem Trompetter (Directeur et chef technicien de la station de pompage) En présence de : M. Olivier Caillaud (Pôle métropolitain de la Côte d?Opale) Mmes Florence Bariseau et Aude Prestaux Déplacements en Belgique Ambassade de France : M. François Sénémaud, Ambassadeur de France en Belgique Mme Caroline Vinot, première conseillère Mme Alyssia Biton, deuxième conseillère M. Arnaud Boulanger, chef du service économique M. Andri-Anderson Rabehanta, chef adjoint du service économique Mme Neïla Khelifi, attachée économique et financier au service économique M. Bernard Siffert, attaché de sécurité intérieure M. Samy Ouahsine, conseiller développement durable et industrie Mercredi 10 janvier, Bruxelles M. Etienne Bouas-Laurent, directeur général d?AXA Belgique M. Hein Lannoy, directeur général d?Assuralia Audrey Amiot, COO Philippe Courouble, Chef du service P&C Mme Leen Depuydt, directrice générale du NCCN, Centre de crise National mercredi 11 janvier M. Jan Jambon, Ministre-président flamand M. Toby De Backer, chef de cabinet adjoint de Mme Zuhal Demir, ministre flamande de l?Environ- nement, de l?Energie, du Tourisme et la Justice M. Jan Vancoillie, conseiller du cabinet du Ministre-président M. Jan Jambon M. Wouter De Ruyter, chef du cabinet adjoint de Mme Lydia Peeters, ministre flamande de la Mobilité et des Travaux publics M. David Maenaut, Conseiller diplomatique, chargé des relations transfrontalières avec la France, les Hauts-de-France et la Wallonie Mme Barbara Vael, Chef de département VLAAMSE MILIEUMAATSCHAPPIJ - VMM M. Chris Danckaerts, Administrateur général de l?Agence flamande des Voies Navigables (De Vlaamse Waterweg, DVW) Mme Emma Vermunicht, conseillère diplomatique de M. Jo Brouns, Ministre flamand de l'Écono- mie, de l'Innovation, du Travail, de l'Économie sociale et de l'Agriculture et Mme Jannes Maes, conseillère agriculture 18 janvier 2024, Namur M. Philippe Dierickx, directeur de la gestion hydrologique au SPW Mobilité et Infrastructures M. Sébastien Gailliez, directeur des cours d'eau non navigables au SPW Agriculture, Ressources naturelles et Environnement M. Simon Riguelle, directeur du Centre régional de crise Mme Emilie Jennes, conseillère au cabinet de M. Elio Di Rupo, Ministre-président wallon M. Denis Mathen, Gouverneur de la province de Namur Mme Marie Muselle, commissaire d'arrondissement PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 51/107 M. Willy Borsus, Vice-président du gouvernement wallon et Ministre de l'Économie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'innovation, du Numérique, de l'Aménagement du Territoire et de l'Agriculture M. Olivier Granville, chef de cabinet M. Thomas Leroy, conseiller en aménagement du territoire et urbanisme M. Michel Dachelet, inspecteur général du département de l?aménagement du territoire et de l?ur- banisme (DATU) M. Jacques Teller, professeur en urbanisme à l?Université de Liège M. Benoît Moritz, professeur en urbanisme à l?Université Libre de Bruxelles Vendredi 9 février, Dixmude et Niewport Présentations des agences flamandes de l?Eau (DVW) et de l?Environnement (VMM) et visite de terrain du Bassin de Blankaart et des écluses de Nieuport. M. Carl Decaluwé, Gouverneur de Flandre-Occidentale M. Bart Naeyaert, Vice-gouverneur en charge de la Politique intégrée de l?eau M. Chris Danckaerts, Administrateur général de l?Agence flamande des Voies Navigables (De Vlaamse Waterweg, DVW) M. Bernard De Potter, Administrateur général de l'Agence flamande de l?Environnement (Vlaamse Milieumaatschappij, VMM) M. Toby De Backer, Chef de Cabinet adjoint de Mme. Zuhal Demir, Ministre flamande de la Justice, de l?Environnement, de l?Aménagement du Territoire, de l?Énergie et du Tourisme M. Wouter De Ruyter, Chef de Cabinet adjoint de Mme. Lydia Peeters, Ministre flamande de la Mobilité et des Travaux publics M. Koen Surdiacourt, Chef de Cabinet du Gouverneur M. David Maenaut, Conseiller diplomatique, chargé des relations transfrontalières avec la France, les Hauts-de-France et la Wallonie Mme Elisabeth Bonne, Chargée de Mission, relations avec la France, Département de la Chan- cellerie et des Affaires Etrangères M. Jan Vandecavey, Directeur de la Politique intégrée de l?eau M. Chris Marey, Conseiller du Gouverneur M. Kristof Vermeire, Conseiller pour les relations avec le Nord de la France M. Lieven Dejonckheere (DVW) M. Joris Duyck (DVW) Mme Lies Verstraete (VMM) M. Niels Van Steenbergen (DVW) M. Maarten Goegebeur (VMM) France CEPRI, Marie-France Beaufils, présidente, et ses équipes PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 52/107 Annexe 3. La prévention des inondations aux Pays-Bas La législation néerlandaise relative à la gestion du risque d?inondation, comme dans nombre de pays, est liée aux catastrophes qu?a connues le pays, en particulier celle de 1953, et au cadre européen découlant de la « Directive inondation ». La robustesse du dispositif mis en place tient à la cohérence de l?organisation politico-administrative et à un cadre juridique et financier inscrit dans la durée mais apte à évoluer. Il garantit en particulier l?entretien et la mise à niveau des ouvrages de protection vitaux pour le pays. Le 21e droit fondamental dans la constitution néerlandaise prévoit, depuis 1983, que : « La puis- sance publique s?attache à l?habitabilité du territoire et à la protection du cadre de vie ». Historique- ment, ce droit fondamental visait à protéger l?agriculture. En 1798, date de la constitution de la république batave, a ainsi été introduite la disposition « La Société commande, en termes égaux, la favorisation de l?Agriculture, et son épanouissement, en particulier au regard des terres vacantes et non artificialisées, à travers l?ensemble du territoire de la République ». La notion de cadre de vie, et plus largement d?environnement, est apparue en 1983, à la suite d?une initiative entamée en 1967. Le dispositif néerlandais de gestion du risque inondation vise à répondre à ce droit fonda- mental. Un recours peut être fait en droit administratif à ce droit fondamental par les citoyens et organisations. Annexe 3.1. Les catastrophes, moments fondateurs des politiques de prévention contre les inondations Les Pays-Bas sont situés dans un delta formé par quatre fleuves : le Rhin, la Meuse, l?Escaut et l?Ems. Actuellement, 26 % du territoire de ce pays sont situés sous le niveau moyen de la mer ; 59 % de ces terres, environ 70 % des 17,6 millions d?habitants de ce pays sont sous la menace d?une inondation, en particulier dans le Randstad, une conurbation formée par les villes d?Amster- dam, d?Utrecht, de Rotterdam et de La Haye. C?est cette même région qui produit le plus de ri- chesses, environ la moitié du produit national brut des Pays-Bas41. La valorisation des marais par des moines a commencé il y a plus de 1000 ans. Ce choix, couplé à plusieurs grandes tempêtes destructives dès les années 1000 à 1200, a donné naissance aux premières organisations démocratiques aux Pays-Bas : les organisations de gestion des eaux,« Waterschappen » ou « Wateringues » avant l?émergence de l?État central42. Des inondations de la Sainte-Elisabeth de 1424 ou celles de Saint-Félix en 1530 (surnommées le « quade saterdach » (mauvais samedi) faisant 100.000 victimes et rayant en grande partie de la carte Reimerswaal, grande ville de Zélande) jusqu?à nos jours, l?histoire néerlandaise est émaillée de nombreuses catastrophes liées à des inondations meurtrières ou à de dramatiques épisodes de submersion marine. Ces catastrophes ont fortement contribué à façonner la politique néerlan- daise de protection et de prévention contre les inondations. Les inondations du Zuiderzee des 13 et 14 janvier 1916 : en raison de fortes tempêtes, une grande partie du Zuiderzee, une ancienne mer intérieure, s'est déversée dans les terres, causant d'impor- tantes inondations dans les provinces de Frise et de Groningue. Cette catastrophe a par exemple conduit à réaliser une grande partie du Plan de 1891 de l?ingénieur Cornelis Lely, notamment la construction de 1927 à 1932 du barrage de l'Afsluitdijk (long de 32 kilomètres) destiné à fermer la 41 Source R. Slomp, Y. Friocourt, 2022. 42 Source : R. Slomp, 2012 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 53/107 Zuiderzee, à protéger les terres contre les inondations et à créer de nouveaux espaces agricoles et résidentiels grâce à l?aménagement de plusieurs polders (Noordoostpolder, polder de Flevoland du nord, polder de Flevoland du sud?). Le village de Schellingwoude pendant la crue Extrémité occidentale de l'Afsluitdijk Les inondations de la mer du Nord, dans la nuit du 31 janvier au 1er février 1953 : cette catastrophe, l'une des plus graves de l'histoire récente des Pays-Bas, présente dans tous les échanges avec les interlocuteurs néerlandais rencontrés, était le résultat combiné de fortes tempêtes et de très grandes marées. Les digues ont alors cédé dans de nombreuses régions, provoquant la mort de plus de 1.800 personnes, l?évacuation de 70.000 personnes, détruisant 4.500 habitations et en endommageant 50.000 autres, sans compter les 200.000 hectares de terres submergées par les flots qui, à certains endroits, atteignirent une hauteur de 4,5 mètres. PUBLIÉ https://fr.wikipedia.org/wiki/Schellingwoude Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 54/107 Cette catastrophe a provoqué un traumatisme durable aux Pays-Bas en matière de prévention des inondations. Le Premier ministre, Mark Rutte, rencontré à Paris début janvier 2024 en marge de l?hommage national à Jacques Delors, y a fait immédiatement référence lors d?une mention des inondations que venaient de connaître le Pas-de-Calais. Les pertes en vies humaines et les dégâts matériels considérables ont conduit le gouvernement à lancer le Plan Delta, un ambitieux projet de construction de barrages et de digues pour renforcer la protection côtière. Le Plan Delta a été l'un des projets d'ingénierie les plus importants de l'histoire des Pays-Bas et a radicalement transformé et artificialisé le paysage côtier. Des méthodes scien- tifiques d?analyse des risques ont été développées et utilisées pour instaurer des niveaux de pro- tection différenciés pour les populations en fonction des enjeux, le système de prévision des inon- dations a été revu. In : Gueben-Venière S, 201 Ce plan tire son nom de la région du delta des fleuves Rhin, Meuse et Escaut, où il a été mis en oeuvre. Le principal objectif du Plan Delta était de fermer les bras de mer, les estuaires et les PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 55/107 embouchures des principaux cours d'eau, créant ainsi une série de barrages et de digues pour empêcher les marées de pénétrer à l'intérieur des terres, et notamment : - le barrage de l'Escaut oriental (Oosterscheldekering), l'un des plus impressionnants du Plan Delta, long de 9 kilomètres, qui comporte une série de portes mobiles qui peuvent être fermées en cas de tempête pour protéger les terres intérieures des marées hautes. Ces portes restent cependant ouvertes la plupart du temps pour permettre la circulation des eaux et la préservation des écosystèmes. - le barrage de l'Hollands Diep (Haringvlietdam) a été construit pour fermer l'estuaire de l'Hollands Diep, réduisant ainsi le risque d'inondation dans la région de Rotterdam. - le barrage de Brouwersdam a été construit pour séparer le lac Grevelingen de la mer du Nord, créant ainsi un lac d'eau salée qui est maintenant utilisé pour la navigation de plai- sance et les sports nautiques. - Le barrage de la Veerse Gat (Veerse Gatdam) a été construit pour séparer le lac Veerse Meer de la mer du Nord, créant ainsi un lac d'eau douce qui est maintenant une zone de PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 56/107 loisirs populaire. Les inondations de 1993 et 1995 : ces inondations fluviales ont fait chacune plus d?une cinquan- taine de morts et d'importants dégâts matériels et ont nécessité l?évacuation de plus de 50.000 personnes : elles ont incité les autorités néerlandaises à intensifier leurs efforts de prévention des inondations et de renforcement des digues. Ces inondations ont mis en évidence des lacunes per- sistantes malgré les progrès réalisés avec le Plan Delta. Cela a incité le gouvernement à revoir et à renforcer les normes de sécurité des digues et des systèmes de drainage, ainsi qu'à investir dans des programmes de gestion intégrée des bassins hydrographiques. Le programme "De l?espace pour le fleuve" a été développé en réponse aux inondations de 1993 et 1995. Ce programme am- bitieux visait à réduire le risque d'inondation en permettant aux rivières de déborder de manière contrôlée dans des zones spécifiques, plutôt que de tenter de les contenir strictement derrière des digues élevées. Ce projet marque aussi la réussite d?une volonté de créer un espace plus large pour le cours d?eau en s?appuyant sur des qualités paysagères et environnementales : au-delà de la prévention du risque d?inondation, ce projet a permis la création et le développement d?espaces urbains attractifs, de qualité, respectueux de l?environnement. Il a par exemple permis de réaliser de nouvelles zones urbaines au bord de la rivière Waal, avec l?implantation d?un îlot en son centre doté d?espaces récréatifs. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 57/107 Les inondations de juillet 2021 : Bien que moins sévères que les catastrophes précédentes, les inondations de 2021 ont touché plusieurs parties des Pays-Bas, notamment la province de Lim- bourg, provoquant des évacuations massives et des dommages importants. Il s?en est fallu de peu que le bilan soit plus élevé (débits mesurés inédits sur la Meuse amont, avec certaines digues en limite de débordement ; mise en place accélérée de mesures de protection grâce à une large et intense mobilisation collective). Ces inondations ont souligné la vulnérabilité continue des Pays- Bas aux changements climatiques et aux événements météorologiques extrêmes. Cela a renforcé l'engagement du gouvernement néerlandais en faveur de l'adaptation aux changements clima- tiques, notamment par le renforcement des infrastructures de prévention des inondations et la pro- motion de mesures d'adaptation au niveau local. Comme l?indiquait le commentaire modeste de Robert Slomp (« nous avons mis deux ans à comprendre les événements de 2021 »), le change- ment climatique rend la prévision de moins en moins aisée et comme le mentionnait l?un des tech- niciens flamands rencontrés, « il s?agit désormais de se préparer à l?imprévisible ». Au-delà des stress tests territoriaux déjà engagés, une expertise a été conduite pour projeter ce qu?auraient été les conséquences du même phénomène météorologique s?il avait été centré sur les Pays -Bas, au lieu de la Wallonie et de l?Allemagne. Annexe 3.2. Des protections des premiers Plans Delta au Commissaire du Delta Annexe 3.2.1 La défense contre la mer Les grandes inondations de 1916 ont conduit à la décision de fermer le bras de mer dans le nord des Pays-Bas. Les inondations dramatiques de 1953 (Sud-Ouest) ont, elles, conduit à la décision de fermer des bras de mer dans le Sud, et au 1er « Plan Delta ». La protection contre la mer est passée, en effet, par la mise en place de grandes infrastructures, qui nécessitaient des moyens considérables, et par la structuration des responsabilités avec un seul type d?organisation pour leur construction et leur entretien, sur la base d?une publication des niveaux de protection définis par l?Etat en fonction des enjeux, et d?un processus de vérification des processus par les provinces. Le projet visait à améliorer la sécurité des zones de faible altitude des Pays-Bas contre les tem- pêtes les plus violentes et les inondations. Les dunes le long de la côte ont été réhaussées de plus de 5 mètres et les îles de la Zélande reliées par des digues et des ouvrages d'art. L'Escaut oriental devait être totalement fermé, ce qui aurait transformé l'ancien estuaire en lac d'eau douce. A la suite de nombreuses manifestations, il a été décidé de construire l'Oosterscheldekering, barrage de 9 km de long et le plus complexe du projet, qui peut être ouvert ou fermé pour protéger la baie, tout en gardant sa salinité, afin de pérenniser l'industrie de la pêche et la faune sauvage. Les 25 km d?ouvrages d'art ont réduit la côte maritime des Pays-Bas d'environ 700 kilomètres. Ce Plan a imposé des choix difficiles : ont été évoqués dans les échanges 1400 maisons ont été rasées en PUBLIÉ https://fr.wikipedia.org/wiki/Inondation https://fr.wikipedia.org/wiki/Dune https://fr.wikipedia.org/wiki/Z%C3%A9lande https://fr.wikipedia.org/wiki/Escaut_oriental https://fr.wikipedia.org/wiki/Oosterscheldekering https://fr.wikipedia.org/wiki/P%C3%AAche_(halieutique) Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 58/107 1996 à Rotterdam, pour la reconstruction de la digue, 3 maisons 2010 à Arnhem, 50 maisons entre 2010 et 2015 à Nimègue. La « Deltacommissie » (Commission du Delta), mise en place dès 1953, est passée de l?approche qui consistait à porter les digues 1 mètre au-dessus des derniers niveaux de crue observés à une analyse des risques d?inondation, pour déterminer des niveaux de risque acceptables au regard des différentes enjeux. Ce travail s?inscrit dans une approche plus générale qui classe chaque type d?événement considéré en fonction de sa plausibilité aux Pays-Bas et de ses conséquences sur la sécurité nationale. La probabilité d?une inondation majeure dans l?Ouest des Pays -Bas est relati- vement faible (environ 1/10 000 à 1/100 000 par an), mais les conséquences seraient destructrices pour les Pays-Bas. Une telle catastrophe, si elle touchait ne serait-ce que la Province de Hollande Méridionale (3,6 millions d?habitants), serait d?ampleur trop importante au vu des moyens actuels des services d?urgences, même assistés par des unités de l?Armée43. Le plan Delta demande plusieurs décennies de mise en oeuvre. Le plan initial est terminé en 1986 et a donné lieu à une évaluation finale présentant les coûts, les avantages et les inconvénients. Une nouvelle tranche de travaux, complémentaire au plan initial devait se terminer en 1997, puis la rehausse de toutes les digues pour être conforme à la norme néerlandaise en la matière se sont poursuivis jusqu'en août 201044. Au bout du compte, les dispositifs de protection contre les inondations, et notamment des systèmes d?endiguements, ont tenu, et tiennent encore, une place majeure dans la politique néerlandaise de gestion des risques d?inondations aux Pays-Bas. 95 systèmes d?endiguements («dijkringen» ou « cercles de digues ») constituent des lignes continues de défense contre les inondations (maritimes ou fluviales, ou même « lacustres » pour la mer intérieure d?Ijssel). Les niveaux de protection sont fixés par voie législative, initialement au regard d?une probabilité d?aléa naturel, à présent au regard d?une probabilité de décès pour un habitant de la zone protégée. Dans la sui te de ces grands programmes, plusieurs programmes pluriannuels se sont succédés (programmes de reconstruc- tion ou de réaménagement) qui fixent les montants de travaux et les clés de répartition. Annexe 3.2.2 La protection contre les inondations fluviales A la suite des catastrophes de 1993 et 1995 de débordement fluvial, les digues sur le Rhin et Meuse ont dû être réparées d'urgence, entre 1996 et 2001, dans la cadre du « Plan Delta pour les grands fleuves » adopté par le Parlement en 1996. Plus de 1000 km des digues ont été mis aux normes en 5 ans et 150 km de nouvelles digues construites en 2 ans le long de la Meuse, conférant ainsi à 20 000 personnes une protection supplémentaire. Si des réponses immédiates ont ainsi été apportées aux inondations, le retour d?expérience qui en a été fait a soulevé des limites de ces interventions d?urgence, avec la découverte de malfaçons et fragilités dans ces digues, qui ont été difficiles et coûteuses à traiter par la suite. Il est apparu aussi que les digues ne sont pas toujours « la » bonne solution. Annexe 3.2.3 L?articulation avec la place pour le fleuve, et le changement de cap opéré dans le contexte du changement climatique La prévention des inondations est un sujet de portée nationale, qui est entré dès 1953 dans une logique de programmation pluriannuelle. Cependant, un débat fondamental s?est instauré au fil du temps à propos des principes mêmes du plan Delta : le niveau de ces terres baisse et le niveau des océans augmente dans le contexte du changement climatique. Cela signifie que les digues 43 Sources : R. Slomp, 2012 ; IGEDD, nov. 2023 44 Source : Wikipedia et entretiens PUBLIÉ https://fr.wikipedia.org/wiki/Conformit%C3%A9_des_digues_aux_Pays-Bas https://fr.wikipedia.org/wiki/Mont%C3%A9e_des_eaux https://fr.wikipedia.org/wiki/Mont%C3%A9e_des_eaux Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 59/107 vont devoir être renforcées et rehaussées, créant davantage d'enfoncement du terrain. Certains estiment que des formes de recul seraient plus pertinentes, à long terme, qu'une bataille contre les eaux, d?autres que ce serait méconnaître une tradition ou un savoir-faire de lutte contre les élé- ments. 400 km de digues ont été réhaussées. Les orientations de la politique de prévention, dans le temps long, évoluent : par exemple, face à l?opposition à des approches prenant peu en compte les articulations avec les milieux naturels, des projets importants ont été abandonnés, comme celui d?un nouveau quartier artificiel près d?Ams- terdam. La nécessité d?intégrer une écoute des populations, d?entendre toutes les propositions, d?y consacrer du temps, a été largement reconnue. Encadré 11 : exemple d?outil de concertation Une démarche de modélisation des effets des idées ou propositions de chacun pour faire face aux inondations a été développée de manière à sensibiliser à la complexité du sujet : chaque solution locale est de nature à reporter l?eau en amont et en aval. Une vue d?ensemble est un préalable indispensable à toute solution. Ce type de dé- marche doit être mobilisé hors période de crise. Si la défense contre la mer à la suite de la catastrophe de 1953 a donné lieu à des travaux majeurs de système d?endiguement, qui sont partie intégrante de l?image des Pays -Bas, la question de la place à donner à l?écoulement des fleuves a été posée dès le plan 2001-2015 « De l?espace pour le fleuve ». Sur le Rhin et la Meuse, ce programme de travaux s?inscrit dans un paradigme nouveau : au lieu d?élever des digues, leur niveau a pu être abaissé en recourant à des mesures alternatives dont des zones d?expansion de crue et des élargissements de la place laissée au cours d?eau entre les digues. Les projets n?ont pas été réalisés dans le même cadre législatif : ils relèvent de la dé- marche de planification spatiale, et ont donné lieu à une évaluation économique. La prise en compte du changement climatique a été introduite dans le même temps. Cela a conduit à retenir des hypothèses d?augmentation de 60 cm du niveau de la mer et d?une augmentation de 15% des crues fluviales. La prise en compte d?un coefficient d?incertitude de 30 cm des hauteurs de crues est couramment faite. Depuis le programme Delta 2001-2015, la nécessité de relever les défis pour 2050 et 2100 a été identifiée. C?est un changement de cap majeur. Au lieu d?attendre une nouvelle catastrophe et mener un programme de réfection, les Pays-Bas tentent d?exploiter les savoirs disponibles sur le changement climatique, les besoins de l?économie et l?utilisation des sols pour anticiper des scénarios possibles. Ce programme se décline en 7 sous-programmes régionaux, ainsi qu?en trois sous-programmes nationaux : analyse des risques d?inondation ; gestion de l?eau (l?eau potable, l?eau pour l?irrigation et le drainage après des événements pluviométriques exceptionnels ) ; urbanisme et aménagement du territoire. Chaque sous-programme est assigné à un directeur et à une équipe composée d?agents des ministères, des agences régionales de l?eau, des provinces, et de certaines communes, des instituts de recherche, et d?entreprises privées. La loi Delta, du 1er janvier 2012, définit les pouvoirs, devoirs et responsabilités du Commissaire du Delta. Son rôle est : - Celui d?un facilitateur dans les interfaces entre l?État et les collectivités ; cela signifie qu?il prend toutes les dispositions pour fluidifier les échanges, assurer la pédagogie, remonter les informations lorsqu?il en identifie le besoin. Bien qu?il occupe une place centrale dans le dispositif, il ne dispose pas du pouvoir politique, qui relève toujours du ministère (lequel élabore conjointement avec les parties intéressées les plans et programmes). Il conseille le gouvernement, mais n?assure pas de mission d?expertise auprès des collectivités. - En tant que conseil du gouvernement, il soumet des propositions pour le programme national Delta, y compris dans ses composantes financières. Il recueille le soutien du public pour le pro- gramme Delta grâce à des interventions publiques et dans les médias. Chaque année, à l'ouverture nationale du Parlement en septembre, le Commissaire du Delta soumet une proposition de nou- velles recommandations et mesures pour le programme au ministre coordonnateur et aux autres PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 60/107 membres du cabinet concernés. Il organise les travaux des administrations, et les consultations des entreprises et des ONG impliquées. Les fonds du programme du Delta (Deltafonds), ne sont pas un budget dont dispose le commissaire : ils sont mobilisés pour financer les projets du pro- gramme du delta et soumis au contrôle des parlementaires. Au titre de sa mission de conseil, le commissaire peut participer au Conseil des affaires financières, économiques, des infrastructures et de l'agriculture en sa qualité d'expert. - Il suit les progrès de la mise en oeuvre du programme Delta, rend compte et conseille sur le rythme d?avancement. Il ne porte pas la responsabilité politique finale, qui incombe au Ministre de l'Infrastructure et de la Gestion de l'Eau. Il peut alerter de sa propre initiative si la progression du programme Delta n?est pas satisfaisante45. Annexe 3.3. Organisation de la prévention des inondations Annexe 3.3.1 Une gestion de l?eau et du risque intégrée à l?échelle ministérielle Comme dans de nombreux états européens, la répartition des compétences de prévention des risques naturels repose sur deux départements ministériels : le Ministère de Sûreté et de la Justice a la responsabilité de la gestion de crise et les compétences générales liées aux services de secours et de la sécurité ; le Ministère de l?Infrastructure et de l?Environnement est en charge de l?Aménagement du Territoire, de la prévention contre le risque d?inondation, de la protection contre les crues et de la gestion des cours d?eau, des lacs, des estuaires et du littoral. Les compétences relatives aux risques naturels liés à l?eau, à la défense contre la mer, à la sécurité correspondante des personnes et des territoires, et à la gestion des cours d?eau font l?objet d?une organisation spécifique et intégrée. L?agence nationale de l'eau, le Rijkswaterstaat, sous tutelle du ministère chargé des infrastructures et de la gestion de l'eau, supervise la construction, la gestion, l?entretien des infrastructures d'intérêt national, et conseille le gouvernement dans la planification stratégique et l?atténuation des risques à long terme. Elle gère les canaux de navigation, les cours d?eau principaux et établit la prévision des crues sur ceux-ci. Elle assure la maîtrise d?ouvrage des systèmes d?endiguements « primaires » correspondants (sur les grands cours d?eau ou fleuves et barrages anti-tempêtes sur les bras de mer les plus importants), mais n?en gère directement qu?une petite partie, le reste étant géré par district hydrographique. Elle est assistée par l?institut public technique et scientifique Deltares. Depuis 2001, les fonctions de gestion et d?inspection sont séparées dans ce domaine. - Les Pays-Bas sont situés à l?aval de cours d?eau dont les sources sont dans des pays voisins. Les plus importants de ces cours d?eau disposent d?instances de coordination multilatérales en application de textes internationaux (Rhin, Meuse, Escaut), chargées notamment de coordonner la mise en oeuvre de la directive européenne cadre sur l?eau et de la directive relative à l'évaluation et à la gestion des risques d'inondation. Ces commissions fluviales internationales constituent aussi le support du développement conjoint de dispositifs de prévision des crues cohérents et par- tagés sur les grands cours d?eau. Annexe 3.3.2 Une organisation spécifique pour la gestion de l?eau aux échelons territoriaux L?organisation territoriale générale, institutionnelle et administrative, des Pays-Bas repose sur 12 provinces et 388 municipalités, pour environ 17,5 millions d?habitants. Les provinces disposent d'une autonomie limitée ; elles sont compétentes sur le développement spatial et économique, la 45 Cette description cite largement le site du Programme national grand delta. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 61/107 politique environnementale, la gestion stratégique des eaux superficielles (en lien avec les munici- palités et en concertation avec les « waterschapen » Cf. infra), les transports en commun et l?éner- gie. Les 12 provinces sont, notamment, responsables de l?aménagement de leur terr itoire (espaces naturels, urbanisation, zones industrielles, transport et voies navigables régionaux). Les membres de chaque conseil provincial sont élus, chaque président du conseil « le Commissaire de la Reine » est nommé par l?État. Outre leur fonction en matière de gestion stratégique de l?eau, les provinces sont responsables des cartes d?aléa et de risque d?inondation. 21 « autorités locales de l?eau », les waterschapen (parfois traduits par « wateringues »), ont été constituées à partir de 2500 autorités historiques. Elles correspondent géographiquement à des districts hydrographiques, et sont centrales pour la gouvernance de l?eau et des inondations. Ces organismes disposent d?un conseil élu au suffrage universel pour cinq ans, qui identifie un président nommé par les autorités de niveau national, le « comte des digues » (Dijkgraaf). Ils gèrent les cours d?eau secondaires, et assurent la maintenance et la reconstruction de la plupart des systèmes d?endiguements et digues primaires ou secondaires, quel qu?en soit le propriétaire. Une loi de 1983 a précisé leur rôle. Financièrement autonomes, les waterschapen disposent d?un pouvoir régle- mentaire en matière de prévention des inondations et de protection des digues et des dunes, de surveillance du niveau et de la qualité des eaux, du traitement des eaux résiduaires urbaines, de la gestion des eaux souterraines. Ils fixent les taxes dues par les bénéficiaires, notamment pour la protection assurée par les digues et pour les émetteurs de pollutions. Les droits de votes sont établis en fonction des taxes payées, la population devant représenter au moins 50% des voix. Sauf exception, un seul waterschap intervient sur chacun des 95 systèmes d?endiguement. Les municipalités sont en charge notamment de l?occupation des sols et de l?urbanisme. Des règles strictes sont définies, au niveau national, qui concernent uniquement la construction dans les zones comprises entre les cours d?eau et les digues, ainsi que dans une bande (de largeur variable) derrière la digue. Les membres du conseil municipal sont élus. Le président du conseil « le maire/ bourgmestre», nommé par l?État, est responsable de la police et des autres services d?urgences. Si l?intégration de tous les enjeux relatifs à l?eau est très forte, la question des interfaces avec l?urbanisme, historiquement, a été moins forte et peu contraignante ? ceci pouvant aussi être lié à la densité et aux contraintes spatiales du pays. D?une manière générale, les règles de constructions font référence à des obligations génériques de stabilité dont le respect relève du maitre d?ouvrage. Il existe des guides techniques qui ne font pas office de prescriptions. Pour les habitations flottantes mises en oeuvre hors de la zone protégée, il est mentionné qu?elles sont construites « à vos risques et périls ». Annexe 3.3.3 Un financement des protections et de la prévention organisé dans une logique de subsidiarité Il existe une hiérarchie des protections. Les protections primaires du domaine de l?État (notamment les grands barrages) sont financées par le budget de l?État. - Les protections primaires du domaine des autorités régionales de l?eau sont entretenues par les autorités régionales de l?eau sur leur budget (notamment grâce à leur impôt propre) ; pour leur construction, le financement repose toutefois à hauteur de 45% sur le budget de l?État (via le pro- gramme HWBP de protection contre la submersion). En 1996, la loi sur les ouvrages de protection contre les submersions a mis en place des inspections techniques réglementaires donnant lieu à des rapports publics et la validation par le parlement du budget pour l?entretien des ouvrages. Encadré 12 : différenciation des systèmes d?endiguement en fonction des niveaux de protection Les digues sont classées en plusieurs catégories, ces classements étant régulièrement revus, avec, le cas échéant, des objectifs de protection modifiés, et des responsables et gestionnaires redéfinis. Sur le Rhin et la Meuse, le Rijkswaterstaat, organisme national, est maître d?ouvrage et gestionnaire des fleuves et grands cours d?eau. Par PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 62/107 contre la gestion de la plupart des digues correspondantes, classées « primaires », est assurée par les 21 « auto- rités locales de l?eau », les waterschapen. Ces organismes assurent par ailleurs la maintenance et la reconstruction des systèmes d?endiguements et digues secondaires quel qu?en soit le propriétaire. Pour des cours d?eau et digues régionaux, comme la Geul et la Roer, les « standards » génériques de protection, en durées de retour des événements de crues, sont de 10 ans pour des prairies, 25 ans pour des cultures, 50 ans pour l?horticulture, 100 ans pour les zones urbanisées. Dans le sud du Limburg, avec une population dense et des vallées pentues (pour les Pays-Bas), certaines zones urbaines comme Valkenburg par exemple, sont protégées contre des crues de période de retour 25 ans, notamment pour des raisons de coûts des ouvrages, semble-t-il. Ces zones ont été exposées en juillet 2021 à des crues plus que centennales. - L?entretien et le curage, qu?il a été difficile de différencier précisément lors des entretiens, des cours d?eau dépendent fortement de leur fonction. Les voies navigables font l?objet de valeurs seuil (étiage) qui justifient des interventions de curage immédiates en cas de perturbation du trafic. Les cours d?eau qui ont pour seul objet l?écoulement d?eau font aussi l?objet d?un suivi afin de res- pecter le gabarit inscrit dans le registre, mais sur une base annuelle seulement. Certains cours d?eau sont dépourvus de gabarit mais font l?objet de curages pour des raisons de qualité écologique et chimique du milieu aquatique : le curage permet de réduire la charge organique au profit du respect des objectifs de la directive-cadre sur l?eau. Pour les grands cours d?eau (Escaut, Meuse, Rhin), l?agence des travaux publics de l?État applique les normes inscrites dans un registre de gabarit (chenal de navigation et végétation maximale), ce qui se traduit par des interventions de curage mais aussi des interventions en certains points du réseau (notamment au droit des ouvrages d?art). Des mesures ont lieu chaque année pour vérifier le gabarit de chaque cours d?eau concerné et des travaux sont réalisés en cas de besoin. Le coût est porté par le budget de l?État. Pour les cours d?eau relevant de la compétence des autorités régionales de l?eau et les autres cours d?eau, une distinction est faite entre trois catégories de cours d?eau : - Catégorie A (domaine de l?autorité régionale de l?eau) : de façon similaire aux cours d?eau ma- gistraux entretenus par l?agence des travaux publics de l?Etat, les normes découlant d?un re- gistre de gabarit sont appliquées. - Catégorie B (cours d?eau sous propriété privée ou relevant du domaine d?autres collectivités) : l?entretien est assuré par les propriétaires sous le contrôle de l?autorité régionale de l?eau, qui intervient auprès du gestionnaire en cas de défaut d?entretien. - Catégorie C : (cours d?eau propriété de particuliers) : l?entretien est entièrement de la respon- sabilité des particuliers. Les autorités régionales de l?eau disposent d?un plan pluriannuel de curage visant à maintenir le gabarit prévu par le registre. Ce plan s?appuie sur un programme de mesures et sur les données historiques, qui permettent d?identifier les zones sujettes à sédimentation. Le financement de ces opérations est assuré en partie par l?impôt propre aux autorités régionales de l?eau et, lorsque les cours d?eau ou canaux ont une fonction touristique, économique ou de navigable (exemple : Eem), en partie par les municipalités et les provinces concernées, dans le cadre d?accords ad hoc. - Le financement de la gestion de l?eau repose sur l?impôt levé par les autorités régionales de l?eau, déterminé chaque année par chaque autorité régionale pour son propre territoire de telle sorte que les recettes couvrent le service rendu, impliquant que l?impôt varie d?une région à l?autre. Cela s?explique par la diversité des situations : les besoins de financement pour la gestion de l?eau ne sont pas homogènes sur le territoire néerlandais (certaines autorités ont plus de digues à en- tretenir que d?autres?). Le programme visant à recréer de l?espace pour la rivière a été financé par l?État, ponctuellement avec un cofinancement local (provinces) pour prendre en compte des fonctionnalités non prévues par le programme. La loi actuelle prévoit toutefois que le montant des impôts puisse être modulé sur la base de la valeur locative des immeubles, des espaces agricoles et des espaces naturels, laquelle peut varier dans le temps ; ainsi, le montant des impôts peut varier dans le temps pour un contribuable donné, PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 63/107 sans que le service rendu par l?autorité régionale ne change. En mars 2024, une proposition de loi sera déposée, répondant à une demande des autorités régionale de l?eau, permettant de moduler le montant des impôts non pas sur la valeur locative des biens mais sur les « caractéristiques » (destination, surface, etc.) des biens. Les ordres de grandeur sont les suivants : ? une taxe locale des autorités régionales de l?eau due par toute construction pour ? entretien de digues et dunes (?10 à 50 ¤/an) par maison ; ? entretien du système d?irrigation et de drainage (canaux et cours d?eau) ; ? le cas échéant : frais de pompage (?10 à 50 ¤/an) ; ? assainissement (?200 ¤/an). Pour la qualité des milieux aquatiques ; le principe du pollueur- payeur est ainsi appliqué, sécurisant le financement. Les réseaux appartiennent aux municipalités. ? Le budget gouvernemental pour les nouveaux ouvrages (?50 ¤/an), en particulier : ? en cas d?évolution des normes ; ? en cas de nouvelles connaissances ; ? pour tenir compte de l?évolution des contraintes et du dérèglement climatique (niveau de la mer, vent, crues des rivières). Aux Pays Bas, les habitants paient ainsi environ 200 euros par maison et par an pour l?assainisse- ment, 50 euros pour la gestion d?eau dans les zones protégées, 50 euros pour les stations de pompage, et 50 euros pour les investissements (50% provenant de fonds nationaux, 50% des fonds locaux à deux niveaux de responsabilité (40 + 10). La taxe doit recouvrir les frais, et vient en contrepartie d?un service. Depuis 1953, il y une solidarité entre zones ruraux et urbain. R. Slomp, lors d?un colloque à La Rochelle indique ainsi : « C?est très important, dans notre sys- tème, que l?entretien des ouvrages soit géré localement et quotidiennement par les autorités régio- nales de l?Eau. Ces autorités gèrent aussi tous les petits cours d?eau et toutes les petites digues. On a 3 600 km de digues principales et environ 15 000 km de digues régionales. Les gestionnaires ne sont pas propriétaires des digues. La propriété et la gestion ont été séparées dans certains cas pour faciliter l?action. Celui qui gère une petite digue soit s?occuper de son entretien pareil pour un petit cours d?eau, et cela réduit la taxation. Si un paysan nettoie sa propre canalisation pour le drainage et l?irrigation autour de ses champs, il évite l?amende qu?il aurait s?il ne le faisait pas. C?est un système qui articule travail volontaire et taxation pour le service reçu. Cela représente en tout 400 euros par année et par habitant. Un agriculteur qui a plus de terrain paie plus ; ce système date du XIIIème siècle. » Annexe 3.4. Une gestion de crise fondée sur des principes clairs et partagés - La gestion de crise, selon son étendue, dépend du niveau communal, du niveau de « régions de sécurité », ou du niveau national. Concernant la sécurité civile, le commissaire du roi au niveau provincial exerce une fonction de coordinateur du maintien de l'ordre public et de la gestion des opérations de secours lors de catastrophes dépassant les limites d'une commune. La responsabilité opérationnelle de la sécurité publique est portée par les 25 « régions de sécurité», conseillées par les waterschapen quand il s?agit d?inondations. Elles donnent mandat aux maires de décider des évacuations. Ces régions sont présidées par un maire (habituellement un maire de commune importante). Elles correspondent aux régions de police, avec qui elles partagent le même président, et coordonnent les services de secours municipaux et les autorités de santé, en crise. Beaucoup de membres des équipes de secours sont des volontaires. La coordination nécessaire entre l?assistance des services d?urgence et de l?armée est assurée par le Ministère de Sûreté et de la Justice. Chaque ministère dispose d?une cellule de crise «DCC ». Le Ministère de Sûreté et de la Justice est chargé de leur coordination. - Les bulletins de l?institut national de météorologie, sont adressés aux structures en charge de la PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 64/107 prévision des crues, toutes les 6 heures avec des messages spécifiques en cas de crise, qui font référence aux conditions hydrauliques utilisées dans les modèles, permettant de se situer par rap- port au risque de rupture des protections. Si ces bulletins sont publics, des messages d?urgence sont adressés aux autorités régionales de l?eau, qui en fonction de leurs analyses informent la région de sécurité. En termes de communication de crise, les experts néerlandais insistent sur la nécessité de s?ap- puyer sur un seul « point of truth » : seule l?autorité compétente (l?autorité régionale de l?eau) a la capacité d?interpréter les bulletins et les messages d?urgence provenant du centre de crise sur la gestion de l?eau. C?est un des enseignements tirés de l?expérience des inondations de 2021 dans le Limbourg ; la région de sûreté a fait évacuer un hôpital (237 malades) sans que les autorités compétentes en matière hydraulique ne l?estiment nécessaire, ce qui en temps de COVID a créé des risques sanitaires jugés « inutiles ». - En situation de pré-crue, pour que les digues assurent leur fonction de protection, il est nécessaire de renforcer certains points, de fermer de façon étanche certains passages (par exemple un pas- sage routier sous un remblai routier ou ferroviaire faisant fonction de digue, ou une interruption dans une digue pour le passage d?une voie de circulation). L?ensemble de ces actions prennent habituellement 5 jours de travail. Par ailleurs, pendant une crise, un dispositif de surveillance et d?intervention sur les digues est prévu, qui mobilise des professionnels, notamment les inspecteurs de digues, aidés par des gardiens de digues volontaires qu?ils encadrent, forment et réunissent une fois par an. Certaines autorités régionales de l?eau recourent, en effet, à des bénévoles pour la surveillance des digues mais aussi, conjointement avec leur personnel administratif, pour la fer- meture de certains batardeaux et pour le renforcement de digues en cas d?urgence (sacs de sable). Pour la préparation aux situations de crise mais aussi pour l?inspection des digues, des formations sont prodiguées par les autorités régionales de l?eau en mobilisant le cas échéant des entreprises qualifiées. Ce dispositif a été globalement efficace lors de inondations de 2021. En certains endroits, il s?en est fallu de quelques centimètres que l?eau ne dépasse le haut de la digue, ou le haut de la rangée de sacs de sable ajoutée. S?il y avait eu du vent, plusieurs digues auraient surversé. Sur la Meuse, l?eau a pu dépasser le niveau de la digue du système « primaire », heureusement renforcée par des sacs de sable. Des évacuations préventives importantes ont néanmoins été mises en oeuvre. - La mise en place de pompages d?urgence relève des gestionnaires des systèmes concernés (l?État pour les grands fleuves, les autorités régionales pour les autres cours d?eau). Il est possible que les régions de sûreté (autorités intercommunales, présidées par le maire de la ville principale, chargées de la sécurité civile) sollicitent le recours aux pompages d?urgence des autorités régio- nales de l?eau lorsque des incidents locaux se produisent et que les pompages pérennes en place et les équipements des pompiers ne suffisent pas. Le Centre national de coordination opérationnel de l?Agence de travaux publics de l?État, au niveau de l?État, est responsable de la gestion du parc de pompes d?urgence, mobilisées pour les crises nationales (et internationales). Le dimensionne- ment du parc est fondé sur une analyse portant sur la période 2003-2007 et sur des études de gestions des catastrophes naturelles. De ces dernières, il est apparu, par exemple, que les pompes historiques, montées sur des barges flottantes, n?étaient pas adaptées pour une mise en place rapide, justifiant leur remplacement par des pompes au format conteneur. Au niveau local, les autorités régionales de l?eau réalisent leurs propres analyses sur le besoin en pompes d?urgences, et les financent par leurs propres moyens. La capacité des pompes d?urgence est négligeable par rapport à celles des pompes pérennes, sur lesquelles les investissements sont privilégiés. Par exemple, suite aux inondations de 1998 (à Na- gele), l?autorité régionale de l?eau compétente a rehaussé de 60% la capacité de ses pompes pé- rennes. Les experts estiment que les pompes d?urgence sont mobilisées à des fins de communi- cation politique pour afficher la mobilisation de tous les moyens pour résoudre une situation de PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 65/107 crise46. Les pompes d?urgences néerlandaises sont également mobilisées en cas de sécheresse, lorsque les ouvrages le long des grands fleuves, destinés à alimenter en eau les systèmes hydrauliques locaux, se trouvent « à sec » du fait de niveaux d?eau trop faibles dans les fleuves. Annexe 3.5. De la prévention des inondations à l?adaptation au changement climatique En novembre 2023, les Pays-Bas ont connu une pluie constante pendant plusieurs semaines. Si cela permet de reconstituer les nappes, cela a posé des problèmes de sécurité du bâti. Cet épi- sode souligne aussi qu?est posée, plus qu?avant, la question de la place laissée au fleuve et la recherche de nouveaux équilibres. Au lieu d?évacuer le plus vite possible l?eau à la mer, un nouvel enjeu, au regard des risques de sécheresse est de la retenir. Le premier moyen pour cela identifié aux Pays-Bas est l?infiltration dans les sols et la recharge des nappes, et non la création de bassins de rétention, qui, de toutes façons sont difficiles à gérer car ils ont potentiellement deux objectifs difficilement compatibles : être vides pour écrêter les crues et retenir l?eau pour l?utiliser l?été. Dans deux ans, sont prévues de nouvelles décisions sur ce sujet, sur la base de nouveaux scenarios. Ce travail s?appuie sur des concertations, il sera présenté par le Commissaire au plan Delta et donnera lieu à des décisions du gouvernement. Le travail de planification spatiale au regard du changement climatique vise à travailler sur les limites que nous donne la nature, limites qui sont atteintes. Une priorité identifiée depuis 2021 est de mieux prendre en compte l?eau et les sols. Cela a été porté par le nouveau gouvernement, puis a donné lieu à un « policy brief » aux chambres, présentant les actions prévues en grandes lignes, à une revue scientifique, et à des discussions avec tous les niveaux de gouvernement. Sept principes sont arrêtés : - ne pas reporter de charge sur les générations futures ; - mieux prendre en compte les situations extrêmes ; - avoir une approche cohérente des inondations, de la sécheresse, des sols ; - avoir une « sécurité multicouche » dans la zone du delta ; - diminuer l?imperméabilisation, l'excavation, éviter les contaminations ; - avoir une approche intégrée de la vie dans l'environnement ; - se conformer à ces principes, les expliquer. Sur cette base, les pratiques vont changer : - prendre en compte les intérêts de l'eau et du sol pour des projets de construction dans la durée ; - avoir une utilisation parcimonieuse de l'eau, une eau propre et en quantité suffisante, des espaces pour retenir, stocker et évacuer l?eau ; - avoir un sol et un sous-sol sains et bien organisés. L?ambition est que : - la construction de bâtiments adaptés au climat devienne une pratique courante ; - des orientations nationales claires s?articulent avec une mise en oeuvre et des solutions locales ; - les système de l'eau et du sol guident la planification et les décisions ; - les solutions utilisées résolvent, autant que possible, plus d'un problème. 46 Des capacités de pompage d?urgence sont également développées pour parer à certains scénarios prévus dans le cadre de plans de gestion du risque. Par exemple, dans le Brabant septentrional, le choix a été fait par l?État de rehausser le niveau d?eau dans le grand lac Volkerak Zoommeer, qui sert de stockage d?eau douce pour les étés secs ; ce choix a eu pour effet de diminuer la capacité d?évacuation gravitationnelle des eaux provenant du système hydraulique local ((autorité régionale de l?eau Brabantse Delta), d?où la nécessité d?adjoindre des pompes d?urgence (mobiles, mais installées dans des sites prévus à cet effet le long du lac). Compte tenu du contexte (choix de l?État de rehausser le nveau du lac), les pompes d?urgence de l?autorité régionale de l?eau ont été financées par l?État dans ce cas précis PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 66/107 Six items guident une construction adaptée au changement climatique : prise en compte de la biodiversité, chaleur, submersion, inondation et ruissellement, sécheresse, biodégradabilité. Des lignes directrices ont été établies à l?échelle nationale, qui n?ont pas, pour le moment, de portée réglementaire. Leur ambition est de donner des orientations nationales claires, mises en oeuvre par les collectivités, et les activités. Ces principes pourraient, à terme, relever de la loi pour ac- croître leur portée. Dans le cas de projets de construction, et du choix des lieux où construire sont pris en compte, la compensation requise si on construit en zone inondable a été augmentée. Une carte a été établie qui fixe les contraintes pour l?aménagement, en fonction des enjeux liés à l?eau et aux sols. Au-delà de ce travail structurel de planification, une démarche que l?on pourrait qualifier de pros- pective et pragmatique a également été engagée dans le cadre du Programme Delta, sous l?égide du Commissaire. Encadré 13 : Le Programme Delta « Depuis déjà une dizaine d?années, les Pays-Bas ont mis en place une structure afin d?anticiper les effets du changement climatique sur le plan de la maîtrise de l?eau, il s?agit du programme Delta. Ce programme est le fruit d?une collaboration entre l?État, les provinces, les wateringues, les communes et des organismes de recherche. Y sont également impliqués les secteurs économiques dépendant de l?eau. Ce pro- gramme est coordonné par le commissaire pour le Delta, un haut-fonctionnaire indépendant du gouvernement. Il est financé par des fonds publics dédiés. Cette indépendance politique et financière, inscrite dans la loi et, de ce fait, approuvée par le Parlement, garantit une certaine protection à cette structure, ainsi qu?une mise à l?abri des alternances électorales et des réductions budgétaires qu?elles peuvent décider. Chacun au sein du programme est encouragé à rechercher et à évaluer les mesures qui rendront la maîtrise de l?eau et son utilisation plus pérennes, sans que soient mis en péril les enjeux économiques dépendants des ressources en eau. Le principe de base est celui des chemins d?adaptation (Haasnoot et al., 2013), dans lesquels les mesures identi- fiées et jugées prometteuses sont mises en place graduellement, au fur et à mesure que le besoin s?en fait sentir, et en consolidant les mesures prises précédemment afin de ne jamais avoir à revenir en arrière. (..) Le gouvernement néerlandais a lancé en 2019 un grand programme de recherche afin d?en comprendre les conséquences possibles sur les stratégies actuelles de maîtrise de l?eau au-delà de 2100. Le but est d?appréhender comment ces stratégies doivent être modifiées au fur et à mesure que le niveau des mers montera de 5 mètres. Le programme, qui doit durer jusqu?en 2025, s?articule autour de cinq axes : ? À quelle vitesse le niveau des océans risque-t-il de monter ? La situation en Antarctique est un élément clé et dépendra des évolutions des émissions mondiales de gaz à effet de serre, telles que conceptualisées dans les scénarios Representative Concentration Pathway (Van Vuuren et al., 2011). ? Quels sont les défis posés par une hausse du niveau de la mer de 1, 2, 3 et 5 mètres ? Dans quelle mesure les PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 67/107 stratégies actuelles sont-elles tenables ? Cette partie concerne à la fois la stratégie de gestion des risques d?inon- dation et celle de l?approvisionnement en eau. ? Comment détecter une accélération de la hausse du niveau de la mer afin d?agir à temps ? ? Quelles seraient les conséquences d?une hausse du niveau de la mer sur les stratégies à long terme d?aménage- ment du territoire ? Et comment les anticiper dans les choix à faire aujourd?hui ? L?implantation de nouveaux quar- tiers se situant 7 mètres au-dessous du niveau de la mer est certes faisable économiquement et techniquement, mais est-ce un choix pérenne ? ? Comment élaborer une politique reposant sur la mise en place de mesures par étapes ? Comment organiser la gouvernance de cette politique, la communication à destination du grand public, etc. ? » PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 68/107 Annexe 4. La prévention des inondations en Belgique La prévention des inondations en Belgique, tout en s?inscrivant dans le cadre des directives européennes, relève très largement des régions, le niveau fédéral étant en charge de ce qui relève de la submersion marine. Même si cela peut induire des différences entre Flandre et Wallonie, des points communs ressortent dans des tendances de fond, comme une évolution d?une démarche de protection à une approche de la prévention par l?aménagement des territoires, et en particulier de la place laissée aux cours d?eau ou encore d?une attention croissante portée aux conditions d?urbanisation. Si la « Water Bomb » a touché dramatiquement la Wallonie, les suites de cette catastrophe ont conduit à un travail de fond, pluridisciplinaire et partenarial, tant en Wallonie qu?en Flandre. Dans la durée, un virage de la prévention des inondations vers l?adaptation au changement climatique est engagé. Annexe 4.1. Mise en perspective historique et géographique Annexe 4.1.1 Un pays présentant des enjeux différenciés du point de vue de la prévention des inondations Le territoire belge comprend, soit en totalité soit partiellement, 6 bassins hydrographiques : l?Yser, l?Escaut, la Meuse, le Rhin, la Seine et le bassin côtier de la Mer du Nord. Leur ampleur sur le territoire belge donne un statut particulier aux districts internationaux de la Meuse (avec la France, l?Allemagne, les Pays-Bas et le Luxembourg) et de l?Escaut (avec la France et les Pays-Bas). La gestion des eaux comporte donc, en Belgique, des enjeux transfrontaliers importants sur plu- sieurszones : Escaut et l?Yser (dont les enjeux relèvent de la Commission Internationale de l?Escaut (CIE) qui unit 6 parties contractantes) ; les Moëres, bande poldérisée entre Dunkerque et Furnes, où est en cours le projet INTERREG - MAGETEAUX qui a été mobilisé en novembre 2023 afin d?assurer l?évacuation des eaux via le canal de Furnes à la mer par Dunkerque ; et la nappe des calcaires carbonifères dans le Tournaisis et de la région de Roubaix-Tourcoing. Encadré 14 : Quelques repères sur la Flandre et la Wallonie La Flandre belge constitue, comme le Nord de la France et les Pays-Bas, une zone poldérisée, plate, au niveau de la mer, qui sur 13.626km² accueille 6.774.807 habitants (soit 497 habitants /km²). Elle fait partie de 2 districts hy- drographiques : l?Escaut et la Meuse. - Le district hydrographique international de l'Escaut a une superficie de 36.500 km², dont environ un tiers se trouve en Flandre. La partie flamande est formée par le bassin hydrographique des rivières Escaut et Yser et de leurs affluents et des Polders de Bruges, ainsi que par les eaux souterraines et les eaux côtières qui y sont associées. Elle comprend les provinces de Flandre occidentale, de Flandre orientale et du Brabant flamand, ainsi qu'une partie des provinces d'Anvers et du Limbourg. Sur les 300 communes flamandes, 263 se trouvent entièrement et 23 partiellement dans le district hydrographique de l'Escaut. Le district est divisé en dix bassins. En raison du relief essentiellement plat, les rivières sont des cours d'eau de plaine avec de larges vallées et des vitesses d'écoulement et des débits faibles. La zone est densément peuplée et fortement urbanisée et se caracté- rise par un réseau très dense de routes de transport. Cette situation, qui s'ajoute à l'urbanisation, crée une forte fragmentation. Le district abrite un certain nombre de grandes zones industrielles, dont le port d'Anvers. L'agricul- ture intensive est également prédominante, représentant un peu moins de la moitié de l'utilisation des sols. Les grandes zones naturelles d'un seul tenant sont rares. - Le district hydrographique international de la Meuse couvre une superficie d'environ 34 500 km², dont à peine 1 600 km² en Flandre. En Flandre, le district hydrographique est constitué de la Meuse et de ses affluents, ainsi que des eaux souterraines associées. Le district ne forme pas un ensemble contigu en Flandre : une partie est située au nord de la province d'Anvers, une deuxième partie à l'est de la province du Limbourg et une troisième partie à Voeren. Sur les 300 communes flamandes, 14 se trouvent entièrement et 23 partiellement dans le district hydro- graphique de la Meuse. Sur les 11 bassins, seul le bassin de la Meuse appartient au district hydrographique de la Meuse. Parmi les six systèmes d'eaux souterraines, l'ensemble du système de la Meuse, une petite partie orientale du système de Brulandkrijt et la partie septentrionale du système de la Campine centrale appartiennent à l'arron- dissement hydrographique de la Meuse. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 69/107 Le relief de l'arrondissement de la Meuse est essentiellement plat. La densité de population y est plus faible que dans le reste de la Flandre. Le réseau de routes de transport y est également moins dense. Les principales zones industrielles sont situées le long des canaux. Un peu moins de la moitié du territoire est consacrée à l'agriculture, essentiellement intensive. Il y a un peu plus de zones naturelles dans le district du bassin de la Meuse que dans le district du bassin de l'Escaut. - La Wallonie,16 901 km2, est constitué de cinq provinces : le Brabant wallon, le Hainaut, Liège, le Luxembourg et Namur. En superficie, la plus grande est la province de Luxembourg qui est également la moins peuplée des cinq avec une densité de population de 64,54 habitants au km², tandis qu?elle est de 372,43 habitants au km² dans le Brabant wallon. Le territoire est également divisé en 20 arrondissements, eux-mêmes divisés en communes. Sur les 262 communes en Wallonie, 65 portent le titre de Ville. À l'exception de la province du Brabant wallon, au sud de Bruxelles, et une grande partie du Hainaut à l'ouest, qui jouxte la France, le reste de la Wallonie ? sauf deux ou trois enclaves, notamment du côté du Grand-Duché de Luxembourg ? appartient au bassin mosan47. Le système fédéral belge conduit historiquement à une répartition complexe entre les différentes structures politico-administratives des compétences mises en jeu par la prévention des inondations, entendue au sens large, de l?aménagement du territoire à la planification des crises. Les inondations meurtrières de l?été 2021 ont créé un choc et ont suscité des critiques sur la ca- pacité du dispositif en place à anticiper et répondre à des événements de cette ampleur. De nom- breuses actions sont en cours, notamment pour répondre à des impératifs de coordination accrue et plus efficace. Une commission d?experts en matière de gestion de crise a établi un livre blanc « Recommandations permettant d?améliorer la gestion de crise en Belgique » en avril 2023. Annexe 4.1.2 Des enjeux transfrontaliers majeurs Ces enjeux sont structurés dans différents cadres : - Par l'autorité de bassin de l'Yser, pour ce qui concerne la concertation bilatérale transfronta- lière autour de l'Yser, notamment en ce qui concerne la qualité de l'eau. - Par le Groupement Européen de Coopération Territoriale, pour la concertation transfronta- lière autour de l'Aa. Ces consultations s'inscrivent dans le cadre du groupe de travail sur l'eau du GECT. L'adaptation du "Moerenverdrag" est née au sein de ce groupe de travail, tout comme le projet Interreg Ma- geteaux, qui a mis en oeuvre une station de pompage sur le Speievaart vers le canal Nieuport - Dunkerque et une construction de glissières à Dunkerque. - Dans le projet Stratégique Vallée de l?Yser et du Handzame (province chef de file) avec les préparatifs en vue de la soumission du projet Provaly (Interreg) concernant le système transfron- talier de prévision et d'alerte, l'aménagement des berges, le GOG Proven, la de Stavele, etc. - Par la Commission Internationale de l'Escaut et, en particulier le groupe de travail hydrologie. La mise en oeuvre du plan pluriannuel ISC-CIE WGH 2022-2027 a commencé avec : - Le travail de préparation des bilans hydriques pour les principales masses d'eau transfrontalières, avec un rapport de la délégation flamande. Les délégations étudient maintenant ce rapport afin d'évaluer dans quelle mesure elles peuvent fournir des données pour les différents éléments du bilan hydrique et/ou si des éléments supplémentaires doivent être ajoutés. - La notification d'étiage a été standardisée et le calendrier de livraison des données a été synchro- nisé. - Les délégations néerlandaise, flamande, bruxelloise et française ont fait des présentations sur l'impact du changement climatique sur les masses d'eau. - Dans le cadre de l'atelier conjoint sur l'hydrométrie, un répertoire des personnes à contacter en 47 Source : Wikipedia PUBLIÉ https://fr.wikipedia.org/wiki/Province_du_Brabant_wallon https://fr.wikipedia.org/wiki/Province_de_Hainaut https://fr.wikipedia.org/wiki/Province_de_Li%C3%A8ge https://fr.wikipedia.org/wiki/Province_de_Luxembourg https://fr.wikipedia.org/wiki/Province_de_Namur https://fr.wikipedia.org/wiki/Densit%C3%A9_de_population https://fr.wikipedia.org/wiki/Arrondissement_administratif_de_Belgique https://fr.wikipedia.org/wiki/Commune_(Belgique) https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_communes_de_la_R%C3%A9gion_wallonne https://fr.wikipedia.org/wiki/Ville_de_Belgique https://fr.wikipedia.org/wiki/Brabant_wallon https://fr.wikipedia.org/wiki/Bruxelles https://fr.wikipedia.org/wiki/Province_de_Hainaut https://fr.wikipedia.org/wiki/France https://fr.wikipedia.org/wiki/Luxembourg_(pays) Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 70/107 cas d'inondation a été lancé, ainsi qu'un aperçu des procédures de travail et de la documentation des organigrammes sur la gestion de crise en cas d'inondation. - Une visite de travail 2023 s'est concentrée sur les mesures de prévention des inondations dues aux marées à Ostende. - Les travaux sur l?alignement bilatéral des principaux cours d?eau transfrontaliers se poursuivent. - Les délégations ont été invitées à fournir une vue d?ensemble des cartes d?inondation natio- nales/régionales afin de relier les plaines inondables transfrontalières. Concrètement, fin décembre 2023, il a été convenu lors de la réunion des chefs de délégation que la Flandre et la France mettent en place une coopération bilatérale pour, d?une part, avoir une vision globale des accords et des conventions entre les gestionnaires de l?eau et vérifier que les mesures de gestion de crise sont suffisamment adéquates et, d?autre part, élaborer un plan d?action transfrontalier tant en termes de planification que de dispositions pour laisser un espace suffisant Room for the River) à l?eau afin de réduire ou d?éviter les risques d?inondation. Annexe 4.2. La gestion de l?eau dans le système fédéral belge Annexe 4.2.1 Le rôle important des régions La Constitution belge et la Loi spéciale de réforme institutionnelle du 8 août 1980, suivie des réformes successives de l?État belge, fixent la répartition des compétences entre l?État fédéral, les Communautés (Communauté française de Belgique/Fédération Wallonie-Bruxelles, Communauté flamande, Communauté germanophone de Belgique/Ostbelgien) et les Régions (Région wallonne, Région flamande, Région de Bruxelles-Capitale), qui constituent ensemble les « entités fédérées ». Les régions ont des compétences dans les domaines qui touchent à l?occupation du territoire au sens large, aux « matières économiques et localisables ». Les communautés sont en charge de ce qui concerne les personnes (matières personnalisables comme la langue, l?éducation, la culture, le sport, l?aide aux personnes). Compte tenu de cette répartition des compétences, la politique belge en matière de prévention et de gestion des inondations et des phénomènes de submersion ? de l?aménagement à la gestion de crise ? relève de différents cadres normatifs, équivalents en termes de hiérarchie des normes, et de différentes autorités qui doivent se concerter. Les Régions, depuis 1980, sont compétentes en matière d?aménagement du territoire et à ce titre, de la politique de l?eau, de la gestion des districts hydrographiques, de la conservation de la nature, des travaux publics et des transports. Les principaux outils juridiques en matière de politique de l?eau sont, en Belgique, des décrets pris par les gouvernements régionaux : il s?agit, pour la Flandre, du décret « Politique intégrale de l?eau » du 18 juillet 2003, codifié dans le Code de l'eau, pour la Wallonie, du décret relatif au Livre II du Code de l?Environnement constituant le Code de l?Eau du 27 mai 2004 et pour Bruxelles-Capitale, de l?ordonnance du 20 octobre 2006 établissant un cadre pour la politique de l?eau. Ces trois textes transposent les directives européennes 2000/60/CE (« Directive-cadre sur l?eau ») et 2007/60/CE (« Directive Inondation »). L?État fédéral intervient cependant dans la mise en oeuvre de la directive-cadre pour les aspects liés aux eaux côtières, en particulier pour la Mer du Nord. Cette structuration se traduit par une démultiplication des participations représentant la Belgique, dans les différentes instances, par exemple, dans celles dédiées à la gestion transfrontalière de l?eau. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 71/107 Annexe 4.2.2 Une organisation de la gestion de crise par niveaux de gravité Si les Régions sont en charge de l?aménagement du territoire et interviennent donc, au sens large, dans la prévention des catastrophes naturelles, la gestion de ces dernières stricto sensu n?est pas de leur ressort. Le modèle belge de gestion de crise est fondé sur la distinction de plusieurs phases définies par le niveau de gravité, l?ampleur géographique et le type de moyens requis : la phase communale, dirigée par le bourgmestre ; la phase provinciale, dirigée par le gouverneur ; la phase fédérale, qui dépend du Ministre de l?Intérieur. La continuité et l?évaluation des critères de passage d?une phase à l?autre sont assurées par le Centre de crise national (NCCN), qui est un acteur interfédéral. Le NCCN est en outre chargé, au niveau national, de développer une stratégie globale d?amélioration de la résilience de la Belgique (élaboration de méthodologies standards pour les acteurs locaux, lancement de campagnes de prévention?), d?organiser la planification d?urgence et d?assurer une vigilance active. Encadré 15 : le NCCN (Centre de crise national) Le NCCN est en charge de la planification d?urgence, pour l?ensemble des risques, au niveau stratégique. Il n?a pas de rôle opérationnel : par exemple, la question du pompage en gestion de crise relève de la direction générale de la sécurité civile. A l?échelle locale, ce sont les bourgmestres qui sont en charge de la crise. Le NCCN fournit le contenu de la formation, d?une grosse demi-journée, mise en place pour les bourgmestres nouveaux. Nécessaire même s?ils ont des experts auprès d?eux, elle est prévue tous les 4 ans mais pas obligatoire. Le NCCN a des échanges en crise avec les gouverneurs via les experts et coordinateurs. Les remontées d?info au NCCN se font via les gouverneurs. Le niveau fédéral est facilitateur et coordonnateur mais n?a pas autorité sur les autres. Les bourgmestres ont accès à l?application SI en gestion de crise, avec des droits gérables pour avoir le cercle de travail efficace. La communication en crise repose sur un contrat cadre pour appeler les personnes en cas d?urgence ? il vaut pour les bourgmestres, gouverneurs NCCN. Le principe est que celui qui gère la crise communique ? les autres ne peuvent que renforcer ou décliner les informations principales. La cellule de communication du NCCN propose des messages et fait une veille des réseaux sociaux. C?est le NCCN qui évalue le besoin de mobilisation de moyens nationaux, toutes les remontées de demandes se font par écrit dans une application informatique, en cours de modernisation. L?assurance de moyens suffisants repose sur le fait que chacun en a et qu?il y a, en plus, un stock national. La crise covid a fait ressentir le besoin d?objectiver les ressources disponibles ; c?est un travail en cours, qui inclut les pompes. Il faut tenir compte du fait que des moyens existants ne sont pas nécessairement disponibles ou mobilisables, et qu?il faut réussir à mutualiser au bon niveau, pour n?être ni en manque, ni en sur capacité. En termes de mutualisation possible ou soutien entre états, les plus efficace serait des achats au niveau de l?UE. La planification en matière de sécurité civile incombe ainsi au premier chef au bourgmestre (maire d?une commune), qui doit disposer d?un Plan général d?urgence et d?intervention (PGUI) comprenant les directives générales de gestion des situations d?urgence de tout type. C?est le bourgmestre qui décide d?éventuelles évacuations. Il s?appuie sur des coordinateurs de situation d?urgence dont c?est le seul métier, quitte à le faire pour plusieurs communes. Toutefois, dès lors que la gestion d?un événement excède les pouvoirs et les moyens dont disposent les bourgmestres, c?est la province, qui intervient. Les provinces sont un pouvoir local, en général placé sous l?autorité des Régions. Par exemple, les inondations de novembre 2023 ont été gérées au niveau provincial et les inondations de l'été 2021 ont été gérées au niveau fédéral. Le secours aux personnes et la sécurité civile sont des compétences fédérales à peu près exclusives, dont l?organisation est déléguée aux pouvoirs locaux que sont les provinces et les communes. Ce principe de délégation dissocie donc la compétence fédérale des moyens fédéraux : les services de secours centraux de l?État fédéral (dit « moyens spéciaux » : unités spécialisées de la police et des pompiers, hélicoptères?) constituent une réserve à l?appui des services de secours locaux. Autrement dit, les services fédéraux peuvent être sollicités par les Régions ? ainsi que par les autorités communales et provinciales ? pour la mise en oeuvre de mesures particulières en PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 72/107 gestion des crises ou des situations d?urgence, ou pour l?établissement des plans d?urgence et d?intervention. Cette configuration implique que les aspects concrets de la gestion de crise et le besoin de planification qui en découlent, dépendent ? d?une façon particulièrement aiguë en Belgique ? de la bonne coordination opérationnelle entre les différents niveaux de pouvoir. En effet, la totalité des implications d?une catastrophe naturelle excède nécessairement les compétences exclusives de chacun. Encadré 16 : Prévision des inondations et alertes Les prévisions météorologiques sont réalisées par l?Institut royal de météorologie (organe fédéral) et l?analyse des paramètres hydrologiques incombe aux Régions. Ainsi, le service opérationnel de prévision des crues de Flanders Hydraulics (HIC - Centre d'information hydrologique) et de l'Agence flamande pour l'environnement utilisent une grande variété de données météorologiques en combinaison avec des modèles hydrologiques et hydrauliques 1D/2D pour fournir des prévisions de niveau d'eau et de débit sur les voies navigables et non navigables catégorie 1) flamandes et le long de la côte belge. Des experts interprètent quotidiennement la situation et communiquent des messages sur waterinfo.be. En cas de crise, ces messages sont activement diffusés pour la gestion de crise et les services d'urgence. Waterinfo.be intègre actuellement 2162 stations de mesure qui fournissent des données en temps réel (ou presque) avec des séries chronologiques à haute résolution le long des voies navigables flamandes, les cours d?eau non navigables de catégorie 1 et de la côte. Des stations supplémentaires des régions environnantes (région wallonne en Belgique, France, Pays-Bas) sont disponibles pour la gestion opérationnelle des crises en cas d'inondations. Lorsque la vitesse et la direction du vent, en particulier pendant la marée de printemps, conduisent à des marées de tempête élevées le long de la côte belge ou dans l'estuaire de l'Escaut, ceci est communiqué sur waterinfo.be par les experts de Flanders Hydraulics qui font les interprétations basées sur les différentes sorties de modèles. Le plan d'urgence à appliquer le long de la région côtière peut être consulté sur waterinfo.be. En Wallonie, la prévision des crues est réalisée par le SPW, Service public de Wallonie, impliquant deux entités internes : - Service public de Wallonie Mobilité et Infrastructures, Direction de la Gestion hydrologique (prévision des crues) - Centre Régional de Crise (prévention et coordination internes en temps de crise, accompagnement des services). La prévision des crues est obligation légale, mais la transmission des infos n'est pas codifiée. Les alertes sont transmises aux services eau et voies navigables, sur site web grand public, et la CRC régional communique aux autorités en charge de crises et urgence. Annexe 4.2.3 Un système assuranciel présenté comme fragile En matière d?assurance, la Belgique compte parmi les pays ayant mis en place un dispositif privé de garanties contre les catastrophes naturelles le cadre des polices d?assurance incendie, ce qui permet en principe au plus grand nombre d?accéder à cette protection. Toutefois, il ressort des échanges que ce dispositif d?assurance privé, combiné aux fonds de calamités publiques mis en place par les régions, est plafonné (350 M¤ par catastrophe) et a montré ses limites lors des inondations de juillet 2021. Le coût des dommages a été évalué à près de 2,5 Md¤, très au-delà des plafonds d?intervention. L?ensemble des dommages est estimé à environ 1% du produit intérieur brut national48. Dans ce contexte, un dispositif ad hoc a été mis en place au seul niveau régional afin d?indemniser les victimes (les assureurs belges ont prêté 1 Md ¤ à la Wallonie à taux zéro, sur une durée de huit ans) et une réflexion plus générale a été engagée afin de réformer le système d?assurance privé et celui des fonds de calamités. Cela concerne également les biens professionnels et les surfaces agricoles et intègre un objectif de mieux évaluer le coût des inondations. Sur ce terrain, la Flandre ? Flanders Hydraulic Research en coopération avec l?Université de Gand (département de géographie) - a développé, dès les années 2000, une méthode originale 48 L?Union européenne a pris en compte un montant de 5,56 Md pour l?ensemble des événements de juillet 2021. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 73/107 d?évaluation des conséquences des inondations, sur la base d?un modèle (LATIS) s?appuyant sur un système d?informations géographiques et des modèles hydrologiques ainsi que des données socio-économiques et d?usage du foncier. Le but affiché est de chercher à minimiser les conséquences des inondations plutôt que de chercher à les prévenir. En dépit de ces démarches, les assureurs estiment que la prise en compte des risques climatiques est fortement problématique en Belgique, notamment du fait de la régionalisation des compétences. Ils plaident pour un nouveau système, a minima fédéralisé, sinon européanisé. Encadré 17 : l?assurance des agriculteurs en Flandres Depuis 2019, une réforme de l?assurance49 articule l?assurance que les agriculteurs doivent désormais souscrire sur le marché et le soutien du gouvernement. En pratique, chaque agriculteur doit souscrire à une assurance in- tempéries globale dans le secteur agricole ? la grêle par exemple, en choisissant sur quelles parcelles. Le gouver- nement apporte une aide à hauteur de 65% du coût de l?assurance. A partir de 2023, si les agriculteurs souhaitent étendre leur champ de couverture, l?aide est inférieure, de l?ordre de 30 à 45% selon les budgets. Le gouvernement intervient en cas de catastrophe naturelle en complément des assurances (au-delà d?une occurrence trentennale), seulement pour les agriculteurs assurés. De leur côté, les agriculteurs doivent s?inscrire dans une démarche de prévention, avec des bénéfices pour leurs cultures (par exemple, protéger les vergers), mais aussi plus larges : limiter l?érosion (haies), ce qui est un bénéfice pour eux et pour les villages voisins. Se posent aussi des questions de la place laissée à l?eau le long de certains fleuves (Yser). Annexe 4.2.4 Le choc des inondations de juillet 2021 La répartition fragmentée des compétences est parfois redoublée par un effet de concurrence entre les différents niveaux de pouvoir. Cela peut conduire à un défaut de coordination ou à des retards dans la prise de décision, comme le pointe assez sévèrement la commission fédérale chargée de tirer les leçons des grandes inondations de l?été 2021. Son rapport prend par exemple appui sur la dissociation entre la prévision météorologique qui est réalisée par l?Institut royal de météorologie (organe fédéral) et l?analyse des paramètres hydrologiques, qui incombe aux Régions. En 2021, cette configuration a gêné la transmission d?une information complète sur le risque de crue aux autorités locales. Une fois les alertes données, les mesures à prendre doivent être concertées entre les autorités régionales et locales, voire fédérales, ce qui prend un temps non négligeable en situation de crise. Les inondations de 2021 ont constitué un facteur de choc à l?échelle du pays en matière de plani- fication et de gestion d?événements climatiques de grande ampleur. Si la concertation qui dérive du fédéralisme rend le dispositif potentiellement difficile à appréhender ? y compris pour les acteurs eux-mêmes, avec l?allongement des délais de décision qui peut en résulter ? la structure de la réponse des autorités a fait l?objet de plusieurs réévaluations depuis 2021-2022, notamment du fait du NCCN. De leur côté, les autorités régionales ont révisé leurs plans d?urgence, tandis que les communes se sont davantage investies dans la rédaction de leurs propres plans. La culture du risque, dont le défaut a souvent été dénoncé, tend ainsi à se développer dans un environnement institutionnel particulièrement complexe (voir infra). Annexe 4.3. Les Flandres : une structuration par grand bassin, en cours d?inflexion En Flandres, le pilotage de la prévention des inondations implique plusieurs ministères : infrastructures, environnement, agriculture, et agence de l?environnement des Flandres. Environ 49 19 Juin 2019. - Arrêté du Gouvernement flamand relatif à la subvention de prime pour une assurance intempéries globale dans le secteur agricole PUBLIÉ https://www.ejustice.just.fgov.be/eli/arrete/2019/06/19/2019030606/justel https://www.ejustice.just.fgov.be/eli/arrete/2019/06/19/2019030606/justel Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 74/107 80 000 foyers flamands ont une probabilité moyenne à élevée d'être inondés ; l'urbanisation et le changement climatique augmentent les risques. La réponse apportée passe par une approche « multicouche » de gestion du risque d?inondation. Il est nécessaire de mobiliser une combinaison de mesures pour faire face aux inondations critiques, dans une logique de responsabilité partagée entre les gestionnaires de l'eau, les planificateurs de l'espace, les services de crise et d'urgence et les citoyens. Les 3 « P » sont : Protection : protéger contre les inondations. Il s?agit d? éviter autant que possible les inondations dans les zones vulnérables au moyen de digues, déversoirs, bassins d'inondation et stations de pompage, ou encore en étant attentif à l?infiltration de l?eau. Prévention : éviter ou réduire les dommages Cet axe comporte les mesures visant à réduire notre vulnérabilité aux inondations, comme le fait d?éviter des constructions dans les zones inondables ou y permettre des constructions adaptées Préparation : être prêt en cas d'inondation. Cela couvre les actions nécessaires pour ne pas être pris par surprise par les inondations et pouvoir agir afin d'éviter que la situation ne s'aggrave ; informer et prévenir, afin que les gestionnaires de l'eau (y compris au niveau local), les services d'urgence et les citoyens puissent prendre des mesures en temps utile et éviter de nombreux dégâts et malheurs. Annexe 4.3.1 L?équilibre entre protection et aménagement du territoire - Actions de protection : les équipements et infrastructures - La lutte contre les inondations en Flandre est d plus en plus appuyée sur la recherche de solutions pour redonner de l'espace à la rivière. Cela peut se faire en élargissant le lit d'hiver naturel ou en créant des zones d'inondation contrôlée ou des bassins d'attente. La conception de ces zones est envisagée en fonction de la configuration de chaque bassin. Il peut s'agir de zones entièrement naturelles, et dans ce cas les agriculteurs présents se voient attribuer d'autres parcelles de terre à cultiver, ou elles peuvent être utilisées à d'autres fins agricoles de sorte qu'il n'y ait pratiquement pas de dégâts en cas d'inondation (surtout en hiver). - Le niveau de protection des digues est déterminé par zone en fonction du risque. C'est l'autorité compétente en matière d'eau qui en fixe le niveau. Le gestionnaire de l'eau est également responsable de la construction, de l'entretien et de l'inspection des digues. Les inspections structurées des digues ont lieu tous les 1 à 3 ans en fonction du risque. A cela s'ajoutent bien sûr les contrôles visuels effectués. Pour le renforcement des digues en crise, les autorités font appel à un fournisseur privé, dans le cadre de contrats qui permettent une intervention dans la journée/ - Les autorités chargées de l'eau sont responsables de l'entretien des canaux, y compris du désensablement et du dragage. La répartition des compétences diffère pour les cours d?eau navigables et non navigables. Pour les premiers, les responsables sont Vlaamse Waterweg (Voies navigables), le Département de la Mobilité et des Travaux publics, et l?Agence des services maritimes et de la côte. Pour les cours d?eau non navigables, ceux qui entrent dans la catégorie 1 relèvent de VMM (Agence Flamande de l?Environnement), de la catégorie 2 des provinces, et la catégorie 3, des municipalités. Les exploitants de cours d'eau prennent en charge le coût des infrastructures construites le long des cours d'eau (zones inondables contrôlées, digues de protection, bassins d'attente, stations de pompage, ...). Pour les cours d'eau non navigables, il existe encore aujourd'hui de nombreux gestionnaires différents. Ce nombre a été fortement réduit depuis 2014. A partir de cette date, les communes pouvaient transférer la gestion des cours d'eau aux provinces, et de très nombreuses communes ont choisi de le faire (sur 300 communes en Flandres, seule 50 sont encore gestionnaires de cours d'eau). Il reste cependant 56 polders et wateringues, 5 provinces et la VMM en tant que gestionnaire de cours d'eau en Flandres. Lors de son entrée en fonction en 2019, le gouvernement flamand a décidé de réformer la gestion des cours d'eau non navigables. Une note PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 75/107 conceptuelle à ce sujet a été approuvée par le gouvernement flamand en juillet 2023. À l'avenir, la gestion des cours d'eau non navigables sera assurée par des conseils de l'eau (12 au maximum) soutenus par un syndicat des conseils de l'eau. Quand VMM fait l?entretien des grands cours d?eau non navigables, cela recouvre le fauchage et le curage, prévu environ tous les 10 ans, dans le cadre d?un plan d?ensemble. Il s?agit de curer aux seuls endroits où des accumulations augmenteraient le risque inondation (au niveau de ruptures de pente, par exemple). Concernant les sections de Wateringues, elles sont en charge de l?entretien des fossés et reçoivent une subvention des provinces. La taxe qu?elles lèvent rapporte un faible pourcentage des coûts et la question est posée de la supprimer. Les sections doivent gérer l?eau de sorte que le niveau d?eau ne soit pas à son maximum quand une crue arrive et que chaque section contribue au tamponnage. Ainsi, dans la Flandre occidentale, se pose la question d?une évolution du système des Wateringues. C?est une volonté forte dans l?accord de coalition du gouvernement flamand engagée il y a cinq ans que de faire évoluer ce système, sous le terme « réformer pour plus d?efficacité ». Il s?agit de trouver un équilibre entre ce système de gestion locale et pragmatique des fossés par les agriculteurs, appuyé sur des redevances pas toujours bien comprises par les riverains qui ne sont pas agriculteurs, et une meilleure coordination de la gestion de l?eau des polders à une échelle plus large. Les pistes évoquées sont de mettre en place une structure plus grande en gardant les chefs de sections dans la gouvernance, dans un dispositif permettant plus de coopération et une communication fluide entre zones. Le traitement des sédiments évacués lors du curage des fossés et canaux est fait conformément à la directive européenne : le niveau de pollution des sédiments est vérifié par le service environnemental avant l?épandage. Les sujets qui peuvent créer des tensions sont l?accès aux propriétés pour curer et pour épandre. Cela relève des agriculteurs ou des collectivités, qui passent alors des contrats d?entretien. - Dans les zones de polders ou aux endroits où le drainage par gravité des cours d'eau n'est (temporairement) pas possible, des systèmes de pompage ont été installés ; la responsabilité de ces systèmes de pompage incombe au gestionnaire de l'eau. Concernant le pompage en crise, c?est la collectivité qui mobilise les pompes qui est en charge du coût, avec un soutien du niveau supérieur à partir d?un certain montant. Pour la crue de novembre dernier, c?est l?état fédéral qui va prendre en charge la facture. A Niewport, une grande capacité de pompage a été ajoutée car l?écoulement gravitaire n?était possible que 2 h sur 12. Le dispositif a été « inventé » en direct, l?espace disponible à l?embouchure était entièrement utilisé. La question va se poser de renforcer la capacité fixe, mais nos interlocuteurs soulignent que l?évacuation à la mer n?est pas si simple ; une mauvaise gestion peut se traduire par des sur- inondations en amont. Les pluies seront plus fréquentes, plus fortes, les modèles de prévision sont dépassés. On aura de toutes façons à faire face à une plus grande incertitude. Une réponse à cette nouvelle situation est l?approche « multicouches » : il faut pouvoir activer différents leviers selon le type de crue. Cela suppose une très bonne coordination. En crise en particulier, cette coordination est essentielle : elle relève du gouverneur qui peut prendre des sanctions en cas de non-respect de consignes. - Actions de prévention : enjeux d?aménagement du territoire Les Flandres sont très denses, avec un aménagement du territoire historique marqué par la possibilité de construire des quartiers au bord de l?eau, ce jusqu?en 2010. Un enjeu maintenant est d?éviter de construire dans les zones à risques. Une cartographie vient d?être établie, sur la base de travaux commencés après les crues de 2010, qui identifie les zones exposées à des inondations centennales, avec et sans changement PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 76/107 climatique. Un processus est engagé pour changer de destination les terrains regardés comme dangereux. Après une enquête publique en 2023, ce travail donnera lieu une deuxième consultation, puis une troisième approbation sera nécessaire pour un aboutissement prévu sous un an à un an et demi. Les cartographies sont déjà publiques, mais de portée purement informative. En Flandre, les permis de construire sont décentralisés ; l?autorité locale peut ne pas suivre les recommandations du niveau régional, qui peut faire un recours. Cela arrive peu. Tout permis de construire donne lieu à « évaluation aquatique », qui tient compte, par exemple, des quantités d?évacuations à prévoir en cas d?inondation (cela peut conduire à accepter une maison sur un terrain exposé, mais pas un immeuble). L?évaluation aquatique repose sur une instruction par les services du gouvernement sur les effets néfastes sur le système d'eau qui peuvent être causés, par exemple, par la construction d'une maison ou d'un projet d'infrastructure. Les plans susceptibles d'avoir un impact sur le réseau hydrographique, tels que les plans d'aménagement du territoire, sont également soumis à l?évaluation aquatique. Dans certaines situations, le gouvernement doit demander l'avis du gestionnaire de l'eau concerné lorsqu'il procède à l'évaluation aquatique. Le gestionnaire de l'eau peut faire des recommandations pour ajuster les activités planifiées afin d'éviter, de limiter, de restaurer ou de compenser les dommages attendus sur le réseau d'eau. Le résultat de l'évaluation aquatique est inclus en tant que « paragraphe sur l'eau » dans le permis ou dans l'approbation du plan ou du programme. Il y a ainsi un devoir d?information, appuyé sur un système de score sur la base d?une approche modélisée, pour chaque parcelle dans une zone inondable -fluviale, liée aux pluies ou par submersion marine) (P-score) et bâtiment de (G-score) ? de A à D selon le niveau de risque (A : pas de risque de crue modélisée, B : faible probabilité d?inondation sous l?effet du changement climatique, C : faible risque d?inondation sous le climat actuel et D : probabilité moyenne sous le climat actuel). Ce devoir d'information a été introduit dans le décret intégral sur la politique de l'eau en 2013. En 2016, l'obligation d'information a été évaluée. Le 1er janvier 2023, un devoir d'information modifié est entré en vigueur. Lors de la vente ou de la location d'un bien immobilier, l'acheteur ou le locataire doit savoir si le bien est situé dans une zone inondable. Côté agriculture, un enjeu est d?encourager une agriculture plus durable, moins exposée aux risques de sécheresse et d?inondation, ce dans le cadre de la PAC, par exemple en améliorant le rôle de rétention des eaux des sols. Une ambition forte est que les agriculteurs ne soient pas seulement dans une logique productiviste mais également convaincus de ces enjeux de durabilité. - Une structuration de ces piliers par grands cours d?eau Le « plan Sigma50 », un plan intégré de protection contre les inondations, a été mis en place pour la première fois en 1977, en réaction à une inondation majeure causée par une onde de tempête en 1976 sur le bassin transfrontalier France, Belgique, Pays-Bas de l?Escaut. Le fleuve ne fait que 350 km, mais coule dans un bassin très dense. Le plus grand danger est lié à une onde de tempête qui se poursuivrait dans les terres, avec un risque de rupture de digues, comme en 1953 et 1966 où des villages entiers ont été inondés. Ce plan vise à protéger environ 20000 hectares de terres en Belgique, le long de l'Escaut et de ses affluents tels que le Rupel, la Nete et la Durme. Il met en place des protections contre les submersions marines et les inondations fluviales causées par des précipitations très fortes, en identifiant quatre zones avec des niveaux de protection différents. Il combine des mesures d'infrastructure "grises", principalement des digues, et des mesures "vertes" sous la forme d'un réseau de zones inondables contrôlées, dont la mise en place fait l?objet de nombreuses discussions avec le secteur agricole. Un plan Sigma actualisé a été approuvé en 2005 qui visait à mieux protéger l?Escaut et ses affluents par la mise en place de « zones temporairement inondables » et de digues. Le Sigma a aussi travaillé à la restauration des rivières et à l?économie locale. Le projet a aidé également à réaliser les objectifs écologiques (Natura 2000). 50 S de Sigma comme le début du nom de l?Escaut en Flamand, Schelde PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 77/107 A l?horizon 2030, il représente 1,3 Md d?euros. Un cadre législatif est nécessaire pour garantir une approche pluriannuelle de ces travaux. Il s?agit d?intégrer le changement climatique, et en particulier l'élévation du niveau de la mer qui accroît le risque d?inondation. Dans la version actuelle, l'élévation du niveau de la mer a été prise en compte dans un scénario moyen. Sur cette base, le plan contient des mesures et des projets dont la réalisation s'étend jusqu'en 2030, suite à une évaluation des coûts-avantages sociaux. Une amélioration du Plan Sigma - un Plan Sigma+ ou un Plan Sigma 3.0 - devrait également prendre en compte le scénario climatique plus extrême à fort impact jusqu'en 2100, avec, en plus de l'élévation du niveau de la mer, l'augmentation de la probabilité d'écoulements supérieurs extrêmes et la coexistence de ces eaux d'amont et d'une onde de tempête. Jusqu'en 2030, le plan actuel doit être mis en oeuvre sans délai, et, par la suite, complété par des mesures additionnelles. Le plan est approuvé par le gouvernement flamand dans ses principes généraux, mais pour le reste, donne lieu à des déclinaisons locales, où le travail est fait en cherchant les collaborations avec les agriculteurs et les associations. Il ressort des échanges une bonne coopération avec les agriculteurs sur le plan Sigma, mais, « dans les relations à proximité des fleuves, pour regagner des zones d?expansion des crues ce n?est pas toujours facile ». La nouvelle étape de prise en compte du changement climatique, par une étude, n?en est qu?à ses débuts. La Dendre, affluent de l?Escaut, qui connait aussi des problèmes d?inondation, est encore en phase de planification. Il s?agit d?élaborer un plan stratégique « espace pour l?eau » pour réduire le risque d?inondation en améliorant la qualité de vie. Ce travail se fait en recherchant une forte participation des autorités locales et habitants, en vue d?une approbation du gouvernement flamand au printemps. Dans le cadre de ces travaux, deux scénarios ont été élaboré et évalués sous l?angle de leurs avantages et limites et soumis à concertation : celui « de la vallée inondable » ou celui d?«expansion des inondations en amont ». C?est le premier, dans une approche naturelle de place laissée au fleuve, avec une action au plus près pour chacun, qui est préférée. Concernant la Meuse, dont le débit peut varier de 10 à 3000 m 3/s et plus, elle coule en Flandre le long d?anciens sites miniers de niveau très bas. Les deux inondations majeures de 1993 et 1995 ont inondé des villages entiers. Dans la suite, les digues ont été surélevées et renforcées, mais le principe de laisser une plus grande place pour le fleuve apparait désormais comme préférable, quitte à supprimer quelques maisons situées dans le lit mineur. Ce travail prend des années. Les digues sont maintenues là où l?élargissement n?est pas possible. Concernant enfin l?Yser, la coopération autour de l?eau est renforcée avec la mobilisation d?une commission de la coordination intégrée de l?eau, et le projet de maitrise de l?Yser dans une approche intégrée quantité- qualité. Le territoire est pour partie inférieur au niveau de la mer et le changement climatique va fragiliser la zone ; la population est peu dense, sauf près de la côte : ce sont surtout des prairies dans les parties basses et des terres agricoles. L?eau potable dépend des eaux de surface, et notamment du réservoir de Blanckaert. Les relations avec les agriculteurs sont un enjeu majeur, dans ce bassin où le projet est de créer des déversoirs sur la rive gauche du fleuve pour compléter la Zone d?expansion des crues (ZEC) de Blanckaert, créée après les crues de 1993-95 (et qui représente un stockage en crue de 450 M m3). Un décret est en préparation pour que les objectifs soient ancrés au niveau flamand. Il s?agit de définir des mesures concrètes à l?horizon 2024 ou 25, afin de les avoir mises en oeuvre un an après entrée en vigueur du décret, dans une logique « top down » vers les bassins. Une plate-forme permet des échanges de connaissances, qui est aussi un outil de concertation. Cet hiver, cette zone a été inondée pendant plusieurs semaines, jusqu?à plusieurs mètres d?eau au plus profond. Il n?y a pas de compensation financière des agriculteurs mise en oeuvre, la prise en charge dépend des assurances. Le bassin de l?Yser est engagé dans un projet Interreg avec l?USAN notamment pour partager la vigilance. Annexe 4.3.2 L?adoption de nouveaux grands plans structurants PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 78/107 - Le Bluedeal est un grand plan adopté après la sécheresse de 2018-20 et consacrée en premier lieu à cet enjeu. Il comporte deux axes : - réduire les consommations d?eau, progresser dans les réutilisations ; - mieux conserver et gérer l?eau, dans une logique trame verte et bleue. Ce programme était prévu à hauteur de 60 à 70 millions d?euros et a été porté à 500 millions d?euros après la crise Covid, dans le cadre des fonds de relance européens. - Après les crues en Wallonie, qualifiées de « bombe d?eau », le gouvernement flamand a demandé à un groupe d?experts de rédiger un avis sur la prévention des inondations. Il s?agissait de revoir la prévention en Flandre sur la base d?un scénario de même type que la « Water Bomb » sur la région, en identifiant également les budgets requis. En effet, il a été estimé que le coût d?une catastrophe de même type serait de 8 Md d?euros. Ce travail s?est engagé en décembre 2021, sous le pilotage de Henk Ovink, professeur néerlandais de renommée internationale, notamment pour son travail à l?ONU. Le choix de cette personnalité se justifiait pour éviter une forme de concurrence entre universités belges, pour mobiliser l?intérêt des Pays-Bas, concernés par la Meuse, pour cette ré- flexion, et bénéficier d?un regard neutre sur la situation. La démarche était pluridisciplinaire. C?es t le Weerbaar Waterland, qui a donné lieu à l?avis Resilient Waterland de mars 2023. Il comporte dix recommandations suivantes qui mettent en avant une approche stratégique, partenariale et intégrée, inscrite dans la durée et impliquant tous les acteurs, informés et responsabilisés : 1. Objectifs aquatiques clairs, intégrés et assortis de tâches à accomplir Depuis des objectifs divers et vagues en matière de quantité d?eau vers des objectifs intégrés dans le domaine de l?eau 2. Programmes d?action intégrés et adaptatifs par sous-bassin Depuis un ensemble réactif d?actions sectorielles déconnectées vers des tâches orientées vers la mise en oeuvre au niveau des sous-bassins 3. L?eau, le sol et le climat au service d?une nouvelle sécurité juridique Depuis un avis sur l?eau sans engagement et une mise en oeuvre incertaine vers un cadre spatial et d?exécution solide et juridiquement sûr 4. Triple mandat, depuis la régie jusqu?à l?exécution D?une exécution dépendante du volontariat et retardée par la fragmentation des pouvoirs vers une régie claire 5. Quatre chantiers flamands de l?eau Depuis un fonctionnement sur la base de projets vers une approche intersectorielle permanente axée sur l?exécution 6. Fonds de sécurité de l?eau ancré Depuis des budgets de projets annuels vers une approche systémique sur plusieurs législatures 7. Préparation des personnes et des infrastructures Depuis l?ignorance relative vers l?autonomie accrue 8. Revirement culturel Depuis le risque individuel vers le gain sociétal 9. Programme flamand pour la Connaissance et l?Innovation Depuis le développement scientifique sectoriel vers l?innovation transdisciplinaire et fondée sur la pratique 10. Approche et collaboration transfrontalières Depuis une région réactive en aval vers un précurseur en matière de protection contre les crues en Europe Les interlocuteurs de la mission mettent l?accent sur les points suivants : - développer des objectifs clairs en matière d'eau au niveau flamand d'ici 2023-2024 : identifier les zones de la Flandre où les risques actuels ou futurs sont trop élevés (tant pour la sécheresse que pour les inondations). - Dès le départ, exploiter les possibilités de liaison pour améliorer la qualité de l'eau et l'érosion et calculer les futurs dommages socio-économiques et écologiques qui en découlent. - Lors de l'élaboration des objectifs, tenir compte de l'impact élevé de la sécheresse et de l'érosion, PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 79/107 tenir compte au maximum du scénario climatique à fort impact jusqu'en 2100< ; - Dans les suites des inondations de novembre 2023, la Task Force « Westhoek résilient », à la demande du Gouvernement flamand, a formulé, à l?issue de trois réunions, un avis étayé pour améliorer la « sécurité de l?eau » dans le Westhoek, et plus particulièrement dans le bassin de l?Yser. Il s?agissait de tenir compte du caractère spécifique du territoire, mais aussi de faire le lien avec le cadre politique « Waterland résilient », qui préconise une approche axée sur la source du problème ainsi que des opportunités gagnant-gagnant pour la gestion des sécheresses. D'autres cadres tels que le Blue Deal et le Plan flamand d'adaptation au climat ont également été pris en compte. À partir du cadre général, une réflexion a été menée à court et à plus long terme. Le Weerbare Westhoek du 22 décembre 2023 prévoit des budgets importants en 2024 (54 M) et 25 (26 M), avec des travaux sur les pompes, les canaux ? Chaque année, 120 M sont destinés aux voies navigables. Pour le court terme quelque 70 mesures sont proposées. Il s'agit de mesures dites « sans regret », c'est-à-dire efficaces et efficientes sous chacun des scénarios climatiques et qui ne viennent pas au détriment d'autres enjeux cruciaux dans la région : mesures de terrain (la rétention d'eau en amont, le tamponnement dans et le long des cours d?eau, l?évacuation vers la mer ainsi que des mesures de protection) mais aussi de mesures politiques et règlementaires, de recherche et de surveillance, de communication et de sensibilisation. Des propositions sont également faites pour éliminer autant que possible les points de friction dans une logique de facilitation ou de simplifica- tion. Toutes les mesures sont conçues de manière à évacuer l'eau excédentaire uniquement lorsque cela est nécessaire pour prévenir des inondations. Elles contribuent ainsi à garantir la disponibilité de l'eau en cas de sécheresse prolongée. Les mesures à court terme suivantes sont prioritaires : - tamponnement des eaux en amont et évacuation retardée ; - création et aménagement de nouvelles zones d?expansion des crues (ZEC) ; - protection des infrastructures critiques (par exemple les centres des villages, les industries, l'ap- provisionnement en électricité, etc.) grâce à la construction de digues locales, par exemple à Roesbrugge et Stavele. - Amélioration de l'entretien structurel de l?ensemble des cours d'eau ; - gestion dynamique des niveaux d?eau ; - optimisation de la capacité d?évacuation, par exemple via le canal de Lo et l?Yser, de Dixmude à Nieuport ; - évacuation suffisante vers la mer à différents endroits, par gravitation mais aussi de manière indépendante des marées ; - démarrage d?un processus d'élaboration du plan « De l?espace pour l?eau ? Vallée de l?Yser » ; - renforcement de la coopération transfrontalière. Des points d?attention sont identifiés : - la conception des mesures à réaliser sur le terrain fait l?objet d?une concertation avec les acteurs locaux, les propriétaires et les utilisateurs des terrains ; - pour la création et l?aménagement de nouvelles zones d?expansion des crues (ZEC), dans la mesure où leur fonctionnement a un effet, une politique d'accompagnement agricole est recom- mandé ; - pour l'approche à plus long terme, la Task Force recommande l?élaboration d?un programme plu- riannuel intégré et orienté vers l'action, garantissant qu?à l?avenir éga lement, et en tenant compte des scénarios climatiques, le Westhoek reste suffisamment résilient face à la fréquence et à l'inten- sité croissantes des conditions météorologiques extrêmes. Il sera possible ainsi de continuer à travailler de manière structurelle et intégrée sur la sécurité de l?eau dans le bassin de l?Yser. Les actions à entreprendre sont les suivantes : - Identifier les risques et les points problématiques et déterminer un risque d'inondation acceptable. - Fixer des objectifs stratégiques et opérationnels pour que les risques soient ou restent sociale- ment acceptables. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 80/107 -. Elaborer et mettre en oeuvre un programme d'actions intégré, de concert avec les acteurs locaux et les parties prenantes. Les nombreux projets et initiatives existants ne seront pas perdus de vue et seront poursuivis et renforcés dans la mesure du possible. La coopération transfrontalière avec la France devra également être poursuivie et renforcée. Enfin, la Task Force a également formulé un avis sur la gouvernance ou la nécessité d'une struc- ture claire pour assurer le suivi d'un tel programme pluriannuel intégré. Elle préconise une ap- proche systémique qui surveille l'intégralité et qui dispose d?une capacité d?action suffisante pour pouvoir efficacement mettre en oeuvre le programme pluriannuel. L?avis recommande aussi d'utili- ser autant que possible les structures déjà existantes aux différents niveaux (flamand - bassin - région), qui fonctionnent bien. La Task Force mise en place - dans sa composition actuelle ? devrait être pérennisée afin de pouvoir assurer la surveillance et le suivi de la mise en oeuvre des actions. La structure actuelle du bassin peut également être maintenue, car elle dispose déjà d'une large représentation locale et d'une approche multidisciplinaire. Il est également recommandé de développer plus avant, sur l?ensemble du bassin, le fonctionne- ment des coalitions territoriales locales accompagnées. Annexe 4.4. La Wallonie : le choc des inondations de juillet 2021 Annexe 4.4.1 Quelques éléments sur le cadre général de la prévention des inondations La gestion de l?eau est une compétence régionale depuis les années 1980, menée dans le cadre des directives européennes. La gestion des cours d?eau dépend de leur classement : elle est faite par les riverains pour les 12807 km de cours non classés, par les communes pour les cours d?eau de 3ème catégorie (4518 km), les provinces pour ceux d 2ème catégorie 5820 km) et les régions pour ceux de 1ère catégorie (1875km) et pour les navigables (873km). Un plan « pluie » a été mené en 2003, et la cartographie des aléas inondation a été entreprise en 2007. Le curage des cours d?eau revient entre 50 à 150 euros par m3 selon le niveau de pollution. Concernant les voies navigables, les sédiments curés sont traités comme des déchets. Pour les cours d?eau non navigables, il est possible de les laisser sur les 6 m à proximité, sinon il faut les évacuer. Les laisser dans le cours d?eau est regardé comme préférable, quitte à recreuser un chenal, cela limite les risques d?érosion des berges. Un décret a fixé quatre enjeux pour les cours d?eau naturels : inondation, socio culturel, économique, biodiversité. Les cours d?eau sont sectorisés par enjeux dominants, en évitant le curage Une étude sur les besoins de la Wallonie en eau a été lancée (avec notamment un axe sur le refroidissement de l?eau, ou la récupération des eaux usées). Les besoins des secteurs économiques sont de 50000 m3/j. 75% sont évaporés. Pour autant, dans les échanges, il est estimé qu?un stockage supplémentaire, pour garder des eux en période de crue, serait une réponse pour ainsi dire sans impact sur les besoins de l?industrie (une piscine toutes les secondes pour une giga-factory) et également de faible impact pour limiter les effets d?une inondation. Annexe 4.4.2 Mise en place d?un dispositif spécifique de reconstruction Les inondations du 14 juillet 2021 ont fait 41 victimes. Il y a eu 45000 maisons sinistrées, 100000 personnes concernées impactés, plus de 5,2 Md de dommages. Quatre fleuves ont débordé en même temps. « C?était il a presque trois ans et on en sort à peine ». Un Commissariat spécial à la reconstruction a été mis en place dès le 26 juillet 2021. Cette PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 81/107 équipe pluridisciplinaire a été mobilisée pendant un anl pour répondre de manière pragmatique aux besoins du territoire sinistré Le travail de reconstruction a été engagé sur les 3 grands bassins versants belges, à l?échelle des15 sous bassins concernés. Les montants pour la reconstruction, de 150 millions d?euros en 2021, ont permis de faire des acquisitions et de la renaturation, en particulier dans la vallée de la Vesdre, la plus touchée, qui a subi la plus grande part des décès en Belgique. Il s?agissait d?avoir des réflexions sur des aménagements adaptés à la situation, qui peuvent conduire à ne pas (re) construire à en endroit, mais, autant que possible sans interdire, même si la possibilité de le faire existe. La Commissariat spécial à la reconstruction n?est pas une autorité mais un ensemblier. C?est une cellule placée auprès de gouvernement, ce qui lui donne du poids. Les termes du bilan pour présenter le travail réalisé sont les suivants : « Le 26 juillet 2021, afin de coordonner la réponse régionale à la reconstruction, le Gouvernement wallon (ci-après GW) a décidé de créer le Commissariat spécial à la Reconstruction (CSR) pour une durée d?un an éventuellement renouvelable. La mission qui a été dévolue au CSR était triple : - coordonner et faciliter l'élaboration et la prise de décision du GW, ainsi que la mise en oeuvre et le suivi des actions dans la gestion des urgences, de la prévention et de la reconstruction ; - formuler, en collaboration et en concertation avec les services compétents, des propositions en vue d'assurer un plan de reconstruction dans les communes concernées ; - veiller à la mise en oeuvre des décisions du GW. Deux Commissaires spéciales ont été désignées le 26 juillet 2021, l ?une en charge des autorités locales (Catherine Delcourt) et l?autre en charge des autorités régionales (Sylvie Marique). Une équipe s'est progressivement mise en place pour assurer la gestion opérationnelle du CSR. En août 2021, seuls 3 agents avaient déjà pu être engagés. Cet effectif était totalement insuffisant pour faire face à l?ampleur des besoins. Au total, une 50aine d?agents du SPW (SG et IWEPS, essentiellement) ont prêté main forte au CSR, en attendant les engagements complémentaires. La diversité des profils a permis d?apporter des réponses efficaces aux différentes problématiques. Le CSR s?est organisé avec un SPOC par partie prenante régionale. Jusqu?au bout, les effectifs se sont avérés bien nécessaires pour mener à bien les différentes missions du CSR. » 51. Un enjeu fort a été la gestion de la temporalité entre l?urgence (aide à la réparation, avec un soutien public pour ce qui n?était pas couvert par les assurances) après crise et la reconstruction résiliente. - Il a fallu un an à un an et demi pour identifier ce qu?il fallait acquérir et rassembler le budget requis. Les crues de 2021 ont été fortement dévastatrices, il reste, en 2023, des habitations à exproprier. La modélisation sous-jacente ne sera à jour que dans trois mois. La première démolition a eu lieu mi-janvier. - Une priorisation a été nécessaire pour cibler l?action sur les neuf communes les plus touchées ? y compris dans les centres historiques ; - l?élaboration d?un schéma multidisciplinaire sur tout le bassin de la Vesdre a été établi, avec l?université de Liège et un studio spécialisé ; - deux guides de bonne pratique sur la constructibilité en zone inondable et sur la gestion durable des eaux fluviale ont été rédigés. Les cartes de l?aléa inondation n?ont pas été réactualisées au regard de cet événement exceptionnel, mais elles le seront en 2025 dans le cadre de la directive inondation. Une circulaire ministérielle donne un cadre pour instruire les permis en zone inondable ; - Un appui urbanistique, mis en place par la région, pour les communes les plus touchées, a été organisé pendant cinq mois. Ce marché n?a pas été opérationnel tout de suite car le premier n?a donné lieu à aucune réponse. Des moyens sont mobilisés pour des acquisitions de bien à démolir. Les discussions sont difficiles avec la population, parfois des réparations temporaires ont été faites. 51 Source Commissariat spécial à la reconstruction, juillet 2022 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 82/107 Il y a eu un travail également sur les facteurs aggravants (bâti à enlever car accroit le risque d?inondation). Le Commissariat a été mobilisé pour de nombreux échanges avec les personnes avec qui il faut trouver un accord. L?approche a été pragmatique : il s?agissait, selon les termes des personnes rencontrées, de réfléchir avant de reconstruire, sans empêcher les mesures immédiates qui donnent du « confort ». Le premier état des bâtiments a demandé une forte mobilisation, avec tous les agents disponibles, afin de le mener en quinze jours. La nouvelle planification des communes a été faite par la région pour le compte des communes (et pas à leur place). Pour les appuis urbanistiques, un marché cadre a été passé. Il a fallu faire de la planification locale avant de finaliser la planification globale, sans avoir les nouvelles études hydrauliques abouties, ce qui supposait des échanges très fréquents entre les équipes travaillant aux différentes échelles pour faire les ajustements nécessaires (et acceptés). Il s?est agi ainsi de construire ainsi un schéma sans valeur légale, sans enquête publique ou évaluation des incidences mais avec des modes de participation, définis à la carte, selon les choix des élus locaux dans chaque collectivité. L?agilité et l?adaptabilité ont reposé sur le fait de se parler. Ainsi ont été élaborés des PDDQ ? plan de développement durable des quartiers. Le travail a porté aussi sur la trame agricole, les haies, le sens du labour, le couvert forestier, qui influencent la gravité des inondations. Rétablir des haies écrête la crue de 20%. La prise en compte des inondations doit se faire par l?amont des bassins versants en premier lieu : ont été mis en place des périmètres de vigilance foncière, avec des possibilités de préemption. Entre janvier 2022 et juillet 2022, 6 plans de reconstruction de centres urbains ont été faits sur 9. 5 millions d?euros ont été consacré aux travaux du commissariat, dont 500000 pour les études. - Le Rapport de la Commission d'enquête parlementaire52 chargée d'examiner les causes et d'évaluer la gestion des inondations de juillet 2021 en Wallonie du 22 mars 2022 a fait 161 recommandations (voir annexe 6). Il ressort des entretiens menés par la mission les points clés et les actions engagées suivants : - La prévision des crues mobilise le service mobilité - infrastructures, en charge des canaux et barrages, en interface avec l?opérateur de Météo (Institut royal météorologique - IRM). Les outils n?étaient pas adaptés à ce phénomène, jamais vu. Il est nécessaire d?améliorer les outils pour des événements exceptionnels. - concernant la gestion de crise, la commission d?enquête parlementaire a fait des recommandations, qui, pour les gouverneurs mettent l?accent sur la coordination des réseaux de volontaires, la formation des élus, les plate-formes citoyennes. En pratique, la Croix rouge est présentée comme étant en recul, et il est nécessaire de mettre en place un cadre spécifique de mobilisation de bénévoles. Il est ressorti des rex également la nécessité de revoir les modalités de coopération. La région wallonne se dote d?une cellule d?expertise (CELEX) dont les avis éclairent le gouverneur sur l?opportunité ou non de déclencher une phase provinciale. Un travail a aussi été mené pour identifier les bâtiments au regard du risque inondation, non diffusé publiquement, qui permet de cibler des alertes, pour les personnes qui s?abonnent (peu à ce jour). Les autorités belges peuvent en effet communiquer directement avec la population, par e-mail ou sms, grâce au système d?alerte BE-Alert (sur inscription ou géolocalisation). - Le pompage repose sur plus de 190 pompes de régulation : il apparaît souhaitable d?en centraliser la supervision pour pouvoir optimiser. Ces pompes ne servent pas qu?à la navigation. La région travaille à un arrêté pour prioriser les usages de l?eau (en crise). Le schéma régional de la ressource en eau fixe des débits autorisés. La gestion des ouvrages donne toujours lieu à des discussions (avoir de l?eau en été/ être en mesure d?écrêter des crues). Les sections de wateringues gèrent quelques pompes, ce qui peut conduire à des surplus dans les canaux en crise, 52 Parlement de Wallonie PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 83/107 mal anticipés. Le pompage qui est fait au quotidien ne correspond pas aux enjeux de la crue ? dans ce cas, il faut prévoir d?autres outils comme les zones d?expansion de crues. - La culture du risque s?est perdue, même dans des vallées très exposées. Les victimes ont été des personnes qui ont pris leur voiture. La région met en place des systèmes de bénévolat pour mobiliser des citoyens formés et engagés en cas de crise. - Il est important d?avoir une approche pluridisciplinaire, mobilisant des spécialistes pour conseiller les autorités, avec une information précise ? sur la localisation de l?aléa en particulier, et des termes permettant une compréhension claire du risque de crue et de l?alerte. La région a travaillé pour que cela soit fait, maintenant, de manière plus intégrée. - Les cartes d?inondations sont faites pour un aléa 100 ans avec une majoration de 30% pour le changement climatique. L?approche s?appuie sur du rex et de la modélisation. Mais la question se pose de l?utilisation des crues de juillet 2021 dans la planification territoriale : l?événement est tellement exceptionnel, faut-il en tenir compte ? Les choix de prévention sont précisés à l?échelle locale, sur la base d?une approche coûts bénéfices. Il existe toujours un risque résiduel. Dans la suite de ce rapport, le ddécret du 13 juillet 2023 a rénové le cadre de la gestion des risques et des crises par la Région wallonne. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 84/107 Annexe 5. Rapport de la Commission d?enquête parlementaire chargée d?examiner les causes et d?évaluer la gestion des inondations de juillet 2021 en Wallonie du 22 mars 2022 Dans la suite des inondations du 14 juillet 2021, qui ont fait 41 morts en Wallonie, une commission d?enquête parlementaire a rendu un rapport qui comporte 161 recommandations. Parmi elles, certaines sont particulièrement intéressantes pour les travaux menés dans la suite des inondations de fin 2023 début 2024 en France : elles figurent en gras dans la reprise du rapport ci-dessous. * Les inondations de juillet 2021 ont dramatiquement renforcé la prise de conscience de la réalité du dérèglement climatique et de son abrupte proximité : le dérèglement climatique n?est pas une problématique réservée aux générations de demain ou aux contrées lointaines mais constitue un enjeu du temps présent et de notre continent. Les inondations mettent en relief la nécessité de renforcer et accélérer, d?une part, la lutte contre le changement climatique par la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) et, d?autre part, l?adaptation de nos territoires, nos infrastructures, nos institutions, nos systèmes et notre société afin de protéger la population des dérèglements climatiques en cours et à venir. Il nous faut calibrer l?ensemble des politiques publiques à la hauteur des catastrophes auxquelles il est possible de s?attendre et à la hauteur du risque défini. Les auditions et les informations reçues par la Commission d?enquête parlementaire chargée d?examiner les causes et d?évaluer la gestion des inondations de juillet 2021 en Wallonie amènent à formuler les recommandations qui suivent. 1. PRÉVISIONS ET ALERTES MÉTÉOROLOGIQUES ET HYDROLOGIQUES European flood awareness (EFAS) 1. Concernant l?usage du European Flood Awareness System (EFAS) par le Service Public de Wallonie (SPW) : ? engager résolument la Wallonie dans le réseau européen constitué par l?EFAS et ses différents outils; ? intégrer l?usage de l?ensemble des outils proposés par l?EFAS (alertes formelles et informelles « flood » et « flash flood » et « Map viewer ») dans les procédures du SPW; ? charger le SPW, conformément aux conditions d?accès à l?EFAS signées le 23 février 2015 par la Région wallonne, de formuler régulièrement des évaluations à l?EFAS sur la qualité de ses prévisions; ? participer aux réunions annuelles et aux formations nécessaires; ? partager avec l?EFAS Dissemination Centre les données des stations pluviométriques et les autres outils de mesure qui peuvent l?être. 2. Concernant Copernicus Emergency Management Service, réduire le délai d?envoi de l?image produite par satellite aux autorités compétentes. Institution royal météorologique (IRM) 3. Développer et renforcer le partenariat entre le Service Public de Wallonie (SPW) et l?Institut Royal Météorologique (IRM) afin principalement : ? de renforcer les capacités de modélisation météorologique pour bénéficier de prévisions météorologiques à la maille la plus fine possible et ce en progressant dans la prévision et PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 85/107 l?intégration des pluies dites convectives (intenses et concentrées) ; ? d?assurer la connaissance mutuelle des outils et données et leur interopérabilité ; ? d?organiser la communication par l?IRM au SPW de la liste exacte des communes concernées par ses avertissements ; ? de solliciter la création d?un produit de l?IRM analysant l?impact plus détaillé des prévisions météorologiques sur les sous-bassins versants comprenant un barrage. 4. Améliorer les conditions et le séquençage d?utilisation des codes d?alerte de l?IRM afin de pouvoir déclencher des alertes jaunes, oranges et rouges sans attendre 48 heures, 24 heures ou 12 heures, en cas de risque d?événements météorologiques de nature ou d?ampleur exceptionnelles. 5. Adapter les modèles de prévisions météorologiques aux modèles climatologiques prospectifs. Direction de la Gestion Hydrologique du ServicePublic de Wallonie Mobilité et Infrastructures (DGH SPW MI) 6. Afin d?améliorer la capacité de prévision et de communication de la Direction de la Gestion Hydrologique du Service Public de Wallonie Mobilité et Infrastructures (DGH SPW MI), il est recommandé : ? d?intégrer progressivement dans le modèle de prévision hydrologique « HydroMax » les prévisions météorologiques du European Centre for Medium- Range Weather Forecasts (ECMWF) et les données issues des cours d?eau non navigables (Aqualim); ? de renforcer les capacités de modélisation hydrologique en prenant en compte un facteur de risque plus grand lié à l?augmentation des phénomènes climatiques extrêmes; ? d?intégrer l?ensemble des cours d'eau dans le système d'alarme et d'alerte de la DGH SPW MI ainsi que la problématique du ruissellement; ? d?opérationnaliser le projet « Walhydro » en regroupant ainsi, au sein d?une même base de données, l?ensemble des données pertinentes en matière d?inondations gérées par le SPW, et en intégrant les réseaux « Aqualim » et « Wacondah » pour créer un réseau métrologique unique; ? de disposer des outils disponibles pour ouvrir l?ensemble des produits fournis par l?Institut Royal Météorologique (IRM) et le European Flood Awareness System (EFAS) au SPW et aux autres autorités régionales; ? de développer des modèles d'alarme spécifiquement liés aux phénomènes de « flash flood »; ? d?appliquer la Directive (UE) 2019/1024 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 concernant les données ouvertes et la réutilisation des informations du secteur public aux données utilisées et générées par Walhydro et HydroMax et de rendre ces données accessibles pour les gestionnaires et les autorités publiques et, dans la mesure du possible, pour les citoyens; ? d?étudier et analyser dans le détail le risque d'inondation par ruissellement afin de mieux comprendre ses processus de fonctionnement dans les vallées (détermination de couloirs préférentiels d'écoulement, etc.). 7. Clarifier et rendre publics la terminologie des codes et seuils de pré-alerte et d?alerte de crues afin de mieux rendre compte des risques d?événements hydrologiques d?une nature exceptionnelle. Dans ce cadre, réfléchir à la possibilité de lancer des pré-alertes ou alertes de crue sur la base des prévisions météorologiques sans attendre le résultat des prévisions hydrologiques. 8. Veiller à ce que la DGH SPW MI adresse une communication compréhensible, signifiante et directement exploitable aux autorités régionales et communales compétentes ainsi qu?à la population. 9. Établir un canevas de bulletin d?information, des messages de pré-alerte, d?alerte et concernant la situation des eaux (données chiffrées, degré de gravité), réalisé en coopération avec le Centre régional de crise (CRC-W) et l?Union des Villes et Communes de Wallonie (UVCW). 10. Opérationnaliser une modélisation plus précise des sous-bassins versants, afin de pouvoir traduire effectivement l?impact des crues sur le territoire, en ce compris l?impact de délestages éventuels en aval des barrages-réservoirs. 11. Améliorer les stations de mesures hydrométriques afin, d?une part, d?agrandir la gamme de PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 86/107 mesure des débits avant une situation de défaillance et, d?autre part, d?augmenter leur résistance. 12. Améliorer la collaboration avec les services hydrologiques régionaux (bruxellois et flamand) et des pays limitrophes, notamment en apportant un point d?attention concernant les barrages et leurs impacts. 13. En concertation avec les médias, tant publics que privés, intégrer les données hydrologiques vulgarisées dans les bulletins météorologiques grand public en cas de prévision de crues et, le cas échéant, prévoir la diffusion de messages de pré-alertes et d?alertes. 14. Renforcer la capacité d?évaluation préliminaire des risques d?inondations visée par l?article 4 de la Directive 2007/60/CE du Parlement Européen et du Conseil du 23 octobre 2007 relative à l?évaluation et à la gestion des risques d?inondation, en tenant compte, parmi les différents éléments de cette évaluation, de la description des inondations survenues dans le passé et ayant eu des impacts négatifs significatifs. Centre de la permanence d?exploitation (PEREX) 4.0 15. Finaliser rapidement l?opérationnalisation du Centre de la Permanence d?Exploitation (Perex) 4.0. 16. Concernant le mécanisme de veille active des cours d?eau et barrages, définir une phase spécifique à partir de laquelle la situation nécessite un mécanisme de permanence opérationnelle. 17. Intégrer dans les meilleurs délais la veille des seuils de préalerte et d?alerte hydrologiques au sein du Centre de la Perex 4.0. 18. Assurer progressivement une connectivité optimale à l?ensemble des sites sensibles régionaux. 19. S?assurer que le Centre de la Perex 4.0 est en mesure de visionner en temps réel des sites sensibles du réseau hydrologique wallon, en ce compris les barrages. 2. PRÉVENTION DES RISQUES ET GESTION DE CRISE Culture du risque 20. Dans l?ensemble des procédures de gestion, de construction ou de rénovation des infrastructures publiques, tenir compte du risque d?aggravation des impacts liés aux phénomènes climatiques extrêmes. 21. Former davantage d?agents publics à la planification d?urgence et à la gestion de crise. 22. Développer davantage d?interactions entre les coordinateurs en planification d'urgence (PLANU), les conseillers en aménagement du territoire et urbanisme (CATU) et les fonctionnaires délégués. 23. Collaborer avec le Centre fédéral d?excellence pour le Climat dans ses travaux de coordination de programmes de recherche sur l'évolution des conditions météorologiques extrêmes dans le futur et développer, en association avec l?Organe de concertation pour l?analyse de la menace « Climat » (OCAM Climat) et les services fédéraux concernés, une expertise en termes de gestion des risques climatiques liés aux compétences régionales, particulièrement en ce qui concerne les inondations. 24. Créer une culture du risque au sein des services publics en coordination avec les différentes autorités en charge du secours. 25. Développer un plan d?urgence d?aide psychosociale en cas de crise majeure à l?attention des victimes et en assurer la coordination avec la Fédération Wallonie-Bruxelles et la Communauté germanophone. 26. Mettre en place une banque de données sécurisée reprenant les différents numéros d?urgence et l?ensemble des moyens disponibles, qui seront actualisés. 27. Créer une logistique efficace en matière d?aides, particulièrement en organisant les prêts et les dons de matériels, la possibilité de les entreposer dans un lieu prévu à cet effet, la mise à disposition de logements ainsi qu?un registre d?entreprises et d?organisations susceptibles d?apporter leur soutien en cas de crise majeure. 28. En coordination avec le Centre de crise national (NCCN), veiller à ce que des équipements efficaces et adéquats soient disponibles en permanence. 29. Dès l?émission d?un code jaune par l?Institut Royal Météorologique (IRM), appréhender la situation en approche et par équipes multidisciplinaires et effectuer des points réguliers sur l?évolution des informations. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 87/107 30. Élaborer, en bonne intelligence avec les communes concernées, des cartes d?évacuation et de mise à l?abri, lisibles, y compris en cas de délestage préventif, accompagnées d?un inventaire des sites pouvant accueillir les personnes évacuées. 31. Permettre la mutualisation des moyens en planification d?urgence à un niveau pluri-communal. 32. En parfaite cohérence avec les Plans généraux d?urgence et d?intervention (PGUI), effectuer régulièrement des exercices d?évacuation et de mise à l?abri de la population ainsi que des stress tests liés aux infrastructures sensibles, le cas échéant à un niveau pluri-communal. 33. Sur base des partenariats existants entre les fédérations de mouvements de jeunesse et les autorités publiques ainsi que sur les procédures et bonnes pratiques mises en oeuvre lors des inondations de juillet 2021, inclure dans les plans généraux d?urgence et d?intervention (PGUI) une procédure d?évacuation relative aux camps de vacances et de jeunesse et l?étendre, de façon adaptée, aux sites de camping et habitations permanentes. 34. Encadrer la participation citoyenne dans la planification et la gestion d?urgence, en créant une réserve de citoyens volontaires au niveau local et en analysant la possibilité juridique de couvrir par une assurance les interventions de ces volontaires en cas de crise. 35. Offrir à des points de contact de quartier la possibilité d?avoir une formation de base permettant de les familiariser à la culture du risque. 36. Créer un cadre permettant une organisation avec les bénévoles, pendant et après la catastrophe, et mettre à disposition les lieux et le matériel nécessaires pour rendre cette aide efficace. 37. Formaliser la délégation pour absence (applicables aux bourgmestres, gouverneurs de province, fonctionnaires, etc.) sur la base de critères préalablement définis ainsi que sur l?étendue de la délégation. 38. S?assurer que l?ensemble des coordonnées de contact des personnes désignées par délégation sont bien transmises aux autorités supérieures et aux différents responsables des corps d?intervention. 39. Organiser une reconnaissance officielle des événements dramatiques des inondations de juillet 2021 et de leurs victimes ainsi que des bénévoles qui leur sont venus en aide. 40. Structurer un travail de mémoire des inondations et sa diffusion afin d?assurer dans la durée la sensibilisation aux risques d?inondations. Centre régional de crise (CRC-W) 41. Adopter un décret relatif au Centre régional de Crise de Wallonie (CRC-W) ayant pour objectifs d?en clarifier les rôles et les missions, d?en moderniser le fonctionnement et d?en faire la porte d?entrée unique des services régionaux en matière d?expertise du risque. Complémentairement, préciser les missions du Collège des Gouverneurs wallons ainsi que son articulation avec le CRC- W. 42. Une fois par législature, publier un rapport décrivant l?état d?anticipation et de prépara- tion des réponses de la Wallonie face aux risques naturels ou à la survenance d?accidents majeurs. 43. Renforcer le rôle du CRC-W en tant qu?interlocuteur de référence pour les gestionnaires de crise, lorsqu?une phase de crise est déclenchée à l?échelon local, provincial ou fédéral. 44. Clarifier, par le biais de protocoles de collaboration, les chaînes de communication et de res- ponsabilité entre le CRC-W, les services du SPW et des unités d?administration publique (UAP) qui peuvent être mobilisés. 45. Optimaliser le rôle du CRC-W en tant que coordinateur de mobilisation de l?expertise et des ressources liées aux risques, notamment par le biais de la mise sur pied de groupes multidiscipli- naires, à l?image de la Cellule d?Expertise (CELEX), afin de favoriser la communication entre les acteurs concernés, et en traduisant de manière facilement compréhensible et exploitable ces expertises pour les acteurs de terrain. 46. Préciser le rôle du CRC-W et des acteurs de la gestion de crise ? Centre de crise national (NCCN), gouverneurs de province, communes ? en matière, entre autres, de lutte contre les « fake news », d?activation du Copernicus Emergency Management Service et de coordination de l?utili- sation des images aériennes disponibles. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 88/107 47. Modifier la dénomination du CRC-W pour qu?elle corresponde mieux à son rôle de centre du risque et d?expertise et d?appui à la gestion de crise. 48. En situation de crise ou de phase provinciale ou fédérale, placer le CRC-W sous l?autorité directe du Secrétaire général du SPW, ce dernier disposant, en coordination avec les Directions générales concernées du SPW, d?un pouvoir d?injonction. 49. En temps de crise, prévoir que le Secrétaire général du SPW puisse avoir connaissance des injonctions ministérielles données aux directeurs généraux. 50. Dans la chaîne de diffusion de messages d?alerte des crues, prévenir l?ensemble des acteurs concernés par la gestion de l?eau (producteurs et distributeurs d?eau, épurateurs, services de dé- mergement, ...). 51. Former le personnel du CRC-W à vulgariser les informations qu?il reçoit et doit répercuter. 52. Donner d?initiative, à toutes les communes, accès aux communications du CRC-W, en complé- ment de la possibilité d?abonnement. 53. Confier au CRC-W la présidence et le pilotage du Groupe Transversal Inondations (GTI). 54. Lorsqu?une crise impliquant les compétences régionales wallonnes a un impact sur les compé- tences communautaires, prévoir la présence au sein du CRC-W d?un représentant de ces entités. 55. Octroyer un statut officiel au GTI en tant qu?organe de pilotage stratégique et coordonné des Plans de gestion des risques d?inondations (PGRI) au niveau du Gouvernement, en précisant no- tamment son rôle, ses missions et sa composition et en élargissant son champ d?action à la pré- paration de la gestion de crise pour une amélioration de la coordination entre les membres du GTI. 56. Préciser la mission du GTI en ce qui concerne la prévention des inondations par débordement et ruissellement. 57. Confier au GTI la présentation d?un rapport par législature au Parlement sur deux volets : l?ac- tivité du GTI, d?une part, et le suivi de chacune des mesures du PGRI, d?autre part. Les gestionnaires de crise (Fédéral, Province, Commune) 58. Dans le cadre de l?arrêté royal du 22 mai 2019 relatif à la planification d'urgence et la gestion de situations d'urgence à l'échelon communal et provincial et au rôle des bourgmestres et des gouverneurs de province en cas d'événements et de situations de crise nécessitant une coordina- tion ou une gestion à l'échelon national, solliciter de l?Autorité fédérale la clarification du comman- dement dans la gestion de crise. Déterminer clairement les mécanismes de coopération entre dif- férentes entités dans l?hypothèse d?une succession de déclenchement de phases d?urgence. Rap- peler le rôle et la responsabilité de chaque intervenant dans chaque phase d?urgence (NCCN, Centre de crise provincial, Centre de crise communal). 59. Intégrer une formation complète à la gestion de crise pour les personnes responsables dans la chaine de commandement. 60. Organiser la formation, à rythme régulier, de l?ensemble des membres des collèges com- munaux à la planification d?urgence et la gestion de crise et rendre obligatoire cette forma- tion pour les bourgmestres, y compris les faisant fonction. Inclure dans les formations les éléments de compréhension et d?interprétation des alertes reçues dans le cadre de la ges- tion de crise. 61. Rendre obligatoire la formation à la planification d?urgence et à la gestion de crise pour les coordinateurs en planification d'urgence (PLANU) et les agents qui les remplacent, clairement dé- signés, pour les gouverneurs de province et les commissaires d?arrondissement, ainsi que pour les directeurs généraux et directeurs généraux adjoints des communes et provinces, et pour le Secré- taire général et les directeurs généraux du SPW. Inclure, dans les formations des agents commu- naux et des élus, les éléments de compréhension et d?interprétation des alertes reçues dans le cadre de la gestion de crise. 62. Mettre sur pied, à une échelle pluri-communale, le partage d?expériences et de bonnes pratiques et facilitant, le cas échéant, la mutualisation et le remplacement des agents com- pétents en matière de PLANU. 63. Intégrer la gestion des risques liés aux sites dangereux ainsi que la lecture et la compréhension de données liées aux risques dans les formations des PLANU. 64. Organiser des formations au portail national de sécurité Incident & Crisis Management System PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 89/107 (ICMS) pour les acteurs concernés et identifier rapidement le responsable de ces formations. 65. Diffuser les règles d?utilisation de l?ICMS préalablement et de manière claire aux parties pre- nantes. 66. Rappeler le rôle de l?ICMS, des gouverneurs de province et du NCCN dans la chaine de com- mandement. 67. Analyser la pertinence des informations à introduire dans l?ICMS. 68. Intégrer systématiquement les gestionnaires de barrages dans le système ICMS lorsque ceux- ci sont concernés directement ou indirectement. 69. Formaliser et systématiser l?organisation de débriefings et de retours d?expérience des gestion- naires de crise, en ce compris avec les structures de soutien et d?expertise (CRC-W, GTI, etc.), afin de pouvoir tirer les enseignements des événements rencontrés et les intégrer dans le proces- sus d?élaboration des Plans de gestion des risques d?inondations (PGRI). 70. En matière d?alerte et de communication d?urgence : ? généraliser l'utilisation de l?outil « BE-Alert » par les autorités locales; ? augmenter le taux d?inscription de la population à BE-Alert; ? améliorer un réseau radio « Astrid », « Blue Light Mobil » ou similaire accessible aussi pour les autorités locales (coordinateur planification d'urgence » (PLANU) et/ou bourgmestre) ; complémen- tairement, développer toute ressource alternative permettant d?assurer une communication entre services en cas de saturation ou défaillance des réseaux des opérateurs téléphoniques, du réseau électrique et d?Internet. Lors de la transmission d?une information cruciale, l?émetteur doit vérifier la réception du message par le destinataire. Paramétrer l?échelle de gravité des circonstances et hiérarchiser les listes de numéros selon cette échelle. 71. Organiser une communication de crise centralisée et uniformisée qui parvienne au destinataire dans les trois langues nationales. 72. Assurer, sur les réseaux sociaux, une communication large et efficace en période de crise pour permettre l?adhésion de la population aux mesures envisagées et lutter contre les « fake news ». 73. En plus de l?arsenal existant, des médias et des réseaux sociaux, établir une démarche de communication de terrain telle que, par exemple et selon les cas : ? la constitution d?un réseau de points de contact par quartier et, le cas échéant, son activation en cas de crise; ? l?utilisation de haut-parleurs dans les quartiers; ? le porte-à-porte; ? les sirènes. 74. Sans remise en cause de l?articulation entre les différents acteurs, demander au Gouvernement wallon de solliciter le Gouvernement fédéral afin de : ? évaluer le mode de fonctionnement entre le Centre de crise national (NCCN) et les centres de crise provinciaux afin de fluidifier la transition lors du passage d?un niveau de gestion de crise à un autre; ? faciliter l?utilisation des moyens du NCCN lors d?une phase de crise provinciale ou d?une phase de crise communale; ? renforcer la coopération du NCCN avec les services des gouverneurs de province et les com- munes; ? développer au niveau du NCCN une mission d?appréhension des risques climatiques et environ- nementaux au même titre que les risques majeurs déjà pris en compte par le NCCN; ? renforcer le rôle du NCCN dans la mobilisation et la mise à disposition d?une expertise spécialisée auprès des autres niveaux de gestion de crise. 75. Actualiser chaque Plan général d?urgence et d?intervention (PGUI) au moins tous les six ans, en incluant une concertation supra-locale. Généraliser dans chaque commune la prise en compte de l?enjeu des inondations dans l?élaboration de son PGUI, incluant une identification des chaînes de communication, un plan de communication de crise et un plan de mise à l?abri et d?évacuation en fonction de la localisation des risques. 76. Clarifier les interlocuteurs destinataires (mandataires et/ou agents) des messages d'alerte et d'avertissement du NCCN et du CRC-W. 77. Assurer une capacité pour les gouverneurs de province à mobiliser, en cas de crise majeure, une réserve de personnel parmi les agents de l?administration provinciale. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 90/107 78. Organiser, à partir des services des gouverneurs de province, une mise à jour régulière et effective des coordonnées d'urgence des autorités locales et acteurs de la gestion de crise. 79. Évaluer le mode de déploiement et de fonctionnement des postes de commandement opéra- tionnel (PC Ops) pour une crise qui touche plusieurs zones de secours. 80. Identifier un ou plusieurs locaux rapidement aménageables où peut se réunir la Cellule com- munale de crise en toute sécurité et commodité. 81. Demander au Gouvernement wallon de solliciter le Gouvernement fédéral afin qu?il prévoit une procédure claire d?urgence interzones et fixant quel commandant de zone de secours dirige les opérations. 82. Prévoir la transmission des ordres du jour et des procès-verbaux des réunions des Collèges de zones de secours aux gouverneurs de province. 83. Évaluer la structuration territoriale des zones de secours, en concertation avec les autorités locales. 84. Demander au Gouvernement wallon de solliciter le Gouvernement fédéral afin qu?il poursuive la réflexion sur la possibilité de réduire le nombre de zones de secours. 3. LES BARRAGES ET OUVRAGES D?ART Cadre légal 85. Créer un cadre légal pour la gestion et la sécurité des barrages-réservoirs publics et privés situés en Wallonie, ainsi que pour leur contrôle externe ayant pour objectif de : ? garantir la sécurité des ouvrages en tout temps; ? assurer un fonctionnement optimal des infrastructures, équipements et outils utilisés en fonction des missions attribuées (sécurité, réserve d?eau potable, écrêtage, étiage, production d?énergie, loisirs); ? formaliser des procédures et priorités claires pour les agents opérationnels; ? organiser les modalités d?un contrôle régulier (fiches techniques d?inspection et stress tests ex- ternes); ? organiser les modalités d?un dialogue entre les gestionnaires des barrages -réservoirs de Wallo- nie. 86. Sans attendre l?établissement de ce cadre légal, organiser dans les meilleurs délais un audit externe des barrages-réservoirs. 87. Consacrer le principe de ces audits externes au minimum une fois tous les 5 ans, incluant l?organisation de stress tests. 88. Prendre en compte, dans le cadre réglementaire, des avis et recommandations émis par la Commission internationale des grands barrages (CIGB), notamment des cartes d'inondation en aval des ouvrages en cas de défaillances. Gestion des barrages et ouvrages d?art 89. Modéliser les parties du bassin versant en amont des barrages afin de pouvoir estimer de façon plus fine et en temps réel les besoins à couvrir par la réserve d?empotement des barrages-réser- voirs. 90. En concertation avec la Société wallonne des eaux (SWDE) : ? rendre la gestion des barrages-réservoirs plus dynamique, avec une réserve d?empotement évo- lutive en fonction des moments de l?année, des prévisions et des données météorologiques et hydrologiques, ainsi qu?un renforcement des possibilités de manoeuvre de la part des gestionnaires; ? revoir en conséquence le contrat de gestion de la SWDE, la convention entre la SWDE et le Service Public de Wallonie Mobilité et Infrastructures (SPW MI) et les notes de manutention des différents barrages-réservoirs. 91. Autoriser le Service Public de Wallonie (SPW) à imposer par injonction à la SWDE et à tout gestionnaire de barrage ou exploitant de centrale électrique, un turbinage immédiat en situation de crise. 92. Dans le même cadre, revoir la méthode de calcul du volume entrant (BT) pour y inclure les facteurs liés à l'environnement (ruissellement, saturation des sols) et aux prévisions. 93. Concernant les modèles prévisionnels propres à la gestion des barrages : ? équiper les barrages d?outils de prévision permettant au gestionnaire de réaliser des prévisions PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 91/107 crédibles de l?impact du ruissellement sur la gestion de l?ouvrage; ? développer un modèle mathématique permettant d?estimer le volume d?eau entrant dans l?ou- vrage en fonction de prévisions météorologiques et d?un ruissellement donné. 94. Modéliser l?impact de lâchers de barrage sur le bassin versant en aval, en intégrant égale ment l?impact du ruissellement sur les bassins versants et actualiser sur cette base les informations de la note de manutention sur la célérité de l?onde de crue. 95. Préciser le mécanisme de décision relatif à la gestion anticipative et au délestage des barrages- réservoirs en cas d?avertissement, de pré-alerte ou d?alerte de crue afin qu?il fasse l?objet d?une concertation de l?agent gestionnaire du barrage avec la Direction des barrages -réservoirs du Ser- vice public de Wallonie Mobilité et Infrastructures (DBR SPW MI), la DGH SPW MI et leur hiérarchie, lorsque le barrage est géré directement par le SPW. Une procédure de concertation sera mise en oeuvre concernant les concessionnaires des barrages privés. 96. Intégrer dans la gestion des barrages un plan d'alarme prévoyant une montée en puissance selon différents niveaux d'alarmes avec des règles à respecter pour chaque niveau afin de clarifier le rôle des gestionnaires des barrages. 97. En cas de crise, prévoir un mécanisme de permanence opérationnelle pour la gestion des barrages- réservoirs. 98. Étudier l?opportunité et les effets potentiels d?une interconnexion entre les barrages. 99. Étudier les possibilités d?adapter les aménagements en aval des barrages -réservoirs afin d?augmenter la capacité de restitution en cas de nécessité. 100. Analyser l?opportunité d?adapter les turbines au sein des barrages-réservoirs dans un objectif de production d?énergie verte. 101. Augmenter et systématiser les échanges d?expérience et de bonnes pratiques entre les ges- tionnaires des barrages en Wallonie, en Belgique et à l?international. 102. Demander au Gouvernement wallon de solliciter le Gouvernement fédéral afin d?envisager une modification de la loi du 17 juin 2016 relative aux marchés publics en sorte d?intégrer les mar- chés publics relatifs aux barrages dans la catégorie des secteurs spéciaux. Prévention des risques liés à la gestion des barrages 103. Organiser et former les équipes de gestionnaires des barrages en matière de gestion des risques (internes et externes) et de crise. 104. Organiser la participation des gestionnaires des barrages aux réunions du GTI. 105. Systématiser et formaliser la communication entre les gestionnaires des barrages-réservoirs et les autorités locales, les zones de secours et les zones de police en prévoyant des réunions régulières. 106. Établir dans les meilleurs délais des Plans particuliers d'urgence et d'intervention (PPUI) pour l?ensemble des barrages-réservoirs situés en Wallonie, à l?initiative des gouverneurs de province et en associant les autres parties prenantes, et intégrer les risques propres au fonctionnement des barrages et ouvrages dans les PGUI des provinces et communes concernées, incluant un plan de mise à l?abri et d?évacuation. 107. Associer les gestionnaires des barrages à la planification d?urgence au niveau des gouver- neurs de province et des communes. 108. Inclure les barrages-réservoirs et les barrages au fil de l?eau dans les Plans de gestion des risques d?inondations (PGRI). 109. Améliorer la gestion et la protection des chantiers significatifs relatifs aux ouvrages hydrau- liques et autres ouvrages d?art sur les cours d?eau, en analysant et en intégrant les risques en cas de crue. 4. GESTION DES COURS D?EAU 110. Préconiser une approche pluridisciplinaire par sous-bassin versant, en tenant compte des enjeux en amont et en aval, afin de contribuer à la protection des personnes et des biens. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 92/107 111. En tenant compte des enjeux en amont et en aval et des engagements européens en matière de gestion des cours d?eau, procéder à un audit des modalités de gestion et d?en- tretien de ces derniers. 112. Evaluer l?intérêt de renforcer la coordination existante des actes d?entretien régulier à travers l?application du Programmes d?Actions sur les Rivières pour une approche Intégrée et Sécurisée (PARIS). 113. En tenant compte des enjeux en amont et en aval, lancer une étude sur l?incidence de l'artificialisation des cours d'eau sur le risque d?inondation. 114. Développer des dispositifs de prévention des risques d?inondation en favorisant les mesures de rétention des eaux (zones d?immersion temporaire, reméandration, élargisse- ment du cours d?eau, remise à ciel ouvert, etc.). 115. Analyser rapidement l?opportunité de revoir la catégorisation des cours d?eau en vue d?opti- maliser leur gestion tout en respectant les fonctions et besoins spécifiques à chaque caté- gorie de cours d?eau. 116. Communiquer aux autorités locales concernées, en ce compris les zones de police et les zones de secours, les cartes d?aléas d?inondation, les cartes des zones inondables et les cartes de risque, après chaque renouvellement de celles-ci. 117. Insérer dans les PGRI les masters plans établis à l?échelle des sous -bassins versants. 118. Intégrer dans les PGRI une gestion territoriale proactive des risques d?inondation in- cluant les mesures visant en particulier l?amélioration de la qualité des sols, l?augmentation de leur capacité de rétention et de ralentissement du ruissellement et l?augmentation de l?infiltration de l?eau. 5. AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET RECONSTRUCTION Cadre légal 119. Étudier la manière la plus adéquate de modifier le cadre légal assurant la prise en compte des cartes d'aléas d?inondations lors de la délivrance des permis d'urbanisme. 120. Dans le cadre des permis nécessitant des mesures hydrologiques particulières (bassins d?orage, noues, etc.), contrôler la mise en oeuvre effective de ces mesures. 121. Adapter le cadre permettant de renforcer le recours aux avis de la Cellule Gestion Intégrée Sol ? Érosion ? Ruissellement (GISER) du SPW en fonction de l?impact du projet analysé sur le risque. 122. Mieux faire connaître l?existence de la Cellule GISER et organiser la possibilité pour un porteur de projet de construction ou d?urbanisation de demander, avant la phase d?instruction du permis, un avis indicatif global préalable intégrant les analyses de la Cellule GISER, des gestionnaires de cours d?eau, des gestionnaires d?égouttage et de tout autre acteur pertinent, selon la localisation. 123. Instaurer un guide de construction pour les zones d'habitation en développement sur les pla- teaux des bassins versants qui ont une influence sur le réseau hydrographique. 124. Actualiser et faire connaître les référentiels de construction durable pour adapter le bâti aux risques de phénomènes extrêmes. 125. Informer les propriétaires et les locataires des bonnes pratiques en matière d?aménagement ou de construction afin de rendre les maisons moins vulnérables aux risques climatiques et envi- ronnementaux (mise des installations à l'étage, architecture bioclimatique, etc.). 126. Mettre à jour les cartes des zones inondables et les cartes d?aléas d?inondations, prio- ritairement dans les zones sinistrées. Cette mise à jour prendra en considération, à titre d?exemple : ? les risques de retour plus fréquent des phénomènes climatiques extrêmes; ? les processus aggravants (par exemple urbanisation et artificialisation des sols, impact des em- bâcles, etc.); ? les effets de gestion des barrages dans chaque scénario de la note de manutention; ? les nappes phréatiques et leurs remontées potentielles; ? l?évaluation par les communes après un événement d?inondation. Dans l?attente de cette mise à jour : ? s?assurer que les autorités locales soient parfaitement informées de la portée et de la signification PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 93/107 réelle des cartes des zones inondables; ? intégrer une version utilisable de ces cartes dans tous les outils de Système d?informations géo- graphiques (SIG) utilisés par les communes; ? mener une démarche d?information et de sensibilisation à l?égard de la population et des parties prenantes (architectes, notaires, urbanistes, etc.), relative à la portée et la signification réelle des cartes des zones inondables et des cartes d?aléa d?inondations. 127. Finaliser et publier les cartes spécifiques du risque en aval des ouvrages en cas de défail- lances. 128. Fixer les trajectoires de réduction de l?artificialisation des sols par bassins, en appor- tant les modifications nécessaires au Schéma de développement territorial (SDT) et au Code du développement territorial (CoDT) dans le prolongement des recommandations du rap- port du Groupe d?experts « artificialisation ». 129. Entretemps, renforcer les mesures concrètes de lutte contre l?imperméabilisation des sols, notamment à partir du travail en cours en matière de gestion à la source des eaux pluviales. Mesures particulières 130. Adapter, dans toute la mesure du possible, les bâtiments menacés par les crues pour qu'ils résistent aux inondations, en particulier pour les collectivités, y com- pris pour les structures existantes. 131. Prendre en compte et systématiser le calcul d'une revanche (distance entre le niveau de l?eau et le sommet d?une berge ou le bord inférieur d?un pont) lors des projets d'aménagement de cours d'eau et d'aménagement des ouvrages de franchissement. 132. Avoir une vue coordonnée dans les zones frontalières entre différentes communes afin d?avoir une approche globale en matière d?aménagement du territoire. 133. Augmenter la capacité d?infiltration des sols à travers : ? l?optimalisation prévue dans le plan stratégique de la Politique agricole commune (PAC) en matière de cultures (couverture hivernale, agroforesterie, etc.); ? la poursuite du programme « Yes We Plant » de plantation d'arbres et de haies ainsi que le renforcement de la perméabilité des sols forestiers; ? l?augmentation de la perméabilisation des sols et de la rétention de l?eau de pluie sur site dans tous les projets de réhabilitation et de rénovation. 134. Élaborer des études de ruissellement à l'échelle de quartiers ou de communes avec définition précise du risque et mise en place de mesures constructives tels que des nou- veaux collecteurs, infiltration, protection localisée d'objets, etc. Reconstruction 135. Mettre en place des « masters plans » afin d?organiser la reconstruction et la prévention des risques d?inondations, dans une approche cohérente et planifiée à l?échelle des sous - bassins versants, en commençant par la Vesdre, par les vallées sinistrées et, le cas échéant, par tout autre sous-bassin où cela s?avérerait nécessaire. Ces « masters plans » constituent des outils d?aide à la décision et pourraient contenir des indications, notamment relatives à : ? des mesures dans les zones non urbanisées pour augmenter la capacité de rétention des sols et ralentir le ruissellement (couverture végétale permanente, forêts résilientes, planta- tion de haies, pratiques agricoles, etc.); ? des mesures dans les zones urbanisées pour augmenter l?infiltration de l?eau (verdurisa- tion, désartificialisation, préservation de friches naturelles, matériaux drainants, etc.); ? des projets d?aménagement de cours d?eau visant à réduire la vulnérabilité des zones urbanisées (zone d?immersion temporaire, reméandration, etc.). Ces « masters plans » pro- poseront des mesures concrètes à décliner, sur base des procédures prévues par la légi- slation, dans des révisions de plans de secteur et dans les outils de planification commu- nale. 136. Protéger le réseau écologique wallon. 137. Garantir le maintien du lien social dans les vallées. 138. Assurer une reconstruction des berges des cours d?eau, par priorité dans les zones PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 94/107 urbaines ou urbanisées, en intégrant l?évolution du comportement des cours d?eau à la suite des crues de juillet 2021 et en se basant sur les résultats des études hydrologiques et hy- drauliques et des différents scénarios d?aménagement envisagés. 139. Dans le cadre des opérations de post-crise, réexaminer les procédures applicables afin d?assurer à tous l?accessibilité aux démarches administratives, de simplifier et d?accélérer, dans toute la mesure du possible, l?ensemble des dispositifs (formalités, marchés publics, tutelle) et de prévenir la surcharge administrative. 140. Mobiliser toute forme de partenariats, entre des partenaires publics et/ou des publics- privés, dès qu?il y a lieu, et gérer la mise en réseau des communes, intercommunales, so- ciétés publiques et privées dans leur mission d?aides, tant au niveau des déchets qu?aux niveaux d?évacuation, de relogement, de démolition, de travaux en urgence, etc. 141. Conclure un accord de coopération entre la Wallonie et la Communauté germanophone afin de fluidifier la mise en oeuvre concrète des aides et de clarifier la répartition des rôles entre les deux entités. 142. Demander au Gouvernement wallon de solliciter le Gouvernement fédéral afin d?envisager une révision de l?arrêté royal du 22 mai 2019 relatif à la planification d'urgence et la gestion de situations d'urgence à l'échelon communal et provincial et au rôle des bourgmestres et des gou- verneurs de province en cas d'événements et de situations de crise nécessitant une coordination ou une gestion à l'échelon national en sorte de préciser la procédure à suivre et les responsabilités des acteurs impliqués dans le cadre de phases de reconstruction après une situation de crise. 143. Modifier les articles L1222-3 à L1222-9 du Code de la démocratie locale et de la décentrali- sation en vue de permettre au collège communal de gérer l?ensemble de la procédure de marché public en cas de reconstruction urgente due aux dégâts causés par une situation de crise. 144. Solliciter de l?Autorité fédérale qu?elle demande à l?Union européenne, relativement au Fonds de solidarité de l?Union européenne : ? une augmentation des moyens budgétaires en ce qui concerne les catastrophes naturelles ; ? une accélération des procédures de liquidation des crédits budgétaires au bénéfice des autorités publiques concernées, en vue de permettre une mise à disposition de ces crédits dans les six mois. 6. SERVICE PUBLIC DE WALLONIE ET FONCTION PUBLIQUE Organisation 145. Améliorer la transversalité au sein du Service Public de Wallonie (SPW) pour sortir d?une gestion en silos. 146. Renforcer le rôle de coordination du secrétariat général du SPW en améliorant la transversa- lité entre les directions générales. Développer une culture organisationnelle en ce sens, en particulier : ? au niveau des objectifs transversaux fixés par le Gouvernement ; ? en termes de dynamique de projets (y compris à durée limitée) ; ? en termes d?anticipation et gestion du risque en situation de crise ; ? en termes de capacité pour le Comité Stratégique (COSTRA) à délibérer d?enjeux communs à plusieurs Directions générales. 147. Déployer une politique de la fonction publique permettant de moderniser l?administration et d?instaurer une culture d?efficience au sein des services du SPW. 148. Définir le rôle du COSTRA en situation de crise afin d?améliorer le fonctionnement, la coordi- nation et la communication au sein du SPW et préciser son articulation avec les missions du Centre régional de crise (CRC-W). 149. Développer, au sein du SPW, des outils permettant de mutualiser la collecte de données pour estimer les dégâts sur le territoire des communes concernées en temps de crise. Ressources humaines 150. Veiller à une meilleure transmission des savoirs, en particulier pour les fonctions critiques, en cas de remplacement de personnel. 151. Établir en permanence un cadastre récurrent des ressources humaines et matérielles mobili- sables au sein du Service Public de Wallonie (SPW) en situation de crise. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 95/107 152. En termes de personnel, renforcer l?attractivité du SPW en permettant la valorisation de l?ex- périence utile et l?ancienneté acquises dans le secteur privé. 153. Augmenter l?efficacité des procédures afin d?assurer une exécution plus rapide des recrute- ments décidés par le Gouvernement wallon. 154. Demander au Gouvernement wallon de solliciter de Gouvernement fédéral afin de se concer- ter avec les organisations représentatives du personnel en sorte d?analyser l?opportunité d?adapter les normes applicables en matière de temps de travail du personnel impliqué dans une situation de crise en vue de rendre la gestion d?une telle situation plus efficace. 7. AUTRES POLITIQUES 155. Mettre à jour les Plans communaux d?action en faveur de l?énergie durable et du climat (PAEDC) afin de renforcer la prise en compte des enjeux d?adaptation climatique. 156. Créer un plan de gestion et d?évacuation des déchets en situation d?urgence, prenant en compte la répartition des responsabilités entre les acteurs concernés et organisant, au bénéfice des communes, sous l?égide de la Société publique d?aide à la qualité de l?environnement (SPAQUE), une procédure de crise pour le nettoyage des déchets immédiats produits. 157. Charger chaque intercommunale de gestion des déchets d?identifier des sites temporaires de stockage des déchets. 158. Définir et évaluer les conditions techniques et juridiques préalables à la mise en place d'une réglementation favorisant la circularité des boues de dragage, sur la base notamment des acquis développés en matière de gestion des terres excavées. 159. Mieux encadrer la valorisation des résidus des curages afin de prévenir et limiter leur mise en Centre d?enfouissement technique (CET) (revêtement pour voiries et pistes cyclables, remblais, etc.). 160. Mettre en relation les vétérinaires urgentistes ainsi que les acteurs du bien-être animal avec les cellules de sécurité provinciale et les plans d?urgence des pouvoirs locaux pour la gestion des situations de crise impliquant les animaux, tant d?élevage que pour les particuliers. 161. Promouvoir l?utilisation par les communes, les vétérinaires, les pompiers, les policiers et les citoyens des meilleurs outils dans le cadre de la recherche d?animaux perdus ou décédés. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 96/107 Annexe 6. Revue de presse La Voix du Nord, 14 novembre 2023 Inondations : les annonces du président de la République - La Voix du Nord Inondations : les annonces du président de la République Emmanuel Macron a présenté plusieurs dispositifs en soutien aux sinistrés des inondations lors de son déplacement à Saint-Omer et Blendecques, ce mardi. L?état de catastrophe naturelle : décrété « pour toutes communes qui en ont fait la demande ». Elles sont plus de 200 et la liste n?est pas fermée, a précisé le président. Un fonds d?indemnisation d?urgence de 50 millions d?euros : à destination des collectivités territoriales touchées. Il est « évolutif en fonction de la situation ». Suffisant ? « C?est une première ligne », a réagi Xavier Bertrand, président de Région, qui ne demande pas plus pour l?heure car, comme il le dit, « personne à cette heure ne connait le coût de la remise en état ». Pour les agriculteurs : « On va mettre en place un fonds spécifique qui complète le dispositif calamité agricole. Un fond qui accompagne les pertes de production, les pertes de matériels... » Pour les entreprises : « On va mettre en place des mécanismes avec l?URSSAF pour échelonner les écheances fiscales », annonce Emmanuel Macron. Qui, à un ouvrier dont l?entreprise est dans l?eau, répond que le chômage partiel va être facilité. Pour les élèves : Un dispositif de soutien scolaire et de fournitures pour les ménages les plus modestes, notamment pour les familles et les enfants qui ne vont plus à l?école depuis la semaine dernière. Et pour que ça ne reproduise plus ? Le président entend « préparer la suite dès maintenant » et enjoint « à tirer les leçons ». La réglementation sur les systèmes d?entretien des cours d?eau doit être allégée pour que les curages puissent se faire rapidement, défend-on à l?Elysée. « Avec la lourdeur de la réglementation, le coût pour curer la même portion de canal est passé chez nous de 800 000 à trois millions d?euros en dix ans », appuie François Decoster, maire de Saint-Omer. À qui Emmanuel Macron a donné mission de travailler à améliorer les systèmes d?évacuation des cours d?eau vers la mer, en piochant dans les bons exemples en Europe et en particulier aux Pays-Bas. Et auprès des assurances ? Pour l?instant il est souvent trop tôt pour que les experts se déploient, « mais on va veiller à ce que ce soit fait très vite », a promis Emmanuel Macron. « Il faut être pressant », plaide Xavier Bertrand, un ancien... assureur. Qui ajoute : « France assureurs doit nous envoyer des experts de toute la France ». La franchise prise en charge : d?un montant de 380 ¤ en situation de catastrophe naturelle, elle sera prise en charge par les départements et la Région pour toutes les personnes ayant une déclaration de sinistre, a annoncé Xavier Bertrand. France 3, 15 novembre 2023 ENTRETIEN. 3 questions au maire de Saint-Omer, missionné par Emmanuel Macron pour penser à "l?après" inondations dans le Pas-de-Calais (francetvinfo.fr) Lors de son déplacement à Saint-Omer mardi 14 novembre 2023, Emmanuel Macron a missionné le maire de la commune pour trouver des solutions afin d'améliorer les systèmes d'évacuation d'eau et éviter de nouvelles crues dévastatrices à l'avenir. Entretien avec François Decoster. Depuis le début du mois de novembre, il est en première ligne face aux inondations. Au chevet des sinistrés, dans les multiples réunions organisées dans la cellule de crise de la préfecture du Pas-de-Calais mais PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 97/107 également auprès du président de la République... François Decoster ne compte pas ses heures. Ce mercredi 15 novembre 2023, lorsqu?il nous répond au téléphone entre deux réunions, le maire de Saint- Omer est en voiture. Et il a le sourire. "Aujourd?hui, il fait beau ! Voir le ciel bleu en ce moment est un soulagement", confie-t-il. Une accalmie bienvenue alors que le moral des habitants est au plus bas. "Certains me disent qu?ils ne supportent plus la pluie et c?est difficile pour moi de trouver une réponse". Un choc psychologique causé par les crues à répétition qui ont inondé des dizaines de communes de l?Audomarois. Tout un bassin de population, déjà éprouvé par les crues historiques de 2002, se retrouve de nouveau sous les eaux. Malgré les nombreux travaux engagés il y a 20 ans, les infrastructures n?ont pas suffi à éviter les inondations, alors que l?Aa, fleuve côtier traversant l?Audomarois, a pulvérisé les records de hauteur d?eau, parfois de plus d?un mètre. À cette époque, François Decoster n?était pas encore maire de la plus grande ville du secteur (il a été élu en 2014, NDLR). Mais aujourd?hui, le premier édile apparaît comme l?homme de confiance choisi par Emmanuel Macron pour éviter de nouvelles crues. Lors de sa visite dans la ville mardi 14 novembre, le chef de l?Etat a missionné François Decoster pour se pencher sur "l?après", afin de trouver des solutions pour améliorer les systèmes d?évacuation d?eau et éviter ainsi de nouvelles crues dévastatrices dans les prochaines années. Pourquoi cette mission pour préparer "l?après" inondations, alors que la même réflexion a été menée après les crues de 2002 ? François Decoster : "Le travail mené après 2002, soit avant que je sois maire, s?est appuyé sur la crue de 2002. Personne à l?époque ne se disait qu?on pouvait connaître encore pire. Et finalement si, il est tombé en 30 jours ce qui tombe habituellement en 6 mois dans le Pas-de-Calais. On va en faire l?évaluation, mais d?évidence, ce qui a été fait depuis 2002 ne permet pas d?éviter une catastrophe. Aujourd?hui, il y a 3 temps : le temps de l?urgence, le temps de la reconstruction et le troisième temps, pour lequel j?ai été missionné. La question est la suivante : comment continuer à nous adapter au regard des événements qui sont entrés dans une nouvelle dimension ? Comment on fait pour se préparer à des évènements qui risquent d?être de plus en plus fréquents et de plus en plus brutaux ? Ce n?est pas moi, seul, qui vais créer les réponses. C?est un travail collectif qui va s?engager. Ce travail n?a pas encore commencé car les inondations se poursuivent et, aujourd?hui, je suis au côté des habitants". En quoi va consister cette mission ? "Avec le chef de l?Etat, nous voulons avoir une approche européenne. Très concrètement, il faut qu?on aille regarder ce qui a été fait ailleurs, notamment aux Pays Bas. Il y a eu des inondations catastrophiques dans les années 50 qui ont fait de nombreuses victimes et qui ont donné lieu à un grand plan national appelé delta. Il consiste notamment à installer des équipements adaptés et à préparer les habitants à de telles situations, notamment avec des pompes à domicile etc. C?est toujours bénéfique d?aller voir les expériences auprès de nos voisins. D?autant plus qu?on a des configurations assez semblables : le pays a travaillé sa relation à la mer depuis des siècles, comme nous. Le delta de l?Aa a aussi un polder, comme aux Pays-Bas (étendue artificielle de terre conquise sur l?eau grâce à des digues, des barrages avec un niveau inférieur à celui de la mer, NDLR). Chez nos voisins, il y a eu une réelle prise de conscience au plan national. Il faut que l?on fasse la même chose". Vous voulez dire que cette réflexion dépasse les frontières du Pas-de-Calais ? PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 98/107 "Le chef de l?État a conscience que ce qui s?est passé chez nous, à savoir un fleuve côtier dont le débit devient infernal, est une situation qui pourrait se reproduire ailleurs en France. Le dérèglement climatique concerne l?ensemble de la planète. Un exemple : le fait qu?on passe d?une situation de sécheresse à une situation historique d?inondations avec impacts très forts est l?illustration de la nécessité absolue de revoir notre organisation et notre fonctionnement. Il y a des questions difficiles qui vont être soulevées comme l'artificialisation des sols... Mais nous allons y arriver". La Voix du Nord, 8 janvier 2024 François Decoster à propos des inondations : « Je veux qu?on soit protégés jusqu?à la fin de l?hiver » - La Voix du Nord C?était un Facebook Live pour préparer la réunion d?après-inondations, qui se tient mardi 9 janvier au conseil départemental, à Arras, à l?instigation de l?État. François Decoster, le maire de Saint-Omer, souhaitait recueillir la parole des sinistrés, pour « être plus efficace ». Morceaux choisis. L?urgence Dire d?abord. Ce Facebook Live organisé à l?heure où les voeux devaient se tenir ? face à l?urgence, ils ont été annulés, comme beaucoup d?autres cérémonies dans l?Audomarois ?, est d?abord le lieu d?annonces avant la réunion convoquée par l?État au conseil départemental pour évoquer la question des inondations après un deuxième épisode exceptionnel en janvier. « Je veux qu?on soit protégés jusqu?à la fin de l?hiver », martèle François Decoster, le maire de Saint-Omer. Qui portera à Arras « quatre demandes immédiates ». Une capacité « d?évacuation maximale vers les eaux de la mer à Mardyck jusqu?au 30 avril », soit 45 mètres cubes d?eau par seconde. Le transfert des eaux de l?Aa, à hauteur de Cuinchy, vers la Deûle, « tant que celle- ci n?est pas inondée », à 7 mètres par seconde au lieu de 2 actuellement. La création d?un déversoir, en amont, dans le canal à grand gabarit, pour empêcher les « gros volumes d?eau » qui ont inondé, comme en novembre, le quartier de la gare, les rues de la Poissonnerie et Saint-Martin. Et la demande de financements exceptionnels pour les équipements individuels ? batardeaux notamment ?, qui doivent protéger les habitations de la montée des eaux. La réflexion L?urgence, donc, d?abord. Sans mettre de côté la question de l?adaptation, sur un terme plus long en écho à la mission qu?Emmanuel Macron, le président de la République, a confiée à François Decoster mi- novembre, en marge de sa visite dans l?Audomarois. Et en réponse aux questions des internautes ? ils sont autour de 200, tout au long du Facebook Live, à le suivre. Pêle-mêle, la question de ralentir l?eau en amont de Saint-Omer, et de faciliter son évacuation ensuite, d?autres, « de bon sens », estime l?élu, de l?infiltration et de « ces immenses parkings en macadam » qui imperméabilisent les sols. Celle des champs d?expansion des crues, enfin. Après la crue qu?on croyait exceptionnelle de 2002, dix ouvrages sont sortis de terre, qui permettent de retenir 610 000 mètres cubes d?eau. « Le référentiel de 2002 est dépassé, analyse le maire de Saint-Omer. On est dans une autre époque, celle du dérèglement climatique, des hivers avec des pluies intenses. On n?est pas préparés à cette vulnérabilité nouvelle. » Les interrogations Sur le fil déployé sous la fenêtre dans laquelle François Decoster s?exprime, les questions s?amoncellent. Il les reprend. Les assurances ? Il n?y aura pas de deuxième franchise pour les sinistrés, Bruno Le Maire, le ministre de l?Économie, l?a promis. Le chemin Cordier ? Les opérations de pompage débutent, pour accélérer l?évacuation de l?eau. Pourquoi se fier aux Hollandais pour imaginer l?après ? Parce qu?une grande partie de leur territoire, 26 %, est sous le niveau de la mer, et qu?« en 1953, une catastrophique submersion marine » les a fait changer de paradigme. Le dragage du canal ? « Je suis impatient de le voir », répond François Decoster. Il coûte plus cher, 800 000 euros en 2013, entre 4 et 6 millions aujourd?hui. « On a demandé une PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 99/107 prise en charge par la solidarité nationale. » L?impact Les mots de François Decoster sont choisis. Pour les voeux, « on attendra des jours meilleurs ». L?élu répète sa « mobilisation » et celle de l?équipe municipale, des agents quand certains ont parfois eu le sentiment d?être « abandonnés ». Il rappelle l?existence d?une cellule d?écoute à la mairie (03 21 98 40 88) et de France Victimes (01 41 83 42 25). « On se prend une catastrophe naturelle alors qu?on est encore en train de digérer une catastrophe naturelle, dit-il. Si j?utilise l?ouverture médiatique qui m?est offerte, c?est pour défendre le territoire. » La Voix du Nord, 5 février 2024 Inondations : François Decoster aux Pays-Bas, « je suis ici en pensant d?abord aux habitants de Saint-Omer » - La Voix du Nord Après la Belgique au début du mois, François Decoster était aux Pays-Bas les 24 et 25 janvier dans le cadre de la mission inondations qu?Emmanuel Macron lui a confiée. Il devra rendre un rapport fin février inspiré par la façon qu?ont les voisins de la France de se prémunir des crues. Quels sont les contours de la mission inondations qu?Emmanuel Macron vous a confiée lors de son déplacement dans l?Audomarois, le 14 novembre 2023, alors que Blendecques se retrouvait sous l ?eau pour la seconde fois en une semaine ? François Decoster : « La lettre de mission est arrivée fin novembre ou début décembre. C?est une mission qui me demande d?aller voir chez nos voisins belges et néerlandais leur système de protection contre les inondations afin d?alimenter notre réflexion sur ce sujet. Le calendrier est assez serré et il nous demande de travailler sur deux types de sujet : gérer l?urgence, la crise, le relogement, les assurances, la mise en sécurité, prévenir le risque immédiat grâce aux travaux d?urgence qui ont déjà commencé, aux capacités de pompage maximales maintenues jusqu?à la fin de l?hiver. C?est la première temporalité. Mais l?ambition, et c?est un vrai défi, est aussi de commencer la réflexion sur le long terme. » Qu?avez-vous fait et vu depuis le début de cette mission ? « J?étais début janvier dans les Flandres, la semaine dernière en Wallonie où la waterbomb ? littéralement la bombe d?eau ? de juillet 2021 a fait 39 morts, touché 5 000 maisons et fait 5,5 millions d?euros de dégâts, et 188 morts en Allemagne. Et enfin ici, aux Pays-Bas ? notamment à Lelystad, au Rijkswaterstaat, le bureau de gestion des eaux de l?État ? où l?on comprend qu?on a intégré les risques liés aux inondations bien plus tôt que chez nous. » En quoi ces déplacements vous nourrissent-ils ? « Il y a d?abord beaucoup de choses communes. On doit se réinterroger, partout, sur nos référentiels. La question de l?impact du dérèglement climatique est présente dans toutes les organisations, elle se traduit ici par une politique de prévention des inondations sur le long terme, où l?on travaille sur le polder jusqu?en 2050, 2100. On sait qu?on va vivre des événements pluviométriques plus intenses pendant l?hiver, des sécheresses plus importantes l?été, et que tout ceci est très difficile à prévoir. La bombe d?eau de 2021 ne correspond à aucune modélisation, elle a surpris par son intensité. » Est-ce que c?est un peu ce qu?il s?est passé dans l?Audomarois en novembre 2023 ? « On se savait plus vulnérables mais on ne s?attendait sans doute pas à cette répétition. Même ici où les gens s?adaptent, où l?eau est une question existentielle, où on a beaucoup fait après les inondations de 1953 ? les Pays-Bas déplorent deux mille morts dans la crue de 1953 qui déclenche les énormes réflexions et travaux de prévention contre les inondations ?, et après les inondations à répétition de 1993, 1995, 1998, on ne cesse de se réinterroger. » PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 100/107 Et qu?est-ce qui nous différencie ? « Ce qui est frappant aux Pays-Bas, c?est à quel point l?autorité régionale de l?eau est puissante, et ce sera l?un des objets de mon rapport. On est passé de 2 500 organismes de gestion des wateringues à 21, qui sont puissants, ont des compétences techniques en permanence, des équipes larges, des budgets et la capacité de définir leurs ressources. Il y a ce Delta commissioner ? littéralement le commissaire du delta, du nom, Delta, des programmes dédiés aux inondations aux Pays-Bas ?, qui est une instance un peu au-dessus, avec une capacité à voir loin, à être dans un dialogue constructif avec les acteurs nationaux, régionaux? » Ce Delta commissioner, c?est un concept qui vous intéresse ? « On voit bien qu?avec la question du dérèglement climatique et de l?adaptation, on n?est pas un jour sans y penser, surtout quand les jours se répètent et aboutissent à des catastrophes. Mais ici, tout le monde dit à quel point c?est utile d?avoir cette forme de permanence, une petite équipe, d?une quinzaine de personnes, autonome, indépendante, dans le dialogue, de petite taille donc mais avec une influence costaud, qui porte attention à cette question à chaque instant. Il y a dans ce pays une culture de l?eau très forte, l?histoire du pays est fondée dessus, mais ça reste un sujet. Un Néerlandais m?a dit, « aux Pays-Bas, on fait du vélo et on sait vivre avec l?eau », si seulement en France on faisait pareil. Alors oui, cet élément de gestion de l?eau, c?est une méthode intéressante. » Jan-Willem Trompetter, l?ingénieur principal du système de pompage que vous avez visité ici, à Lelystad, vous a dit qu?aux Pays-Bas, certains habitants avaient fini par oublier qu?ils vivaient sous le niveau de la mer ? 29 % du territoire se trouvent sous son niveau. Est-ce qu?à Saint-Omer on a pu oublier qu?on vivait dans un marais ? « Les inondations ont rappelé peut-être quelle réalité recouvrait le fait d?habiter dans le marais. Ce sont les paroles d?une nouvelle arrivante, lorsqu?Emmanuel Macron est venu ? le 14 novembre 2023, le président de la République a rencontré les habitants du marais de Saint-Omer avant de se rendre à Blendecques ?, qui lui dit qu?elle est venue ici pour vivre au paradis, et il n?y a pas de raison, quand le niveau de l?eau descend, que ce ne soit plus le cas. Ici, l?organisation de lutte contre les inondations est systémique. On pensait que les maisons seraient toutes équipées de batardeaux, elles n?en ont pas besoin, il y a des batardeaux de villes, et le principe du polder pousse au paroxysme l?importance de calfeutrer l?ensemble. » L?une des réponses aux inondations, c?est évidemment qu?on va devoir s?adapter ? « En 2023, l?événement est exceptionnel, mais il change notre référentiel. On doit évidemment s?adapter. Mais le sujet est difficile. Des habitants envisagent de déménager, une réponse a été apportée par Christophe Béchu ? ministre de la Transition écologique, avec le fonds Barnier. Il y a le fonds Mirapi, Mieux reconstruire après une inondation, et il doit y avoir une réponse d?adaptation des logements pour être moins impacté par une inondation. Le sujet va devenir existentiel, on ne peut plus penser que c?est extraordinaire. C?est aussi le sujet de ce travail. Et ce qu?il est important de dire, c?est que partout on est très bien accueillis, et c?est significatif. Il y a une mobilisation des acteurs chez nos voisins, le souhait de partager une histoire et une volonté de travailler ensemble. » Emmanuel Macron l?a dit quand il est venu à Saint-Omer, « on va continuer à vivre et à travailler dans le marais », cette phrase guide votre mission ? « Je suis là avant tout comme maire de Saint-Omer, je suis dépositaire de cette parole du président de la République et de la demande des habitants de Saint-Omer. Le sujet des déménagements n?est pas le même partout, Saint-Omer répond à un plan particulier né d?un rapport équilibré avec la nature, et ma responsabilité est de respecter cet équilibre, parce que les habitants l?ont demandé. Je suis ici en pensant d?abord à eux. » Nord Littoral, 8 février 2024 https://www.nordlittoral.fr/199793/article/2024-02-08/francois-decoster-en-mission-aux-pays-bas-et-en- PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 101/107 belgique-pour-lutter-contre-les François Decoster en mission aux Pays-Bas et en Belgique pour lutter contre les inondations Le président de la République Emmanuel Macron a confié une mission à François Decoster. Ce dernier nous explique son travail. Entretien. Lors de sa venue à Saint-Omer, le Président de la République Emmanuel Macron avait donné une mission au maire de la cité audomaroise François Decoster. Le maire de Saint-Omer a accepté de répondre à nos questions sur cette fameuse mission. Quelle est cette mission confiée par le président de la République ? « L?idée c?est de pouvoir contribuer à une réflexion globale sur ce qu?il faut faire, pour que des territoires comme le nôtre et au-delà, puissent prévenir le risque d?inondations. Il y a toute une question d?adaptation aux changements climatiques. On a vu avec ce qu?il s?est déroulé depuis le mois de novembre, que tout ce qui a été fait pour essayer de nous protéger contre ces risques d?inondations a été calculé à partir de ce que le territoire avait vécue en 2002. Mais tout cela est dépassé. Nous sommes dans une autre époque, avec des pluies plus fortes en intensité pendant l?hiver et des épisodes qui se déroulent sur quelques heures ou sur quelques jours et tout ceci créait des débordements et du ruissellement et quand cela arrive à Saint- Omer des eaux stagnent pendant des jours avant d?être évacuées à la mer. Ce que m?a demandé le président, c?est de contribuer à cette réflexion qui est une réflexion avec beaucoup d?autres parties prenantes. Mais moi, je dois aller voir, si du côté de nos voisins belges et néerlandais il y a des choses intéressantes pour contribuer à cette réflexion. Est-ce qu?il y a des bonnes pratiques, est-ce qu?il y a de bonnes expériences qui peuvent guider notre travail. C?est une mission de comparaison avec ce que font nos voisins, qui ont cette expérience avec les inondations et je suis accompagné d?une inspectrice générale de l?environnement et du développement. » Pourquoi avoir choisi la Belgique et les Pays-Bas ? « Il y a plusieurs raisons, déjà parce que nous avons une géographie qui est très proche, à Saint-Omer, nous sommes l?entrée d?un polder, c?est d?ailleurs un mot commun avec nos voisins. Nous avons tous les trois des terrains très plats avec parfois des zones qui se situent en dessous du niveau de la mer. Les Pays-Bas et la Belgique sont des pays qui ont une forte expérience depuis de nombreuses années en matière gestion de l?eau. Vous savez le mot Wateringue c?est un mot commun à l?Audomarois au Nord de la France, mais aussi à la Flandre et aux Pays-Bas. Les Pays-Bas considèrent que la gestion de l?eau comme une question existentielle. Il y a 26 % du territoire national qui est sous le niveau de la mer. Pouvoir gérer l ?eau, c?est quelque chose d?essentiel pour eux. Vous savez il y a un dicton néerlandais qui m?a été dit sur place : ?Si Dieu a créé la terre, les Hollandais ont créé les Pays-Bas.? Cela dit tout de leur longue expérience de la gestion de l?eau. C?est pour cela que durant la réflexion qui est la nôtre, pouvoir aller voir ce que font nos voisins proches avec une géographie qui nous ressemble cela est très intéressant. Et il y aura quelques éléments qui vont j?espère être utile. » Qu?est-ce que vous avez fait sur place ? Qui avez-vous rencontré ? « J?ai commencé mon voyage en Flandre puis en Wallonie qui a été très touchée par un épisode très meurtrier avec des inondations très fortes en juillet 2021 avec près de 40 morts. Et il y a quelques jours j?étais aux Pays-Bas pour rencontrer différents niveaux qui ont la compétence en matière de gestion de l?eau. Le ministère des infrastructures et de la gestion de l?eau à La Haye par exemple, j?ai rencontré ensuite des autorités régionales de l?eau. Puis j?ai pu avoir un temps d?échange avec le commissaire du delta qui est une autorité indépendante nommée pour une longue durée et qui a pour objectif d?essayer de planifier et d?organiser les prévisions et l?adaptation du modèle de protection dans la durée et tenir compte des effets du changement climatique. Ce sont à la fois des réunions de travail, mais aussi des visites de terrain pour voir à la fois la manière dont ils s?organisent et comment ils ont cherché à adapter leur protection, leurs prévisions et la gestion des inondations. » PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 102/107 Qu?est-ce qu?il en ressort ? Qu?est-ce que vous en retenez ? « Dans les semaines qui arrivent je vais terminer le rapport. J?ai un déplacement prévu le vendredi 9 février en Flandre-Occidentale pour aller sur le terrain avec le gouverneur, notamment à Bruges et on va compiler ce que l?on a vu dans un rapport que je dois remettre au début du mois de mars à Christophe Béchu, le ministre de la Transition écologique. Il y a bien sûr des éléments qui vont concerner la gouvernance de l?eau. On voit notamment du côté des Pays-Bas, qu?il y a une volonté de pouvoir ajuster l?organisation à la réalité hydraulique et l?unité hydraulique. Les Pays-Bas avaient il y a quelques années près de 2 500 Wateringues qui sont devenus aujourd?hui 21 agences et autorités régionales de l?eau pour avoir des équipes importantes avec des budgets importants, qui sont beaucoup plus importants que les nôtres. Et puis, il y a des questions de pensée d?ensemble du système. Il y a une approche très systémique. Aujourd?hui, on se pose la question des équipements en bâtardeaux pour nos maisons. C?est une question qui ne se pose pas vraiment aux Pays-Bas parce que le système doit vous protéger dans son ensemble. S?il y a des bâtardeaux, ils sont plus structurels pour protéger un quartier ou pour protéger une rue, il n?y a pas un bâtardeau pour chaque maison. Il y a aussi une volonté aux Pays-Bas d?avoir ce commissaire du delta qui est une approche intéressante. Cela permet d?avoir quelqu?un qui a cette permanence qui est là plus longtemps que les élus ou que le gouvernement et qui a pour mission de rappeler l?importance de maintenir l?effort et de rappeler l?importance de toujours continuer à investir. Cela fait partie de quelques éléments parmi d?autres qui sont intéressants. » Et une fois ce rapport remis au ministre que va-t-il se passer ? « Ma partie est seulement une partie de tous les travaux. Tout ceci doit accompagner la réflexion générale et il faudra prendre un certain nombre de décisions. Il reviendra au Ministre et au gouvernement de les prendre. » France Bleu, 9 février 2024 https://www.francebleu.fr/emissions/l-invite-du-6-9-france-bleu-nord/comment-prevenir-les-inondations- francois-decoster-maire-de-saint-omer-pilote-une-mission-pour-y-repondre-9426555 Comment prévenir les inondations ? François Decoster, maire de Saint-Omer, pilote une mission pour y répondre Après les inondations à répétition des derniers mois dans le Pas-de-Calais, le maire de Saint-Omer a été missionné par Emmanuel Macron pour tenter de prévenir de futures crues. Pour cela, François Decoster a notamment été chez nos voisins européens. Il est l'invité de France Bleu Nord. Depuis novembre, François Decoster est chargé par Emmanuel Macron de trouver des solutions afin d'améliorer les systèmes d'évacuation d'eau et éviter de nouvelles crues dévastatrices en France et notamment dans le Pas-de-Calais. Le maire de Saint-Omer, qui disait vouloir avoir une approche européenne, s'est rendu notamment en Belgique, où il est d'ailleurs encore ce vendredi, et aux Pays-Bas. "Donner plus d'espace pour les rivières" Il retient de ses déplacement "qu'il faut s'organiser". "Il faut s'organiser pour que l'on ait une coordination qui soit fondée sur la réalité hydraulique." François Decoster ajoute qu'il "y a eu beaucoup de moyens aux Pays-Bas pour faire en sorte de rassembler les forces pour se donner plus de moyens et également pour pouvoir faire en sorte de mieux protéger face aux inondations." L'élu note aussi "qu'il y a tout un travail aussi sur la prévention." "Donner plus d'espace pour les rivières et préparer les moments où elles pourraient avoir besoin de plus de volume". Le maire note enfin qu'il y "a une culture du risque, une culture de la gestion de l'eau." Delta FM, 16 janvier 2024 Emmanuel Macron : " On continuera à vivre à Calais, Dunkerque et dans l'Audomarois " PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 103/107 Le Président de la République a pris la parole sur les inondations Dans sa longue conférence de presse, le Président de la République a évoqué les inondations et la situation dans le Pas de Calais suite à une question de nos confrères de la Voix du Nord. Dans un premier temps, Emmanuel Macron a rappelé le soutien de l'Etat et a annoncé le retour de son Premier Ministre, sur le terrain, à la fin de mois. Il a également promis tout le soutien de l'Etat dans des opérations de pompage, des travaux rapides et l'accélération de l'indemnisation en collaboration avec les assureurs. Emmanuel Macron sur les inondations : "On sera là" Pour l'après, alors que les scientifiques s'accordent sur une montée des eaux qui devrait refaçonner notre littoral, le Président rassure : " Il n'y a aucune fatalité. On continuera à vivre dans l'audomarois, à Dunkerque ou à Calais. On devra aussi repenser ce qu'on a parfois oublié. Avant, l'évacuation vers la mer se faisait plus facilement. Avant, on curait plus facilement, les installations étaient plus efficaces. Les normes ont parfois compliqué les choses, rendant certains opérations plus coûteuses. " Le Président de la République a réaffirmé avoir confié à François Decoster (maire de Saint-Omer), une mission sur le sujet, pour simplifier certaines démarches et être plus efficaces sur l'évacuation des eaux vers la mer. Pour Emmanuel Macron, quelques soient les efforts que l'ont fait, nous aurons à vivre les conséquences du déréglement climatique : "Nous allons devoir changer nos villes, nos villages. On va progressivement adapter nos paysages." Libération, 5 janvier 2024 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 104/107 Le Point, 4 janvier 2024 Inondations dans le Pas-de-Calais : « On se sent impuissants » Le département est en vigilance rouge pour crue, et orange pour pluies et inondations. Comme en novembre dernier, les communes se retrouvent démunies. Les mêmes scènes et la même détresse. Après les inondations de novembre, huit départements, la plupart localisés dans le nord et l'est de la France, sont en vigilance orange pluie-inondation depuis mardi 2 janvier. Parmi eux, le Pas-de-Calais, placé également en vigilance rouge crue. La rivière Aa, en crue « exceptionnelle » selon Météo-France, est particulièrement scrutée. Après une nuit de surveillance fébrile, les mairies de Blendecques et Saint-Omer s'organisent pour évacuer des habitants et évacuer le plus rapidement possible l'eau. « Plus rapide et brutal » « C'est un retour à la case départ ». Le maire de Saint-Omer, François Decoster, ne cache pas sa fatigue. La ville a l'impression de revivre, « comme un mauvais feuilleton », l'épisode pluvieux du 7 novembre, « en plus rapide et brutal ». « On est en train de battre des records, souligne l'édile, lors de la grande crue PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 105/107 centennale de 2002, le débit était à 57 m/s, nous en sommes actuellement à 80 m/s. » Dans les rues inondées, l'eau se transforme en torrent. Une situation très fatigante « physiquement et émotionnellement » pour les 14 000 habitants. La préfecture du Pas-de-Calais rappelle que les évacuations se font uniquement sur ordre. En attendant, les habitants doivent rester dans les étages de leurs habitations. En plus du personnel du SDIS 62 mobilisé, 120 sapeurs-pompiers supplémentaires ont été engagés. À cinq kilomètres de là, Jean-Christophe Castelain a passé la nuit les yeux rivés sur le site Vigicrues. L'adjoint au maire de Blendeques, qui dirige la cellule d'urgence, espérait que le niveau de l'Aa baisserait vers 23 heures. Las, la rivière est sortie à plus de 2 mètres du niveau de son lit. « Nous avons évacué une vingtaine de personnes dans la nuit vers une salle de la mairie, nous allons ouvrir la salle des sports, plus grande, pour accueillir plus de monde », détaille l'élu. Les évacuations des personnes âgées ou à mobilité réduite se font à dos d'homme ou par tracteur. Évacuer l'eau « On se sent impuissants, avoue Jean-Christophe Castelain, les sols sont gorgés d'eau, plus rien ne s'évacue. » L'évacuation de l'eau sera justement cruciale dans les prochaines heures. « Tout va dépendre de la force des précipitations, souligne le maire de Saint-Omer, les faibles coefficients de marée ne vont pas beaucoup nous aider non plus. » Des moyens de pompage sont également prévus. En tout, depuis le 7 novembre, 350 habitations de Saint-Omer ont été particulièrement touchées par les inondations. « Certaines personnes n'étaient toujours pas rentrées dans leur maison, les murs n'avaient pas encore séché », pointe l'élu. Avec le risque que ces phénomènes climatiques se répètent, une réflexion plus vaste va s'engager sur l'habitat dans un milieu tel que le marais audomarois. « La relation entre l'homme et le marais date d'un millénaire, les habitants y sont attachés », explique François Decoster. Ce dernier doit rendre en mars un rapport sur la question. Le Figaro, 2 janvier 2024 Alerte rouge aux inondations dans le Pas-de-Calais : pourquoi les rivières débordent-elles de nouveau ? DÉCRYPTAGE - Le département a été classé en vigilance rouge «crues» mardi. «Il est absolument indispensable de nous préparer» au dérèglement climatique, a lancé le maire de Saint-Omer, commune touchée de plein fouet par les inondations. Le nord de l?Hexagone vit ses premiers jours de l?an les pieds dans l?eau. La situation est alarmante dans le Nord et surtout dans le Pas-de-Calais, classé par Météo France en vigilance rouge «crues» mardi après-midi, alors que 15 litres d?eau sont tombés au mètre carré dans la nuit de lundi à mardi dans ce département. L?organisme évoque une «pluie continue et durable» sur la zone. Les cumuls de pluie pourraient atteindre des valeurs de 20 à 40 mm sur plusieurs zones du département, dépassant localement 40 mm, prévoit encore Météo France . Ces pluies fortes et abondantes perturbent les rivières, qui sont scrutées avec inquiétude par les habitants comme par les autorités. Huit cours d?eau sont placés en alerte orange «crues» dans le Nord et le Pas-de- Calais. Des risques de «débordements importants» dans les «prochains jours» sont à craindre à proximité de plusieurs rivières, la Liane, la Hem, l?Aa (classé en vigilance rouge «crues» par le site d?informations Vigicrues), la Lys amont-Laquette, la Lawe, La Clarence amont, la Lys Plaine et la Canche, écrit encore Vigicrues . Les sols saturés d?eau depuis novembre Une situation «exceptionnelle» qui s?explique par plusieurs facteurs, réagit Adam Beernaert, directeur général de la Protection civile dans le Pas-de-Calais. «Il pleut beaucoup, dans des délais très courts», détaille-t-il, sur des sols saturés d?humidité qui peinent à dégorger depuis les crues records du 6 novembre. Le Pas-de-Calais est victime de fortes inondations depuis maintenant deux mois. Ces crues exceptionnelles, qui avaient fait cinq blessés légers dans le département, ont causé d?importants dégâts matériels : 6000 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 106/107 habitations, 160 commerces, 130 entreprises et des dizaines d?exploitations agricoles avaient été touchés par les intempéries. Les nappes phréatiques «sont donc pleines d'eau» et débordent aux premières pluies : les eaux en surplus ruissellent vers les cours d?eau de la région, peu nombreux, qui débordent presque automatiquement. La géographie naturelle doit également être prise en compte : le département du Pas-de-Calais est plat. Le cours d?eau de l?Aa dans l?Audomarois (dans le nord-est du département) est même dix mètres en dessous du niveau de la mer, ce qui entrave l?évacuation des eaux, qui s?écoulent peu vers la mer du Nord. Dans cette région, l?Aa est en crue et inondait en début de semaine certaines rues des communes de Wizernes et de Blendecques. En parallèle, les marées à fort coefficient peuvent pousser les eaux des rivières dans le sens opposé à leur descente : l?eau rentre dans les terres, au lieu de se jeter dans la mer. Les systèmes d?évacuation des eaux peinent à tenir le coup face à de telles intempéries. «Les pompes et les digues ne sont pas calibrées pour endiguer des conditions climatiques si exceptionnelles», ajoute Adam Beernaert. «Pour tenir le coup, il faudrait élever de trois mètres les digues de franchissement d?eau sur les rivières qui sont actuellement à deux mètres dix», avance-t-il encore. Des propos corroborés par François Decoster, maire de la commune sinistrée de Saint-Omer. Ces «travaux supplémentaires» avec «des équipements à dimension» sont nécessaires pour affronter de telles catastrophes, détaillait-il le 3 janvier sur France Info, d?autant plus que ces inondations sont amenées à se multiplier «plus régulièrement et plus violemment» en fonction du dérèglement climatique. L?édile rappelle notamment les travaux menés à la suite des «crues historiques» de 2002 qui avaient occasionné 40 millions d?euros de dégâts. Ces constructions se révèlent pourtant «insuffisantes» 20 ans plus tard. «Il faut aller plus loin», a-t-il tonné, et il est «indispensable de nous y préparer très rapidement». Dans les faits, les bassins de rétention, qui «sont pleins en permanence» selon Adam Beernaert, débordent dès les premières gouttes de pluie. Les plus gros cours d?eau sont en crue en moyenne un à deux jours après les premières précipitations «et font à leur tour déborder les rivières et les fleuves». «Evacués six fois en deux mois» Des débordements qui mettent à rude épreuve le moral des habitants du département. «On sent de la colère et de l?épuisement », déplore Adam Beernaert, «avec des locaux qui ont été évacués cinq à six fois en deux mois». Certains avaient été relogés dès les premiers jours de pluie en novembre et n'avaient toujours pas remis les pieds dans leurs habitations aux premiers jours de 2024. Les murs des maisons n?ont pas le temps de sécher, les fondations des maisons s?érodent, l?eau et l?électricité sont coupées depuis deux mois dans certaines habitations. «Après le mois de décembre, on pensait que tout cela était derrière nous et là on a l'impression de revivre le même cauchemar», s?émeut encore le maire de Saint-Omer. Depuis le 6 novembre, 1200 bénévoles de la protection civile sont mobilisés dans le Pas-de-Calais pour assister les sinistrés, et 520 interventions ont été faites. «On est sur le pont en permanence depuis deux mois», explique le directeur. Une mobilisation qui est loin de diminuer : au vu des précipitations attendues sur le département en début de semaine, «les crues ne peuvent que s'aggraver», s'alarme Adam Beernaert. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 107/107 Annexe 7. Eléments de bibliographie AGUR, IIW, 2014, Les wateringues, hier et aujourd?hui, 66 p. Caisse centrale de réassurance, 2023, La prévention des catastrophes naturelles par le fonds de prévention des risques naturels majeurs, édition 2023, 59 p. Chambre régionale des comptes, 2023, « Syndicat mixte « Institution Intercommunale des Wateringues » » 48p. Commissariat spécial à la reconstruction, 2022, Un an après les inondations, bilan de la gestion post-inondations et continuité de la reconstruction, 102 p. CGEDD, 2019, Christian Barthod, Marie-Claire Bozonnet, François Scarbonchi, Évaluation du dispositif des programmes, d?actions de prévention des inondations (PAPI) et de l?efficacité de sa mise en oeuvre, Rapport CGEDD n° 012877-01, IGA n° 19053R, 112 p. DGCL, 2023 ? 04, La taxe Gemapi, une ressource en croissance pour les collectivités, bulletin d?information statistique n°174, 12 p. IGEDD, IGA, CGE, 2023, Olivier Diederichs, Philippe Louviau, Jean-Philippe Torterotot, Serge Catoire ? CGE, Retour d?expérience des inondations des 14 et 15 juillet 2021 ; 136 p. Parlement wallon, 2022, Rapport de la Commission d'enquête parlementaire chargée d'examiner les causes et d'évaluer la gestion des inondations de juillet 2021 en Wallonie, 894 (2021-2022) ? N° 1, 95 p. R. Slomp, 2012, Le cadre législatif et organisationnel de la gestion du risque d?inondation aux Pays- Bas, Audition au Sénat, Paris 29 mai 2012, Rijkswaterstaat, 78 p. R. Slomp, Y. Friaucourt, 2022, Les Pays-Bas face à la montée des eaux : quelle stratégie pour le long terme et comment répondre aux différents enjeux ? , Annales des mines, Juillet, numéro 117, pp.85- 89 PUBLIÉ  Sommaire  Liste des recommandations  Introduction  1 Des inondations longues, liées à des pluies exceptionnelles, sur un territoire de polder  1.1 Des épisodes de pluie d?occurrence parfois centennale sur les sois humides du polder  1.2 Des inondations importantes et longues sur plusieurs bassins  1.3 Une implication historique forte dans la gestion de l?eau mais des évolutions récentes de nature à aggraver les inondations  1.3.1 Un système de drainage mis en place depuis le Moyen-âge  1.3.2 Une action structurée de l?Etat et des collectivités dans la prévention des inondations  1.3.3 Une gestion de l?eau qui mobilise de nombreux acteurs  1.4 Le climat change, le territoire aussi  1.5 Les questions soulevées à l?issue de ces épisodes d?inondation  2 Des similitudes avec les pays voisins qui font socle, des différences qui peuvent être inspirantes  2.1 Des axes d?action complémentaires et une implication de tous les niveaux  2.1.1 La prévention des inondations s?inscrit dans le cadre européen et le rythme et l?intensité de ses évolutions sont marqués par les grandes catastrophes  2.1.2 La prévention des inondations est partenariale par nature  2.1.3 La prévention des inondations prend le pas sur la protection à des rythmes différents selon les pays  2.1.4 La gestion de crise est organisée en fonction de la gravité de la catastrophe  2.1.5 Des coopérations sont une condition première de la prévention des inondations  2.2 Des différences dans le portage stratégique de la prévention des inondations  2.2.1 La capacité à faire de la prévention des inondations une priorité  2.2.2 La pondération des axes d?action  2.2.3 La posture en gestion de crise  2.2.4 L?engagement dans l?adaptation au changement climatique  3 Les actions et axes de progrès qui se dégagent  3.1 Croiser le retour des inondations de fin 2023 - début 2024 et les bonnes pratiques de nos voisins  3.1.1 Des leviers pour améliorer la gestion de crise  3.1.1.1 Organiser une participation accrue des élus à la gestion de crise  3.1.1.2 Mieux anticiper les moyens de pompage en crise  3.1.1.3 Expérimenter des dispositifs de participation citoyenne  3.1.1.4 Deux pistes concrètes pour poursuivre et renforcer un travail permanent sur la culture du risque  3.1.2 Etablir un diagnostic partagé de l?état des cours d?eaux, canaux, fossés  3.2 Renforcer le portage de la prévention par les collectivités locales compétentes  3.3 Anticiper les modalités du relèvement et l?accompagner par une structure spécifique  3.4 Renforcer les coopérations transfrontalières  3.5 Installer une institution stratège et pérenne, au plus haut niveau de l?Etat, pour orienter et soutenir l?adaptation au changement climatique  3.5.1 Structurer le portage politique de l?adaptation au changement climatique au plus haut niveau  3.5.2 Une action à lancer : représenter l?inondation et informer  3.5.2.1 Une carte des provinces, qui offre une information localisée sur tous les risques (avec un accès dans différentes langues dont le Français)  3.5.2.2 Des outils de communication pour former aux comportements qui sauvent  Conclusion  Annexes  Annexe 1. Lettre de mission  Annexe 2. Agenda des déplacements et liste des personnes rencontrées  Annexe 3. La prévention des inondations aux Pays-Bas  Annexe 3.1. Les catastrophes, moments fondateurs des politiques de prévention contre les inondations  Annexe 3.2. Des protections des premiers Plans Delta au Commissaire du Delta  Annexe 3.2.1 La défense contre la mer  Annexe 3.2.2 La protection contre les inondations fluviales  Annexe 3.2.3 L?articulation avec la place pour le fleuve, et le changement de cap opéré dans le contexte du changement climatique  Annexe 3.3. Organisation de la prévention des inondations  Annexe 3.3.1 Une gestion de l?eau et du risque intégrée à l?échelle ministérielle  Annexe 3.3.2 Une organisation spécifique pour la gestion de l?eau aux échelons territoriaux  Annexe 3.3.3 Un financement des protections et de la prévention organisé dans une logique de subsidiarité  Annexe 3.4. Une gestion de crise fondée sur des principes clairs et partagés  Annexe 3.5. De la prévention des inondations à l?adaptation au changement climatique  Annexe 4. La prévention des inondations en Belgique  Annexe 4.1. Mise en perspective historique et géographique  Annexe 4.1.1 Un pays présentant des enjeux différenciés du point de vue de la prévention des inondations  Annexe 4.1.2 Des enjeux transfrontaliers majeurs  Annexe 4.2. La gestion de l?eau dans le système fédéral belge  Annexe 4.2.1 Le rôle important des régions  Annexe 4.2.2 Une organisation de la gestion de crise par niveaux de gravité  Annexe 4.2.3 Un système assuranciel présenté comme fragile  Annexe 4.2.4 Le choc des inondations de juillet 2021  Annexe 4.3. Les Flandres : une structuration par grand bassin, en cours d?inflexion  Annexe 4.3.1 L?équilibre entre protection et aménagement du territoire  Annexe 4.3.2 L?adoption de nouveaux grands plans structurants  Annexe 4.4. La Wallonie : le choc des inondations de juillet 2021  Annexe 4.4.1 Quelques éléments sur le cadre général de la prévention des inondations  Annexe 4.4.2 Mise en place d?un dispositif spécifique de reconstruction  Annexe 5. Rapport de la Commission d?enquête parlementaire chargée d?examiner les causes et d?évaluer la gestion des inondations de juillet 2021 en Wallonie du 22 mars 2022  Annexe 6. Revue de presse  Annexe 7. Eléments de bibliographie (ATTENTION: OPTION du bassin versant. L?exercice de cette compétence est ainsi structuré dans le cadre de syndicats à qui les EPCI peuvent déléguer ou transférer tout ou partie des compétences. Cette approche présente plusieurs avantages : elle s?appuie, comme cela a été fait en France depuis la création des Agences de l?eau en 1964, sur les bassins versants ; elle est intégratrice de trois composantes majeures : urbanisme, compétence historique des collectivités locales, gestion des milieux aquatiques, prévention des inondations. En revanche, la gouvernance et les solidarités nécessaires ne se construisent que progressivement, et les organisations qui en résultent sont également parfois complexes. 2.2.2 La pondération des axes d?action - La prise en compte de l?urbanisme dans la prévention des risques d?inondation est plus ancienne et plus structurée en France. Les PPRi, établis par l?Etat, après concertation, sont des servitudes d?utilité publique qui s?imposent à l?urbanisme. Ils visent à empêcher une augmentation des enjeux dans les zones les plus exposées, et prescrire des mesures de réduction de la vulnérabilité dans les zones exposées. Dans ce cadre, un accompagnement financier des territoires est mis en place, priorisé sur les territoires les plus exposés qui sont ceux qui donnent lieu à des PPRi, et conditionné à un programme de prévention mené à l?échelle des bassins versants. En France, on considère que, dans le long terme, une digue est toujours faillible et qu?un ouvrage de protection ne peut se justifier PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 29/107 pour un aménagement nouveau, mais uniquement pour protéger l?existant34. Aux Pays-Bas l?interdiction de construire concerne uniquement les espaces entre le cours d?eau et la digue, et derrière les digues (ce qui est également le cas en France). Les règles de construction font, par ailleurs, référence à des obligations génériques de stabilité dont le respect relève du maitre d?ouvrage ; les maisons flottantes sont construites « aux risques et périls des habitants ». Les différences d?approche historiques peuvent sans doute s?expliquer par des contraintes spatiales et des densités différentes. En Belgique, comme aux Pays-Bas, des cartes d?aléa existent ou sont en cours d?élaboration, qui relèvent d?une démarche de porter-à-connaissance, voire d?information acquéreur locataire, telle qu?elle existe en France 35. Encadré 8 : Des systèmes assuranciels très différents Le système d?assurance est plus protecteur en France, où l?assurance contre les inondations est liée à l?assurance habitation, avec une surprime obligatoire, qui permet, en cas de catastrophe majeure, une prise en charge par l?assurance et par la réassurance. Le système français apparait ainsi comme marqué par un niveau de solidarité plus important en France qu ?en Belgique et aux Pays-Bas. Cela soulève deux types de questions différentes : - un effet parfois peu incitatif à ne pas s?exposer ; - une évolution possible de ce système dans le contexte de catastrophes répétées, avec des primes modulées ou des risque nouveaux de refus d?assurance. C?est un sujet de forte préoccupation des collectivités locales et des habitants En juillet 2022, le gouvernement de la région wallonne communiquait dans les termes suivants : « Dès le lendemain de la catastrophe le Gouvernement a négocié avec les compagnies d ?assurance pour permettre aux personnes sinistrées assurées de bénéficier d?une indemnisation complète en fonction des clauses de leur police d?assurance et des accords avec les experts. Une loi fédérale permet en effet aux assureurs de limiter les indemnisations versées aux sinistrés en cas de catastrophe de grande ampleur. Dans le cas des inondations de juillet dernier les assurés n?auraient touché que 20% du montant des dégâts estimés par leur assureur. A la lumière du drame humain que représentaient les inondations le Gouvernement a décidé d ?accomplir un effort financier sans précédent d?un milliard d?euros pour permettre l?indemnisation complète des personnes sinistrées assurées. Après négociation, les assureurs ont quasiment doublé leur plafond d?intervention. C?est ainsi qu?à ce stade les assureurs interviennent à raison de 41% et le Gouvernement à raison de 59%. » Les personnes qui n?étaient pas assurées ont reçu l?aide d?un « fonds des calamités », mis en place par le gouvernement pour éviter à tout prix qu?une partie de la population non assurée ne tombe dans la précarité totale. » Aux Pays Bas, l?opérateur (RVO) chargé d?indemniser les victimes publiait en juillet 2022 le bilan suivant : « Exactement 1 an après les fortes pluies et inondations dans le Limbourg et le Brabant du Nord en juillet 2021 nous avons déterminé 1 518 demandes de victimes. Plus de 34 millions d'euros ont été versés dans le cadre du programme WTS de juillet 2021. » « L'assurance volontaire contre les dommages causés par les inondations de la mer et des rivières aux habitations a été proposée dans des produits successifs entre 2012 et 2020 par un assureur (Pays-Bas). Le porteur de risque s'est depuis retiré et il n'existe actuellement aucun assureur aux Pays-Bas qui offre une assurance contre les inondations d'origine maritime et fluviale (percée des défenses primaires contre les inondations) à l'exception des produits destinés à un certain nombre de multinationales et à quelques particuliers très fortunés. L'Association néerlandaise des assureurs indique que cela est dû à une sensibilisation insuffisante (les Néerlandais se sentent relativement en sécurité) à l'anti-sélection et au risque d'accumulation. » Les interlocuteurs administratifs de la mission lui ont confirmé que les dégâts liés aux inondations n?étaient indemnisés que par des fonds publics, que la mise en oeuvre de tels fonds était décidée au cas par cas par le gouvernement et qu?un principe 34https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Modalit%C3%A9s%20d%E2%80%99application%20du%20d%C3 %A9cret%20PPRi%20%E2%80%93%20Novembre%202019.pdf 35 https://www.google.com/search?client=firefox-b-e&q=ERRIAL PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 30/107 général était que l?indemnisation ne couvre pas la totalité des coûts, afin d?inciter à la prudence ceux qui construisent ou résident en zone inondable36. - Dans la suite de la « Water Bomb » de juillet 2021, le gouvernement de Wallonie a mis en place une équipe projet « agile », afin de gérer au mieux les réponses immédiates à la catastrophe et la préparation d?un urbanisme plus résilient qui n?a pas encore d?équivalent en France. Le Commissariat spécial à la reconstruction a été mis en place dès le 26 juillet 2021. Cette équipe pluridisciplinaire d?une dizaine de personnes a été mobilisée pendant un an pour répondre de manière pragmatique aux besoins des 3 grands bassins versants belges sinistrés, en particulier la vallée de la Vesdre. Il s?agissait d?avoir des réflexions sur des aménagements adaptés à la situation. Le Commissariat spécial à la reconstruction n?est pas une autorité mais un ensemblier. C?est une cellule placée auprès du président du gouvernement wallon, ce qui lui donne du poids. Des enjeux forts ont été la gestion de la temporalité entre l?urgence (aide à la réparation, avec un soutien public pour ce qui n?était pas couvert par les assurances) après crise et la reconstruction résiliente, ou encore la priorisation pour cibler l?action sur les neuf communes les plus touchées. Il s?agissait, selon les termes des personnes rencontrées, de réfléchir avant de reconstruire, sans empêcher les mesures immédiates qui donnent du « confort ». Le travail a porté aussi sur la trame agricole, les haies, le sens du labour, le couvert forestier, qui impactent la gravité des inondations. - La gestion des fossés, canaux, cours d?eau diffère dans les trois pays. Si en France, la responsabilité des riverains est affirmée, dans une logique d?association de tous les intéressés à la gestion de l?eau, les Pays-Bas ont explicitement dissocié propriété et gestion ? celle-ci étant, le plus souvent confiée à un opérateur, sans exclure, par exemple pour les wateringues, que des agriculteurs en prennent en charge une partie. Les comparaisons quant aux doctrines et modalités de gestion sont difficiles, compte tenu de la limite ténue entre entretien et curage. Pour autant, il ressort qu?en Flandre comme au Pays-Bas, les modalités de gestion dépendent toujours de l?objet visé, avec une différence possible entre ce qui est navigable et ce qui ne l?est pas, et donnent lieu à une préparation d?ensemble (guides d?entretien territoriaux) et à des interventions régulières. Ces programmes sont assurés et financés par les riverains, le cas échéant sous contrôle de l?autorité compétente pour la gestion de l?eau, sauf pour les infrastructures majeures. 2.2.3 La posture en gestion de crise - Des points de différence dans la gestion de crise, dans les modalités d?anticipation, de communication et dans la place des élus locaux d?une part, de bénévoles d?autres part. Aux-Pays-Bas, compte tenu du rôle majeur des digues dans la protection, des vérifications et manoeuvres spécifiques sont nécessaires en prévision d?épisodes de crue intense. L?ensemble de ces actions prennent habituellement 5 jours de travail. De ce fait, un préavis fixe est demandé aux services de prévision météorologique et de prévision des crues. En France, c?est le système des vigilances qui permet non seulement l?information du public mais aussi celle des services de gestion de crise de l?Etat, sans exclure des échanges informels, mais qui ne relèvent pas d?un cadre systématique. « La communication est une partie essentielle de la gestion de crise ». Les témoignages de gestion de crise, en Belgique comme aux Pays-Bas, soulignent l?importance de partager des règles claires de communication qui se résument aux principes suivants : c?est l?autorité qui gère la crise qui communique, les autres autorités étant les porteuses d?une démultiplication des informations ainsi diffusées ? ce qui suppose qu?elles en disposent régulièrement et facilement. L?accent est mis aussi sur la nécessité d?une veille sur les rumeurs (sur les réseaux sociaux en particulier) pour y apporter des réponses rapides. C?est aussi un des points de recommandations du rapport parlementaire après les crues de Wallonie. Un corollaire de cette approche est, en Belgique comme aux Pays-Bas, une association étroite 36 IGEDD, 2023 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 31/107 des élus locaux à la gestion de crise ? y compris par leur accès, en lecture au moins, aux systèmes d?information de gestion de crise. Aux Pays-Bas, ce sont les autorités régionales de l?eau qui sont associées à la gestion de crise des inondations. Enfin, certaines autorités régionales de l?eau, aux Pays-Bas, recourent à des bénévoles, qui constituent un réseau de plusieurs milliers de personnes, pour la surveillance des digues mais aussi, conjointement avec leur personnel administratif, pour la fermeture de certains batardeaux et pour le renforcement de digues en cas d?urgence (sacs de sable). Pour la préparation aux situations de crise mais aussi pour l?inspection des digues, des formations sont prodiguées par les autorités régionales de l?eau en mobilisant le cas échéant des entreprises qualifiées. Cette démarche, qui est recommandée en Wallonie, dans le rapport postérieur aux inondations de juillet 2021, présente de nombreux intérêts, à commencer par la mobilisation de soutiens formés en période de crise, mais également, au long des années, des occasions de travail en réseau entre autorités et ainsi de soutien à la culture du risque dans la population. La mobilisation de volontaires pour la surveillance des digues, réunis une fois par an, est un vecteur de sensibilisation de la population au comportement de ces ouvrages et à leurs limites. Aux Pays-Bas, un des retours d?expérience de la crise de juillet 2021 a été de réaffirmer la nécessi té que les informations météorologiques soient interprétées par l?autorité compétente pour la gestion de l?eau, seule habilitée à recommander aux municipalités l?évacuation (principe de « point unique d?alerte ») ; cela afin d?éviter les évacuations superfétatoires non éclairées. 2.2.4 L?engagement dans l?adaptation au changement climatique - Une première approche de l?adaptation au changement climatique est l?articulation d?enjeux comme la gestion mieux articulée des risques d?inondation et de sécheresse. Elle apparait hétérogène et, dans l?ensemble, non stabilisée. Aux Pays-Bas, les inondations de novembre 2023 ont à nouveau posé la question : au lieu d?évacuer le plus vite possible l?eau à la mer, un nouvel enjeu, au regard des risques de sécheresse, ne serait-il pas de la retenir ? Le premier moyen pour cela identifié aux Pays-Bas est l?infiltration dans les sols et la recharge des nappes, et non la création de bassins de rétention, qui, de toutes façons sont difficiles à gérer car ils ont potentiellement deux objectifs considérés comme non compatibles (en fonction des saisonnalités des événements et des enjeux en présence) : écrêter les crues et retenir l?eau pour en disposer l?été. En Flandre, la visite de la zone d?expansion des crues de Blanckaert a illustré le fonctionnement d?une immense zone, qui n?a pas vocation à garder l?eau pour l?été. En Wallonie, ont été évoquée les limites d?une approche de rétention de l?eau qui a finalement peu d?impact sur des crues importantes, et apporte peu de réponse au regard des besoins en eau, notamment de certains sites industriels gros consommateurs. - De manière plus structurelle, le travail d?adaptation repose sur la structuration de démarches organisées et pilotées d?anticipation des changements à venir et des mesures à prendre, dans un calendrier réfléchi et partagé. L?adaptation au changement climatique, en France, passe par la réalisation régulière du Plan national d?adaptation au changement climatique (PNACC)37 qui liste des actions à mener, mais n?est pas nécessairement identifié par les élus locaux ou le grand public comme dégageant des lignes stratégiques fortes claires et partagées, comme a pu le faire, sur le seul sujet de la prévention des inondations, la Stratégie nationale de gestion des risques d?inondation (SNGRI) après Xynthia. 37 La Stratégie nationale d?adaptation au changement climatique exprime le point de vue de l?État sur la manière d?aborder la question de l?adaptation au changement climatique. Cette stratégie a été élaborée dans le cadre d?une large concertation, menée par l?Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique (ONERC), impliquant les différents secteurs d?activités et la société civile sous la responsabilité du délégué interministériel au développement durable. Elle a été validée par le Comité interministériel pour le développement durable réuni le 13 novembre 2006 par le Premier ministre. La France s?est dotée en 2011 de son premier Plan national d?adaptation au changement climatique (PNACC) pour une période de 5 ans. Le 3ème devrait être approuvé en 2024. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 32/107 Encadré 9 : La Stratégie nationale de gestion des risques d?inondation (SNGRI) Face au bilan catastrophique des inondations en Europe, notamment les grandes crues de l?été 2012 en Europe centrale et du printemps 2013, le gouvernement a adopté en 2014 la Stratégie nationale de gestion des risques d?inondation. Elle poursuit trois objectifs prioritaires, dont l?atteinte par les différents acteurs est à analyser sur le long terme, à 20 ou 30 ans par une mise en oeuvre progressive, en conduisant une évaluation quantifiée des performances actuelles et futures. ? Augmenter la sécurité des populations exposées ? Stabiliser à court terme, et réduire à moyen terme, le coût des dommages liés à l?inondation ? Raccourcir fortement le délai de retour à la normale des territoires sinistrés Les principes directeurs au service des objectifs sont le principe de solidarité, le principe de subsidiarité et de synergie des politiques publiques, et le principe de priorisation et d?amélioration continue. Les quatre défis à relever sont : ? Développer la gouvernance et les maîtrises d?ouvrage ? Aménager durablement les territoires ? Mieux savoir pour mieux agir ? Apprendre à vivre avec les inondations. En Belgique, des travaux importants et de natures différentes ont été organisées après la « water bomb » : en Wallonie, le cadre est donné par le rapport parlementaire qui comporte 161 recommandations (annexe 7). En Flandre, à la suite de ces inondations, le gouvernement a souhaité revoir la prévention des inondations sur son territoire en cas d?épisode météorologique aussi grave. Le travail pluridisciplinaire, dont le pilotage a été confié à un universitaire néerlandais, a conduit à l?avis « Résilient Waterland » qui comporte dix recommandations, que, de fait, apparaissent comme le passage de la prévention des inondations à l?adaptation au changement climatique. Ce travail apparait également, dans les échanges, comme de nature à faciliter de mobilisation collective en temps utile, et notamment dans la suite des inondations de 2023, pour mettre en place dans des délais courts, les suites adaptées à cette crise. Les Pays-Bas sont engagés depuis le début des années 2000 dans des travaux sur leur adaptation au changement climatique. « Nous vivons dans un delta, nous devons nous adapter continuellement », « La stratégie pour les siècles à venir repose sur deux piliers : la protection contre les inondations et la durabilité », ou encore « Le choix d?accepter l?eau comme une opportunité et non plus comme une menace est fait, soit un changement radical dans la philosophie de ce pays conquis par la pelle et la sueur. » Le Commissariat au Programme Delta, historiquement tourné vers les grands travaux d?infrastructure, puis peu à peu également vers ceux visant à redonner de la place aux cours d?eau, a connu une nouvelle étape à partir de 2012 avec la création du Commissaire du Delta dont les travaux visent l?anticipation du changement climatique, dans une démarche stratégique, de planification spatiale, et une approche partenariale. Il s?agit de travailler sur les limites que nous donne la nature, limites qui sont atteintes. Une priorité identifiée depuis 2021 est de mieux prendre en compte l?eau et les sols. Cela a été porté par le gouvernement entré en fonction en janvier 2022, puis a donné lieu à une stratégie gouvernementale transmise au parlement en date du 25 novembre 2022, présentant les actions prévues en grandes lignes, à une revue scientifique, et à des discussions avec tous les niveaux de gouvernement. Encadré 10 : ce qu?un expert néerlandais propose de retenir dans un processus de parangonnage38 « Les Pays-Bas sont souvent mis en avant en raison de leurs prouesses techniques dans le domaine de la maîtrise de l?eau. Mais celles-ci sont le résultat de siècles d?évolution et d?un profond ancrage de cette question dans la culture néerlandaise. Elles sont également spécifiques de la géographie et des enjeux propres à ce pays et, de ce fait, ne sont pas forcément adaptées pour pouvoir être exportées telles quelles dans d?autres pays. (?) Le risque d?inondation est très présent dans l?inconscient collectif néerlandais depuis des siècles ; la maîtrise de ce risque est acceptée, car elle constitue un enjeu fondamental de la survie même du pays. De ce fait, des mesures ont été prises pour lui donner une place spécifique dans les processus décisionnels, qui la met à l?abri des aléas et des contraintes politiques. 38 R.Slomp Y. Friocourt, 2023, Quelles leçons peuvent tirer les autres pays de l?exemple des Pays-Bas ? Annales des mines 107. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 33/107 Par ailleurs, la société et le modèle politique néerlandais reposent fortement sur le principe du compromis, ce que l?on appelle le « modèle du polder » : avant qu?une décision soit prise, il est important que les opinions des uns et des autres soient attentivement écoutées, afin de pouvoir prendre la décision qui causera le moins de frictions. Ce modèle ne facilite pas la rapidité dans la prise de décision, mais il permet à chacun de se sentir écouté et respecté. Appliqué dans le domaine de la maîtrise de l?eau, il encourage chacun à essayer de trouver des solutions techniques pratiques, qui respectent les différents enjeux, et de mise en oeuvre très décentralisée. Cette approche marquée par la lenteur nécessite d?anticiper, de se poser le plus tôt possible des questions fondamentales, sans forcément y apporter de réponse immédiate. Et cela est spécifiquement le but du programme de recherche portant sur les conséquences de la hausse du niveau de la mer : il n?est pas question de trouver immédiatement des mesures qui mettront les Pays-Bas directement à l?abri de ce risque, mais plutôt de comprendre jusqu?à quand les principes de base actuels de la gestion sont tenables et quelles options sont possibles pour le futur. Par la suite, chaque direction identifiée sera étudiée plus en détail et fera l?objet d?études d?impact et de consultations publiques, avant que des décisions ne soient prises. Et chaque nouvelle inondation ou épisode de sécheresse inattendus apporteront leur lot de découvertes et de déconvenues qui seront, elles aussi, intégrées dans le processus décisionnel. De plus, la pérennité des solutions aux Pays-Bas est indéniablement interdépendante des choix que les pays voi- sins pourront faire, particulièrement dans les bassins versants des fleuves Rhin, Meuse et Escaut. L?adaptation au changement climatique ne se fera que via la collaboration internationale et le soutien actif de la société tout entière, chacun dans son domaine de compétence. Les autorités nationales et locales peuvent définir des principes de base et des réglementations, mais ce sont les citoyens et les entreprises qui, finalement, vont décider ou non d?accepter un risque et de participer à l?effort com- mun. Dans les régions où le risque d?inondation existe depuis des générations, cette volonté est déjà présente dans l?inconscient collectif. Mais pour les habitants des autres régions, il est important de les éduquer et de leur en expliquer les raisons, afin de rendre chacun d?eux partie prenante dans l?appréhension du problème et surtout dans l?élaboration des solutions y répondant. L?allocation structurelle de budgets pérennes en est un ingrédient essentiel. La croissance économique progressant beaucoup plus rapidement que la période de réfection des milliers de kilomètres de digues qui dure typiquement trente à quarante ans, on estime que le risque d?inondation aux Pays-Bas est resté à peu près constant en termes financiers depuis 1953, la dernière inondation catastrophique enregistrée. Cela suggère a contrario que ce risque pourrait avoir fortement augmenté dans les pays qui n?ont pris aucune mesure particulière et prouve ainsi l?ampleur du défi qui nous attend ». PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 34/107 3 Les actions et axes de progrès qui se dégagent Les comparaisons avec nos voisins offrent l?occasion de constater que, dans un cadre commun donné par les directives européennes, et parfois le vécu des mêmes catastrophes quoique d?amplitudes différentes, chaque Etat, ou région, a construit une prévention des inondations qui fait système avec des avancées sur différents points. Les pistes d?amélioration qui en ressortent sont de natures différentes : celles qui tiennent à des actions ponctuelles, de nature à renforcer des démarches en cours, et celles qui sont plus structurelles. Dans certains cas, les territoires touchés par les inondations de 2023 pourraient être expérimentateurs, en vue d?une diffusion des bonnes pratiques identifiées ailleurs sur le territoire national. 3.1 Croiser le retour des inondations de fin 2023 - début 2024 et les bonnes pratiques de nos voisins 3.1.1 Des leviers pour améliorer la gestion de crise 3.1.1.1 Organiser une participation accrue des élus à la gestion de crise - Identifier le niveau de participation pertinent ? entre EPCI et EPTB et structurer une participation efficace à la gestion de crise avec comme axes de travail : - le développement de dispositifs de surveillance du réseau et de systèmes d?information partagés, en interface avec les autorités préfectorales gestionnaires de la crise, - la participation, proportionnée, organisée et anticipée de ces élus ou de leurs services à la gestion de crise ? avec par exemple l?accès en lecture aux informations continues, la participation à des exercices telle que prévue dans les circulaires du ministère de l?intérieur?. Cet axe de travail peut être lié à des dispositifs de formation des élus renforcés. - l?amélioration des protocoles de communication pour répondre aux attentes des populations aux plus près du terrain, et éviter les rumeurs. Recommandation 1. : Proposer une place réelle pour des élus dans la gestion de crises inondation, notamment au sein des cellules de crise, dans le partage de la vision globale de l'information sur le la gestion des événements liés à la crise et des données sur l'ensemble du territoire en crise (travail à mener sous pilotage de la DGSCGC en lien avec les préfectures, des représentants des EPTB, des EPCI et des maires, en lien avec la DGPR d?ici fin 2024, pour préciser la feuille de route et engager les premières actions). 3.1.1.2 Mieux anticiper les moyens de pompage en crise Si les dispositifs de pompage pérennes et de secours semblent très organisés aux Pays-Bas, le retour d?expérience des crues de 2023 en France comme dans en Flandre a témoigné d?une capacité à mettre en place et déployer dans les meilleurs délais des dispositifs qui n?étaient pas prévus au niveau requis. Dans la suite de ce déploiement, il parait nécessaire que le re tour d?expérience conduise à : - intégrer ce qui a été efficace dans les plans Orsec, et compléter ce retour d?expérience, si nécessaire, avec d?autres scénarios de crises ; - identifier les infrastructures requises ? plates-formes, apports d?énergies, les éventuels travaux PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 35/107 structurels à mener, et à identifier ce qui relève de l?axe gestion de crise des PAPI et ce qui relève des moyens des SDIS, et de ceux de la sécurité civile ; - prévoir dans la programmation nationale les pompes de secours utiles à l?échelle nationale. Recommandation 2. : Evaluer et revoir en profondeur le schéma d?évacuation à la mer des crues extrêmes, par voie gravitaire et par pompage, notamment par la mise en place d?un système de pompage de renfort efficient pour ces inondations dans le delta de l?Aa, travail à mener sous l?égide de la préfecture du Pas-de-Calais, avec les Syndicats mixtes concernés et le conseil départemental, d?ici l?automne, pour préciser la feuille de route et engager les premières actions avant l?hiver. 3.1.1.3 Expérimenter des dispositifs de participation citoyenne Des dispositifs de mobilisation citoyenne, comme il en existe en Belgique et aux Pays-Bas, préparés et animés à l?avance, participent de l?efficacité de la gestion de crise et contribuent à la culture du risque (cf : supervision de l?état des digues, rapport IGEDD) 39. Ils demandent un travail spécifique, notamment si les bénévoles ont vocation à être mobilisés en crise (assurances). Recommandation 3. : Expérimenter une participation citoyenne à la gestion de crise, sur la base de réseaux de volontaires formés, travail à mener sous l?égide de la DGSCGC en lien avec l?AMF, sous un an, et développer la culture du risque pour les populations des territoires impactés, notamment par une appropriation des gestes et des réflexes en situation de crise. 3.1.1.4 Deux pistes concrètes pour poursuivre et renforcer un travail permanent sur la culture du risque Chacun des Etats met en avant la nécessité de travailler en permanence la culture du risque. Il y a aussi un accord sur la période spécifique de sensibilisation que représentent les mois qui suivent une inondation. Au regard des actions menées dans les pays voisins, deux actions méritent attention : Il a été souvent constaté à la fois une incompréhension des événements inattendus que sont les inondations majeures, et la nécessité d?appréhender les nécessaires solidarités pour la gestion de l?eau à l?échelle des bassins versants. Dans la suite des crues de Wallonie, a été organisée une démarche d?explication du phénomène, de la manière dont il a été géré, et des suites envisagées. Recommandation 4. : Organiser sur les principaux bassins versants du Pas-de-Calais des séminaires de retour d?expérience des inondations, sous l?égide des préfets, en lien avec les élus locaux, à l?été 2024, quelques mois après la sortie de crise. Dans la suite des crues de Wallonie, la question a été posée, en Flandre, de ce que cette pluie aurait donné sur son territoire. Les exercices de stress test, y compris dans une démarche 39 Le rapport de l?IGEDD de 2023 consacré au retour d?expérience des crues de juillet 2021 cite par exemple le séminaire qui s?est tenu à Longuyon, pour le bassin de la Chiers (Haut pays meurthe-et-mosellan, secteur de Longwy). PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 36/107 transfrontalière, sont à la fois un moyen d?objectiver les risques inhérents au changement climatique et de s?exercer. Recommandation 5. : Prévoir dans le calendrier des exercices nationaux, une démarche de stress test, sur la base par exemple d?un scénario de type « water bomb », sous l?égide de la DGSCGC. 3.1.2 Etablir un diagnostic partagé de l?état des cours d?eaux, canaux, fossés La question de l?état des fossés, canaux, navigués ou non, voire cours d?eau a été au coeur de nombreuses discussions dans le Pas-de-Calais, centrées sur des demandes de simplifications ou de moyens financiers de rattrapage, mais qui ont fait également ressortir un manque de connaissance des responsabilités, de vue d?ensemble, de doctrines partagées sur l?utilité et les inconvénients potentiels des différents types d?intervention, voire de moyens adaptés. Dans les pays voisins, il existe des plans d?entretien, adaptés aux différentes situations. Une fois passée la phase de curages et entretiens requis après la crise, une vue d?ensemble et une programmation d?interventions nécessaires semblent se justifier, qui permettront aussi de calibrer les moyens requis. Recommandation 6. : Etablir un état global des lieux des fossés, canaux, cours d?eau, berges et digues en associant les parties prenantes, évaluer et revoir la périodicité et l'organisation des contrôles des obligations de leur entretien et évaluer toutes les options favorisant l'évacuation gravitaire de l'eau à la mer, y compris les canaux ne présentant plus d'utilité pour la navigation, en vue d?établir un programme pluriannuel de suivi et d?entretien. Un travail préalable, sous pilotage de la DREAL de bassin Artois Picardie, sera nécessaire pour préciser les modalités de cette démarche. Assurer une veille régulière de l'état de ces infrastructures, le cas échéant en y associant des citoyens volontaires formés à cet effet. Etablir un état des lieux suppose un travail préalable de méthodologie : à quelle échelle le mener, selon quelles modalités ? à quelle fréquence le mettre à jour ? comment partager les résultats ? Cet état des lieux pourrait concerner la cartographie, le fonctionnement hydrologique, les actions prévues dans des SAGE, des PAPI, contrats d?objectifs ou protocoles, le niveau d?entretien attendu, la partage des informations, la communication, l?évaluation des moyens requis ? . 3.2 Renforcer le portage de la prévention par les collectivités locales compétentes En France, la mise en place de la Gemapi conduit à organiser la gestion des enjeux liés à l?eau à l?échelle de territoires hydrologiquement pertinents, par transfert ou délégation de compétences à des syndicats intercommunaux. Sur les territoires impactés par les inondations de novembre 2023, se pose la question de leur taille critique, soit au regard de la taille des équipes et des moyens requis pour une action efficace, soit au regard du fonctionnement des bassins versants. Une meilleure structuration apparait comme un « pré requis » à un accélération de l?action, qui ne peut venir que des élus locaux, le cas échéant sous l?impulsion du préfet coordinateur de bassin. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 37/107 Elle devra aller dans le sens de la simplification et de la lisibilité, y compris dans l?articulation des structures gemapiennes avec les sections de Wateringues et contribuer à une meilleure mobilisation des moyens financiers prévus, dans une logique de solidarité. Sans aller jusqu?à l?intégration complète néerlandaise, peut-être non adaptée au contexte français, d?éventuelles évolutions peuvent viser une meilleure association de toutes les parties prenantes et des financeurs potentiels. Les parties impliquées, au regard de l?exemple néerlandais, pourraient également intégrer la nécessité d?un portage politique coopératif et fort des enjeux de gestion de l?eau. Recommandation 7. : S?appuyer sur la mission des inspections en cours sur la gouvernance pour rendre plus robuste et efficace la mise en oeuvre de la Gemapi dans les bassins versants touchés par les inondations, dans ses aspects organisationnels et financiers, afin de gagner en simplicité, lisibilité et efficacité, et créer une approche opérationnelle cohérente de l?amont jusqu?à l?aval. 3.3 Anticiper les modalités du relèvement et l?accompagner par une structure spécifique Un Commissariat spécial à la reconstruction a été mis en place auprès du gouverneur de Wallonie après les crues de Wallonie. En France, après des catastrophes, un préfet ou un sous-préfet peut être mobilisé en position de chef de projet de la période post-crise, ce qui facilite les réponses immédiates, sans toutefois aller jusqu?à faciliter une stratégie de reconstruction résiliente, portée par les acteurs locaux. Recommandation 8. : Dans la suite des inondations de novembre 2023, mettre en place une structure technique spécifique de relèvement (commissariat de la reconstruction doté d'une équipe pluridisciplinaire et placé auprès d'une autorité politique), dans le cadre d?une expérimentation : pour une durée pertinente, de l?ordre de plusieurs mois, elle apporte aux préfets et à leurs services un soutien opérationnel au relèvement, pour intégrer la réduction de la vulnérabilité dans tout l?aménagement du territoire. Si l?expérimentation est réussie, cette structure a vocation à être pérennisée pour capitaliser du retour d'expérience et être mobilisée rapidement en gestion post-catastrophe dans le futur dans tout le territoire national. 3.4 Renforcer les coopérations transfrontalières En raison des inondations exceptionnelles dans les Flandres intérieures en novembre 2023, sur sollicitation du gouverneur des Flandres, le dispositif et les ouvrages du projet MAGETEAUX ont été activés pour évacuer un maximum d?eau via le canal de Furnes directement à la mer par Dunkerque, avant même la finalisation totale du protocole ? ce qui été salué dans les échanges. L?eau a toujours constitué, pour ce secteur en dessous du niveau de la mer, un sujet de coopération prioritaire et fait l?objet de nombreux échanges dans le cadre de groupes de travail au sein de nombreux organismes, dont celui du groupement européen de coopération territoriale) West- Vlaanderen / Flandre-Dunkerque-Côte d?Opale. La convention-protocole sur le secteur des Flandres française et belge avait fait l?objet d?une réunion conclusive à Bruges le 8 mars 2023, présidée par le gouverneur de la Province de Flandre occidentale et en présence de la secrétaire générale de la préfecture du Nord, qui présidait la délégation française. Le texte a ensuite été envoyé par le préfet de région Hauts-de-France, au Ministère de l?Europe et des Affaires étrangères en vue de sa ratification. La Flandre a procédé au PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 38/107 même envoi auprès de son ministère concerné en Région flamande. Plusieurs personnalités rencontrées en Belgique ont souligné la nécessité d?aller au bout de ce processus. Par ailleurs, depuis 1994, la signature de l?Accord sur la protection de l?Escaut (accord de Charleville-Mézières) et la création Commission Internationale pour la Protection de l?Escaut (CIPE), les gouvernements de la République française, de la Fédération Wallonie-Bruxelles, de la Région Flamande, de la Région de Bruxelles-Capitale et du Royaume des Pays-Bas travaillent ensemble sur ce bassin. En 2001, cette coopération transfrontalière a évolué avec la délimitation du district hydrographique international Escaut, l?affiliation de l?État fédéral belge à l?Accord, la réalisation, d?un seul plan de gestion de bassin versant pour l?Escaut ainsi qu?une réflexion multilatérale au sein de la CIPE, visant à établir des mesures d?atténuation des effets des inondations et des périodes de sécheresse. L?accord de Gand du 3 décembre 2002 formalise ces évolutions. La CIPE devient alors la Commission Internationale de l?Escaut (CIE). Les Parties Contractantes à l?Accord de Gand s?efforcent de réaliser une gestion de l?eau durable et intégrée pour le district hydrographique international de l?Escaut (district de l?Escaut). Dans ce cadre, la CIE est le forum international de coordination des directives européennes sur l?eau dans le district. Elle traite en particulier de la coordination internationale de la directive cadre sur l?eau (2000/60/CE), de la directive relative à l?évaluation et à la gestion des risques d?inondation (2007/60/CE), de l?adaptation au changement climatique (notamment la prévention des effets dus aux sécheresses) et de la lutte transfrontalière contre les pollutions accidentelles survenant dans les eaux du district de l?Escaut. Des échanges en décembre 2023 entre la DREAL Hauts-de-France et l?agence de l?environnement de Flandre (VMM) qui représentent respectivement la France et la Flandre dans la CIE portent notamment sur les propositions formulées dans le cadre de la task force créée par le gouvernement flamand. Les parties sont habituées à collaborer pour la mise en place d?accords. Enfin, la province du Hainaut a mobilisé une pompe de moyen gabarit qui a été employée à Calais durant quelques jours durant les inondations dans le Pas-de-Calais. Ensuite, c'est le mécanisme européen de solidarité qui a été activé par le ministre (samedi) et qui a conduit à l'acheminement de quatre pompes hollandaises de grand gabarit. Le Ministère néerlandais des Infrastructures et de la Gestion de l?eau a souhaité souligner l?importance des coopérations transfrontalières dans la prévention des inondations fluviales et de la gestion des crises. Ses représentants appellent de leurs voeux une plus grande participation des autorités françaises, nationales ou régionales, dans les cadres existants et dans le contexte de l?Union Benelux+. En ce sens, la candidature de la Région Hauts-de-France au statut d?observateur de l?Union Benelux+, au même titre que le Land de Rhénanie du Nord-Westphalie, devrait permettre le renforcement de la coopération transfrontalière dans le domaine de l?eau, ainsi que la signature, le 3 avril, d?une feuille de route de la coopération entre la Région Hauts-de-France et les Pays-Bas, alors que l?exécutif régional vient de se doter d?une vice-présidence en charge de l?eau. Recommandation 9. Accentuer les coopérations transfrontalières dans le domaine de la gestion de l'eau et la prévention des inondations pour développer le partage des bonnes pratiques et les réflexes de gestion commune des crises. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 39/107 3.5 Installer une institution stratège et pérenne, au plus haut niveau de l?Etat, pour orienter et soutenir l?adaptation au changement climatique 3.5.1 Structurer le portage politique de l?adaptation au changement climatique au plus haut niveau Les inondations de fin 2023 ont été perçues, peut-être pour la première fois dans le Nord de la France, comme la marque du changement climatique, faisant ressortir à la fois le besoin d?amé- liorer la prévention des inondations pour ne pas se retrouver, de manière de plus en plus fré- quente, dans la même situation, mais aussi d?élargir le champ, de rapprocher les sujets : inon- dation, submersion et élévation du niveau de la mer, inondation et sécheresse, utilisation du foncier et enjeux de désartificialisation ou de recherche de zones d?expansion des crues ? La mise en place, en 2012, aux Pays-Bas, du Commissaire du Delta marque aux Pays-Bas un tournant qui est de ne plus travailler seulement sur la base du retour d?expérience des crues mais de chercher à anticiper en intégrant le changement climatique. Encadré 10 : Le Commissaire du Delta aux Pays-Bas, un gardien de la sécurité hydraulique du pays Fonction créée par la loi Delta entrée en vigueur le 1er janvier 2012, le Commissaire du Delta aux Pays-Bas assume un rôle crucial dans la gestion de l?eau, axé notamment sur la protection contre les inondations et la préservation des ressources hydrauliques. Nommé pour une durée de 7 ans (renouvelable une fois) par le gouvernement, le Commissaire du Delta (épaulé par une équipe d?une quinzaine de personnes) dispose de l?autorité requise pour faciliter la coopération interministérielle et la cohérence des actions initiées par les dif- férents niveaux de gouvernance. Sa visibilité contribue en outre à sensibiliser l?opinion publique à la nécessité de mieux prendre en compte les effets du changement climatique. Chaque année, dans le cadre de la procédure budgétaire, le commissaire soumet de nouvelles recommanda- tions et mesures pour le programme Delta. Il fait le lien avec les organes administratifs concernés, les entre- prises et la société civile, suit l?avancement de la mise en oeuvre du programme Delta, mais n?en porte pas la responsabilité politique qui incombe au ministre de l?Infrastructure et de la Gestion de l?eau. Le Commissaire peut participer, en tant qu?expert, au Conseil de l?environnement, présidé par le Premier ministre et comprenant une dizaine de ministres dont notamment les ministres chargés de l?infrastructure et de la gestion de l?eau, de l?agriculture et de l?environnement. Le Commissaire du Delta, dispose d?un budget propre, et a pour mission d?assurer une bonne coordination entre les organismes d?Etat, les autorités régionales de l?eau (« Waterschappen ») les provinces et les munici- palités, et le cas échéant, les acteurs concernés de l?énergie, du tourisme ou de l?écologie. Il supervise le Programme Delta, qui se décline en 7 sous-programmes régionaux (Littoral « Kust », Delta d?Escaut « Zuid Westelijke Delta », mer autour des Îles de la Frise « Waddenzee », fleuves Rhin et Meuse « Rivieren », Delta Rhin-Meuse « Rijnmond Drechtsteden », Grands Lacs « IJsselmeergebied ») et trois sous-programmes natio- naux (analyse des risques d?inondation, gestion de l?eau, urbanisme et aménagement du territoire : « Nieuwbouw en Herstructurering » ). Si l?ordre du jour le justifie, le Commissaire du Delta peut participer au Conseil des Ministres pour évoquer le Programme Delta. Le Commissaire du Delta aux Pays-Bas incarne l?engagement continu du pays à protéger ses terres et ses habitants contre les inondations, tout en cherchant des solutions innovantes et durables pour faire face aux défis actuels et futurs liés à l?eau. Depuis 2012, trois personnalités se sont succédées à cette fonction. Wim Kuijken fut le premier Commissaire du Delta du 1er février 2010 au 1er janvier 2019, date à laquelle il a pris sa retraite. Peter Glas lui succéda jusqu?à sa propre retraite, le 30 novembre 2023. Co Verdaas est le nouveau commissaire depuis le 1er décembre 2023. Co Verdaas possède une vaste expérience des défis liés à l?eau aux Pays-Bas. Il a été auparavant membre du Parlement néerlandais (200362006), député de la province de Gueldre (2007-2012) et pendant une courte période secrétaire d?État à l?économie dans le cabinet Rutte II. Il a étudié l?urbanisme à l?Université Radboud PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 40/107 de Nimègue et enseigne le développement régional comme professeur à temps partiel à l?Université technique de Delft. Lors de sa prise de fonction, Co Verdaas a estimé qu?il était « important que l?eau ne soit pas consi- dérée comme une tâche isolée et qu?elle soit liée aux défis liés au logement, à la nature et à la durabilité de l?économie. (?) Nous avons une tradition de protection contre l?eau et l?ambition de vivre avec l?eau ». . Recommandation 10. : Dans le contexte des inondations dans le Pas-de-Calais et le Nord, mettre en place une nouvelle institution, qui assure dans la durée et au plus haut niveau de l?Etat, le portage politique de l?anticipation au changement climatique, dans une logique d?appui scientifique et technique, de coordination, de médiation. De taille réduite, elle a vocation à mobiliser les administrations et opérateurs de l?Etat et à être un soutien des élus locaux 40. Une première étape, sous un an, est de configurer cette structure, et le cas échéant son articulation avec les comités de bassin, et de la mandater pour travailler y compris sur les sols. « Le plus difficile, c?est de faire avec l?incertitude », « Je n?ai pas de réel pouvoir, mais tout le monde écoute ce que dit le Commissaire du Delta », « Le commissaire du Delta, c?est un peu la vigie néerlandaise contre les inondations, à l?image de ce que constitue pour nous contre les accidents de la route, le Délégué interministériel pour la sécurité routière et la Prévention routière. » Les échanges avec le gouvernement flamand témoignent d?un intérêt pour des coopérations trans- frontalières entre les autorités sui seront en charge de l?adaptation au changement climatique. 3.5.2 Une action à lancer : représenter l?inondation et informer Les Pays-Bas ont mis en place un système d?information et de pédagogie en ligne qui repose sur deux outils une carte qui présente une information localisée sur tous les risques et en particulier l?inondation, et de outils de communication et de pédagogie. 3.5.2.1 Une carte des provinces, qui offre une information localisée sur tous les risques (avec un accès dans différentes langues dont le Français) PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 41/107 Figure 2 : site néerlandais, page de garde et carte du risque d'inondation par la mer, un lac ou une rivière (source Homepage | Risicokaart) Ce site est l?équivalent du portail Géorisques français dans son principe. Une différence importante réside dans l?information donnée sur les inondations. Figure 3 : portail Géorisques Aux Pays-Bas, l?information porte sur l?ensemble des cours d?eau, pour différents scénarios d?aléa. La mise à disposition de ces couches d?information résulte d?un travail de longue haleine, plus de 10 ans et de l?ordre de 70 M d?euros, qui a permis d?utiliser, notamment, les données sous-jacentes à la prévision pour établir des scénarios d?inondations pour tous les cours d?eau. En pratique, PUBLIÉ https://www.risicokaart.nl/ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 42/107 chaque province disposait auparavant de données d?inondation, mais non homogènes. Plus précisément, les grande lignes étaient uniformes mais chaque province avait fait ses choix quant aux modélisations hydrauliques utilisées et les hypothèses sur le rôle des ouvrages (routes, chemin de fer ? ), aptes ou non à servir de digue. - Une première étape déterminante a été de déterminer, à l?échelle nationale, les scénarios d?inondations sur lesquelles l?Etat souhaitait diffuser des informations : il a été retenu de présenter les zones inondées de crue décennale à la crue millénale et même encore moins probable. Il s?agit notamment de faire comprendre l?emprise spatiale de différentes crues, surcotes ou combinaisons, des plus fréquentes aux plus extrêmes. Ce choix doit être assumé politiquement, homogène sur le territoire et accompagné. - Ensuite, il a fallu mettre en place les coopérations nécessaires pour établir la cartographie en mobilisant les différents ministères, opérateurs et autorités locales concernés. En effet, faire la carte idéale mettrait très longtemps cat il faudrait développer toutes les modélisations : il a donc été choisi, dans un premier temps, de rassembler les données existantes de chaque province pour les mettre en cohérence avant de les publier. La coopération est, ainsi, la deuxième condition forte de cet exercice. Elle s?est matérialisée par un comité de pilotage rassemblant des représentants des partenaires concernés d?une part, et des engagements de contribution aux travaux par la mise à disposition des hommes/jour et des financements nécessaires par chaque organisme. Les travaux se poursuivent, sur la base de cette première étape pragmatique mais structurée, pour aller vers des cartes homogènes dans leur conception même. Mais il a été utile de passer par cette première phase, appuyée sur les données existantes, qui a permis d?aller plus vite et de donner à voir un résultat satisfaisant cat fiable et partagé, utilisable par tout un chacun car mis à disposition en ligne. En France, il existe, de par l?historique de la prévention des inondations, différents types de cartes les représentant : - les cartes des Plans de prévention des risques d?inondation (PPRi) représentent la crue la plus importante connue ou la crue centennale modélisée. Elles reposent, depuis 2019, sur un corpus de méthodes homogènes quant à la prise en compte des ouvrages de protection. Elles sont liées à des zonages réglementaires, qui s?imposent à l?urbanisme. Elles ne constituent pas un continuum puisque les PPRi sont réalisés là où il y a les plus forts croisements aléas-enjeux. Elles sont la base de la procédure en ligne « Information acquéreur locataire » (IAL) ; - les Atlas de zones inondables (AZI), réalisés dans les années 2000 puis laissés de côté, font parfois référence localement, sans constituer un continuum le long du réseau hydrographique ; - les zones inondées potentielles (ZIP)i ont été mises en place pour la gestion de crise, avec différents scénarios d?inondation pour guider les autorités, qui ne recouvrent donc pas nécessairement les hypothèses et méthodes utilisées pour les élaborer les cartes des PPRi. Elles sont préparées, progressivement, au droit des stations de mesure du réseau Vigicrues, elles ne font pas un continuum. Un travail est en cours pour les mettre en ligne sur le site Vigicrues fin 2024-début 2025. Ce sera une avancée importante pour l?information du public, avec une vigilance pour expliquer que les cartes de PPRi et les ZIP sont différentes dans leur élaboration, leurs finalités et leurs portées, mais toutes justes. Ce sont les scénarios des cartes de ZIP qui s?approchent le plus de la démarche d?information néerlandaise (les Pays-Bas n?ayant pas mis en place l?équivalent des PPRi) - les cartes qui figurent dans les Plans de gestion du risque inondation (PGRI), à l?échelle des bassins hydrographiques, dans l?Evaluation primaire des risques d?inondation (EPRI), en application de la Directive inondation. Elles présentent obligatoirement des crues extrêmes, couvrent tout le réseau hydrographique principal, mais ne sont pas « zoomables ». Il faut rappeler que lors de la première réalisation de ces cartes, il avait été choisi, dans certains bassins, de ne pas les diffuser. La compréhension du risque inondation demande en effet un accompagnement spécifique pour expliciter les différents scénarios représentés. Les cartes de l?EPRI constituent également une approche de la démarche néerlandaise ; PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 43/107 - enfin, dans certains cas, pour la préparation de PPRL par exemple, quelques DDT ont fait développer des représentations dynamiques de l?effet d?une inondation sur un territoire. Il existe des cas dans le nord de la France, sans que les résultats aient été présentés au public. Dans certains cas, et dans le cadre des PAPI, certaines collectivités ont également développé des outils de simulation, en réalité augmentée. 3.5.2.2 Des outils de communication pour former aux comportements qui sauvent Les cartes diffusées au Pays-Bas permettent également, à partir de ces mêmes couches de données, de visualiser, pour un bâtiment, l?effet de différents scénarios d?inondation. A chaque scénario sont liés des conseils de préparation et de comportement, avec une image stylisée représentant une maison. L?ouverture de l?application sur téléphone portable permet de mettre la photographie de son habitation à la place du dessin indicatif. En France, dans certaines régions, ont été développées des applications permettant de visualiser en réalité augmentée une rue inondée. Cela relève, par exemple, d?action de culture du risque développées dans les PAPI. Des conseils de comportements figurent sur le site Géorisques de manière générique ; ils sont repris et amplifiés dans des actions ciblées et récurrentes comme la « Campagne cévenole ». Lors d?événements importants, certains assureurs envoient dorénavant des SMS à leurs clients sur le risque encouru. Il est également possible de s ?abonner à Vigicrues pour recevoir des informations sur la station à proximité de chez soi. Avancer sur une cartographie nationale homogène et partagée permettrait de développer des outils de sensibilisation personnalisés de manière beaucoup plus sytématique. Figure 4 : exemple d?outils pédagogique (source https://overstroomik.nl/) Alors que le secteur des assurances se dote de cartographies visant à identifier les zones les plus à risque, avancer sur une cartographie nationale homogène des risques d?inondation permettrait de disposer et de diffuser une information publique sur différents scénarios d?inondation, fondement de la culture du risque. Recommandation 11. Engager l?élaboration d?une cartographie nationale des inondations, permettant de développer des outils pédagogiques. Cela demande une expression politique claire sur la gravité des scénarios d?inondation à traiter et sur le type d?inondation à aborder, et un travail structuré et partenarial pour publier un résultat découlant d?une approche partagée entre différents services ministériels, les opérateurs concernés, les représentants des collec tivités locales, les associations impliquées et certains partenaires comme la Caisse centrale de réassurance. PUBLIÉ https://overstroomik.nl/ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 44/107 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 45/107 Conclusion La France dispose d?un socle de prévention des inondations ancien, qui mobilise Etat et collectivités locales, mais il y a bien sûr toujours des améliorations possibles, notamment identifiées dans l'exercice de parangonnage qui est très utile. Le contexte du changement climatique doit conduire à renforcer en efficacité et en ambition les efforts en la matière, et à structurer de nouveaux travaux d?anticipation. Les échanges menés dans le cadre de la mission de parangonnage ont été fructueux ; il y a un intérêt pour une réciprocité ou des suites à ce travail, notamment dans la cadre des échanges sur les sujets transfrontaliers, mais plus largement : - Les conditions d'avancées de la prévention des inondations ont des composantes techniques ou organisationnelles mais relèvent en premiers lieux de questions de posture : un portage politique fort à tous les niveaux, la mise en oeuvre de coopérations sont des conditions premières à des avancées significatives. Chaque autorité a une place dans l?approche française, du maire qui est le contact de proximité des habitants et le responsable de la sécurité sur le territoire de la commune à l?Etat en passant par l?EPCI, échelle de l?aménagement, ou du syndicat en charge de la Gemapi : l?engagement de chacun et la fluidité de leurs relations sont un gage d?efficacité - Les avancées se font dans la durée car elles reposent sur des évolutions exigeantes, qu?il s?agisse d?aménagement du territoire ou d?évolution de comportements: il convient, pour les différentes autorités en charge, chercher les actions sans regrets, avancer à petits pas, développer une approche plus agile, ou encore lancer, dans un format réfléchi, les travaux les plus nouveaux et complexes sur l?adaptation. - La questions des moyens se pose toujours : les coopérations demandent du temps et des compétences. Des structures nouvelles ad hoc sont nécessaires, l?une pour faciliter le relèvement après de nouvelles catastrophes qui surviendront, et l?autre pour le portage politique et concret de l'adaptation au changement climatique, qui demanderont des effectifs. Dans un contexte de tension budgétaire, il faut comparer le coût de la préparation avec le coût de la réparation, documenter la non action, par exemple au regard des risques sur le système assuranciel, les impacts sociaux pour les populations et les activités exposées. Il est stratégique de renforcer et structurer les moyens, dans des dispositifs efficaces, dans le contexte du changement climatique. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 46/107 Annexes PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 47/107 Annexe 1. Lettre de mission PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 48/107 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 49/107 Annexe 2. Agenda des déplacements et liste des personnes rencontrées Déplacement aux Pays-Bas Ambassade de France : M. François Alabrune Ambassadeur de France aux Pays-Bas Mme Aude Robin-Mitrevski, cheffe du Service économique régional M. Samy Ouahsine, conseiller développement durable et industrie Mme Clotilde Maral, attachée environnement 24 janvier 2024, Pays-Bas, la Haye - Entretien avec M. René Vrugt, Directeur des sols, de l?aménagement du territoire et de l?adap- tation au climat, Ministère de l?Infrastructure et de la Gestion de l?eau - Mme Wieke Tas, cheffe du service Adaptation au changement climatique et gouvernance, « Dé- termination de la politique d?aménagement par les sols et l'eau » - M. Jan Kruijshoop, responsable des affaires internationales, Rijkswaterstaat WVL Retour d?expérience sur les inondations de juillet 2021 au Benelux et en Allemagne, mise en place d?une coopération quadrilatérale - M. Robert Slomp, expert de la gestion de l?eau et de la relation bilatérale avec la France Rijkswa- terstaat WVL - Mme Mariette van Empel, Ambassade des Pays-Bas en France - M. Math Reumers, chargé de la coopération bilatérale avec la France, ministère I&W - Mme Jean-Marie Stam, Affaires internationales, Rijkswaterstaat WVL - Mme Babette Gräber, responsable du programme KAWI, mission internationale pour l?adapta- tion au changement climatique et pour l?eau, Ministère de l?Infrastructure et de la Gestion de l?eau - Café-entretien avec M. Kleis Jager, journaliste néerlandais - Dîner avec SE M. l?Ambassadeur François Alabrune 25 janvier - Rencontre avec M. Co Verdaas, Commissaire pour le programme pour le Delta, M. Dolf Kern, Conseiller pour le programme pour le Delta, M. Jan Bonjer, Président du Waterschap Hollandse Delta, M. Remco van Rijn, Expert en pompes d'urgence chez Hollandse Delta M. Remco Belonje, conseiller spécial de M. Bonjer Et en présence de deux membres supplémentaires de la délégation française : Mme Florence Bariseau, VP eau Région Hauts-de-France, Mme Aude Prestaux, conseillère. - Visite du centre de Gestion de l?eau de Lelystad - Présentations sur la gestion de crise - M. Hans de Vries, président du Comité national de coordination des menaces d'inondation (LCO) et du Comité national de coordination pour la distribution de l'eau (LCW), VWM - M. Jan Kruijshoop, responsable des Affaires internationales à la DG eau et sols, ministère I&W - M. Robert Slomp, expert de la gestion de l?eau et de la relation bilatérale avec la France Rijkswa- terstaat WVL - Mme Marion Wierda, directrice Stratégie et Politique Agence régionale de l?eau Rivierenland - M. Tom Vereijken, membre de l?exécutif de l?autorité régionale de l?eau Zuiderzeeland (où se trouve la station de pompage). PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 50/107 - Visite de la station de pompage Wortman à Lelystad, accueil par M. Jan-Willem Trompetter (Directeur et chef technicien de la station de pompage) En présence de : M. Olivier Caillaud (Pôle métropolitain de la Côte d?Opale) Mmes Florence Bariseau et Aude Prestaux Déplacements en Belgique Ambassade de France : M. François Sénémaud, Ambassadeur de France en Belgique Mme Caroline Vinot, première conseillère Mme Alyssia Biton, deuxième conseillère M. Arnaud Boulanger, chef du service économique M. Andri-Anderson Rabehanta, chef adjoint du service économique Mme Neïla Khelifi, attachée économique et financier au service économique M. Bernard Siffert, attaché de sécurité intérieure M. Samy Ouahsine, conseiller développement durable et industrie Mercredi 10 janvier, Bruxelles M. Etienne Bouas-Laurent, directeur général d?AXA Belgique M. Hein Lannoy, directeur général d?Assuralia Audrey Amiot, COO Philippe Courouble, Chef du service P&C Mme Leen Depuydt, directrice générale du NCCN, Centre de crise National mercredi 11 janvier M. Jan Jambon, Ministre-président flamand M. Toby De Backer, chef de cabinet adjoint de Mme Zuhal Demir, ministre flamande de l?Environ- nement, de l?Energie, du Tourisme et la Justice M. Jan Vancoillie, conseiller du cabinet du Ministre-président M. Jan Jambon M. Wouter De Ruyter, chef du cabinet adjoint de Mme Lydia Peeters, ministre flamande de la Mobilité et des Travaux publics M. David Maenaut, Conseiller diplomatique, chargé des relations transfrontalières avec la France, les Hauts-de-France et la Wallonie Mme Barbara Vael, Chef de département VLAAMSE MILIEUMAATSCHAPPIJ - VMM M. Chris Danckaerts, Administrateur général de l?Agence flamande des Voies Navigables (De Vlaamse Waterweg, DVW) Mme Emma Vermunicht, conseillère diplomatique de M. Jo Brouns, Ministre flamand de l'Écono- mie, de l'Innovation, du Travail, de l'Économie sociale et de l'Agriculture et Mme Jannes Maes, conseillère agriculture 18 janvier 2024, Namur M. Philippe Dierickx, directeur de la gestion hydrologique au SPW Mobilité et Infrastructures M. Sébastien Gailliez, directeur des cours d'eau non navigables au SPW Agriculture, Ressources naturelles et Environnement M. Simon Riguelle, directeur du Centre régional de crise Mme Emilie Jennes, conseillère au cabinet de M. Elio Di Rupo, Ministre-président wallon M. Denis Mathen, Gouverneur de la province de Namur Mme Marie Muselle, commissaire d'arrondissement PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 51/107 M. Willy Borsus, Vice-président du gouvernement wallon et Ministre de l'Économie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'innovation, du Numérique, de l'Aménagement du Territoire et de l'Agriculture M. Olivier Granville, chef de cabinet M. Thomas Leroy, conseiller en aménagement du territoire et urbanisme M. Michel Dachelet, inspecteur général du département de l?aménagement du territoire et de l?ur- banisme (DATU) M. Jacques Teller, professeur en urbanisme à l?Université de Liège M. Benoît Moritz, professeur en urbanisme à l?Université Libre de Bruxelles Vendredi 9 février, Dixmude et Niewport Présentations des agences flamandes de l?Eau (DVW) et de l?Environnement (VMM) et visite de terrain du Bassin de Blankaart et des écluses de Nieuport. M. Carl Decaluwé, Gouverneur de Flandre-Occidentale M. Bart Naeyaert, Vice-gouverneur en charge de la Politique intégrée de l?eau M. Chris Danckaerts, Administrateur général de l?Agence flamande des Voies Navigables (De Vlaamse Waterweg, DVW) M. Bernard De Potter, Administrateur général de l'Agence flamande de l?Environnement (Vlaamse Milieumaatschappij, VMM) M. Toby De Backer, Chef de Cabinet adjoint de Mme. Zuhal Demir, Ministre flamande de la Justice, de l?Environnement, de l?Aménagement du Territoire, de l?Énergie et du Tourisme M. Wouter De Ruyter, Chef de Cabinet adjoint de Mme. Lydia Peeters, Ministre flamande de la Mobilité et des Travaux publics M. Koen Surdiacourt, Chef de Cabinet du Gouverneur M. David Maenaut, Conseiller diplomatique, chargé des relations transfrontalières avec la France, les Hauts-de-France et la Wallonie Mme Elisabeth Bonne, Chargée de Mission, relations avec la France, Département de la Chan- cellerie et des Affaires Etrangères M. Jan Vandecavey, Directeur de la Politique intégrée de l?eau M. Chris Marey, Conseiller du Gouverneur M. Kristof Vermeire, Conseiller pour les relations avec le Nord de la France M. Lieven Dejonckheere (DVW) M. Joris Duyck (DVW) Mme Lies Verstraete (VMM) M. Niels Van Steenbergen (DVW) M. Maarten Goegebeur (VMM) France CEPRI, Marie-France Beaufils, présidente, et ses équipes PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 52/107 Annexe 3. La prévention des inondations aux Pays-Bas La législation néerlandaise relative à la gestion du risque d?inondation, comme dans nombre de pays, est liée aux catastrophes qu?a connues le pays, en particulier celle de 1953, et au cadre européen découlant de la « Directive inondation ». La robustesse du dispositif mis en place tient à la cohérence de l?organisation politico-administrative et à un cadre juridique et financier inscrit dans la durée mais apte à évoluer. Il garantit en particulier l?entretien et la mise à niveau des ouvrages de protection vitaux pour le pays. Le 21e droit fondamental dans la constitution néerlandaise prévoit, depuis 1983, que : « La puis- sance publique s?attache à l?habitabilité du territoire et à la protection du cadre de vie ». Historique- ment, ce droit fondamental visait à protéger l?agriculture. En 1798, date de la constitution de la république batave, a ainsi été introduite la disposition « La Société commande, en termes égaux, la favorisation de l?Agriculture, et son épanouissement, en particulier au regard des terres vacantes et non artificialisées, à travers l?ensemble du territoire de la République ». La notion de cadre de vie, et plus largement d?environnement, est apparue en 1983, à la suite d?une initiative entamée en 1967. Le dispositif néerlandais de gestion du risque inondation vise à répondre à ce droit fonda- mental. Un recours peut être fait en droit administratif à ce droit fondamental par les citoyens et organisations. Annexe 3.1. Les catastrophes, moments fondateurs des politiques de prévention contre les inondations Les Pays-Bas sont situés dans un delta formé par quatre fleuves : le Rhin, la Meuse, l?Escaut et l?Ems. Actuellement, 26 % du territoire de ce pays sont situés sous le niveau moyen de la mer ; 59 % de ces terres, environ 70 % des 17,6 millions d?habitants de ce pays sont sous la menace d?une inondation, en particulier dans le Randstad, une conurbation formée par les villes d?Amster- dam, d?Utrecht, de Rotterdam et de La Haye. C?est cette même région qui produit le plus de ri- chesses, environ la moitié du produit national brut des Pays-Bas41. La valorisation des marais par des moines a commencé il y a plus de 1000 ans. Ce choix, couplé à plusieurs grandes tempêtes destructives dès les années 1000 à 1200, a donné naissance aux premières organisations démocratiques aux Pays-Bas : les organisations de gestion des eaux,« Waterschappen » ou « Wateringues » avant l?émergence de l?État central42. Des inondations de la Sainte-Elisabeth de 1424 ou celles de Saint-Félix en 1530 (surnommées le « quade saterdach » (mauvais samedi) faisant 100.000 victimes et rayant en grande partie de la carte Reimerswaal, grande ville de Zélande) jusqu?à nos jours, l?histoire néerlandaise est émaillée de nombreuses catastrophes liées à des inondations meurtrières ou à de dramatiques épisodes de submersion marine. Ces catastrophes ont fortement contribué à façonner la politique néerlan- daise de protection et de prévention contre les inondations. Les inondations du Zuiderzee des 13 et 14 janvier 1916 : en raison de fortes tempêtes, une grande partie du Zuiderzee, une ancienne mer intérieure, s'est déversée dans les terres, causant d'impor- tantes inondations dans les provinces de Frise et de Groningue. Cette catastrophe a par exemple conduit à réaliser une grande partie du Plan de 1891 de l?ingénieur Cornelis Lely, notamment la construction de 1927 à 1932 du barrage de l'Afsluitdijk (long de 32 kilomètres) destiné à fermer la 41 Source R. Slomp, Y. Friocourt, 2022. 42 Source : R. Slomp, 2012 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 53/107 Zuiderzee, à protéger les terres contre les inondations et à créer de nouveaux espaces agricoles et résidentiels grâce à l?aménagement de plusieurs polders (Noordoostpolder, polder de Flevoland du nord, polder de Flevoland du sud?). Le village de Schellingwoude pendant la crue Extrémité occidentale de l'Afsluitdijk Les inondations de la mer du Nord, dans la nuit du 31 janvier au 1er février 1953 : cette catastrophe, l'une des plus graves de l'histoire récente des Pays-Bas, présente dans tous les échanges avec les interlocuteurs néerlandais rencontrés, était le résultat combiné de fortes tempêtes et de très grandes marées. Les digues ont alors cédé dans de nombreuses régions, provoquant la mort de plus de 1.800 personnes, l?évacuation de 70.000 personnes, détruisant 4.500 habitations et en endommageant 50.000 autres, sans compter les 200.000 hectares de terres submergées par les flots qui, à certains endroits, atteignirent une hauteur de 4,5 mètres. PUBLIÉ https://fr.wikipedia.org/wiki/Schellingwoude Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 54/107 Cette catastrophe a provoqué un traumatisme durable aux Pays-Bas en matière de prévention des inondations. Le Premier ministre, Mark Rutte, rencontré à Paris début janvier 2024 en marge de l?hommage national à Jacques Delors, y a fait immédiatement référence lors d?une mention des inondations que venaient de connaître le Pas-de-Calais. Les pertes en vies humaines et les dégâts matériels considérables ont conduit le gouvernement à lancer le Plan Delta, un ambitieux projet de construction de barrages et de digues pour renforcer la protection côtière. Le Plan Delta a été l'un des projets d'ingénierie les plus importants de l'histoire des Pays-Bas et a radicalement transformé et artificialisé le paysage côtier. Des méthodes scien- tifiques d?analyse des risques ont été développées et utilisées pour instaurer des niveaux de pro- tection différenciés pour les populations en fonction des enjeux, le système de prévision des inon- dations a été revu. In : Gueben-Venière S, 201 Ce plan tire son nom de la région du delta des fleuves Rhin, Meuse et Escaut, où il a été mis en oeuvre. Le principal objectif du Plan Delta était de fermer les bras de mer, les estuaires et les PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 55/107 embouchures des principaux cours d'eau, créant ainsi une série de barrages et de digues pour empêcher les marées de pénétrer à l'intérieur des terres, et notamment : - le barrage de l'Escaut oriental (Oosterscheldekering), l'un des plus impressionnants du Plan Delta, long de 9 kilomètres, qui comporte une série de portes mobiles qui peuvent être fermées en cas de tempête pour protéger les terres intérieures des marées hautes. Ces portes restent cependant ouvertes la plupart du temps pour permettre la circulation des eaux et la préservation des écosystèmes. - le barrage de l'Hollands Diep (Haringvlietdam) a été construit pour fermer l'estuaire de l'Hollands Diep, réduisant ainsi le risque d'inondation dans la région de Rotterdam. - le barrage de Brouwersdam a été construit pour séparer le lac Grevelingen de la mer du Nord, créant ainsi un lac d'eau salée qui est maintenant utilisé pour la navigation de plai- sance et les sports nautiques. - Le barrage de la Veerse Gat (Veerse Gatdam) a été construit pour séparer le lac Veerse Meer de la mer du Nord, créant ainsi un lac d'eau douce qui est maintenant une zone de PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 56/107 loisirs populaire. Les inondations de 1993 et 1995 : ces inondations fluviales ont fait chacune plus d?une cinquan- taine de morts et d'importants dégâts matériels et ont nécessité l?évacuation de plus de 50.000 personnes : elles ont incité les autorités néerlandaises à intensifier leurs efforts de prévention des inondations et de renforcement des digues. Ces inondations ont mis en évidence des lacunes per- sistantes malgré les progrès réalisés avec le Plan Delta. Cela a incité le gouvernement à revoir et à renforcer les normes de sécurité des digues et des systèmes de drainage, ainsi qu'à investir dans des programmes de gestion intégrée des bassins hydrographiques. Le programme "De l?espace pour le fleuve" a été développé en réponse aux inondations de 1993 et 1995. Ce programme am- bitieux visait à réduire le risque d'inondation en permettant aux rivières de déborder de manière contrôlée dans des zones spécifiques, plutôt que de tenter de les contenir strictement derrière des digues élevées. Ce projet marque aussi la réussite d?une volonté de créer un espace plus large pour le cours d?eau en s?appuyant sur des qualités paysagères et environnementales : au-delà de la prévention du risque d?inondation, ce projet a permis la création et le développement d?espaces urbains attractifs, de qualité, respectueux de l?environnement. Il a par exemple permis de réaliser de nouvelles zones urbaines au bord de la rivière Waal, avec l?implantation d?un îlot en son centre doté d?espaces récréatifs. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 57/107 Les inondations de juillet 2021 : Bien que moins sévères que les catastrophes précédentes, les inondations de 2021 ont touché plusieurs parties des Pays-Bas, notamment la province de Lim- bourg, provoquant des évacuations massives et des dommages importants. Il s?en est fallu de peu que le bilan soit plus élevé (débits mesurés inédits sur la Meuse amont, avec certaines digues en limite de débordement ; mise en place accélérée de mesures de protection grâce à une large et intense mobilisation collective). Ces inondations ont souligné la vulnérabilité continue des Pays- Bas aux changements climatiques et aux événements météorologiques extrêmes. Cela a renforcé l'engagement du gouvernement néerlandais en faveur de l'adaptation aux changements clima- tiques, notamment par le renforcement des infrastructures de prévention des inondations et la pro- motion de mesures d'adaptation au niveau local. Comme l?indiquait le commentaire modeste de Robert Slomp (« nous avons mis deux ans à comprendre les événements de 2021 »), le change- ment climatique rend la prévision de moins en moins aisée et comme le mentionnait l?un des tech- niciens flamands rencontrés, « il s?agit désormais de se préparer à l?imprévisible ». Au-delà des stress tests territoriaux déjà engagés, une expertise a été conduite pour projeter ce qu?auraient été les conséquences du même phénomène météorologique s?il avait été centré sur les Pays -Bas, au lieu de la Wallonie et de l?Allemagne. Annexe 3.2. Des protections des premiers Plans Delta au Commissaire du Delta Annexe 3.2.1 La défense contre la mer Les grandes inondations de 1916 ont conduit à la décision de fermer le bras de mer dans le nord des Pays-Bas. Les inondations dramatiques de 1953 (Sud-Ouest) ont, elles, conduit à la décision de fermer des bras de mer dans le Sud, et au 1er « Plan Delta ». La protection contre la mer est passée, en effet, par la mise en place de grandes infrastructures, qui nécessitaient des moyens considérables, et par la structuration des responsabilités avec un seul type d?organisation pour leur construction et leur entretien, sur la base d?une publication des niveaux de protection définis par l?Etat en fonction des enjeux, et d?un processus de vérification des processus par les provinces. Le projet visait à améliorer la sécurité des zones de faible altitude des Pays-Bas contre les tem- pêtes les plus violentes et les inondations. Les dunes le long de la côte ont été réhaussées de plus de 5 mètres et les îles de la Zélande reliées par des digues et des ouvrages d'art. L'Escaut oriental devait être totalement fermé, ce qui aurait transformé l'ancien estuaire en lac d'eau douce. A la suite de nombreuses manifestations, il a été décidé de construire l'Oosterscheldekering, barrage de 9 km de long et le plus complexe du projet, qui peut être ouvert ou fermé pour protéger la baie, tout en gardant sa salinité, afin de pérenniser l'industrie de la pêche et la faune sauvage. Les 25 km d?ouvrages d'art ont réduit la côte maritime des Pays-Bas d'environ 700 kilomètres. Ce Plan a imposé des choix difficiles : ont été évoqués dans les échanges 1400 maisons ont été rasées en PUBLIÉ https://fr.wikipedia.org/wiki/Inondation https://fr.wikipedia.org/wiki/Dune https://fr.wikipedia.org/wiki/Z%C3%A9lande https://fr.wikipedia.org/wiki/Escaut_oriental https://fr.wikipedia.org/wiki/Oosterscheldekering https://fr.wikipedia.org/wiki/P%C3%AAche_(halieutique) Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 58/107 1996 à Rotterdam, pour la reconstruction de la digue, 3 maisons 2010 à Arnhem, 50 maisons entre 2010 et 2015 à Nimègue. La « Deltacommissie » (Commission du Delta), mise en place dès 1953, est passée de l?approche qui consistait à porter les digues 1 mètre au-dessus des derniers niveaux de crue observés à une analyse des risques d?inondation, pour déterminer des niveaux de risque acceptables au regard des différentes enjeux. Ce travail s?inscrit dans une approche plus générale qui classe chaque type d?événement considéré en fonction de sa plausibilité aux Pays-Bas et de ses conséquences sur la sécurité nationale. La probabilité d?une inondation majeure dans l?Ouest des Pays -Bas est relati- vement faible (environ 1/10 000 à 1/100 000 par an), mais les conséquences seraient destructrices pour les Pays-Bas. Une telle catastrophe, si elle touchait ne serait-ce que la Province de Hollande Méridionale (3,6 millions d?habitants), serait d?ampleur trop importante au vu des moyens actuels des services d?urgences, même assistés par des unités de l?Armée43. Le plan Delta demande plusieurs décennies de mise en oeuvre. Le plan initial est terminé en 1986 et a donné lieu à une évaluation finale présentant les coûts, les avantages et les inconvénients. Une nouvelle tranche de travaux, complémentaire au plan initial devait se terminer en 1997, puis la rehausse de toutes les digues pour être conforme à la norme néerlandaise en la matière se sont poursuivis jusqu'en août 201044. Au bout du compte, les dispositifs de protection contre les inondations, et notamment des systèmes d?endiguements, ont tenu, et tiennent encore, une place majeure dans la politique néerlandaise de gestion des risques d?inondations aux Pays-Bas. 95 systèmes d?endiguements («dijkringen» ou « cercles de digues ») constituent des lignes continues de défense contre les inondations (maritimes ou fluviales, ou même « lacustres » pour la mer intérieure d?Ijssel). Les niveaux de protection sont fixés par voie législative, initialement au regard d?une probabilité d?aléa naturel, à présent au regard d?une probabilité de décès pour un habitant de la zone protégée. Dans la sui te de ces grands programmes, plusieurs programmes pluriannuels se sont succédés (programmes de reconstruc- tion ou de réaménagement) qui fixent les montants de travaux et les clés de répartition. Annexe 3.2.2 La protection contre les inondations fluviales A la suite des catastrophes de 1993 et 1995 de débordement fluvial, les digues sur le Rhin et Meuse ont dû être réparées d'urgence, entre 1996 et 2001, dans la cadre du « Plan Delta pour les grands fleuves » adopté par le Parlement en 1996. Plus de 1000 km des digues ont été mis aux normes en 5 ans et 150 km de nouvelles digues construites en 2 ans le long de la Meuse, conférant ainsi à 20 000 personnes une protection supplémentaire. Si des réponses immédiates ont ainsi été apportées aux inondations, le retour d?expérience qui en a été fait a soulevé des limites de ces interventions d?urgence, avec la découverte de malfaçons et fragilités dans ces digues, qui ont été difficiles et coûteuses à traiter par la suite. Il est apparu aussi que les digues ne sont pas toujours « la » bonne solution. Annexe 3.2.3 L?articulation avec la place pour le fleuve, et le changement de cap opéré dans le contexte du changement climatique La prévention des inondations est un sujet de portée nationale, qui est entré dès 1953 dans une logique de programmation pluriannuelle. Cependant, un débat fondamental s?est instauré au fil du temps à propos des principes mêmes du plan Delta : le niveau de ces terres baisse et le niveau des océans augmente dans le contexte du changement climatique. Cela signifie que les digues 43 Sources : R. Slomp, 2012 ; IGEDD, nov. 2023 44 Source : Wikipedia et entretiens PUBLIÉ https://fr.wikipedia.org/wiki/Conformit%C3%A9_des_digues_aux_Pays-Bas https://fr.wikipedia.org/wiki/Mont%C3%A9e_des_eaux https://fr.wikipedia.org/wiki/Mont%C3%A9e_des_eaux Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 59/107 vont devoir être renforcées et rehaussées, créant davantage d'enfoncement du terrain. Certains estiment que des formes de recul seraient plus pertinentes, à long terme, qu'une bataille contre les eaux, d?autres que ce serait méconnaître une tradition ou un savoir-faire de lutte contre les élé- ments. 400 km de digues ont été réhaussées. Les orientations de la politique de prévention, dans le temps long, évoluent : par exemple, face à l?opposition à des approches prenant peu en compte les articulations avec les milieux naturels, des projets importants ont été abandonnés, comme celui d?un nouveau quartier artificiel près d?Ams- terdam. La nécessité d?intégrer une écoute des populations, d?entendre toutes les propositions, d?y consacrer du temps, a été largement reconnue. Encadré 11 : exemple d?outil de concertation Une démarche de modélisation des effets des idées ou propositions de chacun pour faire face aux inondations a été développée de manière à sensibiliser à la complexité du sujet : chaque solution locale est de nature à reporter l?eau en amont et en aval. Une vue d?ensemble est un préalable indispensable à toute solution. Ce type de dé- marche doit être mobilisé hors période de crise. Si la défense contre la mer à la suite de la catastrophe de 1953 a donné lieu à des travaux majeurs de système d?endiguement, qui sont partie intégrante de l?image des Pays -Bas, la question de la place à donner à l?écoulement des fleuves a été posée dès le plan 2001-2015 « De l?espace pour le fleuve ». Sur le Rhin et la Meuse, ce programme de travaux s?inscrit dans un paradigme nouveau : au lieu d?élever des digues, leur niveau a pu être abaissé en recourant à des mesures alternatives dont des zones d?expansion de crue et des élargissements de la place laissée au cours d?eau entre les digues. Les projets n?ont pas été réalisés dans le même cadre législatif : ils relèvent de la dé- marche de planification spatiale, et ont donné lieu à une évaluation économique. La prise en compte du changement climatique a été introduite dans le même temps. Cela a conduit à retenir des hypothèses d?augmentation de 60 cm du niveau de la mer et d?une augmentation de 15% des crues fluviales. La prise en compte d?un coefficient d?incertitude de 30 cm des hauteurs de crues est couramment faite. Depuis le programme Delta 2001-2015, la nécessité de relever les défis pour 2050 et 2100 a été identifiée. C?est un changement de cap majeur. Au lieu d?attendre une nouvelle catastrophe et mener un programme de réfection, les Pays-Bas tentent d?exploiter les savoirs disponibles sur le changement climatique, les besoins de l?économie et l?utilisation des sols pour anticiper des scénarios possibles. Ce programme se décline en 7 sous-programmes régionaux, ainsi qu?en trois sous-programmes nationaux : analyse des risques d?inondation ; gestion de l?eau (l?eau potable, l?eau pour l?irrigation et le drainage après des événements pluviométriques exceptionnels ) ; urbanisme et aménagement du territoire. Chaque sous-programme est assigné à un directeur et à une équipe composée d?agents des ministères, des agences régionales de l?eau, des provinces, et de certaines communes, des instituts de recherche, et d?entreprises privées. La loi Delta, du 1er janvier 2012, définit les pouvoirs, devoirs et responsabilités du Commissaire du Delta. Son rôle est : - Celui d?un facilitateur dans les interfaces entre l?État et les collectivités ; cela signifie qu?il prend toutes les dispositions pour fluidifier les échanges, assurer la pédagogie, remonter les informations lorsqu?il en identifie le besoin. Bien qu?il occupe une place centrale dans le dispositif, il ne dispose pas du pouvoir politique, qui relève toujours du ministère (lequel élabore conjointement avec les parties intéressées les plans et programmes). Il conseille le gouvernement, mais n?assure pas de mission d?expertise auprès des collectivités. - En tant que conseil du gouvernement, il soumet des propositions pour le programme national Delta, y compris dans ses composantes financières. Il recueille le soutien du public pour le pro- gramme Delta grâce à des interventions publiques et dans les médias. Chaque année, à l'ouverture nationale du Parlement en septembre, le Commissaire du Delta soumet une proposition de nou- velles recommandations et mesures pour le programme au ministre coordonnateur et aux autres PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 60/107 membres du cabinet concernés. Il organise les travaux des administrations, et les consultations des entreprises et des ONG impliquées. Les fonds du programme du Delta (Deltafonds), ne sont pas un budget dont dispose le commissaire : ils sont mobilisés pour financer les projets du pro- gramme du delta et soumis au contrôle des parlementaires. Au titre de sa mission de conseil, le commissaire peut participer au Conseil des affaires financières, économiques, des infrastructures et de l'agriculture en sa qualité d'expert. - Il suit les progrès de la mise en oeuvre du programme Delta, rend compte et conseille sur le rythme d?avancement. Il ne porte pas la responsabilité politique finale, qui incombe au Ministre de l'Infrastructure et de la Gestion de l'Eau. Il peut alerter de sa propre initiative si la progression du programme Delta n?est pas satisfaisante45. Annexe 3.3. Organisation de la prévention des inondations Annexe 3.3.1 Une gestion de l?eau et du risque intégrée à l?échelle ministérielle Comme dans de nombreux états européens, la répartition des compétences de prévention des risques naturels repose sur deux départements ministériels : le Ministère de Sûreté et de la Justice a la responsabilité de la gestion de crise et les compétences générales liées aux services de secours et de la sécurité ; le Ministère de l?Infrastructure et de l?Environnement est en charge de l?Aménagement du Territoire, de la prévention contre le risque d?inondation, de la protection contre les crues et de la gestion des cours d?eau, des lacs, des estuaires et du littoral. Les compétences relatives aux risques naturels liés à l?eau, à la défense contre la mer, à la sécurité correspondante des personnes et des territoires, et à la gestion des cours d?eau font l?objet d?une organisation spécifique et intégrée. L?agence nationale de l'eau, le Rijkswaterstaat, sous tutelle du ministère chargé des infrastructures et de la gestion de l'eau, supervise la construction, la gestion, l?entretien des infrastructures d'intérêt national, et conseille le gouvernement dans la planification stratégique et l?atténuation des risques à long terme. Elle gère les canaux de navigation, les cours d?eau principaux et établit la prévision des crues sur ceux-ci. Elle assure la maîtrise d?ouvrage des systèmes d?endiguements « primaires » correspondants (sur les grands cours d?eau ou fleuves et barrages anti-tempêtes sur les bras de mer les plus importants), mais n?en gère directement qu?une petite partie, le reste étant géré par district hydrographique. Elle est assistée par l?institut public technique et scientifique Deltares. Depuis 2001, les fonctions de gestion et d?inspection sont séparées dans ce domaine. - Les Pays-Bas sont situés à l?aval de cours d?eau dont les sources sont dans des pays voisins. Les plus importants de ces cours d?eau disposent d?instances de coordination multilatérales en application de textes internationaux (Rhin, Meuse, Escaut), chargées notamment de coordonner la mise en oeuvre de la directive européenne cadre sur l?eau et de la directive relative à l'évaluation et à la gestion des risques d'inondation. Ces commissions fluviales internationales constituent aussi le support du développement conjoint de dispositifs de prévision des crues cohérents et par- tagés sur les grands cours d?eau. Annexe 3.3.2 Une organisation spécifique pour la gestion de l?eau aux échelons territoriaux L?organisation territoriale générale, institutionnelle et administrative, des Pays-Bas repose sur 12 provinces et 388 municipalités, pour environ 17,5 millions d?habitants. Les provinces disposent d'une autonomie limitée ; elles sont compétentes sur le développement spatial et économique, la 45 Cette description cite largement le site du Programme national grand delta. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 61/107 politique environnementale, la gestion stratégique des eaux superficielles (en lien avec les munici- palités et en concertation avec les « waterschapen » Cf. infra), les transports en commun et l?éner- gie. Les 12 provinces sont, notamment, responsables de l?aménagement de leur terr itoire (espaces naturels, urbanisation, zones industrielles, transport et voies navigables régionaux). Les membres de chaque conseil provincial sont élus, chaque président du conseil « le Commissaire de la Reine » est nommé par l?État. Outre leur fonction en matière de gestion stratégique de l?eau, les provinces sont responsables des cartes d?aléa et de risque d?inondation. 21 « autorités locales de l?eau », les waterschapen (parfois traduits par « wateringues »), ont été constituées à partir de 2500 autorités historiques. Elles correspondent géographiquement à des districts hydrographiques, et sont centrales pour la gouvernance de l?eau et des inondations. Ces organismes disposent d?un conseil élu au suffrage universel pour cinq ans, qui identifie un président nommé par les autorités de niveau national, le « comte des digues » (Dijkgraaf). Ils gèrent les cours d?eau secondaires, et assurent la maintenance et la reconstruction de la plupart des systèmes d?endiguements et digues primaires ou secondaires, quel qu?en soit le propriétaire. Une loi de 1983 a précisé leur rôle. Financièrement autonomes, les waterschapen disposent d?un pouvoir régle- mentaire en matière de prévention des inondations et de protection des digues et des dunes, de surveillance du niveau et de la qualité des eaux, du traitement des eaux résiduaires urbaines, de la gestion des eaux souterraines. Ils fixent les taxes dues par les bénéficiaires, notamment pour la protection assurée par les digues et pour les émetteurs de pollutions. Les droits de votes sont établis en fonction des taxes payées, la population devant représenter au moins 50% des voix. Sauf exception, un seul waterschap intervient sur chacun des 95 systèmes d?endiguement. Les municipalités sont en charge notamment de l?occupation des sols et de l?urbanisme. Des règles strictes sont définies, au niveau national, qui concernent uniquement la construction dans les zones comprises entre les cours d?eau et les digues, ainsi que dans une bande (de largeur variable) derrière la digue. Les membres du conseil municipal sont élus. Le président du conseil « le maire/ bourgmestre», nommé par l?État, est responsable de la police et des autres services d?urgences. Si l?intégration de tous les enjeux relatifs à l?eau est très forte, la question des interfaces avec l?urbanisme, historiquement, a été moins forte et peu contraignante ? ceci pouvant aussi être lié à la densité et aux contraintes spatiales du pays. D?une manière générale, les règles de constructions font référence à des obligations génériques de stabilité dont le respect relève du maitre d?ouvrage. Il existe des guides techniques qui ne font pas office de prescriptions. Pour les habitations flottantes mises en oeuvre hors de la zone protégée, il est mentionné qu?elles sont construites « à vos risques et périls ». Annexe 3.3.3 Un financement des protections et de la prévention organisé dans une logique de subsidiarité Il existe une hiérarchie des protections. Les protections primaires du domaine de l?État (notamment les grands barrages) sont financées par le budget de l?État. - Les protections primaires du domaine des autorités régionales de l?eau sont entretenues par les autorités régionales de l?eau sur leur budget (notamment grâce à leur impôt propre) ; pour leur construction, le financement repose toutefois à hauteur de 45% sur le budget de l?État (via le pro- gramme HWBP de protection contre la submersion). En 1996, la loi sur les ouvrages de protection contre les submersions a mis en place des inspections techniques réglementaires donnant lieu à des rapports publics et la validation par le parlement du budget pour l?entretien des ouvrages. Encadré 12 : différenciation des systèmes d?endiguement en fonction des niveaux de protection Les digues sont classées en plusieurs catégories, ces classements étant régulièrement revus, avec, le cas échéant, des objectifs de protection modifiés, et des responsables et gestionnaires redéfinis. Sur le Rhin et la Meuse, le Rijkswaterstaat, organisme national, est maître d?ouvrage et gestionnaire des fleuves et grands cours d?eau. Par PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 62/107 contre la gestion de la plupart des digues correspondantes, classées « primaires », est assurée par les 21 « auto- rités locales de l?eau », les waterschapen. Ces organismes assurent par ailleurs la maintenance et la reconstruction des systèmes d?endiguements et digues secondaires quel qu?en soit le propriétaire. Pour des cours d?eau et digues régionaux, comme la Geul et la Roer, les « standards » génériques de protection, en durées de retour des événements de crues, sont de 10 ans pour des prairies, 25 ans pour des cultures, 50 ans pour l?horticulture, 100 ans pour les zones urbanisées. Dans le sud du Limburg, avec une population dense et des vallées pentues (pour les Pays-Bas), certaines zones urbaines comme Valkenburg par exemple, sont protégées contre des crues de période de retour 25 ans, notamment pour des raisons de coûts des ouvrages, semble-t-il. Ces zones ont été exposées en juillet 2021 à des crues plus que centennales. - L?entretien et le curage, qu?il a été difficile de différencier précisément lors des entretiens, des cours d?eau dépendent fortement de leur fonction. Les voies navigables font l?objet de valeurs seuil (étiage) qui justifient des interventions de curage immédiates en cas de perturbation du trafic. Les cours d?eau qui ont pour seul objet l?écoulement d?eau font aussi l?objet d?un suivi afin de res- pecter le gabarit inscrit dans le registre, mais sur une base annuelle seulement. Certains cours d?eau sont dépourvus de gabarit mais font l?objet de curages pour des raisons de qualité écologique et chimique du milieu aquatique : le curage permet de réduire la charge organique au profit du respect des objectifs de la directive-cadre sur l?eau. Pour les grands cours d?eau (Escaut, Meuse, Rhin), l?agence des travaux publics de l?État applique les normes inscrites dans un registre de gabarit (chenal de navigation et végétation maximale), ce qui se traduit par des interventions de curage mais aussi des interventions en certains points du réseau (notamment au droit des ouvrages d?art). Des mesures ont lieu chaque année pour vérifier le gabarit de chaque cours d?eau concerné et des travaux sont réalisés en cas de besoin. Le coût est porté par le budget de l?État. Pour les cours d?eau relevant de la compétence des autorités régionales de l?eau et les autres cours d?eau, une distinction est faite entre trois catégories de cours d?eau : - Catégorie A (domaine de l?autorité régionale de l?eau) : de façon similaire aux cours d?eau ma- gistraux entretenus par l?agence des travaux publics de l?Etat, les normes découlant d?un re- gistre de gabarit sont appliquées. - Catégorie B (cours d?eau sous propriété privée ou relevant du domaine d?autres collectivités) : l?entretien est assuré par les propriétaires sous le contrôle de l?autorité régionale de l?eau, qui intervient auprès du gestionnaire en cas de défaut d?entretien. - Catégorie C : (cours d?eau propriété de particuliers) : l?entretien est entièrement de la respon- sabilité des particuliers. Les autorités régionales de l?eau disposent d?un plan pluriannuel de curage visant à maintenir le gabarit prévu par le registre. Ce plan s?appuie sur un programme de mesures et sur les données historiques, qui permettent d?identifier les zones sujettes à sédimentation. Le financement de ces opérations est assuré en partie par l?impôt propre aux autorités régionales de l?eau et, lorsque les cours d?eau ou canaux ont une fonction touristique, économique ou de navigable (exemple : Eem), en partie par les municipalités et les provinces concernées, dans le cadre d?accords ad hoc. - Le financement de la gestion de l?eau repose sur l?impôt levé par les autorités régionales de l?eau, déterminé chaque année par chaque autorité régionale pour son propre territoire de telle sorte que les recettes couvrent le service rendu, impliquant que l?impôt varie d?une région à l?autre. Cela s?explique par la diversité des situations : les besoins de financement pour la gestion de l?eau ne sont pas homogènes sur le territoire néerlandais (certaines autorités ont plus de digues à en- tretenir que d?autres?). Le programme visant à recréer de l?espace pour la rivière a été financé par l?État, ponctuellement avec un cofinancement local (provinces) pour prendre en compte des fonctionnalités non prévues par le programme. La loi actuelle prévoit toutefois que le montant des impôts puisse être modulé sur la base de la valeur locative des immeubles, des espaces agricoles et des espaces naturels, laquelle peut varier dans le temps ; ainsi, le montant des impôts peut varier dans le temps pour un contribuable donné, PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 63/107 sans que le service rendu par l?autorité régionale ne change. En mars 2024, une proposition de loi sera déposée, répondant à une demande des autorités régionale de l?eau, permettant de moduler le montant des impôts non pas sur la valeur locative des biens mais sur les « caractéristiques » (destination, surface, etc.) des biens. Les ordres de grandeur sont les suivants : ? une taxe locale des autorités régionales de l?eau due par toute construction pour ? entretien de digues et dunes (?10 à 50 ¤/an) par maison ; ? entretien du système d?irrigation et de drainage (canaux et cours d?eau) ; ? le cas échéant : frais de pompage (?10 à 50 ¤/an) ; ? assainissement (?200 ¤/an). Pour la qualité des milieux aquatiques ; le principe du pollueur- payeur est ainsi appliqué, sécurisant le financement. Les réseaux appartiennent aux municipalités. ? Le budget gouvernemental pour les nouveaux ouvrages (?50 ¤/an), en particulier : ? en cas d?évolution des normes ; ? en cas de nouvelles connaissances ; ? pour tenir compte de l?évolution des contraintes et du dérèglement climatique (niveau de la mer, vent, crues des rivières). Aux Pays Bas, les habitants paient ainsi environ 200 euros par maison et par an pour l?assainisse- ment, 50 euros pour la gestion d?eau dans les zones protégées, 50 euros pour les stations de pompage, et 50 euros pour les investissements (50% provenant de fonds nationaux, 50% des fonds locaux à deux niveaux de responsabilité (40 + 10). La taxe doit recouvrir les frais, et vient en contrepartie d?un service. Depuis 1953, il y une solidarité entre zones ruraux et urbain. R. Slomp, lors d?un colloque à La Rochelle indique ainsi : « C?est très important, dans notre sys- tème, que l?entretien des ouvrages soit géré localement et quotidiennement par les autorités régio- nales de l?Eau. Ces autorités gèrent aussi tous les petits cours d?eau et toutes les petites digues. On a 3 600 km de digues principales et environ 15 000 km de digues régionales. Les gestionnaires ne sont pas propriétaires des digues. La propriété et la gestion ont été séparées dans certains cas pour faciliter l?action. Celui qui gère une petite digue soit s?occuper de son entretien pareil pour un petit cours d?eau, et cela réduit la taxation. Si un paysan nettoie sa propre canalisation pour le drainage et l?irrigation autour de ses champs, il évite l?amende qu?il aurait s?il ne le faisait pas. C?est un système qui articule travail volontaire et taxation pour le service reçu. Cela représente en tout 400 euros par année et par habitant. Un agriculteur qui a plus de terrain paie plus ; ce système date du XIIIème siècle. » Annexe 3.4. Une gestion de crise fondée sur des principes clairs et partagés - La gestion de crise, selon son étendue, dépend du niveau communal, du niveau de « régions de sécurité », ou du niveau national. Concernant la sécurité civile, le commissaire du roi au niveau provincial exerce une fonction de coordinateur du maintien de l'ordre public et de la gestion des opérations de secours lors de catastrophes dépassant les limites d'une commune. La responsabilité opérationnelle de la sécurité publique est portée par les 25 « régions de sécurité», conseillées par les waterschapen quand il s?agit d?inondations. Elles donnent mandat aux maires de décider des évacuations. Ces régions sont présidées par un maire (habituellement un maire de commune importante). Elles correspondent aux régions de police, avec qui elles partagent le même président, et coordonnent les services de secours municipaux et les autorités de santé, en crise. Beaucoup de membres des équipes de secours sont des volontaires. La coordination nécessaire entre l?assistance des services d?urgence et de l?armée est assurée par le Ministère de Sûreté et de la Justice. Chaque ministère dispose d?une cellule de crise «DCC ». Le Ministère de Sûreté et de la Justice est chargé de leur coordination. - Les bulletins de l?institut national de météorologie, sont adressés aux structures en charge de la PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 64/107 prévision des crues, toutes les 6 heures avec des messages spécifiques en cas de crise, qui font référence aux conditions hydrauliques utilisées dans les modèles, permettant de se situer par rap- port au risque de rupture des protections. Si ces bulletins sont publics, des messages d?urgence sont adressés aux autorités régionales de l?eau, qui en fonction de leurs analyses informent la région de sécurité. En termes de communication de crise, les experts néerlandais insistent sur la nécessité de s?ap- puyer sur un seul « point of truth » : seule l?autorité compétente (l?autorité régionale de l?eau) a la capacité d?interpréter les bulletins et les messages d?urgence provenant du centre de crise sur la gestion de l?eau. C?est un des enseignements tirés de l?expérience des inondations de 2021 dans le Limbourg ; la région de sûreté a fait évacuer un hôpital (237 malades) sans que les autorités compétentes en matière hydraulique ne l?estiment nécessaire, ce qui en temps de COVID a créé des risques sanitaires jugés « inutiles ». - En situation de pré-crue, pour que les digues assurent leur fonction de protection, il est nécessaire de renforcer certains points, de fermer de façon étanche certains passages (par exemple un pas- sage routier sous un remblai routier ou ferroviaire faisant fonction de digue, ou une interruption dans une digue pour le passage d?une voie de circulation). L?ensemble de ces actions prennent habituellement 5 jours de travail. Par ailleurs, pendant une crise, un dispositif de surveillance et d?intervention sur les digues est prévu, qui mobilise des professionnels, notamment les inspecteurs de digues, aidés par des gardiens de digues volontaires qu?ils encadrent, forment et réunissent une fois par an. Certaines autorités régionales de l?eau recourent, en effet, à des bénévoles pour la surveillance des digues mais aussi, conjointement avec leur personnel administratif, pour la fer- meture de certains batardeaux et pour le renforcement de digues en cas d?urgence (sacs de sable). Pour la préparation aux situations de crise mais aussi pour l?inspection des digues, des formations sont prodiguées par les autorités régionales de l?eau en mobilisant le cas échéant des entreprises qualifiées. Ce dispositif a été globalement efficace lors de inondations de 2021. En certains endroits, il s?en est fallu de quelques centimètres que l?eau ne dépasse le haut de la digue, ou le haut de la rangée de sacs de sable ajoutée. S?il y avait eu du vent, plusieurs digues auraient surversé. Sur la Meuse, l?eau a pu dépasser le niveau de la digue du système « primaire », heureusement renforcée par des sacs de sable. Des évacuations préventives importantes ont néanmoins été mises en oeuvre. - La mise en place de pompages d?urgence relève des gestionnaires des systèmes concernés (l?État pour les grands fleuves, les autorités régionales pour les autres cours d?eau). Il est possible que les régions de sûreté (autorités intercommunales, présidées par le maire de la ville principale, chargées de la sécurité civile) sollicitent le recours aux pompages d?urgence des autorités régio- nales de l?eau lorsque des incidents locaux se produisent et que les pompages pérennes en place et les équipements des pompiers ne suffisent pas. Le Centre national de coordination opérationnel de l?Agence de travaux publics de l?État, au niveau de l?État, est responsable de la gestion du parc de pompes d?urgence, mobilisées pour les crises nationales (et internationales). Le dimensionne- ment du parc est fondé sur une analyse portant sur la période 2003-2007 et sur des études de gestions des catastrophes naturelles. De ces dernières, il est apparu, par exemple, que les pompes historiques, montées sur des barges flottantes, n?étaient pas adaptées pour une mise en place rapide, justifiant leur remplacement par des pompes au format conteneur. Au niveau local, les autorités régionales de l?eau réalisent leurs propres analyses sur le besoin en pompes d?urgences, et les financent par leurs propres moyens. La capacité des pompes d?urgence est négligeable par rapport à celles des pompes pérennes, sur lesquelles les investissements sont privilégiés. Par exemple, suite aux inondations de 1998 (à Na- gele), l?autorité régionale de l?eau compétente a rehaussé de 60% la capacité de ses pompes pé- rennes. Les experts estiment que les pompes d?urgence sont mobilisées à des fins de communi- cation politique pour afficher la mobilisation de tous les moyens pour résoudre une situation de PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 65/107 crise46. Les pompes d?urgences néerlandaises sont également mobilisées en cas de sécheresse, lorsque les ouvrages le long des grands fleuves, destinés à alimenter en eau les systèmes hydrauliques locaux, se trouvent « à sec » du fait de niveaux d?eau trop faibles dans les fleuves. Annexe 3.5. De la prévention des inondations à l?adaptation au changement climatique En novembre 2023, les Pays-Bas ont connu une pluie constante pendant plusieurs semaines. Si cela permet de reconstituer les nappes, cela a posé des problèmes de sécurité du bâti. Cet épi- sode souligne aussi qu?est posée, plus qu?avant, la question de la place laissée au fleuve et la recherche de nouveaux équilibres. Au lieu d?évacuer le plus vite possible l?eau à la mer, un nouvel enjeu, au regard des risques de sécheresse est de la retenir. Le premier moyen pour cela identifié aux Pays-Bas est l?infiltration dans les sols et la recharge des nappes, et non la création de bassins de rétention, qui, de toutes façons sont difficiles à gérer car ils ont potentiellement deux objectifs difficilement compatibles : être vides pour écrêter les crues et retenir l?eau pour l?utiliser l?été. Dans deux ans, sont prévues de nouvelles décisions sur ce sujet, sur la base de nouveaux scenarios. Ce travail s?appuie sur des concertations, il sera présenté par le Commissaire au plan Delta et donnera lieu à des décisions du gouvernement. Le travail de planification spatiale au regard du changement climatique vise à travailler sur les limites que nous donne la nature, limites qui sont atteintes. Une priorité identifiée depuis 2021 est de mieux prendre en compte l?eau et les sols. Cela a été porté par le nouveau gouvernement, puis a donné lieu à un « policy brief » aux chambres, présentant les actions prévues en grandes lignes, à une revue scientifique, et à des discussions avec tous les niveaux de gouvernement. Sept principes sont arrêtés : - ne pas reporter de charge sur les générations futures ; - mieux prendre en compte les situations extrêmes ; - avoir une approche cohérente des inondations, de la sécheresse, des sols ; - avoir une « sécurité multicouche » dans la zone du delta ; - diminuer l?imperméabilisation, l'excavation, éviter les contaminations ; - avoir une approche intégrée de la vie dans l'environnement ; - se conformer à ces principes, les expliquer. Sur cette base, les pratiques vont changer : - prendre en compte les intérêts de l'eau et du sol pour des projets de construction dans la durée ; - avoir une utilisation parcimonieuse de l'eau, une eau propre et en quantité suffisante, des espaces pour retenir, stocker et évacuer l?eau ; - avoir un sol et un sous-sol sains et bien organisés. L?ambition est que : - la construction de bâtiments adaptés au climat devienne une pratique courante ; - des orientations nationales claires s?articulent avec une mise en oeuvre et des solutions locales ; - les système de l'eau et du sol guident la planification et les décisions ; - les solutions utilisées résolvent, autant que possible, plus d'un problème. 46 Des capacités de pompage d?urgence sont également développées pour parer à certains scénarios prévus dans le cadre de plans de gestion du risque. Par exemple, dans le Brabant septentrional, le choix a été fait par l?État de rehausser le niveau d?eau dans le grand lac Volkerak Zoommeer, qui sert de stockage d?eau douce pour les étés secs ; ce choix a eu pour effet de diminuer la capacité d?évacuation gravitationnelle des eaux provenant du système hydraulique local ((autorité régionale de l?eau Brabantse Delta), d?où la nécessité d?adjoindre des pompes d?urgence (mobiles, mais installées dans des sites prévus à cet effet le long du lac). Compte tenu du contexte (choix de l?État de rehausser le nveau du lac), les pompes d?urgence de l?autorité régionale de l?eau ont été financées par l?État dans ce cas précis PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 66/107 Six items guident une construction adaptée au changement climatique : prise en compte de la biodiversité, chaleur, submersion, inondation et ruissellement, sécheresse, biodégradabilité. Des lignes directrices ont été établies à l?échelle nationale, qui n?ont pas, pour le moment, de portée réglementaire. Leur ambition est de donner des orientations nationales claires, mises en oeuvre par les collectivités, et les activités. Ces principes pourraient, à terme, relever de la loi pour ac- croître leur portée. Dans le cas de projets de construction, et du choix des lieux où construire sont pris en compte, la compensation requise si on construit en zone inondable a été augmentée. Une carte a été établie qui fixe les contraintes pour l?aménagement, en fonction des enjeux liés à l?eau et aux sols. Au-delà de ce travail structurel de planification, une démarche que l?on pourrait qualifier de pros- pective et pragmatique a également été engagée dans le cadre du Programme Delta, sous l?égide du Commissaire. Encadré 13 : Le Programme Delta « Depuis déjà une dizaine d?années, les Pays-Bas ont mis en place une structure afin d?anticiper les effets du changement climatique sur le plan de la maîtrise de l?eau, il s?agit du programme Delta. Ce programme est le fruit d?une collaboration entre l?État, les provinces, les wateringues, les communes et des organismes de recherche. Y sont également impliqués les secteurs économiques dépendant de l?eau. Ce pro- gramme est coordonné par le commissaire pour le Delta, un haut-fonctionnaire indépendant du gouvernement. Il est financé par des fonds publics dédiés. Cette indépendance politique et financière, inscrite dans la loi et, de ce fait, approuvée par le Parlement, garantit une certaine protection à cette structure, ainsi qu?une mise à l?abri des alternances électorales et des réductions budgétaires qu?elles peuvent décider. Chacun au sein du programme est encouragé à rechercher et à évaluer les mesures qui rendront la maîtrise de l?eau et son utilisation plus pérennes, sans que soient mis en péril les enjeux économiques dépendants des ressources en eau. Le principe de base est celui des chemins d?adaptation (Haasnoot et al., 2013), dans lesquels les mesures identi- fiées et jugées prometteuses sont mises en place graduellement, au fur et à mesure que le besoin s?en fait sentir, et en consolidant les mesures prises précédemment afin de ne jamais avoir à revenir en arrière. (..) Le gouvernement néerlandais a lancé en 2019 un grand programme de recherche afin d?en comprendre les conséquences possibles sur les stratégies actuelles de maîtrise de l?eau au-delà de 2100. Le but est d?appréhender comment ces stratégies doivent être modifiées au fur et à mesure que le niveau des mers montera de 5 mètres. Le programme, qui doit durer jusqu?en 2025, s?articule autour de cinq axes : ? À quelle vitesse le niveau des océans risque-t-il de monter ? La situation en Antarctique est un élément clé et dépendra des évolutions des émissions mondiales de gaz à effet de serre, telles que conceptualisées dans les scénarios Representative Concentration Pathway (Van Vuuren et al., 2011). ? Quels sont les défis posés par une hausse du niveau de la mer de 1, 2, 3 et 5 mètres ? Dans quelle mesure les PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 67/107 stratégies actuelles sont-elles tenables ? Cette partie concerne à la fois la stratégie de gestion des risques d?inon- dation et celle de l?approvisionnement en eau. ? Comment détecter une accélération de la hausse du niveau de la mer afin d?agir à temps ? ? Quelles seraient les conséquences d?une hausse du niveau de la mer sur les stratégies à long terme d?aménage- ment du territoire ? Et comment les anticiper dans les choix à faire aujourd?hui ? L?implantation de nouveaux quar- tiers se situant 7 mètres au-dessous du niveau de la mer est certes faisable économiquement et techniquement, mais est-ce un choix pérenne ? ? Comment élaborer une politique reposant sur la mise en place de mesures par étapes ? Comment organiser la gouvernance de cette politique, la communication à destination du grand public, etc. ? » PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 68/107 Annexe 4. La prévention des inondations en Belgique La prévention des inondations en Belgique, tout en s?inscrivant dans le cadre des directives européennes, relève très largement des régions, le niveau fédéral étant en charge de ce qui relève de la submersion marine. Même si cela peut induire des différences entre Flandre et Wallonie, des points communs ressortent dans des tendances de fond, comme une évolution d?une démarche de protection à une approche de la prévention par l?aménagement des territoires, et en particulier de la place laissée aux cours d?eau ou encore d?une attention croissante portée aux conditions d?urbanisation. Si la « Water Bomb » a touché dramatiquement la Wallonie, les suites de cette catastrophe ont conduit à un travail de fond, pluridisciplinaire et partenarial, tant en Wallonie qu?en Flandre. Dans la durée, un virage de la prévention des inondations vers l?adaptation au changement climatique est engagé. Annexe 4.1. Mise en perspective historique et géographique Annexe 4.1.1 Un pays présentant des enjeux différenciés du point de vue de la prévention des inondations Le territoire belge comprend, soit en totalité soit partiellement, 6 bassins hydrographiques : l?Yser, l?Escaut, la Meuse, le Rhin, la Seine et le bassin côtier de la Mer du Nord. Leur ampleur sur le territoire belge donne un statut particulier aux districts internationaux de la Meuse (avec la France, l?Allemagne, les Pays-Bas et le Luxembourg) et de l?Escaut (avec la France et les Pays-Bas). La gestion des eaux comporte donc, en Belgique, des enjeux transfrontaliers importants sur plu- sieurszones : Escaut et l?Yser (dont les enjeux relèvent de la Commission Internationale de l?Escaut (CIE) qui unit 6 parties contractantes) ; les Moëres, bande poldérisée entre Dunkerque et Furnes, où est en cours le projet INTERREG - MAGETEAUX qui a été mobilisé en novembre 2023 afin d?assurer l?évacuation des eaux via le canal de Furnes à la mer par Dunkerque ; et la nappe des calcaires carbonifères dans le Tournaisis et de la région de Roubaix-Tourcoing. Encadré 14 : Quelques repères sur la Flandre et la Wallonie La Flandre belge constitue, comme le Nord de la France et les Pays-Bas, une zone poldérisée, plate, au niveau de la mer, qui sur 13.626km² accueille 6.774.807 habitants (soit 497 habitants /km²). Elle fait partie de 2 districts hy- drographiques : l?Escaut et la Meuse. - Le district hydrographique international de l'Escaut a une superficie de 36.500 km², dont environ un tiers se trouve en Flandre. La partie flamande est formée par le bassin hydrographique des rivières Escaut et Yser et de leurs affluents et des Polders de Bruges, ainsi que par les eaux souterraines et les eaux côtières qui y sont associées. Elle comprend les provinces de Flandre occidentale, de Flandre orientale et du Brabant flamand, ainsi qu'une partie des provinces d'Anvers et du Limbourg. Sur les 300 communes flamandes, 263 se trouvent entièrement et 23 partiellement dans le district hydrographique de l'Escaut. Le district est divisé en dix bassins. En raison du relief essentiellement plat, les rivières sont des cours d'eau de plaine avec de larges vallées et des vitesses d'écoulement et des débits faibles. La zone est densément peuplée et fortement urbanisée et se caracté- rise par un réseau très dense de routes de transport. Cette situation, qui s'ajoute à l'urbanisation, crée une forte fragmentation. Le district abrite un certain nombre de grandes zones industrielles, dont le port d'Anvers. L'agricul- ture intensive est également prédominante, représentant un peu moins de la moitié de l'utilisation des sols. Les grandes zones naturelles d'un seul tenant sont rares. - Le district hydrographique international de la Meuse couvre une superficie d'environ 34 500 km², dont à peine 1 600 km² en Flandre. En Flandre, le district hydrographique est constitué de la Meuse et de ses affluents, ainsi que des eaux souterraines associées. Le district ne forme pas un ensemble contigu en Flandre : une partie est située au nord de la province d'Anvers, une deuxième partie à l'est de la province du Limbourg et une troisième partie à Voeren. Sur les 300 communes flamandes, 14 se trouvent entièrement et 23 partiellement dans le district hydro- graphique de la Meuse. Sur les 11 bassins, seul le bassin de la Meuse appartient au district hydrographique de la Meuse. Parmi les six systèmes d'eaux souterraines, l'ensemble du système de la Meuse, une petite partie orientale du système de Brulandkrijt et la partie septentrionale du système de la Campine centrale appartiennent à l'arron- dissement hydrographique de la Meuse. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 69/107 Le relief de l'arrondissement de la Meuse est essentiellement plat. La densité de population y est plus faible que dans le reste de la Flandre. Le réseau de routes de transport y est également moins dense. Les principales zones industrielles sont situées le long des canaux. Un peu moins de la moitié du territoire est consacrée à l'agriculture, essentiellement intensive. Il y a un peu plus de zones naturelles dans le district du bassin de la Meuse que dans le district du bassin de l'Escaut. - La Wallonie,16 901 km2, est constitué de cinq provinces : le Brabant wallon, le Hainaut, Liège, le Luxembourg et Namur. En superficie, la plus grande est la province de Luxembourg qui est également la moins peuplée des cinq avec une densité de population de 64,54 habitants au km², tandis qu?elle est de 372,43 habitants au km² dans le Brabant wallon. Le territoire est également divisé en 20 arrondissements, eux-mêmes divisés en communes. Sur les 262 communes en Wallonie, 65 portent le titre de Ville. À l'exception de la province du Brabant wallon, au sud de Bruxelles, et une grande partie du Hainaut à l'ouest, qui jouxte la France, le reste de la Wallonie ? sauf deux ou trois enclaves, notamment du côté du Grand-Duché de Luxembourg ? appartient au bassin mosan47. Le système fédéral belge conduit historiquement à une répartition complexe entre les différentes structures politico-administratives des compétences mises en jeu par la prévention des inondations, entendue au sens large, de l?aménagement du territoire à la planification des crises. Les inondations meurtrières de l?été 2021 ont créé un choc et ont suscité des critiques sur la ca- pacité du dispositif en place à anticiper et répondre à des événements de cette ampleur. De nom- breuses actions sont en cours, notamment pour répondre à des impératifs de coordination accrue et plus efficace. Une commission d?experts en matière de gestion de crise a établi un livre blanc « Recommandations permettant d?améliorer la gestion de crise en Belgique » en avril 2023. Annexe 4.1.2 Des enjeux transfrontaliers majeurs Ces enjeux sont structurés dans différents cadres : - Par l'autorité de bassin de l'Yser, pour ce qui concerne la concertation bilatérale transfronta- lière autour de l'Yser, notamment en ce qui concerne la qualité de l'eau. - Par le Groupement Européen de Coopération Territoriale, pour la concertation transfronta- lière autour de l'Aa. Ces consultations s'inscrivent dans le cadre du groupe de travail sur l'eau du GECT. L'adaptation du "Moerenverdrag" est née au sein de ce groupe de travail, tout comme le projet Interreg Ma- geteaux, qui a mis en oeuvre une station de pompage sur le Speievaart vers le canal Nieuport - Dunkerque et une construction de glissières à Dunkerque. - Dans le projet Stratégique Vallée de l?Yser et du Handzame (province chef de file) avec les préparatifs en vue de la soumission du projet Provaly (Interreg) concernant le système transfron- talier de prévision et d'alerte, l'aménagement des berges, le GOG Proven, la de Stavele, etc. - Par la Commission Internationale de l'Escaut et, en particulier le groupe de travail hydrologie. La mise en oeuvre du plan pluriannuel ISC-CIE WGH 2022-2027 a commencé avec : - Le travail de préparation des bilans hydriques pour les principales masses d'eau transfrontalières, avec un rapport de la délégation flamande. Les délégations étudient maintenant ce rapport afin d'évaluer dans quelle mesure elles peuvent fournir des données pour les différents éléments du bilan hydrique et/ou si des éléments supplémentaires doivent être ajoutés. - La notification d'étiage a été standardisée et le calendrier de livraison des données a été synchro- nisé. - Les délégations néerlandaise, flamande, bruxelloise et française ont fait des présentations sur l'impact du changement climatique sur les masses d'eau. - Dans le cadre de l'atelier conjoint sur l'hydrométrie, un répertoire des personnes à contacter en 47 Source : Wikipedia PUBLIÉ https://fr.wikipedia.org/wiki/Province_du_Brabant_wallon https://fr.wikipedia.org/wiki/Province_de_Hainaut https://fr.wikipedia.org/wiki/Province_de_Li%C3%A8ge https://fr.wikipedia.org/wiki/Province_de_Luxembourg https://fr.wikipedia.org/wiki/Province_de_Namur https://fr.wikipedia.org/wiki/Densit%C3%A9_de_population https://fr.wikipedia.org/wiki/Arrondissement_administratif_de_Belgique https://fr.wikipedia.org/wiki/Commune_(Belgique) https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_communes_de_la_R%C3%A9gion_wallonne https://fr.wikipedia.org/wiki/Ville_de_Belgique https://fr.wikipedia.org/wiki/Brabant_wallon https://fr.wikipedia.org/wiki/Bruxelles https://fr.wikipedia.org/wiki/Province_de_Hainaut https://fr.wikipedia.org/wiki/France https://fr.wikipedia.org/wiki/Luxembourg_(pays) Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 70/107 cas d'inondation a été lancé, ainsi qu'un aperçu des procédures de travail et de la documentation des organigrammes sur la gestion de crise en cas d'inondation. - Une visite de travail 2023 s'est concentrée sur les mesures de prévention des inondations dues aux marées à Ostende. - Les travaux sur l?alignement bilatéral des principaux cours d?eau transfrontaliers se poursuivent. - Les délégations ont été invitées à fournir une vue d?ensemble des cartes d?inondation natio- nales/régionales afin de relier les plaines inondables transfrontalières. Concrètement, fin décembre 2023, il a été convenu lors de la réunion des chefs de délégation que la Flandre et la France mettent en place une coopération bilatérale pour, d?une part, avoir une vision globale des accords et des conventions entre les gestionnaires de l?eau et vérifier que les mesures de gestion de crise sont suffisamment adéquates et, d?autre part, élaborer un plan d?action transfrontalier tant en termes de planification que de dispositions pour laisser un espace suffisant Room for the River) à l?eau afin de réduire ou d?éviter les risques d?inondation. Annexe 4.2. La gestion de l?eau dans le système fédéral belge Annexe 4.2.1 Le rôle important des régions La Constitution belge et la Loi spéciale de réforme institutionnelle du 8 août 1980, suivie des réformes successives de l?État belge, fixent la répartition des compétences entre l?État fédéral, les Communautés (Communauté française de Belgique/Fédération Wallonie-Bruxelles, Communauté flamande, Communauté germanophone de Belgique/Ostbelgien) et les Régions (Région wallonne, Région flamande, Région de Bruxelles-Capitale), qui constituent ensemble les « entités fédérées ». Les régions ont des compétences dans les domaines qui touchent à l?occupation du territoire au sens large, aux « matières économiques et localisables ». Les communautés sont en charge de ce qui concerne les personnes (matières personnalisables comme la langue, l?éducation, la culture, le sport, l?aide aux personnes). Compte tenu de cette répartition des compétences, la politique belge en matière de prévention et de gestion des inondations et des phénomènes de submersion ? de l?aménagement à la gestion de crise ? relève de différents cadres normatifs, équivalents en termes de hiérarchie des normes, et de différentes autorités qui doivent se concerter. Les Régions, depuis 1980, sont compétentes en matière d?aménagement du territoire et à ce titre, de la politique de l?eau, de la gestion des districts hydrographiques, de la conservation de la nature, des travaux publics et des transports. Les principaux outils juridiques en matière de politique de l?eau sont, en Belgique, des décrets pris par les gouvernements régionaux : il s?agit, pour la Flandre, du décret « Politique intégrale de l?eau » du 18 juillet 2003, codifié dans le Code de l'eau, pour la Wallonie, du décret relatif au Livre II du Code de l?Environnement constituant le Code de l?Eau du 27 mai 2004 et pour Bruxelles-Capitale, de l?ordonnance du 20 octobre 2006 établissant un cadre pour la politique de l?eau. Ces trois textes transposent les directives européennes 2000/60/CE (« Directive-cadre sur l?eau ») et 2007/60/CE (« Directive Inondation »). L?État fédéral intervient cependant dans la mise en oeuvre de la directive-cadre pour les aspects liés aux eaux côtières, en particulier pour la Mer du Nord. Cette structuration se traduit par une démultiplication des participations représentant la Belgique, dans les différentes instances, par exemple, dans celles dédiées à la gestion transfrontalière de l?eau. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 71/107 Annexe 4.2.2 Une organisation de la gestion de crise par niveaux de gravité Si les Régions sont en charge de l?aménagement du territoire et interviennent donc, au sens large, dans la prévention des catastrophes naturelles, la gestion de ces dernières stricto sensu n?est pas de leur ressort. Le modèle belge de gestion de crise est fondé sur la distinction de plusieurs phases définies par le niveau de gravité, l?ampleur géographique et le type de moyens requis : la phase communale, dirigée par le bourgmestre ; la phase provinciale, dirigée par le gouverneur ; la phase fédérale, qui dépend du Ministre de l?Intérieur. La continuité et l?évaluation des critères de passage d?une phase à l?autre sont assurées par le Centre de crise national (NCCN), qui est un acteur interfédéral. Le NCCN est en outre chargé, au niveau national, de développer une stratégie globale d?amélioration de la résilience de la Belgique (élaboration de méthodologies standards pour les acteurs locaux, lancement de campagnes de prévention?), d?organiser la planification d?urgence et d?assurer une vigilance active. Encadré 15 : le NCCN (Centre de crise national) Le NCCN est en charge de la planification d?urgence, pour l?ensemble des risques, au niveau stratégique. Il n?a pas de rôle opérationnel : par exemple, la question du pompage en gestion de crise relève de la direction générale de la sécurité civile. A l?échelle locale, ce sont les bourgmestres qui sont en charge de la crise. Le NCCN fournit le contenu de la formation, d?une grosse demi-journée, mise en place pour les bourgmestres nouveaux. Nécessaire même s?ils ont des experts auprès d?eux, elle est prévue tous les 4 ans mais pas obligatoire. Le NCCN a des échanges en crise avec les gouverneurs via les experts et coordinateurs. Les remontées d?info au NCCN se font via les gouverneurs. Le niveau fédéral est facilitateur et coordonnateur mais n?a pas autorité sur les autres. Les bourgmestres ont accès à l?application SI en gestion de crise, avec des droits gérables pour avoir le cercle de travail efficace. La communication en crise repose sur un contrat cadre pour appeler les personnes en cas d?urgence ? il vaut pour les bourgmestres, gouverneurs NCCN. Le principe est que celui qui gère la crise communique ? les autres ne peuvent que renforcer ou décliner les informations principales. La cellule de communication du NCCN propose des messages et fait une veille des réseaux sociaux. C?est le NCCN qui évalue le besoin de mobilisation de moyens nationaux, toutes les remontées de demandes se font par écrit dans une application informatique, en cours de modernisation. L?assurance de moyens suffisants repose sur le fait que chacun en a et qu?il y a, en plus, un stock national. La crise covid a fait ressentir le besoin d?objectiver les ressources disponibles ; c?est un travail en cours, qui inclut les pompes. Il faut tenir compte du fait que des moyens existants ne sont pas nécessairement disponibles ou mobilisables, et qu?il faut réussir à mutualiser au bon niveau, pour n?être ni en manque, ni en sur capacité. En termes de mutualisation possible ou soutien entre états, les plus efficace serait des achats au niveau de l?UE. La planification en matière de sécurité civile incombe ainsi au premier chef au bourgmestre (maire d?une commune), qui doit disposer d?un Plan général d?urgence et d?intervention (PGUI) comprenant les directives générales de gestion des situations d?urgence de tout type. C?est le bourgmestre qui décide d?éventuelles évacuations. Il s?appuie sur des coordinateurs de situation d?urgence dont c?est le seul métier, quitte à le faire pour plusieurs communes. Toutefois, dès lors que la gestion d?un événement excède les pouvoirs et les moyens dont disposent les bourgmestres, c?est la province, qui intervient. Les provinces sont un pouvoir local, en général placé sous l?autorité des Régions. Par exemple, les inondations de novembre 2023 ont été gérées au niveau provincial et les inondations de l'été 2021 ont été gérées au niveau fédéral. Le secours aux personnes et la sécurité civile sont des compétences fédérales à peu près exclusives, dont l?organisation est déléguée aux pouvoirs locaux que sont les provinces et les communes. Ce principe de délégation dissocie donc la compétence fédérale des moyens fédéraux : les services de secours centraux de l?État fédéral (dit « moyens spéciaux » : unités spécialisées de la police et des pompiers, hélicoptères?) constituent une réserve à l?appui des services de secours locaux. Autrement dit, les services fédéraux peuvent être sollicités par les Régions ? ainsi que par les autorités communales et provinciales ? pour la mise en oeuvre de mesures particulières en PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 72/107 gestion des crises ou des situations d?urgence, ou pour l?établissement des plans d?urgence et d?intervention. Cette configuration implique que les aspects concrets de la gestion de crise et le besoin de planification qui en découlent, dépendent ? d?une façon particulièrement aiguë en Belgique ? de la bonne coordination opérationnelle entre les différents niveaux de pouvoir. En effet, la totalité des implications d?une catastrophe naturelle excède nécessairement les compétences exclusives de chacun. Encadré 16 : Prévision des inondations et alertes Les prévisions météorologiques sont réalisées par l?Institut royal de météorologie (organe fédéral) et l?analyse des paramètres hydrologiques incombe aux Régions. Ainsi, le service opérationnel de prévision des crues de Flanders Hydraulics (HIC - Centre d'information hydrologique) et de l'Agence flamande pour l'environnement utilisent une grande variété de données météorologiques en combinaison avec des modèles hydrologiques et hydrauliques 1D/2D pour fournir des prévisions de niveau d'eau et de débit sur les voies navigables et non navigables catégorie 1) flamandes et le long de la côte belge. Des experts interprètent quotidiennement la situation et communiquent des messages sur waterinfo.be. En cas de crise, ces messages sont activement diffusés pour la gestion de crise et les services d'urgence. Waterinfo.be intègre actuellement 2162 stations de mesure qui fournissent des données en temps réel (ou presque) avec des séries chronologiques à haute résolution le long des voies navigables flamandes, les cours d?eau non navigables de catégorie 1 et de la côte. Des stations supplémentaires des régions environnantes (région wallonne en Belgique, France, Pays-Bas) sont disponibles pour la gestion opérationnelle des crises en cas d'inondations. Lorsque la vitesse et la direction du vent, en particulier pendant la marée de printemps, conduisent à des marées de tempête élevées le long de la côte belge ou dans l'estuaire de l'Escaut, ceci est communiqué sur waterinfo.be par les experts de Flanders Hydraulics qui font les interprétations basées sur les différentes sorties de modèles. Le plan d'urgence à appliquer le long de la région côtière peut être consulté sur waterinfo.be. En Wallonie, la prévision des crues est réalisée par le SPW, Service public de Wallonie, impliquant deux entités internes : - Service public de Wallonie Mobilité et Infrastructures, Direction de la Gestion hydrologique (prévision des crues) - Centre Régional de Crise (prévention et coordination internes en temps de crise, accompagnement des services). La prévision des crues est obligation légale, mais la transmission des infos n'est pas codifiée. Les alertes sont transmises aux services eau et voies navigables, sur site web grand public, et la CRC régional communique aux autorités en charge de crises et urgence. Annexe 4.2.3 Un système assuranciel présenté comme fragile En matière d?assurance, la Belgique compte parmi les pays ayant mis en place un dispositif privé de garanties contre les catastrophes naturelles le cadre des polices d?assurance incendie, ce qui permet en principe au plus grand nombre d?accéder à cette protection. Toutefois, il ressort des échanges que ce dispositif d?assurance privé, combiné aux fonds de calamités publiques mis en place par les régions, est plafonné (350 M¤ par catastrophe) et a montré ses limites lors des inondations de juillet 2021. Le coût des dommages a été évalué à près de 2,5 Md¤, très au-delà des plafonds d?intervention. L?ensemble des dommages est estimé à environ 1% du produit intérieur brut national48. Dans ce contexte, un dispositif ad hoc a été mis en place au seul niveau régional afin d?indemniser les victimes (les assureurs belges ont prêté 1 Md ¤ à la Wallonie à taux zéro, sur une durée de huit ans) et une réflexion plus générale a été engagée afin de réformer le système d?assurance privé et celui des fonds de calamités. Cela concerne également les biens professionnels et les surfaces agricoles et intègre un objectif de mieux évaluer le coût des inondations. Sur ce terrain, la Flandre ? Flanders Hydraulic Research en coopération avec l?Université de Gand (département de géographie) - a développé, dès les années 2000, une méthode originale 48 L?Union européenne a pris en compte un montant de 5,56 Md pour l?ensemble des événements de juillet 2021. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 73/107 d?évaluation des conséquences des inondations, sur la base d?un modèle (LATIS) s?appuyant sur un système d?informations géographiques et des modèles hydrologiques ainsi que des données socio-économiques et d?usage du foncier. Le but affiché est de chercher à minimiser les conséquences des inondations plutôt que de chercher à les prévenir. En dépit de ces démarches, les assureurs estiment que la prise en compte des risques climatiques est fortement problématique en Belgique, notamment du fait de la régionalisation des compétences. Ils plaident pour un nouveau système, a minima fédéralisé, sinon européanisé. Encadré 17 : l?assurance des agriculteurs en Flandres Depuis 2019, une réforme de l?assurance49 articule l?assurance que les agriculteurs doivent désormais souscrire sur le marché et le soutien du gouvernement. En pratique, chaque agriculteur doit souscrire à une assurance in- tempéries globale dans le secteur agricole ? la grêle par exemple, en choisissant sur quelles parcelles. Le gouver- nement apporte une aide à hauteur de 65% du coût de l?assurance. A partir de 2023, si les agriculteurs souhaitent étendre leur champ de couverture, l?aide est inférieure, de l?ordre de 30 à 45% selon les budgets. Le gouvernement intervient en cas de catastrophe naturelle en complément des assurances (au-delà d?une occurrence trentennale), seulement pour les agriculteurs assurés. De leur côté, les agriculteurs doivent s?inscrire dans une démarche de prévention, avec des bénéfices pour leurs cultures (par exemple, protéger les vergers), mais aussi plus larges : limiter l?érosion (haies), ce qui est un bénéfice pour eux et pour les villages voisins. Se posent aussi des questions de la place laissée à l?eau le long de certains fleuves (Yser). Annexe 4.2.4 Le choc des inondations de juillet 2021 La répartition fragmentée des compétences est parfois redoublée par un effet de concurrence entre les différents niveaux de pouvoir. Cela peut conduire à un défaut de coordination ou à des retards dans la prise de décision, comme le pointe assez sévèrement la commission fédérale chargée de tirer les leçons des grandes inondations de l?été 2021. Son rapport prend par exemple appui sur la dissociation entre la prévision météorologique qui est réalisée par l?Institut royal de météorologie (organe fédéral) et l?analyse des paramètres hydrologiques, qui incombe aux Régions. En 2021, cette configuration a gêné la transmission d?une information complète sur le risque de crue aux autorités locales. Une fois les alertes données, les mesures à prendre doivent être concertées entre les autorités régionales et locales, voire fédérales, ce qui prend un temps non négligeable en situation de crise. Les inondations de 2021 ont constitué un facteur de choc à l?échelle du pays en matière de plani- fication et de gestion d?événements climatiques de grande ampleur. Si la concertation qui dérive du fédéralisme rend le dispositif potentiellement difficile à appréhender ? y compris pour les acteurs eux-mêmes, avec l?allongement des délais de décision qui peut en résulter ? la structure de la réponse des autorités a fait l?objet de plusieurs réévaluations depuis 2021-2022, notamment du fait du NCCN. De leur côté, les autorités régionales ont révisé leurs plans d?urgence, tandis que les communes se sont davantage investies dans la rédaction de leurs propres plans. La culture du risque, dont le défaut a souvent été dénoncé, tend ainsi à se développer dans un environnement institutionnel particulièrement complexe (voir infra). Annexe 4.3. Les Flandres : une structuration par grand bassin, en cours d?inflexion En Flandres, le pilotage de la prévention des inondations implique plusieurs ministères : infrastructures, environnement, agriculture, et agence de l?environnement des Flandres. Environ 49 19 Juin 2019. - Arrêté du Gouvernement flamand relatif à la subvention de prime pour une assurance intempéries globale dans le secteur agricole PUBLIÉ https://www.ejustice.just.fgov.be/eli/arrete/2019/06/19/2019030606/justel https://www.ejustice.just.fgov.be/eli/arrete/2019/06/19/2019030606/justel Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 74/107 80 000 foyers flamands ont une probabilité moyenne à élevée d'être inondés ; l'urbanisation et le changement climatique augmentent les risques. La réponse apportée passe par une approche « multicouche » de gestion du risque d?inondation. Il est nécessaire de mobiliser une combinaison de mesures pour faire face aux inondations critiques, dans une logique de responsabilité partagée entre les gestionnaires de l'eau, les planificateurs de l'espace, les services de crise et d'urgence et les citoyens. Les 3 « P » sont : Protection : protéger contre les inondations. Il s?agit d? éviter autant que possible les inondations dans les zones vulnérables au moyen de digues, déversoirs, bassins d'inondation et stations de pompage, ou encore en étant attentif à l?infiltration de l?eau. Prévention : éviter ou réduire les dommages Cet axe comporte les mesures visant à réduire notre vulnérabilité aux inondations, comme le fait d?éviter des constructions dans les zones inondables ou y permettre des constructions adaptées Préparation : être prêt en cas d'inondation. Cela couvre les actions nécessaires pour ne pas être pris par surprise par les inondations et pouvoir agir afin d'éviter que la situation ne s'aggrave ; informer et prévenir, afin que les gestionnaires de l'eau (y compris au niveau local), les services d'urgence et les citoyens puissent prendre des mesures en temps utile et éviter de nombreux dégâts et malheurs. Annexe 4.3.1 L?équilibre entre protection et aménagement du territoire - Actions de protection : les équipements et infrastructures - La lutte contre les inondations en Flandre est d plus en plus appuyée sur la recherche de solutions pour redonner de l'espace à la rivière. Cela peut se faire en élargissant le lit d'hiver naturel ou en créant des zones d'inondation contrôlée ou des bassins d'attente. La conception de ces zones est envisagée en fonction de la configuration de chaque bassin. Il peut s'agir de zones entièrement naturelles, et dans ce cas les agriculteurs présents se voient attribuer d'autres parcelles de terre à cultiver, ou elles peuvent être utilisées à d'autres fins agricoles de sorte qu'il n'y ait pratiquement pas de dégâts en cas d'inondation (surtout en hiver). - Le niveau de protection des digues est déterminé par zone en fonction du risque. C'est l'autorité compétente en matière d'eau qui en fixe le niveau. Le gestionnaire de l'eau est également responsable de la construction, de l'entretien et de l'inspection des digues. Les inspections structurées des digues ont lieu tous les 1 à 3 ans en fonction du risque. A cela s'ajoutent bien sûr les contrôles visuels effectués. Pour le renforcement des digues en crise, les autorités font appel à un fournisseur privé, dans le cadre de contrats qui permettent une intervention dans la journée/ - Les autorités chargées de l'eau sont responsables de l'entretien des canaux, y compris du désensablement et du dragage. La répartition des compétences diffère pour les cours d?eau navigables et non navigables. Pour les premiers, les responsables sont Vlaamse Waterweg (Voies navigables), le Département de la Mobilité et des Travaux publics, et l?Agence des services maritimes et de la côte. Pour les cours d?eau non navigables, ceux qui entrent dans la catégorie 1 relèvent de VMM (Agence Flamande de l?Environnement), de la catégorie 2 des provinces, et la catégorie 3, des municipalités. Les exploitants de cours d'eau prennent en charge le coût des infrastructures construites le long des cours d'eau (zones inondables contrôlées, digues de protection, bassins d'attente, stations de pompage, ...). Pour les cours d'eau non navigables, il existe encore aujourd'hui de nombreux gestionnaires différents. Ce nombre a été fortement réduit depuis 2014. A partir de cette date, les communes pouvaient transférer la gestion des cours d'eau aux provinces, et de très nombreuses communes ont choisi de le faire (sur 300 communes en Flandres, seule 50 sont encore gestionnaires de cours d'eau). Il reste cependant 56 polders et wateringues, 5 provinces et la VMM en tant que gestionnaire de cours d'eau en Flandres. Lors de son entrée en fonction en 2019, le gouvernement flamand a décidé de réformer la gestion des cours d'eau non navigables. Une note PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 75/107 conceptuelle à ce sujet a été approuvée par le gouvernement flamand en juillet 2023. À l'avenir, la gestion des cours d'eau non navigables sera assurée par des conseils de l'eau (12 au maximum) soutenus par un syndicat des conseils de l'eau. Quand VMM fait l?entretien des grands cours d?eau non navigables, cela recouvre le fauchage et le curage, prévu environ tous les 10 ans, dans le cadre d?un plan d?ensemble. Il s?agit de curer aux seuls endroits où des accumulations augmenteraient le risque inondation (au niveau de ruptures de pente, par exemple). Concernant les sections de Wateringues, elles sont en charge de l?entretien des fossés et reçoivent une subvention des provinces. La taxe qu?elles lèvent rapporte un faible pourcentage des coûts et la question est posée de la supprimer. Les sections doivent gérer l?eau de sorte que le niveau d?eau ne soit pas à son maximum quand une crue arrive et que chaque section contribue au tamponnage. Ainsi, dans la Flandre occidentale, se pose la question d?une évolution du système des Wateringues. C?est une volonté forte dans l?accord de coalition du gouvernement flamand engagée il y a cinq ans que de faire évoluer ce système, sous le terme « réformer pour plus d?efficacité ». Il s?agit de trouver un équilibre entre ce système de gestion locale et pragmatique des fossés par les agriculteurs, appuyé sur des redevances pas toujours bien comprises par les riverains qui ne sont pas agriculteurs, et une meilleure coordination de la gestion de l?eau des polders à une échelle plus large. Les pistes évoquées sont de mettre en place une structure plus grande en gardant les chefs de sections dans la gouvernance, dans un dispositif permettant plus de coopération et une communication fluide entre zones. Le traitement des sédiments évacués lors du curage des fossés et canaux est fait conformément à la directive européenne : le niveau de pollution des sédiments est vérifié par le service environnemental avant l?épandage. Les sujets qui peuvent créer des tensions sont l?accès aux propriétés pour curer et pour épandre. Cela relève des agriculteurs ou des collectivités, qui passent alors des contrats d?entretien. - Dans les zones de polders ou aux endroits où le drainage par gravité des cours d'eau n'est (temporairement) pas possible, des systèmes de pompage ont été installés ; la responsabilité de ces systèmes de pompage incombe au gestionnaire de l'eau. Concernant le pompage en crise, c?est la collectivité qui mobilise les pompes qui est en charge du coût, avec un soutien du niveau supérieur à partir d?un certain montant. Pour la crue de novembre dernier, c?est l?état fédéral qui va prendre en charge la facture. A Niewport, une grande capacité de pompage a été ajoutée car l?écoulement gravitaire n?était possible que 2 h sur 12. Le dispositif a été « inventé » en direct, l?espace disponible à l?embouchure était entièrement utilisé. La question va se poser de renforcer la capacité fixe, mais nos interlocuteurs soulignent que l?évacuation à la mer n?est pas si simple ; une mauvaise gestion peut se traduire par des sur- inondations en amont. Les pluies seront plus fréquentes, plus fortes, les modèles de prévision sont dépassés. On aura de toutes façons à faire face à une plus grande incertitude. Une réponse à cette nouvelle situation est l?approche « multicouches » : il faut pouvoir activer différents leviers selon le type de crue. Cela suppose une très bonne coordination. En crise en particulier, cette coordination est essentielle : elle relève du gouverneur qui peut prendre des sanctions en cas de non-respect de consignes. - Actions de prévention : enjeux d?aménagement du territoire Les Flandres sont très denses, avec un aménagement du territoire historique marqué par la possibilité de construire des quartiers au bord de l?eau, ce jusqu?en 2010. Un enjeu maintenant est d?éviter de construire dans les zones à risques. Une cartographie vient d?être établie, sur la base de travaux commencés après les crues de 2010, qui identifie les zones exposées à des inondations centennales, avec et sans changement PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 76/107 climatique. Un processus est engagé pour changer de destination les terrains regardés comme dangereux. Après une enquête publique en 2023, ce travail donnera lieu une deuxième consultation, puis une troisième approbation sera nécessaire pour un aboutissement prévu sous un an à un an et demi. Les cartographies sont déjà publiques, mais de portée purement informative. En Flandre, les permis de construire sont décentralisés ; l?autorité locale peut ne pas suivre les recommandations du niveau régional, qui peut faire un recours. Cela arrive peu. Tout permis de construire donne lieu à « évaluation aquatique », qui tient compte, par exemple, des quantités d?évacuations à prévoir en cas d?inondation (cela peut conduire à accepter une maison sur un terrain exposé, mais pas un immeuble). L?évaluation aquatique repose sur une instruction par les services du gouvernement sur les effets néfastes sur le système d'eau qui peuvent être causés, par exemple, par la construction d'une maison ou d'un projet d'infrastructure. Les plans susceptibles d'avoir un impact sur le réseau hydrographique, tels que les plans d'aménagement du territoire, sont également soumis à l?évaluation aquatique. Dans certaines situations, le gouvernement doit demander l'avis du gestionnaire de l'eau concerné lorsqu'il procède à l'évaluation aquatique. Le gestionnaire de l'eau peut faire des recommandations pour ajuster les activités planifiées afin d'éviter, de limiter, de restaurer ou de compenser les dommages attendus sur le réseau d'eau. Le résultat de l'évaluation aquatique est inclus en tant que « paragraphe sur l'eau » dans le permis ou dans l'approbation du plan ou du programme. Il y a ainsi un devoir d?information, appuyé sur un système de score sur la base d?une approche modélisée, pour chaque parcelle dans une zone inondable -fluviale, liée aux pluies ou par submersion marine) (P-score) et bâtiment de (G-score) ? de A à D selon le niveau de risque (A : pas de risque de crue modélisée, B : faible probabilité d?inondation sous l?effet du changement climatique, C : faible risque d?inondation sous le climat actuel et D : probabilité moyenne sous le climat actuel). Ce devoir d'information a été introduit dans le décret intégral sur la politique de l'eau en 2013. En 2016, l'obligation d'information a été évaluée. Le 1er janvier 2023, un devoir d'information modifié est entré en vigueur. Lors de la vente ou de la location d'un bien immobilier, l'acheteur ou le locataire doit savoir si le bien est situé dans une zone inondable. Côté agriculture, un enjeu est d?encourager une agriculture plus durable, moins exposée aux risques de sécheresse et d?inondation, ce dans le cadre de la PAC, par exemple en améliorant le rôle de rétention des eaux des sols. Une ambition forte est que les agriculteurs ne soient pas seulement dans une logique productiviste mais également convaincus de ces enjeux de durabilité. - Une structuration de ces piliers par grands cours d?eau Le « plan Sigma50 », un plan intégré de protection contre les inondations, a été mis en place pour la première fois en 1977, en réaction à une inondation majeure causée par une onde de tempête en 1976 sur le bassin transfrontalier France, Belgique, Pays-Bas de l?Escaut. Le fleuve ne fait que 350 km, mais coule dans un bassin très dense. Le plus grand danger est lié à une onde de tempête qui se poursuivrait dans les terres, avec un risque de rupture de digues, comme en 1953 et 1966 où des villages entiers ont été inondés. Ce plan vise à protéger environ 20000 hectares de terres en Belgique, le long de l'Escaut et de ses affluents tels que le Rupel, la Nete et la Durme. Il met en place des protections contre les submersions marines et les inondations fluviales causées par des précipitations très fortes, en identifiant quatre zones avec des niveaux de protection différents. Il combine des mesures d'infrastructure "grises", principalement des digues, et des mesures "vertes" sous la forme d'un réseau de zones inondables contrôlées, dont la mise en place fait l?objet de nombreuses discussions avec le secteur agricole. Un plan Sigma actualisé a été approuvé en 2005 qui visait à mieux protéger l?Escaut et ses affluents par la mise en place de « zones temporairement inondables » et de digues. Le Sigma a aussi travaillé à la restauration des rivières et à l?économie locale. Le projet a aidé également à réaliser les objectifs écologiques (Natura 2000). 50 S de Sigma comme le début du nom de l?Escaut en Flamand, Schelde PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 77/107 A l?horizon 2030, il représente 1,3 Md d?euros. Un cadre législatif est nécessaire pour garantir une approche pluriannuelle de ces travaux. Il s?agit d?intégrer le changement climatique, et en particulier l'élévation du niveau de la mer qui accroît le risque d?inondation. Dans la version actuelle, l'élévation du niveau de la mer a été prise en compte dans un scénario moyen. Sur cette base, le plan contient des mesures et des projets dont la réalisation s'étend jusqu'en 2030, suite à une évaluation des coûts-avantages sociaux. Une amélioration du Plan Sigma - un Plan Sigma+ ou un Plan Sigma 3.0 - devrait également prendre en compte le scénario climatique plus extrême à fort impact jusqu'en 2100, avec, en plus de l'élévation du niveau de la mer, l'augmentation de la probabilité d'écoulements supérieurs extrêmes et la coexistence de ces eaux d'amont et d'une onde de tempête. Jusqu'en 2030, le plan actuel doit être mis en oeuvre sans délai, et, par la suite, complété par des mesures additionnelles. Le plan est approuvé par le gouvernement flamand dans ses principes généraux, mais pour le reste, donne lieu à des déclinaisons locales, où le travail est fait en cherchant les collaborations avec les agriculteurs et les associations. Il ressort des échanges une bonne coopération avec les agriculteurs sur le plan Sigma, mais, « dans les relations à proximité des fleuves, pour regagner des zones d?expansion des crues ce n?est pas toujours facile ». La nouvelle étape de prise en compte du changement climatique, par une étude, n?en est qu?à ses débuts. La Dendre, affluent de l?Escaut, qui connait aussi des problèmes d?inondation, est encore en phase de planification. Il s?agit d?élaborer un plan stratégique « espace pour l?eau » pour réduire le risque d?inondation en améliorant la qualité de vie. Ce travail se fait en recherchant une forte participation des autorités locales et habitants, en vue d?une approbation du gouvernement flamand au printemps. Dans le cadre de ces travaux, deux scénarios ont été élaboré et évalués sous l?angle de leurs avantages et limites et soumis à concertation : celui « de la vallée inondable » ou celui d?«expansion des inondations en amont ». C?est le premier, dans une approche naturelle de place laissée au fleuve, avec une action au plus près pour chacun, qui est préférée. Concernant la Meuse, dont le débit peut varier de 10 à 3000 m 3/s et plus, elle coule en Flandre le long d?anciens sites miniers de niveau très bas. Les deux inondations majeures de 1993 et 1995 ont inondé des villages entiers. Dans la suite, les digues ont été surélevées et renforcées, mais le principe de laisser une plus grande place pour le fleuve apparait désormais comme préférable, quitte à supprimer quelques maisons situées dans le lit mineur. Ce travail prend des années. Les digues sont maintenues là où l?élargissement n?est pas possible. Concernant enfin l?Yser, la coopération autour de l?eau est renforcée avec la mobilisation d?une commission de la coordination intégrée de l?eau, et le projet de maitrise de l?Yser dans une approche intégrée quantité- qualité. Le territoire est pour partie inférieur au niveau de la mer et le changement climatique va fragiliser la zone ; la population est peu dense, sauf près de la côte : ce sont surtout des prairies dans les parties basses et des terres agricoles. L?eau potable dépend des eaux de surface, et notamment du réservoir de Blanckaert. Les relations avec les agriculteurs sont un enjeu majeur, dans ce bassin où le projet est de créer des déversoirs sur la rive gauche du fleuve pour compléter la Zone d?expansion des crues (ZEC) de Blanckaert, créée après les crues de 1993-95 (et qui représente un stockage en crue de 450 M m3). Un décret est en préparation pour que les objectifs soient ancrés au niveau flamand. Il s?agit de définir des mesures concrètes à l?horizon 2024 ou 25, afin de les avoir mises en oeuvre un an après entrée en vigueur du décret, dans une logique « top down » vers les bassins. Une plate-forme permet des échanges de connaissances, qui est aussi un outil de concertation. Cet hiver, cette zone a été inondée pendant plusieurs semaines, jusqu?à plusieurs mètres d?eau au plus profond. Il n?y a pas de compensation financière des agriculteurs mise en oeuvre, la prise en charge dépend des assurances. Le bassin de l?Yser est engagé dans un projet Interreg avec l?USAN notamment pour partager la vigilance. Annexe 4.3.2 L?adoption de nouveaux grands plans structurants PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 78/107 - Le Bluedeal est un grand plan adopté après la sécheresse de 2018-20 et consacrée en premier lieu à cet enjeu. Il comporte deux axes : - réduire les consommations d?eau, progresser dans les réutilisations ; - mieux conserver et gérer l?eau, dans une logique trame verte et bleue. Ce programme était prévu à hauteur de 60 à 70 millions d?euros et a été porté à 500 millions d?euros après la crise Covid, dans le cadre des fonds de relance européens. - Après les crues en Wallonie, qualifiées de « bombe d?eau », le gouvernement flamand a demandé à un groupe d?experts de rédiger un avis sur la prévention des inondations. Il s?agissait de revoir la prévention en Flandre sur la base d?un scénario de même type que la « Water Bomb » sur la région, en identifiant également les budgets requis. En effet, il a été estimé que le coût d?une catastrophe de même type serait de 8 Md d?euros. Ce travail s?est engagé en décembre 2021, sous le pilotage de Henk Ovink, professeur néerlandais de renommée internationale, notamment pour son travail à l?ONU. Le choix de cette personnalité se justifiait pour éviter une forme de concurrence entre universités belges, pour mobiliser l?intérêt des Pays-Bas, concernés par la Meuse, pour cette ré- flexion, et bénéficier d?un regard neutre sur la situation. La démarche était pluridisciplinaire. C?es t le Weerbaar Waterland, qui a donné lieu à l?avis Resilient Waterland de mars 2023. Il comporte dix recommandations suivantes qui mettent en avant une approche stratégique, partenariale et intégrée, inscrite dans la durée et impliquant tous les acteurs, informés et responsabilisés : 1. Objectifs aquatiques clairs, intégrés et assortis de tâches à accomplir Depuis des objectifs divers et vagues en matière de quantité d?eau vers des objectifs intégrés dans le domaine de l?eau 2. Programmes d?action intégrés et adaptatifs par sous-bassin Depuis un ensemble réactif d?actions sectorielles déconnectées vers des tâches orientées vers la mise en oeuvre au niveau des sous-bassins 3. L?eau, le sol et le climat au service d?une nouvelle sécurité juridique Depuis un avis sur l?eau sans engagement et une mise en oeuvre incertaine vers un cadre spatial et d?exécution solide et juridiquement sûr 4. Triple mandat, depuis la régie jusqu?à l?exécution D?une exécution dépendante du volontariat et retardée par la fragmentation des pouvoirs vers une régie claire 5. Quatre chantiers flamands de l?eau Depuis un fonctionnement sur la base de projets vers une approche intersectorielle permanente axée sur l?exécution 6. Fonds de sécurité de l?eau ancré Depuis des budgets de projets annuels vers une approche systémique sur plusieurs législatures 7. Préparation des personnes et des infrastructures Depuis l?ignorance relative vers l?autonomie accrue 8. Revirement culturel Depuis le risque individuel vers le gain sociétal 9. Programme flamand pour la Connaissance et l?Innovation Depuis le développement scientifique sectoriel vers l?innovation transdisciplinaire et fondée sur la pratique 10. Approche et collaboration transfrontalières Depuis une région réactive en aval vers un précurseur en matière de protection contre les crues en Europe Les interlocuteurs de la mission mettent l?accent sur les points suivants : - développer des objectifs clairs en matière d'eau au niveau flamand d'ici 2023-2024 : identifier les zones de la Flandre où les risques actuels ou futurs sont trop élevés (tant pour la sécheresse que pour les inondations). - Dès le départ, exploiter les possibilités de liaison pour améliorer la qualité de l'eau et l'érosion et calculer les futurs dommages socio-économiques et écologiques qui en découlent. - Lors de l'élaboration des objectifs, tenir compte de l'impact élevé de la sécheresse et de l'érosion, PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 79/107 tenir compte au maximum du scénario climatique à fort impact jusqu'en 2100< ; - Dans les suites des inondations de novembre 2023, la Task Force « Westhoek résilient », à la demande du Gouvernement flamand, a formulé, à l?issue de trois réunions, un avis étayé pour améliorer la « sécurité de l?eau » dans le Westhoek, et plus particulièrement dans le bassin de l?Yser. Il s?agissait de tenir compte du caractère spécifique du territoire, mais aussi de faire le lien avec le cadre politique « Waterland résilient », qui préconise une approche axée sur la source du problème ainsi que des opportunités gagnant-gagnant pour la gestion des sécheresses. D'autres cadres tels que le Blue Deal et le Plan flamand d'adaptation au climat ont également été pris en compte. À partir du cadre général, une réflexion a été menée à court et à plus long terme. Le Weerbare Westhoek du 22 décembre 2023 prévoit des budgets importants en 2024 (54 M) et 25 (26 M), avec des travaux sur les pompes, les canaux ? Chaque année, 120 M sont destinés aux voies navigables. Pour le court terme quelque 70 mesures sont proposées. Il s'agit de mesures dites « sans regret », c'est-à-dire efficaces et efficientes sous chacun des scénarios climatiques et qui ne viennent pas au détriment d'autres enjeux cruciaux dans la région : mesures de terrain (la rétention d'eau en amont, le tamponnement dans et le long des cours d?eau, l?évacuation vers la mer ainsi que des mesures de protection) mais aussi de mesures politiques et règlementaires, de recherche et de surveillance, de communication et de sensibilisation. Des propositions sont également faites pour éliminer autant que possible les points de friction dans une logique de facilitation ou de simplifica- tion. Toutes les mesures sont conçues de manière à évacuer l'eau excédentaire uniquement lorsque cela est nécessaire pour prévenir des inondations. Elles contribuent ainsi à garantir la disponibilité de l'eau en cas de sécheresse prolongée. Les mesures à court terme suivantes sont prioritaires : - tamponnement des eaux en amont et évacuation retardée ; - création et aménagement de nouvelles zones d?expansion des crues (ZEC) ; - protection des infrastructures critiques (par exemple les centres des villages, les industries, l'ap- provisionnement en électricité, etc.) grâce à la construction de digues locales, par exemple à Roesbrugge et Stavele. - Amélioration de l'entretien structurel de l?ensemble des cours d'eau ; - gestion dynamique des niveaux d?eau ; - optimisation de la capacité d?évacuation, par exemple via le canal de Lo et l?Yser, de Dixmude à Nieuport ; - évacuation suffisante vers la mer à différents endroits, par gravitation mais aussi de manière indépendante des marées ; - démarrage d?un processus d'élaboration du plan « De l?espace pour l?eau ? Vallée de l?Yser » ; - renforcement de la coopération transfrontalière. Des points d?attention sont identifiés : - la conception des mesures à réaliser sur le terrain fait l?objet d?une concertation avec les acteurs locaux, les propriétaires et les utilisateurs des terrains ; - pour la création et l?aménagement de nouvelles zones d?expansion des crues (ZEC), dans la mesure où leur fonctionnement a un effet, une politique d'accompagnement agricole est recom- mandé ; - pour l'approche à plus long terme, la Task Force recommande l?élaboration d?un programme plu- riannuel intégré et orienté vers l'action, garantissant qu?à l?avenir éga lement, et en tenant compte des scénarios climatiques, le Westhoek reste suffisamment résilient face à la fréquence et à l'inten- sité croissantes des conditions météorologiques extrêmes. Il sera possible ainsi de continuer à travailler de manière structurelle et intégrée sur la sécurité de l?eau dans le bassin de l?Yser. Les actions à entreprendre sont les suivantes : - Identifier les risques et les points problématiques et déterminer un risque d'inondation acceptable. - Fixer des objectifs stratégiques et opérationnels pour que les risques soient ou restent sociale- ment acceptables. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 80/107 -. Elaborer et mettre en oeuvre un programme d'actions intégré, de concert avec les acteurs locaux et les parties prenantes. Les nombreux projets et initiatives existants ne seront pas perdus de vue et seront poursuivis et renforcés dans la mesure du possible. La coopération transfrontalière avec la France devra également être poursuivie et renforcée. Enfin, la Task Force a également formulé un avis sur la gouvernance ou la nécessité d'une struc- ture claire pour assurer le suivi d'un tel programme pluriannuel intégré. Elle préconise une ap- proche systémique qui surveille l'intégralité et qui dispose d?une capacité d?action suffisante pour pouvoir efficacement mettre en oeuvre le programme pluriannuel. L?avis recommande aussi d'utili- ser autant que possible les structures déjà existantes aux différents niveaux (flamand - bassin - région), qui fonctionnent bien. La Task Force mise en place - dans sa composition actuelle ? devrait être pérennisée afin de pouvoir assurer la surveillance et le suivi de la mise en oeuvre des actions. La structure actuelle du bassin peut également être maintenue, car elle dispose déjà d'une large représentation locale et d'une approche multidisciplinaire. Il est également recommandé de développer plus avant, sur l?ensemble du bassin, le fonctionne- ment des coalitions territoriales locales accompagnées. Annexe 4.4. La Wallonie : le choc des inondations de juillet 2021 Annexe 4.4.1 Quelques éléments sur le cadre général de la prévention des inondations La gestion de l?eau est une compétence régionale depuis les années 1980, menée dans le cadre des directives européennes. La gestion des cours d?eau dépend de leur classement : elle est faite par les riverains pour les 12807 km de cours non classés, par les communes pour les cours d?eau de 3ème catégorie (4518 km), les provinces pour ceux d 2ème catégorie 5820 km) et les régions pour ceux de 1ère catégorie (1875km) et pour les navigables (873km). Un plan « pluie » a été mené en 2003, et la cartographie des aléas inondation a été entreprise en 2007. Le curage des cours d?eau revient entre 50 à 150 euros par m3 selon le niveau de pollution. Concernant les voies navigables, les sédiments curés sont traités comme des déchets. Pour les cours d?eau non navigables, il est possible de les laisser sur les 6 m à proximité, sinon il faut les évacuer. Les laisser dans le cours d?eau est regardé comme préférable, quitte à recreuser un chenal, cela limite les risques d?érosion des berges. Un décret a fixé quatre enjeux pour les cours d?eau naturels : inondation, socio culturel, économique, biodiversité. Les cours d?eau sont sectorisés par enjeux dominants, en évitant le curage Une étude sur les besoins de la Wallonie en eau a été lancée (avec notamment un axe sur le refroidissement de l?eau, ou la récupération des eaux usées). Les besoins des secteurs économiques sont de 50000 m3/j. 75% sont évaporés. Pour autant, dans les échanges, il est estimé qu?un stockage supplémentaire, pour garder des eux en période de crue, serait une réponse pour ainsi dire sans impact sur les besoins de l?industrie (une piscine toutes les secondes pour une giga-factory) et également de faible impact pour limiter les effets d?une inondation. Annexe 4.4.2 Mise en place d?un dispositif spécifique de reconstruction Les inondations du 14 juillet 2021 ont fait 41 victimes. Il y a eu 45000 maisons sinistrées, 100000 personnes concernées impactés, plus de 5,2 Md de dommages. Quatre fleuves ont débordé en même temps. « C?était il a presque trois ans et on en sort à peine ». Un Commissariat spécial à la reconstruction a été mis en place dès le 26 juillet 2021. Cette PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 81/107 équipe pluridisciplinaire a été mobilisée pendant un anl pour répondre de manière pragmatique aux besoins du territoire sinistré Le travail de reconstruction a été engagé sur les 3 grands bassins versants belges, à l?échelle des15 sous bassins concernés. Les montants pour la reconstruction, de 150 millions d?euros en 2021, ont permis de faire des acquisitions et de la renaturation, en particulier dans la vallée de la Vesdre, la plus touchée, qui a subi la plus grande part des décès en Belgique. Il s?agissait d?avoir des réflexions sur des aménagements adaptés à la situation, qui peuvent conduire à ne pas (re) construire à en endroit, mais, autant que possible sans interdire, même si la possibilité de le faire existe. La Commissariat spécial à la reconstruction n?est pas une autorité mais un ensemblier. C?est une cellule placée auprès de gouvernement, ce qui lui donne du poids. Les termes du bilan pour présenter le travail réalisé sont les suivants : « Le 26 juillet 2021, afin de coordonner la réponse régionale à la reconstruction, le Gouvernement wallon (ci-après GW) a décidé de créer le Commissariat spécial à la Reconstruction (CSR) pour une durée d?un an éventuellement renouvelable. La mission qui a été dévolue au CSR était triple : - coordonner et faciliter l'élaboration et la prise de décision du GW, ainsi que la mise en oeuvre et le suivi des actions dans la gestion des urgences, de la prévention et de la reconstruction ; - formuler, en collaboration et en concertation avec les services compétents, des propositions en vue d'assurer un plan de reconstruction dans les communes concernées ; - veiller à la mise en oeuvre des décisions du GW. Deux Commissaires spéciales ont été désignées le 26 juillet 2021, l ?une en charge des autorités locales (Catherine Delcourt) et l?autre en charge des autorités régionales (Sylvie Marique). Une équipe s'est progressivement mise en place pour assurer la gestion opérationnelle du CSR. En août 2021, seuls 3 agents avaient déjà pu être engagés. Cet effectif était totalement insuffisant pour faire face à l?ampleur des besoins. Au total, une 50aine d?agents du SPW (SG et IWEPS, essentiellement) ont prêté main forte au CSR, en attendant les engagements complémentaires. La diversité des profils a permis d?apporter des réponses efficaces aux différentes problématiques. Le CSR s?est organisé avec un SPOC par partie prenante régionale. Jusqu?au bout, les effectifs se sont avérés bien nécessaires pour mener à bien les différentes missions du CSR. » 51. Un enjeu fort a été la gestion de la temporalité entre l?urgence (aide à la réparation, avec un soutien public pour ce qui n?était pas couvert par les assurances) après crise et la reconstruction résiliente. - Il a fallu un an à un an et demi pour identifier ce qu?il fallait acquérir et rassembler le budget requis. Les crues de 2021 ont été fortement dévastatrices, il reste, en 2023, des habitations à exproprier. La modélisation sous-jacente ne sera à jour que dans trois mois. La première démolition a eu lieu mi-janvier. - Une priorisation a été nécessaire pour cibler l?action sur les neuf communes les plus touchées ? y compris dans les centres historiques ; - l?élaboration d?un schéma multidisciplinaire sur tout le bassin de la Vesdre a été établi, avec l?université de Liège et un studio spécialisé ; - deux guides de bonne pratique sur la constructibilité en zone inondable et sur la gestion durable des eaux fluviale ont été rédigés. Les cartes de l?aléa inondation n?ont pas été réactualisées au regard de cet événement exceptionnel, mais elles le seront en 2025 dans le cadre de la directive inondation. Une circulaire ministérielle donne un cadre pour instruire les permis en zone inondable ; - Un appui urbanistique, mis en place par la région, pour les communes les plus touchées, a été organisé pendant cinq mois. Ce marché n?a pas été opérationnel tout de suite car le premier n?a donné lieu à aucune réponse. Des moyens sont mobilisés pour des acquisitions de bien à démolir. Les discussions sont difficiles avec la population, parfois des réparations temporaires ont été faites. 51 Source Commissariat spécial à la reconstruction, juillet 2022 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 82/107 Il y a eu un travail également sur les facteurs aggravants (bâti à enlever car accroit le risque d?inondation). Le Commissariat a été mobilisé pour de nombreux échanges avec les personnes avec qui il faut trouver un accord. L?approche a été pragmatique : il s?agissait, selon les termes des personnes rencontrées, de réfléchir avant de reconstruire, sans empêcher les mesures immédiates qui donnent du « confort ». Le premier état des bâtiments a demandé une forte mobilisation, avec tous les agents disponibles, afin de le mener en quinze jours. La nouvelle planification des communes a été faite par la région pour le compte des communes (et pas à leur place). Pour les appuis urbanistiques, un marché cadre a été passé. Il a fallu faire de la planification locale avant de finaliser la planification globale, sans avoir les nouvelles études hydrauliques abouties, ce qui supposait des échanges très fréquents entre les équipes travaillant aux différentes échelles pour faire les ajustements nécessaires (et acceptés). Il s?est agi ainsi de construire ainsi un schéma sans valeur légale, sans enquête publique ou évaluation des incidences mais avec des modes de participation, définis à la carte, selon les choix des élus locaux dans chaque collectivité. L?agilité et l?adaptabilité ont reposé sur le fait de se parler. Ainsi ont été élaborés des PDDQ ? plan de développement durable des quartiers. Le travail a porté aussi sur la trame agricole, les haies, le sens du labour, le couvert forestier, qui influencent la gravité des inondations. Rétablir des haies écrête la crue de 20%. La prise en compte des inondations doit se faire par l?amont des bassins versants en premier lieu : ont été mis en place des périmètres de vigilance foncière, avec des possibilités de préemption. Entre janvier 2022 et juillet 2022, 6 plans de reconstruction de centres urbains ont été faits sur 9. 5 millions d?euros ont été consacré aux travaux du commissariat, dont 500000 pour les études. - Le Rapport de la Commission d'enquête parlementaire52 chargée d'examiner les causes et d'évaluer la gestion des inondations de juillet 2021 en Wallonie du 22 mars 2022 a fait 161 recommandations (voir annexe 6). Il ressort des entretiens menés par la mission les points clés et les actions engagées suivants : - La prévision des crues mobilise le service mobilité - infrastructures, en charge des canaux et barrages, en interface avec l?opérateur de Météo (Institut royal météorologique - IRM). Les outils n?étaient pas adaptés à ce phénomène, jamais vu. Il est nécessaire d?améliorer les outils pour des événements exceptionnels. - concernant la gestion de crise, la commission d?enquête parlementaire a fait des recommandations, qui, pour les gouverneurs mettent l?accent sur la coordination des réseaux de volontaires, la formation des élus, les plate-formes citoyennes. En pratique, la Croix rouge est présentée comme étant en recul, et il est nécessaire de mettre en place un cadre spécifique de mobilisation de bénévoles. Il est ressorti des rex également la nécessité de revoir les modalités de coopération. La région wallonne se dote d?une cellule d?expertise (CELEX) dont les avis éclairent le gouverneur sur l?opportunité ou non de déclencher une phase provinciale. Un travail a aussi été mené pour identifier les bâtiments au regard du risque inondation, non diffusé publiquement, qui permet de cibler des alertes, pour les personnes qui s?abonnent (peu à ce jour). Les autorités belges peuvent en effet communiquer directement avec la population, par e-mail ou sms, grâce au système d?alerte BE-Alert (sur inscription ou géolocalisation). - Le pompage repose sur plus de 190 pompes de régulation : il apparaît souhaitable d?en centraliser la supervision pour pouvoir optimiser. Ces pompes ne servent pas qu?à la navigation. La région travaille à un arrêté pour prioriser les usages de l?eau (en crise). Le schéma régional de la ressource en eau fixe des débits autorisés. La gestion des ouvrages donne toujours lieu à des discussions (avoir de l?eau en été/ être en mesure d?écrêter des crues). Les sections de wateringues gèrent quelques pompes, ce qui peut conduire à des surplus dans les canaux en crise, 52 Parlement de Wallonie PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 83/107 mal anticipés. Le pompage qui est fait au quotidien ne correspond pas aux enjeux de la crue ? dans ce cas, il faut prévoir d?autres outils comme les zones d?expansion de crues. - La culture du risque s?est perdue, même dans des vallées très exposées. Les victimes ont été des personnes qui ont pris leur voiture. La région met en place des systèmes de bénévolat pour mobiliser des citoyens formés et engagés en cas de crise. - Il est important d?avoir une approche pluridisciplinaire, mobilisant des spécialistes pour conseiller les autorités, avec une information précise ? sur la localisation de l?aléa en particulier, et des termes permettant une compréhension claire du risque de crue et de l?alerte. La région a travaillé pour que cela soit fait, maintenant, de manière plus intégrée. - Les cartes d?inondations sont faites pour un aléa 100 ans avec une majoration de 30% pour le changement climatique. L?approche s?appuie sur du rex et de la modélisation. Mais la question se pose de l?utilisation des crues de juillet 2021 dans la planification territoriale : l?événement est tellement exceptionnel, faut-il en tenir compte ? Les choix de prévention sont précisés à l?échelle locale, sur la base d?une approche coûts bénéfices. Il existe toujours un risque résiduel. Dans la suite de ce rapport, le ddécret du 13 juillet 2023 a rénové le cadre de la gestion des risques et des crises par la Région wallonne. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 84/107 Annexe 5. Rapport de la Commission d?enquête parlementaire chargée d?examiner les causes et d?évaluer la gestion des inondations de juillet 2021 en Wallonie du 22 mars 2022 Dans la suite des inondations du 14 juillet 2021, qui ont fait 41 morts en Wallonie, une commission d?enquête parlementaire a rendu un rapport qui comporte 161 recommandations. Parmi elles, certaines sont particulièrement intéressantes pour les travaux menés dans la suite des inondations de fin 2023 début 2024 en France : elles figurent en gras dans la reprise du rapport ci-dessous. * Les inondations de juillet 2021 ont dramatiquement renforcé la prise de conscience de la réalité du dérèglement climatique et de son abrupte proximité : le dérèglement climatique n?est pas une problématique réservée aux générations de demain ou aux contrées lointaines mais constitue un enjeu du temps présent et de notre continent. Les inondations mettent en relief la nécessité de renforcer et accélérer, d?une part, la lutte contre le changement climatique par la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) et, d?autre part, l?adaptation de nos territoires, nos infrastructures, nos institutions, nos systèmes et notre société afin de protéger la population des dérèglements climatiques en cours et à venir. Il nous faut calibrer l?ensemble des politiques publiques à la hauteur des catastrophes auxquelles il est possible de s?attendre et à la hauteur du risque défini. Les auditions et les informations reçues par la Commission d?enquête parlementaire chargée d?examiner les causes et d?évaluer la gestion des inondations de juillet 2021 en Wallonie amènent à formuler les recommandations qui suivent. 1. PRÉVISIONS ET ALERTES MÉTÉOROLOGIQUES ET HYDROLOGIQUES European flood awareness (EFAS) 1. Concernant l?usage du European Flood Awareness System (EFAS) par le Service Public de Wallonie (SPW) : ? engager résolument la Wallonie dans le réseau européen constitué par l?EFAS et ses différents outils; ? intégrer l?usage de l?ensemble des outils proposés par l?EFAS (alertes formelles et informelles « flood » et « flash flood » et « Map viewer ») dans les procédures du SPW; ? charger le SPW, conformément aux conditions d?accès à l?EFAS signées le 23 février 2015 par la Région wallonne, de formuler régulièrement des évaluations à l?EFAS sur la qualité de ses prévisions; ? participer aux réunions annuelles et aux formations nécessaires; ? partager avec l?EFAS Dissemination Centre les données des stations pluviométriques et les autres outils de mesure qui peuvent l?être. 2. Concernant Copernicus Emergency Management Service, réduire le délai d?envoi de l?image produite par satellite aux autorités compétentes. Institution royal météorologique (IRM) 3. Développer et renforcer le partenariat entre le Service Public de Wallonie (SPW) et l?Institut Royal Météorologique (IRM) afin principalement : ? de renforcer les capacités de modélisation météorologique pour bénéficier de prévisions météorologiques à la maille la plus fine possible et ce en progressant dans la prévision et PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 85/107 l?intégration des pluies dites convectives (intenses et concentrées) ; ? d?assurer la connaissance mutuelle des outils et données et leur interopérabilité ; ? d?organiser la communication par l?IRM au SPW de la liste exacte des communes concernées par ses avertissements ; ? de solliciter la création d?un produit de l?IRM analysant l?impact plus détaillé des prévisions météorologiques sur les sous-bassins versants comprenant un barrage. 4. Améliorer les conditions et le séquençage d?utilisation des codes d?alerte de l?IRM afin de pouvoir déclencher des alertes jaunes, oranges et rouges sans attendre 48 heures, 24 heures ou 12 heures, en cas de risque d?événements météorologiques de nature ou d?ampleur exceptionnelles. 5. Adapter les modèles de prévisions météorologiques aux modèles climatologiques prospectifs. Direction de la Gestion Hydrologique du ServicePublic de Wallonie Mobilité et Infrastructures (DGH SPW MI) 6. Afin d?améliorer la capacité de prévision et de communication de la Direction de la Gestion Hydrologique du Service Public de Wallonie Mobilité et Infrastructures (DGH SPW MI), il est recommandé : ? d?intégrer progressivement dans le modèle de prévision hydrologique « HydroMax » les prévisions météorologiques du European Centre for Medium- Range Weather Forecasts (ECMWF) et les données issues des cours d?eau non navigables (Aqualim); ? de renforcer les capacités de modélisation hydrologique en prenant en compte un facteur de risque plus grand lié à l?augmentation des phénomènes climatiques extrêmes; ? d?intégrer l?ensemble des cours d'eau dans le système d'alarme et d'alerte de la DGH SPW MI ainsi que la problématique du ruissellement; ? d?opérationnaliser le projet « Walhydro » en regroupant ainsi, au sein d?une même base de données, l?ensemble des données pertinentes en matière d?inondations gérées par le SPW, et en intégrant les réseaux « Aqualim » et « Wacondah » pour créer un réseau métrologique unique; ? de disposer des outils disponibles pour ouvrir l?ensemble des produits fournis par l?Institut Royal Météorologique (IRM) et le European Flood Awareness System (EFAS) au SPW et aux autres autorités régionales; ? de développer des modèles d'alarme spécifiquement liés aux phénomènes de « flash flood »; ? d?appliquer la Directive (UE) 2019/1024 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 concernant les données ouvertes et la réutilisation des informations du secteur public aux données utilisées et générées par Walhydro et HydroMax et de rendre ces données accessibles pour les gestionnaires et les autorités publiques et, dans la mesure du possible, pour les citoyens; ? d?étudier et analyser dans le détail le risque d'inondation par ruissellement afin de mieux comprendre ses processus de fonctionnement dans les vallées (détermination de couloirs préférentiels d'écoulement, etc.). 7. Clarifier et rendre publics la terminologie des codes et seuils de pré-alerte et d?alerte de crues afin de mieux rendre compte des risques d?événements hydrologiques d?une nature exceptionnelle. Dans ce cadre, réfléchir à la possibilité de lancer des pré-alertes ou alertes de crue sur la base des prévisions météorologiques sans attendre le résultat des prévisions hydrologiques. 8. Veiller à ce que la DGH SPW MI adresse une communication compréhensible, signifiante et directement exploitable aux autorités régionales et communales compétentes ainsi qu?à la population. 9. Établir un canevas de bulletin d?information, des messages de pré-alerte, d?alerte et concernant la situation des eaux (données chiffrées, degré de gravité), réalisé en coopération avec le Centre régional de crise (CRC-W) et l?Union des Villes et Communes de Wallonie (UVCW). 10. Opérationnaliser une modélisation plus précise des sous-bassins versants, afin de pouvoir traduire effectivement l?impact des crues sur le territoire, en ce compris l?impact de délestages éventuels en aval des barrages-réservoirs. 11. Améliorer les stations de mesures hydrométriques afin, d?une part, d?agrandir la gamme de PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 86/107 mesure des débits avant une situation de défaillance et, d?autre part, d?augmenter leur résistance. 12. Améliorer la collaboration avec les services hydrologiques régionaux (bruxellois et flamand) et des pays limitrophes, notamment en apportant un point d?attention concernant les barrages et leurs impacts. 13. En concertation avec les médias, tant publics que privés, intégrer les données hydrologiques vulgarisées dans les bulletins météorologiques grand public en cas de prévision de crues et, le cas échéant, prévoir la diffusion de messages de pré-alertes et d?alertes. 14. Renforcer la capacité d?évaluation préliminaire des risques d?inondations visée par l?article 4 de la Directive 2007/60/CE du Parlement Européen et du Conseil du 23 octobre 2007 relative à l?évaluation et à la gestion des risques d?inondation, en tenant compte, parmi les différents éléments de cette évaluation, de la description des inondations survenues dans le passé et ayant eu des impacts négatifs significatifs. Centre de la permanence d?exploitation (PEREX) 4.0 15. Finaliser rapidement l?opérationnalisation du Centre de la Permanence d?Exploitation (Perex) 4.0. 16. Concernant le mécanisme de veille active des cours d?eau et barrages, définir une phase spécifique à partir de laquelle la situation nécessite un mécanisme de permanence opérationnelle. 17. Intégrer dans les meilleurs délais la veille des seuils de préalerte et d?alerte hydrologiques au sein du Centre de la Perex 4.0. 18. Assurer progressivement une connectivité optimale à l?ensemble des sites sensibles régionaux. 19. S?assurer que le Centre de la Perex 4.0 est en mesure de visionner en temps réel des sites sensibles du réseau hydrologique wallon, en ce compris les barrages. 2. PRÉVENTION DES RISQUES ET GESTION DE CRISE Culture du risque 20. Dans l?ensemble des procédures de gestion, de construction ou de rénovation des infrastructures publiques, tenir compte du risque d?aggravation des impacts liés aux phénomènes climatiques extrêmes. 21. Former davantage d?agents publics à la planification d?urgence et à la gestion de crise. 22. Développer davantage d?interactions entre les coordinateurs en planification d'urgence (PLANU), les conseillers en aménagement du territoire et urbanisme (CATU) et les fonctionnaires délégués. 23. Collaborer avec le Centre fédéral d?excellence pour le Climat dans ses travaux de coordination de programmes de recherche sur l'évolution des conditions météorologiques extrêmes dans le futur et développer, en association avec l?Organe de concertation pour l?analyse de la menace « Climat » (OCAM Climat) et les services fédéraux concernés, une expertise en termes de gestion des risques climatiques liés aux compétences régionales, particulièrement en ce qui concerne les inondations. 24. Créer une culture du risque au sein des services publics en coordination avec les différentes autorités en charge du secours. 25. Développer un plan d?urgence d?aide psychosociale en cas de crise majeure à l?attention des victimes et en assurer la coordination avec la Fédération Wallonie-Bruxelles et la Communauté germanophone. 26. Mettre en place une banque de données sécurisée reprenant les différents numéros d?urgence et l?ensemble des moyens disponibles, qui seront actualisés. 27. Créer une logistique efficace en matière d?aides, particulièrement en organisant les prêts et les dons de matériels, la possibilité de les entreposer dans un lieu prévu à cet effet, la mise à disposition de logements ainsi qu?un registre d?entreprises et d?organisations susceptibles d?apporter leur soutien en cas de crise majeure. 28. En coordination avec le Centre de crise national (NCCN), veiller à ce que des équipements efficaces et adéquats soient disponibles en permanence. 29. Dès l?émission d?un code jaune par l?Institut Royal Météorologique (IRM), appréhender la situation en approche et par équipes multidisciplinaires et effectuer des points réguliers sur l?évolution des informations. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 87/107 30. Élaborer, en bonne intelligence avec les communes concernées, des cartes d?évacuation et de mise à l?abri, lisibles, y compris en cas de délestage préventif, accompagnées d?un inventaire des sites pouvant accueillir les personnes évacuées. 31. Permettre la mutualisation des moyens en planification d?urgence à un niveau pluri-communal. 32. En parfaite cohérence avec les Plans généraux d?urgence et d?intervention (PGUI), effectuer régulièrement des exercices d?évacuation et de mise à l?abri de la population ainsi que des stress tests liés aux infrastructures sensibles, le cas échéant à un niveau pluri-communal. 33. Sur base des partenariats existants entre les fédérations de mouvements de jeunesse et les autorités publiques ainsi que sur les procédures et bonnes pratiques mises en oeuvre lors des inondations de juillet 2021, inclure dans les plans généraux d?urgence et d?intervention (PGUI) une procédure d?évacuation relative aux camps de vacances et de jeunesse et l?étendre, de façon adaptée, aux sites de camping et habitations permanentes. 34. Encadrer la participation citoyenne dans la planification et la gestion d?urgence, en créant une réserve de citoyens volontaires au niveau local et en analysant la possibilité juridique de couvrir par une assurance les interventions de ces volontaires en cas de crise. 35. Offrir à des points de contact de quartier la possibilité d?avoir une formation de base permettant de les familiariser à la culture du risque. 36. Créer un cadre permettant une organisation avec les bénévoles, pendant et après la catastrophe, et mettre à disposition les lieux et le matériel nécessaires pour rendre cette aide efficace. 37. Formaliser la délégation pour absence (applicables aux bourgmestres, gouverneurs de province, fonctionnaires, etc.) sur la base de critères préalablement définis ainsi que sur l?étendue de la délégation. 38. S?assurer que l?ensemble des coordonnées de contact des personnes désignées par délégation sont bien transmises aux autorités supérieures et aux différents responsables des corps d?intervention. 39. Organiser une reconnaissance officielle des événements dramatiques des inondations de juillet 2021 et de leurs victimes ainsi que des bénévoles qui leur sont venus en aide. 40. Structurer un travail de mémoire des inondations et sa diffusion afin d?assurer dans la durée la sensibilisation aux risques d?inondations. Centre régional de crise (CRC-W) 41. Adopter un décret relatif au Centre régional de Crise de Wallonie (CRC-W) ayant pour objectifs d?en clarifier les rôles et les missions, d?en moderniser le fonctionnement et d?en faire la porte d?entrée unique des services régionaux en matière d?expertise du risque. Complémentairement, préciser les missions du Collège des Gouverneurs wallons ainsi que son articulation avec le CRC- W. 42. Une fois par législature, publier un rapport décrivant l?état d?anticipation et de prépara- tion des réponses de la Wallonie face aux risques naturels ou à la survenance d?accidents majeurs. 43. Renforcer le rôle du CRC-W en tant qu?interlocuteur de référence pour les gestionnaires de crise, lorsqu?une phase de crise est déclenchée à l?échelon local, provincial ou fédéral. 44. Clarifier, par le biais de protocoles de collaboration, les chaînes de communication et de res- ponsabilité entre le CRC-W, les services du SPW et des unités d?administration publique (UAP) qui peuvent être mobilisés. 45. Optimaliser le rôle du CRC-W en tant que coordinateur de mobilisation de l?expertise et des ressources liées aux risques, notamment par le biais de la mise sur pied de groupes multidiscipli- naires, à l?image de la Cellule d?Expertise (CELEX), afin de favoriser la communication entre les acteurs concernés, et en traduisant de manière facilement compréhensible et exploitable ces expertises pour les acteurs de terrain. 46. Préciser le rôle du CRC-W et des acteurs de la gestion de crise ? Centre de crise national (NCCN), gouverneurs de province, communes ? en matière, entre autres, de lutte contre les « fake news », d?activation du Copernicus Emergency Management Service et de coordination de l?utili- sation des images aériennes disponibles. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 88/107 47. Modifier la dénomination du CRC-W pour qu?elle corresponde mieux à son rôle de centre du risque et d?expertise et d?appui à la gestion de crise. 48. En situation de crise ou de phase provinciale ou fédérale, placer le CRC-W sous l?autorité directe du Secrétaire général du SPW, ce dernier disposant, en coordination avec les Directions générales concernées du SPW, d?un pouvoir d?injonction. 49. En temps de crise, prévoir que le Secrétaire général du SPW puisse avoir connaissance des injonctions ministérielles données aux directeurs généraux. 50. Dans la chaîne de diffusion de messages d?alerte des crues, prévenir l?ensemble des acteurs concernés par la gestion de l?eau (producteurs et distributeurs d?eau, épurateurs, services de dé- mergement, ...). 51. Former le personnel du CRC-W à vulgariser les informations qu?il reçoit et doit répercuter. 52. Donner d?initiative, à toutes les communes, accès aux communications du CRC-W, en complé- ment de la possibilité d?abonnement. 53. Confier au CRC-W la présidence et le pilotage du Groupe Transversal Inondations (GTI). 54. Lorsqu?une crise impliquant les compétences régionales wallonnes a un impact sur les compé- tences communautaires, prévoir la présence au sein du CRC-W d?un représentant de ces entités. 55. Octroyer un statut officiel au GTI en tant qu?organe de pilotage stratégique et coordonné des Plans de gestion des risques d?inondations (PGRI) au niveau du Gouvernement, en précisant no- tamment son rôle, ses missions et sa composition et en élargissant son champ d?action à la pré- paration de la gestion de crise pour une amélioration de la coordination entre les membres du GTI. 56. Préciser la mission du GTI en ce qui concerne la prévention des inondations par débordement et ruissellement. 57. Confier au GTI la présentation d?un rapport par législature au Parlement sur deux volets : l?ac- tivité du GTI, d?une part, et le suivi de chacune des mesures du PGRI, d?autre part. Les gestionnaires de crise (Fédéral, Province, Commune) 58. Dans le cadre de l?arrêté royal du 22 mai 2019 relatif à la planification d'urgence et la gestion de situations d'urgence à l'échelon communal et provincial et au rôle des bourgmestres et des gouverneurs de province en cas d'événements et de situations de crise nécessitant une coordina- tion ou une gestion à l'échelon national, solliciter de l?Autorité fédérale la clarification du comman- dement dans la gestion de crise. Déterminer clairement les mécanismes de coopération entre dif- férentes entités dans l?hypothèse d?une succession de déclenchement de phases d?urgence. Rap- peler le rôle et la responsabilité de chaque intervenant dans chaque phase d?urgence (NCCN, Centre de crise provincial, Centre de crise communal). 59. Intégrer une formation complète à la gestion de crise pour les personnes responsables dans la chaine de commandement. 60. Organiser la formation, à rythme régulier, de l?ensemble des membres des collèges com- munaux à la planification d?urgence et la gestion de crise et rendre obligatoire cette forma- tion pour les bourgmestres, y compris les faisant fonction. Inclure dans les formations les éléments de compréhension et d?interprétation des alertes reçues dans le cadre de la ges- tion de crise. 61. Rendre obligatoire la formation à la planification d?urgence et à la gestion de crise pour les coordinateurs en planification d'urgence (PLANU) et les agents qui les remplacent, clairement dé- signés, pour les gouverneurs de province et les commissaires d?arrondissement, ainsi que pour les directeurs généraux et directeurs généraux adjoints des communes et provinces, et pour le Secré- taire général et les directeurs généraux du SPW. Inclure, dans les formations des agents commu- naux et des élus, les éléments de compréhension et d?interprétation des alertes reçues dans le cadre de la gestion de crise. 62. Mettre sur pied, à une échelle pluri-communale, le partage d?expériences et de bonnes pratiques et facilitant, le cas échéant, la mutualisation et le remplacement des agents com- pétents en matière de PLANU. 63. Intégrer la gestion des risques liés aux sites dangereux ainsi que la lecture et la compréhension de données liées aux risques dans les formations des PLANU. 64. Organiser des formations au portail national de sécurité Incident & Crisis Management System PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 89/107 (ICMS) pour les acteurs concernés et identifier rapidement le responsable de ces formations. 65. Diffuser les règles d?utilisation de l?ICMS préalablement et de manière claire aux parties pre- nantes. 66. Rappeler le rôle de l?ICMS, des gouverneurs de province et du NCCN dans la chaine de com- mandement. 67. Analyser la pertinence des informations à introduire dans l?ICMS. 68. Intégrer systématiquement les gestionnaires de barrages dans le système ICMS lorsque ceux- ci sont concernés directement ou indirectement. 69. Formaliser et systématiser l?organisation de débriefings et de retours d?expérience des gestion- naires de crise, en ce compris avec les structures de soutien et d?expertise (CRC-W, GTI, etc.), afin de pouvoir tirer les enseignements des événements rencontrés et les intégrer dans le proces- sus d?élaboration des Plans de gestion des risques d?inondations (PGRI). 70. En matière d?alerte et de communication d?urgence : ? généraliser l'utilisation de l?outil « BE-Alert » par les autorités locales; ? augmenter le taux d?inscription de la population à BE-Alert; ? améliorer un réseau radio « Astrid », « Blue Light Mobil » ou similaire accessible aussi pour les autorités locales (coordinateur planification d'urgence » (PLANU) et/ou bourgmestre) ; complémen- tairement, développer toute ressource alternative permettant d?assurer une communication entre services en cas de saturation ou défaillance des réseaux des opérateurs téléphoniques, du réseau électrique et d?Internet. Lors de la transmission d?une information cruciale, l?émetteur doit vérifier la réception du message par le destinataire. Paramétrer l?échelle de gravité des circonstances et hiérarchiser les listes de numéros selon cette échelle. 71. Organiser une communication de crise centralisée et uniformisée qui parvienne au destinataire dans les trois langues nationales. 72. Assurer, sur les réseaux sociaux, une communication large et efficace en période de crise pour permettre l?adhésion de la population aux mesures envisagées et lutter contre les « fake news ». 73. En plus de l?arsenal existant, des médias et des réseaux sociaux, établir une démarche de communication de terrain telle que, par exemple et selon les cas : ? la constitution d?un réseau de points de contact par quartier et, le cas échéant, son activation en cas de crise; ? l?utilisation de haut-parleurs dans les quartiers; ? le porte-à-porte; ? les sirènes. 74. Sans remise en cause de l?articulation entre les différents acteurs, demander au Gouvernement wallon de solliciter le Gouvernement fédéral afin de : ? évaluer le mode de fonctionnement entre le Centre de crise national (NCCN) et les centres de crise provinciaux afin de fluidifier la transition lors du passage d?un niveau de gestion de crise à un autre; ? faciliter l?utilisation des moyens du NCCN lors d?une phase de crise provinciale ou d?une phase de crise communale; ? renforcer la coopération du NCCN avec les services des gouverneurs de province et les com- munes; ? développer au niveau du NCCN une mission d?appréhension des risques climatiques et environ- nementaux au même titre que les risques majeurs déjà pris en compte par le NCCN; ? renforcer le rôle du NCCN dans la mobilisation et la mise à disposition d?une expertise spécialisée auprès des autres niveaux de gestion de crise. 75. Actualiser chaque Plan général d?urgence et d?intervention (PGUI) au moins tous les six ans, en incluant une concertation supra-locale. Généraliser dans chaque commune la prise en compte de l?enjeu des inondations dans l?élaboration de son PGUI, incluant une identification des chaînes de communication, un plan de communication de crise et un plan de mise à l?abri et d?évacuation en fonction de la localisation des risques. 76. Clarifier les interlocuteurs destinataires (mandataires et/ou agents) des messages d'alerte et d'avertissement du NCCN et du CRC-W. 77. Assurer une capacité pour les gouverneurs de province à mobiliser, en cas de crise majeure, une réserve de personnel parmi les agents de l?administration provinciale. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 90/107 78. Organiser, à partir des services des gouverneurs de province, une mise à jour régulière et effective des coordonnées d'urgence des autorités locales et acteurs de la gestion de crise. 79. Évaluer le mode de déploiement et de fonctionnement des postes de commandement opéra- tionnel (PC Ops) pour une crise qui touche plusieurs zones de secours. 80. Identifier un ou plusieurs locaux rapidement aménageables où peut se réunir la Cellule com- munale de crise en toute sécurité et commodité. 81. Demander au Gouvernement wallon de solliciter le Gouvernement fédéral afin qu?il prévoit une procédure claire d?urgence interzones et fixant quel commandant de zone de secours dirige les opérations. 82. Prévoir la transmission des ordres du jour et des procès-verbaux des réunions des Collèges de zones de secours aux gouverneurs de province. 83. Évaluer la structuration territoriale des zones de secours, en concertation avec les autorités locales. 84. Demander au Gouvernement wallon de solliciter le Gouvernement fédéral afin qu?il poursuive la réflexion sur la possibilité de réduire le nombre de zones de secours. 3. LES BARRAGES ET OUVRAGES D?ART Cadre légal 85. Créer un cadre légal pour la gestion et la sécurité des barrages-réservoirs publics et privés situés en Wallonie, ainsi que pour leur contrôle externe ayant pour objectif de : ? garantir la sécurité des ouvrages en tout temps; ? assurer un fonctionnement optimal des infrastructures, équipements et outils utilisés en fonction des missions attribuées (sécurité, réserve d?eau potable, écrêtage, étiage, production d?énergie, loisirs); ? formaliser des procédures et priorités claires pour les agents opérationnels; ? organiser les modalités d?un contrôle régulier (fiches techniques d?inspection et stress tests ex- ternes); ? organiser les modalités d?un dialogue entre les gestionnaires des barrages -réservoirs de Wallo- nie. 86. Sans attendre l?établissement de ce cadre légal, organiser dans les meilleurs délais un audit externe des barrages-réservoirs. 87. Consacrer le principe de ces audits externes au minimum une fois tous les 5 ans, incluant l?organisation de stress tests. 88. Prendre en compte, dans le cadre réglementaire, des avis et recommandations émis par la Commission internationale des grands barrages (CIGB), notamment des cartes d'inondation en aval des ouvrages en cas de défaillances. Gestion des barrages et ouvrages d?art 89. Modéliser les parties du bassin versant en amont des barrages afin de pouvoir estimer de façon plus fine et en temps réel les besoins à couvrir par la réserve d?empotement des barrages-réser- voirs. 90. En concertation avec la Société wallonne des eaux (SWDE) : ? rendre la gestion des barrages-réservoirs plus dynamique, avec une réserve d?empotement évo- lutive en fonction des moments de l?année, des prévisions et des données météorologiques et hydrologiques, ainsi qu?un renforcement des possibilités de manoeuvre de la part des gestionnaires; ? revoir en conséquence le contrat de gestion de la SWDE, la convention entre la SWDE et le Service Public de Wallonie Mobilité et Infrastructures (SPW MI) et les notes de manutention des différents barrages-réservoirs. 91. Autoriser le Service Public de Wallonie (SPW) à imposer par injonction à la SWDE et à tout gestionnaire de barrage ou exploitant de centrale électrique, un turbinage immédiat en situation de crise. 92. Dans le même cadre, revoir la méthode de calcul du volume entrant (BT) pour y inclure les facteurs liés à l'environnement (ruissellement, saturation des sols) et aux prévisions. 93. Concernant les modèles prévisionnels propres à la gestion des barrages : ? équiper les barrages d?outils de prévision permettant au gestionnaire de réaliser des prévisions PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 91/107 crédibles de l?impact du ruissellement sur la gestion de l?ouvrage; ? développer un modèle mathématique permettant d?estimer le volume d?eau entrant dans l?ou- vrage en fonction de prévisions météorologiques et d?un ruissellement donné. 94. Modéliser l?impact de lâchers de barrage sur le bassin versant en aval, en intégrant égale ment l?impact du ruissellement sur les bassins versants et actualiser sur cette base les informations de la note de manutention sur la célérité de l?onde de crue. 95. Préciser le mécanisme de décision relatif à la gestion anticipative et au délestage des barrages- réservoirs en cas d?avertissement, de pré-alerte ou d?alerte de crue afin qu?il fasse l?objet d?une concertation de l?agent gestionnaire du barrage avec la Direction des barrages -réservoirs du Ser- vice public de Wallonie Mobilité et Infrastructures (DBR SPW MI), la DGH SPW MI et leur hiérarchie, lorsque le barrage est géré directement par le SPW. Une procédure de concertation sera mise en oeuvre concernant les concessionnaires des barrages privés. 96. Intégrer dans la gestion des barrages un plan d'alarme prévoyant une montée en puissance selon différents niveaux d'alarmes avec des règles à respecter pour chaque niveau afin de clarifier le rôle des gestionnaires des barrages. 97. En cas de crise, prévoir un mécanisme de permanence opérationnelle pour la gestion des barrages- réservoirs. 98. Étudier l?opportunité et les effets potentiels d?une interconnexion entre les barrages. 99. Étudier les possibilités d?adapter les aménagements en aval des barrages -réservoirs afin d?augmenter la capacité de restitution en cas de nécessité. 100. Analyser l?opportunité d?adapter les turbines au sein des barrages-réservoirs dans un objectif de production d?énergie verte. 101. Augmenter et systématiser les échanges d?expérience et de bonnes pratiques entre les ges- tionnaires des barrages en Wallonie, en Belgique et à l?international. 102. Demander au Gouvernement wallon de solliciter le Gouvernement fédéral afin d?envisager une modification de la loi du 17 juin 2016 relative aux marchés publics en sorte d?intégrer les mar- chés publics relatifs aux barrages dans la catégorie des secteurs spéciaux. Prévention des risques liés à la gestion des barrages 103. Organiser et former les équipes de gestionnaires des barrages en matière de gestion des risques (internes et externes) et de crise. 104. Organiser la participation des gestionnaires des barrages aux réunions du GTI. 105. Systématiser et formaliser la communication entre les gestionnaires des barrages-réservoirs et les autorités locales, les zones de secours et les zones de police en prévoyant des réunions régulières. 106. Établir dans les meilleurs délais des Plans particuliers d'urgence et d'intervention (PPUI) pour l?ensemble des barrages-réservoirs situés en Wallonie, à l?initiative des gouverneurs de province et en associant les autres parties prenantes, et intégrer les risques propres au fonctionnement des barrages et ouvrages dans les PGUI des provinces et communes concernées, incluant un plan de mise à l?abri et d?évacuation. 107. Associer les gestionnaires des barrages à la planification d?urgence au niveau des gouver- neurs de province et des communes. 108. Inclure les barrages-réservoirs et les barrages au fil de l?eau dans les Plans de gestion des risques d?inondations (PGRI). 109. Améliorer la gestion et la protection des chantiers significatifs relatifs aux ouvrages hydrau- liques et autres ouvrages d?art sur les cours d?eau, en analysant et en intégrant les risques en cas de crue. 4. GESTION DES COURS D?EAU 110. Préconiser une approche pluridisciplinaire par sous-bassin versant, en tenant compte des enjeux en amont et en aval, afin de contribuer à la protection des personnes et des biens. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 92/107 111. En tenant compte des enjeux en amont et en aval et des engagements européens en matière de gestion des cours d?eau, procéder à un audit des modalités de gestion et d?en- tretien de ces derniers. 112. Evaluer l?intérêt de renforcer la coordination existante des actes d?entretien régulier à travers l?application du Programmes d?Actions sur les Rivières pour une approche Intégrée et Sécurisée (PARIS). 113. En tenant compte des enjeux en amont et en aval, lancer une étude sur l?incidence de l'artificialisation des cours d'eau sur le risque d?inondation. 114. Développer des dispositifs de prévention des risques d?inondation en favorisant les mesures de rétention des eaux (zones d?immersion temporaire, reméandration, élargisse- ment du cours d?eau, remise à ciel ouvert, etc.). 115. Analyser rapidement l?opportunité de revoir la catégorisation des cours d?eau en vue d?opti- maliser leur gestion tout en respectant les fonctions et besoins spécifiques à chaque caté- gorie de cours d?eau. 116. Communiquer aux autorités locales concernées, en ce compris les zones de police et les zones de secours, les cartes d?aléas d?inondation, les cartes des zones inondables et les cartes de risque, après chaque renouvellement de celles-ci. 117. Insérer dans les PGRI les masters plans établis à l?échelle des sous -bassins versants. 118. Intégrer dans les PGRI une gestion territoriale proactive des risques d?inondation in- cluant les mesures visant en particulier l?amélioration de la qualité des sols, l?augmentation de leur capacité de rétention et de ralentissement du ruissellement et l?augmentation de l?infiltration de l?eau. 5. AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET RECONSTRUCTION Cadre légal 119. Étudier la manière la plus adéquate de modifier le cadre légal assurant la prise en compte des cartes d'aléas d?inondations lors de la délivrance des permis d'urbanisme. 120. Dans le cadre des permis nécessitant des mesures hydrologiques particulières (bassins d?orage, noues, etc.), contrôler la mise en oeuvre effective de ces mesures. 121. Adapter le cadre permettant de renforcer le recours aux avis de la Cellule Gestion Intégrée Sol ? Érosion ? Ruissellement (GISER) du SPW en fonction de l?impact du projet analysé sur le risque. 122. Mieux faire connaître l?existence de la Cellule GISER et organiser la possibilité pour un porteur de projet de construction ou d?urbanisation de demander, avant la phase d?instruction du permis, un avis indicatif global préalable intégrant les analyses de la Cellule GISER, des gestionnaires de cours d?eau, des gestionnaires d?égouttage et de tout autre acteur pertinent, selon la localisation. 123. Instaurer un guide de construction pour les zones d'habitation en développement sur les pla- teaux des bassins versants qui ont une influence sur le réseau hydrographique. 124. Actualiser et faire connaître les référentiels de construction durable pour adapter le bâti aux risques de phénomènes extrêmes. 125. Informer les propriétaires et les locataires des bonnes pratiques en matière d?aménagement ou de construction afin de rendre les maisons moins vulnérables aux risques climatiques et envi- ronnementaux (mise des installations à l'étage, architecture bioclimatique, etc.). 126. Mettre à jour les cartes des zones inondables et les cartes d?aléas d?inondations, prio- ritairement dans les zones sinistrées. Cette mise à jour prendra en considération, à titre d?exemple : ? les risques de retour plus fréquent des phénomènes climatiques extrêmes; ? les processus aggravants (par exemple urbanisation et artificialisation des sols, impact des em- bâcles, etc.); ? les effets de gestion des barrages dans chaque scénario de la note de manutention; ? les nappes phréatiques et leurs remontées potentielles; ? l?évaluation par les communes après un événement d?inondation. Dans l?attente de cette mise à jour : ? s?assurer que les autorités locales soient parfaitement informées de la portée et de la signification PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 93/107 réelle des cartes des zones inondables; ? intégrer une version utilisable de ces cartes dans tous les outils de Système d?informations géo- graphiques (SIG) utilisés par les communes; ? mener une démarche d?information et de sensibilisation à l?égard de la population et des parties prenantes (architectes, notaires, urbanistes, etc.), relative à la portée et la signification réelle des cartes des zones inondables et des cartes d?aléa d?inondations. 127. Finaliser et publier les cartes spécifiques du risque en aval des ouvrages en cas de défail- lances. 128. Fixer les trajectoires de réduction de l?artificialisation des sols par bassins, en appor- tant les modifications nécessaires au Schéma de développement territorial (SDT) et au Code du développement territorial (CoDT) dans le prolongement des recommandations du rap- port du Groupe d?experts « artificialisation ». 129. Entretemps, renforcer les mesures concrètes de lutte contre l?imperméabilisation des sols, notamment à partir du travail en cours en matière de gestion à la source des eaux pluviales. Mesures particulières 130. Adapter, dans toute la mesure du possible, les bâtiments menacés par les crues pour qu'ils résistent aux inondations, en particulier pour les collectivités, y com- pris pour les structures existantes. 131. Prendre en compte et systématiser le calcul d'une revanche (distance entre le niveau de l?eau et le sommet d?une berge ou le bord inférieur d?un pont) lors des projets d'aménagement de cours d'eau et d'aménagement des ouvrages de franchissement. 132. Avoir une vue coordonnée dans les zones frontalières entre différentes communes afin d?avoir une approche globale en matière d?aménagement du territoire. 133. Augmenter la capacité d?infiltration des sols à travers : ? l?optimalisation prévue dans le plan stratégique de la Politique agricole commune (PAC) en matière de cultures (couverture hivernale, agroforesterie, etc.); ? la poursuite du programme « Yes We Plant » de plantation d'arbres et de haies ainsi que le renforcement de la perméabilité des sols forestiers; ? l?augmentation de la perméabilisation des sols et de la rétention de l?eau de pluie sur site dans tous les projets de réhabilitation et de rénovation. 134. Élaborer des études de ruissellement à l'échelle de quartiers ou de communes avec définition précise du risque et mise en place de mesures constructives tels que des nou- veaux collecteurs, infiltration, protection localisée d'objets, etc. Reconstruction 135. Mettre en place des « masters plans » afin d?organiser la reconstruction et la prévention des risques d?inondations, dans une approche cohérente et planifiée à l?échelle des sous - bassins versants, en commençant par la Vesdre, par les vallées sinistrées et, le cas échéant, par tout autre sous-bassin où cela s?avérerait nécessaire. Ces « masters plans » constituent des outils d?aide à la décision et pourraient contenir des indications, notamment relatives à : ? des mesures dans les zones non urbanisées pour augmenter la capacité de rétention des sols et ralentir le ruissellement (couverture végétale permanente, forêts résilientes, planta- tion de haies, pratiques agricoles, etc.); ? des mesures dans les zones urbanisées pour augmenter l?infiltration de l?eau (verdurisa- tion, désartificialisation, préservation de friches naturelles, matériaux drainants, etc.); ? des projets d?aménagement de cours d?eau visant à réduire la vulnérabilité des zones urbanisées (zone d?immersion temporaire, reméandration, etc.). Ces « masters plans » pro- poseront des mesures concrètes à décliner, sur base des procédures prévues par la légi- slation, dans des révisions de plans de secteur et dans les outils de planification commu- nale. 136. Protéger le réseau écologique wallon. 137. Garantir le maintien du lien social dans les vallées. 138. Assurer une reconstruction des berges des cours d?eau, par priorité dans les zones PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 94/107 urbaines ou urbanisées, en intégrant l?évolution du comportement des cours d?eau à la suite des crues de juillet 2021 et en se basant sur les résultats des études hydrologiques et hy- drauliques et des différents scénarios d?aménagement envisagés. 139. Dans le cadre des opérations de post-crise, réexaminer les procédures applicables afin d?assurer à tous l?accessibilité aux démarches administratives, de simplifier et d?accélérer, dans toute la mesure du possible, l?ensemble des dispositifs (formalités, marchés publics, tutelle) et de prévenir la surcharge administrative. 140. Mobiliser toute forme de partenariats, entre des partenaires publics et/ou des publics- privés, dès qu?il y a lieu, et gérer la mise en réseau des communes, intercommunales, so- ciétés publiques et privées dans leur mission d?aides, tant au niveau des déchets qu?aux niveaux d?évacuation, de relogement, de démolition, de travaux en urgence, etc. 141. Conclure un accord de coopération entre la Wallonie et la Communauté germanophone afin de fluidifier la mise en oeuvre concrète des aides et de clarifier la répartition des rôles entre les deux entités. 142. Demander au Gouvernement wallon de solliciter le Gouvernement fédéral afin d?envisager une révision de l?arrêté royal du 22 mai 2019 relatif à la planification d'urgence et la gestion de situations d'urgence à l'échelon communal et provincial et au rôle des bourgmestres et des gou- verneurs de province en cas d'événements et de situations de crise nécessitant une coordination ou une gestion à l'échelon national en sorte de préciser la procédure à suivre et les responsabilités des acteurs impliqués dans le cadre de phases de reconstruction après une situation de crise. 143. Modifier les articles L1222-3 à L1222-9 du Code de la démocratie locale et de la décentrali- sation en vue de permettre au collège communal de gérer l?ensemble de la procédure de marché public en cas de reconstruction urgente due aux dégâts causés par une situation de crise. 144. Solliciter de l?Autorité fédérale qu?elle demande à l?Union européenne, relativement au Fonds de solidarité de l?Union européenne : ? une augmentation des moyens budgétaires en ce qui concerne les catastrophes naturelles ; ? une accélération des procédures de liquidation des crédits budgétaires au bénéfice des autorités publiques concernées, en vue de permettre une mise à disposition de ces crédits dans les six mois. 6. SERVICE PUBLIC DE WALLONIE ET FONCTION PUBLIQUE Organisation 145. Améliorer la transversalité au sein du Service Public de Wallonie (SPW) pour sortir d?une gestion en silos. 146. Renforcer le rôle de coordination du secrétariat général du SPW en améliorant la transversa- lité entre les directions générales. Développer une culture organisationnelle en ce sens, en particulier : ? au niveau des objectifs transversaux fixés par le Gouvernement ; ? en termes de dynamique de projets (y compris à durée limitée) ; ? en termes d?anticipation et gestion du risque en situation de crise ; ? en termes de capacité pour le Comité Stratégique (COSTRA) à délibérer d?enjeux communs à plusieurs Directions générales. 147. Déployer une politique de la fonction publique permettant de moderniser l?administration et d?instaurer une culture d?efficience au sein des services du SPW. 148. Définir le rôle du COSTRA en situation de crise afin d?améliorer le fonctionnement, la coordi- nation et la communication au sein du SPW et préciser son articulation avec les missions du Centre régional de crise (CRC-W). 149. Développer, au sein du SPW, des outils permettant de mutualiser la collecte de données pour estimer les dégâts sur le territoire des communes concernées en temps de crise. Ressources humaines 150. Veiller à une meilleure transmission des savoirs, en particulier pour les fonctions critiques, en cas de remplacement de personnel. 151. Établir en permanence un cadastre récurrent des ressources humaines et matérielles mobili- sables au sein du Service Public de Wallonie (SPW) en situation de crise. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 95/107 152. En termes de personnel, renforcer l?attractivité du SPW en permettant la valorisation de l?ex- périence utile et l?ancienneté acquises dans le secteur privé. 153. Augmenter l?efficacité des procédures afin d?assurer une exécution plus rapide des recrute- ments décidés par le Gouvernement wallon. 154. Demander au Gouvernement wallon de solliciter de Gouvernement fédéral afin de se concer- ter avec les organisations représentatives du personnel en sorte d?analyser l?opportunité d?adapter les normes applicables en matière de temps de travail du personnel impliqué dans une situation de crise en vue de rendre la gestion d?une telle situation plus efficace. 7. AUTRES POLITIQUES 155. Mettre à jour les Plans communaux d?action en faveur de l?énergie durable et du climat (PAEDC) afin de renforcer la prise en compte des enjeux d?adaptation climatique. 156. Créer un plan de gestion et d?évacuation des déchets en situation d?urgence, prenant en compte la répartition des responsabilités entre les acteurs concernés et organisant, au bénéfice des communes, sous l?égide de la Société publique d?aide à la qualité de l?environnement (SPAQUE), une procédure de crise pour le nettoyage des déchets immédiats produits. 157. Charger chaque intercommunale de gestion des déchets d?identifier des sites temporaires de stockage des déchets. 158. Définir et évaluer les conditions techniques et juridiques préalables à la mise en place d'une réglementation favorisant la circularité des boues de dragage, sur la base notamment des acquis développés en matière de gestion des terres excavées. 159. Mieux encadrer la valorisation des résidus des curages afin de prévenir et limiter leur mise en Centre d?enfouissement technique (CET) (revêtement pour voiries et pistes cyclables, remblais, etc.). 160. Mettre en relation les vétérinaires urgentistes ainsi que les acteurs du bien-être animal avec les cellules de sécurité provinciale et les plans d?urgence des pouvoirs locaux pour la gestion des situations de crise impliquant les animaux, tant d?élevage que pour les particuliers. 161. Promouvoir l?utilisation par les communes, les vétérinaires, les pompiers, les policiers et les citoyens des meilleurs outils dans le cadre de la recherche d?animaux perdus ou décédés. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 96/107 Annexe 6. Revue de presse La Voix du Nord, 14 novembre 2023 Inondations : les annonces du président de la République - La Voix du Nord Inondations : les annonces du président de la République Emmanuel Macron a présenté plusieurs dispositifs en soutien aux sinistrés des inondations lors de son déplacement à Saint-Omer et Blendecques, ce mardi. L?état de catastrophe naturelle : décrété « pour toutes communes qui en ont fait la demande ». Elles sont plus de 200 et la liste n?est pas fermée, a précisé le président. Un fonds d?indemnisation d?urgence de 50 millions d?euros : à destination des collectivités territoriales touchées. Il est « évolutif en fonction de la situation ». Suffisant ? « C?est une première ligne », a réagi Xavier Bertrand, président de Région, qui ne demande pas plus pour l?heure car, comme il le dit, « personne à cette heure ne connait le coût de la remise en état ». Pour les agriculteurs : « On va mettre en place un fonds spécifique qui complète le dispositif calamité agricole. Un fond qui accompagne les pertes de production, les pertes de matériels... » Pour les entreprises : « On va mettre en place des mécanismes avec l?URSSAF pour échelonner les écheances fiscales », annonce Emmanuel Macron. Qui, à un ouvrier dont l?entreprise est dans l?eau, répond que le chômage partiel va être facilité. Pour les élèves : Un dispositif de soutien scolaire et de fournitures pour les ménages les plus modestes, notamment pour les familles et les enfants qui ne vont plus à l?école depuis la semaine dernière. Et pour que ça ne reproduise plus ? Le président entend « préparer la suite dès maintenant » et enjoint « à tirer les leçons ». La réglementation sur les systèmes d?entretien des cours d?eau doit être allégée pour que les curages puissent se faire rapidement, défend-on à l?Elysée. « Avec la lourdeur de la réglementation, le coût pour curer la même portion de canal est passé chez nous de 800 000 à trois millions d?euros en dix ans », appuie François Decoster, maire de Saint-Omer. À qui Emmanuel Macron a donné mission de travailler à améliorer les systèmes d?évacuation des cours d?eau vers la mer, en piochant dans les bons exemples en Europe et en particulier aux Pays-Bas. Et auprès des assurances ? Pour l?instant il est souvent trop tôt pour que les experts se déploient, « mais on va veiller à ce que ce soit fait très vite », a promis Emmanuel Macron. « Il faut être pressant », plaide Xavier Bertrand, un ancien... assureur. Qui ajoute : « France assureurs doit nous envoyer des experts de toute la France ». La franchise prise en charge : d?un montant de 380 ¤ en situation de catastrophe naturelle, elle sera prise en charge par les départements et la Région pour toutes les personnes ayant une déclaration de sinistre, a annoncé Xavier Bertrand. France 3, 15 novembre 2023 ENTRETIEN. 3 questions au maire de Saint-Omer, missionné par Emmanuel Macron pour penser à "l?après" inondations dans le Pas-de-Calais (francetvinfo.fr) Lors de son déplacement à Saint-Omer mardi 14 novembre 2023, Emmanuel Macron a missionné le maire de la commune pour trouver des solutions afin d'améliorer les systèmes d'évacuation d'eau et éviter de nouvelles crues dévastatrices à l'avenir. Entretien avec François Decoster. Depuis le début du mois de novembre, il est en première ligne face aux inondations. Au chevet des sinistrés, dans les multiples réunions organisées dans la cellule de crise de la préfecture du Pas-de-Calais mais PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 97/107 également auprès du président de la République... François Decoster ne compte pas ses heures. Ce mercredi 15 novembre 2023, lorsqu?il nous répond au téléphone entre deux réunions, le maire de Saint- Omer est en voiture. Et il a le sourire. "Aujourd?hui, il fait beau ! Voir le ciel bleu en ce moment est un soulagement", confie-t-il. Une accalmie bienvenue alors que le moral des habitants est au plus bas. "Certains me disent qu?ils ne supportent plus la pluie et c?est difficile pour moi de trouver une réponse". Un choc psychologique causé par les crues à répétition qui ont inondé des dizaines de communes de l?Audomarois. Tout un bassin de population, déjà éprouvé par les crues historiques de 2002, se retrouve de nouveau sous les eaux. Malgré les nombreux travaux engagés il y a 20 ans, les infrastructures n?ont pas suffi à éviter les inondations, alors que l?Aa, fleuve côtier traversant l?Audomarois, a pulvérisé les records de hauteur d?eau, parfois de plus d?un mètre. À cette époque, François Decoster n?était pas encore maire de la plus grande ville du secteur (il a été élu en 2014, NDLR). Mais aujourd?hui, le premier édile apparaît comme l?homme de confiance choisi par Emmanuel Macron pour éviter de nouvelles crues. Lors de sa visite dans la ville mardi 14 novembre, le chef de l?Etat a missionné François Decoster pour se pencher sur "l?après", afin de trouver des solutions pour améliorer les systèmes d?évacuation d?eau et éviter ainsi de nouvelles crues dévastatrices dans les prochaines années. Pourquoi cette mission pour préparer "l?après" inondations, alors que la même réflexion a été menée après les crues de 2002 ? François Decoster : "Le travail mené après 2002, soit avant que je sois maire, s?est appuyé sur la crue de 2002. Personne à l?époque ne se disait qu?on pouvait connaître encore pire. Et finalement si, il est tombé en 30 jours ce qui tombe habituellement en 6 mois dans le Pas-de-Calais. On va en faire l?évaluation, mais d?évidence, ce qui a été fait depuis 2002 ne permet pas d?éviter une catastrophe. Aujourd?hui, il y a 3 temps : le temps de l?urgence, le temps de la reconstruction et le troisième temps, pour lequel j?ai été missionné. La question est la suivante : comment continuer à nous adapter au regard des événements qui sont entrés dans une nouvelle dimension ? Comment on fait pour se préparer à des évènements qui risquent d?être de plus en plus fréquents et de plus en plus brutaux ? Ce n?est pas moi, seul, qui vais créer les réponses. C?est un travail collectif qui va s?engager. Ce travail n?a pas encore commencé car les inondations se poursuivent et, aujourd?hui, je suis au côté des habitants". En quoi va consister cette mission ? "Avec le chef de l?Etat, nous voulons avoir une approche européenne. Très concrètement, il faut qu?on aille regarder ce qui a été fait ailleurs, notamment aux Pays Bas. Il y a eu des inondations catastrophiques dans les années 50 qui ont fait de nombreuses victimes et qui ont donné lieu à un grand plan national appelé delta. Il consiste notamment à installer des équipements adaptés et à préparer les habitants à de telles situations, notamment avec des pompes à domicile etc. C?est toujours bénéfique d?aller voir les expériences auprès de nos voisins. D?autant plus qu?on a des configurations assez semblables : le pays a travaillé sa relation à la mer depuis des siècles, comme nous. Le delta de l?Aa a aussi un polder, comme aux Pays-Bas (étendue artificielle de terre conquise sur l?eau grâce à des digues, des barrages avec un niveau inférieur à celui de la mer, NDLR). Chez nos voisins, il y a eu une réelle prise de conscience au plan national. Il faut que l?on fasse la même chose". Vous voulez dire que cette réflexion dépasse les frontières du Pas-de-Calais ? PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 98/107 "Le chef de l?État a conscience que ce qui s?est passé chez nous, à savoir un fleuve côtier dont le débit devient infernal, est une situation qui pourrait se reproduire ailleurs en France. Le dérèglement climatique concerne l?ensemble de la planète. Un exemple : le fait qu?on passe d?une situation de sécheresse à une situation historique d?inondations avec impacts très forts est l?illustration de la nécessité absolue de revoir notre organisation et notre fonctionnement. Il y a des questions difficiles qui vont être soulevées comme l'artificialisation des sols... Mais nous allons y arriver". La Voix du Nord, 8 janvier 2024 François Decoster à propos des inondations : « Je veux qu?on soit protégés jusqu?à la fin de l?hiver » - La Voix du Nord C?était un Facebook Live pour préparer la réunion d?après-inondations, qui se tient mardi 9 janvier au conseil départemental, à Arras, à l?instigation de l?État. François Decoster, le maire de Saint-Omer, souhaitait recueillir la parole des sinistrés, pour « être plus efficace ». Morceaux choisis. L?urgence Dire d?abord. Ce Facebook Live organisé à l?heure où les voeux devaient se tenir ? face à l?urgence, ils ont été annulés, comme beaucoup d?autres cérémonies dans l?Audomarois ?, est d?abord le lieu d?annonces avant la réunion convoquée par l?État au conseil départemental pour évoquer la question des inondations après un deuxième épisode exceptionnel en janvier. « Je veux qu?on soit protégés jusqu?à la fin de l?hiver », martèle François Decoster, le maire de Saint-Omer. Qui portera à Arras « quatre demandes immédiates ». Une capacité « d?évacuation maximale vers les eaux de la mer à Mardyck jusqu?au 30 avril », soit 45 mètres cubes d?eau par seconde. Le transfert des eaux de l?Aa, à hauteur de Cuinchy, vers la Deûle, « tant que celle- ci n?est pas inondée », à 7 mètres par seconde au lieu de 2 actuellement. La création d?un déversoir, en amont, dans le canal à grand gabarit, pour empêcher les « gros volumes d?eau » qui ont inondé, comme en novembre, le quartier de la gare, les rues de la Poissonnerie et Saint-Martin. Et la demande de financements exceptionnels pour les équipements individuels ? batardeaux notamment ?, qui doivent protéger les habitations de la montée des eaux. La réflexion L?urgence, donc, d?abord. Sans mettre de côté la question de l?adaptation, sur un terme plus long en écho à la mission qu?Emmanuel Macron, le président de la République, a confiée à François Decoster mi- novembre, en marge de sa visite dans l?Audomarois. Et en réponse aux questions des internautes ? ils sont autour de 200, tout au long du Facebook Live, à le suivre. Pêle-mêle, la question de ralentir l?eau en amont de Saint-Omer, et de faciliter son évacuation ensuite, d?autres, « de bon sens », estime l?élu, de l?infiltration et de « ces immenses parkings en macadam » qui imperméabilisent les sols. Celle des champs d?expansion des crues, enfin. Après la crue qu?on croyait exceptionnelle de 2002, dix ouvrages sont sortis de terre, qui permettent de retenir 610 000 mètres cubes d?eau. « Le référentiel de 2002 est dépassé, analyse le maire de Saint-Omer. On est dans une autre époque, celle du dérèglement climatique, des hivers avec des pluies intenses. On n?est pas préparés à cette vulnérabilité nouvelle. » Les interrogations Sur le fil déployé sous la fenêtre dans laquelle François Decoster s?exprime, les questions s?amoncellent. Il les reprend. Les assurances ? Il n?y aura pas de deuxième franchise pour les sinistrés, Bruno Le Maire, le ministre de l?Économie, l?a promis. Le chemin Cordier ? Les opérations de pompage débutent, pour accélérer l?évacuation de l?eau. Pourquoi se fier aux Hollandais pour imaginer l?après ? Parce qu?une grande partie de leur territoire, 26 %, est sous le niveau de la mer, et qu?« en 1953, une catastrophique submersion marine » les a fait changer de paradigme. Le dragage du canal ? « Je suis impatient de le voir », répond François Decoster. Il coûte plus cher, 800 000 euros en 2013, entre 4 et 6 millions aujourd?hui. « On a demandé une PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 99/107 prise en charge par la solidarité nationale. » L?impact Les mots de François Decoster sont choisis. Pour les voeux, « on attendra des jours meilleurs ». L?élu répète sa « mobilisation » et celle de l?équipe municipale, des agents quand certains ont parfois eu le sentiment d?être « abandonnés ». Il rappelle l?existence d?une cellule d?écoute à la mairie (03 21 98 40 88) et de France Victimes (01 41 83 42 25). « On se prend une catastrophe naturelle alors qu?on est encore en train de digérer une catastrophe naturelle, dit-il. Si j?utilise l?ouverture médiatique qui m?est offerte, c?est pour défendre le territoire. » La Voix du Nord, 5 février 2024 Inondations : François Decoster aux Pays-Bas, « je suis ici en pensant d?abord aux habitants de Saint-Omer » - La Voix du Nord Après la Belgique au début du mois, François Decoster était aux Pays-Bas les 24 et 25 janvier dans le cadre de la mission inondations qu?Emmanuel Macron lui a confiée. Il devra rendre un rapport fin février inspiré par la façon qu?ont les voisins de la France de se prémunir des crues. Quels sont les contours de la mission inondations qu?Emmanuel Macron vous a confiée lors de son déplacement dans l?Audomarois, le 14 novembre 2023, alors que Blendecques se retrouvait sous l ?eau pour la seconde fois en une semaine ? François Decoster : « La lettre de mission est arrivée fin novembre ou début décembre. C?est une mission qui me demande d?aller voir chez nos voisins belges et néerlandais leur système de protection contre les inondations afin d?alimenter notre réflexion sur ce sujet. Le calendrier est assez serré et il nous demande de travailler sur deux types de sujet : gérer l?urgence, la crise, le relogement, les assurances, la mise en sécurité, prévenir le risque immédiat grâce aux travaux d?urgence qui ont déjà commencé, aux capacités de pompage maximales maintenues jusqu?à la fin de l?hiver. C?est la première temporalité. Mais l?ambition, et c?est un vrai défi, est aussi de commencer la réflexion sur le long terme. » Qu?avez-vous fait et vu depuis le début de cette mission ? « J?étais début janvier dans les Flandres, la semaine dernière en Wallonie où la waterbomb ? littéralement la bombe d?eau ? de juillet 2021 a fait 39 morts, touché 5 000 maisons et fait 5,5 millions d?euros de dégâts, et 188 morts en Allemagne. Et enfin ici, aux Pays-Bas ? notamment à Lelystad, au Rijkswaterstaat, le bureau de gestion des eaux de l?État ? où l?on comprend qu?on a intégré les risques liés aux inondations bien plus tôt que chez nous. » En quoi ces déplacements vous nourrissent-ils ? « Il y a d?abord beaucoup de choses communes. On doit se réinterroger, partout, sur nos référentiels. La question de l?impact du dérèglement climatique est présente dans toutes les organisations, elle se traduit ici par une politique de prévention des inondations sur le long terme, où l?on travaille sur le polder jusqu?en 2050, 2100. On sait qu?on va vivre des événements pluviométriques plus intenses pendant l?hiver, des sécheresses plus importantes l?été, et que tout ceci est très difficile à prévoir. La bombe d?eau de 2021 ne correspond à aucune modélisation, elle a surpris par son intensité. » Est-ce que c?est un peu ce qu?il s?est passé dans l?Audomarois en novembre 2023 ? « On se savait plus vulnérables mais on ne s?attendait sans doute pas à cette répétition. Même ici où les gens s?adaptent, où l?eau est une question existentielle, où on a beaucoup fait après les inondations de 1953 ? les Pays-Bas déplorent deux mille morts dans la crue de 1953 qui déclenche les énormes réflexions et travaux de prévention contre les inondations ?, et après les inondations à répétition de 1993, 1995, 1998, on ne cesse de se réinterroger. » PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 100/107 Et qu?est-ce qui nous différencie ? « Ce qui est frappant aux Pays-Bas, c?est à quel point l?autorité régionale de l?eau est puissante, et ce sera l?un des objets de mon rapport. On est passé de 2 500 organismes de gestion des wateringues à 21, qui sont puissants, ont des compétences techniques en permanence, des équipes larges, des budgets et la capacité de définir leurs ressources. Il y a ce Delta commissioner ? littéralement le commissaire du delta, du nom, Delta, des programmes dédiés aux inondations aux Pays-Bas ?, qui est une instance un peu au-dessus, avec une capacité à voir loin, à être dans un dialogue constructif avec les acteurs nationaux, régionaux? » Ce Delta commissioner, c?est un concept qui vous intéresse ? « On voit bien qu?avec la question du dérèglement climatique et de l?adaptation, on n?est pas un jour sans y penser, surtout quand les jours se répètent et aboutissent à des catastrophes. Mais ici, tout le monde dit à quel point c?est utile d?avoir cette forme de permanence, une petite équipe, d?une quinzaine de personnes, autonome, indépendante, dans le dialogue, de petite taille donc mais avec une influence costaud, qui porte attention à cette question à chaque instant. Il y a dans ce pays une culture de l?eau très forte, l?histoire du pays est fondée dessus, mais ça reste un sujet. Un Néerlandais m?a dit, « aux Pays-Bas, on fait du vélo et on sait vivre avec l?eau », si seulement en France on faisait pareil. Alors oui, cet élément de gestion de l?eau, c?est une méthode intéressante. » Jan-Willem Trompetter, l?ingénieur principal du système de pompage que vous avez visité ici, à Lelystad, vous a dit qu?aux Pays-Bas, certains habitants avaient fini par oublier qu?ils vivaient sous le niveau de la mer ? 29 % du territoire se trouvent sous son niveau. Est-ce qu?à Saint-Omer on a pu oublier qu?on vivait dans un marais ? « Les inondations ont rappelé peut-être quelle réalité recouvrait le fait d?habiter dans le marais. Ce sont les paroles d?une nouvelle arrivante, lorsqu?Emmanuel Macron est venu ? le 14 novembre 2023, le président de la République a rencontré les habitants du marais de Saint-Omer avant de se rendre à Blendecques ?, qui lui dit qu?elle est venue ici pour vivre au paradis, et il n?y a pas de raison, quand le niveau de l?eau descend, que ce ne soit plus le cas. Ici, l?organisation de lutte contre les inondations est systémique. On pensait que les maisons seraient toutes équipées de batardeaux, elles n?en ont pas besoin, il y a des batardeaux de villes, et le principe du polder pousse au paroxysme l?importance de calfeutrer l?ensemble. » L?une des réponses aux inondations, c?est évidemment qu?on va devoir s?adapter ? « En 2023, l?événement est exceptionnel, mais il change notre référentiel. On doit évidemment s?adapter. Mais le sujet est difficile. Des habitants envisagent de déménager, une réponse a été apportée par Christophe Béchu ? ministre de la Transition écologique, avec le fonds Barnier. Il y a le fonds Mirapi, Mieux reconstruire après une inondation, et il doit y avoir une réponse d?adaptation des logements pour être moins impacté par une inondation. Le sujet va devenir existentiel, on ne peut plus penser que c?est extraordinaire. C?est aussi le sujet de ce travail. Et ce qu?il est important de dire, c?est que partout on est très bien accueillis, et c?est significatif. Il y a une mobilisation des acteurs chez nos voisins, le souhait de partager une histoire et une volonté de travailler ensemble. » Emmanuel Macron l?a dit quand il est venu à Saint-Omer, « on va continuer à vivre et à travailler dans le marais », cette phrase guide votre mission ? « Je suis là avant tout comme maire de Saint-Omer, je suis dépositaire de cette parole du président de la République et de la demande des habitants de Saint-Omer. Le sujet des déménagements n?est pas le même partout, Saint-Omer répond à un plan particulier né d?un rapport équilibré avec la nature, et ma responsabilité est de respecter cet équilibre, parce que les habitants l?ont demandé. Je suis ici en pensant d?abord à eux. » Nord Littoral, 8 février 2024 https://www.nordlittoral.fr/199793/article/2024-02-08/francois-decoster-en-mission-aux-pays-bas-et-en- PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 101/107 belgique-pour-lutter-contre-les François Decoster en mission aux Pays-Bas et en Belgique pour lutter contre les inondations Le président de la République Emmanuel Macron a confié une mission à François Decoster. Ce dernier nous explique son travail. Entretien. Lors de sa venue à Saint-Omer, le Président de la République Emmanuel Macron avait donné une mission au maire de la cité audomaroise François Decoster. Le maire de Saint-Omer a accepté de répondre à nos questions sur cette fameuse mission. Quelle est cette mission confiée par le président de la République ? « L?idée c?est de pouvoir contribuer à une réflexion globale sur ce qu?il faut faire, pour que des territoires comme le nôtre et au-delà, puissent prévenir le risque d?inondations. Il y a toute une question d?adaptation aux changements climatiques. On a vu avec ce qu?il s?est déroulé depuis le mois de novembre, que tout ce qui a été fait pour essayer de nous protéger contre ces risques d?inondations a été calculé à partir de ce que le territoire avait vécue en 2002. Mais tout cela est dépassé. Nous sommes dans une autre époque, avec des pluies plus fortes en intensité pendant l?hiver et des épisodes qui se déroulent sur quelques heures ou sur quelques jours et tout ceci créait des débordements et du ruissellement et quand cela arrive à Saint- Omer des eaux stagnent pendant des jours avant d?être évacuées à la mer. Ce que m?a demandé le président, c?est de contribuer à cette réflexion qui est une réflexion avec beaucoup d?autres parties prenantes. Mais moi, je dois aller voir, si du côté de nos voisins belges et néerlandais il y a des choses intéressantes pour contribuer à cette réflexion. Est-ce qu?il y a des bonnes pratiques, est-ce qu?il y a de bonnes expériences qui peuvent guider notre travail. C?est une mission de comparaison avec ce que font nos voisins, qui ont cette expérience avec les inondations et je suis accompagné d?une inspectrice générale de l?environnement et du développement. » Pourquoi avoir choisi la Belgique et les Pays-Bas ? « Il y a plusieurs raisons, déjà parce que nous avons une géographie qui est très proche, à Saint-Omer, nous sommes l?entrée d?un polder, c?est d?ailleurs un mot commun avec nos voisins. Nous avons tous les trois des terrains très plats avec parfois des zones qui se situent en dessous du niveau de la mer. Les Pays-Bas et la Belgique sont des pays qui ont une forte expérience depuis de nombreuses années en matière gestion de l?eau. Vous savez le mot Wateringue c?est un mot commun à l?Audomarois au Nord de la France, mais aussi à la Flandre et aux Pays-Bas. Les Pays-Bas considèrent que la gestion de l?eau comme une question existentielle. Il y a 26 % du territoire national qui est sous le niveau de la mer. Pouvoir gérer l ?eau, c?est quelque chose d?essentiel pour eux. Vous savez il y a un dicton néerlandais qui m?a été dit sur place : ?Si Dieu a créé la terre, les Hollandais ont créé les Pays-Bas.? Cela dit tout de leur longue expérience de la gestion de l?eau. C?est pour cela que durant la réflexion qui est la nôtre, pouvoir aller voir ce que font nos voisins proches avec une géographie qui nous ressemble cela est très intéressant. Et il y aura quelques éléments qui vont j?espère être utile. » Qu?est-ce que vous avez fait sur place ? Qui avez-vous rencontré ? « J?ai commencé mon voyage en Flandre puis en Wallonie qui a été très touchée par un épisode très meurtrier avec des inondations très fortes en juillet 2021 avec près de 40 morts. Et il y a quelques jours j?étais aux Pays-Bas pour rencontrer différents niveaux qui ont la compétence en matière de gestion de l?eau. Le ministère des infrastructures et de la gestion de l?eau à La Haye par exemple, j?ai rencontré ensuite des autorités régionales de l?eau. Puis j?ai pu avoir un temps d?échange avec le commissaire du delta qui est une autorité indépendante nommée pour une longue durée et qui a pour objectif d?essayer de planifier et d?organiser les prévisions et l?adaptation du modèle de protection dans la durée et tenir compte des effets du changement climatique. Ce sont à la fois des réunions de travail, mais aussi des visites de terrain pour voir à la fois la manière dont ils s?organisent et comment ils ont cherché à adapter leur protection, leurs prévisions et la gestion des inondations. » PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 102/107 Qu?est-ce qu?il en ressort ? Qu?est-ce que vous en retenez ? « Dans les semaines qui arrivent je vais terminer le rapport. J?ai un déplacement prévu le vendredi 9 février en Flandre-Occidentale pour aller sur le terrain avec le gouverneur, notamment à Bruges et on va compiler ce que l?on a vu dans un rapport que je dois remettre au début du mois de mars à Christophe Béchu, le ministre de la Transition écologique. Il y a bien sûr des éléments qui vont concerner la gouvernance de l?eau. On voit notamment du côté des Pays-Bas, qu?il y a une volonté de pouvoir ajuster l?organisation à la réalité hydraulique et l?unité hydraulique. Les Pays-Bas avaient il y a quelques années près de 2 500 Wateringues qui sont devenus aujourd?hui 21 agences et autorités régionales de l?eau pour avoir des équipes importantes avec des budgets importants, qui sont beaucoup plus importants que les nôtres. Et puis, il y a des questions de pensée d?ensemble du système. Il y a une approche très systémique. Aujourd?hui, on se pose la question des équipements en bâtardeaux pour nos maisons. C?est une question qui ne se pose pas vraiment aux Pays-Bas parce que le système doit vous protéger dans son ensemble. S?il y a des bâtardeaux, ils sont plus structurels pour protéger un quartier ou pour protéger une rue, il n?y a pas un bâtardeau pour chaque maison. Il y a aussi une volonté aux Pays-Bas d?avoir ce commissaire du delta qui est une approche intéressante. Cela permet d?avoir quelqu?un qui a cette permanence qui est là plus longtemps que les élus ou que le gouvernement et qui a pour mission de rappeler l?importance de maintenir l?effort et de rappeler l?importance de toujours continuer à investir. Cela fait partie de quelques éléments parmi d?autres qui sont intéressants. » Et une fois ce rapport remis au ministre que va-t-il se passer ? « Ma partie est seulement une partie de tous les travaux. Tout ceci doit accompagner la réflexion générale et il faudra prendre un certain nombre de décisions. Il reviendra au Ministre et au gouvernement de les prendre. » France Bleu, 9 février 2024 https://www.francebleu.fr/emissions/l-invite-du-6-9-france-bleu-nord/comment-prevenir-les-inondations- francois-decoster-maire-de-saint-omer-pilote-une-mission-pour-y-repondre-9426555 Comment prévenir les inondations ? François Decoster, maire de Saint-Omer, pilote une mission pour y répondre Après les inondations à répétition des derniers mois dans le Pas-de-Calais, le maire de Saint-Omer a été missionné par Emmanuel Macron pour tenter de prévenir de futures crues. Pour cela, François Decoster a notamment été chez nos voisins européens. Il est l'invité de France Bleu Nord. Depuis novembre, François Decoster est chargé par Emmanuel Macron de trouver des solutions afin d'améliorer les systèmes d'évacuation d'eau et éviter de nouvelles crues dévastatrices en France et notamment dans le Pas-de-Calais. Le maire de Saint-Omer, qui disait vouloir avoir une approche européenne, s'est rendu notamment en Belgique, où il est d'ailleurs encore ce vendredi, et aux Pays-Bas. "Donner plus d'espace pour les rivières" Il retient de ses déplacement "qu'il faut s'organiser". "Il faut s'organiser pour que l'on ait une coordination qui soit fondée sur la réalité hydraulique." François Decoster ajoute qu'il "y a eu beaucoup de moyens aux Pays-Bas pour faire en sorte de rassembler les forces pour se donner plus de moyens et également pour pouvoir faire en sorte de mieux protéger face aux inondations." L'élu note aussi "qu'il y a tout un travail aussi sur la prévention." "Donner plus d'espace pour les rivières et préparer les moments où elles pourraient avoir besoin de plus de volume". Le maire note enfin qu'il y "a une culture du risque, une culture de la gestion de l'eau." Delta FM, 16 janvier 2024 Emmanuel Macron : " On continuera à vivre à Calais, Dunkerque et dans l'Audomarois " PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 103/107 Le Président de la République a pris la parole sur les inondations Dans sa longue conférence de presse, le Président de la République a évoqué les inondations et la situation dans le Pas de Calais suite à une question de nos confrères de la Voix du Nord. Dans un premier temps, Emmanuel Macron a rappelé le soutien de l'Etat et a annoncé le retour de son Premier Ministre, sur le terrain, à la fin de mois. Il a également promis tout le soutien de l'Etat dans des opérations de pompage, des travaux rapides et l'accélération de l'indemnisation en collaboration avec les assureurs. Emmanuel Macron sur les inondations : "On sera là" Pour l'après, alors que les scientifiques s'accordent sur une montée des eaux qui devrait refaçonner notre littoral, le Président rassure : " Il n'y a aucune fatalité. On continuera à vivre dans l'audomarois, à Dunkerque ou à Calais. On devra aussi repenser ce qu'on a parfois oublié. Avant, l'évacuation vers la mer se faisait plus facilement. Avant, on curait plus facilement, les installations étaient plus efficaces. Les normes ont parfois compliqué les choses, rendant certains opérations plus coûteuses. " Le Président de la République a réaffirmé avoir confié à François Decoster (maire de Saint-Omer), une mission sur le sujet, pour simplifier certaines démarches et être plus efficaces sur l'évacuation des eaux vers la mer. Pour Emmanuel Macron, quelques soient les efforts que l'ont fait, nous aurons à vivre les conséquences du déréglement climatique : "Nous allons devoir changer nos villes, nos villages. On va progressivement adapter nos paysages." Libération, 5 janvier 2024 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 104/107 Le Point, 4 janvier 2024 Inondations dans le Pas-de-Calais : « On se sent impuissants » Le département est en vigilance rouge pour crue, et orange pour pluies et inondations. Comme en novembre dernier, les communes se retrouvent démunies. Les mêmes scènes et la même détresse. Après les inondations de novembre, huit départements, la plupart localisés dans le nord et l'est de la France, sont en vigilance orange pluie-inondation depuis mardi 2 janvier. Parmi eux, le Pas-de-Calais, placé également en vigilance rouge crue. La rivière Aa, en crue « exceptionnelle » selon Météo-France, est particulièrement scrutée. Après une nuit de surveillance fébrile, les mairies de Blendecques et Saint-Omer s'organisent pour évacuer des habitants et évacuer le plus rapidement possible l'eau. « Plus rapide et brutal » « C'est un retour à la case départ ». Le maire de Saint-Omer, François Decoster, ne cache pas sa fatigue. La ville a l'impression de revivre, « comme un mauvais feuilleton », l'épisode pluvieux du 7 novembre, « en plus rapide et brutal ». « On est en train de battre des records, souligne l'édile, lors de la grande crue PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 105/107 centennale de 2002, le débit était à 57 m/s, nous en sommes actuellement à 80 m/s. » Dans les rues inondées, l'eau se transforme en torrent. Une situation très fatigante « physiquement et émotionnellement » pour les 14 000 habitants. La préfecture du Pas-de-Calais rappelle que les évacuations se font uniquement sur ordre. En attendant, les habitants doivent rester dans les étages de leurs habitations. En plus du personnel du SDIS 62 mobilisé, 120 sapeurs-pompiers supplémentaires ont été engagés. À cinq kilomètres de là, Jean-Christophe Castelain a passé la nuit les yeux rivés sur le site Vigicrues. L'adjoint au maire de Blendeques, qui dirige la cellule d'urgence, espérait que le niveau de l'Aa baisserait vers 23 heures. Las, la rivière est sortie à plus de 2 mètres du niveau de son lit. « Nous avons évacué une vingtaine de personnes dans la nuit vers une salle de la mairie, nous allons ouvrir la salle des sports, plus grande, pour accueillir plus de monde », détaille l'élu. Les évacuations des personnes âgées ou à mobilité réduite se font à dos d'homme ou par tracteur. Évacuer l'eau « On se sent impuissants, avoue Jean-Christophe Castelain, les sols sont gorgés d'eau, plus rien ne s'évacue. » L'évacuation de l'eau sera justement cruciale dans les prochaines heures. « Tout va dépendre de la force des précipitations, souligne le maire de Saint-Omer, les faibles coefficients de marée ne vont pas beaucoup nous aider non plus. » Des moyens de pompage sont également prévus. En tout, depuis le 7 novembre, 350 habitations de Saint-Omer ont été particulièrement touchées par les inondations. « Certaines personnes n'étaient toujours pas rentrées dans leur maison, les murs n'avaient pas encore séché », pointe l'élu. Avec le risque que ces phénomènes climatiques se répètent, une réflexion plus vaste va s'engager sur l'habitat dans un milieu tel que le marais audomarois. « La relation entre l'homme et le marais date d'un millénaire, les habitants y sont attachés », explique François Decoster. Ce dernier doit rendre en mars un rapport sur la question. Le Figaro, 2 janvier 2024 Alerte rouge aux inondations dans le Pas-de-Calais : pourquoi les rivières débordent-elles de nouveau ? DÉCRYPTAGE - Le département a été classé en vigilance rouge «crues» mardi. «Il est absolument indispensable de nous préparer» au dérèglement climatique, a lancé le maire de Saint-Omer, commune touchée de plein fouet par les inondations. Le nord de l?Hexagone vit ses premiers jours de l?an les pieds dans l?eau. La situation est alarmante dans le Nord et surtout dans le Pas-de-Calais, classé par Météo France en vigilance rouge «crues» mardi après-midi, alors que 15 litres d?eau sont tombés au mètre carré dans la nuit de lundi à mardi dans ce département. L?organisme évoque une «pluie continue et durable» sur la zone. Les cumuls de pluie pourraient atteindre des valeurs de 20 à 40 mm sur plusieurs zones du département, dépassant localement 40 mm, prévoit encore Météo France . Ces pluies fortes et abondantes perturbent les rivières, qui sont scrutées avec inquiétude par les habitants comme par les autorités. Huit cours d?eau sont placés en alerte orange «crues» dans le Nord et le Pas-de- Calais. Des risques de «débordements importants» dans les «prochains jours» sont à craindre à proximité de plusieurs rivières, la Liane, la Hem, l?Aa (classé en vigilance rouge «crues» par le site d?informations Vigicrues), la Lys amont-Laquette, la Lawe, La Clarence amont, la Lys Plaine et la Canche, écrit encore Vigicrues . Les sols saturés d?eau depuis novembre Une situation «exceptionnelle» qui s?explique par plusieurs facteurs, réagit Adam Beernaert, directeur général de la Protection civile dans le Pas-de-Calais. «Il pleut beaucoup, dans des délais très courts», détaille-t-il, sur des sols saturés d?humidité qui peinent à dégorger depuis les crues records du 6 novembre. Le Pas-de-Calais est victime de fortes inondations depuis maintenant deux mois. Ces crues exceptionnelles, qui avaient fait cinq blessés légers dans le département, ont causé d?importants dégâts matériels : 6000 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 106/107 habitations, 160 commerces, 130 entreprises et des dizaines d?exploitations agricoles avaient été touchés par les intempéries. Les nappes phréatiques «sont donc pleines d'eau» et débordent aux premières pluies : les eaux en surplus ruissellent vers les cours d?eau de la région, peu nombreux, qui débordent presque automatiquement. La géographie naturelle doit également être prise en compte : le département du Pas-de-Calais est plat. Le cours d?eau de l?Aa dans l?Audomarois (dans le nord-est du département) est même dix mètres en dessous du niveau de la mer, ce qui entrave l?évacuation des eaux, qui s?écoulent peu vers la mer du Nord. Dans cette région, l?Aa est en crue et inondait en début de semaine certaines rues des communes de Wizernes et de Blendecques. En parallèle, les marées à fort coefficient peuvent pousser les eaux des rivières dans le sens opposé à leur descente : l?eau rentre dans les terres, au lieu de se jeter dans la mer. Les systèmes d?évacuation des eaux peinent à tenir le coup face à de telles intempéries. «Les pompes et les digues ne sont pas calibrées pour endiguer des conditions climatiques si exceptionnelles», ajoute Adam Beernaert. «Pour tenir le coup, il faudrait élever de trois mètres les digues de franchissement d?eau sur les rivières qui sont actuellement à deux mètres dix», avance-t-il encore. Des propos corroborés par François Decoster, maire de la commune sinistrée de Saint-Omer. Ces «travaux supplémentaires» avec «des équipements à dimension» sont nécessaires pour affronter de telles catastrophes, détaillait-il le 3 janvier sur France Info, d?autant plus que ces inondations sont amenées à se multiplier «plus régulièrement et plus violemment» en fonction du dérèglement climatique. L?édile rappelle notamment les travaux menés à la suite des «crues historiques» de 2002 qui avaient occasionné 40 millions d?euros de dégâts. Ces constructions se révèlent pourtant «insuffisantes» 20 ans plus tard. «Il faut aller plus loin», a-t-il tonné, et il est «indispensable de nous y préparer très rapidement». Dans les faits, les bassins de rétention, qui «sont pleins en permanence» selon Adam Beernaert, débordent dès les premières gouttes de pluie. Les plus gros cours d?eau sont en crue en moyenne un à deux jours après les premières précipitations «et font à leur tour déborder les rivières et les fleuves». «Evacués six fois en deux mois» Des débordements qui mettent à rude épreuve le moral des habitants du département. «On sent de la colère et de l?épuisement », déplore Adam Beernaert, «avec des locaux qui ont été évacués cinq à six fois en deux mois». Certains avaient été relogés dès les premiers jours de pluie en novembre et n'avaient toujours pas remis les pieds dans leurs habitations aux premiers jours de 2024. Les murs des maisons n?ont pas le temps de sécher, les fondations des maisons s?érodent, l?eau et l?électricité sont coupées depuis deux mois dans certaines habitations. «Après le mois de décembre, on pensait que tout cela était derrière nous et là on a l'impression de revivre le même cauchemar», s?émeut encore le maire de Saint-Omer. Depuis le 6 novembre, 1200 bénévoles de la protection civile sont mobilisés dans le Pas-de-Calais pour assister les sinistrés, et 520 interventions ont été faites. «On est sur le pont en permanence depuis deux mois», explique le directeur. Une mobilisation qui est loin de diminuer : au vu des précipitations attendues sur le département en début de semaine, «les crues ne peuvent que s'aggraver», s'alarme Adam Beernaert. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 107/107 Annexe 7. Eléments de bibliographie AGUR, IIW, 2014, Les wateringues, hier et aujourd?hui, 66 p. Caisse centrale de réassurance, 2023, La prévention des catastrophes naturelles par le fonds de prévention des risques naturels majeurs, édition 2023, 59 p. Chambre régionale des comptes, 2023, « Syndicat mixte « Institution Intercommunale des Wateringues » » 48p. Commissariat spécial à la reconstruction, 2022, Un an après les inondations, bilan de la gestion post-inondations et continuité de la reconstruction, 102 p. CGEDD, 2019, Christian Barthod, Marie-Claire Bozonnet, François Scarbonchi, Évaluation du dispositif des programmes, d?actions de prévention des inondations (PAPI) et de l?efficacité de sa mise en oeuvre, Rapport CGEDD n° 012877-01, IGA n° 19053R, 112 p. DGCL, 2023 ? 04, La taxe Gemapi, une ressource en croissance pour les collectivités, bulletin d?information statistique n°174, 12 p. IGEDD, IGA, CGE, 2023, Olivier Diederichs, Philippe Louviau, Jean-Philippe Torterotot, Serge Catoire ? CGE, Retour d?expérience des inondations des 14 et 15 juillet 2021 ; 136 p. Parlement wallon, 2022, Rapport de la Commission d'enquête parlementaire chargée d'examiner les causes et d'évaluer la gestion des inondations de juillet 2021 en Wallonie, 894 (2021-2022) ? N° 1, 95 p. R. Slomp, 2012, Le cadre législatif et organisationnel de la gestion du risque d?inondation aux Pays- Bas, Audition au Sénat, Paris 29 mai 2012, Rijkswaterstaat, 78 p. R. Slomp, Y. Friaucourt, 2022, Les Pays-Bas face à la montée des eaux : quelle stratégie pour le long terme et comment répondre aux différents enjeux ? , Annales des mines, Juillet, numéro 117, pp.85- 89 PUBLIÉ Sommaire Liste des recommandations Introduction 1 Des inondations longues, liées à des pluies exceptionnelles, sur un territoire de polder 1.1 Des épisodes de pluie d?occurrence parfois centennale sur les sois humides du polder 1.2 Des inondations importantes et longues sur plusieurs bassins 1.3 Une implication historique forte dans la gestion de l?eau mais des évolutions récentes de nature à aggraver les inondations 1.3.1 Un système de drainage mis en place depuis le Moyen-âge 1.3.2 Une action structurée de l?Etat et des collectivités dans la prévention des inondations 1.3.3 Une gestion de l?eau qui mobilise de nombreux acteurs 1.4 Le climat change, le territoire aussi 1.5 Les questions soulevées à l?issue de ces épisodes d?inondation 2 Des similitudes avec les pays voisins qui font socle, des différences qui peuvent être inspirantes 2.1 Des axes d?action complémentaires et une implication de tous les niveaux 2.1.1 La prévention des inondations s?inscrit dans le cadre européen et le rythme et l?intensité de ses évolutions sont marqués par les grandes catastrophes 2.1.2 La prévention des inondations est partenariale par nature 2.1.3 La prévention des inondations prend le pas sur la protection à des rythmes différents selon les pays 2.1.4 La gestion de crise est organisée en fonction de la gravité de la catastrophe 2.1.5 Des coopérations sont une condition première de la prévention des inondations 2.2 Des différences dans le portage stratégique de la prévention des inondations 2.2.1 La capacité à faire de la prévention des inondations une priorité 2.2.2 La pondération des axes d?action 2.2.3 La posture en gestion de crise 2.2.4 L?engagement dans l?adaptation au changement climatique 3 Les actions et axes de progrès qui se dégagent 3.1 Croiser le retour des inondations de fin 2023 - début 2024 et les bonnes pratiques de nos voisins 3.1.1 Des leviers pour améliorer la gestion de crise 3.1.1.1 Organiser une participation accrue des élus à la gestion de crise 3.1.1.2 Mieux anticiper les moyens de pompage en crise 3.1.1.3 Expérimenter des dispositifs de participation citoyenne 3.1.1.4 Deux pistes concrètes pour poursuivre et renforcer un travail permanent sur la culture du risque 3.1.2 Etablir un diagnostic partagé de l?état des cours d?eaux, canaux, fossés 3.2 Renforcer le portage de la prévention par les collectivités locales compétentes 3.3 Anticiper les modalités du relèvement et l?accompagner par une structure spécifique 3.4 Renforcer les coopérations transfrontalières 3.5 Installer une institution stratège et pérenne, au plus haut niveau de l?Etat, pour orienter et soutenir l?adaptation au changement climatique 3.5.1 Structurer le portage politique de l?adaptation au changement climatique au plus haut niveau 3.5.2 Une action à lancer : représenter l?inondation et informer 3.5.2.1 Une carte des provinces, qui offre une information localisée sur tous les risques (avec un accès dans différentes langues dont le Français) 3.5.2.2 Des outils de communication pour former aux comportements qui sauvent Conclusion Annexes Annexe 1. Lettre de mission Annexe 2. Agenda des déplacements et liste des personnes rencontrées Annexe 3. La prévention des inondations aux Pays-Bas Annexe 3.1. Les catastrophes, moments fondateurs des politiques de prévention contre les inondations Annexe 3.2. Des protections des premiers Plans Delta au Commissaire du Delta Annexe 3.2.1 La défense contre la mer Annexe 3.2.2 La protection contre les inondations fluviales Annexe 3.2.3 L?articulation avec la place pour le fleuve, et le changement de cap opéré dans le contexte du changement climatique Annexe 3.3. Organisation de la prévention des inondations Annexe 3.3.1 Une gestion de l?eau et du risque intégrée à l?échelle ministérielle Annexe 3.3.2 Une organisation spécifique pour la gestion de l?eau aux échelons territoriaux Annexe 3.3.3 Un financement des protections et de la prévention organisé dans une logique de subsidiarité Annexe 3.4. Une gestion de crise fondée sur des principes clairs et partagés Annexe 3.5. De la prévention des inondations à l?adaptation au changement climatique Annexe 4. La prévention des inondations en Belgique Annexe 4.1. Mise en perspective historique et géographique Annexe 4.1.1 Un pays présentant des enjeux différenciés du point de vue de la prévention des inondations Annexe 4.1.2 Des enjeux transfrontaliers majeurs Annexe 4.2. La gestion de l?eau dans le système fédéral belge Annexe 4.2.1 Le rôle important des régions Annexe 4.2.2 Une organisation de la gestion de crise par niveaux de gravité Annexe 4.2.3 Un système assuranciel présenté comme fragile Annexe 4.2.4 Le choc des inondations de juillet 2021 Annexe 4.3. Les Flandres : une structuration par grand bassin, en cours d?inflexion Annexe 4.3.1 L?équilibre entre protection et aménagement du territoire Annexe 4.3.2 L?adoption de nouveaux grands plans structurants Annexe 4.4. La Wallonie : le choc des inondations de juillet 2021 Annexe 4.4.1 Quelques éléments sur le cadre général de la prévention des inondations Annexe 4.4.2 Mise en place d?un dispositif spécifique de reconstruction Annexe 5. Rapport de la Commission d?enquête parlementaire chargée d?examiner les causes et d?évaluer la gestion des inondations de juillet 2021 en Wallonie du 22 mars 2022 Annexe 6. Revue de presse Annexe 7. Eléments de bibliographie INVALIDE) (ATTENTION: OPTION présente plusieurs avantages : elle s?appuie, comme cela a été fait en France depuis la création des Agences de l?eau en 1964, sur les bassins versants ; elle est intégratrice de trois composantes majeures : urbanisme, compétence historique des collectivités locales, gestion des milieux aquatiques, prévention des inondations. En revanche, la gouvernance et les solidarités nécessaires ne se construisent que progressivement, et les organisations qui en résultent sont également parfois complexes. 2.2.2 La pondération des axes d?action - La prise en compte de l?urbanisme dans la prévention des risques d?inondation est plus ancienne et plus structurée en France. Les PPRi, établis par l?Etat, après concertation, sont des servitudes d?utilité publique qui s?imposent à l?urbanisme. Ils visent à empêcher une augmentation des enjeux dans les zones les plus exposées, et prescrire des mesures de réduction de la vulnérabilité dans les zones exposées. Dans ce cadre, un accompagnement financier des territoires est mis en place, priorisé sur les territoires les plus exposés qui sont ceux qui donnent lieu à des PPRi, et conditionné à un programme de prévention mené à l?échelle des bassins versants. En France, on considère que, dans le long terme, une digue est toujours faillible et qu?un ouvrage de protection ne peut se justifier PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 29/107 pour un aménagement nouveau, mais uniquement pour protéger l?existant34. Aux Pays-Bas l?interdiction de construire concerne uniquement les espaces entre le cours d?eau et la digue, et derrière les digues (ce qui est également le cas en France). Les règles de construction font, par ailleurs, référence à des obligations génériques de stabilité dont le respect relève du maitre d?ouvrage ; les maisons flottantes sont construites « aux risques et périls des habitants ». Les différences d?approche historiques peuvent sans doute s?expliquer par des contraintes spatiales et des densités différentes. En Belgique, comme aux Pays-Bas, des cartes d?aléa existent ou sont en cours d?élaboration, qui relèvent d?une démarche de porter-à-connaissance, voire d?information acquéreur locataire, telle qu?elle existe en France 35. Encadré 8 : Des systèmes assuranciels très différents Le système d?assurance est plus protecteur en France, où l?assurance contre les inondations est liée à l?assurance habitation, avec une surprime obligatoire, qui permet, en cas de catastrophe majeure, une prise en charge par l?assurance et par la réassurance. Le système français apparait ainsi comme marqué par un niveau de solidarité plus important en France qu ?en Belgique et aux Pays-Bas. Cela soulève deux types de questions différentes : - un effet parfois peu incitatif à ne pas s?exposer ; - une évolution possible de ce système dans le contexte de catastrophes répétées, avec des primes modulées ou des risque nouveaux de refus d?assurance. C?est un sujet de forte préoccupation des collectivités locales et des habitants En juillet 2022, le gouvernement de la région wallonne communiquait dans les termes suivants : « Dès le lendemain de la catastrophe le Gouvernement a négocié avec les compagnies d ?assurance pour permettre aux personnes sinistrées assurées de bénéficier d?une indemnisation complète en fonction des clauses de leur police d?assurance et des accords avec les experts. Une loi fédérale permet en effet aux assureurs de limiter les indemnisations versées aux sinistrés en cas de catastrophe de grande ampleur. Dans le cas des inondations de juillet dernier les assurés n?auraient touché que 20% du montant des dégâts estimés par leur assureur. A la lumière du drame humain que représentaient les inondations le Gouvernement a décidé d ?accomplir un effort financier sans précédent d?un milliard d?euros pour permettre l?indemnisation complète des personnes sinistrées assurées. Après négociation, les assureurs ont quasiment doublé leur plafond d?intervention. C?est ainsi qu?à ce stade les assureurs interviennent à raison de 41% et le Gouvernement à raison de 59%. » Les personnes qui n?étaient pas assurées ont reçu l?aide d?un « fonds des calamités », mis en place par le gouvernement pour éviter à tout prix qu?une partie de la population non assurée ne tombe dans la précarité totale. » Aux Pays Bas, l?opérateur (RVO) chargé d?indemniser les victimes publiait en juillet 2022 le bilan suivant : « Exactement 1 an après les fortes pluies et inondations dans le Limbourg et le Brabant du Nord en juillet 2021 nous avons déterminé 1 518 demandes de victimes. Plus de 34 millions d'euros ont été versés dans le cadre du programme WTS de juillet 2021. » « L'assurance volontaire contre les dommages causés par les inondations de la mer et des rivières aux habitations a été proposée dans des produits successifs entre 2012 et 2020 par un assureur (Pays-Bas). Le porteur de risque s'est depuis retiré et il n'existe actuellement aucun assureur aux Pays-Bas qui offre une assurance contre les inondations d'origine maritime et fluviale (percée des défenses primaires contre les inondations) à l'exception des produits destinés à un certain nombre de multinationales et à quelques particuliers très fortunés. L'Association néerlandaise des assureurs indique que cela est dû à une sensibilisation insuffisante (les Néerlandais se sentent relativement en sécurité) à l'anti-sélection et au risque d'accumulation. » Les interlocuteurs administratifs de la mission lui ont confirmé que les dégâts liés aux inondations n?étaient indemnisés que par des fonds publics, que la mise en oeuvre de tels fonds était décidée au cas par cas par le gouvernement et qu?un principe 34https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Modalit%C3%A9s%20d%E2%80%99application%20du%20d%C3 %A9cret%20PPRi%20%E2%80%93%20Novembre%202019.pdf 35 https://www.google.com/search?client=firefox-b-e&q=ERRIAL PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 30/107 général était que l?indemnisation ne couvre pas la totalité des coûts, afin d?inciter à la prudence ceux qui construisent ou résident en zone inondable36. - Dans la suite de la « Water Bomb » de juillet 2021, le gouvernement de Wallonie a mis en place une équipe projet « agile », afin de gérer au mieux les réponses immédiates à la catastrophe et la préparation d?un urbanisme plus résilient qui n?a pas encore d?équivalent en France. Le Commissariat spécial à la reconstruction a été mis en place dès le 26 juillet 2021. Cette équipe pluridisciplinaire d?une dizaine de personnes a été mobilisée pendant un an pour répondre de manière pragmatique aux besoins des 3 grands bassins versants belges sinistrés, en particulier la vallée de la Vesdre. Il s?agissait d?avoir des réflexions sur des aménagements adaptés à la situation. Le Commissariat spécial à la reconstruction n?est pas une autorité mais un ensemblier. C?est une cellule placée auprès du président du gouvernement wallon, ce qui lui donne du poids. Des enjeux forts ont été la gestion de la temporalité entre l?urgence (aide à la réparation, avec un soutien public pour ce qui n?était pas couvert par les assurances) après crise et la reconstruction résiliente, ou encore la priorisation pour cibler l?action sur les neuf communes les plus touchées. Il s?agissait, selon les termes des personnes rencontrées, de réfléchir avant de reconstruire, sans empêcher les mesures immédiates qui donnent du « confort ». Le travail a porté aussi sur la trame agricole, les haies, le sens du labour, le couvert forestier, qui impactent la gravité des inondations. - La gestion des fossés, canaux, cours d?eau diffère dans les trois pays. Si en France, la responsabilité des riverains est affirmée, dans une logique d?association de tous les intéressés à la gestion de l?eau, les Pays-Bas ont explicitement dissocié propriété et gestion ? celle-ci étant, le plus souvent confiée à un opérateur, sans exclure, par exemple pour les wateringues, que des agriculteurs en prennent en charge une partie. Les comparaisons quant aux doctrines et modalités de gestion sont difficiles, compte tenu de la limite ténue entre entretien et curage. Pour autant, il ressort qu?en Flandre comme au Pays-Bas, les modalités de gestion dépendent toujours de l?objet visé, avec une différence possible entre ce qui est navigable et ce qui ne l?est pas, et donnent lieu à une préparation d?ensemble (guides d?entretien territoriaux) et à des interventions régulières. Ces programmes sont assurés et financés par les riverains, le cas échéant sous contrôle de l?autorité compétente pour la gestion de l?eau, sauf pour les infrastructures majeures. 2.2.3 La posture en gestion de crise - Des points de différence dans la gestion de crise, dans les modalités d?anticipation, de communication et dans la place des élus locaux d?une part, de bénévoles d?autres part. Aux-Pays-Bas, compte tenu du rôle majeur des digues dans la protection, des vérifications et manoeuvres spécifiques sont nécessaires en prévision d?épisodes de crue intense. L?ensemble de ces actions prennent habituellement 5 jours de travail. De ce fait, un préavis fixe est demandé aux services de prévision météorologique et de prévision des crues. En France, c?est le système des vigilances qui permet non seulement l?information du public mais aussi celle des services de gestion de crise de l?Etat, sans exclure des échanges informels, mais qui ne relèvent pas d?un cadre systématique. « La communication est une partie essentielle de la gestion de crise ». Les témoignages de gestion de crise, en Belgique comme aux Pays-Bas, soulignent l?importance de partager des règles claires de communication qui se résument aux principes suivants : c?est l?autorité qui gère la crise qui communique, les autres autorités étant les porteuses d?une démultiplication des informations ainsi diffusées ? ce qui suppose qu?elles en disposent régulièrement et facilement. L?accent est mis aussi sur la nécessité d?une veille sur les rumeurs (sur les réseaux sociaux en particulier) pour y apporter des réponses rapides. C?est aussi un des points de recommandations du rapport parlementaire après les crues de Wallonie. Un corollaire de cette approche est, en Belgique comme aux Pays-Bas, une association étroite 36 IGEDD, 2023 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 31/107 des élus locaux à la gestion de crise ? y compris par leur accès, en lecture au moins, aux systèmes d?information de gestion de crise. Aux Pays-Bas, ce sont les autorités régionales de l?eau qui sont associées à la gestion de crise des inondations. Enfin, certaines autorités régionales de l?eau, aux Pays-Bas, recourent à des bénévoles, qui constituent un réseau de plusieurs milliers de personnes, pour la surveillance des digues mais aussi, conjointement avec leur personnel administratif, pour la fermeture de certains batardeaux et pour le renforcement de digues en cas d?urgence (sacs de sable). Pour la préparation aux situations de crise mais aussi pour l?inspection des digues, des formations sont prodiguées par les autorités régionales de l?eau en mobilisant le cas échéant des entreprises qualifiées. Cette démarche, qui est recommandée en Wallonie, dans le rapport postérieur aux inondations de juillet 2021, présente de nombreux intérêts, à commencer par la mobilisation de soutiens formés en période de crise, mais également, au long des années, des occasions de travail en réseau entre autorités et ainsi de soutien à la culture du risque dans la population. La mobilisation de volontaires pour la surveillance des digues, réunis une fois par an, est un vecteur de sensibilisation de la population au comportement de ces ouvrages et à leurs limites. Aux Pays-Bas, un des retours d?expérience de la crise de juillet 2021 a été de réaffirmer la nécessi té que les informations météorologiques soient interprétées par l?autorité compétente pour la gestion de l?eau, seule habilitée à recommander aux municipalités l?évacuation (principe de « point unique d?alerte ») ; cela afin d?éviter les évacuations superfétatoires non éclairées. 2.2.4 L?engagement dans l?adaptation au changement climatique - Une première approche de l?adaptation au changement climatique est l?articulation d?enjeux comme la gestion mieux articulée des risques d?inondation et de sécheresse. Elle apparait hétérogène et, dans l?ensemble, non stabilisée. Aux Pays-Bas, les inondations de novembre 2023 ont à nouveau posé la question : au lieu d?évacuer le plus vite possible l?eau à la mer, un nouvel enjeu, au regard des risques de sécheresse, ne serait-il pas de la retenir ? Le premier moyen pour cela identifié aux Pays-Bas est l?infiltration dans les sols et la recharge des nappes, et non la création de bassins de rétention, qui, de toutes façons sont difficiles à gérer car ils ont potentiellement deux objectifs considérés comme non compatibles (en fonction des saisonnalités des événements et des enjeux en présence) : écrêter les crues et retenir l?eau pour en disposer l?été. En Flandre, la visite de la zone d?expansion des crues de Blanckaert a illustré le fonctionnement d?une immense zone, qui n?a pas vocation à garder l?eau pour l?été. En Wallonie, ont été évoquée les limites d?une approche de rétention de l?eau qui a finalement peu d?impact sur des crues importantes, et apporte peu de réponse au regard des besoins en eau, notamment de certains sites industriels gros consommateurs. - De manière plus structurelle, le travail d?adaptation repose sur la structuration de démarches organisées et pilotées d?anticipation des changements à venir et des mesures à prendre, dans un calendrier réfléchi et partagé. L?adaptation au changement climatique, en France, passe par la réalisation régulière du Plan national d?adaptation au changement climatique (PNACC)37 qui liste des actions à mener, mais n?est pas nécessairement identifié par les élus locaux ou le grand public comme dégageant des lignes stratégiques fortes claires et partagées, comme a pu le faire, sur le seul sujet de la prévention des inondations, la Stratégie nationale de gestion des risques d?inondation (SNGRI) après Xynthia. 37 La Stratégie nationale d?adaptation au changement climatique exprime le point de vue de l?État sur la manière d?aborder la question de l?adaptation au changement climatique. Cette stratégie a été élaborée dans le cadre d?une large concertation, menée par l?Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique (ONERC), impliquant les différents secteurs d?activités et la société civile sous la responsabilité du délégué interministériel au développement durable. Elle a été validée par le Comité interministériel pour le développement durable réuni le 13 novembre 2006 par le Premier ministre. La France s?est dotée en 2011 de son premier Plan national d?adaptation au changement climatique (PNACC) pour une période de 5 ans. Le 3ème devrait être approuvé en 2024. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 32/107 Encadré 9 : La Stratégie nationale de gestion des risques d?inondation (SNGRI) Face au bilan catastrophique des inondations en Europe, notamment les grandes crues de l?été 2012 en Europe centrale et du printemps 2013, le gouvernement a adopté en 2014 la Stratégie nationale de gestion des risques d?inondation. Elle poursuit trois objectifs prioritaires, dont l?atteinte par les différents acteurs est à analyser sur le long terme, à 20 ou 30 ans par une mise en oeuvre progressive, en conduisant une évaluation quantifiée des performances actuelles et futures. ? Augmenter la sécurité des populations exposées ? Stabiliser à court terme, et réduire à moyen terme, le coût des dommages liés à l?inondation ? Raccourcir fortement le délai de retour à la normale des territoires sinistrés Les principes directeurs au service des objectifs sont le principe de solidarité, le principe de subsidiarité et de synergie des politiques publiques, et le principe de priorisation et d?amélioration continue. Les quatre défis à relever sont : ? Développer la gouvernance et les maîtrises d?ouvrage ? Aménager durablement les territoires ? Mieux savoir pour mieux agir ? Apprendre à vivre avec les inondations. En Belgique, des travaux importants et de natures différentes ont été organisées après la « water bomb » : en Wallonie, le cadre est donné par le rapport parlementaire qui comporte 161 recommandations (annexe 7). En Flandre, à la suite de ces inondations, le gouvernement a souhaité revoir la prévention des inondations sur son territoire en cas d?épisode météorologique aussi grave. Le travail pluridisciplinaire, dont le pilotage a été confié à un universitaire néerlandais, a conduit à l?avis « Résilient Waterland » qui comporte dix recommandations, que, de fait, apparaissent comme le passage de la prévention des inondations à l?adaptation au changement climatique. Ce travail apparait également, dans les échanges, comme de nature à faciliter de mobilisation collective en temps utile, et notamment dans la suite des inondations de 2023, pour mettre en place dans des délais courts, les suites adaptées à cette crise. Les Pays-Bas sont engagés depuis le début des années 2000 dans des travaux sur leur adaptation au changement climatique. « Nous vivons dans un delta, nous devons nous adapter continuellement », « La stratégie pour les siècles à venir repose sur deux piliers : la protection contre les inondations et la durabilité », ou encore « Le choix d?accepter l?eau comme une opportunité et non plus comme une menace est fait, soit un changement radical dans la philosophie de ce pays conquis par la pelle et la sueur. » Le Commissariat au Programme Delta, historiquement tourné vers les grands travaux d?infrastructure, puis peu à peu également vers ceux visant à redonner de la place aux cours d?eau, a connu une nouvelle étape à partir de 2012 avec la création du Commissaire du Delta dont les travaux visent l?anticipation du changement climatique, dans une démarche stratégique, de planification spatiale, et une approche partenariale. Il s?agit de travailler sur les limites que nous donne la nature, limites qui sont atteintes. Une priorité identifiée depuis 2021 est de mieux prendre en compte l?eau et les sols. Cela a été porté par le gouvernement entré en fonction en janvier 2022, puis a donné lieu à une stratégie gouvernementale transmise au parlement en date du 25 novembre 2022, présentant les actions prévues en grandes lignes, à une revue scientifique, et à des discussions avec tous les niveaux de gouvernement. Encadré 10 : ce qu?un expert néerlandais propose de retenir dans un processus de parangonnage38 « Les Pays-Bas sont souvent mis en avant en raison de leurs prouesses techniques dans le domaine de la maîtrise de l?eau. Mais celles-ci sont le résultat de siècles d?évolution et d?un profond ancrage de cette question dans la culture néerlandaise. Elles sont également spécifiques de la géographie et des enjeux propres à ce pays et, de ce fait, ne sont pas forcément adaptées pour pouvoir être exportées telles quelles dans d?autres pays. (?) Le risque d?inondation est très présent dans l?inconscient collectif néerlandais depuis des siècles ; la maîtrise de ce risque est acceptée, car elle constitue un enjeu fondamental de la survie même du pays. De ce fait, des mesures ont été prises pour lui donner une place spécifique dans les processus décisionnels, qui la met à l?abri des aléas et des contraintes politiques. 38 R.Slomp Y. Friocourt, 2023, Quelles leçons peuvent tirer les autres pays de l?exemple des Pays-Bas ? Annales des mines 107. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 33/107 Par ailleurs, la société et le modèle politique néerlandais reposent fortement sur le principe du compromis, ce que l?on appelle le « modèle du polder » : avant qu?une décision soit prise, il est important que les opinions des uns et des autres soient attentivement écoutées, afin de pouvoir prendre la décision qui causera le moins de frictions. Ce modèle ne facilite pas la rapidité dans la prise de décision, mais il permet à chacun de se sentir écouté et respecté. Appliqué dans le domaine de la maîtrise de l?eau, il encourage chacun à essayer de trouver des solutions techniques pratiques, qui respectent les différents enjeux, et de mise en oeuvre très décentralisée. Cette approche marquée par la lenteur nécessite d?anticiper, de se poser le plus tôt possible des questions fondamentales, sans forcément y apporter de réponse immédiate. Et cela est spécifiquement le but du programme de recherche portant sur les conséquences de la hausse du niveau de la mer : il n?est pas question de trouver immédiatement des mesures qui mettront les Pays-Bas directement à l?abri de ce risque, mais plutôt de comprendre jusqu?à quand les principes de base actuels de la gestion sont tenables et quelles options sont possibles pour le futur. Par la suite, chaque direction identifiée sera étudiée plus en détail et fera l?objet d?études d?impact et de consultations publiques, avant que des décisions ne soient prises. Et chaque nouvelle inondation ou épisode de sécheresse inattendus apporteront leur lot de découvertes et de déconvenues qui seront, elles aussi, intégrées dans le processus décisionnel. De plus, la pérennité des solutions aux Pays-Bas est indéniablement interdépendante des choix que les pays voi- sins pourront faire, particulièrement dans les bassins versants des fleuves Rhin, Meuse et Escaut. L?adaptation au changement climatique ne se fera que via la collaboration internationale et le soutien actif de la société tout entière, chacun dans son domaine de compétence. Les autorités nationales et locales peuvent définir des principes de base et des réglementations, mais ce sont les citoyens et les entreprises qui, finalement, vont décider ou non d?accepter un risque et de participer à l?effort com- mun. Dans les régions où le risque d?inondation existe depuis des générations, cette volonté est déjà présente dans l?inconscient collectif. Mais pour les habitants des autres régions, il est important de les éduquer et de leur en expliquer les raisons, afin de rendre chacun d?eux partie prenante dans l?appréhension du problème et surtout dans l?élaboration des solutions y répondant. L?allocation structurelle de budgets pérennes en est un ingrédient essentiel. La croissance économique progressant beaucoup plus rapidement que la période de réfection des milliers de kilomètres de digues qui dure typiquement trente à quarante ans, on estime que le risque d?inondation aux Pays-Bas est resté à peu près constant en termes financiers depuis 1953, la dernière inondation catastrophique enregistrée. Cela suggère a contrario que ce risque pourrait avoir fortement augmenté dans les pays qui n?ont pris aucune mesure particulière et prouve ainsi l?ampleur du défi qui nous attend ». PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 34/107 3 Les actions et axes de progrès qui se dégagent Les comparaisons avec nos voisins offrent l?occasion de constater que, dans un cadre commun donné par les directives européennes, et parfois le vécu des mêmes catastrophes quoique d?amplitudes différentes, chaque Etat, ou région, a construit une prévention des inondations qui fait système avec des avancées sur différents points. Les pistes d?amélioration qui en ressortent sont de natures différentes : celles qui tiennent à des actions ponctuelles, de nature à renforcer des démarches en cours, et celles qui sont plus structurelles. Dans certains cas, les territoires touchés par les inondations de 2023 pourraient être expérimentateurs, en vue d?une diffusion des bonnes pratiques identifiées ailleurs sur le territoire national. 3.1 Croiser le retour des inondations de fin 2023 - début 2024 et les bonnes pratiques de nos voisins 3.1.1 Des leviers pour améliorer la gestion de crise 3.1.1.1 Organiser une participation accrue des élus à la gestion de crise - Identifier le niveau de participation pertinent ? entre EPCI et EPTB et structurer une participation efficace à la gestion de crise avec comme axes de travail : - le développement de dispositifs de surveillance du réseau et de systèmes d?information partagés, en interface avec les autorités préfectorales gestionnaires de la crise, - la participation, proportionnée, organisée et anticipée de ces élus ou de leurs services à la gestion de crise ? avec par exemple l?accès en lecture aux informations continues, la participation à des exercices telle que prévue dans les circulaires du ministère de l?intérieur?. Cet axe de travail peut être lié à des dispositifs de formation des élus renforcés. - l?amélioration des protocoles de communication pour répondre aux attentes des populations aux plus près du terrain, et éviter les rumeurs. Recommandation 1. : Proposer une place réelle pour des élus dans la gestion de crises inondation, notamment au sein des cellules de crise, dans le partage de la vision globale de l'information sur le la gestion des événements liés à la crise et des données sur l'ensemble du territoire en crise (travail à mener sous pilotage de la DGSCGC en lien avec les préfectures, des représentants des EPTB, des EPCI et des maires, en lien avec la DGPR d?ici fin 2024, pour préciser la feuille de route et engager les premières actions). 3.1.1.2 Mieux anticiper les moyens de pompage en crise Si les dispositifs de pompage pérennes et de secours semblent très organisés aux Pays-Bas, le retour d?expérience des crues de 2023 en France comme dans en Flandre a témoigné d?une capacité à mettre en place et déployer dans les meilleurs délais des dispositifs qui n?étaient pas prévus au niveau requis. Dans la suite de ce déploiement, il parait nécessaire que le re tour d?expérience conduise à : - intégrer ce qui a été efficace dans les plans Orsec, et compléter ce retour d?expérience, si nécessaire, avec d?autres scénarios de crises ; - identifier les infrastructures requises ? plates-formes, apports d?énergies, les éventuels travaux PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 35/107 structurels à mener, et à identifier ce qui relève de l?axe gestion de crise des PAPI et ce qui relève des moyens des SDIS, et de ceux de la sécurité civile ; - prévoir dans la programmation nationale les pompes de secours utiles à l?échelle nationale. Recommandation 2. : Evaluer et revoir en profondeur le schéma d?évacuation à la mer des crues extrêmes, par voie gravitaire et par pompage, notamment par la mise en place d?un système de pompage de renfort efficient pour ces inondations dans le delta de l?Aa, travail à mener sous l?égide de la préfecture du Pas-de-Calais, avec les Syndicats mixtes concernés et le conseil départemental, d?ici l?automne, pour préciser la feuille de route et engager les premières actions avant l?hiver. 3.1.1.3 Expérimenter des dispositifs de participation citoyenne Des dispositifs de mobilisation citoyenne, comme il en existe en Belgique et aux Pays-Bas, préparés et animés à l?avance, participent de l?efficacité de la gestion de crise et contribuent à la culture du risque (cf : supervision de l?état des digues, rapport IGEDD) 39. Ils demandent un travail spécifique, notamment si les bénévoles ont vocation à être mobilisés en crise (assurances). Recommandation 3. : Expérimenter une participation citoyenne à la gestion de crise, sur la base de réseaux de volontaires formés, travail à mener sous l?égide de la DGSCGC en lien avec l?AMF, sous un an, et développer la culture du risque pour les populations des territoires impactés, notamment par une appropriation des gestes et des réflexes en situation de crise. 3.1.1.4 Deux pistes concrètes pour poursuivre et renforcer un travail permanent sur la culture du risque Chacun des Etats met en avant la nécessité de travailler en permanence la culture du risque. Il y a aussi un accord sur la période spécifique de sensibilisation que représentent les mois qui suivent une inondation. Au regard des actions menées dans les pays voisins, deux actions méritent attention : Il a été souvent constaté à la fois une incompréhension des événements inattendus que sont les inondations majeures, et la nécessité d?appréhender les nécessaires solidarités pour la gestion de l?eau à l?échelle des bassins versants. Dans la suite des crues de Wallonie, a été organisée une démarche d?explication du phénomène, de la manière dont il a été géré, et des suites envisagées. Recommandation 4. : Organiser sur les principaux bassins versants du Pas-de-Calais des séminaires de retour d?expérience des inondations, sous l?égide des préfets, en lien avec les élus locaux, à l?été 2024, quelques mois après la sortie de crise. Dans la suite des crues de Wallonie, la question a été posée, en Flandre, de ce que cette pluie aurait donné sur son territoire. Les exercices de stress test, y compris dans une démarche 39 Le rapport de l?IGEDD de 2023 consacré au retour d?expérience des crues de juillet 2021 cite par exemple le séminaire qui s?est tenu à Longuyon, pour le bassin de la Chiers (Haut pays meurthe-et-mosellan, secteur de Longwy). PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 36/107 transfrontalière, sont à la fois un moyen d?objectiver les risques inhérents au changement climatique et de s?exercer. Recommandation 5. : Prévoir dans le calendrier des exercices nationaux, une démarche de stress test, sur la base par exemple d?un scénario de type « water bomb », sous l?égide de la DGSCGC. 3.1.2 Etablir un diagnostic partagé de l?état des cours d?eaux, canaux, fossés La question de l?état des fossés, canaux, navigués ou non, voire cours d?eau a été au coeur de nombreuses discussions dans le Pas-de-Calais, centrées sur des demandes de simplifications ou de moyens financiers de rattrapage, mais qui ont fait également ressortir un manque de connaissance des responsabilités, de vue d?ensemble, de doctrines partagées sur l?utilité et les inconvénients potentiels des différents types d?intervention, voire de moyens adaptés. Dans les pays voisins, il existe des plans d?entretien, adaptés aux différentes situations. Une fois passée la phase de curages et entretiens requis après la crise, une vue d?ensemble et une programmation d?interventions nécessaires semblent se justifier, qui permettront aussi de calibrer les moyens requis. Recommandation 6. : Etablir un état global des lieux des fossés, canaux, cours d?eau, berges et digues en associant les parties prenantes, évaluer et revoir la périodicité et l'organisation des contrôles des obligations de leur entretien et évaluer toutes les options favorisant l'évacuation gravitaire de l'eau à la mer, y compris les canaux ne présentant plus d'utilité pour la navigation, en vue d?établir un programme pluriannuel de suivi et d?entretien. Un travail préalable, sous pilotage de la DREAL de bassin Artois Picardie, sera nécessaire pour préciser les modalités de cette démarche. Assurer une veille régulière de l'état de ces infrastructures, le cas échéant en y associant des citoyens volontaires formés à cet effet. Etablir un état des lieux suppose un travail préalable de méthodologie : à quelle échelle le mener, selon quelles modalités ? à quelle fréquence le mettre à jour ? comment partager les résultats ? Cet état des lieux pourrait concerner la cartographie, le fonctionnement hydrologique, les actions prévues dans des SAGE, des PAPI, contrats d?objectifs ou protocoles, le niveau d?entretien attendu, la partage des informations, la communication, l?évaluation des moyens requis ? . 3.2 Renforcer le portage de la prévention par les collectivités locales compétentes En France, la mise en place de la Gemapi conduit à organiser la gestion des enjeux liés à l?eau à l?échelle de territoires hydrologiquement pertinents, par transfert ou délégation de compétences à des syndicats intercommunaux. Sur les territoires impactés par les inondations de novembre 2023, se pose la question de leur taille critique, soit au regard de la taille des équipes et des moyens requis pour une action efficace, soit au regard du fonctionnement des bassins versants. Une meilleure structuration apparait comme un « pré requis » à un accélération de l?action, qui ne peut venir que des élus locaux, le cas échéant sous l?impulsion du préfet coordinateur de bassin. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 37/107 Elle devra aller dans le sens de la simplification et de la lisibilité, y compris dans l?articulation des structures gemapiennes avec les sections de Wateringues et contribuer à une meilleure mobilisation des moyens financiers prévus, dans une logique de solidarité. Sans aller jusqu?à l?intégration complète néerlandaise, peut-être non adaptée au contexte français, d?éventuelles évolutions peuvent viser une meilleure association de toutes les parties prenantes et des financeurs potentiels. Les parties impliquées, au regard de l?exemple néerlandais, pourraient également intégrer la nécessité d?un portage politique coopératif et fort des enjeux de gestion de l?eau. Recommandation 7. : S?appuyer sur la mission des inspections en cours sur la gouvernance pour rendre plus robuste et efficace la mise en oeuvre de la Gemapi dans les bassins versants touchés par les inondations, dans ses aspects organisationnels et financiers, afin de gagner en simplicité, lisibilité et efficacité, et créer une approche opérationnelle cohérente de l?amont jusqu?à l?aval. 3.3 Anticiper les modalités du relèvement et l?accompagner par une structure spécifique Un Commissariat spécial à la reconstruction a été mis en place auprès du gouverneur de Wallonie après les crues de Wallonie. En France, après des catastrophes, un préfet ou un sous-préfet peut être mobilisé en position de chef de projet de la période post-crise, ce qui facilite les réponses immédiates, sans toutefois aller jusqu?à faciliter une stratégie de reconstruction résiliente, portée par les acteurs locaux. Recommandation 8. : Dans la suite des inondations de novembre 2023, mettre en place une structure technique spécifique de relèvement (commissariat de la reconstruction doté d'une équipe pluridisciplinaire et placé auprès d'une autorité politique), dans le cadre d?une expérimentation : pour une durée pertinente, de l?ordre de plusieurs mois, elle apporte aux préfets et à leurs services un soutien opérationnel au relèvement, pour intégrer la réduction de la vulnérabilité dans tout l?aménagement du territoire. Si l?expérimentation est réussie, cette structure a vocation à être pérennisée pour capitaliser du retour d'expérience et être mobilisée rapidement en gestion post-catastrophe dans le futur dans tout le territoire national. 3.4 Renforcer les coopérations transfrontalières En raison des inondations exceptionnelles dans les Flandres intérieures en novembre 2023, sur sollicitation du gouverneur des Flandres, le dispositif et les ouvrages du projet MAGETEAUX ont été activés pour évacuer un maximum d?eau via le canal de Furnes directement à la mer par Dunkerque, avant même la finalisation totale du protocole ? ce qui été salué dans les échanges. L?eau a toujours constitué, pour ce secteur en dessous du niveau de la mer, un sujet de coopération prioritaire et fait l?objet de nombreux échanges dans le cadre de groupes de travail au sein de nombreux organismes, dont celui du groupement européen de coopération territoriale) West- Vlaanderen / Flandre-Dunkerque-Côte d?Opale. La convention-protocole sur le secteur des Flandres française et belge avait fait l?objet d?une réunion conclusive à Bruges le 8 mars 2023, présidée par le gouverneur de la Province de Flandre occidentale et en présence de la secrétaire générale de la préfecture du Nord, qui présidait la délégation française. Le texte a ensuite été envoyé par le préfet de région Hauts-de-France, au Ministère de l?Europe et des Affaires étrangères en vue de sa ratification. La Flandre a procédé au PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 38/107 même envoi auprès de son ministère concerné en Région flamande. Plusieurs personnalités rencontrées en Belgique ont souligné la nécessité d?aller au bout de ce processus. Par ailleurs, depuis 1994, la signature de l?Accord sur la protection de l?Escaut (accord de Charleville-Mézières) et la création Commission Internationale pour la Protection de l?Escaut (CIPE), les gouvernements de la République française, de la Fédération Wallonie-Bruxelles, de la Région Flamande, de la Région de Bruxelles-Capitale et du Royaume des Pays-Bas travaillent ensemble sur ce bassin. En 2001, cette coopération transfrontalière a évolué avec la délimitation du district hydrographique international Escaut, l?affiliation de l?État fédéral belge à l?Accord, la réalisation, d?un seul plan de gestion de bassin versant pour l?Escaut ainsi qu?une réflexion multilatérale au sein de la CIPE, visant à établir des mesures d?atténuation des effets des inondations et des périodes de sécheresse. L?accord de Gand du 3 décembre 2002 formalise ces évolutions. La CIPE devient alors la Commission Internationale de l?Escaut (CIE). Les Parties Contractantes à l?Accord de Gand s?efforcent de réaliser une gestion de l?eau durable et intégrée pour le district hydrographique international de l?Escaut (district de l?Escaut). Dans ce cadre, la CIE est le forum international de coordination des directives européennes sur l?eau dans le district. Elle traite en particulier de la coordination internationale de la directive cadre sur l?eau (2000/60/CE), de la directive relative à l?évaluation et à la gestion des risques d?inondation (2007/60/CE), de l?adaptation au changement climatique (notamment la prévention des effets dus aux sécheresses) et de la lutte transfrontalière contre les pollutions accidentelles survenant dans les eaux du district de l?Escaut. Des échanges en décembre 2023 entre la DREAL Hauts-de-France et l?agence de l?environnement de Flandre (VMM) qui représentent respectivement la France et la Flandre dans la CIE portent notamment sur les propositions formulées dans le cadre de la task force créée par le gouvernement flamand. Les parties sont habituées à collaborer pour la mise en place d?accords. Enfin, la province du Hainaut a mobilisé une pompe de moyen gabarit qui a été employée à Calais durant quelques jours durant les inondations dans le Pas-de-Calais. Ensuite, c'est le mécanisme européen de solidarité qui a été activé par le ministre (samedi) et qui a conduit à l'acheminement de quatre pompes hollandaises de grand gabarit. Le Ministère néerlandais des Infrastructures et de la Gestion de l?eau a souhaité souligner l?importance des coopérations transfrontalières dans la prévention des inondations fluviales et de la gestion des crises. Ses représentants appellent de leurs voeux une plus grande participation des autorités françaises, nationales ou régionales, dans les cadres existants et dans le contexte de l?Union Benelux+. En ce sens, la candidature de la Région Hauts-de-France au statut d?observateur de l?Union Benelux+, au même titre que le Land de Rhénanie du Nord-Westphalie, devrait permettre le renforcement de la coopération transfrontalière dans le domaine de l?eau, ainsi que la signature, le 3 avril, d?une feuille de route de la coopération entre la Région Hauts-de-France et les Pays-Bas, alors que l?exécutif régional vient de se doter d?une vice-présidence en charge de l?eau. Recommandation 9. Accentuer les coopérations transfrontalières dans le domaine de la gestion de l'eau et la prévention des inondations pour développer le partage des bonnes pratiques et les réflexes de gestion commune des crises. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 39/107 3.5 Installer une institution stratège et pérenne, au plus haut niveau de l?Etat, pour orienter et soutenir l?adaptation au changement climatique 3.5.1 Structurer le portage politique de l?adaptation au changement climatique au plus haut niveau Les inondations de fin 2023 ont été perçues, peut-être pour la première fois dans le Nord de la France, comme la marque du changement climatique, faisant ressortir à la fois le besoin d?amé- liorer la prévention des inondations pour ne pas se retrouver, de manière de plus en plus fré- quente, dans la même situation, mais aussi d?élargir le champ, de rapprocher les sujets : inon- dation, submersion et élévation du niveau de la mer, inondation et sécheresse, utilisation du foncier et enjeux de désartificialisation ou de recherche de zones d?expansion des crues ? La mise en place, en 2012, aux Pays-Bas, du Commissaire du Delta marque aux Pays-Bas un tournant qui est de ne plus travailler seulement sur la base du retour d?expérience des crues mais de chercher à anticiper en intégrant le changement climatique. Encadré 10 : Le Commissaire du Delta aux Pays-Bas, un gardien de la sécurité hydraulique du pays Fonction créée par la loi Delta entrée en vigueur le 1er janvier 2012, le Commissaire du Delta aux Pays-Bas assume un rôle crucial dans la gestion de l?eau, axé notamment sur la protection contre les inondations et la préservation des ressources hydrauliques. Nommé pour une durée de 7 ans (renouvelable une fois) par le gouvernement, le Commissaire du Delta (épaulé par une équipe d?une quinzaine de personnes) dispose de l?autorité requise pour faciliter la coopération interministérielle et la cohérence des actions initiées par les dif- férents niveaux de gouvernance. Sa visibilité contribue en outre à sensibiliser l?opinion publique à la nécessité de mieux prendre en compte les effets du changement climatique. Chaque année, dans le cadre de la procédure budgétaire, le commissaire soumet de nouvelles recommanda- tions et mesures pour le programme Delta. Il fait le lien avec les organes administratifs concernés, les entre- prises et la société civile, suit l?avancement de la mise en oeuvre du programme Delta, mais n?en porte pas la responsabilité politique qui incombe au ministre de l?Infrastructure et de la Gestion de l?eau. Le Commissaire peut participer, en tant qu?expert, au Conseil de l?environnement, présidé par le Premier ministre et comprenant une dizaine de ministres dont notamment les ministres chargés de l?infrastructure et de la gestion de l?eau, de l?agriculture et de l?environnement. Le Commissaire du Delta, dispose d?un budget propre, et a pour mission d?assurer une bonne coordination entre les organismes d?Etat, les autorités régionales de l?eau (« Waterschappen ») les provinces et les munici- palités, et le cas échéant, les acteurs concernés de l?énergie, du tourisme ou de l?écologie. Il supervise le Programme Delta, qui se décline en 7 sous-programmes régionaux (Littoral « Kust », Delta d?Escaut « Zuid Westelijke Delta », mer autour des Îles de la Frise « Waddenzee », fleuves Rhin et Meuse « Rivieren », Delta Rhin-Meuse « Rijnmond Drechtsteden », Grands Lacs « IJsselmeergebied ») et trois sous-programmes natio- naux (analyse des risques d?inondation, gestion de l?eau, urbanisme et aménagement du territoire : « Nieuwbouw en Herstructurering » ). Si l?ordre du jour le justifie, le Commissaire du Delta peut participer au Conseil des Ministres pour évoquer le Programme Delta. Le Commissaire du Delta aux Pays-Bas incarne l?engagement continu du pays à protéger ses terres et ses habitants contre les inondations, tout en cherchant des solutions innovantes et durables pour faire face aux défis actuels et futurs liés à l?eau. Depuis 2012, trois personnalités se sont succédées à cette fonction. Wim Kuijken fut le premier Commissaire du Delta du 1er février 2010 au 1er janvier 2019, date à laquelle il a pris sa retraite. Peter Glas lui succéda jusqu?à sa propre retraite, le 30 novembre 2023. Co Verdaas est le nouveau commissaire depuis le 1er décembre 2023. Co Verdaas possède une vaste expérience des défis liés à l?eau aux Pays-Bas. Il a été auparavant membre du Parlement néerlandais (200362006), député de la province de Gueldre (2007-2012) et pendant une courte période secrétaire d?État à l?économie dans le cabinet Rutte II. Il a étudié l?urbanisme à l?Université Radboud PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 40/107 de Nimègue et enseigne le développement régional comme professeur à temps partiel à l?Université technique de Delft. Lors de sa prise de fonction, Co Verdaas a estimé qu?il était « important que l?eau ne soit pas consi- dérée comme une tâche isolée et qu?elle soit liée aux défis liés au logement, à la nature et à la durabilité de l?économie. (?) Nous avons une tradition de protection contre l?eau et l?ambition de vivre avec l?eau ». . Recommandation 10. : Dans le contexte des inondations dans le Pas-de-Calais et le Nord, mettre en place une nouvelle institution, qui assure dans la durée et au plus haut niveau de l?Etat, le portage politique de l?anticipation au changement climatique, dans une logique d?appui scientifique et technique, de coordination, de médiation. De taille réduite, elle a vocation à mobiliser les administrations et opérateurs de l?Etat et à être un soutien des élus locaux 40. Une première étape, sous un an, est de configurer cette structure, et le cas échéant son articulation avec les comités de bassin, et de la mandater pour travailler y compris sur les sols. « Le plus difficile, c?est de faire avec l?incertitude », « Je n?ai pas de réel pouvoir, mais tout le monde écoute ce que dit le Commissaire du Delta », « Le commissaire du Delta, c?est un peu la vigie néerlandaise contre les inondations, à l?image de ce que constitue pour nous contre les accidents de la route, le Délégué interministériel pour la sécurité routière et la Prévention routière. » Les échanges avec le gouvernement flamand témoignent d?un intérêt pour des coopérations trans- frontalières entre les autorités sui seront en charge de l?adaptation au changement climatique. 3.5.2 Une action à lancer : représenter l?inondation et informer Les Pays-Bas ont mis en place un système d?information et de pédagogie en ligne qui repose sur deux outils une carte qui présente une information localisée sur tous les risques et en particulier l?inondation, et de outils de communication et de pédagogie. 3.5.2.1 Une carte des provinces, qui offre une information localisée sur tous les risques (avec un accès dans différentes langues dont le Français) PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 41/107 Figure 2 : site néerlandais, page de garde et carte du risque d'inondation par la mer, un lac ou une rivière (source Homepage | Risicokaart) Ce site est l?équivalent du portail Géorisques français dans son principe. Une différence importante réside dans l?information donnée sur les inondations. Figure 3 : portail Géorisques Aux Pays-Bas, l?information porte sur l?ensemble des cours d?eau, pour différents scénarios d?aléa. La mise à disposition de ces couches d?information résulte d?un travail de longue haleine, plus de 10 ans et de l?ordre de 70 M d?euros, qui a permis d?utiliser, notamment, les données sous-jacentes à la prévision pour établir des scénarios d?inondations pour tous les cours d?eau. En pratique, PUBLIÉ https://www.risicokaart.nl/ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 42/107 chaque province disposait auparavant de données d?inondation, mais non homogènes. Plus précisément, les grande lignes étaient uniformes mais chaque province avait fait ses choix quant aux modélisations hydrauliques utilisées et les hypothèses sur le rôle des ouvrages (routes, chemin de fer ? ), aptes ou non à servir de digue. - Une première étape déterminante a été de déterminer, à l?échelle nationale, les scénarios d?inondations sur lesquelles l?Etat souhaitait diffuser des informations : il a été retenu de présenter les zones inondées de crue décennale à la crue millénale et même encore moins probable. Il s?agit notamment de faire comprendre l?emprise spatiale de différentes crues, surcotes ou combinaisons, des plus fréquentes aux plus extrêmes. Ce choix doit être assumé politiquement, homogène sur le territoire et accompagné. - Ensuite, il a fallu mettre en place les coopérations nécessaires pour établir la cartographie en mobilisant les différents ministères, opérateurs et autorités locales concernés. En effet, faire la carte idéale mettrait très longtemps cat il faudrait développer toutes les modélisations : il a donc été choisi, dans un premier temps, de rassembler les données existantes de chaque province pour les mettre en cohérence avant de les publier. La coopération est, ainsi, la deuxième condition forte de cet exercice. Elle s?est matérialisée par un comité de pilotage rassemblant des représentants des partenaires concernés d?une part, et des engagements de contribution aux travaux par la mise à disposition des hommes/jour et des financements nécessaires par chaque organisme. Les travaux se poursuivent, sur la base de cette première étape pragmatique mais structurée, pour aller vers des cartes homogènes dans leur conception même. Mais il a été utile de passer par cette première phase, appuyée sur les données existantes, qui a permis d?aller plus vite et de donner à voir un résultat satisfaisant cat fiable et partagé, utilisable par tout un chacun car mis à disposition en ligne. En France, il existe, de par l?historique de la prévention des inondations, différents types de cartes les représentant : - les cartes des Plans de prévention des risques d?inondation (PPRi) représentent la crue la plus importante connue ou la crue centennale modélisée. Elles reposent, depuis 2019, sur un corpus de méthodes homogènes quant à la prise en compte des ouvrages de protection. Elles sont liées à des zonages réglementaires, qui s?imposent à l?urbanisme. Elles ne constituent pas un continuum puisque les PPRi sont réalisés là où il y a les plus forts croisements aléas-enjeux. Elles sont la base de la procédure en ligne « Information acquéreur locataire » (IAL) ; - les Atlas de zones inondables (AZI), réalisés dans les années 2000 puis laissés de côté, font parfois référence localement, sans constituer un continuum le long du réseau hydrographique ; - les zones inondées potentielles (ZIP)i ont été mises en place pour la gestion de crise, avec différents scénarios d?inondation pour guider les autorités, qui ne recouvrent donc pas nécessairement les hypothèses et méthodes utilisées pour les élaborer les cartes des PPRi. Elles sont préparées, progressivement, au droit des stations de mesure du réseau Vigicrues, elles ne font pas un continuum. Un travail est en cours pour les mettre en ligne sur le site Vigicrues fin 2024-début 2025. Ce sera une avancée importante pour l?information du public, avec une vigilance pour expliquer que les cartes de PPRi et les ZIP sont différentes dans leur élaboration, leurs finalités et leurs portées, mais toutes justes. Ce sont les scénarios des cartes de ZIP qui s?approchent le plus de la démarche d?information néerlandaise (les Pays-Bas n?ayant pas mis en place l?équivalent des PPRi) - les cartes qui figurent dans les Plans de gestion du risque inondation (PGRI), à l?échelle des bassins hydrographiques, dans l?Evaluation primaire des risques d?inondation (EPRI), en application de la Directive inondation. Elles présentent obligatoirement des crues extrêmes, couvrent tout le réseau hydrographique principal, mais ne sont pas « zoomables ». Il faut rappeler que lors de la première réalisation de ces cartes, il avait été choisi, dans certains bassins, de ne pas les diffuser. La compréhension du risque inondation demande en effet un accompagnement spécifique pour expliciter les différents scénarios représentés. Les cartes de l?EPRI constituent également une approche de la démarche néerlandaise ; PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 43/107 - enfin, dans certains cas, pour la préparation de PPRL par exemple, quelques DDT ont fait développer des représentations dynamiques de l?effet d?une inondation sur un territoire. Il existe des cas dans le nord de la France, sans que les résultats aient été présentés au public. Dans certains cas, et dans le cadre des PAPI, certaines collectivités ont également développé des outils de simulation, en réalité augmentée. 3.5.2.2 Des outils de communication pour former aux comportements qui sauvent Les cartes diffusées au Pays-Bas permettent également, à partir de ces mêmes couches de données, de visualiser, pour un bâtiment, l?effet de différents scénarios d?inondation. A chaque scénario sont liés des conseils de préparation et de comportement, avec une image stylisée représentant une maison. L?ouverture de l?application sur téléphone portable permet de mettre la photographie de son habitation à la place du dessin indicatif. En France, dans certaines régions, ont été développées des applications permettant de visualiser en réalité augmentée une rue inondée. Cela relève, par exemple, d?action de culture du risque développées dans les PAPI. Des conseils de comportements figurent sur le site Géorisques de manière générique ; ils sont repris et amplifiés dans des actions ciblées et récurrentes comme la « Campagne cévenole ». Lors d?événements importants, certains assureurs envoient dorénavant des SMS à leurs clients sur le risque encouru. Il est également possible de s ?abonner à Vigicrues pour recevoir des informations sur la station à proximité de chez soi. Avancer sur une cartographie nationale homogène et partagée permettrait de développer des outils de sensibilisation personnalisés de manière beaucoup plus sytématique. Figure 4 : exemple d?outils pédagogique (source https://overstroomik.nl/) Alors que le secteur des assurances se dote de cartographies visant à identifier les zones les plus à risque, avancer sur une cartographie nationale homogène des risques d?inondation permettrait de disposer et de diffuser une information publique sur différents scénarios d?inondation, fondement de la culture du risque. Recommandation 11. Engager l?élaboration d?une cartographie nationale des inondations, permettant de développer des outils pédagogiques. Cela demande une expression politique claire sur la gravité des scénarios d?inondation à traiter et sur le type d?inondation à aborder, et un travail structuré et partenarial pour publier un résultat découlant d?une approche partagée entre différents services ministériels, les opérateurs concernés, les représentants des collec tivités locales, les associations impliquées et certains partenaires comme la Caisse centrale de réassurance. PUBLIÉ https://overstroomik.nl/ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 44/107 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 45/107 Conclusion La France dispose d?un socle de prévention des inondations ancien, qui mobilise Etat et collectivités locales, mais il y a bien sûr toujours des améliorations possibles, notamment identifiées dans l'exercice de parangonnage qui est très utile. Le contexte du changement climatique doit conduire à renforcer en efficacité et en ambition les efforts en la matière, et à structurer de nouveaux travaux d?anticipation. Les échanges menés dans le cadre de la mission de parangonnage ont été fructueux ; il y a un intérêt pour une réciprocité ou des suites à ce travail, notamment dans la cadre des échanges sur les sujets transfrontaliers, mais plus largement : - Les conditions d'avancées de la prévention des inondations ont des composantes techniques ou organisationnelles mais relèvent en premiers lieux de questions de posture : un portage politique fort à tous les niveaux, la mise en oeuvre de coopérations sont des conditions premières à des avancées significatives. Chaque autorité a une place dans l?approche française, du maire qui est le contact de proximité des habitants et le responsable de la sécurité sur le territoire de la commune à l?Etat en passant par l?EPCI, échelle de l?aménagement, ou du syndicat en charge de la Gemapi : l?engagement de chacun et la fluidité de leurs relations sont un gage d?efficacité - Les avancées se font dans la durée car elles reposent sur des évolutions exigeantes, qu?il s?agisse d?aménagement du territoire ou d?évolution de comportements: il convient, pour les différentes autorités en charge, chercher les actions sans regrets, avancer à petits pas, développer une approche plus agile, ou encore lancer, dans un format réfléchi, les travaux les plus nouveaux et complexes sur l?adaptation. - La questions des moyens se pose toujours : les coopérations demandent du temps et des compétences. Des structures nouvelles ad hoc sont nécessaires, l?une pour faciliter le relèvement après de nouvelles catastrophes qui surviendront, et l?autre pour le portage politique et concret de l'adaptation au changement climatique, qui demanderont des effectifs. Dans un contexte de tension budgétaire, il faut comparer le coût de la préparation avec le coût de la réparation, documenter la non action, par exemple au regard des risques sur le système assuranciel, les impacts sociaux pour les populations et les activités exposées. Il est stratégique de renforcer et structurer les moyens, dans des dispositifs efficaces, dans le contexte du changement climatique. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 46/107 Annexes PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 47/107 Annexe 1. Lettre de mission PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 48/107 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 49/107 Annexe 2. Agenda des déplacements et liste des personnes rencontrées Déplacement aux Pays-Bas Ambassade de France : M. François Alabrune Ambassadeur de France aux Pays-Bas Mme Aude Robin-Mitrevski, cheffe du Service économique régional M. Samy Ouahsine, conseiller développement durable et industrie Mme Clotilde Maral, attachée environnement 24 janvier 2024, Pays-Bas, la Haye - Entretien avec M. René Vrugt, Directeur des sols, de l?aménagement du territoire et de l?adap- tation au climat, Ministère de l?Infrastructure et de la Gestion de l?eau - Mme Wieke Tas, cheffe du service Adaptation au changement climatique et gouvernance, « Dé- termination de la politique d?aménagement par les sols et l'eau » - M. Jan Kruijshoop, responsable des affaires internationales, Rijkswaterstaat WVL Retour d?expérience sur les inondations de juillet 2021 au Benelux et en Allemagne, mise en place d?une coopération quadrilatérale - M. Robert Slomp, expert de la gestion de l?eau et de la relation bilatérale avec la France Rijkswa- terstaat WVL - Mme Mariette van Empel, Ambassade des Pays-Bas en France - M. Math Reumers, chargé de la coopération bilatérale avec la France, ministère I&W - Mme Jean-Marie Stam, Affaires internationales, Rijkswaterstaat WVL - Mme Babette Gräber, responsable du programme KAWI, mission internationale pour l?adapta- tion au changement climatique et pour l?eau, Ministère de l?Infrastructure et de la Gestion de l?eau - Café-entretien avec M. Kleis Jager, journaliste néerlandais - Dîner avec SE M. l?Ambassadeur François Alabrune 25 janvier - Rencontre avec M. Co Verdaas, Commissaire pour le programme pour le Delta, M. Dolf Kern, Conseiller pour le programme pour le Delta, M. Jan Bonjer, Président du Waterschap Hollandse Delta, M. Remco van Rijn, Expert en pompes d'urgence chez Hollandse Delta M. Remco Belonje, conseiller spécial de M. Bonjer Et en présence de deux membres supplémentaires de la délégation française : Mme Florence Bariseau, VP eau Région Hauts-de-France, Mme Aude Prestaux, conseillère. - Visite du centre de Gestion de l?eau de Lelystad - Présentations sur la gestion de crise - M. Hans de Vries, président du Comité national de coordination des menaces d'inondation (LCO) et du Comité national de coordination pour la distribution de l'eau (LCW), VWM - M. Jan Kruijshoop, responsable des Affaires internationales à la DG eau et sols, ministère I&W - M. Robert Slomp, expert de la gestion de l?eau et de la relation bilatérale avec la France Rijkswa- terstaat WVL - Mme Marion Wierda, directrice Stratégie et Politique Agence régionale de l?eau Rivierenland - M. Tom Vereijken, membre de l?exécutif de l?autorité régionale de l?eau Zuiderzeeland (où se trouve la station de pompage). PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 50/107 - Visite de la station de pompage Wortman à Lelystad, accueil par M. Jan-Willem Trompetter (Directeur et chef technicien de la station de pompage) En présence de : M. Olivier Caillaud (Pôle métropolitain de la Côte d?Opale) Mmes Florence Bariseau et Aude Prestaux Déplacements en Belgique Ambassade de France : M. François Sénémaud, Ambassadeur de France en Belgique Mme Caroline Vinot, première conseillère Mme Alyssia Biton, deuxième conseillère M. Arnaud Boulanger, chef du service économique M. Andri-Anderson Rabehanta, chef adjoint du service économique Mme Neïla Khelifi, attachée économique et financier au service économique M. Bernard Siffert, attaché de sécurité intérieure M. Samy Ouahsine, conseiller développement durable et industrie Mercredi 10 janvier, Bruxelles M. Etienne Bouas-Laurent, directeur général d?AXA Belgique M. Hein Lannoy, directeur général d?Assuralia Audrey Amiot, COO Philippe Courouble, Chef du service P&C Mme Leen Depuydt, directrice générale du NCCN, Centre de crise National mercredi 11 janvier M. Jan Jambon, Ministre-président flamand M. Toby De Backer, chef de cabinet adjoint de Mme Zuhal Demir, ministre flamande de l?Environ- nement, de l?Energie, du Tourisme et la Justice M. Jan Vancoillie, conseiller du cabinet du Ministre-président M. Jan Jambon M. Wouter De Ruyter, chef du cabinet adjoint de Mme Lydia Peeters, ministre flamande de la Mobilité et des Travaux publics M. David Maenaut, Conseiller diplomatique, chargé des relations transfrontalières avec la France, les Hauts-de-France et la Wallonie Mme Barbara Vael, Chef de département VLAAMSE MILIEUMAATSCHAPPIJ - VMM M. Chris Danckaerts, Administrateur général de l?Agence flamande des Voies Navigables (De Vlaamse Waterweg, DVW) Mme Emma Vermunicht, conseillère diplomatique de M. Jo Brouns, Ministre flamand de l'Écono- mie, de l'Innovation, du Travail, de l'Économie sociale et de l'Agriculture et Mme Jannes Maes, conseillère agriculture 18 janvier 2024, Namur M. Philippe Dierickx, directeur de la gestion hydrologique au SPW Mobilité et Infrastructures M. Sébastien Gailliez, directeur des cours d'eau non navigables au SPW Agriculture, Ressources naturelles et Environnement M. Simon Riguelle, directeur du Centre régional de crise Mme Emilie Jennes, conseillère au cabinet de M. Elio Di Rupo, Ministre-président wallon M. Denis Mathen, Gouverneur de la province de Namur Mme Marie Muselle, commissaire d'arrondissement PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 51/107 M. Willy Borsus, Vice-président du gouvernement wallon et Ministre de l'Économie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'innovation, du Numérique, de l'Aménagement du Territoire et de l'Agriculture M. Olivier Granville, chef de cabinet M. Thomas Leroy, conseiller en aménagement du territoire et urbanisme M. Michel Dachelet, inspecteur général du département de l?aménagement du territoire et de l?ur- banisme (DATU) M. Jacques Teller, professeur en urbanisme à l?Université de Liège M. Benoît Moritz, professeur en urbanisme à l?Université Libre de Bruxelles Vendredi 9 février, Dixmude et Niewport Présentations des agences flamandes de l?Eau (DVW) et de l?Environnement (VMM) et visite de terrain du Bassin de Blankaart et des écluses de Nieuport. M. Carl Decaluwé, Gouverneur de Flandre-Occidentale M. Bart Naeyaert, Vice-gouverneur en charge de la Politique intégrée de l?eau M. Chris Danckaerts, Administrateur général de l?Agence flamande des Voies Navigables (De Vlaamse Waterweg, DVW) M. Bernard De Potter, Administrateur général de l'Agence flamande de l?Environnement (Vlaamse Milieumaatschappij, VMM) M. Toby De Backer, Chef de Cabinet adjoint de Mme. Zuhal Demir, Ministre flamande de la Justice, de l?Environnement, de l?Aménagement du Territoire, de l?Énergie et du Tourisme M. Wouter De Ruyter, Chef de Cabinet adjoint de Mme. Lydia Peeters, Ministre flamande de la Mobilité et des Travaux publics M. Koen Surdiacourt, Chef de Cabinet du Gouverneur M. David Maenaut, Conseiller diplomatique, chargé des relations transfrontalières avec la France, les Hauts-de-France et la Wallonie Mme Elisabeth Bonne, Chargée de Mission, relations avec la France, Département de la Chan- cellerie et des Affaires Etrangères M. Jan Vandecavey, Directeur de la Politique intégrée de l?eau M. Chris Marey, Conseiller du Gouverneur M. Kristof Vermeire, Conseiller pour les relations avec le Nord de la France M. Lieven Dejonckheere (DVW) M. Joris Duyck (DVW) Mme Lies Verstraete (VMM) M. Niels Van Steenbergen (DVW) M. Maarten Goegebeur (VMM) France CEPRI, Marie-France Beaufils, présidente, et ses équipes PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 52/107 Annexe 3. La prévention des inondations aux Pays-Bas La législation néerlandaise relative à la gestion du risque d?inondation, comme dans nombre de pays, est liée aux catastrophes qu?a connues le pays, en particulier celle de 1953, et au cadre européen découlant de la « Directive inondation ». La robustesse du dispositif mis en place tient à la cohérence de l?organisation politico-administrative et à un cadre juridique et financier inscrit dans la durée mais apte à évoluer. Il garantit en particulier l?entretien et la mise à niveau des ouvrages de protection vitaux pour le pays. Le 21e droit fondamental dans la constitution néerlandaise prévoit, depuis 1983, que : « La puis- sance publique s?attache à l?habitabilité du territoire et à la protection du cadre de vie ». Historique- ment, ce droit fondamental visait à protéger l?agriculture. En 1798, date de la constitution de la république batave, a ainsi été introduite la disposition « La Société commande, en termes égaux, la favorisation de l?Agriculture, et son épanouissement, en particulier au regard des terres vacantes et non artificialisées, à travers l?ensemble du territoire de la République ». La notion de cadre de vie, et plus largement d?environnement, est apparue en 1983, à la suite d?une initiative entamée en 1967. Le dispositif néerlandais de gestion du risque inondation vise à répondre à ce droit fonda- mental. Un recours peut être fait en droit administratif à ce droit fondamental par les citoyens et organisations. Annexe 3.1. Les catastrophes, moments fondateurs des politiques de prévention contre les inondations Les Pays-Bas sont situés dans un delta formé par quatre fleuves : le Rhin, la Meuse, l?Escaut et l?Ems. Actuellement, 26 % du territoire de ce pays sont situés sous le niveau moyen de la mer ; 59 % de ces terres, environ 70 % des 17,6 millions d?habitants de ce pays sont sous la menace d?une inondation, en particulier dans le Randstad, une conurbation formée par les villes d?Amster- dam, d?Utrecht, de Rotterdam et de La Haye. C?est cette même région qui produit le plus de ri- chesses, environ la moitié du produit national brut des Pays-Bas41. La valorisation des marais par des moines a commencé il y a plus de 1000 ans. Ce choix, couplé à plusieurs grandes tempêtes destructives dès les années 1000 à 1200, a donné naissance aux premières organisations démocratiques aux Pays-Bas : les organisations de gestion des eaux,« Waterschappen » ou « Wateringues » avant l?émergence de l?État central42. Des inondations de la Sainte-Elisabeth de 1424 ou celles de Saint-Félix en 1530 (surnommées le « quade saterdach » (mauvais samedi) faisant 100.000 victimes et rayant en grande partie de la carte Reimerswaal, grande ville de Zélande) jusqu?à nos jours, l?histoire néerlandaise est émaillée de nombreuses catastrophes liées à des inondations meurtrières ou à de dramatiques épisodes de submersion marine. Ces catastrophes ont fortement contribué à façonner la politique néerlan- daise de protection et de prévention contre les inondations. Les inondations du Zuiderzee des 13 et 14 janvier 1916 : en raison de fortes tempêtes, une grande partie du Zuiderzee, une ancienne mer intérieure, s'est déversée dans les terres, causant d'impor- tantes inondations dans les provinces de Frise et de Groningue. Cette catastrophe a par exemple conduit à réaliser une grande partie du Plan de 1891 de l?ingénieur Cornelis Lely, notamment la construction de 1927 à 1932 du barrage de l'Afsluitdijk (long de 32 kilomètres) destiné à fermer la 41 Source R. Slomp, Y. Friocourt, 2022. 42 Source : R. Slomp, 2012 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 53/107 Zuiderzee, à protéger les terres contre les inondations et à créer de nouveaux espaces agricoles et résidentiels grâce à l?aménagement de plusieurs polders (Noordoostpolder, polder de Flevoland du nord, polder de Flevoland du sud?). Le village de Schellingwoude pendant la crue Extrémité occidentale de l'Afsluitdijk Les inondations de la mer du Nord, dans la nuit du 31 janvier au 1er février 1953 : cette catastrophe, l'une des plus graves de l'histoire récente des Pays-Bas, présente dans tous les échanges avec les interlocuteurs néerlandais rencontrés, était le résultat combiné de fortes tempêtes et de très grandes marées. Les digues ont alors cédé dans de nombreuses régions, provoquant la mort de plus de 1.800 personnes, l?évacuation de 70.000 personnes, détruisant 4.500 habitations et en endommageant 50.000 autres, sans compter les 200.000 hectares de terres submergées par les flots qui, à certains endroits, atteignirent une hauteur de 4,5 mètres. PUBLIÉ https://fr.wikipedia.org/wiki/Schellingwoude Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 54/107 Cette catastrophe a provoqué un traumatisme durable aux Pays-Bas en matière de prévention des inondations. Le Premier ministre, Mark Rutte, rencontré à Paris début janvier 2024 en marge de l?hommage national à Jacques Delors, y a fait immédiatement référence lors d?une mention des inondations que venaient de connaître le Pas-de-Calais. Les pertes en vies humaines et les dégâts matériels considérables ont conduit le gouvernement à lancer le Plan Delta, un ambitieux projet de construction de barrages et de digues pour renforcer la protection côtière. Le Plan Delta a été l'un des projets d'ingénierie les plus importants de l'histoire des Pays-Bas et a radicalement transformé et artificialisé le paysage côtier. Des méthodes scien- tifiques d?analyse des risques ont été développées et utilisées pour instaurer des niveaux de pro- tection différenciés pour les populations en fonction des enjeux, le système de prévision des inon- dations a été revu. In : Gueben-Venière S, 201 Ce plan tire son nom de la région du delta des fleuves Rhin, Meuse et Escaut, où il a été mis en oeuvre. Le principal objectif du Plan Delta était de fermer les bras de mer, les estuaires et les PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 55/107 embouchures des principaux cours d'eau, créant ainsi une série de barrages et de digues pour empêcher les marées de pénétrer à l'intérieur des terres, et notamment : - le barrage de l'Escaut oriental (Oosterscheldekering), l'un des plus impressionnants du Plan Delta, long de 9 kilomètres, qui comporte une série de portes mobiles qui peuvent être fermées en cas de tempête pour protéger les terres intérieures des marées hautes. Ces portes restent cependant ouvertes la plupart du temps pour permettre la circulation des eaux et la préservation des écosystèmes. - le barrage de l'Hollands Diep (Haringvlietdam) a été construit pour fermer l'estuaire de l'Hollands Diep, réduisant ainsi le risque d'inondation dans la région de Rotterdam. - le barrage de Brouwersdam a été construit pour séparer le lac Grevelingen de la mer du Nord, créant ainsi un lac d'eau salée qui est maintenant utilisé pour la navigation de plai- sance et les sports nautiques. - Le barrage de la Veerse Gat (Veerse Gatdam) a été construit pour séparer le lac Veerse Meer de la mer du Nord, créant ainsi un lac d'eau douce qui est maintenant une zone de PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 56/107 loisirs populaire. Les inondations de 1993 et 1995 : ces inondations fluviales ont fait chacune plus d?une cinquan- taine de morts et d'importants dégâts matériels et ont nécessité l?évacuation de plus de 50.000 personnes : elles ont incité les autorités néerlandaises à intensifier leurs efforts de prévention des inondations et de renforcement des digues. Ces inondations ont mis en évidence des lacunes per- sistantes malgré les progrès réalisés avec le Plan Delta. Cela a incité le gouvernement à revoir et à renforcer les normes de sécurité des digues et des systèmes de drainage, ainsi qu'à investir dans des programmes de gestion intégrée des bassins hydrographiques. Le programme "De l?espace pour le fleuve" a été développé en réponse aux inondations de 1993 et 1995. Ce programme am- bitieux visait à réduire le risque d'inondation en permettant aux rivières de déborder de manière contrôlée dans des zones spécifiques, plutôt que de tenter de les contenir strictement derrière des digues élevées. Ce projet marque aussi la réussite d?une volonté de créer un espace plus large pour le cours d?eau en s?appuyant sur des qualités paysagères et environnementales : au-delà de la prévention du risque d?inondation, ce projet a permis la création et le développement d?espaces urbains attractifs, de qualité, respectueux de l?environnement. Il a par exemple permis de réaliser de nouvelles zones urbaines au bord de la rivière Waal, avec l?implantation d?un îlot en son centre doté d?espaces récréatifs. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 57/107 Les inondations de juillet 2021 : Bien que moins sévères que les catastrophes précédentes, les inondations de 2021 ont touché plusieurs parties des Pays-Bas, notamment la province de Lim- bourg, provoquant des évacuations massives et des dommages importants. Il s?en est fallu de peu que le bilan soit plus élevé (débits mesurés inédits sur la Meuse amont, avec certaines digues en limite de débordement ; mise en place accélérée de mesures de protection grâce à une large et intense mobilisation collective). Ces inondations ont souligné la vulnérabilité continue des Pays- Bas aux changements climatiques et aux événements météorologiques extrêmes. Cela a renforcé l'engagement du gouvernement néerlandais en faveur de l'adaptation aux changements clima- tiques, notamment par le renforcement des infrastructures de prévention des inondations et la pro- motion de mesures d'adaptation au niveau local. Comme l?indiquait le commentaire modeste de Robert Slomp (« nous avons mis deux ans à comprendre les événements de 2021 »), le change- ment climatique rend la prévision de moins en moins aisée et comme le mentionnait l?un des tech- niciens flamands rencontrés, « il s?agit désormais de se préparer à l?imprévisible ». Au-delà des stress tests territoriaux déjà engagés, une expertise a été conduite pour projeter ce qu?auraient été les conséquences du même phénomène météorologique s?il avait été centré sur les Pays -Bas, au lieu de la Wallonie et de l?Allemagne. Annexe 3.2. Des protections des premiers Plans Delta au Commissaire du Delta Annexe 3.2.1 La défense contre la mer Les grandes inondations de 1916 ont conduit à la décision de fermer le bras de mer dans le nord des Pays-Bas. Les inondations dramatiques de 1953 (Sud-Ouest) ont, elles, conduit à la décision de fermer des bras de mer dans le Sud, et au 1er « Plan Delta ». La protection contre la mer est passée, en effet, par la mise en place de grandes infrastructures, qui nécessitaient des moyens considérables, et par la structuration des responsabilités avec un seul type d?organisation pour leur construction et leur entretien, sur la base d?une publication des niveaux de protection définis par l?Etat en fonction des enjeux, et d?un processus de vérification des processus par les provinces. Le projet visait à améliorer la sécurité des zones de faible altitude des Pays-Bas contre les tem- pêtes les plus violentes et les inondations. Les dunes le long de la côte ont été réhaussées de plus de 5 mètres et les îles de la Zélande reliées par des digues et des ouvrages d'art. L'Escaut oriental devait être totalement fermé, ce qui aurait transformé l'ancien estuaire en lac d'eau douce. A la suite de nombreuses manifestations, il a été décidé de construire l'Oosterscheldekering, barrage de 9 km de long et le plus complexe du projet, qui peut être ouvert ou fermé pour protéger la baie, tout en gardant sa salinité, afin de pérenniser l'industrie de la pêche et la faune sauvage. Les 25 km d?ouvrages d'art ont réduit la côte maritime des Pays-Bas d'environ 700 kilomètres. Ce Plan a imposé des choix difficiles : ont été évoqués dans les échanges 1400 maisons ont été rasées en PUBLIÉ https://fr.wikipedia.org/wiki/Inondation https://fr.wikipedia.org/wiki/Dune https://fr.wikipedia.org/wiki/Z%C3%A9lande https://fr.wikipedia.org/wiki/Escaut_oriental https://fr.wikipedia.org/wiki/Oosterscheldekering https://fr.wikipedia.org/wiki/P%C3%AAche_(halieutique) Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 58/107 1996 à Rotterdam, pour la reconstruction de la digue, 3 maisons 2010 à Arnhem, 50 maisons entre 2010 et 2015 à Nimègue. La « Deltacommissie » (Commission du Delta), mise en place dès 1953, est passée de l?approche qui consistait à porter les digues 1 mètre au-dessus des derniers niveaux de crue observés à une analyse des risques d?inondation, pour déterminer des niveaux de risque acceptables au regard des différentes enjeux. Ce travail s?inscrit dans une approche plus générale qui classe chaque type d?événement considéré en fonction de sa plausibilité aux Pays-Bas et de ses conséquences sur la sécurité nationale. La probabilité d?une inondation majeure dans l?Ouest des Pays -Bas est relati- vement faible (environ 1/10 000 à 1/100 000 par an), mais les conséquences seraient destructrices pour les Pays-Bas. Une telle catastrophe, si elle touchait ne serait-ce que la Province de Hollande Méridionale (3,6 millions d?habitants), serait d?ampleur trop importante au vu des moyens actuels des services d?urgences, même assistés par des unités de l?Armée43. Le plan Delta demande plusieurs décennies de mise en oeuvre. Le plan initial est terminé en 1986 et a donné lieu à une évaluation finale présentant les coûts, les avantages et les inconvénients. Une nouvelle tranche de travaux, complémentaire au plan initial devait se terminer en 1997, puis la rehausse de toutes les digues pour être conforme à la norme néerlandaise en la matière se sont poursuivis jusqu'en août 201044. Au bout du compte, les dispositifs de protection contre les inondations, et notamment des systèmes d?endiguements, ont tenu, et tiennent encore, une place majeure dans la politique néerlandaise de gestion des risques d?inondations aux Pays-Bas. 95 systèmes d?endiguements («dijkringen» ou « cercles de digues ») constituent des lignes continues de défense contre les inondations (maritimes ou fluviales, ou même « lacustres » pour la mer intérieure d?Ijssel). Les niveaux de protection sont fixés par voie législative, initialement au regard d?une probabilité d?aléa naturel, à présent au regard d?une probabilité de décès pour un habitant de la zone protégée. Dans la sui te de ces grands programmes, plusieurs programmes pluriannuels se sont succédés (programmes de reconstruc- tion ou de réaménagement) qui fixent les montants de travaux et les clés de répartition. Annexe 3.2.2 La protection contre les inondations fluviales A la suite des catastrophes de 1993 et 1995 de débordement fluvial, les digues sur le Rhin et Meuse ont dû être réparées d'urgence, entre 1996 et 2001, dans la cadre du « Plan Delta pour les grands fleuves » adopté par le Parlement en 1996. Plus de 1000 km des digues ont été mis aux normes en 5 ans et 150 km de nouvelles digues construites en 2 ans le long de la Meuse, conférant ainsi à 20 000 personnes une protection supplémentaire. Si des réponses immédiates ont ainsi été apportées aux inondations, le retour d?expérience qui en a été fait a soulevé des limites de ces interventions d?urgence, avec la découverte de malfaçons et fragilités dans ces digues, qui ont été difficiles et coûteuses à traiter par la suite. Il est apparu aussi que les digues ne sont pas toujours « la » bonne solution. Annexe 3.2.3 L?articulation avec la place pour le fleuve, et le changement de cap opéré dans le contexte du changement climatique La prévention des inondations est un sujet de portée nationale, qui est entré dès 1953 dans une logique de programmation pluriannuelle. Cependant, un débat fondamental s?est instauré au fil du temps à propos des principes mêmes du plan Delta : le niveau de ces terres baisse et le niveau des océans augmente dans le contexte du changement climatique. Cela signifie que les digues 43 Sources : R. Slomp, 2012 ; IGEDD, nov. 2023 44 Source : Wikipedia et entretiens PUBLIÉ https://fr.wikipedia.org/wiki/Conformit%C3%A9_des_digues_aux_Pays-Bas https://fr.wikipedia.org/wiki/Mont%C3%A9e_des_eaux https://fr.wikipedia.org/wiki/Mont%C3%A9e_des_eaux Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 59/107 vont devoir être renforcées et rehaussées, créant davantage d'enfoncement du terrain. Certains estiment que des formes de recul seraient plus pertinentes, à long terme, qu'une bataille contre les eaux, d?autres que ce serait méconnaître une tradition ou un savoir-faire de lutte contre les élé- ments. 400 km de digues ont été réhaussées. Les orientations de la politique de prévention, dans le temps long, évoluent : par exemple, face à l?opposition à des approches prenant peu en compte les articulations avec les milieux naturels, des projets importants ont été abandonnés, comme celui d?un nouveau quartier artificiel près d?Ams- terdam. La nécessité d?intégrer une écoute des populations, d?entendre toutes les propositions, d?y consacrer du temps, a été largement reconnue. Encadré 11 : exemple d?outil de concertation Une démarche de modélisation des effets des idées ou propositions de chacun pour faire face aux inondations a été développée de manière à sensibiliser à la complexité du sujet : chaque solution locale est de nature à reporter l?eau en amont et en aval. Une vue d?ensemble est un préalable indispensable à toute solution. Ce type de dé- marche doit être mobilisé hors période de crise. Si la défense contre la mer à la suite de la catastrophe de 1953 a donné lieu à des travaux majeurs de système d?endiguement, qui sont partie intégrante de l?image des Pays -Bas, la question de la place à donner à l?écoulement des fleuves a été posée dès le plan 2001-2015 « De l?espace pour le fleuve ». Sur le Rhin et la Meuse, ce programme de travaux s?inscrit dans un paradigme nouveau : au lieu d?élever des digues, leur niveau a pu être abaissé en recourant à des mesures alternatives dont des zones d?expansion de crue et des élargissements de la place laissée au cours d?eau entre les digues. Les projets n?ont pas été réalisés dans le même cadre législatif : ils relèvent de la dé- marche de planification spatiale, et ont donné lieu à une évaluation économique. La prise en compte du changement climatique a été introduite dans le même temps. Cela a conduit à retenir des hypothèses d?augmentation de 60 cm du niveau de la mer et d?une augmentation de 15% des crues fluviales. La prise en compte d?un coefficient d?incertitude de 30 cm des hauteurs de crues est couramment faite. Depuis le programme Delta 2001-2015, la nécessité de relever les défis pour 2050 et 2100 a été identifiée. C?est un changement de cap majeur. Au lieu d?attendre une nouvelle catastrophe et mener un programme de réfection, les Pays-Bas tentent d?exploiter les savoirs disponibles sur le changement climatique, les besoins de l?économie et l?utilisation des sols pour anticiper des scénarios possibles. Ce programme se décline en 7 sous-programmes régionaux, ainsi qu?en trois sous-programmes nationaux : analyse des risques d?inondation ; gestion de l?eau (l?eau potable, l?eau pour l?irrigation et le drainage après des événements pluviométriques exceptionnels ) ; urbanisme et aménagement du territoire. Chaque sous-programme est assigné à un directeur et à une équipe composée d?agents des ministères, des agences régionales de l?eau, des provinces, et de certaines communes, des instituts de recherche, et d?entreprises privées. La loi Delta, du 1er janvier 2012, définit les pouvoirs, devoirs et responsabilités du Commissaire du Delta. Son rôle est : - Celui d?un facilitateur dans les interfaces entre l?État et les collectivités ; cela signifie qu?il prend toutes les dispositions pour fluidifier les échanges, assurer la pédagogie, remonter les informations lorsqu?il en identifie le besoin. Bien qu?il occupe une place centrale dans le dispositif, il ne dispose pas du pouvoir politique, qui relève toujours du ministère (lequel élabore conjointement avec les parties intéressées les plans et programmes). Il conseille le gouvernement, mais n?assure pas de mission d?expertise auprès des collectivités. - En tant que conseil du gouvernement, il soumet des propositions pour le programme national Delta, y compris dans ses composantes financières. Il recueille le soutien du public pour le pro- gramme Delta grâce à des interventions publiques et dans les médias. Chaque année, à l'ouverture nationale du Parlement en septembre, le Commissaire du Delta soumet une proposition de nou- velles recommandations et mesures pour le programme au ministre coordonnateur et aux autres PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 60/107 membres du cabinet concernés. Il organise les travaux des administrations, et les consultations des entreprises et des ONG impliquées. Les fonds du programme du Delta (Deltafonds), ne sont pas un budget dont dispose le commissaire : ils sont mobilisés pour financer les projets du pro- gramme du delta et soumis au contrôle des parlementaires. Au titre de sa mission de conseil, le commissaire peut participer au Conseil des affaires financières, économiques, des infrastructures et de l'agriculture en sa qualité d'expert. - Il suit les progrès de la mise en oeuvre du programme Delta, rend compte et conseille sur le rythme d?avancement. Il ne porte pas la responsabilité politique finale, qui incombe au Ministre de l'Infrastructure et de la Gestion de l'Eau. Il peut alerter de sa propre initiative si la progression du programme Delta n?est pas satisfaisante45. Annexe 3.3. Organisation de la prévention des inondations Annexe 3.3.1 Une gestion de l?eau et du risque intégrée à l?échelle ministérielle Comme dans de nombreux états européens, la répartition des compétences de prévention des risques naturels repose sur deux départements ministériels : le Ministère de Sûreté et de la Justice a la responsabilité de la gestion de crise et les compétences générales liées aux services de secours et de la sécurité ; le Ministère de l?Infrastructure et de l?Environnement est en charge de l?Aménagement du Territoire, de la prévention contre le risque d?inondation, de la protection contre les crues et de la gestion des cours d?eau, des lacs, des estuaires et du littoral. Les compétences relatives aux risques naturels liés à l?eau, à la défense contre la mer, à la sécurité correspondante des personnes et des territoires, et à la gestion des cours d?eau font l?objet d?une organisation spécifique et intégrée. L?agence nationale de l'eau, le Rijkswaterstaat, sous tutelle du ministère chargé des infrastructures et de la gestion de l'eau, supervise la construction, la gestion, l?entretien des infrastructures d'intérêt national, et conseille le gouvernement dans la planification stratégique et l?atténuation des risques à long terme. Elle gère les canaux de navigation, les cours d?eau principaux et établit la prévision des crues sur ceux-ci. Elle assure la maîtrise d?ouvrage des systèmes d?endiguements « primaires » correspondants (sur les grands cours d?eau ou fleuves et barrages anti-tempêtes sur les bras de mer les plus importants), mais n?en gère directement qu?une petite partie, le reste étant géré par district hydrographique. Elle est assistée par l?institut public technique et scientifique Deltares. Depuis 2001, les fonctions de gestion et d?inspection sont séparées dans ce domaine. - Les Pays-Bas sont situés à l?aval de cours d?eau dont les sources sont dans des pays voisins. Les plus importants de ces cours d?eau disposent d?instances de coordination multilatérales en application de textes internationaux (Rhin, Meuse, Escaut), chargées notamment de coordonner la mise en oeuvre de la directive européenne cadre sur l?eau et de la directive relative à l'évaluation et à la gestion des risques d'inondation. Ces commissions fluviales internationales constituent aussi le support du développement conjoint de dispositifs de prévision des crues cohérents et par- tagés sur les grands cours d?eau. Annexe 3.3.2 Une organisation spécifique pour la gestion de l?eau aux échelons territoriaux L?organisation territoriale générale, institutionnelle et administrative, des Pays-Bas repose sur 12 provinces et 388 municipalités, pour environ 17,5 millions d?habitants. Les provinces disposent d'une autonomie limitée ; elles sont compétentes sur le développement spatial et économique, la 45 Cette description cite largement le site du Programme national grand delta. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 61/107 politique environnementale, la gestion stratégique des eaux superficielles (en lien avec les munici- palités et en concertation avec les « waterschapen » Cf. infra), les transports en commun et l?éner- gie. Les 12 provinces sont, notamment, responsables de l?aménagement de leur terr itoire (espaces naturels, urbanisation, zones industrielles, transport et voies navigables régionaux). Les membres de chaque conseil provincial sont élus, chaque président du conseil « le Commissaire de la Reine » est nommé par l?État. Outre leur fonction en matière de gestion stratégique de l?eau, les provinces sont responsables des cartes d?aléa et de risque d?inondation. 21 « autorités locales de l?eau », les waterschapen (parfois traduits par « wateringues »), ont été constituées à partir de 2500 autorités historiques. Elles correspondent géographiquement à des districts hydrographiques, et sont centrales pour la gouvernance de l?eau et des inondations. Ces organismes disposent d?un conseil élu au suffrage universel pour cinq ans, qui identifie un président nommé par les autorités de niveau national, le « comte des digues » (Dijkgraaf). Ils gèrent les cours d?eau secondaires, et assurent la maintenance et la reconstruction de la plupart des systèmes d?endiguements et digues primaires ou secondaires, quel qu?en soit le propriétaire. Une loi de 1983 a précisé leur rôle. Financièrement autonomes, les waterschapen disposent d?un pouvoir régle- mentaire en matière de prévention des inondations et de protection des digues et des dunes, de surveillance du niveau et de la qualité des eaux, du traitement des eaux résiduaires urbaines, de la gestion des eaux souterraines. Ils fixent les taxes dues par les bénéficiaires, notamment pour la protection assurée par les digues et pour les émetteurs de pollutions. Les droits de votes sont établis en fonction des taxes payées, la population devant représenter au moins 50% des voix. Sauf exception, un seul waterschap intervient sur chacun des 95 systèmes d?endiguement. Les municipalités sont en charge notamment de l?occupation des sols et de l?urbanisme. Des règles strictes sont définies, au niveau national, qui concernent uniquement la construction dans les zones comprises entre les cours d?eau et les digues, ainsi que dans une bande (de largeur variable) derrière la digue. Les membres du conseil municipal sont élus. Le président du conseil « le maire/ bourgmestre», nommé par l?État, est responsable de la police et des autres services d?urgences. Si l?intégration de tous les enjeux relatifs à l?eau est très forte, la question des interfaces avec l?urbanisme, historiquement, a été moins forte et peu contraignante ? ceci pouvant aussi être lié à la densité et aux contraintes spatiales du pays. D?une manière générale, les règles de constructions font référence à des obligations génériques de stabilité dont le respect relève du maitre d?ouvrage. Il existe des guides techniques qui ne font pas office de prescriptions. Pour les habitations flottantes mises en oeuvre hors de la zone protégée, il est mentionné qu?elles sont construites « à vos risques et périls ». Annexe 3.3.3 Un financement des protections et de la prévention organisé dans une logique de subsidiarité Il existe une hiérarchie des protections. Les protections primaires du domaine de l?État (notamment les grands barrages) sont financées par le budget de l?État. - Les protections primaires du domaine des autorités régionales de l?eau sont entretenues par les autorités régionales de l?eau sur leur budget (notamment grâce à leur impôt propre) ; pour leur construction, le financement repose toutefois à hauteur de 45% sur le budget de l?État (via le pro- gramme HWBP de protection contre la submersion). En 1996, la loi sur les ouvrages de protection contre les submersions a mis en place des inspections techniques réglementaires donnant lieu à des rapports publics et la validation par le parlement du budget pour l?entretien des ouvrages. Encadré 12 : différenciation des systèmes d?endiguement en fonction des niveaux de protection Les digues sont classées en plusieurs catégories, ces classements étant régulièrement revus, avec, le cas échéant, des objectifs de protection modifiés, et des responsables et gestionnaires redéfinis. Sur le Rhin et la Meuse, le Rijkswaterstaat, organisme national, est maître d?ouvrage et gestionnaire des fleuves et grands cours d?eau. Par PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 62/107 contre la gestion de la plupart des digues correspondantes, classées « primaires », est assurée par les 21 « auto- rités locales de l?eau », les waterschapen. Ces organismes assurent par ailleurs la maintenance et la reconstruction des systèmes d?endiguements et digues secondaires quel qu?en soit le propriétaire. Pour des cours d?eau et digues régionaux, comme la Geul et la Roer, les « standards » génériques de protection, en durées de retour des événements de crues, sont de 10 ans pour des prairies, 25 ans pour des cultures, 50 ans pour l?horticulture, 100 ans pour les zones urbanisées. Dans le sud du Limburg, avec une population dense et des vallées pentues (pour les Pays-Bas), certaines zones urbaines comme Valkenburg par exemple, sont protégées contre des crues de période de retour 25 ans, notamment pour des raisons de coûts des ouvrages, semble-t-il. Ces zones ont été exposées en juillet 2021 à des crues plus que centennales. - L?entretien et le curage, qu?il a été difficile de différencier précisément lors des entretiens, des cours d?eau dépendent fortement de leur fonction. Les voies navigables font l?objet de valeurs seuil (étiage) qui justifient des interventions de curage immédiates en cas de perturbation du trafic. Les cours d?eau qui ont pour seul objet l?écoulement d?eau font aussi l?objet d?un suivi afin de res- pecter le gabarit inscrit dans le registre, mais sur une base annuelle seulement. Certains cours d?eau sont dépourvus de gabarit mais font l?objet de curages pour des raisons de qualité écologique et chimique du milieu aquatique : le curage permet de réduire la charge organique au profit du respect des objectifs de la directive-cadre sur l?eau. Pour les grands cours d?eau (Escaut, Meuse, Rhin), l?agence des travaux publics de l?État applique les normes inscrites dans un registre de gabarit (chenal de navigation et végétation maximale), ce qui se traduit par des interventions de curage mais aussi des interventions en certains points du réseau (notamment au droit des ouvrages d?art). Des mesures ont lieu chaque année pour vérifier le gabarit de chaque cours d?eau concerné et des travaux sont réalisés en cas de besoin. Le coût est porté par le budget de l?État. Pour les cours d?eau relevant de la compétence des autorités régionales de l?eau et les autres cours d?eau, une distinction est faite entre trois catégories de cours d?eau : - Catégorie A (domaine de l?autorité régionale de l?eau) : de façon similaire aux cours d?eau ma- gistraux entretenus par l?agence des travaux publics de l?Etat, les normes découlant d?un re- gistre de gabarit sont appliquées. - Catégorie B (cours d?eau sous propriété privée ou relevant du domaine d?autres collectivités) : l?entretien est assuré par les propriétaires sous le contrôle de l?autorité régionale de l?eau, qui intervient auprès du gestionnaire en cas de défaut d?entretien. - Catégorie C : (cours d?eau propriété de particuliers) : l?entretien est entièrement de la respon- sabilité des particuliers. Les autorités régionales de l?eau disposent d?un plan pluriannuel de curage visant à maintenir le gabarit prévu par le registre. Ce plan s?appuie sur un programme de mesures et sur les données historiques, qui permettent d?identifier les zones sujettes à sédimentation. Le financement de ces opérations est assuré en partie par l?impôt propre aux autorités régionales de l?eau et, lorsque les cours d?eau ou canaux ont une fonction touristique, économique ou de navigable (exemple : Eem), en partie par les municipalités et les provinces concernées, dans le cadre d?accords ad hoc. - Le financement de la gestion de l?eau repose sur l?impôt levé par les autorités régionales de l?eau, déterminé chaque année par chaque autorité régionale pour son propre territoire de telle sorte que les recettes couvrent le service rendu, impliquant que l?impôt varie d?une région à l?autre. Cela s?explique par la diversité des situations : les besoins de financement pour la gestion de l?eau ne sont pas homogènes sur le territoire néerlandais (certaines autorités ont plus de digues à en- tretenir que d?autres?). Le programme visant à recréer de l?espace pour la rivière a été financé par l?État, ponctuellement avec un cofinancement local (provinces) pour prendre en compte des fonctionnalités non prévues par le programme. La loi actuelle prévoit toutefois que le montant des impôts puisse être modulé sur la base de la valeur locative des immeubles, des espaces agricoles et des espaces naturels, laquelle peut varier dans le temps ; ainsi, le montant des impôts peut varier dans le temps pour un contribuable donné, PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 63/107 sans que le service rendu par l?autorité régionale ne change. En mars 2024, une proposition de loi sera déposée, répondant à une demande des autorités régionale de l?eau, permettant de moduler le montant des impôts non pas sur la valeur locative des biens mais sur les « caractéristiques » (destination, surface, etc.) des biens. Les ordres de grandeur sont les suivants : ? une taxe locale des autorités régionales de l?eau due par toute construction pour ? entretien de digues et dunes (?10 à 50 ¤/an) par maison ; ? entretien du système d?irrigation et de drainage (canaux et cours d?eau) ; ? le cas échéant : frais de pompage (?10 à 50 ¤/an) ; ? assainissement (?200 ¤/an). Pour la qualité des milieux aquatiques ; le principe du pollueur- payeur est ainsi appliqué, sécurisant le financement. Les réseaux appartiennent aux municipalités. ? Le budget gouvernemental pour les nouveaux ouvrages (?50 ¤/an), en particulier : ? en cas d?évolution des normes ; ? en cas de nouvelles connaissances ; ? pour tenir compte de l?évolution des contraintes et du dérèglement climatique (niveau de la mer, vent, crues des rivières). Aux Pays Bas, les habitants paient ainsi environ 200 euros par maison et par an pour l?assainisse- ment, 50 euros pour la gestion d?eau dans les zones protégées, 50 euros pour les stations de pompage, et 50 euros pour les investissements (50% provenant de fonds nationaux, 50% des fonds locaux à deux niveaux de responsabilité (40 + 10). La taxe doit recouvrir les frais, et vient en contrepartie d?un service. Depuis 1953, il y une solidarité entre zones ruraux et urbain. R. Slomp, lors d?un colloque à La Rochelle indique ainsi : « C?est très important, dans notre sys- tème, que l?entretien des ouvrages soit géré localement et quotidiennement par les autorités régio- nales de l?Eau. Ces autorités gèrent aussi tous les petits cours d?eau et toutes les petites digues. On a 3 600 km de digues principales et environ 15 000 km de digues régionales. Les gestionnaires ne sont pas propriétaires des digues. La propriété et la gestion ont été séparées dans certains cas pour faciliter l?action. Celui qui gère une petite digue soit s?occuper de son entretien pareil pour un petit cours d?eau, et cela réduit la taxation. Si un paysan nettoie sa propre canalisation pour le drainage et l?irrigation autour de ses champs, il évite l?amende qu?il aurait s?il ne le faisait pas. C?est un système qui articule travail volontaire et taxation pour le service reçu. Cela représente en tout 400 euros par année et par habitant. Un agriculteur qui a plus de terrain paie plus ; ce système date du XIIIème siècle. » Annexe 3.4. Une gestion de crise fondée sur des principes clairs et partagés - La gestion de crise, selon son étendue, dépend du niveau communal, du niveau de « régions de sécurité », ou du niveau national. Concernant la sécurité civile, le commissaire du roi au niveau provincial exerce une fonction de coordinateur du maintien de l'ordre public et de la gestion des opérations de secours lors de catastrophes dépassant les limites d'une commune. La responsabilité opérationnelle de la sécurité publique est portée par les 25 « régions de sécurité», conseillées par les waterschapen quand il s?agit d?inondations. Elles donnent mandat aux maires de décider des évacuations. Ces régions sont présidées par un maire (habituellement un maire de commune importante). Elles correspondent aux régions de police, avec qui elles partagent le même président, et coordonnent les services de secours municipaux et les autorités de santé, en crise. Beaucoup de membres des équipes de secours sont des volontaires. La coordination nécessaire entre l?assistance des services d?urgence et de l?armée est assurée par le Ministère de Sûreté et de la Justice. Chaque ministère dispose d?une cellule de crise «DCC ». Le Ministère de Sûreté et de la Justice est chargé de leur coordination. - Les bulletins de l?institut national de météorologie, sont adressés aux structures en charge de la PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 64/107 prévision des crues, toutes les 6 heures avec des messages spécifiques en cas de crise, qui font référence aux conditions hydrauliques utilisées dans les modèles, permettant de se situer par rap- port au risque de rupture des protections. Si ces bulletins sont publics, des messages d?urgence sont adressés aux autorités régionales de l?eau, qui en fonction de leurs analyses informent la région de sécurité. En termes de communication de crise, les experts néerlandais insistent sur la nécessité de s?ap- puyer sur un seul « point of truth » : seule l?autorité compétente (l?autorité régionale de l?eau) a la capacité d?interpréter les bulletins et les messages d?urgence provenant du centre de crise sur la gestion de l?eau. C?est un des enseignements tirés de l?expérience des inondations de 2021 dans le Limbourg ; la région de sûreté a fait évacuer un hôpital (237 malades) sans que les autorités compétentes en matière hydraulique ne l?estiment nécessaire, ce qui en temps de COVID a créé des risques sanitaires jugés « inutiles ». - En situation de pré-crue, pour que les digues assurent leur fonction de protection, il est nécessaire de renforcer certains points, de fermer de façon étanche certains passages (par exemple un pas- sage routier sous un remblai routier ou ferroviaire faisant fonction de digue, ou une interruption dans une digue pour le passage d?une voie de circulation). L?ensemble de ces actions prennent habituellement 5 jours de travail. Par ailleurs, pendant une crise, un dispositif de surveillance et d?intervention sur les digues est prévu, qui mobilise des professionnels, notamment les inspecteurs de digues, aidés par des gardiens de digues volontaires qu?ils encadrent, forment et réunissent une fois par an. Certaines autorités régionales de l?eau recourent, en effet, à des bénévoles pour la surveillance des digues mais aussi, conjointement avec leur personnel administratif, pour la fer- meture de certains batardeaux et pour le renforcement de digues en cas d?urgence (sacs de sable). Pour la préparation aux situations de crise mais aussi pour l?inspection des digues, des formations sont prodiguées par les autorités régionales de l?eau en mobilisant le cas échéant des entreprises qualifiées. Ce dispositif a été globalement efficace lors de inondations de 2021. En certains endroits, il s?en est fallu de quelques centimètres que l?eau ne dépasse le haut de la digue, ou le haut de la rangée de sacs de sable ajoutée. S?il y avait eu du vent, plusieurs digues auraient surversé. Sur la Meuse, l?eau a pu dépasser le niveau de la digue du système « primaire », heureusement renforcée par des sacs de sable. Des évacuations préventives importantes ont néanmoins été mises en oeuvre. - La mise en place de pompages d?urgence relève des gestionnaires des systèmes concernés (l?État pour les grands fleuves, les autorités régionales pour les autres cours d?eau). Il est possible que les régions de sûreté (autorités intercommunales, présidées par le maire de la ville principale, chargées de la sécurité civile) sollicitent le recours aux pompages d?urgence des autorités régio- nales de l?eau lorsque des incidents locaux se produisent et que les pompages pérennes en place et les équipements des pompiers ne suffisent pas. Le Centre national de coordination opérationnel de l?Agence de travaux publics de l?État, au niveau de l?État, est responsable de la gestion du parc de pompes d?urgence, mobilisées pour les crises nationales (et internationales). Le dimensionne- ment du parc est fondé sur une analyse portant sur la période 2003-2007 et sur des études de gestions des catastrophes naturelles. De ces dernières, il est apparu, par exemple, que les pompes historiques, montées sur des barges flottantes, n?étaient pas adaptées pour une mise en place rapide, justifiant leur remplacement par des pompes au format conteneur. Au niveau local, les autorités régionales de l?eau réalisent leurs propres analyses sur le besoin en pompes d?urgences, et les financent par leurs propres moyens. La capacité des pompes d?urgence est négligeable par rapport à celles des pompes pérennes, sur lesquelles les investissements sont privilégiés. Par exemple, suite aux inondations de 1998 (à Na- gele), l?autorité régionale de l?eau compétente a rehaussé de 60% la capacité de ses pompes pé- rennes. Les experts estiment que les pompes d?urgence sont mobilisées à des fins de communi- cation politique pour afficher la mobilisation de tous les moyens pour résoudre une situation de PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 65/107 crise46. Les pompes d?urgences néerlandaises sont également mobilisées en cas de sécheresse, lorsque les ouvrages le long des grands fleuves, destinés à alimenter en eau les systèmes hydrauliques locaux, se trouvent « à sec » du fait de niveaux d?eau trop faibles dans les fleuves. Annexe 3.5. De la prévention des inondations à l?adaptation au changement climatique En novembre 2023, les Pays-Bas ont connu une pluie constante pendant plusieurs semaines. Si cela permet de reconstituer les nappes, cela a posé des problèmes de sécurité du bâti. Cet épi- sode souligne aussi qu?est posée, plus qu?avant, la question de la place laissée au fleuve et la recherche de nouveaux équilibres. Au lieu d?évacuer le plus vite possible l?eau à la mer, un nouvel enjeu, au regard des risques de sécheresse est de la retenir. Le premier moyen pour cela identifié aux Pays-Bas est l?infiltration dans les sols et la recharge des nappes, et non la création de bassins de rétention, qui, de toutes façons sont difficiles à gérer car ils ont potentiellement deux objectifs difficilement compatibles : être vides pour écrêter les crues et retenir l?eau pour l?utiliser l?été. Dans deux ans, sont prévues de nouvelles décisions sur ce sujet, sur la base de nouveaux scenarios. Ce travail s?appuie sur des concertations, il sera présenté par le Commissaire au plan Delta et donnera lieu à des décisions du gouvernement. Le travail de planification spatiale au regard du changement climatique vise à travailler sur les limites que nous donne la nature, limites qui sont atteintes. Une priorité identifiée depuis 2021 est de mieux prendre en compte l?eau et les sols. Cela a été porté par le nouveau gouvernement, puis a donné lieu à un « policy brief » aux chambres, présentant les actions prévues en grandes lignes, à une revue scientifique, et à des discussions avec tous les niveaux de gouvernement. Sept principes sont arrêtés : - ne pas reporter de charge sur les générations futures ; - mieux prendre en compte les situations extrêmes ; - avoir une approche cohérente des inondations, de la sécheresse, des sols ; - avoir une « sécurité multicouche » dans la zone du delta ; - diminuer l?imperméabilisation, l'excavation, éviter les contaminations ; - avoir une approche intégrée de la vie dans l'environnement ; - se conformer à ces principes, les expliquer. Sur cette base, les pratiques vont changer : - prendre en compte les intérêts de l'eau et du sol pour des projets de construction dans la durée ; - avoir une utilisation parcimonieuse de l'eau, une eau propre et en quantité suffisante, des espaces pour retenir, stocker et évacuer l?eau ; - avoir un sol et un sous-sol sains et bien organisés. L?ambition est que : - la construction de bâtiments adaptés au climat devienne une pratique courante ; - des orientations nationales claires s?articulent avec une mise en oeuvre et des solutions locales ; - les système de l'eau et du sol guident la planification et les décisions ; - les solutions utilisées résolvent, autant que possible, plus d'un problème. 46 Des capacités de pompage d?urgence sont également développées pour parer à certains scénarios prévus dans le cadre de plans de gestion du risque. Par exemple, dans le Brabant septentrional, le choix a été fait par l?État de rehausser le niveau d?eau dans le grand lac Volkerak Zoommeer, qui sert de stockage d?eau douce pour les étés secs ; ce choix a eu pour effet de diminuer la capacité d?évacuation gravitationnelle des eaux provenant du système hydraulique local ((autorité régionale de l?eau Brabantse Delta), d?où la nécessité d?adjoindre des pompes d?urgence (mobiles, mais installées dans des sites prévus à cet effet le long du lac). Compte tenu du contexte (choix de l?État de rehausser le nveau du lac), les pompes d?urgence de l?autorité régionale de l?eau ont été financées par l?État dans ce cas précis PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 66/107 Six items guident une construction adaptée au changement climatique : prise en compte de la biodiversité, chaleur, submersion, inondation et ruissellement, sécheresse, biodégradabilité. Des lignes directrices ont été établies à l?échelle nationale, qui n?ont pas, pour le moment, de portée réglementaire. Leur ambition est de donner des orientations nationales claires, mises en oeuvre par les collectivités, et les activités. Ces principes pourraient, à terme, relever de la loi pour ac- croître leur portée. Dans le cas de projets de construction, et du choix des lieux où construire sont pris en compte, la compensation requise si on construit en zone inondable a été augmentée. Une carte a été établie qui fixe les contraintes pour l?aménagement, en fonction des enjeux liés à l?eau et aux sols. Au-delà de ce travail structurel de planification, une démarche que l?on pourrait qualifier de pros- pective et pragmatique a également été engagée dans le cadre du Programme Delta, sous l?égide du Commissaire. Encadré 13 : Le Programme Delta « Depuis déjà une dizaine d?années, les Pays-Bas ont mis en place une structure afin d?anticiper les effets du changement climatique sur le plan de la maîtrise de l?eau, il s?agit du programme Delta. Ce programme est le fruit d?une collaboration entre l?État, les provinces, les wateringues, les communes et des organismes de recherche. Y sont également impliqués les secteurs économiques dépendant de l?eau. Ce pro- gramme est coordonné par le commissaire pour le Delta, un haut-fonctionnaire indépendant du gouvernement. Il est financé par des fonds publics dédiés. Cette indépendance politique et financière, inscrite dans la loi et, de ce fait, approuvée par le Parlement, garantit une certaine protection à cette structure, ainsi qu?une mise à l?abri des alternances électorales et des réductions budgétaires qu?elles peuvent décider. Chacun au sein du programme est encouragé à rechercher et à évaluer les mesures qui rendront la maîtrise de l?eau et son utilisation plus pérennes, sans que soient mis en péril les enjeux économiques dépendants des ressources en eau. Le principe de base est celui des chemins d?adaptation (Haasnoot et al., 2013), dans lesquels les mesures identi- fiées et jugées prometteuses sont mises en place graduellement, au fur et à mesure que le besoin s?en fait sentir, et en consolidant les mesures prises précédemment afin de ne jamais avoir à revenir en arrière. (..) Le gouvernement néerlandais a lancé en 2019 un grand programme de recherche afin d?en comprendre les conséquences possibles sur les stratégies actuelles de maîtrise de l?eau au-delà de 2100. Le but est d?appréhender comment ces stratégies doivent être modifiées au fur et à mesure que le niveau des mers montera de 5 mètres. Le programme, qui doit durer jusqu?en 2025, s?articule autour de cinq axes : ? À quelle vitesse le niveau des océans risque-t-il de monter ? La situation en Antarctique est un élément clé et dépendra des évolutions des émissions mondiales de gaz à effet de serre, telles que conceptualisées dans les scénarios Representative Concentration Pathway (Van Vuuren et al., 2011). ? Quels sont les défis posés par une hausse du niveau de la mer de 1, 2, 3 et 5 mètres ? Dans quelle mesure les PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 67/107 stratégies actuelles sont-elles tenables ? Cette partie concerne à la fois la stratégie de gestion des risques d?inon- dation et celle de l?approvisionnement en eau. ? Comment détecter une accélération de la hausse du niveau de la mer afin d?agir à temps ? ? Quelles seraient les conséquences d?une hausse du niveau de la mer sur les stratégies à long terme d?aménage- ment du territoire ? Et comment les anticiper dans les choix à faire aujourd?hui ? L?implantation de nouveaux quar- tiers se situant 7 mètres au-dessous du niveau de la mer est certes faisable économiquement et techniquement, mais est-ce un choix pérenne ? ? Comment élaborer une politique reposant sur la mise en place de mesures par étapes ? Comment organiser la gouvernance de cette politique, la communication à destination du grand public, etc. ? » PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 68/107 Annexe 4. La prévention des inondations en Belgique La prévention des inondations en Belgique, tout en s?inscrivant dans le cadre des directives européennes, relève très largement des régions, le niveau fédéral étant en charge de ce qui relève de la submersion marine. Même si cela peut induire des différences entre Flandre et Wallonie, des points communs ressortent dans des tendances de fond, comme une évolution d?une démarche de protection à une approche de la prévention par l?aménagement des territoires, et en particulier de la place laissée aux cours d?eau ou encore d?une attention croissante portée aux conditions d?urbanisation. Si la « Water Bomb » a touché dramatiquement la Wallonie, les suites de cette catastrophe ont conduit à un travail de fond, pluridisciplinaire et partenarial, tant en Wallonie qu?en Flandre. Dans la durée, un virage de la prévention des inondations vers l?adaptation au changement climatique est engagé. Annexe 4.1. Mise en perspective historique et géographique Annexe 4.1.1 Un pays présentant des enjeux différenciés du point de vue de la prévention des inondations Le territoire belge comprend, soit en totalité soit partiellement, 6 bassins hydrographiques : l?Yser, l?Escaut, la Meuse, le Rhin, la Seine et le bassin côtier de la Mer du Nord. Leur ampleur sur le territoire belge donne un statut particulier aux districts internationaux de la Meuse (avec la France, l?Allemagne, les Pays-Bas et le Luxembourg) et de l?Escaut (avec la France et les Pays-Bas). La gestion des eaux comporte donc, en Belgique, des enjeux transfrontaliers importants sur plu- sieurszones : Escaut et l?Yser (dont les enjeux relèvent de la Commission Internationale de l?Escaut (CIE) qui unit 6 parties contractantes) ; les Moëres, bande poldérisée entre Dunkerque et Furnes, où est en cours le projet INTERREG - MAGETEAUX qui a été mobilisé en novembre 2023 afin d?assurer l?évacuation des eaux via le canal de Furnes à la mer par Dunkerque ; et la nappe des calcaires carbonifères dans le Tournaisis et de la région de Roubaix-Tourcoing. Encadré 14 : Quelques repères sur la Flandre et la Wallonie La Flandre belge constitue, comme le Nord de la France et les Pays-Bas, une zone poldérisée, plate, au niveau de la mer, qui sur 13.626km² accueille 6.774.807 habitants (soit 497 habitants /km²). Elle fait partie de 2 districts hy- drographiques : l?Escaut et la Meuse. - Le district hydrographique international de l'Escaut a une superficie de 36.500 km², dont environ un tiers se trouve en Flandre. La partie flamande est formée par le bassin hydrographique des rivières Escaut et Yser et de leurs affluents et des Polders de Bruges, ainsi que par les eaux souterraines et les eaux côtières qui y sont associées. Elle comprend les provinces de Flandre occidentale, de Flandre orientale et du Brabant flamand, ainsi qu'une partie des provinces d'Anvers et du Limbourg. Sur les 300 communes flamandes, 263 se trouvent entièrement et 23 partiellement dans le district hydrographique de l'Escaut. Le district est divisé en dix bassins. En raison du relief essentiellement plat, les rivières sont des cours d'eau de plaine avec de larges vallées et des vitesses d'écoulement et des débits faibles. La zone est densément peuplée et fortement urbanisée et se caracté- rise par un réseau très dense de routes de transport. Cette situation, qui s'ajoute à l'urbanisation, crée une forte fragmentation. Le district abrite un certain nombre de grandes zones industrielles, dont le port d'Anvers. L'agricul- ture intensive est également prédominante, représentant un peu moins de la moitié de l'utilisation des sols. Les grandes zones naturelles d'un seul tenant sont rares. - Le district hydrographique international de la Meuse couvre une superficie d'environ 34 500 km², dont à peine 1 600 km² en Flandre. En Flandre, le district hydrographique est constitué de la Meuse et de ses affluents, ainsi que des eaux souterraines associées. Le district ne forme pas un ensemble contigu en Flandre : une partie est située au nord de la province d'Anvers, une deuxième partie à l'est de la province du Limbourg et une troisième partie à Voeren. Sur les 300 communes flamandes, 14 se trouvent entièrement et 23 partiellement dans le district hydro- graphique de la Meuse. Sur les 11 bassins, seul le bassin de la Meuse appartient au district hydrographique de la Meuse. Parmi les six systèmes d'eaux souterraines, l'ensemble du système de la Meuse, une petite partie orientale du système de Brulandkrijt et la partie septentrionale du système de la Campine centrale appartiennent à l'arron- dissement hydrographique de la Meuse. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 69/107 Le relief de l'arrondissement de la Meuse est essentiellement plat. La densité de population y est plus faible que dans le reste de la Flandre. Le réseau de routes de transport y est également moins dense. Les principales zones industrielles sont situées le long des canaux. Un peu moins de la moitié du territoire est consacrée à l'agriculture, essentiellement intensive. Il y a un peu plus de zones naturelles dans le district du bassin de la Meuse que dans le district du bassin de l'Escaut. - La Wallonie,16 901 km2, est constitué de cinq provinces : le Brabant wallon, le Hainaut, Liège, le Luxembourg et Namur. En superficie, la plus grande est la province de Luxembourg qui est également la moins peuplée des cinq avec une densité de population de 64,54 habitants au km², tandis qu?elle est de 372,43 habitants au km² dans le Brabant wallon. Le territoire est également divisé en 20 arrondissements, eux-mêmes divisés en communes. Sur les 262 communes en Wallonie, 65 portent le titre de Ville. À l'exception de la province du Brabant wallon, au sud de Bruxelles, et une grande partie du Hainaut à l'ouest, qui jouxte la France, le reste de la Wallonie ? sauf deux ou trois enclaves, notamment du côté du Grand-Duché de Luxembourg ? appartient au bassin mosan47. Le système fédéral belge conduit historiquement à une répartition complexe entre les différentes structures politico-administratives des compétences mises en jeu par la prévention des inondations, entendue au sens large, de l?aménagement du territoire à la planification des crises. Les inondations meurtrières de l?été 2021 ont créé un choc et ont suscité des critiques sur la ca- pacité du dispositif en place à anticiper et répondre à des événements de cette ampleur. De nom- breuses actions sont en cours, notamment pour répondre à des impératifs de coordination accrue et plus efficace. Une commission d?experts en matière de gestion de crise a établi un livre blanc « Recommandations permettant d?améliorer la gestion de crise en Belgique » en avril 2023. Annexe 4.1.2 Des enjeux transfrontaliers majeurs Ces enjeux sont structurés dans différents cadres : - Par l'autorité de bassin de l'Yser, pour ce qui concerne la concertation bilatérale transfronta- lière autour de l'Yser, notamment en ce qui concerne la qualité de l'eau. - Par le Groupement Européen de Coopération Territoriale, pour la concertation transfronta- lière autour de l'Aa. Ces consultations s'inscrivent dans le cadre du groupe de travail sur l'eau du GECT. L'adaptation du "Moerenverdrag" est née au sein de ce groupe de travail, tout comme le projet Interreg Ma- geteaux, qui a mis en oeuvre une station de pompage sur le Speievaart vers le canal Nieuport - Dunkerque et une construction de glissières à Dunkerque. - Dans le projet Stratégique Vallée de l?Yser et du Handzame (province chef de file) avec les préparatifs en vue de la soumission du projet Provaly (Interreg) concernant le système transfron- talier de prévision et d'alerte, l'aménagement des berges, le GOG Proven, la de Stavele, etc. - Par la Commission Internationale de l'Escaut et, en particulier le groupe de travail hydrologie. La mise en oeuvre du plan pluriannuel ISC-CIE WGH 2022-2027 a commencé avec : - Le travail de préparation des bilans hydriques pour les principales masses d'eau transfrontalières, avec un rapport de la délégation flamande. Les délégations étudient maintenant ce rapport afin d'évaluer dans quelle mesure elles peuvent fournir des données pour les différents éléments du bilan hydrique et/ou si des éléments supplémentaires doivent être ajoutés. - La notification d'étiage a été standardisée et le calendrier de livraison des données a été synchro- nisé. - Les délégations néerlandaise, flamande, bruxelloise et française ont fait des présentations sur l'impact du changement climatique sur les masses d'eau. - Dans le cadre de l'atelier conjoint sur l'hydrométrie, un répertoire des personnes à contacter en 47 Source : Wikipedia PUBLIÉ https://fr.wikipedia.org/wiki/Province_du_Brabant_wallon https://fr.wikipedia.org/wiki/Province_de_Hainaut https://fr.wikipedia.org/wiki/Province_de_Li%C3%A8ge https://fr.wikipedia.org/wiki/Province_de_Luxembourg https://fr.wikipedia.org/wiki/Province_de_Namur https://fr.wikipedia.org/wiki/Densit%C3%A9_de_population https://fr.wikipedia.org/wiki/Arrondissement_administratif_de_Belgique https://fr.wikipedia.org/wiki/Commune_(Belgique) https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_communes_de_la_R%C3%A9gion_wallonne https://fr.wikipedia.org/wiki/Ville_de_Belgique https://fr.wikipedia.org/wiki/Brabant_wallon https://fr.wikipedia.org/wiki/Bruxelles https://fr.wikipedia.org/wiki/Province_de_Hainaut https://fr.wikipedia.org/wiki/France https://fr.wikipedia.org/wiki/Luxembourg_(pays) Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 70/107 cas d'inondation a été lancé, ainsi qu'un aperçu des procédures de travail et de la documentation des organigrammes sur la gestion de crise en cas d'inondation. - Une visite de travail 2023 s'est concentrée sur les mesures de prévention des inondations dues aux marées à Ostende. - Les travaux sur l?alignement bilatéral des principaux cours d?eau transfrontaliers se poursuivent. - Les délégations ont été invitées à fournir une vue d?ensemble des cartes d?inondation natio- nales/régionales afin de relier les plaines inondables transfrontalières. Concrètement, fin décembre 2023, il a été convenu lors de la réunion des chefs de délégation que la Flandre et la France mettent en place une coopération bilatérale pour, d?une part, avoir une vision globale des accords et des conventions entre les gestionnaires de l?eau et vérifier que les mesures de gestion de crise sont suffisamment adéquates et, d?autre part, élaborer un plan d?action transfrontalier tant en termes de planification que de dispositions pour laisser un espace suffisant Room for the River) à l?eau afin de réduire ou d?éviter les risques d?inondation. Annexe 4.2. La gestion de l?eau dans le système fédéral belge Annexe 4.2.1 Le rôle important des régions La Constitution belge et la Loi spéciale de réforme institutionnelle du 8 août 1980, suivie des réformes successives de l?État belge, fixent la répartition des compétences entre l?État fédéral, les Communautés (Communauté française de Belgique/Fédération Wallonie-Bruxelles, Communauté flamande, Communauté germanophone de Belgique/Ostbelgien) et les Régions (Région wallonne, Région flamande, Région de Bruxelles-Capitale), qui constituent ensemble les « entités fédérées ». Les régions ont des compétences dans les domaines qui touchent à l?occupation du territoire au sens large, aux « matières économiques et localisables ». Les communautés sont en charge de ce qui concerne les personnes (matières personnalisables comme la langue, l?éducation, la culture, le sport, l?aide aux personnes). Compte tenu de cette répartition des compétences, la politique belge en matière de prévention et de gestion des inondations et des phénomènes de submersion ? de l?aménagement à la gestion de crise ? relève de différents cadres normatifs, équivalents en termes de hiérarchie des normes, et de différentes autorités qui doivent se concerter. Les Régions, depuis 1980, sont compétentes en matière d?aménagement du territoire et à ce titre, de la politique de l?eau, de la gestion des districts hydrographiques, de la conservation de la nature, des travaux publics et des transports. Les principaux outils juridiques en matière de politique de l?eau sont, en Belgique, des décrets pris par les gouvernements régionaux : il s?agit, pour la Flandre, du décret « Politique intégrale de l?eau » du 18 juillet 2003, codifié dans le Code de l'eau, pour la Wallonie, du décret relatif au Livre II du Code de l?Environnement constituant le Code de l?Eau du 27 mai 2004 et pour Bruxelles-Capitale, de l?ordonnance du 20 octobre 2006 établissant un cadre pour la politique de l?eau. Ces trois textes transposent les directives européennes 2000/60/CE (« Directive-cadre sur l?eau ») et 2007/60/CE (« Directive Inondation »). L?État fédéral intervient cependant dans la mise en oeuvre de la directive-cadre pour les aspects liés aux eaux côtières, en particulier pour la Mer du Nord. Cette structuration se traduit par une démultiplication des participations représentant la Belgique, dans les différentes instances, par exemple, dans celles dédiées à la gestion transfrontalière de l?eau. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 71/107 Annexe 4.2.2 Une organisation de la gestion de crise par niveaux de gravité Si les Régions sont en charge de l?aménagement du territoire et interviennent donc, au sens large, dans la prévention des catastrophes naturelles, la gestion de ces dernières stricto sensu n?est pas de leur ressort. Le modèle belge de gestion de crise est fondé sur la distinction de plusieurs phases définies par le niveau de gravité, l?ampleur géographique et le type de moyens requis : la phase communale, dirigée par le bourgmestre ; la phase provinciale, dirigée par le gouverneur ; la phase fédérale, qui dépend du Ministre de l?Intérieur. La continuité et l?évaluation des critères de passage d?une phase à l?autre sont assurées par le Centre de crise national (NCCN), qui est un acteur interfédéral. Le NCCN est en outre chargé, au niveau national, de développer une stratégie globale d?amélioration de la résilience de la Belgique (élaboration de méthodologies standards pour les acteurs locaux, lancement de campagnes de prévention?), d?organiser la planification d?urgence et d?assurer une vigilance active. Encadré 15 : le NCCN (Centre de crise national) Le NCCN est en charge de la planification d?urgence, pour l?ensemble des risques, au niveau stratégique. Il n?a pas de rôle opérationnel : par exemple, la question du pompage en gestion de crise relève de la direction générale de la sécurité civile. A l?échelle locale, ce sont les bourgmestres qui sont en charge de la crise. Le NCCN fournit le contenu de la formation, d?une grosse demi-journée, mise en place pour les bourgmestres nouveaux. Nécessaire même s?ils ont des experts auprès d?eux, elle est prévue tous les 4 ans mais pas obligatoire. Le NCCN a des échanges en crise avec les gouverneurs via les experts et coordinateurs. Les remontées d?info au NCCN se font via les gouverneurs. Le niveau fédéral est facilitateur et coordonnateur mais n?a pas autorité sur les autres. Les bourgmestres ont accès à l?application SI en gestion de crise, avec des droits gérables pour avoir le cercle de travail efficace. La communication en crise repose sur un contrat cadre pour appeler les personnes en cas d?urgence ? il vaut pour les bourgmestres, gouverneurs NCCN. Le principe est que celui qui gère la crise communique ? les autres ne peuvent que renforcer ou décliner les informations principales. La cellule de communication du NCCN propose des messages et fait une veille des réseaux sociaux. C?est le NCCN qui évalue le besoin de mobilisation de moyens nationaux, toutes les remontées de demandes se font par écrit dans une application informatique, en cours de modernisation. L?assurance de moyens suffisants repose sur le fait que chacun en a et qu?il y a, en plus, un stock national. La crise covid a fait ressentir le besoin d?objectiver les ressources disponibles ; c?est un travail en cours, qui inclut les pompes. Il faut tenir compte du fait que des moyens existants ne sont pas nécessairement disponibles ou mobilisables, et qu?il faut réussir à mutualiser au bon niveau, pour n?être ni en manque, ni en sur capacité. En termes de mutualisation possible ou soutien entre états, les plus efficace serait des achats au niveau de l?UE. La planification en matière de sécurité civile incombe ainsi au premier chef au bourgmestre (maire d?une commune), qui doit disposer d?un Plan général d?urgence et d?intervention (PGUI) comprenant les directives générales de gestion des situations d?urgence de tout type. C?est le bourgmestre qui décide d?éventuelles évacuations. Il s?appuie sur des coordinateurs de situation d?urgence dont c?est le seul métier, quitte à le faire pour plusieurs communes. Toutefois, dès lors que la gestion d?un événement excède les pouvoirs et les moyens dont disposent les bourgmestres, c?est la province, qui intervient. Les provinces sont un pouvoir local, en général placé sous l?autorité des Régions. Par exemple, les inondations de novembre 2023 ont été gérées au niveau provincial et les inondations de l'été 2021 ont été gérées au niveau fédéral. Le secours aux personnes et la sécurité civile sont des compétences fédérales à peu près exclusives, dont l?organisation est déléguée aux pouvoirs locaux que sont les provinces et les communes. Ce principe de délégation dissocie donc la compétence fédérale des moyens fédéraux : les services de secours centraux de l?État fédéral (dit « moyens spéciaux » : unités spécialisées de la police et des pompiers, hélicoptères?) constituent une réserve à l?appui des services de secours locaux. Autrement dit, les services fédéraux peuvent être sollicités par les Régions ? ainsi que par les autorités communales et provinciales ? pour la mise en oeuvre de mesures particulières en PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 72/107 gestion des crises ou des situations d?urgence, ou pour l?établissement des plans d?urgence et d?intervention. Cette configuration implique que les aspects concrets de la gestion de crise et le besoin de planification qui en découlent, dépendent ? d?une façon particulièrement aiguë en Belgique ? de la bonne coordination opérationnelle entre les différents niveaux de pouvoir. En effet, la totalité des implications d?une catastrophe naturelle excède nécessairement les compétences exclusives de chacun. Encadré 16 : Prévision des inondations et alertes Les prévisions météorologiques sont réalisées par l?Institut royal de météorologie (organe fédéral) et l?analyse des paramètres hydrologiques incombe aux Régions. Ainsi, le service opérationnel de prévision des crues de Flanders Hydraulics (HIC - Centre d'information hydrologique) et de l'Agence flamande pour l'environnement utilisent une grande variété de données météorologiques en combinaison avec des modèles hydrologiques et hydrauliques 1D/2D pour fournir des prévisions de niveau d'eau et de débit sur les voies navigables et non navigables catégorie 1) flamandes et le long de la côte belge. Des experts interprètent quotidiennement la situation et communiquent des messages sur waterinfo.be. En cas de crise, ces messages sont activement diffusés pour la gestion de crise et les services d'urgence. Waterinfo.be intègre actuellement 2162 stations de mesure qui fournissent des données en temps réel (ou presque) avec des séries chronologiques à haute résolution le long des voies navigables flamandes, les cours d?eau non navigables de catégorie 1 et de la côte. Des stations supplémentaires des régions environnantes (région wallonne en Belgique, France, Pays-Bas) sont disponibles pour la gestion opérationnelle des crises en cas d'inondations. Lorsque la vitesse et la direction du vent, en particulier pendant la marée de printemps, conduisent à des marées de tempête élevées le long de la côte belge ou dans l'estuaire de l'Escaut, ceci est communiqué sur waterinfo.be par les experts de Flanders Hydraulics qui font les interprétations basées sur les différentes sorties de modèles. Le plan d'urgence à appliquer le long de la région côtière peut être consulté sur waterinfo.be. En Wallonie, la prévision des crues est réalisée par le SPW, Service public de Wallonie, impliquant deux entités internes : - Service public de Wallonie Mobilité et Infrastructures, Direction de la Gestion hydrologique (prévision des crues) - Centre Régional de Crise (prévention et coordination internes en temps de crise, accompagnement des services). La prévision des crues est obligation légale, mais la transmission des infos n'est pas codifiée. Les alertes sont transmises aux services eau et voies navigables, sur site web grand public, et la CRC régional communique aux autorités en charge de crises et urgence. Annexe 4.2.3 Un système assuranciel présenté comme fragile En matière d?assurance, la Belgique compte parmi les pays ayant mis en place un dispositif privé de garanties contre les catastrophes naturelles le cadre des polices d?assurance incendie, ce qui permet en principe au plus grand nombre d?accéder à cette protection. Toutefois, il ressort des échanges que ce dispositif d?assurance privé, combiné aux fonds de calamités publiques mis en place par les régions, est plafonné (350 M¤ par catastrophe) et a montré ses limites lors des inondations de juillet 2021. Le coût des dommages a été évalué à près de 2,5 Md¤, très au-delà des plafonds d?intervention. L?ensemble des dommages est estimé à environ 1% du produit intérieur brut national48. Dans ce contexte, un dispositif ad hoc a été mis en place au seul niveau régional afin d?indemniser les victimes (les assureurs belges ont prêté 1 Md ¤ à la Wallonie à taux zéro, sur une durée de huit ans) et une réflexion plus générale a été engagée afin de réformer le système d?assurance privé et celui des fonds de calamités. Cela concerne également les biens professionnels et les surfaces agricoles et intègre un objectif de mieux évaluer le coût des inondations. Sur ce terrain, la Flandre ? Flanders Hydraulic Research en coopération avec l?Université de Gand (département de géographie) - a développé, dès les années 2000, une méthode originale 48 L?Union européenne a pris en compte un montant de 5,56 Md pour l?ensemble des événements de juillet 2021. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 73/107 d?évaluation des conséquences des inondations, sur la base d?un modèle (LATIS) s?appuyant sur un système d?informations géographiques et des modèles hydrologiques ainsi que des données socio-économiques et d?usage du foncier. Le but affiché est de chercher à minimiser les conséquences des inondations plutôt que de chercher à les prévenir. En dépit de ces démarches, les assureurs estiment que la prise en compte des risques climatiques est fortement problématique en Belgique, notamment du fait de la régionalisation des compétences. Ils plaident pour un nouveau système, a minima fédéralisé, sinon européanisé. Encadré 17 : l?assurance des agriculteurs en Flandres Depuis 2019, une réforme de l?assurance49 articule l?assurance que les agriculteurs doivent désormais souscrire sur le marché et le soutien du gouvernement. En pratique, chaque agriculteur doit souscrire à une assurance in- tempéries globale dans le secteur agricole ? la grêle par exemple, en choisissant sur quelles parcelles. Le gouver- nement apporte une aide à hauteur de 65% du coût de l?assurance. A partir de 2023, si les agriculteurs souhaitent étendre leur champ de couverture, l?aide est inférieure, de l?ordre de 30 à 45% selon les budgets. Le gouvernement intervient en cas de catastrophe naturelle en complément des assurances (au-delà d?une occurrence trentennale), seulement pour les agriculteurs assurés. De leur côté, les agriculteurs doivent s?inscrire dans une démarche de prévention, avec des bénéfices pour leurs cultures (par exemple, protéger les vergers), mais aussi plus larges : limiter l?érosion (haies), ce qui est un bénéfice pour eux et pour les villages voisins. Se posent aussi des questions de la place laissée à l?eau le long de certains fleuves (Yser). Annexe 4.2.4 Le choc des inondations de juillet 2021 La répartition fragmentée des compétences est parfois redoublée par un effet de concurrence entre les différents niveaux de pouvoir. Cela peut conduire à un défaut de coordination ou à des retards dans la prise de décision, comme le pointe assez sévèrement la commission fédérale chargée de tirer les leçons des grandes inondations de l?été 2021. Son rapport prend par exemple appui sur la dissociation entre la prévision météorologique qui est réalisée par l?Institut royal de météorologie (organe fédéral) et l?analyse des paramètres hydrologiques, qui incombe aux Régions. En 2021, cette configuration a gêné la transmission d?une information complète sur le risque de crue aux autorités locales. Une fois les alertes données, les mesures à prendre doivent être concertées entre les autorités régionales et locales, voire fédérales, ce qui prend un temps non négligeable en situation de crise. Les inondations de 2021 ont constitué un facteur de choc à l?échelle du pays en matière de plani- fication et de gestion d?événements climatiques de grande ampleur. Si la concertation qui dérive du fédéralisme rend le dispositif potentiellement difficile à appréhender ? y compris pour les acteurs eux-mêmes, avec l?allongement des délais de décision qui peut en résulter ? la structure de la réponse des autorités a fait l?objet de plusieurs réévaluations depuis 2021-2022, notamment du fait du NCCN. De leur côté, les autorités régionales ont révisé leurs plans d?urgence, tandis que les communes se sont davantage investies dans la rédaction de leurs propres plans. La culture du risque, dont le défaut a souvent été dénoncé, tend ainsi à se développer dans un environnement institutionnel particulièrement complexe (voir infra). Annexe 4.3. Les Flandres : une structuration par grand bassin, en cours d?inflexion En Flandres, le pilotage de la prévention des inondations implique plusieurs ministères : infrastructures, environnement, agriculture, et agence de l?environnement des Flandres. Environ 49 19 Juin 2019. - Arrêté du Gouvernement flamand relatif à la subvention de prime pour une assurance intempéries globale dans le secteur agricole PUBLIÉ https://www.ejustice.just.fgov.be/eli/arrete/2019/06/19/2019030606/justel https://www.ejustice.just.fgov.be/eli/arrete/2019/06/19/2019030606/justel Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 74/107 80 000 foyers flamands ont une probabilité moyenne à élevée d'être inondés ; l'urbanisation et le changement climatique augmentent les risques. La réponse apportée passe par une approche « multicouche » de gestion du risque d?inondation. Il est nécessaire de mobiliser une combinaison de mesures pour faire face aux inondations critiques, dans une logique de responsabilité partagée entre les gestionnaires de l'eau, les planificateurs de l'espace, les services de crise et d'urgence et les citoyens. Les 3 « P » sont : Protection : protéger contre les inondations. Il s?agit d? éviter autant que possible les inondations dans les zones vulnérables au moyen de digues, déversoirs, bassins d'inondation et stations de pompage, ou encore en étant attentif à l?infiltration de l?eau. Prévention : éviter ou réduire les dommages Cet axe comporte les mesures visant à réduire notre vulnérabilité aux inondations, comme le fait d?éviter des constructions dans les zones inondables ou y permettre des constructions adaptées Préparation : être prêt en cas d'inondation. Cela couvre les actions nécessaires pour ne pas être pris par surprise par les inondations et pouvoir agir afin d'éviter que la situation ne s'aggrave ; informer et prévenir, afin que les gestionnaires de l'eau (y compris au niveau local), les services d'urgence et les citoyens puissent prendre des mesures en temps utile et éviter de nombreux dégâts et malheurs. Annexe 4.3.1 L?équilibre entre protection et aménagement du territoire - Actions de protection : les équipements et infrastructures - La lutte contre les inondations en Flandre est d plus en plus appuyée sur la recherche de solutions pour redonner de l'espace à la rivière. Cela peut se faire en élargissant le lit d'hiver naturel ou en créant des zones d'inondation contrôlée ou des bassins d'attente. La conception de ces zones est envisagée en fonction de la configuration de chaque bassin. Il peut s'agir de zones entièrement naturelles, et dans ce cas les agriculteurs présents se voient attribuer d'autres parcelles de terre à cultiver, ou elles peuvent être utilisées à d'autres fins agricoles de sorte qu'il n'y ait pratiquement pas de dégâts en cas d'inondation (surtout en hiver). - Le niveau de protection des digues est déterminé par zone en fonction du risque. C'est l'autorité compétente en matière d'eau qui en fixe le niveau. Le gestionnaire de l'eau est également responsable de la construction, de l'entretien et de l'inspection des digues. Les inspections structurées des digues ont lieu tous les 1 à 3 ans en fonction du risque. A cela s'ajoutent bien sûr les contrôles visuels effectués. Pour le renforcement des digues en crise, les autorités font appel à un fournisseur privé, dans le cadre de contrats qui permettent une intervention dans la journée/ - Les autorités chargées de l'eau sont responsables de l'entretien des canaux, y compris du désensablement et du dragage. La répartition des compétences diffère pour les cours d?eau navigables et non navigables. Pour les premiers, les responsables sont Vlaamse Waterweg (Voies navigables), le Département de la Mobilité et des Travaux publics, et l?Agence des services maritimes et de la côte. Pour les cours d?eau non navigables, ceux qui entrent dans la catégorie 1 relèvent de VMM (Agence Flamande de l?Environnement), de la catégorie 2 des provinces, et la catégorie 3, des municipalités. Les exploitants de cours d'eau prennent en charge le coût des infrastructures construites le long des cours d'eau (zones inondables contrôlées, digues de protection, bassins d'attente, stations de pompage, ...). Pour les cours d'eau non navigables, il existe encore aujourd'hui de nombreux gestionnaires différents. Ce nombre a été fortement réduit depuis 2014. A partir de cette date, les communes pouvaient transférer la gestion des cours d'eau aux provinces, et de très nombreuses communes ont choisi de le faire (sur 300 communes en Flandres, seule 50 sont encore gestionnaires de cours d'eau). Il reste cependant 56 polders et wateringues, 5 provinces et la VMM en tant que gestionnaire de cours d'eau en Flandres. Lors de son entrée en fonction en 2019, le gouvernement flamand a décidé de réformer la gestion des cours d'eau non navigables. Une note PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 75/107 conceptuelle à ce sujet a été approuvée par le gouvernement flamand en juillet 2023. À l'avenir, la gestion des cours d'eau non navigables sera assurée par des conseils de l'eau (12 au maximum) soutenus par un syndicat des conseils de l'eau. Quand VMM fait l?entretien des grands cours d?eau non navigables, cela recouvre le fauchage et le curage, prévu environ tous les 10 ans, dans le cadre d?un plan d?ensemble. Il s?agit de curer aux seuls endroits où des accumulations augmenteraient le risque inondation (au niveau de ruptures de pente, par exemple). Concernant les sections de Wateringues, elles sont en charge de l?entretien des fossés et reçoivent une subvention des provinces. La taxe qu?elles lèvent rapporte un faible pourcentage des coûts et la question est posée de la supprimer. Les sections doivent gérer l?eau de sorte que le niveau d?eau ne soit pas à son maximum quand une crue arrive et que chaque section contribue au tamponnage. Ainsi, dans la Flandre occidentale, se pose la question d?une évolution du système des Wateringues. C?est une volonté forte dans l?accord de coalition du gouvernement flamand engagée il y a cinq ans que de faire évoluer ce système, sous le terme « réformer pour plus d?efficacité ». Il s?agit de trouver un équilibre entre ce système de gestion locale et pragmatique des fossés par les agriculteurs, appuyé sur des redevances pas toujours bien comprises par les riverains qui ne sont pas agriculteurs, et une meilleure coordination de la gestion de l?eau des polders à une échelle plus large. Les pistes évoquées sont de mettre en place une structure plus grande en gardant les chefs de sections dans la gouvernance, dans un dispositif permettant plus de coopération et une communication fluide entre zones. Le traitement des sédiments évacués lors du curage des fossés et canaux est fait conformément à la directive européenne : le niveau de pollution des sédiments est vérifié par le service environnemental avant l?épandage. Les sujets qui peuvent créer des tensions sont l?accès aux propriétés pour curer et pour épandre. Cela relève des agriculteurs ou des collectivités, qui passent alors des contrats d?entretien. - Dans les zones de polders ou aux endroits où le drainage par gravité des cours d'eau n'est (temporairement) pas possible, des systèmes de pompage ont été installés ; la responsabilité de ces systèmes de pompage incombe au gestionnaire de l'eau. Concernant le pompage en crise, c?est la collectivité qui mobilise les pompes qui est en charge du coût, avec un soutien du niveau supérieur à partir d?un certain montant. Pour la crue de novembre dernier, c?est l?état fédéral qui va prendre en charge la facture. A Niewport, une grande capacité de pompage a été ajoutée car l?écoulement gravitaire n?était possible que 2 h sur 12. Le dispositif a été « inventé » en direct, l?espace disponible à l?embouchure était entièrement utilisé. La question va se poser de renforcer la capacité fixe, mais nos interlocuteurs soulignent que l?évacuation à la mer n?est pas si simple ; une mauvaise gestion peut se traduire par des sur- inondations en amont. Les pluies seront plus fréquentes, plus fortes, les modèles de prévision sont dépassés. On aura de toutes façons à faire face à une plus grande incertitude. Une réponse à cette nouvelle situation est l?approche « multicouches » : il faut pouvoir activer différents leviers selon le type de crue. Cela suppose une très bonne coordination. En crise en particulier, cette coordination est essentielle : elle relève du gouverneur qui peut prendre des sanctions en cas de non-respect de consignes. - Actions de prévention : enjeux d?aménagement du territoire Les Flandres sont très denses, avec un aménagement du territoire historique marqué par la possibilité de construire des quartiers au bord de l?eau, ce jusqu?en 2010. Un enjeu maintenant est d?éviter de construire dans les zones à risques. Une cartographie vient d?être établie, sur la base de travaux commencés après les crues de 2010, qui identifie les zones exposées à des inondations centennales, avec et sans changement PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 76/107 climatique. Un processus est engagé pour changer de destination les terrains regardés comme dangereux. Après une enquête publique en 2023, ce travail donnera lieu une deuxième consultation, puis une troisième approbation sera nécessaire pour un aboutissement prévu sous un an à un an et demi. Les cartographies sont déjà publiques, mais de portée purement informative. En Flandre, les permis de construire sont décentralisés ; l?autorité locale peut ne pas suivre les recommandations du niveau régional, qui peut faire un recours. Cela arrive peu. Tout permis de construire donne lieu à « évaluation aquatique », qui tient compte, par exemple, des quantités d?évacuations à prévoir en cas d?inondation (cela peut conduire à accepter une maison sur un terrain exposé, mais pas un immeuble). L?évaluation aquatique repose sur une instruction par les services du gouvernement sur les effets néfastes sur le système d'eau qui peuvent être causés, par exemple, par la construction d'une maison ou d'un projet d'infrastructure. Les plans susceptibles d'avoir un impact sur le réseau hydrographique, tels que les plans d'aménagement du territoire, sont également soumis à l?évaluation aquatique. Dans certaines situations, le gouvernement doit demander l'avis du gestionnaire de l'eau concerné lorsqu'il procède à l'évaluation aquatique. Le gestionnaire de l'eau peut faire des recommandations pour ajuster les activités planifiées afin d'éviter, de limiter, de restaurer ou de compenser les dommages attendus sur le réseau d'eau. Le résultat de l'évaluation aquatique est inclus en tant que « paragraphe sur l'eau » dans le permis ou dans l'approbation du plan ou du programme. Il y a ainsi un devoir d?information, appuyé sur un système de score sur la base d?une approche modélisée, pour chaque parcelle dans une zone inondable -fluviale, liée aux pluies ou par submersion marine) (P-score) et bâtiment de (G-score) ? de A à D selon le niveau de risque (A : pas de risque de crue modélisée, B : faible probabilité d?inondation sous l?effet du changement climatique, C : faible risque d?inondation sous le climat actuel et D : probabilité moyenne sous le climat actuel). Ce devoir d'information a été introduit dans le décret intégral sur la politique de l'eau en 2013. En 2016, l'obligation d'information a été évaluée. Le 1er janvier 2023, un devoir d'information modifié est entré en vigueur. Lors de la vente ou de la location d'un bien immobilier, l'acheteur ou le locataire doit savoir si le bien est situé dans une zone inondable. Côté agriculture, un enjeu est d?encourager une agriculture plus durable, moins exposée aux risques de sécheresse et d?inondation, ce dans le cadre de la PAC, par exemple en améliorant le rôle de rétention des eaux des sols. Une ambition forte est que les agriculteurs ne soient pas seulement dans une logique productiviste mais également convaincus de ces enjeux de durabilité. - Une structuration de ces piliers par grands cours d?eau Le « plan Sigma50 », un plan intégré de protection contre les inondations, a été mis en place pour la première fois en 1977, en réaction à une inondation majeure causée par une onde de tempête en 1976 sur le bassin transfrontalier France, Belgique, Pays-Bas de l?Escaut. Le fleuve ne fait que 350 km, mais coule dans un bassin très dense. Le plus grand danger est lié à une onde de tempête qui se poursuivrait dans les terres, avec un risque de rupture de digues, comme en 1953 et 1966 où des villages entiers ont été inondés. Ce plan vise à protéger environ 20000 hectares de terres en Belgique, le long de l'Escaut et de ses affluents tels que le Rupel, la Nete et la Durme. Il met en place des protections contre les submersions marines et les inondations fluviales causées par des précipitations très fortes, en identifiant quatre zones avec des niveaux de protection différents. Il combine des mesures d'infrastructure "grises", principalement des digues, et des mesures "vertes" sous la forme d'un réseau de zones inondables contrôlées, dont la mise en place fait l?objet de nombreuses discussions avec le secteur agricole. Un plan Sigma actualisé a été approuvé en 2005 qui visait à mieux protéger l?Escaut et ses affluents par la mise en place de « zones temporairement inondables » et de digues. Le Sigma a aussi travaillé à la restauration des rivières et à l?économie locale. Le projet a aidé également à réaliser les objectifs écologiques (Natura 2000). 50 S de Sigma comme le début du nom de l?Escaut en Flamand, Schelde PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 77/107 A l?horizon 2030, il représente 1,3 Md d?euros. Un cadre législatif est nécessaire pour garantir une approche pluriannuelle de ces travaux. Il s?agit d?intégrer le changement climatique, et en particulier l'élévation du niveau de la mer qui accroît le risque d?inondation. Dans la version actuelle, l'élévation du niveau de la mer a été prise en compte dans un scénario moyen. Sur cette base, le plan contient des mesures et des projets dont la réalisation s'étend jusqu'en 2030, suite à une évaluation des coûts-avantages sociaux. Une amélioration du Plan Sigma - un Plan Sigma+ ou un Plan Sigma 3.0 - devrait également prendre en compte le scénario climatique plus extrême à fort impact jusqu'en 2100, avec, en plus de l'élévation du niveau de la mer, l'augmentation de la probabilité d'écoulements supérieurs extrêmes et la coexistence de ces eaux d'amont et d'une onde de tempête. Jusqu'en 2030, le plan actuel doit être mis en oeuvre sans délai, et, par la suite, complété par des mesures additionnelles. Le plan est approuvé par le gouvernement flamand dans ses principes généraux, mais pour le reste, donne lieu à des déclinaisons locales, où le travail est fait en cherchant les collaborations avec les agriculteurs et les associations. Il ressort des échanges une bonne coopération avec les agriculteurs sur le plan Sigma, mais, « dans les relations à proximité des fleuves, pour regagner des zones d?expansion des crues ce n?est pas toujours facile ». La nouvelle étape de prise en compte du changement climatique, par une étude, n?en est qu?à ses débuts. La Dendre, affluent de l?Escaut, qui connait aussi des problèmes d?inondation, est encore en phase de planification. Il s?agit d?élaborer un plan stratégique « espace pour l?eau » pour réduire le risque d?inondation en améliorant la qualité de vie. Ce travail se fait en recherchant une forte participation des autorités locales et habitants, en vue d?une approbation du gouvernement flamand au printemps. Dans le cadre de ces travaux, deux scénarios ont été élaboré et évalués sous l?angle de leurs avantages et limites et soumis à concertation : celui « de la vallée inondable » ou celui d?«expansion des inondations en amont ». C?est le premier, dans une approche naturelle de place laissée au fleuve, avec une action au plus près pour chacun, qui est préférée. Concernant la Meuse, dont le débit peut varier de 10 à 3000 m 3/s et plus, elle coule en Flandre le long d?anciens sites miniers de niveau très bas. Les deux inondations majeures de 1993 et 1995 ont inondé des villages entiers. Dans la suite, les digues ont été surélevées et renforcées, mais le principe de laisser une plus grande place pour le fleuve apparait désormais comme préférable, quitte à supprimer quelques maisons situées dans le lit mineur. Ce travail prend des années. Les digues sont maintenues là où l?élargissement n?est pas possible. Concernant enfin l?Yser, la coopération autour de l?eau est renforcée avec la mobilisation d?une commission de la coordination intégrée de l?eau, et le projet de maitrise de l?Yser dans une approche intégrée quantité- qualité. Le territoire est pour partie inférieur au niveau de la mer et le changement climatique va fragiliser la zone ; la population est peu dense, sauf près de la côte : ce sont surtout des prairies dans les parties basses et des terres agricoles. L?eau potable dépend des eaux de surface, et notamment du réservoir de Blanckaert. Les relations avec les agriculteurs sont un enjeu majeur, dans ce bassin où le projet est de créer des déversoirs sur la rive gauche du fleuve pour compléter la Zone d?expansion des crues (ZEC) de Blanckaert, créée après les crues de 1993-95 (et qui représente un stockage en crue de 450 M m3). Un décret est en préparation pour que les objectifs soient ancrés au niveau flamand. Il s?agit de définir des mesures concrètes à l?horizon 2024 ou 25, afin de les avoir mises en oeuvre un an après entrée en vigueur du décret, dans une logique « top down » vers les bassins. Une plate-forme permet des échanges de connaissances, qui est aussi un outil de concertation. Cet hiver, cette zone a été inondée pendant plusieurs semaines, jusqu?à plusieurs mètres d?eau au plus profond. Il n?y a pas de compensation financière des agriculteurs mise en oeuvre, la prise en charge dépend des assurances. Le bassin de l?Yser est engagé dans un projet Interreg avec l?USAN notamment pour partager la vigilance. Annexe 4.3.2 L?adoption de nouveaux grands plans structurants PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 78/107 - Le Bluedeal est un grand plan adopté après la sécheresse de 2018-20 et consacrée en premier lieu à cet enjeu. Il comporte deux axes : - réduire les consommations d?eau, progresser dans les réutilisations ; - mieux conserver et gérer l?eau, dans une logique trame verte et bleue. Ce programme était prévu à hauteur de 60 à 70 millions d?euros et a été porté à 500 millions d?euros après la crise Covid, dans le cadre des fonds de relance européens. - Après les crues en Wallonie, qualifiées de « bombe d?eau », le gouvernement flamand a demandé à un groupe d?experts de rédiger un avis sur la prévention des inondations. Il s?agissait de revoir la prévention en Flandre sur la base d?un scénario de même type que la « Water Bomb » sur la région, en identifiant également les budgets requis. En effet, il a été estimé que le coût d?une catastrophe de même type serait de 8 Md d?euros. Ce travail s?est engagé en décembre 2021, sous le pilotage de Henk Ovink, professeur néerlandais de renommée internationale, notamment pour son travail à l?ONU. Le choix de cette personnalité se justifiait pour éviter une forme de concurrence entre universités belges, pour mobiliser l?intérêt des Pays-Bas, concernés par la Meuse, pour cette ré- flexion, et bénéficier d?un regard neutre sur la situation. La démarche était pluridisciplinaire. C?es t le Weerbaar Waterland, qui a donné lieu à l?avis Resilient Waterland de mars 2023. Il comporte dix recommandations suivantes qui mettent en avant une approche stratégique, partenariale et intégrée, inscrite dans la durée et impliquant tous les acteurs, informés et responsabilisés : 1. Objectifs aquatiques clairs, intégrés et assortis de tâches à accomplir Depuis des objectifs divers et vagues en matière de quantité d?eau vers des objectifs intégrés dans le domaine de l?eau 2. Programmes d?action intégrés et adaptatifs par sous-bassin Depuis un ensemble réactif d?actions sectorielles déconnectées vers des tâches orientées vers la mise en oeuvre au niveau des sous-bassins 3. L?eau, le sol et le climat au service d?une nouvelle sécurité juridique Depuis un avis sur l?eau sans engagement et une mise en oeuvre incertaine vers un cadre spatial et d?exécution solide et juridiquement sûr 4. Triple mandat, depuis la régie jusqu?à l?exécution D?une exécution dépendante du volontariat et retardée par la fragmentation des pouvoirs vers une régie claire 5. Quatre chantiers flamands de l?eau Depuis un fonctionnement sur la base de projets vers une approche intersectorielle permanente axée sur l?exécution 6. Fonds de sécurité de l?eau ancré Depuis des budgets de projets annuels vers une approche systémique sur plusieurs législatures 7. Préparation des personnes et des infrastructures Depuis l?ignorance relative vers l?autonomie accrue 8. Revirement culturel Depuis le risque individuel vers le gain sociétal 9. Programme flamand pour la Connaissance et l?Innovation Depuis le développement scientifique sectoriel vers l?innovation transdisciplinaire et fondée sur la pratique 10. Approche et collaboration transfrontalières Depuis une région réactive en aval vers un précurseur en matière de protection contre les crues en Europe Les interlocuteurs de la mission mettent l?accent sur les points suivants : - développer des objectifs clairs en matière d'eau au niveau flamand d'ici 2023-2024 : identifier les zones de la Flandre où les risques actuels ou futurs sont trop élevés (tant pour la sécheresse que pour les inondations). - Dès le départ, exploiter les possibilités de liaison pour améliorer la qualité de l'eau et l'érosion et calculer les futurs dommages socio-économiques et écologiques qui en découlent. - Lors de l'élaboration des objectifs, tenir compte de l'impact élevé de la sécheresse et de l'érosion, PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 79/107 tenir compte au maximum du scénario climatique à fort impact jusqu'en 2100< ; - Dans les suites des inondations de novembre 2023, la Task Force « Westhoek résilient », à la demande du Gouvernement flamand, a formulé, à l?issue de trois réunions, un avis étayé pour améliorer la « sécurité de l?eau » dans le Westhoek, et plus particulièrement dans le bassin de l?Yser. Il s?agissait de tenir compte du caractère spécifique du territoire, mais aussi de faire le lien avec le cadre politique « Waterland résilient », qui préconise une approche axée sur la source du problème ainsi que des opportunités gagnant-gagnant pour la gestion des sécheresses. D'autres cadres tels que le Blue Deal et le Plan flamand d'adaptation au climat ont également été pris en compte. À partir du cadre général, une réflexion a été menée à court et à plus long terme. Le Weerbare Westhoek du 22 décembre 2023 prévoit des budgets importants en 2024 (54 M) et 25 (26 M), avec des travaux sur les pompes, les canaux ? Chaque année, 120 M sont destinés aux voies navigables. Pour le court terme quelque 70 mesures sont proposées. Il s'agit de mesures dites « sans regret », c'est-à-dire efficaces et efficientes sous chacun des scénarios climatiques et qui ne viennent pas au détriment d'autres enjeux cruciaux dans la région : mesures de terrain (la rétention d'eau en amont, le tamponnement dans et le long des cours d?eau, l?évacuation vers la mer ainsi que des mesures de protection) mais aussi de mesures politiques et règlementaires, de recherche et de surveillance, de communication et de sensibilisation. Des propositions sont également faites pour éliminer autant que possible les points de friction dans une logique de facilitation ou de simplifica- tion. Toutes les mesures sont conçues de manière à évacuer l'eau excédentaire uniquement lorsque cela est nécessaire pour prévenir des inondations. Elles contribuent ainsi à garantir la disponibilité de l'eau en cas de sécheresse prolongée. Les mesures à court terme suivantes sont prioritaires : - tamponnement des eaux en amont et évacuation retardée ; - création et aménagement de nouvelles zones d?expansion des crues (ZEC) ; - protection des infrastructures critiques (par exemple les centres des villages, les industries, l'ap- provisionnement en électricité, etc.) grâce à la construction de digues locales, par exemple à Roesbrugge et Stavele. - Amélioration de l'entretien structurel de l?ensemble des cours d'eau ; - gestion dynamique des niveaux d?eau ; - optimisation de la capacité d?évacuation, par exemple via le canal de Lo et l?Yser, de Dixmude à Nieuport ; - évacuation suffisante vers la mer à différents endroits, par gravitation mais aussi de manière indépendante des marées ; - démarrage d?un processus d'élaboration du plan « De l?espace pour l?eau ? Vallée de l?Yser » ; - renforcement de la coopération transfrontalière. Des points d?attention sont identifiés : - la conception des mesures à réaliser sur le terrain fait l?objet d?une concertation avec les acteurs locaux, les propriétaires et les utilisateurs des terrains ; - pour la création et l?aménagement de nouvelles zones d?expansion des crues (ZEC), dans la mesure où leur fonctionnement a un effet, une politique d'accompagnement agricole est recom- mandé ; - pour l'approche à plus long terme, la Task Force recommande l?élaboration d?un programme plu- riannuel intégré et orienté vers l'action, garantissant qu?à l?avenir éga lement, et en tenant compte des scénarios climatiques, le Westhoek reste suffisamment résilient face à la fréquence et à l'inten- sité croissantes des conditions météorologiques extrêmes. Il sera possible ainsi de continuer à travailler de manière structurelle et intégrée sur la sécurité de l?eau dans le bassin de l?Yser. Les actions à entreprendre sont les suivantes : - Identifier les risques et les points problématiques et déterminer un risque d'inondation acceptable. - Fixer des objectifs stratégiques et opérationnels pour que les risques soient ou restent sociale- ment acceptables. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 80/107 -. Elaborer et mettre en oeuvre un programme d'actions intégré, de concert avec les acteurs locaux et les parties prenantes. Les nombreux projets et initiatives existants ne seront pas perdus de vue et seront poursuivis et renforcés dans la mesure du possible. La coopération transfrontalière avec la France devra également être poursuivie et renforcée. Enfin, la Task Force a également formulé un avis sur la gouvernance ou la nécessité d'une struc- ture claire pour assurer le suivi d'un tel programme pluriannuel intégré. Elle préconise une ap- proche systémique qui surveille l'intégralité et qui dispose d?une capacité d?action suffisante pour pouvoir efficacement mettre en oeuvre le programme pluriannuel. L?avis recommande aussi d'utili- ser autant que possible les structures déjà existantes aux différents niveaux (flamand - bassin - région), qui fonctionnent bien. La Task Force mise en place - dans sa composition actuelle ? devrait être pérennisée afin de pouvoir assurer la surveillance et le suivi de la mise en oeuvre des actions. La structure actuelle du bassin peut également être maintenue, car elle dispose déjà d'une large représentation locale et d'une approche multidisciplinaire. Il est également recommandé de développer plus avant, sur l?ensemble du bassin, le fonctionne- ment des coalitions territoriales locales accompagnées. Annexe 4.4. La Wallonie : le choc des inondations de juillet 2021 Annexe 4.4.1 Quelques éléments sur le cadre général de la prévention des inondations La gestion de l?eau est une compétence régionale depuis les années 1980, menée dans le cadre des directives européennes. La gestion des cours d?eau dépend de leur classement : elle est faite par les riverains pour les 12807 km de cours non classés, par les communes pour les cours d?eau de 3ème catégorie (4518 km), les provinces pour ceux d 2ème catégorie 5820 km) et les régions pour ceux de 1ère catégorie (1875km) et pour les navigables (873km). Un plan « pluie » a été mené en 2003, et la cartographie des aléas inondation a été entreprise en 2007. Le curage des cours d?eau revient entre 50 à 150 euros par m3 selon le niveau de pollution. Concernant les voies navigables, les sédiments curés sont traités comme des déchets. Pour les cours d?eau non navigables, il est possible de les laisser sur les 6 m à proximité, sinon il faut les évacuer. Les laisser dans le cours d?eau est regardé comme préférable, quitte à recreuser un chenal, cela limite les risques d?érosion des berges. Un décret a fixé quatre enjeux pour les cours d?eau naturels : inondation, socio culturel, économique, biodiversité. Les cours d?eau sont sectorisés par enjeux dominants, en évitant le curage Une étude sur les besoins de la Wallonie en eau a été lancée (avec notamment un axe sur le refroidissement de l?eau, ou la récupération des eaux usées). Les besoins des secteurs économiques sont de 50000 m3/j. 75% sont évaporés. Pour autant, dans les échanges, il est estimé qu?un stockage supplémentaire, pour garder des eux en période de crue, serait une réponse pour ainsi dire sans impact sur les besoins de l?industrie (une piscine toutes les secondes pour une giga-factory) et également de faible impact pour limiter les effets d?une inondation. Annexe 4.4.2 Mise en place d?un dispositif spécifique de reconstruction Les inondations du 14 juillet 2021 ont fait 41 victimes. Il y a eu 45000 maisons sinistrées, 100000 personnes concernées impactés, plus de 5,2 Md de dommages. Quatre fleuves ont débordé en même temps. « C?était il a presque trois ans et on en sort à peine ». Un Commissariat spécial à la reconstruction a été mis en place dès le 26 juillet 2021. Cette PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 81/107 équipe pluridisciplinaire a été mobilisée pendant un anl pour répondre de manière pragmatique aux besoins du territoire sinistré Le travail de reconstruction a été engagé sur les 3 grands bassins versants belges, à l?échelle des15 sous bassins concernés. Les montants pour la reconstruction, de 150 millions d?euros en 2021, ont permis de faire des acquisitions et de la renaturation, en particulier dans la vallée de la Vesdre, la plus touchée, qui a subi la plus grande part des décès en Belgique. Il s?agissait d?avoir des réflexions sur des aménagements adaptés à la situation, qui peuvent conduire à ne pas (re) construire à en endroit, mais, autant que possible sans interdire, même si la possibilité de le faire existe. La Commissariat spécial à la reconstruction n?est pas une autorité mais un ensemblier. C?est une cellule placée auprès de gouvernement, ce qui lui donne du poids. Les termes du bilan pour présenter le travail réalisé sont les suivants : « Le 26 juillet 2021, afin de coordonner la réponse régionale à la reconstruction, le Gouvernement wallon (ci-après GW) a décidé de créer le Commissariat spécial à la Reconstruction (CSR) pour une durée d?un an éventuellement renouvelable. La mission qui a été dévolue au CSR était triple : - coordonner et faciliter l'élaboration et la prise de décision du GW, ainsi que la mise en oeuvre et le suivi des actions dans la gestion des urgences, de la prévention et de la reconstruction ; - formuler, en collaboration et en concertation avec les services compétents, des propositions en vue d'assurer un plan de reconstruction dans les communes concernées ; - veiller à la mise en oeuvre des décisions du GW. Deux Commissaires spéciales ont été désignées le 26 juillet 2021, l ?une en charge des autorités locales (Catherine Delcourt) et l?autre en charge des autorités régionales (Sylvie Marique). Une équipe s'est progressivement mise en place pour assurer la gestion opérationnelle du CSR. En août 2021, seuls 3 agents avaient déjà pu être engagés. Cet effectif était totalement insuffisant pour faire face à l?ampleur des besoins. Au total, une 50aine d?agents du SPW (SG et IWEPS, essentiellement) ont prêté main forte au CSR, en attendant les engagements complémentaires. La diversité des profils a permis d?apporter des réponses efficaces aux différentes problématiques. Le CSR s?est organisé avec un SPOC par partie prenante régionale. Jusqu?au bout, les effectifs se sont avérés bien nécessaires pour mener à bien les différentes missions du CSR. » 51. Un enjeu fort a été la gestion de la temporalité entre l?urgence (aide à la réparation, avec un soutien public pour ce qui n?était pas couvert par les assurances) après crise et la reconstruction résiliente. - Il a fallu un an à un an et demi pour identifier ce qu?il fallait acquérir et rassembler le budget requis. Les crues de 2021 ont été fortement dévastatrices, il reste, en 2023, des habitations à exproprier. La modélisation sous-jacente ne sera à jour que dans trois mois. La première démolition a eu lieu mi-janvier. - Une priorisation a été nécessaire pour cibler l?action sur les neuf communes les plus touchées ? y compris dans les centres historiques ; - l?élaboration d?un schéma multidisciplinaire sur tout le bassin de la Vesdre a été établi, avec l?université de Liège et un studio spécialisé ; - deux guides de bonne pratique sur la constructibilité en zone inondable et sur la gestion durable des eaux fluviale ont été rédigés. Les cartes de l?aléa inondation n?ont pas été réactualisées au regard de cet événement exceptionnel, mais elles le seront en 2025 dans le cadre de la directive inondation. Une circulaire ministérielle donne un cadre pour instruire les permis en zone inondable ; - Un appui urbanistique, mis en place par la région, pour les communes les plus touchées, a été organisé pendant cinq mois. Ce marché n?a pas été opérationnel tout de suite car le premier n?a donné lieu à aucune réponse. Des moyens sont mobilisés pour des acquisitions de bien à démolir. Les discussions sont difficiles avec la population, parfois des réparations temporaires ont été faites. 51 Source Commissariat spécial à la reconstruction, juillet 2022 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 82/107 Il y a eu un travail également sur les facteurs aggravants (bâti à enlever car accroit le risque d?inondation). Le Commissariat a été mobilisé pour de nombreux échanges avec les personnes avec qui il faut trouver un accord. L?approche a été pragmatique : il s?agissait, selon les termes des personnes rencontrées, de réfléchir avant de reconstruire, sans empêcher les mesures immédiates qui donnent du « confort ». Le premier état des bâtiments a demandé une forte mobilisation, avec tous les agents disponibles, afin de le mener en quinze jours. La nouvelle planification des communes a été faite par la région pour le compte des communes (et pas à leur place). Pour les appuis urbanistiques, un marché cadre a été passé. Il a fallu faire de la planification locale avant de finaliser la planification globale, sans avoir les nouvelles études hydrauliques abouties, ce qui supposait des échanges très fréquents entre les équipes travaillant aux différentes échelles pour faire les ajustements nécessaires (et acceptés). Il s?est agi ainsi de construire ainsi un schéma sans valeur légale, sans enquête publique ou évaluation des incidences mais avec des modes de participation, définis à la carte, selon les choix des élus locaux dans chaque collectivité. L?agilité et l?adaptabilité ont reposé sur le fait de se parler. Ainsi ont été élaborés des PDDQ ? plan de développement durable des quartiers. Le travail a porté aussi sur la trame agricole, les haies, le sens du labour, le couvert forestier, qui influencent la gravité des inondations. Rétablir des haies écrête la crue de 20%. La prise en compte des inondations doit se faire par l?amont des bassins versants en premier lieu : ont été mis en place des périmètres de vigilance foncière, avec des possibilités de préemption. Entre janvier 2022 et juillet 2022, 6 plans de reconstruction de centres urbains ont été faits sur 9. 5 millions d?euros ont été consacré aux travaux du commissariat, dont 500000 pour les études. - Le Rapport de la Commission d'enquête parlementaire52 chargée d'examiner les causes et d'évaluer la gestion des inondations de juillet 2021 en Wallonie du 22 mars 2022 a fait 161 recommandations (voir annexe 6). Il ressort des entretiens menés par la mission les points clés et les actions engagées suivants : - La prévision des crues mobilise le service mobilité - infrastructures, en charge des canaux et barrages, en interface avec l?opérateur de Météo (Institut royal météorologique - IRM). Les outils n?étaient pas adaptés à ce phénomène, jamais vu. Il est nécessaire d?améliorer les outils pour des événements exceptionnels. - concernant la gestion de crise, la commission d?enquête parlementaire a fait des recommandations, qui, pour les gouverneurs mettent l?accent sur la coordination des réseaux de volontaires, la formation des élus, les plate-formes citoyennes. En pratique, la Croix rouge est présentée comme étant en recul, et il est nécessaire de mettre en place un cadre spécifique de mobilisation de bénévoles. Il est ressorti des rex également la nécessité de revoir les modalités de coopération. La région wallonne se dote d?une cellule d?expertise (CELEX) dont les avis éclairent le gouverneur sur l?opportunité ou non de déclencher une phase provinciale. Un travail a aussi été mené pour identifier les bâtiments au regard du risque inondation, non diffusé publiquement, qui permet de cibler des alertes, pour les personnes qui s?abonnent (peu à ce jour). Les autorités belges peuvent en effet communiquer directement avec la population, par e-mail ou sms, grâce au système d?alerte BE-Alert (sur inscription ou géolocalisation). - Le pompage repose sur plus de 190 pompes de régulation : il apparaît souhaitable d?en centraliser la supervision pour pouvoir optimiser. Ces pompes ne servent pas qu?à la navigation. La région travaille à un arrêté pour prioriser les usages de l?eau (en crise). Le schéma régional de la ressource en eau fixe des débits autorisés. La gestion des ouvrages donne toujours lieu à des discussions (avoir de l?eau en été/ être en mesure d?écrêter des crues). Les sections de wateringues gèrent quelques pompes, ce qui peut conduire à des surplus dans les canaux en crise, 52 Parlement de Wallonie PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 83/107 mal anticipés. Le pompage qui est fait au quotidien ne correspond pas aux enjeux de la crue ? dans ce cas, il faut prévoir d?autres outils comme les zones d?expansion de crues. - La culture du risque s?est perdue, même dans des vallées très exposées. Les victimes ont été des personnes qui ont pris leur voiture. La région met en place des systèmes de bénévolat pour mobiliser des citoyens formés et engagés en cas de crise. - Il est important d?avoir une approche pluridisciplinaire, mobilisant des spécialistes pour conseiller les autorités, avec une information précise ? sur la localisation de l?aléa en particulier, et des termes permettant une compréhension claire du risque de crue et de l?alerte. La région a travaillé pour que cela soit fait, maintenant, de manière plus intégrée. - Les cartes d?inondations sont faites pour un aléa 100 ans avec une majoration de 30% pour le changement climatique. L?approche s?appuie sur du rex et de la modélisation. Mais la question se pose de l?utilisation des crues de juillet 2021 dans la planification territoriale : l?événement est tellement exceptionnel, faut-il en tenir compte ? Les choix de prévention sont précisés à l?échelle locale, sur la base d?une approche coûts bénéfices. Il existe toujours un risque résiduel. Dans la suite de ce rapport, le ddécret du 13 juillet 2023 a rénové le cadre de la gestion des risques et des crises par la Région wallonne. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 84/107 Annexe 5. Rapport de la Commission d?enquête parlementaire chargée d?examiner les causes et d?évaluer la gestion des inondations de juillet 2021 en Wallonie du 22 mars 2022 Dans la suite des inondations du 14 juillet 2021, qui ont fait 41 morts en Wallonie, une commission d?enquête parlementaire a rendu un rapport qui comporte 161 recommandations. Parmi elles, certaines sont particulièrement intéressantes pour les travaux menés dans la suite des inondations de fin 2023 début 2024 en France : elles figurent en gras dans la reprise du rapport ci-dessous. * Les inondations de juillet 2021 ont dramatiquement renforcé la prise de conscience de la réalité du dérèglement climatique et de son abrupte proximité : le dérèglement climatique n?est pas une problématique réservée aux générations de demain ou aux contrées lointaines mais constitue un enjeu du temps présent et de notre continent. Les inondations mettent en relief la nécessité de renforcer et accélérer, d?une part, la lutte contre le changement climatique par la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) et, d?autre part, l?adaptation de nos territoires, nos infrastructures, nos institutions, nos systèmes et notre société afin de protéger la population des dérèglements climatiques en cours et à venir. Il nous faut calibrer l?ensemble des politiques publiques à la hauteur des catastrophes auxquelles il est possible de s?attendre et à la hauteur du risque défini. Les auditions et les informations reçues par la Commission d?enquête parlementaire chargée d?examiner les causes et d?évaluer la gestion des inondations de juillet 2021 en Wallonie amènent à formuler les recommandations qui suivent. 1. PRÉVISIONS ET ALERTES MÉTÉOROLOGIQUES ET HYDROLOGIQUES European flood awareness (EFAS) 1. Concernant l?usage du European Flood Awareness System (EFAS) par le Service Public de Wallonie (SPW) : ? engager résolument la Wallonie dans le réseau européen constitué par l?EFAS et ses différents outils; ? intégrer l?usage de l?ensemble des outils proposés par l?EFAS (alertes formelles et informelles « flood » et « flash flood » et « Map viewer ») dans les procédures du SPW; ? charger le SPW, conformément aux conditions d?accès à l?EFAS signées le 23 février 2015 par la Région wallonne, de formuler régulièrement des évaluations à l?EFAS sur la qualité de ses prévisions; ? participer aux réunions annuelles et aux formations nécessaires; ? partager avec l?EFAS Dissemination Centre les données des stations pluviométriques et les autres outils de mesure qui peuvent l?être. 2. Concernant Copernicus Emergency Management Service, réduire le délai d?envoi de l?image produite par satellite aux autorités compétentes. Institution royal météorologique (IRM) 3. Développer et renforcer le partenariat entre le Service Public de Wallonie (SPW) et l?Institut Royal Météorologique (IRM) afin principalement : ? de renforcer les capacités de modélisation météorologique pour bénéficier de prévisions météorologiques à la maille la plus fine possible et ce en progressant dans la prévision et PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 85/107 l?intégration des pluies dites convectives (intenses et concentrées) ; ? d?assurer la connaissance mutuelle des outils et données et leur interopérabilité ; ? d?organiser la communication par l?IRM au SPW de la liste exacte des communes concernées par ses avertissements ; ? de solliciter la création d?un produit de l?IRM analysant l?impact plus détaillé des prévisions météorologiques sur les sous-bassins versants comprenant un barrage. 4. Améliorer les conditions et le séquençage d?utilisation des codes d?alerte de l?IRM afin de pouvoir déclencher des alertes jaunes, oranges et rouges sans attendre 48 heures, 24 heures ou 12 heures, en cas de risque d?événements météorologiques de nature ou d?ampleur exceptionnelles. 5. Adapter les modèles de prévisions météorologiques aux modèles climatologiques prospectifs. Direction de la Gestion Hydrologique du ServicePublic de Wallonie Mobilité et Infrastructures (DGH SPW MI) 6. Afin d?améliorer la capacité de prévision et de communication de la Direction de la Gestion Hydrologique du Service Public de Wallonie Mobilité et Infrastructures (DGH SPW MI), il est recommandé : ? d?intégrer progressivement dans le modèle de prévision hydrologique « HydroMax » les prévisions météorologiques du European Centre for Medium- Range Weather Forecasts (ECMWF) et les données issues des cours d?eau non navigables (Aqualim); ? de renforcer les capacités de modélisation hydrologique en prenant en compte un facteur de risque plus grand lié à l?augmentation des phénomènes climatiques extrêmes; ? d?intégrer l?ensemble des cours d'eau dans le système d'alarme et d'alerte de la DGH SPW MI ainsi que la problématique du ruissellement; ? d?opérationnaliser le projet « Walhydro » en regroupant ainsi, au sein d?une même base de données, l?ensemble des données pertinentes en matière d?inondations gérées par le SPW, et en intégrant les réseaux « Aqualim » et « Wacondah » pour créer un réseau métrologique unique; ? de disposer des outils disponibles pour ouvrir l?ensemble des produits fournis par l?Institut Royal Météorologique (IRM) et le European Flood Awareness System (EFAS) au SPW et aux autres autorités régionales; ? de développer des modèles d'alarme spécifiquement liés aux phénomènes de « flash flood »; ? d?appliquer la Directive (UE) 2019/1024 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 concernant les données ouvertes et la réutilisation des informations du secteur public aux données utilisées et générées par Walhydro et HydroMax et de rendre ces données accessibles pour les gestionnaires et les autorités publiques et, dans la mesure du possible, pour les citoyens; ? d?étudier et analyser dans le détail le risque d'inondation par ruissellement afin de mieux comprendre ses processus de fonctionnement dans les vallées (détermination de couloirs préférentiels d'écoulement, etc.). 7. Clarifier et rendre publics la terminologie des codes et seuils de pré-alerte et d?alerte de crues afin de mieux rendre compte des risques d?événements hydrologiques d?une nature exceptionnelle. Dans ce cadre, réfléchir à la possibilité de lancer des pré-alertes ou alertes de crue sur la base des prévisions météorologiques sans attendre le résultat des prévisions hydrologiques. 8. Veiller à ce que la DGH SPW MI adresse une communication compréhensible, signifiante et directement exploitable aux autorités régionales et communales compétentes ainsi qu?à la population. 9. Établir un canevas de bulletin d?information, des messages de pré-alerte, d?alerte et concernant la situation des eaux (données chiffrées, degré de gravité), réalisé en coopération avec le Centre régional de crise (CRC-W) et l?Union des Villes et Communes de Wallonie (UVCW). 10. Opérationnaliser une modélisation plus précise des sous-bassins versants, afin de pouvoir traduire effectivement l?impact des crues sur le territoire, en ce compris l?impact de délestages éventuels en aval des barrages-réservoirs. 11. Améliorer les stations de mesures hydrométriques afin, d?une part, d?agrandir la gamme de PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 86/107 mesure des débits avant une situation de défaillance et, d?autre part, d?augmenter leur résistance. 12. Améliorer la collaboration avec les services hydrologiques régionaux (bruxellois et flamand) et des pays limitrophes, notamment en apportant un point d?attention concernant les barrages et leurs impacts. 13. En concertation avec les médias, tant publics que privés, intégrer les données hydrologiques vulgarisées dans les bulletins météorologiques grand public en cas de prévision de crues et, le cas échéant, prévoir la diffusion de messages de pré-alertes et d?alertes. 14. Renforcer la capacité d?évaluation préliminaire des risques d?inondations visée par l?article 4 de la Directive 2007/60/CE du Parlement Européen et du Conseil du 23 octobre 2007 relative à l?évaluation et à la gestion des risques d?inondation, en tenant compte, parmi les différents éléments de cette évaluation, de la description des inondations survenues dans le passé et ayant eu des impacts négatifs significatifs. Centre de la permanence d?exploitation (PEREX) 4.0 15. Finaliser rapidement l?opérationnalisation du Centre de la Permanence d?Exploitation (Perex) 4.0. 16. Concernant le mécanisme de veille active des cours d?eau et barrages, définir une phase spécifique à partir de laquelle la situation nécessite un mécanisme de permanence opérationnelle. 17. Intégrer dans les meilleurs délais la veille des seuils de préalerte et d?alerte hydrologiques au sein du Centre de la Perex 4.0. 18. Assurer progressivement une connectivité optimale à l?ensemble des sites sensibles régionaux. 19. S?assurer que le Centre de la Perex 4.0 est en mesure de visionner en temps réel des sites sensibles du réseau hydrologique wallon, en ce compris les barrages. 2. PRÉVENTION DES RISQUES ET GESTION DE CRISE Culture du risque 20. Dans l?ensemble des procédures de gestion, de construction ou de rénovation des infrastructures publiques, tenir compte du risque d?aggravation des impacts liés aux phénomènes climatiques extrêmes. 21. Former davantage d?agents publics à la planification d?urgence et à la gestion de crise. 22. Développer davantage d?interactions entre les coordinateurs en planification d'urgence (PLANU), les conseillers en aménagement du territoire et urbanisme (CATU) et les fonctionnaires délégués. 23. Collaborer avec le Centre fédéral d?excellence pour le Climat dans ses travaux de coordination de programmes de recherche sur l'évolution des conditions météorologiques extrêmes dans le futur et développer, en association avec l?Organe de concertation pour l?analyse de la menace « Climat » (OCAM Climat) et les services fédéraux concernés, une expertise en termes de gestion des risques climatiques liés aux compétences régionales, particulièrement en ce qui concerne les inondations. 24. Créer une culture du risque au sein des services publics en coordination avec les différentes autorités en charge du secours. 25. Développer un plan d?urgence d?aide psychosociale en cas de crise majeure à l?attention des victimes et en assurer la coordination avec la Fédération Wallonie-Bruxelles et la Communauté germanophone. 26. Mettre en place une banque de données sécurisée reprenant les différents numéros d?urgence et l?ensemble des moyens disponibles, qui seront actualisés. 27. Créer une logistique efficace en matière d?aides, particulièrement en organisant les prêts et les dons de matériels, la possibilité de les entreposer dans un lieu prévu à cet effet, la mise à disposition de logements ainsi qu?un registre d?entreprises et d?organisations susceptibles d?apporter leur soutien en cas de crise majeure. 28. En coordination avec le Centre de crise national (NCCN), veiller à ce que des équipements efficaces et adéquats soient disponibles en permanence. 29. Dès l?émission d?un code jaune par l?Institut Royal Météorologique (IRM), appréhender la situation en approche et par équipes multidisciplinaires et effectuer des points réguliers sur l?évolution des informations. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 87/107 30. Élaborer, en bonne intelligence avec les communes concernées, des cartes d?évacuation et de mise à l?abri, lisibles, y compris en cas de délestage préventif, accompagnées d?un inventaire des sites pouvant accueillir les personnes évacuées. 31. Permettre la mutualisation des moyens en planification d?urgence à un niveau pluri-communal. 32. En parfaite cohérence avec les Plans généraux d?urgence et d?intervention (PGUI), effectuer régulièrement des exercices d?évacuation et de mise à l?abri de la population ainsi que des stress tests liés aux infrastructures sensibles, le cas échéant à un niveau pluri-communal. 33. Sur base des partenariats existants entre les fédérations de mouvements de jeunesse et les autorités publiques ainsi que sur les procédures et bonnes pratiques mises en oeuvre lors des inondations de juillet 2021, inclure dans les plans généraux d?urgence et d?intervention (PGUI) une procédure d?évacuation relative aux camps de vacances et de jeunesse et l?étendre, de façon adaptée, aux sites de camping et habitations permanentes. 34. Encadrer la participation citoyenne dans la planification et la gestion d?urgence, en créant une réserve de citoyens volontaires au niveau local et en analysant la possibilité juridique de couvrir par une assurance les interventions de ces volontaires en cas de crise. 35. Offrir à des points de contact de quartier la possibilité d?avoir une formation de base permettant de les familiariser à la culture du risque. 36. Créer un cadre permettant une organisation avec les bénévoles, pendant et après la catastrophe, et mettre à disposition les lieux et le matériel nécessaires pour rendre cette aide efficace. 37. Formaliser la délégation pour absence (applicables aux bourgmestres, gouverneurs de province, fonctionnaires, etc.) sur la base de critères préalablement définis ainsi que sur l?étendue de la délégation. 38. S?assurer que l?ensemble des coordonnées de contact des personnes désignées par délégation sont bien transmises aux autorités supérieures et aux différents responsables des corps d?intervention. 39. Organiser une reconnaissance officielle des événements dramatiques des inondations de juillet 2021 et de leurs victimes ainsi que des bénévoles qui leur sont venus en aide. 40. Structurer un travail de mémoire des inondations et sa diffusion afin d?assurer dans la durée la sensibilisation aux risques d?inondations. Centre régional de crise (CRC-W) 41. Adopter un décret relatif au Centre régional de Crise de Wallonie (CRC-W) ayant pour objectifs d?en clarifier les rôles et les missions, d?en moderniser le fonctionnement et d?en faire la porte d?entrée unique des services régionaux en matière d?expertise du risque. Complémentairement, préciser les missions du Collège des Gouverneurs wallons ainsi que son articulation avec le CRC- W. 42. Une fois par législature, publier un rapport décrivant l?état d?anticipation et de prépara- tion des réponses de la Wallonie face aux risques naturels ou à la survenance d?accidents majeurs. 43. Renforcer le rôle du CRC-W en tant qu?interlocuteur de référence pour les gestionnaires de crise, lorsqu?une phase de crise est déclenchée à l?échelon local, provincial ou fédéral. 44. Clarifier, par le biais de protocoles de collaboration, les chaînes de communication et de res- ponsabilité entre le CRC-W, les services du SPW et des unités d?administration publique (UAP) qui peuvent être mobilisés. 45. Optimaliser le rôle du CRC-W en tant que coordinateur de mobilisation de l?expertise et des ressources liées aux risques, notamment par le biais de la mise sur pied de groupes multidiscipli- naires, à l?image de la Cellule d?Expertise (CELEX), afin de favoriser la communication entre les acteurs concernés, et en traduisant de manière facilement compréhensible et exploitable ces expertises pour les acteurs de terrain. 46. Préciser le rôle du CRC-W et des acteurs de la gestion de crise ? Centre de crise national (NCCN), gouverneurs de province, communes ? en matière, entre autres, de lutte contre les « fake news », d?activation du Copernicus Emergency Management Service et de coordination de l?utili- sation des images aériennes disponibles. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 88/107 47. Modifier la dénomination du CRC-W pour qu?elle corresponde mieux à son rôle de centre du risque et d?expertise et d?appui à la gestion de crise. 48. En situation de crise ou de phase provinciale ou fédérale, placer le CRC-W sous l?autorité directe du Secrétaire général du SPW, ce dernier disposant, en coordination avec les Directions générales concernées du SPW, d?un pouvoir d?injonction. 49. En temps de crise, prévoir que le Secrétaire général du SPW puisse avoir connaissance des injonctions ministérielles données aux directeurs généraux. 50. Dans la chaîne de diffusion de messages d?alerte des crues, prévenir l?ensemble des acteurs concernés par la gestion de l?eau (producteurs et distributeurs d?eau, épurateurs, services de dé- mergement, ...). 51. Former le personnel du CRC-W à vulgariser les informations qu?il reçoit et doit répercuter. 52. Donner d?initiative, à toutes les communes, accès aux communications du CRC-W, en complé- ment de la possibilité d?abonnement. 53. Confier au CRC-W la présidence et le pilotage du Groupe Transversal Inondations (GTI). 54. Lorsqu?une crise impliquant les compétences régionales wallonnes a un impact sur les compé- tences communautaires, prévoir la présence au sein du CRC-W d?un représentant de ces entités. 55. Octroyer un statut officiel au GTI en tant qu?organe de pilotage stratégique et coordonné des Plans de gestion des risques d?inondations (PGRI) au niveau du Gouvernement, en précisant no- tamment son rôle, ses missions et sa composition et en élargissant son champ d?action à la pré- paration de la gestion de crise pour une amélioration de la coordination entre les membres du GTI. 56. Préciser la mission du GTI en ce qui concerne la prévention des inondations par débordement et ruissellement. 57. Confier au GTI la présentation d?un rapport par législature au Parlement sur deux volets : l?ac- tivité du GTI, d?une part, et le suivi de chacune des mesures du PGRI, d?autre part. Les gestionnaires de crise (Fédéral, Province, Commune) 58. Dans le cadre de l?arrêté royal du 22 mai 2019 relatif à la planification d'urgence et la gestion de situations d'urgence à l'échelon communal et provincial et au rôle des bourgmestres et des gouverneurs de province en cas d'événements et de situations de crise nécessitant une coordina- tion ou une gestion à l'échelon national, solliciter de l?Autorité fédérale la clarification du comman- dement dans la gestion de crise. Déterminer clairement les mécanismes de coopération entre dif- férentes entités dans l?hypothèse d?une succession de déclenchement de phases d?urgence. Rap- peler le rôle et la responsabilité de chaque intervenant dans chaque phase d?urgence (NCCN, Centre de crise provincial, Centre de crise communal). 59. Intégrer une formation complète à la gestion de crise pour les personnes responsables dans la chaine de commandement. 60. Organiser la formation, à rythme régulier, de l?ensemble des membres des collèges com- munaux à la planification d?urgence et la gestion de crise et rendre obligatoire cette forma- tion pour les bourgmestres, y compris les faisant fonction. Inclure dans les formations les éléments de compréhension et d?interprétation des alertes reçues dans le cadre de la ges- tion de crise. 61. Rendre obligatoire la formation à la planification d?urgence et à la gestion de crise pour les coordinateurs en planification d'urgence (PLANU) et les agents qui les remplacent, clairement dé- signés, pour les gouverneurs de province et les commissaires d?arrondissement, ainsi que pour les directeurs généraux et directeurs généraux adjoints des communes et provinces, et pour le Secré- taire général et les directeurs généraux du SPW. Inclure, dans les formations des agents commu- naux et des élus, les éléments de compréhension et d?interprétation des alertes reçues dans le cadre de la gestion de crise. 62. Mettre sur pied, à une échelle pluri-communale, le partage d?expériences et de bonnes pratiques et facilitant, le cas échéant, la mutualisation et le remplacement des agents com- pétents en matière de PLANU. 63. Intégrer la gestion des risques liés aux sites dangereux ainsi que la lecture et la compréhension de données liées aux risques dans les formations des PLANU. 64. Organiser des formations au portail national de sécurité Incident & Crisis Management System PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 89/107 (ICMS) pour les acteurs concernés et identifier rapidement le responsable de ces formations. 65. Diffuser les règles d?utilisation de l?ICMS préalablement et de manière claire aux parties pre- nantes. 66. Rappeler le rôle de l?ICMS, des gouverneurs de province et du NCCN dans la chaine de com- mandement. 67. Analyser la pertinence des informations à introduire dans l?ICMS. 68. Intégrer systématiquement les gestionnaires de barrages dans le système ICMS lorsque ceux- ci sont concernés directement ou indirectement. 69. Formaliser et systématiser l?organisation de débriefings et de retours d?expérience des gestion- naires de crise, en ce compris avec les structures de soutien et d?expertise (CRC-W, GTI, etc.), afin de pouvoir tirer les enseignements des événements rencontrés et les intégrer dans le proces- sus d?élaboration des Plans de gestion des risques d?inondations (PGRI). 70. En matière d?alerte et de communication d?urgence : ? généraliser l'utilisation de l?outil « BE-Alert » par les autorités locales; ? augmenter le taux d?inscription de la population à BE-Alert; ? améliorer un réseau radio « Astrid », « Blue Light Mobil » ou similaire accessible aussi pour les autorités locales (coordinateur planification d'urgence » (PLANU) et/ou bourgmestre) ; complémen- tairement, développer toute ressource alternative permettant d?assurer une communication entre services en cas de saturation ou défaillance des réseaux des opérateurs téléphoniques, du réseau électrique et d?Internet. Lors de la transmission d?une information cruciale, l?émetteur doit vérifier la réception du message par le destinataire. Paramétrer l?échelle de gravité des circonstances et hiérarchiser les listes de numéros selon cette échelle. 71. Organiser une communication de crise centralisée et uniformisée qui parvienne au destinataire dans les trois langues nationales. 72. Assurer, sur les réseaux sociaux, une communication large et efficace en période de crise pour permettre l?adhésion de la population aux mesures envisagées et lutter contre les « fake news ». 73. En plus de l?arsenal existant, des médias et des réseaux sociaux, établir une démarche de communication de terrain telle que, par exemple et selon les cas : ? la constitution d?un réseau de points de contact par quartier et, le cas échéant, son activation en cas de crise; ? l?utilisation de haut-parleurs dans les quartiers; ? le porte-à-porte; ? les sirènes. 74. Sans remise en cause de l?articulation entre les différents acteurs, demander au Gouvernement wallon de solliciter le Gouvernement fédéral afin de : ? évaluer le mode de fonctionnement entre le Centre de crise national (NCCN) et les centres de crise provinciaux afin de fluidifier la transition lors du passage d?un niveau de gestion de crise à un autre; ? faciliter l?utilisation des moyens du NCCN lors d?une phase de crise provinciale ou d?une phase de crise communale; ? renforcer la coopération du NCCN avec les services des gouverneurs de province et les com- munes; ? développer au niveau du NCCN une mission d?appréhension des risques climatiques et environ- nementaux au même titre que les risques majeurs déjà pris en compte par le NCCN; ? renforcer le rôle du NCCN dans la mobilisation et la mise à disposition d?une expertise spécialisée auprès des autres niveaux de gestion de crise. 75. Actualiser chaque Plan général d?urgence et d?intervention (PGUI) au moins tous les six ans, en incluant une concertation supra-locale. Généraliser dans chaque commune la prise en compte de l?enjeu des inondations dans l?élaboration de son PGUI, incluant une identification des chaînes de communication, un plan de communication de crise et un plan de mise à l?abri et d?évacuation en fonction de la localisation des risques. 76. Clarifier les interlocuteurs destinataires (mandataires et/ou agents) des messages d'alerte et d'avertissement du NCCN et du CRC-W. 77. Assurer une capacité pour les gouverneurs de province à mobiliser, en cas de crise majeure, une réserve de personnel parmi les agents de l?administration provinciale. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 90/107 78. Organiser, à partir des services des gouverneurs de province, une mise à jour régulière et effective des coordonnées d'urgence des autorités locales et acteurs de la gestion de crise. 79. Évaluer le mode de déploiement et de fonctionnement des postes de commandement opéra- tionnel (PC Ops) pour une crise qui touche plusieurs zones de secours. 80. Identifier un ou plusieurs locaux rapidement aménageables où peut se réunir la Cellule com- munale de crise en toute sécurité et commodité. 81. Demander au Gouvernement wallon de solliciter le Gouvernement fédéral afin qu?il prévoit une procédure claire d?urgence interzones et fixant quel commandant de zone de secours dirige les opérations. 82. Prévoir la transmission des ordres du jour et des procès-verbaux des réunions des Collèges de zones de secours aux gouverneurs de province. 83. Évaluer la structuration territoriale des zones de secours, en concertation avec les autorités locales. 84. Demander au Gouvernement wallon de solliciter le Gouvernement fédéral afin qu?il poursuive la réflexion sur la possibilité de réduire le nombre de zones de secours. 3. LES BARRAGES ET OUVRAGES D?ART Cadre légal 85. Créer un cadre légal pour la gestion et la sécurité des barrages-réservoirs publics et privés situés en Wallonie, ainsi que pour leur contrôle externe ayant pour objectif de : ? garantir la sécurité des ouvrages en tout temps; ? assurer un fonctionnement optimal des infrastructures, équipements et outils utilisés en fonction des missions attribuées (sécurité, réserve d?eau potable, écrêtage, étiage, production d?énergie, loisirs); ? formaliser des procédures et priorités claires pour les agents opérationnels; ? organiser les modalités d?un contrôle régulier (fiches techniques d?inspection et stress tests ex- ternes); ? organiser les modalités d?un dialogue entre les gestionnaires des barrages -réservoirs de Wallo- nie. 86. Sans attendre l?établissement de ce cadre légal, organiser dans les meilleurs délais un audit externe des barrages-réservoirs. 87. Consacrer le principe de ces audits externes au minimum une fois tous les 5 ans, incluant l?organisation de stress tests. 88. Prendre en compte, dans le cadre réglementaire, des avis et recommandations émis par la Commission internationale des grands barrages (CIGB), notamment des cartes d'inondation en aval des ouvrages en cas de défaillances. Gestion des barrages et ouvrages d?art 89. Modéliser les parties du bassin versant en amont des barrages afin de pouvoir estimer de façon plus fine et en temps réel les besoins à couvrir par la réserve d?empotement des barrages-réser- voirs. 90. En concertation avec la Société wallonne des eaux (SWDE) : ? rendre la gestion des barrages-réservoirs plus dynamique, avec une réserve d?empotement évo- lutive en fonction des moments de l?année, des prévisions et des données météorologiques et hydrologiques, ainsi qu?un renforcement des possibilités de manoeuvre de la part des gestionnaires; ? revoir en conséquence le contrat de gestion de la SWDE, la convention entre la SWDE et le Service Public de Wallonie Mobilité et Infrastructures (SPW MI) et les notes de manutention des différents barrages-réservoirs. 91. Autoriser le Service Public de Wallonie (SPW) à imposer par injonction à la SWDE et à tout gestionnaire de barrage ou exploitant de centrale électrique, un turbinage immédiat en situation de crise. 92. Dans le même cadre, revoir la méthode de calcul du volume entrant (BT) pour y inclure les facteurs liés à l'environnement (ruissellement, saturation des sols) et aux prévisions. 93. Concernant les modèles prévisionnels propres à la gestion des barrages : ? équiper les barrages d?outils de prévision permettant au gestionnaire de réaliser des prévisions PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 91/107 crédibles de l?impact du ruissellement sur la gestion de l?ouvrage; ? développer un modèle mathématique permettant d?estimer le volume d?eau entrant dans l?ou- vrage en fonction de prévisions météorologiques et d?un ruissellement donné. 94. Modéliser l?impact de lâchers de barrage sur le bassin versant en aval, en intégrant égale ment l?impact du ruissellement sur les bassins versants et actualiser sur cette base les informations de la note de manutention sur la célérité de l?onde de crue. 95. Préciser le mécanisme de décision relatif à la gestion anticipative et au délestage des barrages- réservoirs en cas d?avertissement, de pré-alerte ou d?alerte de crue afin qu?il fasse l?objet d?une concertation de l?agent gestionnaire du barrage avec la Direction des barrages -réservoirs du Ser- vice public de Wallonie Mobilité et Infrastructures (DBR SPW MI), la DGH SPW MI et leur hiérarchie, lorsque le barrage est géré directement par le SPW. Une procédure de concertation sera mise en oeuvre concernant les concessionnaires des barrages privés. 96. Intégrer dans la gestion des barrages un plan d'alarme prévoyant une montée en puissance selon différents niveaux d'alarmes avec des règles à respecter pour chaque niveau afin de clarifier le rôle des gestionnaires des barrages. 97. En cas de crise, prévoir un mécanisme de permanence opérationnelle pour la gestion des barrages- réservoirs. 98. Étudier l?opportunité et les effets potentiels d?une interconnexion entre les barrages. 99. Étudier les possibilités d?adapter les aménagements en aval des barrages -réservoirs afin d?augmenter la capacité de restitution en cas de nécessité. 100. Analyser l?opportunité d?adapter les turbines au sein des barrages-réservoirs dans un objectif de production d?énergie verte. 101. Augmenter et systématiser les échanges d?expérience et de bonnes pratiques entre les ges- tionnaires des barrages en Wallonie, en Belgique et à l?international. 102. Demander au Gouvernement wallon de solliciter le Gouvernement fédéral afin d?envisager une modification de la loi du 17 juin 2016 relative aux marchés publics en sorte d?intégrer les mar- chés publics relatifs aux barrages dans la catégorie des secteurs spéciaux. Prévention des risques liés à la gestion des barrages 103. Organiser et former les équipes de gestionnaires des barrages en matière de gestion des risques (internes et externes) et de crise. 104. Organiser la participation des gestionnaires des barrages aux réunions du GTI. 105. Systématiser et formaliser la communication entre les gestionnaires des barrages-réservoirs et les autorités locales, les zones de secours et les zones de police en prévoyant des réunions régulières. 106. Établir dans les meilleurs délais des Plans particuliers d'urgence et d'intervention (PPUI) pour l?ensemble des barrages-réservoirs situés en Wallonie, à l?initiative des gouverneurs de province et en associant les autres parties prenantes, et intégrer les risques propres au fonctionnement des barrages et ouvrages dans les PGUI des provinces et communes concernées, incluant un plan de mise à l?abri et d?évacuation. 107. Associer les gestionnaires des barrages à la planification d?urgence au niveau des gouver- neurs de province et des communes. 108. Inclure les barrages-réservoirs et les barrages au fil de l?eau dans les Plans de gestion des risques d?inondations (PGRI). 109. Améliorer la gestion et la protection des chantiers significatifs relatifs aux ouvrages hydrau- liques et autres ouvrages d?art sur les cours d?eau, en analysant et en intégrant les risques en cas de crue. 4. GESTION DES COURS D?EAU 110. Préconiser une approche pluridisciplinaire par sous-bassin versant, en tenant compte des enjeux en amont et en aval, afin de contribuer à la protection des personnes et des biens. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 92/107 111. En tenant compte des enjeux en amont et en aval et des engagements européens en matière de gestion des cours d?eau, procéder à un audit des modalités de gestion et d?en- tretien de ces derniers. 112. Evaluer l?intérêt de renforcer la coordination existante des actes d?entretien régulier à travers l?application du Programmes d?Actions sur les Rivières pour une approche Intégrée et Sécurisée (PARIS). 113. En tenant compte des enjeux en amont et en aval, lancer une étude sur l?incidence de l'artificialisation des cours d'eau sur le risque d?inondation. 114. Développer des dispositifs de prévention des risques d?inondation en favorisant les mesures de rétention des eaux (zones d?immersion temporaire, reméandration, élargisse- ment du cours d?eau, remise à ciel ouvert, etc.). 115. Analyser rapidement l?opportunité de revoir la catégorisation des cours d?eau en vue d?opti- maliser leur gestion tout en respectant les fonctions et besoins spécifiques à chaque caté- gorie de cours d?eau. 116. Communiquer aux autorités locales concernées, en ce compris les zones de police et les zones de secours, les cartes d?aléas d?inondation, les cartes des zones inondables et les cartes de risque, après chaque renouvellement de celles-ci. 117. Insérer dans les PGRI les masters plans établis à l?échelle des sous -bassins versants. 118. Intégrer dans les PGRI une gestion territoriale proactive des risques d?inondation in- cluant les mesures visant en particulier l?amélioration de la qualité des sols, l?augmentation de leur capacité de rétention et de ralentissement du ruissellement et l?augmentation de l?infiltration de l?eau. 5. AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET RECONSTRUCTION Cadre légal 119. Étudier la manière la plus adéquate de modifier le cadre légal assurant la prise en compte des cartes d'aléas d?inondations lors de la délivrance des permis d'urbanisme. 120. Dans le cadre des permis nécessitant des mesures hydrologiques particulières (bassins d?orage, noues, etc.), contrôler la mise en oeuvre effective de ces mesures. 121. Adapter le cadre permettant de renforcer le recours aux avis de la Cellule Gestion Intégrée Sol ? Érosion ? Ruissellement (GISER) du SPW en fonction de l?impact du projet analysé sur le risque. 122. Mieux faire connaître l?existence de la Cellule GISER et organiser la possibilité pour un porteur de projet de construction ou d?urbanisation de demander, avant la phase d?instruction du permis, un avis indicatif global préalable intégrant les analyses de la Cellule GISER, des gestionnaires de cours d?eau, des gestionnaires d?égouttage et de tout autre acteur pertinent, selon la localisation. 123. Instaurer un guide de construction pour les zones d'habitation en développement sur les pla- teaux des bassins versants qui ont une influence sur le réseau hydrographique. 124. Actualiser et faire connaître les référentiels de construction durable pour adapter le bâti aux risques de phénomènes extrêmes. 125. Informer les propriétaires et les locataires des bonnes pratiques en matière d?aménagement ou de construction afin de rendre les maisons moins vulnérables aux risques climatiques et envi- ronnementaux (mise des installations à l'étage, architecture bioclimatique, etc.). 126. Mettre à jour les cartes des zones inondables et les cartes d?aléas d?inondations, prio- ritairement dans les zones sinistrées. Cette mise à jour prendra en considération, à titre d?exemple : ? les risques de retour plus fréquent des phénomènes climatiques extrêmes; ? les processus aggravants (par exemple urbanisation et artificialisation des sols, impact des em- bâcles, etc.); ? les effets de gestion des barrages dans chaque scénario de la note de manutention; ? les nappes phréatiques et leurs remontées potentielles; ? l?évaluation par les communes après un événement d?inondation. Dans l?attente de cette mise à jour : ? s?assurer que les autorités locales soient parfaitement informées de la portée et de la signification PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 93/107 réelle des cartes des zones inondables; ? intégrer une version utilisable de ces cartes dans tous les outils de Système d?informations géo- graphiques (SIG) utilisés par les communes; ? mener une démarche d?information et de sensibilisation à l?égard de la population et des parties prenantes (architectes, notaires, urbanistes, etc.), relative à la portée et la signification réelle des cartes des zones inondables et des cartes d?aléa d?inondations. 127. Finaliser et publier les cartes spécifiques du risque en aval des ouvrages en cas de défail- lances. 128. Fixer les trajectoires de réduction de l?artificialisation des sols par bassins, en appor- tant les modifications nécessaires au Schéma de développement territorial (SDT) et au Code du développement territorial (CoDT) dans le prolongement des recommandations du rap- port du Groupe d?experts « artificialisation ». 129. Entretemps, renforcer les mesures concrètes de lutte contre l?imperméabilisation des sols, notamment à partir du travail en cours en matière de gestion à la source des eaux pluviales. Mesures particulières 130. Adapter, dans toute la mesure du possible, les bâtiments menacés par les crues pour qu'ils résistent aux inondations, en particulier pour les collectivités, y com- pris pour les structures existantes. 131. Prendre en compte et systématiser le calcul d'une revanche (distance entre le niveau de l?eau et le sommet d?une berge ou le bord inférieur d?un pont) lors des projets d'aménagement de cours d'eau et d'aménagement des ouvrages de franchissement. 132. Avoir une vue coordonnée dans les zones frontalières entre différentes communes afin d?avoir une approche globale en matière d?aménagement du territoire. 133. Augmenter la capacité d?infiltration des sols à travers : ? l?optimalisation prévue dans le plan stratégique de la Politique agricole commune (PAC) en matière de cultures (couverture hivernale, agroforesterie, etc.); ? la poursuite du programme « Yes We Plant » de plantation d'arbres et de haies ainsi que le renforcement de la perméabilité des sols forestiers; ? l?augmentation de la perméabilisation des sols et de la rétention de l?eau de pluie sur site dans tous les projets de réhabilitation et de rénovation. 134. Élaborer des études de ruissellement à l'échelle de quartiers ou de communes avec définition précise du risque et mise en place de mesures constructives tels que des nou- veaux collecteurs, infiltration, protection localisée d'objets, etc. Reconstruction 135. Mettre en place des « masters plans » afin d?organiser la reconstruction et la prévention des risques d?inondations, dans une approche cohérente et planifiée à l?échelle des sous - bassins versants, en commençant par la Vesdre, par les vallées sinistrées et, le cas échéant, par tout autre sous-bassin où cela s?avérerait nécessaire. Ces « masters plans » constituent des outils d?aide à la décision et pourraient contenir des indications, notamment relatives à : ? des mesures dans les zones non urbanisées pour augmenter la capacité de rétention des sols et ralentir le ruissellement (couverture végétale permanente, forêts résilientes, planta- tion de haies, pratiques agricoles, etc.); ? des mesures dans les zones urbanisées pour augmenter l?infiltration de l?eau (verdurisa- tion, désartificialisation, préservation de friches naturelles, matériaux drainants, etc.); ? des projets d?aménagement de cours d?eau visant à réduire la vulnérabilité des zones urbanisées (zone d?immersion temporaire, reméandration, etc.). Ces « masters plans » pro- poseront des mesures concrètes à décliner, sur base des procédures prévues par la légi- slation, dans des révisions de plans de secteur et dans les outils de planification commu- nale. 136. Protéger le réseau écologique wallon. 137. Garantir le maintien du lien social dans les vallées. 138. Assurer une reconstruction des berges des cours d?eau, par priorité dans les zones PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 94/107 urbaines ou urbanisées, en intégrant l?évolution du comportement des cours d?eau à la suite des crues de juillet 2021 et en se basant sur les résultats des études hydrologiques et hy- drauliques et des différents scénarios d?aménagement envisagés. 139. Dans le cadre des opérations de post-crise, réexaminer les procédures applicables afin d?assurer à tous l?accessibilité aux démarches administratives, de simplifier et d?accélérer, dans toute la mesure du possible, l?ensemble des dispositifs (formalités, marchés publics, tutelle) et de prévenir la surcharge administrative. 140. Mobiliser toute forme de partenariats, entre des partenaires publics et/ou des publics- privés, dès qu?il y a lieu, et gérer la mise en réseau des communes, intercommunales, so- ciétés publiques et privées dans leur mission d?aides, tant au niveau des déchets qu?aux niveaux d?évacuation, de relogement, de démolition, de travaux en urgence, etc. 141. Conclure un accord de coopération entre la Wallonie et la Communauté germanophone afin de fluidifier la mise en oeuvre concrète des aides et de clarifier la répartition des rôles entre les deux entités. 142. Demander au Gouvernement wallon de solliciter le Gouvernement fédéral afin d?envisager une révision de l?arrêté royal du 22 mai 2019 relatif à la planification d'urgence et la gestion de situations d'urgence à l'échelon communal et provincial et au rôle des bourgmestres et des gou- verneurs de province en cas d'événements et de situations de crise nécessitant une coordination ou une gestion à l'échelon national en sorte de préciser la procédure à suivre et les responsabilités des acteurs impliqués dans le cadre de phases de reconstruction après une situation de crise. 143. Modifier les articles L1222-3 à L1222-9 du Code de la démocratie locale et de la décentrali- sation en vue de permettre au collège communal de gérer l?ensemble de la procédure de marché public en cas de reconstruction urgente due aux dégâts causés par une situation de crise. 144. Solliciter de l?Autorité fédérale qu?elle demande à l?Union européenne, relativement au Fonds de solidarité de l?Union européenne : ? une augmentation des moyens budgétaires en ce qui concerne les catastrophes naturelles ; ? une accélération des procédures de liquidation des crédits budgétaires au bénéfice des autorités publiques concernées, en vue de permettre une mise à disposition de ces crédits dans les six mois. 6. SERVICE PUBLIC DE WALLONIE ET FONCTION PUBLIQUE Organisation 145. Améliorer la transversalité au sein du Service Public de Wallonie (SPW) pour sortir d?une gestion en silos. 146. Renforcer le rôle de coordination du secrétariat général du SPW en améliorant la transversa- lité entre les directions générales. Développer une culture organisationnelle en ce sens, en particulier : ? au niveau des objectifs transversaux fixés par le Gouvernement ; ? en termes de dynamique de projets (y compris à durée limitée) ; ? en termes d?anticipation et gestion du risque en situation de crise ; ? en termes de capacité pour le Comité Stratégique (COSTRA) à délibérer d?enjeux communs à plusieurs Directions générales. 147. Déployer une politique de la fonction publique permettant de moderniser l?administration et d?instaurer une culture d?efficience au sein des services du SPW. 148. Définir le rôle du COSTRA en situation de crise afin d?améliorer le fonctionnement, la coordi- nation et la communication au sein du SPW et préciser son articulation avec les missions du Centre régional de crise (CRC-W). 149. Développer, au sein du SPW, des outils permettant de mutualiser la collecte de données pour estimer les dégâts sur le territoire des communes concernées en temps de crise. Ressources humaines 150. Veiller à une meilleure transmission des savoirs, en particulier pour les fonctions critiques, en cas de remplacement de personnel. 151. Établir en permanence un cadastre récurrent des ressources humaines et matérielles mobili- sables au sein du Service Public de Wallonie (SPW) en situation de crise. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 95/107 152. En termes de personnel, renforcer l?attractivité du SPW en permettant la valorisation de l?ex- périence utile et l?ancienneté acquises dans le secteur privé. 153. Augmenter l?efficacité des procédures afin d?assurer une exécution plus rapide des recrute- ments décidés par le Gouvernement wallon. 154. Demander au Gouvernement wallon de solliciter de Gouvernement fédéral afin de se concer- ter avec les organisations représentatives du personnel en sorte d?analyser l?opportunité d?adapter les normes applicables en matière de temps de travail du personnel impliqué dans une situation de crise en vue de rendre la gestion d?une telle situation plus efficace. 7. AUTRES POLITIQUES 155. Mettre à jour les Plans communaux d?action en faveur de l?énergie durable et du climat (PAEDC) afin de renforcer la prise en compte des enjeux d?adaptation climatique. 156. Créer un plan de gestion et d?évacuation des déchets en situation d?urgence, prenant en compte la répartition des responsabilités entre les acteurs concernés et organisant, au bénéfice des communes, sous l?égide de la Société publique d?aide à la qualité de l?environnement (SPAQUE), une procédure de crise pour le nettoyage des déchets immédiats produits. 157. Charger chaque intercommunale de gestion des déchets d?identifier des sites temporaires de stockage des déchets. 158. Définir et évaluer les conditions techniques et juridiques préalables à la mise en place d'une réglementation favorisant la circularité des boues de dragage, sur la base notamment des acquis développés en matière de gestion des terres excavées. 159. Mieux encadrer la valorisation des résidus des curages afin de prévenir et limiter leur mise en Centre d?enfouissement technique (CET) (revêtement pour voiries et pistes cyclables, remblais, etc.). 160. Mettre en relation les vétérinaires urgentistes ainsi que les acteurs du bien-être animal avec les cellules de sécurité provinciale et les plans d?urgence des pouvoirs locaux pour la gestion des situations de crise impliquant les animaux, tant d?élevage que pour les particuliers. 161. Promouvoir l?utilisation par les communes, les vétérinaires, les pompiers, les policiers et les citoyens des meilleurs outils dans le cadre de la recherche d?animaux perdus ou décédés. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 96/107 Annexe 6. Revue de presse La Voix du Nord, 14 novembre 2023 Inondations : les annonces du président de la République - La Voix du Nord Inondations : les annonces du président de la République Emmanuel Macron a présenté plusieurs dispositifs en soutien aux sinistrés des inondations lors de son déplacement à Saint-Omer et Blendecques, ce mardi. L?état de catastrophe naturelle : décrété « pour toutes communes qui en ont fait la demande ». Elles sont plus de 200 et la liste n?est pas fermée, a précisé le président. Un fonds d?indemnisation d?urgence de 50 millions d?euros : à destination des collectivités territoriales touchées. Il est « évolutif en fonction de la situation ». Suffisant ? « C?est une première ligne », a réagi Xavier Bertrand, président de Région, qui ne demande pas plus pour l?heure car, comme il le dit, « personne à cette heure ne connait le coût de la remise en état ». Pour les agriculteurs : « On va mettre en place un fonds spécifique qui complète le dispositif calamité agricole. Un fond qui accompagne les pertes de production, les pertes de matériels... » Pour les entreprises : « On va mettre en place des mécanismes avec l?URSSAF pour échelonner les écheances fiscales », annonce Emmanuel Macron. Qui, à un ouvrier dont l?entreprise est dans l?eau, répond que le chômage partiel va être facilité. Pour les élèves : Un dispositif de soutien scolaire et de fournitures pour les ménages les plus modestes, notamment pour les familles et les enfants qui ne vont plus à l?école depuis la semaine dernière. Et pour que ça ne reproduise plus ? Le président entend « préparer la suite dès maintenant » et enjoint « à tirer les leçons ». La réglementation sur les systèmes d?entretien des cours d?eau doit être allégée pour que les curages puissent se faire rapidement, défend-on à l?Elysée. « Avec la lourdeur de la réglementation, le coût pour curer la même portion de canal est passé chez nous de 800 000 à trois millions d?euros en dix ans », appuie François Decoster, maire de Saint-Omer. À qui Emmanuel Macron a donné mission de travailler à améliorer les systèmes d?évacuation des cours d?eau vers la mer, en piochant dans les bons exemples en Europe et en particulier aux Pays-Bas. Et auprès des assurances ? Pour l?instant il est souvent trop tôt pour que les experts se déploient, « mais on va veiller à ce que ce soit fait très vite », a promis Emmanuel Macron. « Il faut être pressant », plaide Xavier Bertrand, un ancien... assureur. Qui ajoute : « France assureurs doit nous envoyer des experts de toute la France ». La franchise prise en charge : d?un montant de 380 ¤ en situation de catastrophe naturelle, elle sera prise en charge par les départements et la Région pour toutes les personnes ayant une déclaration de sinistre, a annoncé Xavier Bertrand. France 3, 15 novembre 2023 ENTRETIEN. 3 questions au maire de Saint-Omer, missionné par Emmanuel Macron pour penser à "l?après" inondations dans le Pas-de-Calais (francetvinfo.fr) Lors de son déplacement à Saint-Omer mardi 14 novembre 2023, Emmanuel Macron a missionné le maire de la commune pour trouver des solutions afin d'améliorer les systèmes d'évacuation d'eau et éviter de nouvelles crues dévastatrices à l'avenir. Entretien avec François Decoster. Depuis le début du mois de novembre, il est en première ligne face aux inondations. Au chevet des sinistrés, dans les multiples réunions organisées dans la cellule de crise de la préfecture du Pas-de-Calais mais PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 97/107 également auprès du président de la République... François Decoster ne compte pas ses heures. Ce mercredi 15 novembre 2023, lorsqu?il nous répond au téléphone entre deux réunions, le maire de Saint- Omer est en voiture. Et il a le sourire. "Aujourd?hui, il fait beau ! Voir le ciel bleu en ce moment est un soulagement", confie-t-il. Une accalmie bienvenue alors que le moral des habitants est au plus bas. "Certains me disent qu?ils ne supportent plus la pluie et c?est difficile pour moi de trouver une réponse". Un choc psychologique causé par les crues à répétition qui ont inondé des dizaines de communes de l?Audomarois. Tout un bassin de population, déjà éprouvé par les crues historiques de 2002, se retrouve de nouveau sous les eaux. Malgré les nombreux travaux engagés il y a 20 ans, les infrastructures n?ont pas suffi à éviter les inondations, alors que l?Aa, fleuve côtier traversant l?Audomarois, a pulvérisé les records de hauteur d?eau, parfois de plus d?un mètre. À cette époque, François Decoster n?était pas encore maire de la plus grande ville du secteur (il a été élu en 2014, NDLR). Mais aujourd?hui, le premier édile apparaît comme l?homme de confiance choisi par Emmanuel Macron pour éviter de nouvelles crues. Lors de sa visite dans la ville mardi 14 novembre, le chef de l?Etat a missionné François Decoster pour se pencher sur "l?après", afin de trouver des solutions pour améliorer les systèmes d?évacuation d?eau et éviter ainsi de nouvelles crues dévastatrices dans les prochaines années. Pourquoi cette mission pour préparer "l?après" inondations, alors que la même réflexion a été menée après les crues de 2002 ? François Decoster : "Le travail mené après 2002, soit avant que je sois maire, s?est appuyé sur la crue de 2002. Personne à l?époque ne se disait qu?on pouvait connaître encore pire. Et finalement si, il est tombé en 30 jours ce qui tombe habituellement en 6 mois dans le Pas-de-Calais. On va en faire l?évaluation, mais d?évidence, ce qui a été fait depuis 2002 ne permet pas d?éviter une catastrophe. Aujourd?hui, il y a 3 temps : le temps de l?urgence, le temps de la reconstruction et le troisième temps, pour lequel j?ai été missionné. La question est la suivante : comment continuer à nous adapter au regard des événements qui sont entrés dans une nouvelle dimension ? Comment on fait pour se préparer à des évènements qui risquent d?être de plus en plus fréquents et de plus en plus brutaux ? Ce n?est pas moi, seul, qui vais créer les réponses. C?est un travail collectif qui va s?engager. Ce travail n?a pas encore commencé car les inondations se poursuivent et, aujourd?hui, je suis au côté des habitants". En quoi va consister cette mission ? "Avec le chef de l?Etat, nous voulons avoir une approche européenne. Très concrètement, il faut qu?on aille regarder ce qui a été fait ailleurs, notamment aux Pays Bas. Il y a eu des inondations catastrophiques dans les années 50 qui ont fait de nombreuses victimes et qui ont donné lieu à un grand plan national appelé delta. Il consiste notamment à installer des équipements adaptés et à préparer les habitants à de telles situations, notamment avec des pompes à domicile etc. C?est toujours bénéfique d?aller voir les expériences auprès de nos voisins. D?autant plus qu?on a des configurations assez semblables : le pays a travaillé sa relation à la mer depuis des siècles, comme nous. Le delta de l?Aa a aussi un polder, comme aux Pays-Bas (étendue artificielle de terre conquise sur l?eau grâce à des digues, des barrages avec un niveau inférieur à celui de la mer, NDLR). Chez nos voisins, il y a eu une réelle prise de conscience au plan national. Il faut que l?on fasse la même chose". Vous voulez dire que cette réflexion dépasse les frontières du Pas-de-Calais ? PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 98/107 "Le chef de l?État a conscience que ce qui s?est passé chez nous, à savoir un fleuve côtier dont le débit devient infernal, est une situation qui pourrait se reproduire ailleurs en France. Le dérèglement climatique concerne l?ensemble de la planète. Un exemple : le fait qu?on passe d?une situation de sécheresse à une situation historique d?inondations avec impacts très forts est l?illustration de la nécessité absolue de revoir notre organisation et notre fonctionnement. Il y a des questions difficiles qui vont être soulevées comme l'artificialisation des sols... Mais nous allons y arriver". La Voix du Nord, 8 janvier 2024 François Decoster à propos des inondations : « Je veux qu?on soit protégés jusqu?à la fin de l?hiver » - La Voix du Nord C?était un Facebook Live pour préparer la réunion d?après-inondations, qui se tient mardi 9 janvier au conseil départemental, à Arras, à l?instigation de l?État. François Decoster, le maire de Saint-Omer, souhaitait recueillir la parole des sinistrés, pour « être plus efficace ». Morceaux choisis. L?urgence Dire d?abord. Ce Facebook Live organisé à l?heure où les voeux devaient se tenir ? face à l?urgence, ils ont été annulés, comme beaucoup d?autres cérémonies dans l?Audomarois ?, est d?abord le lieu d?annonces avant la réunion convoquée par l?État au conseil départemental pour évoquer la question des inondations après un deuxième épisode exceptionnel en janvier. « Je veux qu?on soit protégés jusqu?à la fin de l?hiver », martèle François Decoster, le maire de Saint-Omer. Qui portera à Arras « quatre demandes immédiates ». Une capacité « d?évacuation maximale vers les eaux de la mer à Mardyck jusqu?au 30 avril », soit 45 mètres cubes d?eau par seconde. Le transfert des eaux de l?Aa, à hauteur de Cuinchy, vers la Deûle, « tant que celle- ci n?est pas inondée », à 7 mètres par seconde au lieu de 2 actuellement. La création d?un déversoir, en amont, dans le canal à grand gabarit, pour empêcher les « gros volumes d?eau » qui ont inondé, comme en novembre, le quartier de la gare, les rues de la Poissonnerie et Saint-Martin. Et la demande de financements exceptionnels pour les équipements individuels ? batardeaux notamment ?, qui doivent protéger les habitations de la montée des eaux. La réflexion L?urgence, donc, d?abord. Sans mettre de côté la question de l?adaptation, sur un terme plus long en écho à la mission qu?Emmanuel Macron, le président de la République, a confiée à François Decoster mi- novembre, en marge de sa visite dans l?Audomarois. Et en réponse aux questions des internautes ? ils sont autour de 200, tout au long du Facebook Live, à le suivre. Pêle-mêle, la question de ralentir l?eau en amont de Saint-Omer, et de faciliter son évacuation ensuite, d?autres, « de bon sens », estime l?élu, de l?infiltration et de « ces immenses parkings en macadam » qui imperméabilisent les sols. Celle des champs d?expansion des crues, enfin. Après la crue qu?on croyait exceptionnelle de 2002, dix ouvrages sont sortis de terre, qui permettent de retenir 610 000 mètres cubes d?eau. « Le référentiel de 2002 est dépassé, analyse le maire de Saint-Omer. On est dans une autre époque, celle du dérèglement climatique, des hivers avec des pluies intenses. On n?est pas préparés à cette vulnérabilité nouvelle. » Les interrogations Sur le fil déployé sous la fenêtre dans laquelle François Decoster s?exprime, les questions s?amoncellent. Il les reprend. Les assurances ? Il n?y aura pas de deuxième franchise pour les sinistrés, Bruno Le Maire, le ministre de l?Économie, l?a promis. Le chemin Cordier ? Les opérations de pompage débutent, pour accélérer l?évacuation de l?eau. Pourquoi se fier aux Hollandais pour imaginer l?après ? Parce qu?une grande partie de leur territoire, 26 %, est sous le niveau de la mer, et qu?« en 1953, une catastrophique submersion marine » les a fait changer de paradigme. Le dragage du canal ? « Je suis impatient de le voir », répond François Decoster. Il coûte plus cher, 800 000 euros en 2013, entre 4 et 6 millions aujourd?hui. « On a demandé une PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 99/107 prise en charge par la solidarité nationale. » L?impact Les mots de François Decoster sont choisis. Pour les voeux, « on attendra des jours meilleurs ». L?élu répète sa « mobilisation » et celle de l?équipe municipale, des agents quand certains ont parfois eu le sentiment d?être « abandonnés ». Il rappelle l?existence d?une cellule d?écoute à la mairie (03 21 98 40 88) et de France Victimes (01 41 83 42 25). « On se prend une catastrophe naturelle alors qu?on est encore en train de digérer une catastrophe naturelle, dit-il. Si j?utilise l?ouverture médiatique qui m?est offerte, c?est pour défendre le territoire. » La Voix du Nord, 5 février 2024 Inondations : François Decoster aux Pays-Bas, « je suis ici en pensant d?abord aux habitants de Saint-Omer » - La Voix du Nord Après la Belgique au début du mois, François Decoster était aux Pays-Bas les 24 et 25 janvier dans le cadre de la mission inondations qu?Emmanuel Macron lui a confiée. Il devra rendre un rapport fin février inspiré par la façon qu?ont les voisins de la France de se prémunir des crues. Quels sont les contours de la mission inondations qu?Emmanuel Macron vous a confiée lors de son déplacement dans l?Audomarois, le 14 novembre 2023, alors que Blendecques se retrouvait sous l ?eau pour la seconde fois en une semaine ? François Decoster : « La lettre de mission est arrivée fin novembre ou début décembre. C?est une mission qui me demande d?aller voir chez nos voisins belges et néerlandais leur système de protection contre les inondations afin d?alimenter notre réflexion sur ce sujet. Le calendrier est assez serré et il nous demande de travailler sur deux types de sujet : gérer l?urgence, la crise, le relogement, les assurances, la mise en sécurité, prévenir le risque immédiat grâce aux travaux d?urgence qui ont déjà commencé, aux capacités de pompage maximales maintenues jusqu?à la fin de l?hiver. C?est la première temporalité. Mais l?ambition, et c?est un vrai défi, est aussi de commencer la réflexion sur le long terme. » Qu?avez-vous fait et vu depuis le début de cette mission ? « J?étais début janvier dans les Flandres, la semaine dernière en Wallonie où la waterbomb ? littéralement la bombe d?eau ? de juillet 2021 a fait 39 morts, touché 5 000 maisons et fait 5,5 millions d?euros de dégâts, et 188 morts en Allemagne. Et enfin ici, aux Pays-Bas ? notamment à Lelystad, au Rijkswaterstaat, le bureau de gestion des eaux de l?État ? où l?on comprend qu?on a intégré les risques liés aux inondations bien plus tôt que chez nous. » En quoi ces déplacements vous nourrissent-ils ? « Il y a d?abord beaucoup de choses communes. On doit se réinterroger, partout, sur nos référentiels. La question de l?impact du dérèglement climatique est présente dans toutes les organisations, elle se traduit ici par une politique de prévention des inondations sur le long terme, où l?on travaille sur le polder jusqu?en 2050, 2100. On sait qu?on va vivre des événements pluviométriques plus intenses pendant l?hiver, des sécheresses plus importantes l?été, et que tout ceci est très difficile à prévoir. La bombe d?eau de 2021 ne correspond à aucune modélisation, elle a surpris par son intensité. » Est-ce que c?est un peu ce qu?il s?est passé dans l?Audomarois en novembre 2023 ? « On se savait plus vulnérables mais on ne s?attendait sans doute pas à cette répétition. Même ici où les gens s?adaptent, où l?eau est une question existentielle, où on a beaucoup fait après les inondations de 1953 ? les Pays-Bas déplorent deux mille morts dans la crue de 1953 qui déclenche les énormes réflexions et travaux de prévention contre les inondations ?, et après les inondations à répétition de 1993, 1995, 1998, on ne cesse de se réinterroger. » PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 100/107 Et qu?est-ce qui nous différencie ? « Ce qui est frappant aux Pays-Bas, c?est à quel point l?autorité régionale de l?eau est puissante, et ce sera l?un des objets de mon rapport. On est passé de 2 500 organismes de gestion des wateringues à 21, qui sont puissants, ont des compétences techniques en permanence, des équipes larges, des budgets et la capacité de définir leurs ressources. Il y a ce Delta commissioner ? littéralement le commissaire du delta, du nom, Delta, des programmes dédiés aux inondations aux Pays-Bas ?, qui est une instance un peu au-dessus, avec une capacité à voir loin, à être dans un dialogue constructif avec les acteurs nationaux, régionaux? » Ce Delta commissioner, c?est un concept qui vous intéresse ? « On voit bien qu?avec la question du dérèglement climatique et de l?adaptation, on n?est pas un jour sans y penser, surtout quand les jours se répètent et aboutissent à des catastrophes. Mais ici, tout le monde dit à quel point c?est utile d?avoir cette forme de permanence, une petite équipe, d?une quinzaine de personnes, autonome, indépendante, dans le dialogue, de petite taille donc mais avec une influence costaud, qui porte attention à cette question à chaque instant. Il y a dans ce pays une culture de l?eau très forte, l?histoire du pays est fondée dessus, mais ça reste un sujet. Un Néerlandais m?a dit, « aux Pays-Bas, on fait du vélo et on sait vivre avec l?eau », si seulement en France on faisait pareil. Alors oui, cet élément de gestion de l?eau, c?est une méthode intéressante. » Jan-Willem Trompetter, l?ingénieur principal du système de pompage que vous avez visité ici, à Lelystad, vous a dit qu?aux Pays-Bas, certains habitants avaient fini par oublier qu?ils vivaient sous le niveau de la mer ? 29 % du territoire se trouvent sous son niveau. Est-ce qu?à Saint-Omer on a pu oublier qu?on vivait dans un marais ? « Les inondations ont rappelé peut-être quelle réalité recouvrait le fait d?habiter dans le marais. Ce sont les paroles d?une nouvelle arrivante, lorsqu?Emmanuel Macron est venu ? le 14 novembre 2023, le président de la République a rencontré les habitants du marais de Saint-Omer avant de se rendre à Blendecques ?, qui lui dit qu?elle est venue ici pour vivre au paradis, et il n?y a pas de raison, quand le niveau de l?eau descend, que ce ne soit plus le cas. Ici, l?organisation de lutte contre les inondations est systémique. On pensait que les maisons seraient toutes équipées de batardeaux, elles n?en ont pas besoin, il y a des batardeaux de villes, et le principe du polder pousse au paroxysme l?importance de calfeutrer l?ensemble. » L?une des réponses aux inondations, c?est évidemment qu?on va devoir s?adapter ? « En 2023, l?événement est exceptionnel, mais il change notre référentiel. On doit évidemment s?adapter. Mais le sujet est difficile. Des habitants envisagent de déménager, une réponse a été apportée par Christophe Béchu ? ministre de la Transition écologique, avec le fonds Barnier. Il y a le fonds Mirapi, Mieux reconstruire après une inondation, et il doit y avoir une réponse d?adaptation des logements pour être moins impacté par une inondation. Le sujet va devenir existentiel, on ne peut plus penser que c?est extraordinaire. C?est aussi le sujet de ce travail. Et ce qu?il est important de dire, c?est que partout on est très bien accueillis, et c?est significatif. Il y a une mobilisation des acteurs chez nos voisins, le souhait de partager une histoire et une volonté de travailler ensemble. » Emmanuel Macron l?a dit quand il est venu à Saint-Omer, « on va continuer à vivre et à travailler dans le marais », cette phrase guide votre mission ? « Je suis là avant tout comme maire de Saint-Omer, je suis dépositaire de cette parole du président de la République et de la demande des habitants de Saint-Omer. Le sujet des déménagements n?est pas le même partout, Saint-Omer répond à un plan particulier né d?un rapport équilibré avec la nature, et ma responsabilité est de respecter cet équilibre, parce que les habitants l?ont demandé. Je suis ici en pensant d?abord à eux. » Nord Littoral, 8 février 2024 https://www.nordlittoral.fr/199793/article/2024-02-08/francois-decoster-en-mission-aux-pays-bas-et-en- PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 101/107 belgique-pour-lutter-contre-les François Decoster en mission aux Pays-Bas et en Belgique pour lutter contre les inondations Le président de la République Emmanuel Macron a confié une mission à François Decoster. Ce dernier nous explique son travail. Entretien. Lors de sa venue à Saint-Omer, le Président de la République Emmanuel Macron avait donné une mission au maire de la cité audomaroise François Decoster. Le maire de Saint-Omer a accepté de répondre à nos questions sur cette fameuse mission. Quelle est cette mission confiée par le président de la République ? « L?idée c?est de pouvoir contribuer à une réflexion globale sur ce qu?il faut faire, pour que des territoires comme le nôtre et au-delà, puissent prévenir le risque d?inondations. Il y a toute une question d?adaptation aux changements climatiques. On a vu avec ce qu?il s?est déroulé depuis le mois de novembre, que tout ce qui a été fait pour essayer de nous protéger contre ces risques d?inondations a été calculé à partir de ce que le territoire avait vécue en 2002. Mais tout cela est dépassé. Nous sommes dans une autre époque, avec des pluies plus fortes en intensité pendant l?hiver et des épisodes qui se déroulent sur quelques heures ou sur quelques jours et tout ceci créait des débordements et du ruissellement et quand cela arrive à Saint- Omer des eaux stagnent pendant des jours avant d?être évacuées à la mer. Ce que m?a demandé le président, c?est de contribuer à cette réflexion qui est une réflexion avec beaucoup d?autres parties prenantes. Mais moi, je dois aller voir, si du côté de nos voisins belges et néerlandais il y a des choses intéressantes pour contribuer à cette réflexion. Est-ce qu?il y a des bonnes pratiques, est-ce qu?il y a de bonnes expériences qui peuvent guider notre travail. C?est une mission de comparaison avec ce que font nos voisins, qui ont cette expérience avec les inondations et je suis accompagné d?une inspectrice générale de l?environnement et du développement. » Pourquoi avoir choisi la Belgique et les Pays-Bas ? « Il y a plusieurs raisons, déjà parce que nous avons une géographie qui est très proche, à Saint-Omer, nous sommes l?entrée d?un polder, c?est d?ailleurs un mot commun avec nos voisins. Nous avons tous les trois des terrains très plats avec parfois des zones qui se situent en dessous du niveau de la mer. Les Pays-Bas et la Belgique sont des pays qui ont une forte expérience depuis de nombreuses années en matière gestion de l?eau. Vous savez le mot Wateringue c?est un mot commun à l?Audomarois au Nord de la France, mais aussi à la Flandre et aux Pays-Bas. Les Pays-Bas considèrent que la gestion de l?eau comme une question existentielle. Il y a 26 % du territoire national qui est sous le niveau de la mer. Pouvoir gérer l ?eau, c?est quelque chose d?essentiel pour eux. Vous savez il y a un dicton néerlandais qui m?a été dit sur place : ?Si Dieu a créé la terre, les Hollandais ont créé les Pays-Bas.? Cela dit tout de leur longue expérience de la gestion de l?eau. C?est pour cela que durant la réflexion qui est la nôtre, pouvoir aller voir ce que font nos voisins proches avec une géographie qui nous ressemble cela est très intéressant. Et il y aura quelques éléments qui vont j?espère être utile. » Qu?est-ce que vous avez fait sur place ? Qui avez-vous rencontré ? « J?ai commencé mon voyage en Flandre puis en Wallonie qui a été très touchée par un épisode très meurtrier avec des inondations très fortes en juillet 2021 avec près de 40 morts. Et il y a quelques jours j?étais aux Pays-Bas pour rencontrer différents niveaux qui ont la compétence en matière de gestion de l?eau. Le ministère des infrastructures et de la gestion de l?eau à La Haye par exemple, j?ai rencontré ensuite des autorités régionales de l?eau. Puis j?ai pu avoir un temps d?échange avec le commissaire du delta qui est une autorité indépendante nommée pour une longue durée et qui a pour objectif d?essayer de planifier et d?organiser les prévisions et l?adaptation du modèle de protection dans la durée et tenir compte des effets du changement climatique. Ce sont à la fois des réunions de travail, mais aussi des visites de terrain pour voir à la fois la manière dont ils s?organisent et comment ils ont cherché à adapter leur protection, leurs prévisions et la gestion des inondations. » PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 102/107 Qu?est-ce qu?il en ressort ? Qu?est-ce que vous en retenez ? « Dans les semaines qui arrivent je vais terminer le rapport. J?ai un déplacement prévu le vendredi 9 février en Flandre-Occidentale pour aller sur le terrain avec le gouverneur, notamment à Bruges et on va compiler ce que l?on a vu dans un rapport que je dois remettre au début du mois de mars à Christophe Béchu, le ministre de la Transition écologique. Il y a bien sûr des éléments qui vont concerner la gouvernance de l?eau. On voit notamment du côté des Pays-Bas, qu?il y a une volonté de pouvoir ajuster l?organisation à la réalité hydraulique et l?unité hydraulique. Les Pays-Bas avaient il y a quelques années près de 2 500 Wateringues qui sont devenus aujourd?hui 21 agences et autorités régionales de l?eau pour avoir des équipes importantes avec des budgets importants, qui sont beaucoup plus importants que les nôtres. Et puis, il y a des questions de pensée d?ensemble du système. Il y a une approche très systémique. Aujourd?hui, on se pose la question des équipements en bâtardeaux pour nos maisons. C?est une question qui ne se pose pas vraiment aux Pays-Bas parce que le système doit vous protéger dans son ensemble. S?il y a des bâtardeaux, ils sont plus structurels pour protéger un quartier ou pour protéger une rue, il n?y a pas un bâtardeau pour chaque maison. Il y a aussi une volonté aux Pays-Bas d?avoir ce commissaire du delta qui est une approche intéressante. Cela permet d?avoir quelqu?un qui a cette permanence qui est là plus longtemps que les élus ou que le gouvernement et qui a pour mission de rappeler l?importance de maintenir l?effort et de rappeler l?importance de toujours continuer à investir. Cela fait partie de quelques éléments parmi d?autres qui sont intéressants. » Et une fois ce rapport remis au ministre que va-t-il se passer ? « Ma partie est seulement une partie de tous les travaux. Tout ceci doit accompagner la réflexion générale et il faudra prendre un certain nombre de décisions. Il reviendra au Ministre et au gouvernement de les prendre. » France Bleu, 9 février 2024 https://www.francebleu.fr/emissions/l-invite-du-6-9-france-bleu-nord/comment-prevenir-les-inondations- francois-decoster-maire-de-saint-omer-pilote-une-mission-pour-y-repondre-9426555 Comment prévenir les inondations ? François Decoster, maire de Saint-Omer, pilote une mission pour y répondre Après les inondations à répétition des derniers mois dans le Pas-de-Calais, le maire de Saint-Omer a été missionné par Emmanuel Macron pour tenter de prévenir de futures crues. Pour cela, François Decoster a notamment été chez nos voisins européens. Il est l'invité de France Bleu Nord. Depuis novembre, François Decoster est chargé par Emmanuel Macron de trouver des solutions afin d'améliorer les systèmes d'évacuation d'eau et éviter de nouvelles crues dévastatrices en France et notamment dans le Pas-de-Calais. Le maire de Saint-Omer, qui disait vouloir avoir une approche européenne, s'est rendu notamment en Belgique, où il est d'ailleurs encore ce vendredi, et aux Pays-Bas. "Donner plus d'espace pour les rivières" Il retient de ses déplacement "qu'il faut s'organiser". "Il faut s'organiser pour que l'on ait une coordination qui soit fondée sur la réalité hydraulique." François Decoster ajoute qu'il "y a eu beaucoup de moyens aux Pays-Bas pour faire en sorte de rassembler les forces pour se donner plus de moyens et également pour pouvoir faire en sorte de mieux protéger face aux inondations." L'élu note aussi "qu'il y a tout un travail aussi sur la prévention." "Donner plus d'espace pour les rivières et préparer les moments où elles pourraient avoir besoin de plus de volume". Le maire note enfin qu'il y "a une culture du risque, une culture de la gestion de l'eau." Delta FM, 16 janvier 2024 Emmanuel Macron : " On continuera à vivre à Calais, Dunkerque et dans l'Audomarois " PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 103/107 Le Président de la République a pris la parole sur les inondations Dans sa longue conférence de presse, le Président de la République a évoqué les inondations et la situation dans le Pas de Calais suite à une question de nos confrères de la Voix du Nord. Dans un premier temps, Emmanuel Macron a rappelé le soutien de l'Etat et a annoncé le retour de son Premier Ministre, sur le terrain, à la fin de mois. Il a également promis tout le soutien de l'Etat dans des opérations de pompage, des travaux rapides et l'accélération de l'indemnisation en collaboration avec les assureurs. Emmanuel Macron sur les inondations : "On sera là" Pour l'après, alors que les scientifiques s'accordent sur une montée des eaux qui devrait refaçonner notre littoral, le Président rassure : " Il n'y a aucune fatalité. On continuera à vivre dans l'audomarois, à Dunkerque ou à Calais. On devra aussi repenser ce qu'on a parfois oublié. Avant, l'évacuation vers la mer se faisait plus facilement. Avant, on curait plus facilement, les installations étaient plus efficaces. Les normes ont parfois compliqué les choses, rendant certains opérations plus coûteuses. " Le Président de la République a réaffirmé avoir confié à François Decoster (maire de Saint-Omer), une mission sur le sujet, pour simplifier certaines démarches et être plus efficaces sur l'évacuation des eaux vers la mer. Pour Emmanuel Macron, quelques soient les efforts que l'ont fait, nous aurons à vivre les conséquences du déréglement climatique : "Nous allons devoir changer nos villes, nos villages. On va progressivement adapter nos paysages." Libération, 5 janvier 2024 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 104/107 Le Point, 4 janvier 2024 Inondations dans le Pas-de-Calais : « On se sent impuissants » Le département est en vigilance rouge pour crue, et orange pour pluies et inondations. Comme en novembre dernier, les communes se retrouvent démunies. Les mêmes scènes et la même détresse. Après les inondations de novembre, huit départements, la plupart localisés dans le nord et l'est de la France, sont en vigilance orange pluie-inondation depuis mardi 2 janvier. Parmi eux, le Pas-de-Calais, placé également en vigilance rouge crue. La rivière Aa, en crue « exceptionnelle » selon Météo-France, est particulièrement scrutée. Après une nuit de surveillance fébrile, les mairies de Blendecques et Saint-Omer s'organisent pour évacuer des habitants et évacuer le plus rapidement possible l'eau. « Plus rapide et brutal » « C'est un retour à la case départ ». Le maire de Saint-Omer, François Decoster, ne cache pas sa fatigue. La ville a l'impression de revivre, « comme un mauvais feuilleton », l'épisode pluvieux du 7 novembre, « en plus rapide et brutal ». « On est en train de battre des records, souligne l'édile, lors de la grande crue PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 105/107 centennale de 2002, le débit était à 57 m/s, nous en sommes actuellement à 80 m/s. » Dans les rues inondées, l'eau se transforme en torrent. Une situation très fatigante « physiquement et émotionnellement » pour les 14 000 habitants. La préfecture du Pas-de-Calais rappelle que les évacuations se font uniquement sur ordre. En attendant, les habitants doivent rester dans les étages de leurs habitations. En plus du personnel du SDIS 62 mobilisé, 120 sapeurs-pompiers supplémentaires ont été engagés. À cinq kilomètres de là, Jean-Christophe Castelain a passé la nuit les yeux rivés sur le site Vigicrues. L'adjoint au maire de Blendeques, qui dirige la cellule d'urgence, espérait que le niveau de l'Aa baisserait vers 23 heures. Las, la rivière est sortie à plus de 2 mètres du niveau de son lit. « Nous avons évacué une vingtaine de personnes dans la nuit vers une salle de la mairie, nous allons ouvrir la salle des sports, plus grande, pour accueillir plus de monde », détaille l'élu. Les évacuations des personnes âgées ou à mobilité réduite se font à dos d'homme ou par tracteur. Évacuer l'eau « On se sent impuissants, avoue Jean-Christophe Castelain, les sols sont gorgés d'eau, plus rien ne s'évacue. » L'évacuation de l'eau sera justement cruciale dans les prochaines heures. « Tout va dépendre de la force des précipitations, souligne le maire de Saint-Omer, les faibles coefficients de marée ne vont pas beaucoup nous aider non plus. » Des moyens de pompage sont également prévus. En tout, depuis le 7 novembre, 350 habitations de Saint-Omer ont été particulièrement touchées par les inondations. « Certaines personnes n'étaient toujours pas rentrées dans leur maison, les murs n'avaient pas encore séché », pointe l'élu. Avec le risque que ces phénomènes climatiques se répètent, une réflexion plus vaste va s'engager sur l'habitat dans un milieu tel que le marais audomarois. « La relation entre l'homme et le marais date d'un millénaire, les habitants y sont attachés », explique François Decoster. Ce dernier doit rendre en mars un rapport sur la question. Le Figaro, 2 janvier 2024 Alerte rouge aux inondations dans le Pas-de-Calais : pourquoi les rivières débordent-elles de nouveau ? DÉCRYPTAGE - Le département a été classé en vigilance rouge «crues» mardi. «Il est absolument indispensable de nous préparer» au dérèglement climatique, a lancé le maire de Saint-Omer, commune touchée de plein fouet par les inondations. Le nord de l?Hexagone vit ses premiers jours de l?an les pieds dans l?eau. La situation est alarmante dans le Nord et surtout dans le Pas-de-Calais, classé par Météo France en vigilance rouge «crues» mardi après-midi, alors que 15 litres d?eau sont tombés au mètre carré dans la nuit de lundi à mardi dans ce département. L?organisme évoque une «pluie continue et durable» sur la zone. Les cumuls de pluie pourraient atteindre des valeurs de 20 à 40 mm sur plusieurs zones du département, dépassant localement 40 mm, prévoit encore Météo France . Ces pluies fortes et abondantes perturbent les rivières, qui sont scrutées avec inquiétude par les habitants comme par les autorités. Huit cours d?eau sont placés en alerte orange «crues» dans le Nord et le Pas-de- Calais. Des risques de «débordements importants» dans les «prochains jours» sont à craindre à proximité de plusieurs rivières, la Liane, la Hem, l?Aa (classé en vigilance rouge «crues» par le site d?informations Vigicrues), la Lys amont-Laquette, la Lawe, La Clarence amont, la Lys Plaine et la Canche, écrit encore Vigicrues . Les sols saturés d?eau depuis novembre Une situation «exceptionnelle» qui s?explique par plusieurs facteurs, réagit Adam Beernaert, directeur général de la Protection civile dans le Pas-de-Calais. «Il pleut beaucoup, dans des délais très courts», détaille-t-il, sur des sols saturés d?humidité qui peinent à dégorger depuis les crues records du 6 novembre. Le Pas-de-Calais est victime de fortes inondations depuis maintenant deux mois. Ces crues exceptionnelles, qui avaient fait cinq blessés légers dans le département, ont causé d?importants dégâts matériels : 6000 PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 106/107 habitations, 160 commerces, 130 entreprises et des dizaines d?exploitations agricoles avaient été touchés par les intempéries. Les nappes phréatiques «sont donc pleines d'eau» et débordent aux premières pluies : les eaux en surplus ruissellent vers les cours d?eau de la région, peu nombreux, qui débordent presque automatiquement. La géographie naturelle doit également être prise en compte : le département du Pas-de-Calais est plat. Le cours d?eau de l?Aa dans l?Audomarois (dans le nord-est du département) est même dix mètres en dessous du niveau de la mer, ce qui entrave l?évacuation des eaux, qui s?écoulent peu vers la mer du Nord. Dans cette région, l?Aa est en crue et inondait en début de semaine certaines rues des communes de Wizernes et de Blendecques. En parallèle, les marées à fort coefficient peuvent pousser les eaux des rivières dans le sens opposé à leur descente : l?eau rentre dans les terres, au lieu de se jeter dans la mer. Les systèmes d?évacuation des eaux peinent à tenir le coup face à de telles intempéries. «Les pompes et les digues ne sont pas calibrées pour endiguer des conditions climatiques si exceptionnelles», ajoute Adam Beernaert. «Pour tenir le coup, il faudrait élever de trois mètres les digues de franchissement d?eau sur les rivières qui sont actuellement à deux mètres dix», avance-t-il encore. Des propos corroborés par François Decoster, maire de la commune sinistrée de Saint-Omer. Ces «travaux supplémentaires» avec «des équipements à dimension» sont nécessaires pour affronter de telles catastrophes, détaillait-il le 3 janvier sur France Info, d?autant plus que ces inondations sont amenées à se multiplier «plus régulièrement et plus violemment» en fonction du dérèglement climatique. L?édile rappelle notamment les travaux menés à la suite des «crues historiques» de 2002 qui avaient occasionné 40 millions d?euros de dégâts. Ces constructions se révèlent pourtant «insuffisantes» 20 ans plus tard. «Il faut aller plus loin», a-t-il tonné, et il est «indispensable de nous y préparer très rapidement». Dans les faits, les bassins de rétention, qui «sont pleins en permanence» selon Adam Beernaert, débordent dès les premières gouttes de pluie. Les plus gros cours d?eau sont en crue en moyenne un à deux jours après les premières précipitations «et font à leur tour déborder les rivières et les fleuves». «Evacués six fois en deux mois» Des débordements qui mettent à rude épreuve le moral des habitants du département. «On sent de la colère et de l?épuisement », déplore Adam Beernaert, «avec des locaux qui ont été évacués cinq à six fois en deux mois». Certains avaient été relogés dès les premiers jours de pluie en novembre et n'avaient toujours pas remis les pieds dans leurs habitations aux premiers jours de 2024. Les murs des maisons n?ont pas le temps de sécher, les fondations des maisons s?érodent, l?eau et l?électricité sont coupées depuis deux mois dans certaines habitations. «Après le mois de décembre, on pensait que tout cela était derrière nous et là on a l'impression de revivre le même cauchemar», s?émeut encore le maire de Saint-Omer. Depuis le 6 novembre, 1200 bénévoles de la protection civile sont mobilisés dans le Pas-de-Calais pour assister les sinistrés, et 520 interventions ont été faites. «On est sur le pont en permanence depuis deux mois», explique le directeur. Une mobilisation qui est loin de diminuer : au vu des précipitations attendues sur le département en début de semaine, «les crues ne peuvent que s'aggraver», s'alarme Adam Beernaert. PUBLIÉ Mars 2024 Mission de parangonnage à la suite des inondations de novembre 2023 et janvier 2024 dans les Hauts-de-France Page 107/107 Annexe 7. Eléments de bibliographie AGUR, IIW, 2014, Les wateringues, hier et aujourd?hui, 66 p. Caisse centrale de réassurance, 2023, La prévention des catastrophes naturelles par le fonds de prévention des risques naturels majeurs, édition 2023, 59 p. Chambre régionale des comptes, 2023, « Syndicat mixte « Institution Intercommunale des Wateringues » » 48p. Commissariat spécial à la reconstruction, 2022, Un an après les inondations, bilan de la gestion post-inondations et continuité de la reconstruction, 102 p. CGEDD, 2019, Christian Barthod, Marie-Claire Bozonnet, François Scarbonchi, Évaluation du dispositif des programmes, d?actions de prévention des inondations (PAPI) et de l?efficacité de sa mise en oeuvre, Rapport CGEDD n° 012877-01, IGA n° 19053R, 112 p. DGCL, 2023 ? 04, La taxe Gemapi, une ressource en croissance pour les collectivités, bulletin d?information statistique n°174, 12 p. IGEDD, IGA, CGE, 2023, Olivier Diederichs, Philippe Louviau, Jean-Philippe Torterotot, Serge Catoire ? CGE, Retour d?expérience des inondations des 14 et 15 juillet 2021 ; 136 p. Parlement wallon, 2022, Rapport de la Commission d'enquête parlementaire chargée d'examiner les causes et d'évaluer la gestion des inondations de juillet 2021 en Wallonie, 894 (2021-2022) ? N° 1, 95 p. R. Slomp, 2012, Le cadre législatif et organisationnel de la gestion du risque d?inondation aux Pays- Bas, Audition au Sénat, Paris 29 mai 2012, Rijkswaterstaat, 78 p. R. Slomp, Y. Friaucourt, 2022, Les Pays-Bas face à la montée des eaux : quelle stratégie pour le long terme et comment répondre aux différents enjeux ? , Annales des mines, Juillet, numéro 117, pp.85- 89 PUBLIÉ Sommaire Liste des recommandations Introduction 1 Des inondations longues, liées à des pluies exceptionnelles, sur un territoire de polder 1.1 Des épisodes de pluie d?occurrence parfois centennale sur les sois humides du polder 1.2 Des inondations importantes et longues sur plusieurs bassins 1.3 Une implication historique forte dans la gestion de l?eau mais des évolutions récentes de nature à aggraver les inondations 1.3.1 Un système de drainage mis en place depuis le Moyen-âge 1.3.2 Une action structurée de l?Etat et des collectivités dans la prévention des inondations 1.3.3 Une gestion de l?eau qui mobilise de nombreux acteurs 1.4 Le climat change, le territoire aussi 1.5 Les questions soulevées à l?issue de ces épisodes d?inondation 2 Des similitudes avec les pays voisins qui font socle, des différences qui peuvent être inspirantes 2.1 Des axes d?action complémentaires et une implication de tous les niveaux 2.1.1 La prévention des inondations s?inscrit dans le cadre européen et le rythme et l?intensité de ses évolutions sont marqués par les grandes catastrophes 2.1.2 La prévention des inondations est partenariale par nature 2.1.3 La prévention des inondations prend le pas sur la protection à des rythmes différents selon les pays 2.1.4 La gestion de crise est organisée en fonction de la gravité de la catastrophe 2.1.5 Des coopérations sont une condition première de la prévention des inondations 2.2 Des différences dans le portage stratégique de la prévention des inondations 2.2.1 La capacité à faire de la prévention des inondations une priorité 2.2.2 La pondération des axes d?action 2.2.3 La posture en gestion de crise 2.2.4 L?engagement dans l?adaptation au changement climatique 3 Les actions et axes de progrès qui se dégagent 3.1 Croiser le retour des inondations de fin 2023 - début 2024 et les bonnes pratiques de nos voisins 3.1.1 Des leviers pour améliorer la gestion de crise 3.1.1.1 Organiser une participation accrue des élus à la gestion de crise 3.1.1.2 Mieux anticiper les moyens de pompage en crise 3.1.1.3 Expérimenter des dispositifs de participation citoyenne 3.1.1.4 Deux pistes concrètes pour poursuivre et renforcer un travail permanent sur la culture du risque 3.1.2 Etablir un diagnostic partagé de l?état des cours d?eaux, canaux, fossés 3.2 Renforcer le portage de la prévention par les collectivités locales compétentes 3.3 Anticiper les modalités du relèvement et l?accompagner par une structure spécifique 3.4 Renforcer les coopérations transfrontalières 3.5 Installer une institution stratège et pérenne, au plus haut niveau de l?Etat, pour orienter et soutenir l?adaptation au changement climatique 3.5.1 Structurer le portage politique de l?adaptation au changement climatique au plus haut niveau 3.5.2 Une action à lancer : représenter l?inondation et informer 3.5.2.1 Une carte des provinces, qui offre une information localisée sur tous les risques (avec un accès dans différentes langues dont le Français) 3.5.2.2 Des outils de communication pour former aux comportements qui sauvent Conclusion Annexes Annexe 1. Lettre de mission Annexe 2. Agenda des déplacements et liste des personnes rencontrées Annexe 3. La prévention des inondations aux Pays-Bas Annexe 3.1. Les catastrophes, moments fondateurs des politiques de prévention contre les inondations Annexe 3.2. Des protections des premiers Plans Delta au Commissaire du Delta Annexe 3.2.1 La défense contre la mer Annexe 3.2.2 La protection contre les inondations fluviales Annexe 3.2.3 L?articulation avec la place pour le fleuve, et le changement de cap opéré dans le contexte du changement climatique Annexe 3.3. Organisation de la prévention des inondations Annexe 3.3.1 Une gestion de l?eau et du risque intégrée à l?échelle ministérielle Annexe 3.3.2 Une organisation spécifique pour la gestion de l?eau aux échelons territoriaux Annexe 3.3.3 Un financement des protections et de la prévention organisé dans une logique de subsidiarité Annexe 3.4. Une gestion de crise fondée sur des principes clairs et partagés Annexe 3.5. De la prévention des inondations à l?adaptation au changement climatique Annexe 4. La prévention des inondations en Belgique Annexe 4.1. Mise en perspective historique et géographique Annexe 4.1.1 Un pays présentant des enjeux différenciés du point de vue de la prévention des inondations Annexe 4.1.2 Des enjeux transfrontaliers majeurs Annexe 4.2. La gestion de l?eau dans le système fédéral belge Annexe 4.2.1 Le rôle important des régions Annexe 4.2.2 Une organisation de la gestion de crise par niveaux de gravité Annexe 4.2.3 Un système assuranciel présenté comme fragile Annexe 4.2.4 Le choc des inondations de juillet 2021 Annexe 4.3. Les Flandres : une structuration par grand bassin, en cours d?inflexion Annexe 4.3.1 L?équilibre entre protection et aménagement du territoire Annexe 4.3.2 L?adoption de nouveaux grands plans structurants Annexe 4.4. La Wallonie : le choc des inondations de juillet 2021 Annexe 4.4.1 Quelques éléments sur le cadre général de la prévention des inondations Annexe 4.4.2 Mise en place d?un dispositif spécifique de reconstruction Annexe 5. Rapport de la Commission d?enquête parlementaire chargée d?examiner les causes et d?évaluer la gestion des inondations de juillet 2021 en Wallonie du 22 mars 2022 Annexe 6. Revue de presse Annexe 7. Eléments de bibliographie INVALIDE)

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