La pollution par les micro-plastiques d'origine textile
DUMOULIN, Virginie ;SAINT-GERMAIN, Sabine
Auteur moral
France. Inspection générale de l'environnement et du développement durable (IGEDD)
Auteur secondaire
Résumé
<div style="text-align: justify;">Le sujet de la pollution par les micro-plastiques d'origine textile s'inscrit dans un contexte d'augmentation constante de la production mondiale de plastique (+50% depuis 2000) et des déchets qui en découlent (+50% depuis 2000 soit une augmentation de 156 millions de tonnes (Mt) à 353 Mt), et alors que le secteur du textile est le 3ème secteur à utiliser du plastique (14,2% après les emballages et les bâtiments) et à émettre des micro-plastiques. Le champ du rapport couvre la pollution causée par les microparticules solides d'une taille inférieure à 5 mm, non solubles et non biodégradables, composées de polymères bio-sourcés ou non, émises par les produits d'origine textile destinés à l'habillement et à l'équipement de la maison. Si le constat et l'ampleur - contamination de tous les écosystèmes même les plus isolés - d'une pollution par les microparticules plastiques issues du textile ne fait pas débat, le caractère relativement récent de la prise de conscience par la communauté scientifique comme par la société civile de cet enjeu et de ses sources a nuit, jusqu'à présent, à la consolidation des données collectées, et freine la réorientation des stratégies des autorités publiques comme de l'industrie. Aux termes de sa réflexion, la mission constate que seule une réponse globale, appuyée sur l'ensemble du cycle de vie du produit, est susceptible de donner des résultats dans une échelle de temps acceptable. Elle recommande donc une série de mesures, classées par ordre de priorité en fonction non seulement de leur efficacité mais aussi de leur délai de mise en oeuvre. Eu égard à la nature du marché des textiles et à l'appartenance de la France au marché unique de l'Union européenne, qui implique la libre circulation des produits entre États-membres, la mission recommande de privilégier toutes les mesures susceptibles d'être adoptées à l'échelle de l'Union européenne.</div>
Editeur
IGEDD
Descripteur Urbamet
matériau de construction
;déchet
;produit
;industrie de l'habillement
Descripteur écoplanete
plastique
;contamination
;écoconception
Thème
Environnement - Paysage
Texte intégral
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
Virginie Dumoulin ? IGEDD
(coordonnatrice)
Sabine Saint-Germain - IGEDD
La pollution par les micro-plastiques d?origine
textile
P
U
B
L
I É
Les auteurs attestent qu'aucun des éléments de leurs activités
passées ou présentes n'a affecté leur impartialité dans la rédaction
de ce rapport
Statut de communication
? Préparatoire à une décision administrative
? Non communicable
? Communicable (données confidentielles occultées)
? Communicable
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 3/72
Sommaire
Sommaire........................................................................................................................ 3
Résumé ........................................................................................................................... 6
Liste des recommandations .......................................................................................... 8
Introduction .................................................................................................................... 9
1 La pollution par les micro-plastiques textiles est avérée mais les analyses
scientifiques et techniques restent incomplètes, ce qui freine la prise de
décision .................................................................................................................... 11
1.1 Une définition des micro-plastiques encore sujette à discussion ......................... 11
1.1.1 Une question de composition ..................................................................... 11
1.1.2 Une question de taille et de forme .............................................................. 13
1.1.3 Une question de source ............................................................................. 14
1.2 La pollution par les micro-plastiques est constatée dans l?ensemble des
écosystèmes ....................................................................................................... 15
1.2.1 La pollution aux micro-plastiques de tous les écosystèmes est avérée ...... 15
1.2.2 La part respective de chaque source dans la pollution par micro-plastique
reste incertaine ........................................................................................... 17
1.2.3 La pollution par les micro-plastiques est durable ........................................ 18
1.3 Des incertitudes qui ralentissent la prise de décision alors que la production de
textile synthétique s?accroît ................................................................................. 19
1.3.1 Une quantification de la pollution par les micro-plastiques textiles
incomplète .................................................................................................. 19
1.3.2 Des incertitudes sur les risques pour les écosystèmes et la santé humaine
................................................................................................................... 21
1.3.3 Une croissance incontrôlée de la production de textiles synthétiques ........ 23
2 La réponse actuelle à la pollution par les micro-plastiques issus du textile
demeure très incomplète ........................................................................................ 28
2.1 Les émissions de micro-plastiques textiles sont peu prises en compte dans la
règlementation européenne ................................................................................ 28
2.1.1 Une règlementation de l?économie circulaire qui s?oriente enfin vers la
réduction de la pollution micro-plastique .................................................... 28
2.1.2 Une règlementation des produits chimiques qui n?intègre pas les micro-
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 4/72
plastiques ................................................................................................... 31
2.1.3 Une règlementation sur la pollution de l?eau et de l?air qui n?intégrait pas
les micro-plastiques .................................................................................... 31
2.1.4 Une règlementation sur l?exportation des déchets ne permettant pas leur
contrôle ...................................................................................................... 32
2.2 Les mesures adoptées en France sont insuffisantes .......................................... 32
2.2.1 Une règlementation française centrée sur la REP et le recyclage qui ne
règle pas la pollution par les micro-plastiques textiles ................................ 32
2.2.2 La loi AGEC tente d?apporter une solution avec l?équipement obligatoire de
filtres à micro-plastiques dans les lave-linges ............................................. 36
2.2.3 La captation des micro-plastiques textiles dans les boues des stations
d?épuration ................................................................................................. 39
2.2.4 Les mesures qui prolongent la durée de vie des textiles ralentissent la
pollution ...................................................................................................... 41
2.2.5 La lente émergence d?une information des consommateurs et de
l?écoconception .......................................................................................... 42
2.3 Le secteur économique cherche peu à réduire la pollution à la source ............... 44
2.3.1 Un secteur en transition, peu mobilisé sur la question des micro-plastiques
................................................................................................................... 45
2.3.2 Aucun label environnemental ne semble afficher de critères sur les
émissions de micro-plastiques ................................................................... 46
2.4 De nouveaux outils qui devraient permettre de dépasser ces freins ................... 47
2.4.1 Les recherches scientifiques en cours ....................................................... 47
2.4.2 De nouvelles normes devraient faciliter l?avancée des recherches sur les
émissions de micro-plastiques ................................................................... 47
2.4.3 Les évolutions règlementaires à venir à l?échelle européenne ................... 49
3 Afin de mieux répondre à cette pollution, il est nécessaire de prendre en
compte le cycle de vie du produit textile ............................................................... 51
3.1 Approfondir les efforts de recherche ................................................................... 51
3.2 Répondre aux émissions lors de la création des étoffes et des produits ............. 51
3.3 Faire du consommateur un acteur éclairé de la réduction de la pollution par les
micro-plastiques .................................................................................................. 54
3.4 Répondre aux émissions lors de l?usage du produit ............................................ 55
3.4.1 Les émissions lors des lavages des produits ............................................. 55
3.4.2 Les émissions lors du port des produits ..................................................... 57
3.5 Répondre aux émissions lorsque le textile devient déchet .................................. 57
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 5/72
3.5.1 La collecte, le tri et les usages nouveaux (réemploi, réutilisation) .............. 57
3.5.2 Les problèmes de pollution créés par l?exportation des déchets textiles
européens et français ................................................................................. 58
Conclusion ................................................................................................................... 59
Annexes ........................................................................................................................ 60
Annexe 1. Lettre de mission........................................................................................ 61
Annexe 2. Liste des personnes rencontrées ............................................................. 63
Annexe 3. Glossaire des sigles et acronymes ........................................................... 67
Annexe 4. Quelques chiffres sur la pollution plastique en général ......................... 70
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 6/72
Résumé
Dans un contexte d?augmentation constante de la production mondiale de plastique (+50% depuis
2000)1 et des déchets qui en découlent (+50% depuis 2000 soit une augmentation de 156 millions
de tonnes (Mt) à 353 Mt)2, et alors que le secteur du textile est le 3ème secteur à utiliser du plastique
(14,2% après les emballages et les bâtiments)3 et à émettre des micro-plastiques, le ministre de la
transition écologique et la secrétaire d?État à l?écologie ont demandé à l?Inspection générale de
l?environnement et du développement durable (IGEDD) d?examiner le sujet de la pollution par les
micro-plastiques d?origine textile.
Le champ de ce rapport couvre la pollution causée par les microparticules solides d?une taille
inférieure à 5 mm, non solubles et non biodégradables, composées de polymères bio-sourcés ou
non, émises par les produits d?origine textile destinés à l?habillement et à l?équipement de la
maison.
Si le constat et l?ampleur - contamination de tous les écosystèmes même les plus isolés - d?une
pollution par les microparticules plastiques issues du textile ne fait pas débat, le caractère
relativement récent de la prise de conscience par la communauté scientifique comme par la société
civile de cet enjeu et de ses sources a nuit, jusqu?à présent, à la consolidation des données
collectées, et freine la réorientation des stratégies des autorités publiques comme de l?industrie.
Néanmoins, certaines avancées en matière de normalisation, l?aboutissement de travaux de
recherche et le renforcement du cadre règlementaire à l?échelle européenne devraient pouvoir
permettre de dépasser ces blocages dans les prochaines années. De plus, l?ampleur de la pollution
provoquée par ce secteur, qui ne pourra qu?augmenter eu égard à la consommation croissante de
textiles synthétiques à bas coûts (« fast fashion »), impose d?agir sans tarder en application des
principes de précaution et de prévention.
Les émissions de micro-plastiques se produisent à toutes les étapes du cycle de vie du produit :
lors de sa production (essentiellement dans des pays tiers), lors de son usage (air et eaux de
lavage qui contaminent les eaux et les sols) et lors de sa fin de vie (décharge).
Les mesures normatives déjà adoptées au niveau européen et national peinent à répondre à cette
pollution. D?une part, ce cadre a été mis en place avec comme principal objectif la collecte, le
réemploi et le recyclage des produits textiles, ce qui ne répond que partiellement à la problématique
des micro-plastiques issus du textile, qui sont, a priori, tout autant produits par le plastique recyclé
que par le plastique neuf. L?écoconception des produits est balbutiante sur le sujet des micro-
plastiques. D?autre part, les mesures déjà en vigueur ou celles qui sont en cours d?adoption
transfèrent indûment et, en tout état de cause, imparfaitement la charge de la pollution sur des
secteurs et acteurs économiques qui n?en sont pas responsables. Il en va ainsi de la capture des
microparticules par des filtres dans les machines à laver le linge ou par les stations d?épuration lors
du traitement des eaux usées, qui ne permettra pas, de surcroît, l?élimination de l?intégralité des
micro-plastiques. Et qu?il s?agisse de filtres dans les lave-linges ou dans les stations d?épuration, la
question du traitement des résidus reste posée : d?un côté, l?élimination des micro-plastiques
captés par les filtres dans les lave-linges provoque un nouveau déchet, de l?autre, 80% des micro-
plastiques présents dans les boues d?épuration des eaux usées sont épandus dans les champs et
de ce fait transférés dans les sols.
1 OCDE https://www.oecd.org/fr/environnement/plastiques/le-cycle-de-vie-des-plastiques-est-loin-d-etre-
circulaire.htm#:~:text=La%20production%20mondiale%20annuelle%20de,156%20Mt%20%C3%A0%20353%20
Mt.
2 Voir [1]
3 Source : Atlas du plastique 2020 ? Fondation Heinrich Böll : utilisation des plastiques par le secteur industriel
dans le monde en 2017 = 62 M/t par les textiles contre 158 M/t emballage et 71 M/t bâtiment et travaux publics.
PUBLIÉ
https://www.oecd.org/fr/environnement/plastiques/le-cycle-de-vie-des-plastiques-est-loin-d-etre-circulaire.htm%23:~:text=La%20production%20mondiale%20annuelle%20de,156%20Mt%20%C3%A0%20353%20Mt.
https://www.oecd.org/fr/environnement/plastiques/le-cycle-de-vie-des-plastiques-est-loin-d-etre-circulaire.htm%23:~:text=La%20production%20mondiale%20annuelle%20de,156%20Mt%20%C3%A0%20353%20Mt.
https://www.oecd.org/fr/environnement/plastiques/le-cycle-de-vie-des-plastiques-est-loin-d-etre-circulaire.htm%23:~:text=La%20production%20mondiale%20annuelle%20de,156%20Mt%20%C3%A0%20353%20Mt.
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 7/72
Outre les aspects techniques évoqués, la proportionnalité des mesures à mettre en oeuvre est le
principal frein à la prise de décision. L?application du principe pollueur-payeur, qui sous-tend la
politique européenne et française environnementale (et notamment le principe de responsabilité
élargie du producteur (REP)), imposerait de ne pas transférer la charge de la pollution sur d?autres
secteurs (électroménager, traitement des eaux usées). Le secteur économique du textile emploie
dans l?Union européenne 1,5 million de personnes dans 160 000 entreprises pour un chiffre
d?affaires de 162 milliards d?euros et les fibres synthétiques constituent aujourd?hui 60% des
produits textiles neufs, dont les deux-tiers sont importés. La chaine logistique mise en place dans
ce secteur pour garantir les prix les plus bas rend complexe l?adoption de toute décision en matière
d?écoconception ou d?action préalable à la mise sur le marché des produits. Toute prise de décision
impactant ces processus de production et de commercialisation comporte des risques de
déstabilisation de certaines marques.
Aux termes de sa réflexion, la mission constate que seule une réponse globale, appuyée sur
l?ensemble du cycle de vie du produit, est susceptible de donner des résultats dans une échelle de
temps acceptable. Elle recommande donc les mesures suivantes, classées par ordre de priorité
en fonction non seulement de leur efficacité mais aussi de leur délai de mise en oeuvre :
1 ? Lutter contre la surconsommation textile en communiquant sur l?impact environnemental des
produits textiles synthétiques et en impliquant les producteurs grâce à la REP ;
2 ? Assurer le réemploi et la réparabilité des produits textiles.
3 ? Investir dans la connaissance sur les micro-plastiques issus des textiles afin d?en déterminer
la quantification en tant que pollution dans les différents milieux (notamment sol et air), la
provenance (émission par) en fonction des types d?étoffes, les possibilités de captation (lors des
lavages notamment mais aussi dans les eaux usées).
4 ? Promouvoir l?écoconception des étoffes et favoriser le déploiement des nouvelles fibres
biosourcées et biodégradables.
5 ? Informer le consommateur par la mise en place d?un étiquetage des produits et le
développement de labels pour les producteurs.
6 ? Examiner les options de captation des microparticules à l?issue des lavages des étoffes au
stade de la production et de l?usage, à l?échelle industrielle et individuelle.
7 ? Analyser les perspectives de captation au niveau des stations d?épuration des microparticules
plastiques (coût, planification), l?ampleur de leur présence dans les boues d?épuration et, si la
présence des microparticules plastiques est confirmée, définir de nouvelles options pour assurer
la destruction des boues d?épuration.
8 ? Gérer les textiles en fin de vie en interdisant les exportations de produits textiles synthétiques
comme déchets dans les pays tiers qui ne peuvent les gérer.
9 - Orienter le recyclage des fibres textiles vers des usages non émetteurs de microparticules.
Eu égard à la nature du marché des textiles et à l?appartenance de la France au marché unique de
l?Union européenne, qui implique la libre circulation des produits entre États-membres, la mission
recommande de privilégier toutes les mesures susceptibles d?être adoptées à l?échelle de l?Union
européenne.
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 8/72
Liste des recommandations
[ADEME et ANSES] Soutenir des projets de recherche sur les effets
sur les écosystèmes et la santé humaine des micro-plastiques,sur la pollution aux micro-
plastiques d?origine textile dans l?air et par l?épandage des boues d?épuration et sur la
pollution issue des textiles recyclés et en fin de vie. .......................................................... 51
[MTECT/DGPR] Modifier l?article L. 541-10-12 du code de
l?environnement pour prévoir que le plan d?écoconception doit avoir comme objectif
d?augmenter la part des fibres peu ou pas émettrices de micro-plastiques ....................... 52
[MEFSIN/DGE] Soutenir le développement par la filière TLC de la
production d?étoffes en fibres naturelles alternatives au coton ou en nouvelles étoffes
synthétiques biosourcées et bio-compostables .................................................................. 53
[MEAE - MTECT] Aider les pays tiers dans lesquels sont produites
les étoffes à développer des systèmes de gestion des eaux et de captation des microfibres,
dans le cadre des politiques d?aide au développement et en partenariat avec les entreprises
européennes productrices et distributrices de produits textiles. ......................................... 53
[MTECT ? MESFIN/DGE] Limiter les émissions de micro-plastiques
en provenance des lavages en Europe en : a) défendant à l?échelle européenne dans le
cadre de l?évolution du règlement écoconception la mise en place de filtre sur les lave-linges
privés ; b) examinant à l?échelle européenne la possibilité d?un prélavage des produits
textiles avant leur mise en rayon par les distributeurs ........................................................ 57
[MTECT] Renforcer les filtres équipant les stations d?épuration dans
les zones sensibles et limiter l?épandage des boues d?épuration dont la contamination par
les micro-plastiques est avérée. .......................................................................................... 57
[MTECT/DGEC] A l?échelle européenne, en fonction des résultats
des études sur les émissions de micro-plastiques dans l?air, intégrer les microparticules de
plastique dans les PM2,5 et PM10. ........................................................................................ 57
[MTECT/DGPR] Modifier le cahier des charges de l?éco-organisme
de la filière TLC pour lui fixer des objectifs de collecte, de tri, de réemploi et de réparation
des textiles synthétiques, plus ambitieux que pour les autres textiles .............................. 58
[MEFSIN/DGT ? MEAE] Dans le cadre de la négociation européenne
sur la révision du règlement sur l?exportation des déchets, promouvoir la position tendant à
interdire l?exportation de déchets textiles dans les pays tiers qui ne sont pas en capacité de
gérer ces déchets ??????????????????????...??????58
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 9/72
Introduction
La production mondiale de plastique augmente (+50% depuis 2000 soit 460 Mt4 en 2019)5 et celle
des déchets plastiques aussi (+50% depuis 2000 soit 156 Mt à 353 Mt)6. La stratégie européenne
sur les plastiques de 2018 évalue à 49 Mt la demande de matières plastiques et à 25,8 Mt les
déchets produits chaque année dans l?Union européenne, dont seulement 30% sont récupérés
pour être recyclés. La France consomme 4,8 Mt par an de plastiques, soit 70 kg/hab. et en recycle
26%7.
Le textile est le 3ème secteur à utiliser du plastique après les emballages et les bâtiments (14,2%)8.
En 2020, l?Union Européenne a produit 6,9 Mt de produits textiles pour un montant de 77 milliards
d?euros et en a importé 8,7 Mt pour un montant de 125 milliards d?euros, dont 45% de vêtements,
principalement en provenance de Chine, du Bangladesh et de Turquie. La consommation en 2020
serait de 6,6 Mt9. En 2019, les Européens ont dépensé 600 euros par personne en vêtements et
70 euros sur les textiles de maison, ce qui représente 25 kg/pers (en incluant également les
chaussures) dont 10 kg pour les vêtements. Chaque Français a dépensé en moyenne 430 euros
en 2020 pour les vêtements.
Cette consommation de produits textiles a une forte empreinte environnementale, en raison de ses
conditions de production : on estime à 4 milliards de tonnes de CO2 les émissions de l?industrie
textile à l?échelle mondiale10 , qui est également responsable de 20% de la pollution des eaux
industrielles, et est enfin critiquée pour ses conditions de travail et de sécurité. De plus, l?impact
environnemental se poursuit pendant la vie du produit : le secteur textile serait le 3ème secteur
émetteur de micro-plastiques, pendant l?usage et en tant que déchets. En effet, les fibres textiles
sont aujourd?hui composées à plus de 60% de matières plastiques (polymères synthétiques) issues
de la pétrochimie.
Même si on ne connait pas encore parfaitement les effets des micro-plastiques sur la santé
humaine et sur l?environnement, on sait que tous les plastiques se décomposent en structures
toujours plus petites (micro puis nano), qu?elles sont très rarement biodégradables, qu?il y en a
partout sur terre et dans tous les organismes vivants, et que cette quantité ne va faire que croitre
si la consommation actuelle se poursuit au même rythme. Les observations scientifiques nous
indiquent que certains milieux et certaines espèces souffrent d?ores et déjà de cette pollution.
Les principes de précaution et de prévention imposent de réduire cette pollution le plus rapidement
possible.
Les autorités européennes et françaises se sont donc engagées dans une lutte contre les déchets
plastiques, y compris les microparticules de plastiques, en mettant en place un cadre législatif et
règlementaire. À ce stade, la pollution par les micro-plastiques apparait néanmoins comme le
parent pauvre de ces décisions politiques, en raison notamment de la multiplicité des sources
d?émission des micro-plastiques.
Les autorités publiques se sont orientées en priorité vers l?élimination des micro-plastiques ajoutés
intentionnellement dans les produits et transformés immédiatement après l?usage en déchets
4 Mt : million de tonnes
5 Source OCDE voir [1]
6 Source OCDE voir [1]
7 Atlas du plastique 2020 https://fr.boell.org/sites/default/files/2020-03/Atlas%20du%20Plastique%20VF_0.pdf
8 Voir [6]
9 En raison de la crise COVID, la consommation de textile a été très basse en 2020.
10 « Soit un impact plus important que le trafic aérien et maritime réunis » source ADEME. Ce qui représenterait
selon les sources et la définition du secteur entre 3,7% et 10% des émissions totales de GES.
PUBLIÉ
https://fr.boell.org/sites/default/files/2020-03/Atlas%20du%20Plastique%20VF_0.pdf
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 10/72
(microparticules de plastiques dans les cosmétiques, les produits ménagers et les usages
industriels). L?ensemble du cadre juridique n?est pas encore stabilisé dans ce domaine pourtant.
Ensuite les autorités tentent de lutter contre les micro-plastiques issus de la dégradation des
macro-déchets plastiques, avec notamment l?interdiction de la plupart des plastiques à usage
unique et le renforcement des mesures encadrant la gestion des déchets domestiques et
industriels, qui sont collectés et traités. Le recyclage du plastique a occupé la première place des
orientations politiques européennes et nationales, avec l?illusion qu?une fois collecté, le déchet
plastique pourrait être réutilisé à l?infini ou transformé pour produire de nouveaux objets. Cette
solution permettait d?accomplir « l?économie circulaire » et d?éviter la destruction du plastique
produit. Mais, il s?agit d?un mythe : la plupart des plastiques ne sont pas recyclables dans leurs
fonctions initiales, ou ne peuvent être réutilisés avec le même usage qu?une seule fois (par exemple
les bouteilles PET recyclées ne peuvent l?être à nouveau pour des raisons sanitaires), et de plus,
le plastique recyclé reste a priori émetteur de microparticules.
Les autorités publiques orientent également leurs interventions sur les microparticules de plastique
issues de l?usage quotidien d?objets en plastique fortement émetteurs, au premier rang desquels
les pneus des véhicules et les produits textiles. Les secteurs économiques responsables de la
pollution, notamment l?industrie textile, sont associés à la politique de lutte contre les émissions, à
la fois à l?étape de la recherche, de la production et de l?usage et de la fin de vie du produit,
notamment dans le cadre des dispositifs existants comme la responsabilité élargie des producteurs
(REP).
Néanmoins, l?ampleur de cette pollution liée aux micro-plastiques issus du textile n?a été constatée
que récemment. Malgré de nombreuses recherches lancées à la fois par les secteurs privés et
publics, leurs consolidations font encore défaut. On sait que les micro-plastiques sont très
nombreux, qu?ils ont contaminé tous les milieux, ont un impact sur la santé des écosystèmes. Mais
on ne sait pas encore quelle part occupent les émissions du secteur textile dans cette pollution, ni
quelles étoffes sont les plus émettrices, ni relier les émissions à chaque moment du cycle de vie
du produit.
La mission a donc été chargée de faire un bilan de l?état des connaissances en matière de pollution
par les micro-plastiques issus des textiles (partie 1), puis d?analyser les règles en vigueur pour
lutter contre cette pollution aux échelles européenne et nationale ainsi que les mesures mises en
place par le secteur économique lui-même (partie 2), pour enfin faire des propositions sur les axes
d?action à privilégier (partie 3).
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 11/72
1 La pollution par les micro-plastiques textiles est avérée
mais les analyses scientifiques et techniques restent
incomplètes, ce qui freine la prise de décision
1.1 Une définition des micro-plastiques encore sujette à discussion
Si l?ensemble des documents et études consultés par la mission s?accordent pour considérer que
les micro-plastiques sont les particules de plastique dont les dimensions sont réduites, il n?existe
pas pour autant de définition unique des micro-plastiques, ce qui rend la comparabilité des études
difficile et fragilise la collecte de données. Le terme « micro-plastique » renvoie à différentes
propriétés physiques et chimiques de la microparticule telles que sa composition (type de polymère,
additifs), sa forme et sa taille, sa source ou son état de dégradation.
1.1.1 Une question de composition
Concernant la matière composant les microparticules, le plastique peut être défini, en accord avec
la norme ISO 472 /2013, comme « toute matière contenant comme ingrédient essentiel un haut
polymère ». Un polymère est, lui, définit à l?échelle européenne dans le règlement REACH11 et les
notes de l?ECHA12.
La grande majorité des plastiques (environ 99 %) sont aujourd?hui produits à base d?hydrocarbures
(polymères fossiles). Des plastiques à base de ressources renouvelables existent, de nombreux
polymères étant présents dans la nature : polypeptides (collagène, gélatine), polysaccharides
(sucres) et polynucléotides (ADN, ARN). Le latex (caoutchouc naturel) est également un polymère
naturel produit par l?Hévéa. D?autres ont pour origine l?amidon du blé, de la pomme de terre ou du
maïs, le bois, des huiles obtenues à partir du tournesol ou une origine animale comme les protéines
de lait13 ou la kératine.
Figure 1 : Chronologie sur la découverte des différents polymères (source : Atlas du plastique 2020)
L?industrie textile fait principalement appelle aux plastiques synthétiques suivants :
- le polyester qui représente aujourd?hui selon les publications entre 60% et 70% des fibres
textiles produites à l?échelle mondiale, fabriqué à 90% en Asie (Chine, Inde, Bangladesh,
Vietnam). Sa composition la plus courante est le PET (Polyéthylène Téréphtalate) ;
- les fibres acryliques (PAN - Polyacrilonitrile) ;
- l?élasthanne ou lycra® (PU - Polyuréthane) ;
11 Règlement européen portant sur l?enregistrement, l?évaluation et l?autorisation des substances chimiques dans
l?Union européenne https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:02006R1907-20230528
12 L?ECHA est l?Agence européenne des produits chimiques, créée par le règlement REACH.
https://echa.europa.eu/documents/10162/2324906/polymers_fr.pdf
13 Les premiers plastiques industriels très résistants ? la Bakélite ? ont été produits à partir de lait au début du
20ème siècle.
PUBLIÉ
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:02006R1907-20230528
https://echa.europa.eu/documents/10162/2324906/polymers_fr.pdf
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 12/72
- Le nylon (PA - Polyamide), première fibre textile synthétique produite en 1938, qui sert
principalement pour les collants ;
- L'aramide (PPD-T - para phénylène-téréphtalamide), plus connue sous le nom de kevlar®,
qui sert principalement pour les vêtements professionnels (armée, pompiers) ou spéciali-
sés (moto, escrime) ;
- Le vinyle (PVC - Chlorure de polyvinyle), qui permet de fabriquer des tissus enduits pour
l?habillement et la maroquinerie, ou des rubans adhésifs.
On ajoutera à cette liste le cas particulier de la viscose (acétate de cellulose), dont la texture est
proche de la soie, qui est un polymère synthétique produit à base de bois contrairement aux autres
plastiques mentionnés préalablement qui sont issus de l?industrie pétrochimique.
La viscose
La viscose est une matière plastique d?origine végétale issue de la transformation de la cellulose qui provient de la
pulpe contenue dans le tronc des arbres ou d?autres végétaux (bambou, eucalyptus). Bien que d?origine naturelle,
elle est obtenue par un procédé de fabrication peu naturel, et générant des quantités importantes de déchets de
solvant.
La première étape de transformation est l?obtention de la cellulose, selon un procédé de fabrication proche de celui
utilisé dans la fabrication du papier. Mais comme la cellulose obtenue ne se présente pas sous forme de fibre, il est
nécessaire de la transformer de nouveau en dépolymérisant (« cassant ») les chaines de cellulose en petites
molécules, qui seront ensuite mises sous forme de fibres, puis repolymérisées. Au final la structure chimique de la
fibre est identique à celle de la cellulose, mais avec une mise en forme différente. Afin de décomposer la cellulose,
des bains d?acide sulfurique et de composés soufrés sont nécessaires et pour la recomposer, la cellulose sous
forme liquide est injectée dans un bain de soude caustique.
La fibre reste biodégradable et ne produit pas de microparticules plastiques.
Pour améliorer l?empreinte écologique de ce procédé de fabrication, des processus de recyclage et d?utilisation de
solvants moins toxiques ont été développés. Le procédé Lyocell, aussi connu sous le nom commercial de
Tencel?®, utilise un solvant spécifique le NMMO (N-Methylmorpholine N-oxide) affiché comme non toxique, et
recyclable à plus de 99% permettant la production des fibres de Tencel en circuit fermé.
Ce rapport considère comme fibres naturelles celles issues de plantes (par exemple, coton, lin,
chanvre) ou d?origine animale (soie, lainages - cachemire, laine, mohair, cuir, duvet) et ne faisant
pas l?objet d?une transformation chimique.
Figure 2 : Répartition de la production de fibres textiles dans le monde en 2021, par type (source :
Statista)
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 13/72
De plus, un plastique est un polymère auquel peuvent être ajoutés des additifs14 c?est-à-dire des
produits chimiques visant à améliorer ses propriétés ou à réduire son coût de production ou de
stockage : plastifiants, colorants, antioxydants, etc. Ces additifs peuvent à la fois constituer le
polymère lui-même ou lui être adjoint ultérieurement lors du processus de fabrication de l?étoffe.
Les impacts en terme de pollution et de risque de ces additifs seront détaillés en 1.3.2.
Enfin, les microparticules issues du textile sont souvent un mélange de microparticules plastiques
et de microparticules de fibres naturelles. Lors de la constitution des étoffes, les fibres synthétiques
et naturelles sont souvent utilisées ensemble, l?alliance la plus fréquente étant l?association coton-
polyester. Les étoffes peuvent aussi être agrémentées de microparticules de plastique ajoutées
dans des objectifs esthétiques (paillettes, thermocollage, broderies), ou d?usage notamment pour
les vêtements professionnels (imperméabilisation, ignifugation par exemple).
1.1.2 Une question de taille et de forme
Les micro-plastiques sont définis par leur taille. La grande majorité des publications et études
affichent une taille de 5 mm pour la plus grande des dimensions des particules considérées.
Certaines études choisissent néanmoins 1 mm comme dimension de référence.
Une limite basse, permettant de distinguer micro et nanoparticules est également évoquée dans
de nombreuses études, mais à nouveau les analyses divergent.
Figure 3 : Les plages de taille associées aux macro, micro et nano-plastiques (source : Office
parlementaire d?évaluation des choix scientifiques et technologiques)
14 Note ECHA précité [4] : « Un polymère, [?], peut également contenir des additifs nécessaires pour préserver
la stabilité du polymère et des impuretés dérivées du procédé de fabrication. ». La norme ISO/FDIS 24187
considère de la même manière les additifs comme faisant partie du polymère.
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 14/72
Les nanoparticules correspondraient à des fragments dont la taille est inférieure à 1 ?m, mais là
encore, les limites supérieures varient selon les études entre 1 et 20 ?m, le plus souvent, sans
qu?une valeur pour la limite inférieure ne soit définie. Le flou sur la limite de classe entre micro et
nano-plastiques s?explique à la fois par l?aspect plus récent des recherches concernant les nano-
plastiques, mais également, par le haut niveau d?équipement nécessaire à leur observation.
Par ailleurs, et particulièrement pour ce qui concerne les microparticules issues du textile, se pose
la question de la forme de la microparticule. Les microparticules émises par la filière textile sont le
plus souvent des fibres, de forme allongée. Elles peuvent donc dépasser les 5 mm en longueur,
tout en ayant une largeur très inférieure aux 5 mm.
1.1.3 Une question de source
Les microparticules plastiques issues des textiles relèvent, selon les informations collectées par la
mission, principalement des émissions consécutives à la production (notamment les bains de
lavage lors de fabrication des étoffes) et à l?usage (port, lavage) des textiles, mais elles peuvent
également découler d?ajouts intentionnels sur les étoffes (paillettes, thermocollage) et de la
dégradation des étoffes devenues déchets (décharges). Elles participent donc aux pollutions
primaires et secondaires quelle qu?en soit la définition.
Les micro-plastiques primaires et secondaires
La plupart des contributions lues par la mission considèrent que les micro-plastiques sont de deux sortes :
- Les micro-plastiques primaires ou micro-plastiques « intentionnels » sont des microparticules qui se présentent
dès leur phase de production comme les microbilles intégrées aux cosmétiques pour leur usage exfoliant, ou les
granulés de pré-production (« pellets ») utilisés pour la fabrication de produits en plastiques ;
- Les micro-plastiques secondaires qui résultent de la désagrégation, dans l?environnement, d?objets en plastique
de dimension plus importante en fragments de plus en plus réduits et qui sont issus soit :
* de la dégradation des macro-déchets plastiques, notamment sous l?action de l?érosion marine ou de la
photodégradation ;
* de l?usage de produits en plastique de plus grande dimension. Ces micro-plastiques issus de la
fragmentation progressive du plastique pendant son usage proviendraient principalement de cinq sources :
= l?abrasion des pneus : il s?agit de caoutchouc naturel ou synthétique ;
= l?usure des marquages routiers et autres peintures dont celles des bateaux ;
= les outils de pêche, et notamment les filets de pêche, même si ces derniers émettent la plus
grande partie de leurs micro-plastiques dans l?eau de mer lorsqu?ils deviennent des déchets ;
= les microparticules issues des textiles pendant leur fabrication et leur usage ;
= les micro-plastiques issus des géotextiles.
Lors de leurs auditions, les rapporteuses ont noté les propos de Nathalie Gontard15 qui considère que d?autres
objets en plastique peuvent, et en tout cas pourront, émettre des microparticules de plastique au fur et à mesure
de leur dégradation d?usage sans être pour autant devenus des déchets : il s?agit notamment des plastiques utilisés
dans la construction, les aménagements urbains, les véhicules, etc?
À noter que l?Union Internationale de Conservation de la Nature (UICN) fait un autre choix qualifiant de
primaire ce qui relève de la production et de l?usage, et de secondaire ce qui relève de la dégradation des
déchets16.
15 Voir Annexe 2
16 Micro-plastiques primaires dans les océans - https://portals.iucn.org/library/efiles/documents/2017-002-Fr.pdf
PUBLIÉ
https://portals.iucn.org/library/efiles/documents/2017-002-Fr.pdf
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 15/72
Afin de mieux qualifier le champ de cette étude, la mission s?est référée à la définition des produits
textiles qui figure dans le règlement européen 1007/2011. Est un produit textile « tout produit qui,
à l'état brut, semi-ouvré, ouvré, semi-manufacturé, manufacturé, semi-confectionné ou
confectionné, est exclusivement composé de fibres textiles, quel que soit le procédé de mélange
ou d'assemblage mis en oeuvre ». Et est une fibre textile : « i) un élément caractérisé par sa
flexibilité, sa finesse et sa grande longueur par rapport à la dimension transversale maximale, qui
le rendent apte à des applications textiles ; Ou ii) une bande ou un tube souple ne dépassant pas
5 millimètres de largeur apparente, y compris les bandes coupées de bandes ou de feuilles plus
larges fabriquées à partir des substances servant à la fabrication des fibres (?) et aptes à des
applications textiles. »
Pour préciser le champ de ce rapport, il convient d?ajouter à cette définition matérielle des textiles,
leurs usages : la mission a décidé d?y intégrer les étoffes et produits textiles 17 servant à
l?habillement, y compris professionnel, et à l?équipement de la maison (linge de maison). Elle a par
contre choisi d?en exclure les chaussures et les géotextiles, ainsi que les lingettes, même si ces
derniers sont également responsables d?une pollution aux microparticules de plastique.
Les géotextiles
Les géotextiles sont des matériaux utilisés dans l?ingénierie civile, l?agriculture et la construction ; ils sont
composés d?une variété de matériaux plastiques (PET, PP) mais aussi de fibres naturelles. Ils sont utilisés dans de
nombreuses applications, de la lutte contre l?érosion côtière au drainage en passant par la construction.
L?UE représente 20% de ce marché mondial, en croissance (+24% attendus d?ici 2040).
Les émissions de micro-plastiques en provenance des géotextiles en PET sont évaluées entre 58 et 158 kilotonnes.
Comme il n?y a aucune barrière entre les géotextiles et l?environnement, les micro-plastiques sont relâchés
directement dans l?environnement et ne peuvent être retirés. La fin de vie des géotextiles n?est pas prise en compte
dans leur processus d?installation et de gestion.
À l?échelle européenne, des réflexions sont en cours afin de : mieux définir les géotextiles18, modifier leur conception
pour réduire leurs émissions, éviter le recours aux géotextiles pour certains usages, mettre en place un système
de responsabilité élargie des producteurs.
En conclusion de cette première partie, le champ de ce rapport couvre la pollution causée par
les microparticules solides d?une taille inférieure à 5 mm, non solubles et non
biodégradables, composées de polymères bio-sourcés ou non, émises par les produits
d?origine textile au sens du règlement européen 1007/2011 destinés à l?habillement et à
l?équipement de la maison.
1.2 La pollution par les micro-plastiques est constatée dans
l?ensemble des écosystèmes
Afin de mieux appréhender l?importance de la pollution par les micro-plastiques, l?annexe 4 du
présent rapport donne quelques ordres de grandeur sur la pollution plastique en général, les deux
étant intrinsèquement liées.
1.2.1 La pollution aux micro-plastiques de tous les écosystèmes est
avérée
Une pollution par les micro-plastiques a été constatée dans tous les milieux, sur toute la planète, y
compris dans les milieux les plus reculés (Arctique et Antarctique, glaciers, coraux, fonds des
océans, nappes d?eau souterraines). Le rapport de l?Office parlementaire d?évaluation des choix
17 Conformément à l?usage fait dans le cadre de la normalisation, les étoffes désignent toute forme de tissus, issus
de fils tissés ou tricotés, et les produits textiles désigne un objet résultant de l?assemblage d?étoffes.
18 À noter cependant qu?il existe déjà une norme ISO 10318-1:2015 qui les définit.
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 16/72
scientifiques et technologiques (OPESCT) de 2020 sur la pollution plastique19 conclut qu?il n?existe
« aucun modèle scientifique permettant de quantifier avec certitude le nombre de micro-
plastiques », affirmation que la mission ne peut que confirmer, tant les évaluations chiffrées
trouvées dans la littérature varient. L?étude précitée de l?UICN, qui apparait comme une des
principales références, estime qu?entre 1,8 et 5 Mt de micro-plastiques « primaires » 20 (voir
encadré p. 14) seraient relargués dans l?environnement chaque année.
La pollution des milieux aquatiques, et plus spécifiquement marins, a été la première ayant fait
l?objet de recherches et d?expertises. Le rapport précité de l?UICN estime entre 0,8 et 2,5 Mt/an les
micro-plastiques atteignant les océans (soit 48% des pertes de micro-plastiques « primaires »). Le
rapport de l?OPESCT indique que les micro-plastiques (compris entre 0,5 et 5 mm)
représenteraient 6 400 tonnes (soit 2,5 kg par km²) dans la pollution plastique de l?océan et 1 700
milliards de déchets, soit une concentration de 678 000 déchets par km². Les écarts entre les
pertes et les rejets peuvent probablement être attribués au stockage des micro-plastiques dans les
sols, notamment les fonds marins, mais également aux différences de mesures des études. Par
exemple, l?étude de l?UICN n?intègre pas les microparticules issues du caoutchouc naturel.
70% à 80% des micro-plastiques trouvés dans les océans viendraient des fleuves et des rivières :
6 000 à 7 000 tonnes de micro-plastiques seraient ainsi rejetés par an dans les océans avec une
répartition équilibrée entre les océans21. Des études ont estimé les micro-plastiques transitant par
la Seine (0,34 tonnes22 ), le Rhône (22 t/an acheminées en Méditerranée), le Rhin (890 000
particules/km², avec des maximales de 3 900 000 particules/km²)23.
La pollution des sols et de l?air, pourtant avérée, n?a pas encore fait l?objet d?études permettant de
la quantifier de façon précise.
Les micro-plastiques peuvent être retrouvés dans les sols après y avoir été acheminés soit par l?air
soit par l?eau. La pollution par le biais des eaux vient principalement, d?une part, des ruissellements
et des inondations (majoritairement alimentée par les microparticules de pneus, de marquages
routiers et les poussières urbaines24 ) et d?autre part, de l?épandage des boues des stations
d?épuration, elles-mêmes contaminées par les micro-plastiques captés lors des processus de
filtration des eaux usées, et enfin, de l?irrigation de terres agricoles par des eaux chargées en micro-
plastiques. Elle est aussi la résultante de la décomposition des plastiques qui sont mis en décharge,
principalement en dehors de l?Union européenne, notamment en provenance des textiles exportés
par les pays de l?OCDE qui finissent comme déchets. Aucune donnée quantitative portant sur des
concentrations observées dans les sols n?est disponible à ce stade, même si certains scientifiques
19 Rapport n° 217 (2020-2021) de Mme Angèle PRÉVILLE, sénatrice, et M. Philippe BOLO, député, au nom de
l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, déposé le 10 décembre 2020
« Pollution plastique : une bombe à retardement ? » https://www.senat.fr/notice-rapport/2020/r20-217-notice.html
20 Selon la définition UICN à savoir ceux qui ne sont pas issus des déchets plastiques.
21 Rapport de l?OPESCT [19] : 28 % vers le Pacifique Nord par le biais des fleuves d?Asie et d?Amérique du Nord,
24 % vers l?Atlantique Nord via les fleuves d?Europe et d?Amérique du Nord, 23 % vers l?Océan Indien, 12 % vers
le Pacifique Sud et 13 % vers l?Atlantique Sud.
22 Dris et al. (2016) https://enpc.hal.science/hal-01251430/document
23 Mani et al. (2015) https://www.nature.com/articles/srep17988
24 Poussières urbaines : expositions aux intempéries, abrasion et déversement. Le terme désigne un groupe de
neuf sources identifiées lors de récentes évaluations par pays et que l?on trouve principalement dans les
environnements urbains : particules issues de l?usure d?objets (semelles de chaussures, ustensiles de cuisine
synthétiques), de la dégradation d?infrastructures (habitations, aménagements, pelouses artificielles, ports, y
compris de plaisance, peintures des bâtiments) ainsi que de l?utilisation d?abrasifs ou de détergents. Ces sources
sont regroupées car leur contribution individuelle est faible.
PUBLIÉ
https://www.senat.fr/notice-rapport/2020/r20-217-notice.html
https://enpc.hal.science/hal-01251430/document
https://www.nature.com/articles/srep17988
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 17/72
estiment la pollution des sols à plus de 50% de la pollution par les microparticules de plastique25.
Une étude pilote menée par le « Centre commun de recherche » (JRC)26 de la Commission
européenne estime que 60 microparticules de plastiques peuvent être présentes dans 1 g de sol
cultivé (à partir de 50 échantillons collectés dans sept États membres)27.
La pollution de l?air fait l?objet d?encore moins d?études et d?analyses que celle des sols. Pourtant,
dans les zones urbaines, les micro-plastiques observés dans l?air sont très majoritairement des
fibres, provenant vraisemblablement de l?usure de textiles synthétiques ou artificiels28 . Peu de
données quantitatives sont disponibles : l?étude Dris et al. (voir la note [26]) a mesuré les retombées
atmosphériques de fibres en deux sites de la région parisienne et estime que de 2 à 355 fibres se
déposent par m²/jour ; les même chercheurs (Dris et al. 2017) ont mesuré des concentrations dans
l?air extérieur comprises entre 0,3 et 1,5 fibre par m3, dont un tiers seraient d?origine pétrochimique ;
des mesures ont également été faites en air intérieur, montrant des concentrations bien
supérieures, de 1 à 60 fibres par m3. Une étude réalisée à Londres fait état de micro-plastiques
trouvés dans tous les échantillons d?air extérieur examinés, avec des taux de dépôts allant de 575
à 1008 micro-plastiques aéroportés/m²/jour dont 92% de microfibres29. On pourrait ainsi comparer
cette pollution à celle provoquée par d?autres types de microparticules qui font l?objet de
règlementation comme les PM10 et les PM2,5
30
(voir en 2.1.3).
1.2.2 La part respective de chaque source dans la pollution par micro-
plastique reste incertaine
La plupart des publications considèrent que les sept sources d?émission des microparticules de
plastique les plus importantes sont les pneus, les textiles synthétiques, la peinture marine, les
marquages routiers, les articles cosmétiques et de nettoyage, les granulés de plastique et les
poussières urbaines.
Si les sources d?émission des microparticules sont clairement identifiées, leurs quantifications
respectives font encore l?objet de nombreux débats. Les études ne s?accordent pas sur les
proportions émises par chaque source. Ainsi l?étude de l?UICN accorde 35% des émissions de
micro-plastiques aux textiles synthétiques contre 25% pour les pneus (à l?échelle mondiale), tandis
que les études commandées par la Commission européenne réduisent la pollution issue des
textiles à une part mineure des émissions européennes (allant de 0,2% à 3,4%) face aux émissions
des pneus (plus de 25%) et des peintures (plus de 27%). Les écarts dans les chiffres ne permettent
pas d?y voir très clair.
25 Dans le monde, le stock de micro-plastiques dans les sols agricoles pourrait être de 1,5 à 6,6 M de tonnes, soit
plus qu?à la surface des océans. « Continents de plastiques : Une estimation du stock de micro-plastiques dans les
sols agricoles » ? M. Kedzierski, D. Ciredef Boulant, M. Palazot, M. Yvin, S. Bruzeaud - Université Bretagne Sud,
Lorient
26 Le JRC fournit des connaissances et des connaissances scientifiques indépendantes et fondées sur des
preuves, soutenant les politiques de l'UE visant à avoir un impact positif sur la société.?
27 Document de travail de la Commission européenne d?évaluation de la Directive du Conseil 86/278/CE du 12
Juin 1986 sur la protection de l?environnement et en particulier le sol, quand les boues d?épuration sont utilisées en
agriculture SWD (2023) 158 final
28 Dris et al. (2016) https://enpc.hal.science/hal-01251430/document
Wright SL, Ulke J, Font A, Chan KLA, Kelly FJ. Atmospheric microplastic deposition in an urban environment and
an evaluation of transport. Environ Int. 2020; 136: 105411. DOI: https://doi.org/10.1016/j.envint.2019.105411
29 Dépôt atmosphérique de micro-plastiques en milieu urbain et évaluation des transports ? SL Wiright et al. 2020
https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0160412019330351?via%3Dihub
30 Les particules en suspension (notées PM en anglais pour Particulate matter) incluent les matières
microscopiques en suspension dans l'air ou dans l'eau. Les particules en suspension dans l'air se nomment aérosol.
Les PM10 regroupent les particules de diamètre inférieur à 10 µm, les PM2,5 celles inférieures à 2,5 µm.
PUBLIÉ
https://enpc.hal.science/hal-01251430/document
https://doi.org/10.1016/j.envint.2019.105411
https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0160412019330351?via%3Dihub
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 18/72
Concernant l?abrasion des textiles synthétiques, elle se produirait majoritairement au cours des
lavages lors de la production des étoffes, puis dans les blanchisseries industrielles ou dans les
foyers. La part produite lors de la fabrication des étoffes est évaluée par l?UICN à près de 16% de
la production de micro-plastiques par l?Asie où la plupart des étoffes synthétiques sont produites.
Ces émissions se font notamment lors des bains de lavage nécessaires à la teinture des fils et de
l?étoffe. La part d?émission serait plus importante dans les lavages domestiques en Europe. L?UICN
estime que les pertes de micro-plastiques s?élèvent à environ 900 mg/kg de textile synthétique à
chaque cycle de lavage, ou encore à 2% la perte de masse d?un textile synthétique au long de son
cycle de vie. La commission Minderoo indique que 30 000 à 465 000 microfibres sont rejetées dans
le cadre des 5 premiers lavages par m² d?étoffe synthétique.
Néanmoins, comme indiqué précédemment, la pollution de l?air ambiant par les microfibres de
plastiques issues des textiles serait également une source importante de pollution. Cette source
n?est pas quantifiée.
De même, la pollution des sols et des eaux par les textiles mis en décharge, principalement dans
les pays tiers, n?est pas évaluée.
1.2.3 La pollution par les micro-plastiques est durable
Comme indiqué précédemment, les plastiques et les micro-plastiques sont très résistants, ce qui
constitue une vertu pour leurs applications industrielles et explique l?accroissement de leur usage,
mais en fait, a contrario, une source de pollution de long terme lorsqu?ils rejoignent l?environnement.
Ils se disloquent, formant des fragments de plus petites tailles et libérant alors les additifs. La
majeure partie des plastiques qui ont été produits dans l?histoire seraient encore présents dans
l?environnement sous une forme ou une autre31.
L?état de la recherche ne permet pas de dire si les microparticules de plastiques non-
biodégradables seront un jour bio-assimilables par un milieu naturel ouvert, ou si leur apparente
disparition résulte uniquement d?une dislocation plus importante. On constate donc leur persistance
qu?ils soient ingérés par des organismes, notamment marins, qu?ils sédimentent ou encore qu?ils
soient dégradés en particules plus petites encore (nano-plastiques), certains pouvant même être
aérosolisés, notamment par les vagues, et se retrouvant ensuite dans le cycle de l?eau (neige,
pluie).
Les plastiques bio-sourcés ont les mêmes propriétés que leur équivalent d?origine fossile. Par
conséquent, si le plastique fossile n?est pas biodégradable, son homologue bio-sourcé ne le sera
pas non plus. Concernant la pollution par micro-plastiques, la question de la capacité du
plastique à se dégrader de manière naturelle dans l?environnement est donc plus importante
que son origine biosourcée ou fossile, quelle que soit la taille de la microparticule, même à
l?échelle des nanoparticules.
On entend généralement par biodégradable, la capacité d?un polymère en fin de vie à pouvoir être
utilisé comme source de carbone par les micro-organismes32. Certains polymères sont biosourcés
31 A. Horton et al. 2017 https://www.rsc.org/images/AliceHorton_tcm18-249960.pdf
32 Directive (UE) 2019/904 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 relative à la réduction de l?incidence
de certains produits en plastique sur l?environnement - Article 3 ? Définitions ? 16 : « plastique qui est de nature à
pouvoir subir une décomposition physique ou biologique, de telle sorte qu?il se décompose finalement en dioxyde
de carbone (CO2), en biomasse et en eau, et est, conformément aux normes européennes applicables aux
emballages, valorisable par compostage et par digestion anaérobie. »
Plastics in a circular economy: Mitigating the ambiguity of widely-used terms from stakeholders consultation ? N.
Gontard et al. 2021 - « Les plastiques biodégradables sont ceux qui sont convertis par les micro-organismes du sol
dans un délai raisonnable (inférieur à un an), éventuellement en conjonction avec d'autres facteurs trouvés dans
des conditions environnementales naturelles répandues, en biomasse, eau, dioxyde de carbone (CO2) et méthane
(CH4). » https://doi.org/10.1016/j.envsci.2022.04.011
PUBLIÉ
https://www.rsc.org/images/AliceHorton_tcm18-249960.pdf
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 19/72
et biodégradables par les micro-organismes : l?acide polylactique (PLA) 33 et le
polyhydroxyalcanoate (PHA)34, ce dernier n?étant pas utilisé actuellement dans le domaine textile.
Cette biodégradabilité des plastiques concerne également des polymères dérivés du pétrole : le
PBAT (polybutylène adipate-co-téréphtalate), le PBS (polybutylène succinate) et le PCL
(polyaprolactone), mais aucun d?entre eux n?a pour l?instant d?utilisation textile.
Figure 4 : Système de classification des polymères en fonction de leur origine et de leur
biodégradabilité (source : ADEME)
Néanmoins, la biodégradation ultime de ces plastiques dans l?environnement n?est pas encore
démontrée dans la pratique, des conditions spécifiques de température et d?oxygénation étant
requises.
1.3 Des incertitudes qui ralentissent la prise de décision alors que
la production de textile synthétique s?accroît
1.3.1 Une quantification de la pollution par les micro-plastiques textiles
incomplète
Comme indiqué précédemment, on constate une faiblesse du chiffrage de la part de la pollution
par les micro-plastiques issus des textiles au sein de la pollution micro-plastique en général, de
même que des données sur leur présence dans certains milieux comme le sol et l?air. L?existence
de micro-plastiques et encore plus de nano-plastiques issus des textiles est méconnue par la
population qui ignore, par voie de conséquence, le risque que ces derniers feraient courir à
l?environnement ou à l?homme.
33 Polymère biodégradable en compostage industriel (à une température supérieure à 60°C donc dans des
conditions non naturelles) qui peut être obtenu à partir d?amidon de maïs ou autre culture. Il représente une
alternative au polyéthylène (PET).
34 Polyester biodégradable.
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 20/72
La pollution liée aux micro-plastiques issus des textiles est également noyée dans les travaux en
cours visant la réduction de la pollution en général issue des textiles (impact carbone, pollution
chimique, consommation excessive d?eau, mauvaise gestion des déchets), et la recherche d?une
amélioration des conditions de travail dans certains pays producteurs.
Mais la part des fibres synthétiques dans la fabrication des étoffes est, elle, clairement évaluée.
Comme indiqué dans le rapport de l?OPESCT précité, moins chères à produire, « résistantes,
élastiques, peu absorbantes, imperméables et séchant donc rapidement, les fibres synthétiques
confèrent aux tissus des propriétés inégalées par les fibres naturelles ». Elles représentent
désormais les deux tiers du marché des fibres textiles : 62,1 Mt de fibres synthétiques ont été
produites (dont 54 Mt pour le polyester) en 201635 et 66 Mt en 201936.
Suite aux études réalisées par le secteur comme par d?autres acteurs, on sait également que le
lavage des vêtements libère des fibres : leur relargage dans l?environnement est évalué au niveau
européen entre 18 000 et 46 000 tonnes par an. Des études démontrent que des fibres se
retrouvent en très grand nombre dans les effluents des machines à laver (9 000 à 35 000 fibres
par litre), proportion qui se réduit dans les eaux usées (70 à 473 fibres par litre) en raison de la
dilution des eaux issues des machines à laver dans les autres eaux grises. Le rapport de l?OPESCT
précité indique ainsi que 4,3 milliards de microfibres sont rejetées en mer à la sortie de la station
d?épuration de Nice par an alors qu?elle intercepte 92% des fibres.
La présence de fibres synthétiques non-biodégradables dans tous les milieux n?est donc plus à
démontrer, même si une étude récente a considère que 8,2% des fibres présentes dans l?océan
seraient d?origine synthétique, contre 79,5% d?origine cellulosique et 12,3% d?origine animale37.
Rappelons néanmoins que les fibres cellulosiques et d?origine animale sont biodégradables dans
des conditions naturelles selon des délais variables38 . Le présent rapport ne traite pas de la
pollution des écosystèmes par des excès de fibres cellulosiques.
Jusqu?à présent, il n?existe pas de méthodologie « agréée » à l?échelle mondiale, et même
européenne, permettant la quantification des émissions de microparticules de plastique par les
étoffes ou les produits textiles (définition, échantillonnage, quantification), ainsi que l?impact exact
des lavages (la température de lavage et l?agressivité des lessives influenceraient la libération des
microfibres), qu?elles sont les périodes d?émission dans la vie du produit même si le nombre de
fibres libérées diminuerait avec la répétition des cycles de lavage (on parle de 60 à 80 % des fibres
qui seraient libérées au premier lavage).
L?intensité du relargage des fibres textiles dépend en effet de nombreux facteurs, de la nature de
la fibre à la méthode de découpe. L?apprêt mécanique39 subi par le textile peut également jouer un
rôle. Ainsi, le lavage d?un tissu polaire de 400 g libèrerait 14 millions de fibres, soit dix fois plus que
d?autres textiles. Les rapporteuses ont questionné des marques qui ont réalisé des tests et
obtiennent d?autres résultats : les étoffes les plus émettrices seraient les serviettes en microfibres.
Les émissions par les lave-linges et la capacité à capter les fibres relarguées font également l?objet
d?essais méthodologiques.
Cette absence de méthodologie et de quantification freine la prise de décision.
35 Rapport de l?office parlementaire précité [16]
36 The Minderoo-Monaco Commission on plastic and human health - 21 mars 2023
37 G. Suaria et al. 2020 « Microfibres dans les eaux de surface océaniques : une caractérisation globale »
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7274779/
38 Le coton serait biodégradable (et compostable) en quelques semaines à quelques mois ; le lin un peu plus
rapidement.
39 Les apprêts textiles sont une série d?opérations que subissent les textiles ou articles confectionnés dans le but
de modifier leur apparence, leur surface, leur toucher ou leurs propriétés. Les apprêts mécaniques sont réalisés
dans des cylindres chauffants ou non, gravés et recouverts de brosses métalliques (émerisage, calandrage,
gaufrage, cloquage, moirage, grattage, foulage, tondage, sanforisage, frappage, froissage, encollage).
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 21/72
1.3.2 Des incertitudes sur les risques pour les écosystèmes et la santé
humaine
Bien que nous disposions d?informations sur la contamination des organismes vivants, y compris
humains, par les micro-plastiques, il existe encore peu d?études documentant les impacts sur la
santé des écosystèmes, de la faune et encore moins des humains de cette pollution par les micro-
plastiques ou les nano-plastiques.
La plupart des études sur les risques se sont focalisées sur la biodiversité marine, parvenant à
qualifier la présence de micro-plastiques, voire à la quantifier, et même parfois à analyser un impact.
Des effets toxicologiques variables (sur la physiologie, le métabolisme, le comportement et la
reproduction) sont constatés en laboratoire sur différents organismes vivants tels que les coraux,
les huîtres ou certains types de poissons. Les effets des micro-plastiques sur le phytoplancton ont
été étudiés rapportant une altération de leur capacité à réaliser la photosynthèse.
Des risques ont également été identifiés par des études sur la biodiversité du sol et ses invertébrés
dont la survie et la bonne santé sont impactées. S?agissant des impacts sur les micro-organismes,
la présence de micro-plastiques dans les sols serait de nature à perturber la diversité et
l?abondance des communautés microbiennes avec des effets indirects, par exemple, sur le cycle
de l?azote. Les bactéries fixatrices de l?azote sont susceptibles d?être sensibles aux micro-
plastiques en fonction de leur durée d?exposition.
Il n?existe pas d?études équivalentes sur la santé humaine. Néanmoins, des études ont été
réalisées sur les effets des nanoparticules sur des cellules en culture et in vivo : il a été constaté
une possible altération de la fonction cellulaire sous l?effet de stress oxydatif et une inflammation
avec des conséquences sur certains organes tels que le foie et l?amplification de maladies telles
que l?obésité. Nous rappellerons que la biodégradabilité de la plupart des polymères, même à
l?échelle nano, n?est pas encore démontrée, faisant craindre des effets liés à leur accumulation
dans les organes.
Les principaux risques identifiés sont, au-delà de l?ingestion de polymères, liés à leurs additifs d?une
part, et à la capacité de captation ou d?absorptions par les polymères de produits chimiques
(perturbateurs endocriniens, polluants organiques persistants) ou de métaux d?autre part, ces
derniers pouvant avoir des impacts plus directs sur la biodiversité. Les additifs ont pour la plupart
le potentiel de s?échapper des produits en plastique, car ils ne sont généralement pas reliés par
covalence 40 aux polymères. Ils ont ainsi la possibilité de polluer l?environnement de façon
autonome du polymère qui les abritait préalablement. De nombreux additifs ont été bannis par la
règlementation européenne et nationale de la composition de certains plastiques. On citera à titre
d?exemple les phtalates (plastifiants), dont six d?entre eux, qui ont des effets cancérigènes, toxiques
pour le développement neuronal et jouent un rôle de perturbateurs endocriniens, sont interdits en
Europe, au Japon et aux États-Unis d?Amérique dans les cosmétiques, les équipements médicaux
et les jouets et vêtements pour enfants. Ils restent possiblement utilisés pour les impressions en
relief sur les vêtements. Parmi les autres additifs considérés comme pouvant potentiellement avoir
un impact sur la santé, on citera les alkyphénols, utilisés pour le nettoyage et la teinture41, les
composés perfluorés (PFAS ? cf. le rapport IGEDD 014323-01 de MM. Hugues AYPHASSORO et
Alby SCHMITT42) qui visent à rendre une étoffe anti-taches ou résistante à l?eau et le formaldéhyde
(rend le tissu infroissable). On trouve également dans les étoffes des métaux (chrome, cuivre, et
aluminium dans le polyester ; nickel et fer dans le nylon). Des nanoparticules de métal sont
40 Une liaison covalente est une liaison chimique dans laquelle deux atomes se partagent deux électrons d?une
de leurs couches externes, liant ainsi les atomes. (Wikipédia)
41 Les nonylphénols et nonylphénols éthoxylés sont inscrits à l?Annexe XVII de REACH qui impose qu?ils ne soient
pas mis sur le marché, ni utilisés, en tant que substances ou dans des mélanges, à des concentrations égales ou
supérieures à 0,1% en poids dans le traitement des textiles et du cuir (depuis le 2 février 2021 0,01% pour les
éthoxylates de nonylphénol).
42 https://www.igedd.developpement-durable.gouv.fr/analyse-des-risques-de-presence-de-per-et-a3658.html
PUBLIÉ
https://www.igedd.developpement-durable.gouv.fr/analyse-des-risques-de-presence-de-per-et-a3658.html
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 22/72
également utilisées pour traiter des étoffes pour leur action antimicrobienne (argent) ou leur
capacité d?absorption des ultra-violets (titane).
Le rapport de l?OPESCT de 2020 fait état de la détection de 24 polluants adsorbés aux micro-
plastiques dans le bassin versant de la rade de Brest, 12 d?entre eux faisant partie de la liste des
molécules prioritaires de la directive cadre sur l?eau (atrazine, six hydrocarbures polyaromatiques,
PCB 105, cyperméthrine, PPDDT, aldrine et dieldrine). Des études constatent des effets de
bioamplification, la bioconcentration des phtalates dans le plancton étant 5 000 fois plus importante
que la concentration des phtalates dans l?eau. Enfin, des tests ont révélé la présence d?additifs
dans des vêtements ? par exemple des formaldéhydes ? à des niveaux de concentration 40 fois
supérieurs à ce qui est autorisé par les règlementations internationales sur les textiles et par les
règlementations européennes (Bisphénols BPA et BPS).
Un autre type de risque lié aux micro-plastiques est leur capacité à transporter, y compris sur de
longues distances, des pathogènes (transport de la bactérie E. coli par exemple).
Concernant la santé humaine, force est de constater que les quantités de micro-plastiques
ingérées par l?homme sont actuellement inconnues, comme la manière dont ces particules
interagissent dans le corps et l?impact physique comme chimique du transit des micro-plastiques à
travers le tractus gastro-intestinal. De même, les particules de plastique de 10 ?m peuvent entrer
dans les voies respiratoires, atteindre les poumons et provoquer des irritations comme le font les
autres PM10 et PM2,5 liées à la pollution de l?air actuellement règlementée. Des nanoparticules
pourraient même atteindre le cerveau.
On mentionnera enfin qu?une étude a été réalisée sur les conséquences de l?inhalation des
microparticules plastiques par les ouvriers du secteur du nylon et a constaté des effets sur leurs
capacités respiratoires43.
Les nanoparticules de plastique
En raison de leur taille, les nanoparticules de plastiques sont très difficiles à isoler du reste de leur environnement
par des méthodes simples, notamment la filtration classiquement utilisée pour les micro-plastiques. Leur nombre
dans l?environnement ne fait donc pas l?objet d?une évaluation.
Les examiner nécessite des études réalisées en laboratoire. Mais les analyser dans des échantillons
d?environnement est très difficile. À ce stade, la spéculation sur la base de ce qui est connu de la fragmentation du
plastique est donc la seule solution.
Il est notamment impossible à ce stade de déterminer si des nano-plastiques de taille et de composition différente
s?agrègent ou sédimentent ni comment ils évoluent dans l?environnement.
Le risque lié à ces particules est qu?en raison de leur si petite taille, ils puissent pénétrer dans les tissus des
organismes vivants.
Source : Nature nanotechnology https://www.nature.com/articles/s41565-019-0437-7
Si l?hypothèse de la fragmentation des déchets de plastiques en nano-plastiques était avérée, elle
serait particulièrement préoccupante pour deux raisons. D?une part, le nombre de nano-plastiques
dans l?environnement pourrait être considérable, et bien supérieur à celui des macro-plastiques et
des micro-plastiques. D?autre part, par analogie avec les propriétés de translocation connues pour
d?autres nanoparticules, les nano-plastiques seraient susceptibles de pénétrer dans l?ensemble
des organes en traversant la barrière intestinale lorsqu?elles sont ingérées ou la barrière
pulmonaire lorsqu?elles sont inhalées. Comme suggéré par le rapport de l?OPECST, des
collaborations entre les équipes de recherche, en faisant appel aux spécialistes des nano-
plastiques, sont indispensables et urgentes.
43 Organisation internationale du travail 2022 « Sécurité et santé dans les industries du textile, du vêtement, du cuir
et de la chaussure » https://www.ilo.org/wcmsp5/groups/public/---ed_dialogue/---
sector/documents/normativeinstrument/wcms_828430.pdf
PUBLIÉ
https://www.nature.com/articles/s41565-019-0437-7
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 23/72
1.3.3 Une croissance incontrôlée de la production de textiles synthétiques
En 2020, l?Union Européenne a produit 6,9 Mt de produits textiles pour 77 milliards d?euros et a
importé 8,7 Mt de produits textiles pour 125 milliards d?euros dont 45% de vêtements,
principalement de Chine, du Bangladesh et de Turquie. La consommation en 2020 serait de
6,6 Mt44. En 2019, les européens ont dépensé 600 euros par personne en vêtements, et 70 euros
sur les textiles de maison ce qui représente 25 kg/pers (en incluant également les chaussures)
dont 10 kg pour les vêtements.
Figure 5 : Consommation de vêtements, chaussures et textiles ménagers ? 2010-2020 en Mt et
kg/pers (Source : ETC/CE 2022/2 ? Textiles et l?environnement, le rôle de l?écoconception dans
l?économie circulaire européenne ? Agence européenne de l?environnement)
1.3.3.1 La fabrication des étoffes est majoritairement délocalisée
À l?échelle de l?Union européenne, le secteur textile emploie 1,5 million de personnes dans 160 000
entreprises pour un chiffre d?affaires de 162 milliards d?euros. Néanmoins, en vingt ans, l?industrie
textile a perdu les deux tiers de ses effectifs et plus de la moitié de sa production. De même, la
France importe massivement les produits textiles, dont la moitié provient d?Asie et un tiers
d?Europe45. Selon l?Union française des industries mode et habillement46, le secteur de la mode et
de l?habillement représente à l?échelle nationale 2 500 entreprises, 32 000 salariés en France et
300 000 à l?étranger. 450 entreprises fabriquent sur le territoire national des vêtements. Cette
délocalisation massive de l?industrie s?explique essentiellement par l?écart des coûts de confection
(surtout en raison du coût de la main d?oeuvre).
La délocalisation est parfois presque totale, seule une partie de la conception restant en France.
Les entreprises n?ont parfois plus de relations commerciales directes avec les différents acteurs
intervenant sur le produit, notamment avec les teinturiers.
44 Même si en raison de la crise COVID, la consommation de textile a été très basse en 2020.
45 L?industrie textile en France : une production mondialisée sauf pour les produits de luxe et les textiles techniques
(INSEE Première n° 1714, octobre 2018)
46 Union française des industrie Mode et Habillement (UFIMH) https://www.lamodefrancaise.org/organisation/
PUBLIÉ
https://www.lamodefrancaise.org/organisation/
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 24/72
Figure 6 : Exportation et importation de textile en France ? par produits 2021 (source : UIT47)
En 2018, les Français ont dépensé 35,7 milliards d?euros pour l?habillement et les chaussures, ce
qui les place au quatrième rang des plus gros dépensiers en Europe, derrière le Royaume-Uni,
l?Allemagne et l?Italie48. En 2022, en moyenne chaque Français a acheté 40 pièces d?habillement
et 5 pièces de linge de maison. Au total, 3,3 milliards de pièces (vêtements, linges de maison et
chaussures) représentant 827 000 tonnes, ont été mises sur le marché cette même année, en
croissance de 2% par rapport à l?année 202149.
Figure 7 : Exportation et importation de textile en France ? par pays 2021 (source : UIT)
1.3.3.1 Les fibres synthétiques envahissent de plus en plus les étoffes et stimulent la
baisse des prix et la surconsommation
Un autre phénomène marquant de ces dernières années est l?augmentation considérable de la
part des fibres synthétiques dans les produits mis sur le marché. Les deux courbes et schéma ci-
dessous en rendent compte.
47 L?Union des industries textiles (UIT) représente 2 200 entreprises exerçant une activité textile sur le territoire
national (filature, moulinage, tissage, tricotage, ennoblissement). https://www.textile.fr/
48 Le Royaume-Uni a dépensé 65,4 milliards d?euros, l?Allemagne 62,7 milliards d?euros et l?Italie 52,4 milliards
d?euros. Source: Dépenses de consommation des ménages en habillement dans l'Union européenne en 2018, par
pays, Statista 2022
49 Refashion Rapport d?activité 2022
PUBLIÉ
https://www.textile.fr/
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 25/72
Figure 8 : Évolution de la production mondiale de laine, coton, lin et fibres synthétiques
(source : UIT)
Cette évolution explique aussi, en partie, la baisse des prix des produits et l?augmentation de la
consommation de produits textiles. En 1950, la part des vêtements dans le budget d?un ménage
représentait 30% alors qu?elle n?atteignait plus que 5% en 2000 malgré l?augmentation du nombre
de pièces achetées. En France, les dépenses des ménages en vêtements et chaussures en 2020
étaient de 3,1% du total des dépenses50 soit environ 430 euros en vêtements, montant qui est
inférieur à la moyenne au sein de l?UE-27 (490 euros)51 et en baisse par rapport à 2018 (530 euros
par an en vêtements). Une étude Kantar commandée par Refashion confirme que le prix est le
premier critère de choix des consommateurs en 202252.
Dernière tendance à souligner, la baisse de la valeur monétaire des vêtements entraine leur durée
de vie de plus en plus courte. La « mode éphémère » (« fast fashion »), qui devient de plus en plus
éphémère (« l?extra fast fashion »), cherche à réduire encore plus les prix des produits (au
détriment des critères sociaux, environnementaux ou de qualité) pour accélérer la rotation des
collections et faire pression sur l?acte d?achat. Certaines enseignes proposent de nouveaux
produits tous les quinze jours, parfois même moins. Cette frénésie d?achat est décuplée par les
réseaux sociaux. 130 milliards de vêtements sont produits par an dans le monde soit 80% de plus
qu?il y a 15 ans53.
50 Source: Agrandissement du ménage, France, 2020, Vêtements et Chaussures (total des dépenses en %),
Eurostat
51 Extrait des Faits et Chiffres Clés 2022 du rapport European Textile and Clothing Industry d'Euratex, Juin 2022.
Source: Eurostat
52 Selon cette étude, parmi les 10 enseignes plébiscitées pour les achats neufs (Actions, Kiabi, Lidl, Shein?) 70%
proposent un prix moyen d?achat par article inférieur de 205 à 85% du prix moyen du marché.
53 Fast Fashion : Impacts, alternatives et moyens d?agir, Oxfam France https://www.oxfamfrance.org/wp-
content/uploads/2022/03/Fast-Fashion-Impacts-alternatives-et-moyens-dagir.pdf
PUBLIÉ
https://www.oxfamfrance.org/wp-content/uploads/2022/03/Fast-Fashion-Impacts-alternatives-et-moyens-dagir.pdf
https://www.oxfamfrance.org/wp-content/uploads/2022/03/Fast-Fashion-Impacts-alternatives-et-moyens-dagir.pdf
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 26/72
Figure 9 : Hausse du marché textile vs population mondiale de 1970 à aujourd?hui (source :
« The environmental price of Fast fashion » 2020)
La durée de vie des vêtements aurait diminué de 36% entre 2000 et 2015. D?après différentes
études menées à des dates différentes et dans plusieurs pays, l?usure des produits textiles, linges
de maison et chaussures (TLC) ne serait responsable que d?un tiers de leur fin de vie, les deux
autres tiers provenant soit de leur inadaptation aux utilisateurs (changement de taille par exemple),
soit du sentiment de lassitude qu?ils génèrent chez ces derniers.
Figure 10 : Causes de fin de vie d?un vêtement (Source : Travaux Ecobalyse)54
*****
En conclusion de cette première partie, compte tenu des prévisions de croissance de la production
de fibres plastiques textiles dans les prochaines décennies, du faisceau d?indices démontrant les
dangers d?une pollution incontrôlée par les micro-plastiques et de leur persistance dans
l?environnement, la plupart des études consultées par la mission appellent à faire jouer les
principes de précaution et de prévention, et à prendre dès maintenant des mesures
adaptées pour lutter contre les micro-plastiques issus des textiles, quand bien même l?état
54 Projet porté par le Ministère de la Transition écologique
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 27/72
de la recherche manque encore de données sur les quantités de micro-plastiques re-
larguées dans l?environnement, leur biodégradabilité, et leur nocivité.
On citera en particulier l?avis des conseillers scientifiques en chef de la Commission européenne55
formulé le 30 avril 2019 : « Bien qu?une incertitude considérable entoure les risques écologiques
et sanitaires de la pollution micro-plastique, des risques augmenteront à l?avenir si la pollution
micro-plastique se poursuit à son rythme actuel. » Il recommande donc d?« élargir la politique
existante pour prévenir et réduire la pollution par les micro-plastiques dans les environnements
marins et d?eau douce, ainsi que dans l?air et le sol, et donner la priorité aux mesures spécifiques,
aux substances et au contexte pour les sources à volume élevé et à fortes émissions. » De même,
l?Organisation mondiale de la santé, appelle à mener une « évaluation approfondie des micro-
plastiques présents dans l?environnement et de leurs conséquences potentielles sur la santé
humaine, suite à la publication d?une analyse de l?état de la recherche sur les micro-plastiques
dans l?eau de boisson »56.
55 Le groupe des conseillers scientifiques en chef, créé en octobre 2015, soutient la commission européenne avec
des avis scientifiques indépendants dans le cadre de ses activités d?élaboration des politiques de l?Union
européenne. Le groupe contient jusqu?à 7 scientifiques indépendants, nommés à titre personnel.
56 https://www.who.int/fr/news/item/22-08-2019-who-calls-for-more-research-into-microplastics-and-a-
crackdown-on-plastic-pollution
PUBLIÉ
https://www.who.int/fr/news/item/22-08-2019-who-calls-for-more-research-into-microplastics-and-a-crackdown-on-plastic-pollution
https://www.who.int/fr/news/item/22-08-2019-who-calls-for-more-research-into-microplastics-and-a-crackdown-on-plastic-pollution
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 28/72
2 La réponse actuelle à la pollution par les micro-
plastiques issus du textile demeure très incomplète
2.1 Les émissions de micro-plastiques textiles sont peu prises en
compte dans la règlementation européenne
L?Union européenne a mis en place une règlementation conséquente pour lutter contre la pollution
par le plastique et limiter les risques pour l?environnement et la santé qu?elle est susceptible
d?entrainer, principalement à travers le paquet57 économie circulaire58, qui contient une stratégie
sur les matières plastiques59 et une stratégie textile60 , et le règlement REACH, qui règlemente
l?usage des produits chimiques. Elle défend également à l?échelle internationale l?adoption d?un
traité sur le plastique et limite les exportations de déchets, notamment plastiques, vers les pays
tiers.
Néanmoins, les micro-plastiques apparaissaient jusqu?à présent comme le parent pauvre de ce
très riche cadre règlementaire européen, le pacte vert pour l?Europe annonçant des objectifs de
réduction des émissions de micro-plastiques et non des mesures concrètes :
le nouveau plan d?action pour une économie circulaire et la stratégie de l?UE sur les
matières plastiques prévoient la prise de mesures visant à lutter contre la pollution due aux
micro-plastiques qui sont ajoutés intentionnellement à des produits (aux cosmétiques,
détergents, peintures, par exemple) et à ceux qui sont rejetés de manière non intentionnelle
dans l?environnement (par les pneumatiques et les textiles synthétiques, par exemple),
mais n?ont pas encore été traduites dans les faits ;
le plan d?action de l?UE intitulé « Vers une pollution zéro dans l?air, l?eau et les sols »61 fixe
l?objectif de réduction d?ici 2030 dans l?UE des déchets plastiques en mer de 50% et des
micro-plastiques de 30%.
2.1.1 Une règlementation de l?économie circulaire qui s?oriente enfin vers
la réduction de la pollution micro-plastique
2.1.1.1 Un paquet économie circulaire focalisé sur la recyclabilité du plastique
Le paquet économie circulaire s?est initialement focalisé sur la gestion des déchets, puis sur le
réemploi et le recyclage, et enfin sur la sobriété mais seulement du plastique à usage unique. La
stratégie de l?Union européenne pour des textiles durables et circulaires énonce le problème posé
par les micro-plastiques d?origine textile, mais renvoie à des décisions ultérieures.
Sur demande de la Commission européenne, l?ECHA a préparé un dossier justifiant la restriction
57 Paquet : train de mesures
58 « Communication ? Un nouveau plan d?action pour une économie circulaire, pour une Europe plus propre et
plus compétitive » 11/03/2020 https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:9903b325-6388-11ea-b735-
01aa75ed71a1.0017.02/DOC_1&format=PDF
et son annexe https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:9903b325-6388-11ea-b735-
01aa75ed71a1.0017.02/DOC_2&format=PDF
59 « Communication ? Une stratégie européenne sur les matières plastiques dans une économie circulaire »
16/01/2018 https://eur-lex.europa.eu/legal-
content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:52018DC0028&from=SK#:~:text=En%202030%2C%20tous%20les%20emba
llages,pour%20toutes%20les%20grandes%20applications.
60 Stratégie de l?Union européenne pour des textiles durables et circulaires du 30/03/2022 https://eur-
lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:9d2e47d1-b0f3-11ec-83e1-01aa75ed71a1.0001.02/DOC_1&format=PDF
61 Plan d?action « Vers une pollution zéro dans l?air, l?eau et le sol »
PUBLIÉ
https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:9903b325-6388-11ea-b735-01aa75ed71a1.0017.02/DOC_1&format=PDF
https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:9903b325-6388-11ea-b735-01aa75ed71a1.0017.02/DOC_1&format=PDF
https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:9903b325-6388-11ea-b735-01aa75ed71a1.0017.02/DOC_2&format=PDF
https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:9903b325-6388-11ea-b735-01aa75ed71a1.0017.02/DOC_2&format=PDF
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:52018DC0028&from=SK%23:~:text=En%202030%2C%20tous%20les%20emballages,pour%20toutes%20les%20grandes%20applications.
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:52018DC0028&from=SK%23:~:text=En%202030%2C%20tous%20les%20emballages,pour%20toutes%20les%20grandes%20applications.
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:52018DC0028&from=SK%23:~:text=En%202030%2C%20tous%20les%20emballages,pour%20toutes%20les%20grandes%20applications.
https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:9d2e47d1-b0f3-11ec-83e1-01aa75ed71a1.0001.02/DOC_1&format=PDF
https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:9d2e47d1-b0f3-11ec-83e1-01aa75ed71a1.0001.02/DOC_1&format=PDF
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 29/72
d?usage des micro-plastiques ajoutés intentionnellement à certains produits. Ce dossier ne traite
pas des micro-plastiques issus des textiles. L?ECHA a néanmoins, dans ce cadre, produit une
définition des micro-plastiques - de petites particules solides composées de polymères
synthétiques d?une taille inférieure à 5 mm - définition qui recoupe celles évoquées précédemment
au point 1.1.
Le paquet économie circulaire prévoyant l?examen des différentes options politiques pour la
réduction des micro-plastiques, une « initiative » a été lancée en novembre 2021 visant à améliorer
la connaissance sur les risques et la présence de micro-plastiques dans l?environnement et à
permettre la définition de « mesures visant à réduire la présence dans l?environnement de micro-
plastiques libérés non intentionnellement à partir des pneumatiques, des textiles et des
granulés plastiques ». Pour les décisions concernant les micro-plastiques ajoutés
intentionnellement et les granulés industriels, la prise de décision se fera sur la base de l?avis de
l?ECHA. L?initiative cherche également à « élaborer des mesures en matière d?étiquetage, de
normalisation, de certification et de réglementation relatives à la libération non intentionnelle de
micro-plastiques, en particulier pour accroître la capture des micro-plastiques à tous les stades du
cycle de vie des produits ». Enfin, elle veut développer et harmoniser davantage les méthodes de
mesure des micro-plastiques libérés non intentionnellement, en particulier par les pneumatiques et
les textiles, pour pouvoir fournir des données harmonisées sur les concentrations de micro-
plastiques. La Commission constate que les approches volontaires ont atteint leurs limites : en
raison de la complexité des rejets et des chaines de valeur, elles ne parviennent pas à fixer
d?objectifs de réduction.
Pour les textiles synthétiques, différentes options sont examinées dans le cadre de cette initiative :
? mettre en oeuvre des exigences en matière d?écoconception, notamment promouvoir l?uti-
lisation de nouveaux matériaux tels que les fils biodégradables ;
? améliorer les procédés de fabrication, dont la possibilité de prélaver les vêtements avant
leur mise sur le marché ;
? établir des règles pour éviter que les produits ne deviennent des déchets, en instaurant
notamment des systèmes de reprise ;
? favoriser le contenu recyclé ou le remanufacturage ;
? appliquer des filtres ou d?autres solutions techniques aux lave-linges, lave-linges séchants
et sèche-linges ;
? séparer les micro-plastiques des boues dans les stations d?épuration ;
? fixer des exigences minimales en matière de durabilité et/ou d?information, et étiqueter les
produits en fonction de leur niveau d?émission de micro-plastiques ;
? stimuler les démarches volontaires des entreprises.
Une communication était attendue à l?issue de cette initiative, initialement avant la négociation
internationale de mai 2023 sur le traité sur les plastiques. Elle a été reportée à juillet 2023 et n?est
pas encore parue à l?heure de l?écriture de ce rapport.
2.1.1.2 L?écoconception pour répondre aux enjeux climatiques plus qu?à la pollution
Autre champ du paquet économie circulaire, les règles européennes en matière d?écoconception
des produits étaient jusqu?à présent orientées sur les produits consommateurs d?énergie62 dans
une démarche de réduction de l?empreinte carbone de l?Union européenne. La directive
écoconception s?accompagne néanmoins d?un règlement d?application sur l?écoconception des
machines à laver le linge63, qui ne traite pas de la question des micro-plastiques, mais encourage
62 Directive 2009/125/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant un cadre pour la
fixation d?exigences en matière d?écoconception applicables aux produits liés à l?énergie
63 Règlement UE 2919/2023 du 1er octobre 2019 établissant des exigences en matière d?écoconception
applicables aux lave-linges ménagers et aux lave-linges séchant ménagers conformément à la directive
2009/125/CE modifiant le règlement CE 1275/2008
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 30/72
à le faire lors de la révision du règlement en 2025, dans son article 8 point f « Réexamen » : « La
Commission réexamine le présent règlement à la lumière du progrès technologique et présente au
forum consultatif les résultats de ce réexamen, accompagnés le cas échéant d?un projet de
proposition de révision, le 25 décembre 2025. Le réexamen porte notamment sur les éléments
suivants : la faisabilité et l?opportunité de nouvelles exigences en vue de réduire les micro-
plastiques présents dans les eaux évacuées, telles que des filtres ». Un processus de révision de
la règlementation relative à l?écoconception est en cours d?adoption (voir 2.4.3).
Par ailleurs, la Commission européenne a rendu publique une recommandation 2021/2279 du 15
décembre 2021 relative à l?utilisation de méthodes d?empreinte environnementale pour mesurer et
indiquer la performance environnementale des produits (PEFCR64) et des organisations (OEFSR)
sur l?ensemble du cycle de vie puis par le projet de directive de mars 2023 modifiant les directives
2005/29/CE et 2011/83/UE pour donner aux consommateurs les moyens d?agir en faveur de la
transition écologique grâce à une meilleure protection contre les pratiques déloyales et de
meilleures informations. On mentionnera également l?encouragement de la Commission
européenne à prendre en compte, dans l?affichage environnemental, la question sur les émissions
de micro-plastiques. Ainsi le projet de directive sur la justification et la communication des
allégations environnementales, en cours d?examen par le Parlement européen et le Conseil,
mentionnent le secteur textile comme pouvant faire partie des secteurs disposant de règles de
catégorisation de leur empreinte environnementale et les émissions de micro-plastiques comme
pouvant être un des facteurs pris en compte.
2.1.1.3 Une définition de la biodégradabilité qui tient imparfaitement compte de la
capacité du plastique à se diviser en microparticules
La règlementation européenne définit la biodégradabilité des plastiques (European standard EN
17033:2018). Néanmoins cette définition a été fortement critiquée comme n?ayant pas pris en
compte les dernières étapes de dégradation des polymères et comme conduisant notamment à
considérer comme compostables65 des plastiques dont l?échelle de dégradation ne respectait pas
les critères de la biodégradabilité telle que définie précédemment dans le présent rapport (voir
1.2.3).
Dans une communication du 30 novembre 202266 , la Commission manifeste qu?elle a pris en
compte ces critiques puisqu?elle indique que les plastiques biodégradables selon cette norme
doivent être utilisés seulement lorsqu?il n?existe pas de solution alternative et qu?ils doivent faire
l?objet de nouvelles séries de tests et de certifications. En outre, elle ajoute que des risques sont
également associés aux additifs utilisés dans de tels produits si ces additifs ne sont pas eux-
mêmes biodégradables. Elle souhaite également que la mention de biodégradabilité de ces
produits plastiques soit accompagnée d?informations sur les conditions et la temporalité de la
biodégradation des produits.
64 Product Environnemental Footprint Category Rule. Méthode européenne qui repose sur une approche
multicritères et basée sur l?ensemble du cycle de vie des produits rt qui permet d?harmoniser le calcul de leur
empreinte environnementale.
65 Est considéré comme compostable un produit biodégradable en conformité avec les normes NF EN
13432 :2000 (compostage industriel) et NF T 51-800 :2015 (compostage domestique). Selon l?ANSES : Les
matières plastiques « compostables » sont des matières plastiques biodégradables qui se dégradent dans des
conditions spécifiques (température, hygrométrie) de compostage, qu?il soit industriel ou domestique. Selon les
normes actuelles, ces matières doivent se dégrader à plus de 90 %, dans un délai maximum de 6 ou 12 mois selon
qu?il s?agit de compostage en conditions industrielles ou domestiques. https://www.anses.fr/fr/proscrire-matieres-
plastiques-biodegradables-compost
66 https://environment.ec.europa.eu/system/files/2022-12/COM_2022_682_1_EN_ACT_part1_v4.pdf
PUBLIÉ
https://www.anses.fr/fr/proscrire-matieres-plastiques-biodegradables-compost
https://www.anses.fr/fr/proscrire-matieres-plastiques-biodegradables-compost
https://environment.ec.europa.eu/system/files/2022-12/COM_2022_682_1_EN_ACT_part1_v4.pdf
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 31/72
2.1.2 Une règlementation des produits chimiques qui n?intègre pas les
micro-plastiques
Les micro-plastiques en général ne rentrent pas dans les classifications en lien avec REACH : ils
ne sont pas, en particulier, classés SVHC67 en tant que tels et les polymères sont exemptés des
démarches d?enregistrement et d?évaluation propres au règlement REACH.
On mettra néanmoins en avant les évolutions récentes dans différents textes européens sur
l?interdiction et la limitation de certains produits chimiques susceptibles d?être intégrés comme
additifs dans des polymères utilisés dans la fabrication de fibres textiles. Ainsi, le règlement POP
(polluants organiques persistants)68 a été modifié le 28 octobre 2021 pour notamment interdire
deux produits pouvant figurer dans les textiles : l?acide perfluorooctanoic (PFOA) (textiles
imperméables) et le pentachlorophénol.
2.1.3 Une règlementation sur la pollution de l?eau et de l?air qui n?intégrait
pas les micro-plastiques
Les règlementations européennes relatives à la qualité de l?eau et de l?air ne traitaient pas la
question des micro-plastiques. La DCSMM 69 définit certes les micro-plastiques comme des
déchets contre lesquels il faut lutter. Mais la DCE70 n?évoque pas les micro-plastiques dans la
qualité de l?eau. La règlementation européenne relative à l?assainissement des eaux usées
(Directive ERU71 et règlement sur la nature des boues d?épuration72) n?évoque pas non plus le
problème posé par les micro-plastiques présents dans le processus d?assainissement et dans les
boues.
Néanmoins, la nouvelle directive relative à la qualité des eaux destinées à la consommation
humaine adoptée le 16 décembre 202073 prévoit la création d?une « liste de vigilance » recensant
les pollutions émergentes parmi lesquelles figurent les micro-plastiques. Elle charge la
Commission européenne d?adopter « au plus tard le 12 janvier 2024, [?] des actes délégués [?]
afin de compléter la présente directive en adoptant une méthode de mesure des micro-plastiques
afin de les faire figurer sur la liste de vigilance ». La Commission devra par ailleurs présenter d?ici
le 12 janvier 2029, un rapport sur le danger potentiel que représentent, pour les sources d?eau
potable, les micro-plastiques.
Une évaluation du règlement sur les boues d?épuration a été lancée en parallèle, avec consultation
du public en 2020 et publication en mai 202374. Même si elle constate qu?environ 1% du poids des
67 Substance extrêmement préoccupantes qui doivent être contrôlées et substituées par d?autres substances dont
les propriétés ne sont pas préoccupantes et sont soumises à autorisation
68 Règlement UE 2019/1021
69 Directive 2008/56/EC du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008 établissant un cadre pour une
politique communautaire dans le domaine de la politique pour le milieu marin (directive-cadre « stratégie pour le
milieu marin »)
70 Directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une
politique communautaire dans le domaine de l'eau
71 Directive eaux résiduaires urbaines 91/271/EEC du 21 mai 1991 https://aida.ineris.fr/node/25697/printable/pdf
72 Règlement du 21 juin 1986 sur la protection de l?environnement, et en particulier du sol, quand les boues
d?épuration sont utilisées en agriculture, modifiée en 1991, 2003, 2009, et 2019.
73 https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32020L2184
74 https://ec.europa.eu/info/law/better-regulation/have-your-say/initiatives/12328-Utilisation-des-boues-
depuration-dans-lagriculture-Evaluation_fr
PUBLIÉ
https://aida.ineris.fr/node/25697/printable/pdf
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32020L2184
https://ec.europa.eu/info/law/better-regulation/have-your-say/initiatives/12328-Utilisation-des-boues-depuration-dans-lagriculture-Evaluation_fr
https://ec.europa.eu/info/law/better-regulation/have-your-say/initiatives/12328-Utilisation-des-boues-depuration-dans-lagriculture-Evaluation_fr
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 32/72
boues d?épuration est constituée de micro-plastiques 75 , cette évaluation conclut que cette
contamination ne peut être quantifiée à ce stade et renvoie la prise de décision à une meilleure
articulation avec la révision de la directive DERU qui est en cours76.
Concernant la pollution de l?air, les micro-plastiques sont totalement absents des normes
européennes77, même des actes en cours de révision. La règlementation des particules fines (PM10
et PM2,5) ne définit pas leur composition chimique et fait seulement référence à leur taille (particules
allant jusqu?à 10 microns ou 2,5 microns dans leur plus grande dimension). Les nano-plastiques
pourraient donc être intégrés dans cette catégorie. Néanmoins les microfibres semblent échapper
à ce cadre, d?une part, en raison de leurs dimensions, et d?autre part, parce qu?elles seraient surtout
présentes dans l?air ambiant intérieur, qui ne fait pas l?objet de textes européens actuellement.
2.1.4 Une règlementation sur l?exportation des déchets ne permettant pas
leur contrôle
Enfin, les déchets textiles ne font pas partie des produits exclus d?exportation78 et le contrôle
insuffisant des conditions dans lesquelles ils sont gérés dans les pays de destination, en particulier
dans les pays en développement, représente une lacune majeure de la règlementation actuelle.
En conséquence, l'exportation de certains déchets depuis l'UE a créé des problèmes
environnementaux et de santé publique dans les pays de destination. Le texte est lui aussi en cours
de révision afin de renforcer notamment l?autorisation d?accès aux pays tiers des exportations
susceptibles de causer des dommages environnementaux dans le pays importateur.
2.2 Les mesures adoptées en France sont insuffisantes
2.2.1 Une règlementation française centrée sur la REP et le recyclage qui
ne règle pas la pollution par les micro-plastiques textiles
Pour améliorer l?empreinte environnementale des textiles, les pouvoirs publics français ont adopté
des dispositions qui encouragent le recyclage79 et l?incorporation de matières recyclées dans les
étoffes mises sur le marché. Avant de les présenter, il convient de restituer le contexte de la
responsabilité élargie des producteurs, qui concerne également le secteur des textiles, linges de
maison et chaussures (TLC).
2.2.1.1 Le principe de la responsabilité élargie des producteurs et son application au
secteur du textile
La responsabilité élargie du producteur (REP) est une déclinaison à la fois du principe « pollueur-
payeur » posé par l?article 4 de la Charte de l?environnement mais aussi, depuis la loi AGEC, du
75 ?Microplastics removal from a primary settler tank in a wastewater treatment plant and estimations of
contamination onto European agricultural land via sewage sludge recycling, Environmental Pollution, Volume 304,
2022 https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0269749122004122
76 Au moment de l?écriture de ce rapport, la révision de la DERU est en cours d?examen par le conseil et le
Parlement européen. La poursuite de l?examen des textes est inscrite à l?agenda du 2nd semestre 2023.
77 https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:2ae4a0cc-55f8-11ed-92ed-
01aa75ed71a1.0001.02/DOC_3&format=PDF
78 Règlement sur l?exportation de déchets amendant les règlement 1257/2013 et 2020/1056 du 17/11/2021. Les
produits textiles sont listés B3030 et ne sont pas couvert par l?interdiction d?exportation, n?étant pas couverts par la
convention de Bâle.
79 L?article L. 541-1-1 du code de l?environnement définit ainsi le recyclage : « toute opération de valorisation par
laquelle les déchets, y compris les déchets organiques, sont retraités en substances, matières ou produits aux fins
de leur fonction initiale ou à d'autres fins. »
PUBLIÉ
https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0269749122004122
https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:2ae4a0cc-55f8-11ed-92ed-01aa75ed71a1.0001.02/DOC_3&format=PDF
https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:2ae4a0cc-55f8-11ed-92ed-01aa75ed71a1.0001.02/DOC_3&format=PDF
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 33/72
principe de prévention qui résulte de l?article 3 de la même Charte. Ce dispositif, initié en France
en 1992 pour les déchets ménagers et conforté au niveau de l?Union européenne par la directive
cadre sur les déchets de 2008 80 , prévoit en effet désormais que les acteurs économiques
(fabricants, distributeurs, importateurs, exportateurs) sont responsables de l?ensemble du cycle de
vie des produits qu?ils mettent sur le marché, de leur écoconception jusqu?à la fin de leur vie.
En pratique, dans chaque filière pour laquelle un mécanisme de REP a été instauré, ces acteurs
doivent assumer la charge financière de la collecte sélective puis du recyclage ou du traitement
des déchets issus de leur production. Ils peuvent le faire de façon individuelle ou collective dans le
cadre d'un éco-organisme. Dans ce dernier cas, ils adhèrent à une société agréée par les pouvoirs
publics à laquelle ils versent une contribution financière.
La loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et l?économie circulaire
dite « loi AGEC » a ajouté aux obligations préexistantes, celles d?adopter une démarche
d'écoconception des produits, de favoriser l'allongement de la durée de vie des produits, de
soutenir les réseaux de réemploi, de réutilisation et de réparation, de contribuer à des projets d'aide
au développement en matière de collecte et de traitement de leurs déchets et de développer le
recyclage des déchets issus des produits.
S?agissant du champ d?application du dispositif, la loi AGEC a étendu la REP en vigueur depuis
2008 pour les textiles d?habillement, des chaussures et le linge de maison (TLC), aux produits
textiles neufs pour la maison81.
La mission s?est demandée pourquoi les vêtements professionnels ou du moins certains d?entre
eux n?étaient pas soumis à la filière REP d?autant qu?ils incorporaient bien souvent des plastiques.
À la suite de réflexions engagées en 2014, le choix a été fait de susciter des projets volontaires de
la part des entreprises ou des administrations. La structuration d?une filière de réemploi / recyclage
industrielle des vêtements professionnels (projet "FRIVEP") a été l?un des quatre premiers
engagements pour la croissance verte, signé le 27 avril 2016. Cette démarche a notamment
débouché sur la rédaction d?un livret d?écoconception des vêtements professionnels en 202082.
L?éco-organisme qui assure les obligations des producteurs de déchets textiles s?ils le souhaitent
est Refashion (ex Eco TLC), agréé depuis 2019 et dont l?agrément a été renouvelé par arrêté du
23 décembre 2022. Un nouveau cahier des charges lui a été fixé par arrêté du 23 novembre 202383
quant à ses objectifs en matière de collecte et de valorisation des textiles usagés.
2.2.1.2 Une politique de recyclage qui ne répond pas à la pollution par les micro-
plastiques
Au sens de la loi française, le recyclage ne se traduit pas nécessairement par la fabrication du
produit pour le même usage. On distingue à cet égard, le recyclage en boucle fermée (même usage)
80 2008/98/CE du 19 novembre 2008
81 Art. L. 541-10-1 du code de l?environnement
82 « Livret d?écoconception des vêtements professionnels ; retours d?expériences du projet FRIVEP » réalisé par
OREE en juin 2020
83 Nouveaux objectifs :
? Taux de collecte des TLC usagés : 60% en 2028,
? TLC usagés triés devant être réemployés ou réutilisés : 120 000 tonnes en 2024,
? Taux de réutilisation / réemploi à moins de 1 500 km du lieu de collecte : 15% en 2027,
? Taux de recyclage des TLC usagés non réutilisées : 70% en 2024, 80% en 2027,
? Taux de recyclage des TLC usagés intégrant au moins 90% de matières synthétiques plastiques non
réutilisées : 50% en 2025, 90% en 2027,
? Au plus 0,5 % des TLC collectés ou soutenus sont éliminés (stockage, incinération sans valorisation éner-
gétique).
Source : site du ministère de la transition écologique
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 34/72
du recyclage en boucle ouverte (destination différente à la suite d?altération des propriétés du
plastique). D?ailleurs l?article R. 541-221 du code de l?environnement définit la recyclabilité comme
la capacité de recyclage effective des déchets issus de produits identiques ou similaires. Si la
matière recyclée issue du recyclage représente plus de 95% du déchet collecté, le produit peut
porter la mention « produit entièrement recyclable ». En tout cas, cette part doit être supérieure ou
égale à 50% de la masse du déchet collecté. Si l?usage et la destination du produit recyclé sont
identiques et sans perte fonctionnelle, l?information peut indiquer « produit recyclable en un produit
de même nature ».
Des sommes considérables sont investies dans la politique de recyclage du textile, notamment
dans la recherche appliquée. Cette politique est à vrai dire en ligne avec les objectifs de l?UE en
matière de recyclage des plastiques.
Techniques de recyclage des plastiques
On distingue le recyclage mécanique et le recyclage chimique.
Le recyclage mécanique conduit à broyer, laver, retrier, extruder puis transformer en granulés des polymères
homogènes sans que soit modifiée leur structure.
Le recyclage chimique englobe toute technologie de retraitement utilisant des agents ou des procédés chimiques
qui affectent directement le plastique ou le polymère lui-même. Trois grandes familles de technologie existent : la
purification à l?aide de solvants, la dépolymérisation, la dépolymérisation thermique
L?OPESCT considère que « la filière mondiale du recyclage chimique est toujours en phase de test ». La France
compterait 13 projets de recyclage chimique.
Source : note n°39 de l?Office parlementaire d?évaluation des choix scientifiques et techniques (OPECST) « Le
recyclage des plastiques » juin 2023
Les autorités françaises ont mis en place des mesures incitatives pour encourager le recyclage.
a) des objectifs particulièrement ambitieux sont assignés à Refashion qui peut les traduire via des
éco-modulations.
Ces objectifs de recyclage de plus de 50% des TLC usagés sont à comparer aux 32% du taux de
recyclage constaté en 2021. En trois ans, ce taux doit plus que doubler, surtout lorsque les produits
d?origine intègrent beaucoup de plastiques. Pour l?atteindre, l?éco-organisme Refashion va devoir
inciter les producteurs, importateurs et distributeurs par tous les outils mis à sa disposition et
notamment les éco-modulations.
Les éco-modulations
L?article L. 541-10-3 du code de l?environnement permet des modulations des contributions financières des
producteurs, sous forme de primes ou de pénalités, au regard des meilleures techniques disponibles en fonction
de critères de performance environnementale (notamment la quantité de matière utilisée, l?incorporation de matière
recyclée, l?emploi de ressources renouvelables gérées durablement, la durabilité, la réparabilité, les possibilités de
réemploi ou de réutilisation, la recyclabilité, l?absence d?écotoxicité).
Les éco-modulations sont soumises pour avis au comité des parties prenantes84, prévu par l?article L. 541-10 du
code de l?environnement, puis sont arrêtées par le ministre chargé de l?environnement après avis de la commission
interfilière. L?éco-modulation ne doit pas dépasser 20% du montant du prix de vente du produit.
Le cahier des charges prévoit des éco-modulations positives ou négatives en fonction du respect de l?affichage
environnemental quand il sera en vigueur et de la recyclabilité des TLC après production d?une étude.
84 Selon l?article L. 541-10, chaque éco-organisme crée un comité des parties prenantes, composé notamment de
producteurs, de représentants de collectivités territoriales, d?associations de protection de l?environnement agréées,
d?association de protection des consommateurs ainsi que d?opérateurs de la prévention et de la gestion des déchets,
dont ceux de l?économie sociale et solidaire
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 35/72
Mais, actuellement, seules des éco-modulations positives sont versées sous forme de primes aux producteurs de
déchets en fonction de la durabilité des TLC, des certifications par des labels environnementaux (huit sont
sélectionnées par l?arrêté85 mais l?éco-organisme peut en proposer d?autres après avis du comité des parties
prenantes) et de la quantité de matières recyclées dans les produits.
b) des obligations d?étiquetage :
L?article L. 541-9-1 du code de l?environnement et son décret d?application86 prévoient, selon un
calendrier échelonné en fonction de la taille des entreprises et de leurs ventes87, que les textiles
d?habillement et linge de maison neufs comportant des matières recyclées devront mentionner
cette composition (R. 541-221- III) et qu?ils devront également indiquer leur recyclabilité (R. 541-
221-VI) en signalant s?ils sont majoritairement ou entièrement recyclables (recyclables à plus de
95%) ou encore « recyclable en un produit de même nature » ; cette obligation ne pèse que si cinq
critères88 qui définissent la recyclabilité sont tous remplis.
Sur ce dernier point, Refashion a fait savoir à ses adhérents qu?il considérait qu?aucun d?entre eux
n?était à ce jour soumis à l?obligation d?informer les consommateurs car les cinq critères
précédemment évoqués n?étaient pas tous réunis. En effet, cet éco-organisme considère que la
filière REP TLC est tournée depuis son origine vers la réutilisation des produits, en application de
la hiérarchie des modes de traitement des déchets inscrite à l?article L. 541-1 du code de
l?environnement et qu?ainsi elle ne dispose pas des capacités de recyclage suffisantes pour
répondre au 5ème critère. En 2021, le taux de réutilisation des déchets TLC atteignait 58% et
le recyclage 32%. Refashion s?engage en revanche à réévaluer régulièrement la recyclabilité
des produits TLC en fonction de l?évolution de la filière à plus et mieux recycler.
c) Les plans de prévention et d?écoconception :
L?article L. 541-10-12 du code de l?environnement, auquel sont soumis tous les producteurs de
déchets, leur impose d?établir tous les cinq ans un plan de prévention et d?écoconception. Qu?ils
soient individuels ou communs à plusieurs entreprises, ils doivent nécessairement comporter des
chapitres expliquant comment ils comptent réduire l?usage des ressources non renouvelables,
accroitre l?utilisation de matières recyclées et la recyclabilité des produits. Dans le secteur des TLC,
ils devaient être transmis à Refashion (même si l?entreprise n?est pas adhérente) avant le 31 juillet
2023 qui doit en faire une synthèse à la fin de l?année. L?éco-organisme met en ligne des outils
pour aider les entreprises à remplir cette nouvelle obligation (guide de rédaction, trame vierge et
pré-remplie avec des exemples d?indicateurs et d?objectifs).
En premier lieu, la mission souligne là encore la priorité accordée au recyclage. Par ailleurs,
l?objectif de réduction des ressources non renouvelables n?est pas détaillé.
85 Ecocert textile, Oeko-tex, Made in Green, Bluesign, Fairtrade, Ecolabel Européen, Demeter, GOTS et Bioré
86 Décret n° 2022-748 du 29 avril 2022 qui a créé les articles R. 541-220 à 223 du code de l?environnement
87 À compter du 1er janvier 2023 pour les entreprises dont le chiffre d?affaires dépasse 50 M ¤ et qui mettent
chaque année plus de 25 000 unités, du 1er janvier 2024 pour celles pour lesquelles ces données sont supérieures
respectivement à 20M¤ et 10 000 unités, et du 1er janvier 2025 pour celles pour lesquelles elles sont supérieures
à 10M¤ et 10 000 unités,
88 Les 5 critères sont les suivants :
« 1° La capacité à être efficacement collecté à l?échelle du territoire, via l?accès de la population à des points de
collecte de proximité ;
2° La capacité à être trié, c?est-à-dire orienté vers les filières de recyclage afin d?être recyclé ;
3° L?absence d?éléments ou substances perturbant le tri, le recyclage ou limitant l?utilisation de la matière recyclée ;
4° La capacité à ce que la matière recyclée produite par les processus de recyclage mis en oeuvre représente plus
de 50 % en masse du déchet collecté ;
5° La capacité à être recyclé à l?échelle industrielle et en pratique, notamment via une garantie que la qualité
de la matière recyclée obtenue est suffisante pour garantir la pérennité des débouchés, et à ce que la filière
de recyclage puisse justifier d?une bonne capacité de prise en charge des produits pouvant s?y intégrer ».
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 36/72
En second lieu, elle considère, qu?en l?état des connaissances, le recyclage n?est pas une solution
au problème de la pollution micro-plastique puisque, a priori, rien ne permet de penser que les
textiles issus du recyclage sont moins émetteurs de micro-plastiques que le textile d?origine.
Tout d?abord, la pollution par les micro-plastiques en provenance des plastiques recyclés et des
opérations de recyclage n?est pas connue. La mission n?a pas connaissance de recherches sur ces
sujets pourtant essentiels compte tenu des objectifs de recyclage que notre pays poursuit.
L?OPESCT relève seulement que le laboratoire national de métrologie propose de mettre en place
un observatoire national sur les matériaux recyclés afin d?évaluer les risques émergents liés au
développement du recyclage89.
En absence de données sur cette question, la mission postule que le relargage de micro-plastiques
par des étoffes produites à partir de plastiques recyclés, qu?ils proviennent de bouteilles ou de
jeans, est identique à celui des produits composés de plastiques qui ont subi des opérations de
recyclage. Autrement dit, au mieux, le problème ne fait que perdurer. Il peut aussi être amplifié tout
au long du cycle de vie de la nouvelle étoffe.
Ensuite, des limites techniques demeurent : seuls quelques textiles peuvent être recyclés à
l?identique et pendant un temps limité. Le reste subit des déclassements progressifs. Dans ces
conditions, l?OPECST estime que le recyclage n?est qu?un « amortisseur temporel de la formation
des déchets, sans les éviter ». Nathalie Gontard fait la même analyse90. En outre, elle souligne
que « les industries de la mode (?) proposent de nouvelles fibres textiles en plastique recyclé pour
remplacer les fibres vierges ou naturelles ».
Enfin et ce n?est pas la moindre des observations, l?accent trop important mis sur le recyclage ne
respecte pas la hiérarchie des modes de traitement des déchets, qui devrait pourtant être la
boussole des politiques publiques en application de l?article 4 de la directive cadre déchets 2008/98
transposé à l?article L. 541-1 du code de l?environnement en France. Cet article donne la priorité à
la prévention et à la réduction des déchets notamment via la conception et les actions en faveur
du réemploi des produits. Ensuite, lorsque les déchets sont inévitables, il privilégie dans l?ordre : la
préparation à leur réutilisation, leur recyclage, toute autre valorisation, enfin seulement leur
élimination.
2.2.2 La loi AGEC tente d?apporter une solution avec l?équipement
obligatoire de filtres à micro-plastiques dans les lave-linges
La loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et l?économie circulaire,
dite « loi AGEC », comporte de nombreuses dispositions relatives à la lutte contre la pollution
plastique, notamment les micro-plastiques. Son article 79, modifié depuis par l?article 47 de la loi
n° 2021-1104 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à
ses effets, dite « loi Climat et Résilience », prévoit qu?à compter du 1er janvier 2025 les lave-linges
neufs domestiques ou professionnels vendus en France seront dotés d?un filtre à microfibres de
plastique ou de toute autre solution interne ou externe permettant leur captation. L?entrée en
vigueur de cette disposition est conditionnée à la publication des textes réglementaires qui en
fixeront les modalités d?application. Ces projets sont en cours de rédaction à la date de rédaction
du présent rapport.
Cette mesure nécessite le développement par le secteur industriel de l?électroménager, qui n?est
pourtant pas le pollueur au sens de l?application du principe pollueur-payeur ou du dispositif de
REP, de tels produits.
89 « Le recyclage des plastiques », Note scientifique de l?OPESCT de juin 2023
90 « Plastique : le grand emballement » page 155, Nathalie Gontard avec Hélène Seinglier : édition Stock, 2020
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 37/72
À ce stade, le marché ne compte que deux machines à laver le linge domestiques ainsi équipées.
Le groupe Arcelik met sur le marché deux produits ? l?un sous la marque Beko® qui a créé le
produit et l?autre sous la marque Grundig® - équipés d?un « Fibercatcher », un filtre intégré dans
une cartouche située à l?arrière du bac à lessive. La technologie ne s?active que sur le programme
synthétique, car sinon les microfibres naturelles de coton également relarguées lors des lavages
la rendraient inopérante. Le circuit d?évacuation de l?eau a été repensé pour que l?eau repasse par
le bac à lessive et donc le filtre avant d?être rejetée. La technologie « Fibercatcher » capturerait
« jusqu?à 90 % des microfibres plastiques émises lors du cycle de lavage ». La cartouche se
change tous les 6 mois environ (en fonction du nombre de cycles dédiés au lavage synthétique) :
elle coûte 19,99 euros, est fabriquée à partir de 98 % de plastique recyclé. Ces lave-linges sont
vendus entre 599 et 699 euros91.
La marque Electrolux® a fait un autre choix et propose un filtre externe qui s?adapte à toutes ses
machines à laver le linge et s?installe sur le mur au niveau de la sortie d?eau de la machine. Le prix
est similaire, machine et filtre, la promesse de captation est également de 90% de microparticules
de plus de 45 microns. Le filtre seul coûte 79,90 euros et doit être nettoyé en rejetant les résidus
dans la poubelle classique lorsque le voyant s?allume ; sa cartouche doit toutefois être changée
tous les 6 mois environ, en fonction de la fréquence des cycles dédiés au lavage des vêtements
synthétiques. Le kit Electrolux Filtre Micro-plastiques E9WHMIC1 est livré avec deux cartouches
filtrantes, soit environ un an de lavages (en fonction des habitudes) avant le rachat d?une recharge
de cartouches filtrantes, vendues par deux.
D?autres produits sont également disponibles sur le marché mais ne sont pas proposés par les
fabricants de lave-linges : autres types de filtres externes et sacs de lavage.
On notera que tous ces produits nécessitent, au-delà de l?acte d?achat, un comportement volontaire
de la part du ménage utilisateur, du lancement du bon programme, avec le regroupement du textile
synthétique, au vidage/nettoyage/échange du filtre.
L?industrie du secteur des lave-linges est mobilisée sur cet enjeu depuis l?adoption de la loi AGEC
et du règlement européen prévoyant une modification en 2025 des règles d?écoconception des
machines à laver le linge. Regroupée au sein d?APPLIA92, elle a réalisé une étude en 2020 confiée
à RISE (Research Institute of Sweden)93 qui évalue le nombre de fibres micro-plastiques issues du
lavage en machine dans l?Union européenne de 20 à 500 mg de microfibres de polyester issus
des textiles, relâchées entre le 2ème et le 5ème lavage. En prenant comme hypothèses un nombre
d?habitants de l?UE + UK de 513 M d?habitants, lavant 265 kg de linge par personne et par an dont
55% de textiles synthétiques, l?étude arrive à une émission de 15 000 tonnes de fibres émises par
an après filtrage par les stations d?épuration qui sont supposées capter 90% des fibres mais ne
traitent pas 10% des flux.
91 Sachant qu?un lave-linge premier prix (capacité de 5kg) a un prix aux alentours de 200 euros mais qu?un lave-
linge de 9kg de classe énergétique A sans filtre atteint 600 euros.
92 APPLIA (Home Appliance for Europe) ? Représente les fabricants d?électroménager européen (Arcelik, Ariston,
BSH, Candy, Daikin, De Longhi, Dyson, Electrolux, Groupe Atlantic, Gorenje, LG, Liebherr, Miele, Philips,
Panasonic, Samsung, Seb, Smeg, Vestel, Vorwerk, Whirlpool).
93 RISE est un institut de recherche suédois impliqué dans les projets de recherche sur les micro-plastiques lancés
par le gouvernement de la Suède.
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 38/72
Figure 11 : Nombre de fibres émises avec inclusion du 1er lavage (source : APLLIA)94
Néanmoins, en raison de l?absence à ce stade de méthodologie unifiée validée, l?industrie
considère que des études supplémentaires sont nécessaires pour évaluer la capacité de captation
des filtres, et même le niveau d?émission des fibres synthétiques. De nombreux facteurs entrent
en ligne de compte : type de machine (domestique, laboratoire, commerciale), nombre de lavages,
nature du filtre qui collecte les microparticules, lavage de la machine entre les tests, type d?étoffe
(polymère mais aussi méthode de tissage/tricotage, type de fil, existence d?un prétraitement),
température de lavage et type de détergent utilisé, quantité d?eau, etc. Elle reconnait néanmoins
des tendances :
? la majorité des microparticules sont émises lors des premiers lavages jusqu?aux cycles 5 à
10 ;
? la température accroit le nombre de particules émises, ainsi que l?utilisation de détergent ;
? la finesse des mailles de captation des filtres est déterminante ; dans une étude menée en
2016 par des chercheurs de la Plymouth University, la taille moyenne des fibres récoltées
était comprise entre 11,9 et 17,7 microns de diamètre ; autrement dit, une grande part de
ces microplastiques seraient passés à travers les mailles du filtre Electrolux® ;
? les tests en laboratoire et ceux dans des machines commerciales sont tout autant valables,
mais des conclusions sont difficiles à retirer des tests en laboratoire par rapport aux impacts
sur les vêtements dans la vie réelle des produits.
Il apparait donc que l?équipement obligatoire des lave-linges en filtres ne peut régler à lui seul la
question de la pollution aux micro-plastiques pour les raisons suivantes :
elle ne permet pas la captation de l?ensemble des fibres émises ;
elle arrive à un stade avancé du cycle de vie du textile alors que les émissions les plus
importantes interviennent lors de la fabrication et de la teinture des produits ;
elle doit s?accompagner de la mise en place de procédés de traitements des résidus filtrés
par les lave-linges et d?acteurs économiques en capacité de les prendre en charge ;
son efficacité repose sur le respect par les particuliers d?un certain nombre de consignes,
tout à fait nouvelles pour eux (récupérer les résidus et les déposer à certains endroits ou
envoyer le filtre régulièrement à des entreprises qui le laveront et le retourneront aux
usagers, voire, au regard des produits actuellement sur le marché, nettoyage du filtre
externe), étant souligné que seuls les acquéreurs de nouvelles machines à laver le linge
seront concernés.
94 Littérature review ? Microplastic emissions from textile laundry including emission scenarios for EU ?
08/10/2020 ? R. Landin, K. Jedvert, AC Hanning, A. Hakonen
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 39/72
Enfin, cette disposition soulève des questions vis-à-vis du droit de l?Union européenne. En premier
lieu, on peut s?interroger sur sa conformité à l?article 34 du Traité sur le fonctionnement de l?UE
(TFUE) qui prohibe les mesures équivalentes à une restriction de la libre circulation des
marchandises au sein de l?Union. Cette interdiction est néanmoins levée si la mesure peut être
regardée comme une exigence impérative d?intérêt général, nécessaire et proportionnée (art 36 du
TFUE95). Toutefois, les observations précédentes conduisent à se demander si la Cour de justice
considérerait qu?une telle exigence peut être en l?espèce reconnue. L?appréciation portée sur cette
proportionnalité devra tenir compte des éléments qui figureront dans la communication de la
Commission européenne attendue sur les micro-plastiques et notamment le maintien d?un objectif
de révision du règlement écoconception des machines à laver le linge dès 2025. Et encore faudrait-
il que cette révision soit acceptée par une majorité d?États membres. En tout état de cause, elle ne
pourrait sans doute pas intervenir avant la fin de l?année 2027.
Malgré toutes les difficultés et sous les réserves exposées précédemment, le filtre à particules
micro-plastiques, interne ou externe aux lave-linges, peut constituer une des mesures permettant
de réduire la pollution résultant des micro-plastiques d?origine textile. Elle pourrait devenir effective
progressivement, au fur et à mesure du renouvellement du parc de lave-linges des particuliers.
Néanmoins, il conviendrait, pour éviter tout contentieux, que l?échéance prévue par l?article 79 de
la loi AGEC soit repoussée, voire que la disposition soit réécrite, en adaptant le dispositif français
aux futures dispositions européennes.
2.2.3 La captation des micro-plastiques textiles dans les boues des
stations d?épuration
L?article L. 541-38 du code de l?environnement, modifié par la loi AGEC, prévoit que les référentiels
des boues d?épurations doivent au plus tard le 1er juillet 2021 prendre en compte les « particules
de plastiques » en fonction de l?évolution des connaissances. Les textes d?application96 permettant
la mise en oeuvre de ces dispositions sont en cours d?écriture par les services de l?État (ministère
de l?agriculture, avec le ministère de la transition écologique). Les projets de décret et d?arrêté ?
qui vont entrer en consultation dans le courant du second semestre 2023 - prévoient effectivement
une « teneur maximale en inertes et impuretés » dans lesquelles figurent les micro-plastiques
d?une taille supérieure à 2 mm97.
Comme indiqué précédemment, la révision en cours de la directive DERU va imposer la réalisation
de telles évaluations.
Les questions posées ici sont de deux ordres :
? Quels pourcentages de microparticules sont effectivement captées lors du traitement des
eaux usées ?
? Quelles quantités de micro-plastiques sont ensuite transférés dans les sols via l?épandage
des boues d?épuration des stations ?
95 Voir l?interprétation par la CJUE de l?article 36 du TFUE : CJUE, 11 septembre 2014, Essent Belgium, C-204/12
à C-208/12, pt. 90 ; CJCE, 20 septembre 1988, Commission c. Royaume de Danemark, C-302/86, pt. 9 ainsi que
CJUE, 23 décembre 2015, Scotch Whisky Association, C-333/14, pt. 53.
96 L?article 86 de la loi AGEC prévoyait la révision des textes réglementaires applicables à l?épandage des boues
d?épuration urbaines et industrielles, au plus tard le 1er juillet 2021, afin de mettre sur un pied d?égalité toutes les
matières fertilisantes et supports de culture (MFSC), en fixant des critères de qualité agronomique et d?innocuité,
« afin de s?assurer que leur mise sur le marché et leur utilisation ne portent pas atteinte à la santé et à
l?environnement ». À partir de cette date, les MFSC ne respectant pas les nouveaux textes, n?auraient pu être
valorisées en agriculture.
97 Projet : teneur maximale en plastique de +2 mm = 3 g/kg de matière sèche
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 40/72
Concernant la captation des microparticules de plastique par les stations d?épuration, la littérature
scientifique estime que les stations d?épuration actuelles (à l?échelle mondiale) en retirent, lors du
traitement des eaux usées, entre 58,8 et 99,9%98, et que 79% des micro-plastiques entrant dans
la station d?épuration finissent dans les boues ou encore que l?on compte entre 1 000 et 300 000
microparticules de plastique dans 1kg de boues d?épuration. La littérature scientifique met
également en avant le fait qu?en sus d?être une pollution en soi, les micro-plastiques sont également
le véhicule potentiel d?autres contaminants (métaux lourds, bactéries, produits pharmaceutiques)
qui sont transférés dans les sols et impactent leur qualité en tant qu?écosystème.
De nouvelles technologies existent permettant de retirer jusqu?à plus de 98% des micro-plastiques
présents dans les eaux usées en combinant des techniques conventionnelles de boues activées
et un traitement par bioréacteur à membrane. Elles sont proposées par l?ensemble des industriels
de la filière de traitement des eaux usées.
Bioréacteur à membrane
Un bioréacteur à membrane (BRM) est une technologie utilisée dans une station d?épuration pour améliorer la
qualité de l?eau rejetée : elle fait usage de membranes de microfiltration ou d?ultrafiltration pour séparer l?eau traitée
des flocs bactériens. Ces membranes ont une porosité inférieure à 0,1 µm et séparent toutes les bactéries et
matières en suspension de l?eau épurée. Le module membranaire peut être immergé dans le bassin biologique ou
placé à l?extérieur du bassin biologique.
Les installations BRM sont généralement plus chères et consomment plus d?énergie que les stations d?épuration
classiques. Leur gros avantage réside dans la très bonne qualité de leurs effluents.
Différents types de membranes sont disponibles en fonction de la taille de l?installation et du type d?eau usée.
En remplaçant l'étape traditionnelle de clarification gravitaire, la séparation membranaire supprime les contraintes
liées à la décantation des boues : la qualité de rejet est donc parfaitement maîtrisée.
Les problèmes posés par cette évolution technologique, qui permettrait la captation de la plupart
des micro-plastiques, sont en premier lieu son prix et son calendrier de mise en oeuvre : elle
implique en effet un équipement du parc national de stations d?épuration qui prendra du temps et
aura un coût important, alors que la France est aujourd?hui déjà confrontée à un non-respect des
obligations relatives à la directive eaux résiduaires urbaines (cf. rapport IGEDD 014474-0199 ).
Actuellement, un nombre réduit de stations d?épuration (il s?agit en général de celles qui rejettent
leurs effluents en zone sensible), ont été équipées de ce type d?installation. Cette technologie
entraine par ailleurs un surcoût énergétique de fonctionnement.
Les stations d?épuration en France
En 2020, la France compte 22 331 usines de traitement des eaux usées représentant une capacité totale de
105 000 000 équivalent-habitants (EH).
Les STEU délivrant au moins un traitement secondaire représentent 96 % de la capacité totale des installations en
activité en France et celles assurant un traitement encore plus rigoureux couvrent 80 % de cette capacité totale.
Le besoin de renouvellement annuel nécessaire pour maintenir la valeur du patrimoine d?assainissement est estimé
entre 3,9 et 5,7 millions d?euros. Ce patrimoine ferait l?objet d?un sous-investissement, principalement dans le
réseau, les postes de refoulement et les branchements, de l?ordre de 1,4 Mds/an. Cette évaluation ne prend pas
en compte les nouveaux besoins (investissements eaux pluviales, lutte contre les micropolluants et les micro-
plastiques).
98 ?Microplastic contamination in sewage sludge: Abundance, characteristics, and impacts on the environment and
human health? - Environmental Technology & Innovation 31 (2023) 103176 ? 23 avril 2023
99 https://www.igedd.developpement-durable.gouv.fr/comment-ameliorer-durablement-la-collecte-et-le-
a3734.html
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 41/72
Source :
UIE - Étude patrimoniale eau Rapport 2022
Service des données et études statistiques du ministère de la transition écologique, 2020
Mais surtout, la mise en oeuvre du concept d?économie circulaire implique que les boues
d?épuration soient utilisées au maximum de leurs capacités pour produire de l?énergie ou des
produits annexes (matériaux de construction, engrais, source d?énergie pour la production de
biogaz ou d?énergie à travers l?incinération). En France, 80% des boues d?épuration produites
sont épandues dans les champs. Or l?usage des boues d?épuration comme engrais agricole
conduit à répandre dans les sols des micro-plastiques, cette méthode devenant ainsi sans doute
l?une des principales sources de contamination des sols par les micro-plastiques.
Il en découle donc que, quand bien même l?ensemble des stations d?épuration seraient équipées
de bioréacteurs membranaires d?ici 15 ans, les micro-plastiques captés dans les boues poseraient
toujours le problème de leur gestion finale. Si l?épandage venait à être remis en cause pour être
remplacé par une élimination des boues par incinération, les volumes de boues à traiter
nécessiterait l?équipement des collectivités en incinérateurs, et donc de nouvelles dépenses
publiques. Par ailleurs, des études indiquent que l?incinération des boues peut également être
source de diffusion de micro/nano-plastiques dans l?air.
Il convient enfin de rappeler qu?une partie des micro-plastiques restent véhiculés par les eaux
pluviales (pneus et peintures routières) qui ne font pas l?objet de traitement dans les collectivités
équipées de réseaux séparatifs.
En conclusion sur ce point, la mission considère que l?utilisation des boues d?épuration comme
fertilisant dans les champs agricoles devrait faire l?objet d?un examen plus poussé afin de minimiser
les risques pour la santé humaine et les écosystèmes. Il convient de rappeler ici que l?épandage
des boues d?épuration urbaines et industrielles ne représente que 12 à 13% des épandages en
général100. L?arrêt ou la réduction de l?épandage des boues d?épuration sera donc principalement
un problème de gestion desdites boues dont le principal usage final serait modifié101.
2.2.4 Les mesures qui prolongent la durée de vie des textiles ralentissent
la pollution
Face à des étoffes composées en tout ou partie de polymères dont les émissions sont
principalement réalisées en début de cycle de vie, retarder leur fin de vie, et la gérer car elle est
susceptible à nouveau de générer de nombreux micro-plastiques dans l?eau, dans l?air, dans le sol,
peut apparaitre comme une solution, qui en plus s?inscrit dans la politique nationale et européenne
de développement de réduction de l?impact environnemental de la filière textile. À cet égard la
prohibition de l?élimination des invendus est une mesure contraignante intéressante aux yeux de
la mission. De même, les dispositifs encourageant la réparation, le réemploi et la réutilisation.
2.2.4.1 L?interdiction de l?élimination des invendus, une mesure forte
La part des invendus parmi les textiles mis en vente est estimée entre 10% et 20%102. Pour une
entreprise donnée, elle varie notamment en fonction de la gestion des volumes produits ou la
fréquence des collections.
Depuis le 1er janvier 2022, en application de l?article L. 541-15-8 du code de l?environnement, les
100 Les épandages sur terres agricoles des matières fertilisantes d'origine résiduaire ? CGEDD-CGAER 2015
https://agriculture.gouv.fr/sites/default/files/cgaaer_14074_2015_rapport.pdf
101 Entre 43% et 76% si on additionne épandage et compostage.
102 Rapport d?Eunomia « Scoping study to assess the feasibility of further EU measures on waste prevention »
publié en 2022
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 42/72
producteurs, importateurs et distributeurs notamment de produits textiles 103 sont tenus de
réemployer, y compris par le don104 à des associations caritatives ou à des structures de l?économie
sociale et solidaire dans le cadre de convention de dons, de réutiliser ou de recycler les invendus.
Refashion engage ses adhérents à repenser la structuration de leurs collections, par exemple en
augmentant la part des intemporels, à créer des produits au plus près des attentes des
consommateurs, à tester de nouvelles lignes, à minimiser les stocks, à faire des soldes attractives.
Il leur suggère également de créer des espaces de ventes de « seconde main » qui pourront
intégrer les invendus.
Tout en évitant la destruction des produits non vendus, cette mesure devrait inciter les producteurs,
importateurs et distributeurs à mieux calibrer leurs productions et leurs stocks. Elle sera, de plus,
désormais appuyée par la règlementation européenne qui va imposer la même obligation à
l?échelle de l?Union européenne (voir 2.1).
2.2.4.2 Le cahier des charges de Refashion lui impose de promouvoir la réparation, le
réemploi et la réutilisation
Comme indiqué en 2.2.1.2, le cahier des charges de l?éco-organisme prévoit des éco-modulations
en fonction de la durabilité des produits TLC105. La durabilité est notamment appréciée, par type
de textile, au regard de la résistance aux lavages, de la résistance aux abrasions, des glissements
de fils aux coutures, du boulochage.
La durabilité est par ailleurs encouragée via un fond dédié au financement de la réparation.
L?objectif est d?augmenter le nombre de réparations hors garantie de 35% en 2028 par rapport à
2019. Le fond doté de 44M¤ financera notamment les dépenses liées aux réparations réalisées
par des acteurs labélisés par l?éco-organisme. Le 11 juillet 2023, la secrétaire d?État à l?écologie, a
ainsi annoncé qu?à partir du mois d?octobre 2023, les consommateurs pourront percevoir un bonus
allant de 6 à 25 euros par réparation.
Autres leviers indirects pour limiter la production de textiles synthétiques, des objectifs de
réutilisation et de réemploi106 des TLC ont été fixés à Refashion : 120 000 tonnes de TLC usagés
doivent être réutilisés ou réemployé chaque année à compter de 2024. Un fond soutient de telles
opérations dès lors qu?elles interviennent à une distance inférieure à 1 500 km du lieu de collecte
des TLC.
2.2.5 La lente émergence d?une information des consommateurs et de
l?écoconception
2.2.5.1 De l?encadrement des allégations environnementales vers l?étiquetage
obligatoire
Avant la loi AGEC, les allégations environnementales étaient seulement soumises à la
réglementation sur la publicité trompeuse et les pratiques commerciales déloyales (Directive
2005/29/CE et articles L. 121-1 et suivants du code de la consommation). Mais des mesures
103 Cette obligation n?entre en oeuvre qu?à compter du 1er janvier 2024 pour les textiles neufs pour la maison.
104 Ce don permet de bénéficier d?une réduction fiscale
105 Voir l?annexe III du cahier des charges
106 L?article L 541-1-1 du code de l?environnement définit ainsi le réemploi et la réutilisation :
« Réemploi : toute opération par laquelle des substances, matières ou produits qui ne sont pas des déchets sont
utilisés de nouveau pour un usage identique à celui pour lequel ils avaient été conçus ; »
« Réutilisation : toute opération par laquelle des substances, matières ou produits qui sont devenus des déchets
sont utilisés de nouveau ; »
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 43/72
volontaires les concernant avaient été prises par le monde de la publicité : le guide du Conseil
national de la consommation sur les allégations environnementales (guide de 2010 réactualisé en
2023) et la « Recommandation développement durable » de l?autorité de régulation professionnelle
de la publicité (la version en ligne date d?août 2020). Ces deux types d?auto encadrement visaient
toutes les activités économiques.
Outre des mentions obligatoires sur l?intégration de matières recyclées et sur la recyclabilité des
fibres mentionnées au 2.2.2.1, le décret n° 2022-748 a prévu que les textiles d?habillement et linge
de maison neufs devront indiquer le pays où s?effectuent le tissage, la teinture et l?impression ainsi
que la confection et que ceux qui sont composés de plus de 50% de fibres synthétiques
comportent la mention « rejette des microfibres plastiques dans l?environnement lors du
lavage ».
Néanmoins, l?enquête faite par les rapporteuses auprès du secteur a démontré que seules
quelques marques appliquent cette règle dans les délais impartis.
La mission s?est demandée si la très forte délocalisation de la fabrication des textiles évoquée au
1.3.3.1 ne pouvait pas expliquer la difficulté de déploiement des nouvelles règlementations sur
l?étiquetage. En effet, des entreprises interrogées ont expliqué à la mission que leurs produits
arrivaient en France cintrés et étiquetés, prêts à être exposés en magasins. Il conviendra donc de
s?assurer que cette disposition est bien mise en oeuvre.
2.2.5.2 L?affichage environnemental devrait « valoriser » le risque de pollution par les
microparticules de plastique
D?abord prévu par l?article 15 de la loi AGEC107, l?affichage environnemental est désormais régi par
l?article 2 de la loi Climat et Résilience. Il ne s?agit pas comme pour l?étiquetage environnemental
de préciser certaines caractéristiques environnementales des produits. L?affichage
environnemental vise d?une part, à « communiquer une information précise et transparente au
consommateur pour qu?il puisse faire des choix en connaissance de cause », d?autre part, à
« encourager les producteurs à concevoir de manière plus responsable leurs produits », enfin à
« réduire l?impact environnemental de l?industrie de la mode » (Communiqué de presse de la
secrétaire d?État à l?écologie le 21 mars 2023).
Le secteur du textile connait des démarches d?affichage environnemental depuis 2010 et de
nombreux travaux ont été menés permettant de constituer un socle technique (référentiel BPX 30-
323). Quatre entreprises ont été volontaires pour tester des projets de pré-déploiement de cet
affichage de 2017 à 2020.
La loi AGEC a poursuivi et officialisé cette démarche expérimentale en prévoyant des
expérimentations pendant 18 mois, le dispositif devant être rendu obligatoire après l?entrée en
vigueur de dispositions européennes ayant le même objectif.
Ces expérimentations ont été prolongées, pour une durée maximale de cinq ans, par les
dispositions du II de l?article 2 de la loi Climat et Résilience. Elles devaient débuter notamment par
le secteur du textile d?habillement. À la différence de la loi AGEC, la loi Climat et Résilience prévoit
qu?à l?issue de ces expérimentations et après évaluation de celles-ci, l?affichage environnemental
sera rendu obligatoire par décret, prioritairement dans le secteur du textile d?habillement.
Un premier bilan de l?expérimentation de l?affichage environnemental pour les textiles d?habillement
et les chaussures a été dressé par un rapport au Parlement108, déposé en mars 2022 en application
107 Abrogé par le V de l?article 2 de la loi Climat et Résilience
108 Rapport au Parlement sur le bilan de l?expérimentation affichage environnemental textiles d?habillement et
chaussures de la loi Anti-Gaspillage pour une Economie Circulaire, article 15, Mars 2022
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 44/72
de l?article 15 de la loi AGEC. Il précise qu?environ 160 organisations s?étaient manifestées en 2020
auprès de l?ADEME pour participer à l?expérimentation mais que le nombre d?entreprises ayant
réellement mis en place des expérimentations, précisément inconnu, peut être estimé à une dizaine.
Le rapport explique cette désaffection in itinere par les difficultés liées à la crise COVID, un certain
nombre d?incompréhensions des objectifs de cette expérimentation, notamment le positionnement
par rapport aux travaux européens, l?absence de « certaines données cruciales » dans la base
Impact de l?ADEME, l?absence d?échelles de notation commune. Il souligne que, pour la plupart
des acteurs, le référentiel doit être complété mais qu?il n?y a pas de consensus entre eux sur les
choix à faire.
Il signale que sur la base de ces premiers enseignements et compte tenu du nouveau cadre posé
par la loi Climat et Résilience, une nouvelle phase d?expérimentation a été lancée en juillet 2021
avec une gouvernance et des méthodes renouvelées.
C?est ainsi que 11 méthodes de calcul et d?affichage d?une empreinte environnementale ont été
expérimentées en 2022 avec environ 470 études de cas réalisés sur des produits réels. L?ADEME
en a dressé un bilan dans un rapport109 de mars 2023 partagé avec le comité des partenaires. Six
méthodes étaient basées sur le socle ADEME, quatre sur le projet de PEFCR (voir 2.1.1.2 p. 32)
et une autre approche. Bien que, ni le projet de PEFCR, ni le socle de l?ADEME ne prennent en
compte les micro-plastiques à proprement parler, certaines méthodes ont proposé d?intégrer cet
enjeu, le considérant important : trois méthodes l?ont appréhendé en tant que sous-score de la
biodiversité et deux ont développé un nouveau critère relatif aux micro-plastiques en lien avec la
teneur en microfibres contenues dans le produit considéré.
Compte tenu des résultats de ces expérimentations, la secrétaire d?État à l?écologie a annoncé le
17 mars 2023, devant les entreprises impliquées dans les expérimentations, les représentants du
secteur et les ONG que huit critères d?impact avaient été retenus pour construire la méthode de
calcul pour le futur affichage environnemental. Les rejets de micro-plastiques seront pris en
compte par le 5ème de ces critères.
La mission ne peut qu?approuver cette orientation dès lors qu?elle permettra aux
consommateurs de prendre la mesure de l?éventuelle pollution micro-plastique engendrée
par leur achat, en la comparant à d?autres impacts environnementaux et aura par
répercussion des effets sur la conception des produits.
Une première version de la méthode de calcul devrait être mise au point au second semestre 2023.
Cette initiative française avance parallèlement aux travaux menés à l?échelle européenne sur
l?affichage environnemental (notamment sur le PEFCR). Dans ce cadre, la France tente de faire
valoir ses propres réflexions, qui convergent souvent avec celles de la Commission, par exemple
sur la durabilité des vêtements (projet Durhabi porté par l?IFTH, repris au niveau européen), sur la
réparabilité mais aussi sur les micro-plastiques.
Mais à ce jour aucune méthode n?étant fiable, plusieurs projets de recherche sont en cours afin
d?intégrer l?impact des micro-plastiques dans les analyses de cycle de vie.
2.3 Le secteur économique cherche peu à réduire la pollution à la
source
Le secteur, très dépendant des importations, déploie peu de moyens pour réduire la pollution par
les micro-plastiques à la source. Peu incité par les pouvoirs publics comme indiqué précédemment,
il ne l?est pas plus par les différents labels existants.
109 Rapport de l?ADEME : Évaluation transversale des méthodes d?affichage environnemental des textiles
d?habillement et chaussures, Mars 2023
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 45/72
2.3.1 Un secteur en transition, peu mobilisé sur la question des micro-
plastiques
2.3.1.1 Les transformations du secteur
La profession, bousculée voire fragilisée par la « fast fashion » mais aussi par la crise sanitaire de
la Covid 19, cherche avant tout à réduire son impact sur le climat, souhaite amorcer une
relocalisation de sa production comme en atteste le rapport du Comité stratégique de filière « mode
et luxe » demandé par la ministre de la transition énergétique : « Relocalisation et mode durable »
2021.
Le secteur se prépare aussi à mettre en oeuvre la loi AGEC, et notamment la réduction des
emballages en plastique, l?affichage environnemental et les mesures précédemment rappelées en
terme de recyclage et d?intégration de matières recyclées dans les étoffes.
La mission a ainsi constaté que les efforts des grosses entreprises portent surtout sur le recyclage
et la durabilité des produits, parfois sur le « coton bio » en terme d?efforts d?écoconception.
La recherche appliquée, qu?elle soit publique ou privée (comme celle portée par GEMTEX110), est
très déterminée par les demandes des entreprises, qui elles-mêmes, outre leurs stratégies propres
de recherche et développement, suivent les orientations des pouvoirs publics. Ainsi, il a été indiqué
à la mission que l?absence de dispositions contraignantes sur la teneur en polymère des textiles
ou sur leur rejet de micro-plastiques, expliquait en partie la rareté des recherches sur ces sujets.
Le centre européen des textiles innovants (CETI), centre de recherche privé, dispose d?une
installation de recyclage thermodynamique étant souligné que c?est le recyclage mécanique qui est
majoritairement utilisé. Pour développer ces procédés, il a mis en place une plateforme dénommée
CETIA dédiée au tri et au recyclage. Il considère ainsi qu?il est tout à fait possible, techniquement
et économiquement, de recycler à l?identique des mélanges de fibres (polyester/polyamide et
polyester/coton) ou de les recycler en les séparant, cette dernière solution étant plus coûteuse.
2.3.1.2 Quelques initiatives vers des textiles naturels ou moins émetteurs de micro-
plastiques
? L?exemple de la filière française du lin parait emblématique de la désindustrialisation du
secteur textile en France.
Cette filière, qui bénéficiait d?une longue tradition depuis le Moyen Âge, du Sud de la Normandie
au Nord de la France, comme dans une partie de l?Europe du Nord, a presque totalement disparu.
Ne demeurent que deux filateurs et une poignée de tisseurs et de tisserands 111 . Pourtant,
« l?Europe, en particulier la France, la Belgique et les Pays-Bas, concentre 80% de la production
mondiale de lin fibre, expédiée à 85% vers les filatures chinoises et en partie en Inde ». Elle se
mobilise aujourd?hui pour relancer ses filatures et ateliers de tissage en cherchant à se relocaliser
en France.
À cet égard, il convient de signaler l?initiative de l?Union des industries textiles (UIT) et
d?Interchanvre, lancée en juin 2023, « Bleu Blanc Lin » et « Bleu Blanc Chanvre » qui vise à « faire
renaitre une filière lin et chanvre pour un textile 100% made in France »112.
110 Laboratoire de recherche textile ? Roubaix https://www.gemtex.fr/
111 La tapisserie de Bayeux est une preuve de la présence du lin au XIe siècle « Les savoir-faire du lin textile »
Fiche d?inventaire du patrimoine culturel immatériel (page 19).
112 https://www.textile.fr/actualite/soutienfilierestextilesfrancaiseslinetchanvre
PUBLIÉ
https://www.textile.fr/actualite/soutienfilierestextilesfrancaiseslinetchanvre
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 46/72
Ce mouvement de renaissance est porté au niveau européen, par la Confédération européenne
du lin et du chanvre qui rassemble tous les acteurs de l?industrie européenne du lin dans 14 pays
de l?Union européenne.
La mission ne peut que se réjouir de ces évolutions qui, entre autres bénéfices, permettront de
mettre sur le marché français et européen, des textiles moins ou pas émetteurs de micro-plastiques.
? Le CETI participe à des projets qui cherchent à développer des fibres plus « naturelles » :
? des PLA (Acide polylactique) (TOTAL Corbion en Normandie sur le site de la raffi-
nerie de Grandpuits en Seine-et-Marne) bio plastique produit à partir de sucres de
cannes ou d?amidon (aussi d?écorces de betterave) ; il est recyclable et « compos-
table » selon Total énergie ;
? des celluloses issues de lin oléagineux (CETI) ;
? des fibres réalisées à partir de lait impropre à la consommation humaine qui sont
recyclables ou compostables ; ces fibres, en apparence proches de la laine et de
la soie, intéressent certaines entreprises du luxe mais compte tenu de leur origine
et pour des raisons éthiques (ne pas détourner la production agricole), elles ne
pourront donner lieu à une production de masse.
? Enfin, quelques rares entreprises se focalisent sur le sujet des micro-plastiques. Elles sont
principalement regroupées au sein du Consortium Microfibres (TMC)113 association qui re-
groupe différentes marques autour d?un « Engagement microfibres 2030 » : elles s?enga-
gent à rechercher un « impact nul de la fragmentation des fibres des textiles sur l?environ-
nement naturel d?ici 2030 » en choisissant de mettre la fragmentation des fibres en tête de
leur agenda environnemental. Elles réalisent des tests sur leurs matériaux qu?elles com-
muniquent au consortium et mettent à disposition des équipes de travail spécifiques sur le
sujet.
Ainsi, Décathlon® a engagé une démarche de tests de l?ensemble des étoffes de sa
collection afin d?évaluer de façon précise leur caractère émissif et de pouvoir adapter sa
production en fonction des résultats. Cette entreprise est l?une des deux marques ayant
respecté les délais en matière d?étiquetage de ses produits.
On notera également que le TMC a très largement contribué à l?élaboration des normes en
cours d?adoption (voir 2.4.2).
2.3.2 Aucun label environnemental ne semble afficher de critères sur les
émissions de micro-plastiques
Les labels environnementaux sont des outils mis à la disposition des consommateurs pour leur
permettre de choisir les produits qui paraissent offrir les meilleures garanties de préservation de
l?environnement et de la santé humaine. Ils peuvent donc conduire à des changements de
consommation non négligeables.
Certains labels sont apposés sur les produits sous la seule responsabilité des fabricants ou
distributeurs. D?autres sont certifiés ou contrôlés par un organisme tiers indépendants sur la base
d?un cahier des charges conformément à l?article L. 433-1 du code de la consommation. Parmi
ceux-ci figurent les labels conformes à la norme ISO 14024 et peuvent être appelés « Écolabel »
comme l?éco label européen.
113 Outdoor Microfibre Consortium Limited dont sont membres Adidas, CetA, Decathlon, Bureau Veritas, Eurifins,
Fashion for Good, Gap Inc, HetM Group, Helly Hansen, Kering, Next, Nike, The North Face, Patagonia, Puma,
RISE, Tesco, Textile exchange, etc? https://www.microfibreconsortium.com/signatories
PUBLIÉ
https://www.microfibreconsortium.com/signatories
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 47/72
L?ADEME a réalisé une étude sur huit labels environnementaux apposés sur les textiles en 2020114.
Cette étude est en ligne sur son site115. Depuis le 1er janvier 2023, la certification par un ou plusieurs
de ces huit labels116 donne droit à des primes réduisant les éco-contributions versées à Refashion
(voir 2.2.1.2).
Toutefois l?étude de l?ADEME ne s?intéressait pas aux micro-plastiques, en tant que tels, mais d?une
manière générale, à l?impact des produits sur le changement climatique, la perte de biodiversité, la
pollution de l?air, l?écotoxicité et l?épuisement des ressources. La question de la pollution de l?air y
était abordée mais sous l?angle des composés organiques volatiles. Par ailleurs, le critère de la
durabilité, peu utilisé, était peu précisé par cette étude.
La mission n?a pas trouvé de label mettant en avant le caractère faiblement émissif des étoffes.
2.4 De nouveaux outils qui devraient permettre de dépasser ces
freins
2.4.1 Les recherches scientifiques en cours
Afin de faire face aux incertitudes évoquées en partie 1.3, différents projets de recherche sont en
cours, pour permettre la définition des micro-plastiques, leur caractérisation, leurs impacts
toxicologiques à l?échelle internationale comme nationale, par les autorités publiques comme par
le secteur privé.
Ces projets en France117 sont notamment portés par l?ADEME, l?Institut national de l?environnement
industriel et des risques (INERIS) et l?Office français de la biodiversité (OFB). Certains visent à
évaluer la contamination des sols par les micro-plastiques (Microsof), d?autres leurs impacts
écotoxicologiques (MusselPlast), les boues d?épuration (PRO), la dégradabilité des plastiques. Ces
projets sont en phase d?achèvement et rendront des résultats d?ici fin 2024.
Par ailleurs, l?ADEME, l?OFB, l?INERIS participent au réseau européen SOILVER dans lequel un
état de l?art de la contamination dans les sols et les eaux souterraines a été réalisé par l?INERIS et
des collaborateurs belges et néerlandais (projet MISSOURI). En mars 2022, un appel à projets de
recherche (APR) a été lancé conjointement par l?ADEME et l?OFB pour évaluer le transfert des
micro-plastiques dans les écosystèmes continentaux, afin d?anticiper les besoins réglementaires
de surveillance et de gestion de ces pollutions.
Les résultats de ces projets de recherche permettront d?asseoir les décisions publiques sur des
données chiffrées. À ce stade, ils confirment la présence de micro-plastiques dans les
écosystèmes investigués.
2.4.2 De nouvelles normes devraient faciliter l?avancée des recherches sur
les émissions de micro-plastiques
Grâce à la mobilisation des acteurs du secteur dans le monde entier, des normes ISO ont
récemment été publiées ou sont en cours d?adoption. Pour la première fois, vont exister des
définitions communes des micro-plastiques et des nano-plastiques, des méthodes communes pour
déterminer les pertes de matière lors des lavages industriels et domestiques et pour les analyser.
Ces harmonisations devraient permettre un essor des travaux de recherche et de leur comparaison
114 Vêtements, chaussures et textiles : impacts environnementaux et labels, Expertises, édition 2020
115 https://agirpourlatransition.ademe.fr/particuliers/labels-environnementaux#labelsrow-3
116 Pour les noms des labels voir note 86
117 Microsof, Biomaleg, Plasticène, Cinape, Pro
PUBLIÉ
https://agirpourlatransition.ademe.fr/particuliers/labels-environnementaux%23labelsrow-3
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 48/72
et des conclusions beaucoup plus pertinentes devraient pouvoir en être tirées que ce soit par
exemple en ce qui concerne l?ampleur des émissions de micro-plastiques sur le cycle de vie des
étoffes, la réalité des pollutions dans l?environnement, les atteintes à la santé humaine, l?affichage
environnemental ou les labels.
2.4.2.1 Des définitions communes des particules fines de plastiques
Une norme (ISO/FDIS 24187118) est en cours d?élaboration et pourrait être adoptée d?ici la fin de
l?année 2023 permettant une classification unique des micro-plastiques et un faisceau de règles
permettant leur échantillonnage.
À ce stade de son élaboration, la norme définirait les micro-plastiques comme des particules
solides, non solubles dans l?eau, d?une taille allant de 1 µm à 1000 µm (soit 1 mm), les particules
allant de 1 à 5 mm étant elles qualifiées de « grands micro-plastiques » mais étant couvertes par
la même norme. De plus, cette norme indiquerait que la forme peut être régulière ou irrégulière, et
que la dimension est celle de la partie la plus longue de la particule, ce qui permettrait d?y inclure
les microfibres de moins de 5 mm de longueur. Elle devrait être validée à l?échelle internationale,
mais également européenne (CEN) et française (AFNOR).
Enfin, les nano-plastiques seraient également en cours de définition - ce qui est plus petit que 1
µm ? ces éléments étant contenus dans un document normatif écrit il y quatre ans. Une autre
définition est proposée par l?OCDE jusqu?à 100 nanomètres.
2.4.2.2 Une harmonisation des méthodes pour mesurer et analyser les pertes de
matières lors des lavages des textiles
Une norme ISO, CEN et NF 4484 porte sur cette harmonisation. Elle comporte trois parties.
La première partie concerne la détermination de la perte de matières des étoffes lors des lavages
(ISO 4484-1 : 2023)119. Elle a été publiée et est en vigueur depuis février 2023.
La troisième partie se concentre sur les méthodes pour mesurer la masse de matériaux collectés
libérés par les produits finis textiles au cours des lavages domestiques. Cette partie de la norme a
été publiée en mai 2023 au niveau international mais ne l?était pas encore en France à la date de
rédaction du présent rapport120.
La deuxième partie, qui porte sur les méthodes pour mesurer, quantifier et analyser les résultats
des matières ainsi collectées, fait encore débat. En effet, il existe déjà des travaux de normalisation
sur l?analyse des micro-plastiques dans l?eau. La plupart des pays de l?Union européenne et la
Commission souhaiteraient qu?il n?y ait qu?une seule norme (norme ISO/16084 en trois parties en
cours d?élaboration) et que la gouvernance sur ces questions soit harmonisée et confiée au
« groupe joint » entre le comité technique dans le domaine des plastiques et le comité technique
dans le domaine de l?eau, et ne fasse donc pas l?objet d?une norme séparée.
L?Union européenne a donc voté « contre » la proposition de norme ISO 4484-2. L?adoption de
cette norme poursuit néanmoins sa route et elle devrait être publiée avant la fin de l?année 2023,
mais ne sera pas applicable dans l?UE.
118 Projet de norme ISO/FDIS 24187:2023 « Principes d?analyse des micro-plastiques présents dans
l?environnement ».
119 https://standards.cencenelec.eu/dyn/www/f?p=205:110:0::::FSP_PROJECT:71617&cs=110565CE941B989550
C25BDB465B4B18A
120 https://www.iso.org/fr/standard/81035.html
PUBLIÉ
https://www.iso.org/fr/standard/81035.html
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 49/72
2.4.3 Les évolutions règlementaires à venir à l?échelle européenne
Comme évoqué en 2.1, la Commission européenne et les agences européennes travaillent
activement sur le sujet des micro-plastiques avec l?objectif de faire évoluer la règlementation
européenne sur le sujet.
Des travaux européens ont été conduits et seraient sur le point d?aboutir à la publication d?une
communication faisant état de la collecte de données sur l?émission des micro-plastiques non
intentionnels réalisée depuis 2018 et des priorités politiques que va se donner l?Union européenne
dans ce domaine. Au stade de la finalisation de ce rapport, cette communication n?a pas été
adoptée par la Commission européenne. Selon des informations recueillies par la mission, la
Commission européenne se préparerait à annoncer que la priorité sera donnée à la lutte contre les
pertes de granulés industriels. La définition de mesures visant la réduction des micro-plastiques
issus des textiles pâtirait du manque de données consolidées permettant l?évaluation quantitative
de cette pollution, et des conséquences économiques pour les secteurs concernés (industrie textile,
fabricants de lave-linges).
En parallèle, la Commission a soumis le 30 mars 2022 à l?adoption législative une règlementation
élargissant les obligations en matière d?écoconception à de nouveaux types de produits dont les
textiles (tous les produits en fait à l?exception de quelques-uns). Cette règlementation cadre est en
cours d?adoption par le Conseil et le Parlement qui a adopté sa position le 12 juillet dernier. Elle
sera suivie de la définition de règlements d?application propres à chaque secteur, comportant ses
propres règles en matière d?écoconception des produits. Cette règlementation européenne prévoit
notamment la « labellisation » des produits sur leur impact environnemental : le « passeport
produit » doit contenir les informations exactes et à jour sur les possibilités de réparation et de
recyclage, sur la durabilité du produit. Cela aidera le consommateur à faire des choix éclairés et
les autorités de contrôle des États membres à effectuer les vérifications. D?autres règles seront
également définies pour améliorer la durabilité, la sûreté, la réutilisation, l?amélioration, la
réparation, le maintien en bon état et la remise à neuf, la présence de produits à risque, l?usage de
l?énergie et l?efficacité énergétique, le contenu recyclé, la possibilité de reproduire et de recycler, la
possibilité de récupération des matériaux, les impacts environnementaux et la génération prévue
de déchets. À ce stade de la négociation, l?orientation générale du Conseil propose une interdiction
directe de destruction des produits non écoulés dans le secteur de l?industrie textile, avec une
exemption de quatre ans pour les entreprises de taille moyenne et une exemption générale pour
les petites et microentreprises121. Cette position est soutenue par le Parlement européen dans son
vote du 12 juillet 2023. Il est important de préciser que la « destruction » au sens de ce texte
européen n?intègre pas l?action de réemploi ou de re-fabrication, afin de pousser les producteurs à
envisager différentes options pour ces textiles invendus.
Une révision de la directive sur la biodégradabilité des plastiques est prévue en 2027 afin de tenir
compte des progrès dans la compréhension du phénomène de pollution.
La règlementation européenne relative à l?exportation des déchets est également en cours
d?évolution. Début juillet 2023, la Commission a abordé cette question dans le cadre de la révision,
ciblée sur les textiles, de la directive cadre sur les déchets. Elle a annoncé dans un communiqué
de presse que les mesures prévues viendront compléter celles de la proposition de nouveau
règlement concernant les transferts de déchets qui ont pour « objectif d?assurer que les transferts
de déchets textiles n?ont lieu que lorsqu?il est garanti qu?ils sont gérés d?une manière
121 « Nouvel article 20b : Interdiction de destruction des produits de consommation invendus qui sont des vêtements
ou des accessoires vestimentaires : À compter de 36 mois après l?entrée en vigueur du présent règlement, la
destruction des produits de consommation invendus qui sont des vêtements ou des accessoires du vêtements,
énumérés aux chapitres 61 et 62 du TARIC [Tarif douanier de l?Union européenne] établi par le règlement CEE
n°2658/8777 du Conseil est interdite. »
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 50/72
écologiquement durable »122.
Dans le domaine de la pollution de l?eau, la proposition de directive révisant la DERU identifie les
micro-plastiques comme de « nouveaux polluants » ayant fait leur apparition et fixe un objectif de
réduction des émissions de micro-plastiques de 9% d?ici 2040, « principalement grâce à des actions
sur la gestion améliorée des eaux de pluie ». Par ailleurs, elle prévoit que les États membres
devraient désormais « surveiller la pollution provenant des eaux de ruissellement urbain et des
surcharges dues aux pluies d?orage, les concentrations et les charges des polluants réglementés
dans la présente directive à la sortie des stations d?épuration des eaux urbaines résiduaires et la
présence de micro-plastiques (y compris dans les boues) » pour toutes les agglomérations ayant
un taux d?équivalent habitants (EH) supérieur à 10 000. Une méthodologie de mesure des micro-
plastiques dans les eaux résiduaires urbaines et les boues sera établie par la Commission
européenne dans le cadre d?actes d?exécution de la directive.
Enfin, notamment parce que les micro-plastiques peuvent être des vecteurs de substances
chimiques concernées par la DCE, notamment des additifs susceptibles d?être relargués
(plastifiants tels que le DEHP, le C10-13-chloroalcane, hexachlorobenzène, composés ignifuges
tels que l?HBCDD, ou encore des métaux (utilisés comme pigments tels que le cadmium) qui sont
des « substances prioritaires dangereuses » susceptibles d?être présentes dans les plastiques, la
Commission a proposé le 26 octobre 2022 une directive révisant la DCE, la directive sur les eaux
souterraines et celle sur les standards de qualité environnementale dans le domaine de la politique
de l?eau . Cette révision propose notamment l?introduction de nouvelles substances à mesurer dans
le cadre de l?évaluation de la qualité de l?eau et demande l?élaboration d?une méthodologie pour
évaluer les micro-plastiques présents dans l?eau. Ce texte est en cours d?examen par les instances
européennes.
L?ensemble des évolutions de ce cadre européen auront un impact sur la mise en oeuvre de la loi
AGEC et des autres mesures règlementaires en cours d?adoption en France.
122 Communiqué de presse de la Commission européenne du 5 juillet 2023 : Économie circulaire et secteur du
textile : responsabilité à l?égard de la réduction, du réemploi et du recyclage des déchets textiles et stimulation des
marchés des textiles usagés.
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 51/72
3 Afin de mieux répondre à cette pollution, il est nécessaire
de prendre en compte le cycle de vie du produit textile
D?une manière générale, il semble à la mission indispensable que les politiques publiques
s?inspirent de la hiérarchie des modes de traitement des déchets. Par ordre de priorité décroissante,
il convient donc d?abord d?encourager à l?écoconception, d?augmenter la durabilité, d?inciter à la
réparation, au réemploi, enfin à la réutilisation. Le recyclage doit donc retrouver sa place, après
ces premières mesures. Mais pour mettre en oeuvre une écoconception efficace et pertinente, la
filière a besoin que la recherche sur toutes les étapes de la vie du produit soit intensifiée.
3.1 Approfondir les efforts de recherche
Il a été souligné précédemment123 à quel point le manque de connaissances freinait tant les
décisions publiques que les choix des industriels.
Les avancées en terme de normalisation124 devraient faciliter nombre de recherches publiques ou
privées sur l?ensemble des enjeux évoqués dans ce rapport.
La mission estime que des recherches complémentaires devraient porter en priorité sur :
- les risques des micro- et les nano-plastiques sur les écosystèmes et la santé humaine ;
- la quantification des micro-plastiques émis dans l?air lors du port des vêtements ;
- l?analyse des émissions de micro-plastiques issus des étoffes produites en polymères recyclés et
des étoffes en fin de vie ;
- le devenir des micro-plastiques présents dans les boues d?épuration épandues sur les sols.
[ADEME et ANSES] Soutenir des projets de recherche sur les effets sur
les écosystèmes et la santé humaine des micro-plastiques, sur la pollution aux micro-
plastiques d?origine textile dans l?air et par l?épandage des boues d?épuration et sur la
pollution issue des textiles recyclés et en fin de vie.
3.2 Répondre aux émissions lors de la création des étoffes et des
produits
Dans le cadre de la mise en oeuvre du principe de précaution et de prévention, l?écoconception
des étoffes apparait comme une des mesures à privilégier afin de limiter leur caractère émissif en
micro-plastiques.
Deux orientations politiques sont possibles :
? Réduire la part des étoffes synthétiques dans le textile consommé en France en leur
substituant des matériaux alternatifs :
? fibres naturelles (lin, chanvre) ;
? fibres biosourcées transformées (viscose, lyocell) tout en limitant leurs autres im-
pacts environnementaux ;
? Réduire les émissions de micro-plastiques par les étoffes :
123 Voir partie 1
124 Voir en 2.4.2
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 52/72
? en améliorant leur conception : sur la base des tests qui seront réalisés, la profes-
sion va pouvoir déterminer plus précisément quels sont les types d?étoffes les plus
émetteurs ;
? en captant les émissions réalisées lors de la fabrication des étoffes, ce qui néces-
site un plan d?investissements dans les pays producteurs pour que les émissions
des usines de fabrication soient collectées, traitées, filtrées et que les déchets
soient ensuite détruits.
Parce que la substitution de matières pas ou peu émettrices de micro-plastiques nécessite de
revoir des lignes de production et des gammes de produits, et donc du temps, les plans de
prévention et d?écoconception devraient être utilisés comme aides en vue de telles transformations.
Le plan de prévention et d?écoconception prévu par l?article L. 541-10-12 du code de
l?environnement pourrait être l?occasion d?imposer aux entreprises du secteur de remettre en
question leur recours aux textiles synthétiques, qu?ils soient vierges ou recyclés, en fonction de la
gamme de chacune d?entre elle. Il pourrait même leur être demandé de se fixer à elles-mêmes un
objectif de réduction des micro-plastiques.
[MTECT/DGPR] Modifier l?article L. 541-10-12 du code de
l?environnement pour prévoir que le plan d?écoconception doit avoir comme objectif
d?augmenter la part des fibres peu ou pas émettrices de micro-plastiques
Les innovations déjà amorcées sur de nouvelles fibres naturelles ou synthétiques devraient être
accentuées. Pour accompagner cette réorientation, la reconstitution ou la constitution de filières
de fibres naturelles, telles que le lin et le chanvre, pour celles qui peuvent être produites en France
ou en Europe, devraient être encouragées et soutenues à l?échelle nationale comme européenne.
La conception d?étoffes et de produits non ou moins émetteurs de micro-plastiques devrait faire
partie des priorités des programmes de recherche entrepris par les secteurs privé et public. Des
recherches récentes, il apparait que la longueur des fibres synthétiques a une grande importance
sur leur caractère émetteur de microparticules. Si ces informations venaient à être confirmées par
les tests en cours, cette exigence relative au type de fibre pourrait figurer dans les cahiers de
charge. Même si à ce stade la biodégradabilité des plastiques synthétiques n?a pu être prouvée, la
recherche de fibres biodégradables (même si émettrices de microfibres ou particules) est
également un champ à explorer125.
Un autre sujet d?écoconception des étoffes relève des modalités de tissage ou tricotage. Sans
remettre en cause la suprématie industrielle actuelle du tricotage, qui déstabiliserait fortement la
filière, les tests sur les étoffes devraient également permettre d?analyser l?impact de la conception
des étoffes sur les émissions de microfibres.
De même, les modalités de découpe des étoffes au moment de la fabrication des produits textiles
ou d?assemblage des pièces peuvent avoir un impact sur leur caractère émissif.
En résumé, sur la base des tests qui vont pouvoir être conduits dans les 2 ou 3 prochaines années
conformément aux normes récemment adoptées ou en cours d?adoption, les cahiers de charge
des entreprises de fabrication et de diffusion des produits textiles auprès de leurs fournisseurs
pourront intégrer des critères permettant de limiter les émissions de micro-plastiques par les étoffes
et les produits achetés, qu?ils soient importés ou produits au sein de l?Union européenne.
125 L?entreprise Primaloft Bio indique avoir fabriqué le premier tissu issu de fibres synthétiques 100% recyclées et
biodégradables à 55% (Prima loft Bio Performance Fabric).
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 53/72
[MEFSIN/DGE] Soutenir le développement par la filière TLC de la
production d?étoffes en fibres naturelles alternatives au coton ou en nouvelles étoffes
synthétiques biosourcées et compostables
Pour accélérer la réduction de l?utilisation des micro-plastiques lorsque leur utilité n?est pas avérée,
il pourrait être envisagé d?interdire l?incorporation de micro-plastique dans les textiles. De telles
pratiques existent par exemple pour ennoblir les textiles ou rendre plus agréable leur portabilité
(nanoparticules pour éviter les mauvaises odeurs dégagées par les chaussettes de sport). Il s?agit
ici d?éviter l?ajout de micro-plastiques intentionnels et donc de s?aligner avec la politique
européenne visant à réglementer en priorité les micro-plastiques primaires. On pourrait à l?échelle
française étendre le champ d?application de l?article L. 541-15-12 du code de l?environnement
(inséré par l?article 82 de la loi AGEC) qui interdit l?incorporation de micro-plastique en
concentration supérieure à 0,01% dans certains produits. S?agissant de l?industrie textile, cette
interdiction devrait viser tous les micro- et nano-plastiques sauf, encore une fois, en cas de
nécessité démontrée. Cette décision doit préalablement être prise à l?échelle européenne.
Enfin, afin de limiter l?impact des micro-plastiques émis, l?écoconception devrait également se
concentrer sur les additifs. La limitation, voire l?interdiction, de certaines substances chimiques
utilisées comme additifs dans la confection des polymères peut faire l?objet d?un renforcement de
la règlementation européenne sur le sujet.
[MEFSIN/DGE ? MTECT/DGPR] Demander à l?échelle européenne l?inter-
diction de : a) l?insertion de micro et nano-plastiques additionnels pour l?embellissement et
l?ennoblissement ; b) l?ajout des additifs insérés dans les polymères textiles causant des
risques pour la santé humaine et les écosystèmes.
Enfin, la France et l?Union européenne sont mobilisées dans le cadre de leur aide au
développement sur le sujet de la gestion de l?eau dans les pays tiers. Néanmoins, la majorité des
aides est dirigée vers l?accès à l?eau potable des populations, plutôt que vers le traitement des
eaux usées ; et quand bien même des projets relatifs au traitement des eaux usées existent, les
usages des boues d?épuration sont similaires aux usages réalisés en France, à savoir l?épandage
d?une grande partie d?entre elles, et donc des micro-plastiques qui ont été captés lors du traitement.
D?échanges avec le secteur du textile, la mission retient également que l?insertion dans les cahiers
des charges de contraintes pour les producteurs de textiles des pays tiers en matière de collecte
de leurs eaux usées à la sortie de leurs usines de fabrication, n?a pas eu de résultats, les moyens
de contrôle étant inexistants et le saut technique demandé n?étant pas possible à mettre en oeuvre,
avec souvent des réseaux publics de traitement des eaux inexistant ou insuffisants pour prendre
le relais des industries. Pourtant, la traçabilité récemment mise en place devrait permettre
d?améliorer la capacité de contrôle sur les producteurs de produits textiles par les donneurs d?ordre.
L?encouragement à l?amélioration de la gestion des eaux usées dans les pays tiers producteurs de
textiles doit être poursuivi, même si des résultats ne peuvent être attendus à court terme.
[MEAE - MTECT] Aider les pays tiers dans lesquels sont produites les
étoffes à développer des systèmes de gestion des eaux et de captation des microfibres,
dans le cadre des politiques d?aide au développement et en partenariat avec les entreprises
européennes productrices et distributrices de produits textiles.
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 54/72
La commande publique, devant être « mise au service de la transition vers l?économie
circulaire » en application de l?article. L. 541-1 (dernier alinéa) du code de l?environnement,
le levier des marchés publics pourrait être aussi actionné pour les vêtements professionnels
lorsque la technicité de leur usage le permet. Un pourcentage maximum de fibres synthétiques
pourrait être inclus dans les clauses techniques des marchés correspondant et un bonus pourrait
être accordé aux tissus comportant le plus de fibres naturelles et/ou biodégradables.
3.3 Faire du consommateur un acteur éclairé de la réduction de la
pollution par les micro-plastiques
La lutte contre les micro-plastiques des textiles rejoint celle de la lutte contre les coûts
environnementaux de la surconsommation textile. D?après un sondage réalisé par OpinonWay126
auprès de 2 002 personnes, 55% des Français déclarent limiter leurs achats textiles aux besoins
réels, 46% trier leurs placards et 55% valoriser leurs textiles en leur offrant une seconde vie, 80%
ayant recours aux dons.
Figure 12 : Cycle de vie des textiles et chaussures (Source : rapport d'activité 2022 Refashion)
Une des clés de l?action politique apparait donc comme étant celle de la sensibilisation du
consommateur comme du distributeur.
L?affichage environnemental, dès lors qu?il comportera un critère sur le rejet dans l?environnement
126 https://fr.fashionnetwork.com/news/Dechets-textiles-les-francais-mobilises-mais-trop-peu-
informes,1340053.html
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 55/72
de micro-plastiques et que ce critère sera correctement valorisé, ne pourra qu?avoir des effets
positifs sur la conception des étoffes. Pour éviter de faire l?objet d?un mauvais score, les entreprises
devraient s?orienter vers des tissus comportant moins de polymères ou vers des polymères moins
émetteurs de micro-plastiques.
Eu égard à l?importance de la pollution par les micro-plastiques d?origine textile, la mission
considère qu?il est nécessaire de renforcer les contraintes d?étiquetage actuellement prévues par
le XI de l?article R. 541-221 du code de l?environnement :
- d?une part, le pourcentage de 50% de composition d?étoffe synthétique au-delà duquel les
émissions de micro-plastiques doivent être signalées apparait trop élevé puisque l?on sait que
toutes ces fibres rejettent des micro-plastiques quel que soit leur pourcentage. La mission propose
donc de faire passer le pourcentage à 5 % ;
- d?autre part, sachant que le relargage des microparticules peut aussi intervenir lors du port, de
tout autre utilisation et de la fin des étoffes, la mission propose soit de supprimer dans la mention
obligatoire les mots « lors du lavage », soit de compléter cette mention par « de l?utilisation et de
la fin de vie de l?étoffe ». Cette recommandation rejoint celle du rapport de l?OPECST de 2020 sur
la pollution plastique.
La mission rappelle qu?un pictogramme signalant de manière très claire la présence de plastiques
n?est prévu que pour certains produits à usage unique par le décret n°2021-1279 qui transpose
l?article 7 de la directive du 5/06/2019 et son règlement d?exécution UE 2020/2151. Un pictogramme
analogue pourrait accompagner la mention « rejette des microfibres plastiques dans
l?environnement ».
Les labels constituant des outils souples et rapidement mobilisables, la mission considère qu?ils
devraient mieux prendre en compte la pollution par les micro-plastiques d?origine textile. Pour les
y inciter, elle estime que l?ADEME devrait renouveler et approfondir son étude sur les labels
environnementaux.
[MTECT/CGDD - ADEME] Mieux informer le consommateur sur les mi-
cro-plastiques textile en : a) lançant des campagnes de communication sur l?émission de
micro-plastiques par les produits textiles ; b) modifiant le XI de l?article R. 541-221 du code
de l?environnement pour faire passer le seuil de présence de fibre synthétique de 50% à 5%
déclenchant une information du consommateur ; c) renouveler l?étude sur les labels envi-
ronnementaux pour les textiles en mettant en lumière les critères retenus par chacun d?eux
sur les émissions de micro-plastiques, sur le taux de présence de fibres synthétiques et
artificielles, sur la réparabilité du vêtement, sur sa durabilité.
3.4 Répondre aux émissions lors de l?usage du produit
3.4.1 Les émissions lors des lavages des produits
La partie 2 de ce rapport a souligné la difficile mise en place d?une politique de captation des micro-
plastiques issus des lavages de vêtements, qui sont supposés être l?une des principales causes
d?émission de micro-plastiques textiles en Europe.
Concernant les machines individuelles à laver le linge, la loi AGEC a fixé un objectif, auquel les
fabricants de machine ont partiellement répondu, et sa mise en oeuvre dépend principalement de
l?adoption de règles équivalentes à l?échelle européenne. La mission souhaite néanmoins attirer
l?attention sur la nécessaire proportionnalité de cette mesure d?une part, eu égard aux technologies
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 56/72
actuellement existantes qui nécessitent une forte implication de l?utilisateur de la machine (choix
des programmes, nettoyage des filtres), un risque de contradiction avec le droit européen de libre
circulation des biens et marchandises, et d?autre part sur sa temporalité de mise en oeuvre. D?après
UFC-Que-Choisir et l?INSEE, 94% des ménages sont équipés d?un lave-linge en France et la durée
de vie d?un lave-linge est estimée à 7 à 10 ans. De plus, les règles européennes et nationales
récentes visent la promotion de la fin de l?obsolescence programmée et du réemploi de
l?électroménager. Quand bien même la mesure d?installation obligatoire d?un système de filtrage
serait mise en place en France dès 2025, le temps nécessaire pour qu?une fraction suffisante des
ménages français investissent dans une machine équipée d?un tel système de filtrage ne permettra
pas d?obtenir des résultats avant 2030.
La mission s?est donc penchée sur la possibilité d?imposer l?équipement des machines à laver
industrielles d?un tel système de filtrage, solution qui apporterait a minima la garantie du bon
traitement des résidus de lavage issus du système de filtration et de la bonne application du
principe de filtration en fonction de la nature des étoffes. La loi française impose également
l?équipement des machines industrielles d?un même système de filtration.
L?idée, expertisée également par la Commission européenne, serait donc d?imposer un premier
lavage ? ou plusieurs lavages initiaux - des produits textiles distribués sur le marché européen,
qu?ils soient importés ou fabriqués dans l?Union européenne. Ce(s) premier(s) lavage(s)
permettrai(en)t non seulement la collecte des microparticules émises lors des premiers lavages, et
leur récupération puis leur élimination, mais également celles de produits/additifs chimiques nocifs
qui peuvent être utilisés dans la fabrication des étoffes. Cette solution ne peut être expérimentée
par la France seule et doit s?imposer à l?échelle de l?Union européenne.
Les solutions logistiques pour la mettre en oeuvre devraient être laissées aux distributeurs afin de
pouvoir s?intégrer dans leur chaine logistique. Néanmoins, il convient de ne pas oublier que cette
mesure entrainerait une forte déstabilisation des chaines logistiques actuellement existantes de la
plupart des marques, dont la très large majorité de la production est fabriquée à l?extérieur de
l?Union européenne, non seulement pour la production des étoffes, mais également pour leur
conception, leur étiquetage, leur emballage et même leur cintrage ce qui rend un relavage dans
l?Union européenne très complexe. Et l?imposition d?un lavage dans le pays de production du
produit ? qui n?est pas forcément celui de la production de l?étoffe elle-même ? pose les problèmes
liés au traitement des eaux usées dans les pays tiers déjà évoqué (3.1.1).
Cette solution dont l?efficacité immédiate est très séduisante, aura donc un impact majeur sur la
chaine de production et nécessiterait une mise en oeuvre progressive. L?examen devra notamment
intégrer les types de financement pouvant être apportés par la REP.
La dernière étape d?émission des micro-plastiques lors des lavages est celle des stations
d?épuration, sujet également largement abordé en partie 2.2.3. Les réglementations en cours de
mise en place à l?échelle nationale et européenne devraient permettre d?avoir rapidement une
visibilité sur l?ampleur de cette pollution par les micro-plastiques. Dans le contexte actuel d?un
renforcement de l?équipement des collectivités françaises en systèmes d?épuration des eaux usées
plus efficaces afin de respecter les obligations communautaires actuelles et à venir, la mission
pense utile que l?équipement des stations en filtres permettant une meilleure capture des
microparticules de plastique soit examinée de façon plus systématique dans le cadre des projets,
notamment pour les stations situées dans des zones sensibles. La question de l?usage des boues
d?épuration nécessite également une expertise plus poussée. En effet, la mise en oeuvre du
principe de précaution conduirait à ne pas poursuivre l?épandage des boues d?épuration dont la
teneur en microparticules de plastique est avérée. Le développement d?autres usages des boues
d?épuration doit donc être recherché.
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 57/72
[MTECT ? MESFIN/DGE] Limiter les émissions de micro-plastiques en
provenance des lavages en Europe en : a) défendant à l?échelle européenne dans le cadre
de l?évolution du règlement écoconception la mise en place de filtre sur les lave-linges
privés ; b) examinant à l?échelle européenne la possibilité d?un prélavage des produits
textiles avant leur mise en rayon par les distributeurs
[MTECT] Renforcer les filtres équipant les stations d?épuration dans les
zones sensibles et limiter l?épandage des boues d?épuration dont la contamination par les
micro-plastiques est avérée.
3.4.2 Les émissions lors du port des produits
À ce stade de l?analyse, il apparait à cette mission très difficile d?imposer des règles obligatoires.
La priorité doit être donnée à la recherche pour analyser à la fois la présence des microfibres dans
l?air, la capacité d?ingestion/adsorption de ces microfibres dans le corps humain et leur impact sur
la santé.
Dans un deuxième temps, une fois ces études complémentaires réalisées, il suffira d?étendre les
règles européennes sur la pollution de l?air aux microfibres en les rattachant aux PM2,5 et PM10.
[MTECT/DGEC] A l?échelle européenne, en fonction des résultats des
études sur les émissions de micro-plastiques dans l?air, intégrer les microparticules de
plastique dans les PM2,5 et PM10.
3.5 Répondre aux émissions lorsque le textile devient déchet
3.5.1 La collecte, le tri et les usages nouveaux (réemploi, réutilisation)
La lutte contre les micro-plastiques ne pourra que bénéficier de l?accroissement de la durabilité des
produits puisque la majorité des émissions se produisent en début de vie du produit, même si cette
assertion se heurte à l?absence de tests réalisés sur des étoffes en fin de vie ou sur des étoffes en
synthétiques recyclés.
Il convient à cette occasion de signaler que Refashion doit contribuer à la prise en charge des
opérations de collecte séparée des déchets textiles. Cette collecte séparée devient en effet
obligatoire à compter du 1er janvier 2025, en application du décret n °2021-950 du 16 juillet 2021,
comme dans le reste de l?Union européenne. Elle va augmenter la masse de déchets collectés
mais leur traitement en sera facilité et de meilleure qualité.
Quelques chiffres sur le tri et le réemploi
67 centres de tri conventionnés donc 15 en Europe hors de France
260 000 tonnes ont été récoltées dont 188 000 ont été triées (soit 23% de la mise sur le marché)
59% des volumes collectés et triés est considéré comme apte à la réutilisation.
On estime le volume des TLC réemployés à 10 000 à 30 000 tonnes par an, essentiellement vers les boutiques
des entreprises relevant de l?économie sociale et solidaire.
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 58/72
[MTECT/DGPR] Modifier le cahier des charges de l?éco-organisme de
la filière TLC pour lui fixer des objectifs de collecte, de tri, de réemploi et de réparation des
textiles synthétiques, plus ambitieux que pour les autres textiles
3.5.2 Les problèmes de pollution créés par l?exportation des déchets
textiles européens et français
Selon Refashion, 95% des TLC collectés et triés sont exportés essentiellement en Afrique (35%),
en Europe (31%) et en Asie (24%), les trois principaux pays destinataires étant le Pakistan (33 000
tonnes), la Tunisie (près de 31 000 tonnes) et la Belgique (28 000 tonnes). Rares sont les textiles
qui sont réutilisés dans ces pays en raison de leur mauvais état ou parce qu?ils ne correspondent
pas aux besoins locaux.
La plupart est donc éliminée alors que les pays importateurs de déchets n?ont bien souvent pas les
capacités de les traiter correctement. Ces exportations sont ainsi vraisemblablement génératrices
d?une très forte pollution notamment en terme de micro-plastiques.
De nombreuses voix se sont élevées contre ces pratiques qui demeurent néanmoins à l?échelle
européenne.
Le cahier des charges de Refashion n?est pas à la hauteur du problème puisqu?il prévoit seulement
qu?en 2024, 8% des TLC usagés devront être réemployés ou réutilisés à moins de 1 500 km du
lieu de collecte, cet objectif passant à 15% en 2027.
Pour la mission, il n?est pas admissible que notre pays exporte ainsi ses déchets textiles sans
s?assurer que les installations qui les accueillent seront en mesure de les traiter correctement, en
particulier en ce qui concerne les micro-plastiques.
Elle a constaté que cette position était conforme à celle préconisée tant par le Parlement européen
que par la Commission (voir 2.1.4).
[MEFSIN/DGT ? MEAE] Dans le cadre de la négociation européenne
sur la révision du règlement sur l?exportation des déchets, promouvoir la position tendant
à interdire l?exportation de déchets textiles dans les pays tiers qui ne sont pas en capacité
de gérer ces déchets
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 59/72
Conclusion
L?émission de microparticules de plastiques par le textile est avérée, a contaminé tous les milieux,
et ne va faire que s?accroitre au regard de l?augmentation de la part des étoffes synthétiques dans
la production textile mondiale. Il y a donc urgence à agir pour réduire cette pollution à l?échelle de
l?ensemble du cycle de vie des produits, les émissions se déroulant à chaque étape.
La concentration des efforts actuellement menés sur la phase lavage des produits textiles ne
permet pas de répondre à l?ensemble de la problématique et a des coûts disproportionnés par
rapport à d?autres actions qui peuvent être mises en oeuvre en amont et sont plus en phase avec
les principes pollueur-payeur et de respect du cycle de vie du produit.
La mission recommande donc d?axer prioritairement les efforts sur l?écoconception des étoffes et
des produits textiles en s?appuyant sur les nouveaux outils de normalisation récemment adoptés
ou en cours d?adoption. Dans ce secteur, il semble également indispensable que toute décision
soit prise à l?échelle européenne. Il convient enfin d?ancrer l?action de lutte contre les micro-
plastiques textiles dans le contexte et le cadre de la lutte contre la surconsommation de textiles à
bas coûts qui est au coeur de cette problématique.
Virginie DUMOULIN
Sabine SAINT GERMAIN
Inspectrice générale de
l'administration du développement durable
Inspectrice générale de
l'administration du développement durable
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 60/72
Annexes
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 61/72
Annexe 1. Lettre de mission
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 62/72
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 63/72
Annexe 2. Liste des personnes rencontrées
Organisme Date Nom Fonction
Cabinet de la SE à l?écologie 12/04/23 Léonard BRUDIEU Conseiller
DEB 19/04/23 Marie-Laure Metayer Adjointe au DEB
id Isabelle Kamil Sous-directrice, de la protection et de la gestion de l?eau, des
ressources minérales et des écosystèmes aquatiques, EARM
id Véronique NICOLAS Cheffe du bureau EARM 4
id Vincent SZLEPER Adjoint à la sous-directrice de la protection et de la restauration des
écosystèmes littoraux et marins.
DGPR/SRSEDPD/SD id Sami DRISSI-AMRAOUI Chargée de mission REACH santé environnement, produits
chimiques, agriculture/ bureau des produits chimiques
MEFSIN/DGE/Service de
l?industrie/sous-direction des
industries de santé, des biens
de consommation et de
l?agroalimentaire
21/04/23 Astrid EVEN Chef de projet Mode, Luxe et biens de consommation
France LACOEUILHE Chargée du textile au sein de l?équipe de Mme EVEN
Comité France Océan 2/05/2023 Gauthier CARLE Coordonnateur des ONG du Comité France Océan
Laboratoire GEMTEX/ENSAIT 2/05/2023 Xyanzi ZENG Directeur
Fabien SALAUN Responsable « matériau avancé »
Xavier LEGRAND Responsable « matériau composite »
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 64/72
MTECT/CGDD/SEVS 5/05/2023 Audrey COREAU Cheffe du service de l?économie verte et solidaire
Pascal DAGRAS Chef de projet affichage environnemental
Alliance du commerce 5/05/2023 Yohann PETIOT Directeur
Pascale Barthomeuf-
Lassire
Directrice des affaires économiques et juridiques
Pierre Alexandre Naud Responsable des affaires économiques et juridiques
ADEME
9/05/2023
Jean Charles
CAUDRON
Responsable de la direction de la supervision des REP
Manon LEGER Chargée de mission au sein de cette direction
GIFAM (Groupement des
marques d?appareils pour la
maison)
10/05/2023
Camille BEURDELEY
Alexandrine FADIN
SOS MAL DE SEINE 12/05/23 Laurent Colasse Président
CETI, centre européen des
textiles européens
16/05/23 Pascal DENIZART Directeur
Expedition MED 16/05/23 Bruno DUMONTET Fondateur et directeur
ETAM 16/05/23 Kache HONG ZWART Directrice RSE
Les Amis de la Terre 23/05/23 Pierre Condamine Chargé de campagne surproduction
ADEME/Service de
Coordination, d?Evaluation et de
24/05/23 Isabelle DEPORTES Ingénieure impacts sanitaires et écotoxicologiques de l?économie
circulaire
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 65/72
Valorisation (SCEV) Coordination R&D DECi
INERIS / Direction stratégie,
politique scientifique et
communication
24/05/23 Pierre BOUCARD Responsable études et recherches de l?unité économie et décision
pour l?environnement
ECOBALYSE/ADEME 24/05/23 Alban FOURNIER Responsable
DECATHLON 26/05/23 Julie Arnould Responsable de l?équipe de recherche
Marie Stephan
Antoine Cosne Doctorant
Institut Français du textile et de
l?habillement
26/05/23 Clarisse REILLE Directrice
Eva Debruyne Référente développement durable
Carole Garbowski Chargé du suivi réglementaire notamment de l?affichage
environnemental
Bureau de la normalisation de
l?industrie textile et de
l?habillement BNITH
2/06/23 Laurent Houillon Directeur
Chercheuse publique 2/06/23 Nathalie Gontard Directrice de recherche à l?INRA et professeure à l?Université de
Montpellier
Refashion 6/06/23 Hélène Daret Directrice du pôle relation avec les adhérents et responsable du
développement de l?éco conception
Bureau de la normalisation des
plastiques et de la plasturgie
20/06/23 Yan Archambeau Directeur
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 66/72
Commission de l?UE/ Direction
générale de l?environnement
23/06/23 Flora Wallace Unité B1
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 67/72
Annexe 3. Glossaire des sigles et acronymes
Acronyme Signification en français
ADEME Agence de la transition écologique
AFNOR Association française de normalisation
AGEC (Loi) Anti-gaspillage et pour une économie circulaire
ANSES
Agence nationale de sécurité sanitaire de l?alimentation, de
l?environnement et du travail
APPLIA Homa Appliance for Europe
BPA Bisphénol A
BPS Bisphénol S
BRM Bioréacteur à membrane
CGDD Commissariat Général au Développement Durable
CETI Centre européen des textiles innovants
COVID Maladie à Coronavirus
CTI Centre Technique Industriel (du textile et de l'habillement)
DCE Directive cadre sur l?eau
DCSMM Directive cadre Stratégie et milieux marins
DEHP Phtalate de bois
DGE Direction générale des entreprises
DGEC Direction Générale de l?Energie et du Climat
DGPR Direction Générale de la Prévention des Risques
DGT Direction Générale du Trésor
ECHA Agence européenne des produits chimiques
EH Equivalent habitant
EN Standard européen en matière de normalisation
ERU Eaux résiduaires urbaines
ETC Commission européenne du voyage
FRIVEP
Projet de structuration d'une filière de réemploi / recyclage industrielle
des vêtements professionnels
GEMTEX Laboratoire de recherche textile
IFTH Institut français du textile et de l'habillement
IGEDD Inspection Générale de l?Environnement et du Développement Durable
INERIS Institut national de l'environnement industriel et des risques
ISO Organisation internationale de normalisation
HBCDD Hexabromocyclododécane (composé aliphatique bromé)
HDPE Polyéthylène de haute densité
LDPE Polyéthylène à basse densité
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 68/72
Acronyme Signification en français
MEAE Ministère de l?Europe et des Affaires Etrangères
MEFSIN
Ministère de l?Economie, des Finances et de la Souveraineté
Industrielle et Numérique
MTECT Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires
Mt Million de tonnes
NMMO N-Methylmorpholine N-oxide
OCDE Organisation de Coopération et de développement économique
OEFSR Performance environnementale des organisations
OFB Office Français de la Biodiversité
ONG Organisation non gouvernementale
OPESCT
Office parlementaire d?évaluation des choix scientifiques et
technologiques
PA Polyamide
PAN Polyacrilonitrile
PBAT Polybutylène adipate-co-téréphtalate
PBS Polybutylène succinate
PCB Polychlorobiphényles
PCL Polyaprolactone
PE Parlement européen
PET Polyéthylène Téréphtalate
PEF Polyéthylène furanoate
PFAS Composés perfluorés
PEFCR Performance environnementale des produits (projet européen)
PFOA Acide perfluorooctanoic
PHA Polyhydroxyalcanoate
PLA Acide polylactique
PM2,5 Particules fines de diamètre 2,5 microns
PM10 Particules fines de diamètre 10 microns
POP Polluants organiques persistants
PP Polypropylène
PPDDT Dichlorodiphényltrichloroéthane
PPD-T Para phénylène-téréphtalamide
PS Polystyrène expansé
PU Polyuréthane
PVC Chlorure de polyvinyle
PVOH Alcool polyvinylique
REACH
Règlement européen portant sur l?enregistrement, l?évaluation et
l?autorisation des substances chimiques dans l?Union européenne
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 69/72
Acronyme Signification en français
Refashion
Eco-organisme de la Filière Textile d'habillement, Linge de maison et
Chaussure
REP Responsabilité élargie du producteur
RISE Institut de recherche de Suède
STEU Stations de traitement des eaux usées
SVHC Substance extrêmement préoccupantes
TARIC Tarif douanier européen
TFUE Traité sur le fonctionnement de l?Union européenne
TLC Produits textiles, linges de maison et chaussures
TMC Consortium Microfibres
UE Union européenne
UICN Union internationale de la Conservation de la nature
UIE Union Nationale des Industries et Entreprises de l'Eau
UIT Union des industries textiles
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 70/72
Annexe 4. Quelques chiffres sur la pollution plastique en
général
Sources :
? Stratégie européenne sur les plastiques (2018)
? The Minderoo-Monaco Commission on Plastics and Human Health
https://storage.googleapis.com/jnl-up-j-agh-
files/journals/1/articles/4056/submission/proof/4056-1-17364-2-10-20230321.pdf
? Global Plastic Outlook ? OCDE https://www.oecd-ilibrary.org/sites/de747aef-
en/1/3/2/index.html?itemId=/content/publication/de747aef-
en&_csp_=e9020c542dd024467e760066b0abe328&itemIGO=oecd&itemContentType=book#
section-d1e2597
8 300 Mt de plastiques fabriqués depuis 1945, dont plus de 50% depuis 2002, et seulement 30%
encore utilisés
460 Mt de plastiques produits en 2019 et 1231 Mt en 2060 selon les prévisions de l?OCDE
49 Mt de matières plastiques consommées dans l?Union européenne (2018)
25,8 Mt de déchets produits chaque année dans l?Union européenne, dont seulement 30% sont
récupérés pour être recyclés
Répartition de la consommation mondiale : 20% Chine, 18% USA, 18% Europe OCDE, 9% reste
OCDE
Production : 52% en Asie dont 32% en Chine, 19% Amérique du nord, 17% Europe.
Entreprises productrices : Sinopec, Exxon mobil, PetroChina, Sibur
Répartition de la production par type de plastiques : 16% PP (polypropylène ? PET), 13% fibres,
12% HDPE, 12% LDPE
Plastiques recyclés : 9% dans le monde soit 29,1 Mt en 2019 du plastique produit et 14% dans
l?UE
Plastiques à usage unique : 35% des plastiques produits soit 133 Mt en 2019
PUBLIÉ
https://storage.googleapis.com/jnl-up-j-agh-files/journals/1/articles/4056/submission/proof/4056-1-17364-2-10-20230321.pdf
https://storage.googleapis.com/jnl-up-j-agh-files/journals/1/articles/4056/submission/proof/4056-1-17364-2-10-20230321.pdf
https://www.oecd-ilibrary.org/sites/de747aef-en/1/3/2/index.html?itemId=/content/publication/de747aef-en&_csp_=e9020c542dd024467e760066b0abe328&itemIGO=oecd&itemContentType=book%23section-d1e2597
https://www.oecd-ilibrary.org/sites/de747aef-en/1/3/2/index.html?itemId=/content/publication/de747aef-en&_csp_=e9020c542dd024467e760066b0abe328&itemIGO=oecd&itemContentType=book%23section-d1e2597
https://www.oecd-ilibrary.org/sites/de747aef-en/1/3/2/index.html?itemId=/content/publication/de747aef-en&_csp_=e9020c542dd024467e760066b0abe328&itemIGO=oecd&itemContentType=book%23section-d1e2597
https://www.oecd-ilibrary.org/sites/de747aef-en/1/3/2/index.html?itemId=/content/publication/de747aef-en&_csp_=e9020c542dd024467e760066b0abe328&itemIGO=oecd&itemContentType=book%23section-d1e2597
PUBLIÉ
Site internet de l?IGEDD :
« Les rapports de l?inspection »
PUBLIÉ
https://www.igedd.developpement-durable.gouv.fr/spip.php?page=liste-actualites&lang=fr&id_mot=1187&debut_rub_actus=0
https://www.igedd.developpement-durable.gouv.fr/spip.php?page=liste-actualites&lang=fr&id_mot=1187&debut_rub_actus=0
Sommaire
Résumé
Liste des recommandations
Introduction
1 La pollution par les micro-plastiques textiles est avérée mais les analyses scientifiques et techniques restent incomplètes, ce qui freine la prise de décision
1.1 Une définition des micro-plastiques encore sujette à discussion
1.1.1 Une question de composition
1.1.2 Une question de taille et de forme
1.1.3 Une question de source
1.2 La pollution par les micro-plastiques est constatée dans l?ensemble des écosystèmes
1.2.1 La pollution aux micro-plastiques de tous les écosystèmes est avérée
1.2.2 La part respective de chaque source dans la pollution par micro-plastique reste incertaine
1.2.3 La pollution par les micro-plastiques est durable
1.3 Des incertitudes qui ralentissent la prise de décision alors que la production de textile synthétique s?accroît
1.3.1 Une quantification de la pollution par les micro-plastiques textiles incomplète
1.3.2 Des incertitudes sur les risques pour les écosystèmes et la santé humaine
1.3.3 Une croissance incontrôlée de la production de textiles synthétiques
1.3.3.1 La fabrication des étoffes est majoritairement délocalisée
1.3.3.1 Les fibres synthétiques envahissent de plus en plus les étoffes et stimulent la baisse des prix et la surconsommation
2 La réponse actuelle à la pollution par les micro-plastiques issus du textile demeure très incomplète
2.1 Les émissions de micro-plastiques textiles sont peu prises en compte dans la règlementation européenne
2.1.1 Une règlementation de l?économie circulaire qui s?oriente enfin vers la réduction de la pollution micro-plastique
2.1.1.1 Un paquet économie circulaire focalisé sur la recyclabilité du plastique
2.1.1.2 L?écoconception pour répondre aux enjeux climatiques plus qu?à la pollution
2.1.1.3 Une définition de la biodégradabilité qui tient imparfaitement compte de la capacité du plastique à se diviser en microparticules
2.1.2 Une règlementation des produits chimiques qui n?intègre pas les micro-plastiques
2.1.3 Une règlementation sur la pollution de l?eau et de l?air qui n?intégrait pas les micro-plastiques
2.1.4 Une règlementation sur l?exportation des déchets ne permettant pas leur contrôle
2.2 Les mesures adoptées en France sont insuffisantes
2.2.1 Une règlementation française centrée sur la REP et le recyclage qui ne règle pas la pollution par les micro-plastiques textiles
2.2.1.1 Le principe de la responsabilité élargie des producteurs et son application au secteur du textile
2.2.1.2 Une politique de recyclage qui ne répond pas à la pollution par les micro-plastiques
2.2.2 La loi AGEC tente d?apporter une solution avec l?équipement obligatoire de filtres à micro-plastiques dans les lave-linges
2.2.3 La captation des micro-plastiques textiles dans les boues des stations d?épuration
2.2.4 Les mesures qui prolongent la durée de vie des textiles ralentissent la pollution
2.2.4.1 L?interdiction de l?élimination des invendus, une mesure forte
2.2.4.2 Le cahier des charges de Refashion lui impose de promouvoir la réparation, le réemploi et la réutilisation
2.2.5 La lente émergence d?une information des consommateurs et de l?écoconception
2.2.5.1 De l?encadrement des allégations environnementales vers l?étiquetage obligatoire
2.2.5.2 L?affichage environnemental devrait « valoriser » le risque de pollution par les microparticules de plastique
2.3 Le secteur économique cherche peu à réduire la pollution à la source
2.3.1 Un secteur en transition, peu mobilisé sur la question des micro-plastiques
2.3.1.1 Les transformations du secteur
2.3.1.2 Quelques initiatives vers des textiles naturels ou moins émetteurs de micro-plastiques
2.3.2 Aucun label environnemental ne semble afficher de critères sur les émissions de micro-plastiques
2.4 De nouveaux outils qui devraient permettre de dépasser ces freins
2.4.1 Les recherches scientifiques en cours
2.4.2 De nouvelles normes devraient faciliter l?avancée des recherches sur les émissions de micro-plastiques
2.4.2.1 Des définitions communes des particules fines de plastiques
2.4.2.2 Une harmonisation des méthodes pour mesurer et analyser les pertes de matières lors des lavages des textiles
2.4.3 Les évolutions règlementaires à venir à l?échelle européenne
3 Afin de mieux répondre à cette pollution, il est nécessaire de prendre en compte le cycle de vie du produit textile
3.1 Approfondir les efforts de recherche
3.2 Répondre aux émissions lors de la création des étoffes et des produits
3.3 Faire du consommateur un acteur éclairé de la réduction de la pollution par les micro-plastiques
3.4 Répondre aux émissions lors de l?usage du produit
3.4.1 Les émissions lors des lavages des produits
3.4.2 Les émissions lors du port des produits
3.5 Répondre aux émissions lorsque le textile devient déchet
3.5.1 La collecte, le tri et les usages nouveaux (réemploi, réutilisation)
3.5.2 Les problèmes de pollution créés par l?exportation des déchets textiles européens et français
Conclusion
Annexes
Annexe 1. Lettre de mission
Annexe 2. Liste des personnes rencontrées
Annexe 3. Glossaire des sigles et acronymes
Annexe 4. Quelques chiffres sur la pollution plastique en général
(ATTENTION: OPTION ion-des-boues-
depuration-dans-lagriculture-Evaluation_fr
PUBLIÉ
https://aida.ineris.fr/node/25697/printable/pdf
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32020L2184
https://ec.europa.eu/info/law/better-regulation/have-your-say/initiatives/12328-Utilisation-des-boues-depuration-dans-lagriculture-Evaluation_fr
https://ec.europa.eu/info/law/better-regulation/have-your-say/initiatives/12328-Utilisation-des-boues-depuration-dans-lagriculture-Evaluation_fr
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 32/72
boues d?épuration est constituée de micro-plastiques 75 , cette évaluation conclut que cette
contamination ne peut être quantifiée à ce stade et renvoie la prise de décision à une meilleure
articulation avec la révision de la directive DERU qui est en cours76.
Concernant la pollution de l?air, les micro-plastiques sont totalement absents des normes
européennes77, même des actes en cours de révision. La règlementation des particules fines (PM10
et PM2,5) ne définit pas leur composition chimique et fait seulement référence à leur taille (particules
allant jusqu?à 10 microns ou 2,5 microns dans leur plus grande dimension). Les nano-plastiques
pourraient donc être intégrés dans cette catégorie. Néanmoins les microfibres semblent échapper
à ce cadre, d?une part, en raison de leurs dimensions, et d?autre part, parce qu?elles seraient surtout
présentes dans l?air ambiant intérieur, qui ne fait pas l?objet de textes européens actuellement.
2.1.4 Une règlementation sur l?exportation des déchets ne permettant pas
leur contrôle
Enfin, les déchets textiles ne font pas partie des produits exclus d?exportation78 et le contrôle
insuffisant des conditions dans lesquelles ils sont gérés dans les pays de destination, en particulier
dans les pays en développement, représente une lacune majeure de la règlementation actuelle.
En conséquence, l'exportation de certains déchets depuis l'UE a créé des problèmes
environnementaux et de santé publique dans les pays de destination. Le texte est lui aussi en cours
de révision afin de renforcer notamment l?autorisation d?accès aux pays tiers des exportations
susceptibles de causer des dommages environnementaux dans le pays importateur.
2.2 Les mesures adoptées en France sont insuffisantes
2.2.1 Une règlementation française centrée sur la REP et le recyclage qui
ne règle pas la pollution par les micro-plastiques textiles
Pour améliorer l?empreinte environnementale des textiles, les pouvoirs publics français ont adopté
des dispositions qui encouragent le recyclage79 et l?incorporation de matières recyclées dans les
étoffes mises sur le marché. Avant de les présenter, il convient de restituer le contexte de la
responsabilité élargie des producteurs, qui concerne également le secteur des textiles, linges de
maison et chaussures (TLC).
2.2.1.1 Le principe de la responsabilité élargie des producteurs et son application au
secteur du textile
La responsabilité élargie du producteur (REP) est une déclinaison à la fois du principe « pollueur-
payeur » posé par l?article 4 de la Charte de l?environnement mais aussi, depuis la loi AGEC, du
75 ?Microplastics removal from a primary settler tank in a wastewater treatment plant and estimations of
contamination onto European agricultural land via sewage sludge recycling, Environmental Pollution, Volume 304,
2022 https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0269749122004122
76 Au moment de l?écriture de ce rapport, la révision de la DERU est en cours d?examen par le conseil et le
Parlement européen. La poursuite de l?examen des textes est inscrite à l?agenda du 2nd semestre 2023.
77 https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:2ae4a0cc-55f8-11ed-92ed-
01aa75ed71a1.0001.02/DOC_3&format=PDF
78 Règlement sur l?exportation de déchets amendant les règlement 1257/2013 et 2020/1056 du 17/11/2021. Les
produits textiles sont listés B3030 et ne sont pas couvert par l?interdiction d?exportation, n?étant pas couverts par la
convention de Bâle.
79 L?article L. 541-1-1 du code de l?environnement définit ainsi le recyclage : « toute opération de valorisation par
laquelle les déchets, y compris les déchets organiques, sont retraités en substances, matières ou produits aux fins
de leur fonction initiale ou à d'autres fins. »
PUBLIÉ
https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0269749122004122
https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:2ae4a0cc-55f8-11ed-92ed-01aa75ed71a1.0001.02/DOC_3&format=PDF
https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:2ae4a0cc-55f8-11ed-92ed-01aa75ed71a1.0001.02/DOC_3&format=PDF
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 33/72
principe de prévention qui résulte de l?article 3 de la même Charte. Ce dispositif, initié en France
en 1992 pour les déchets ménagers et conforté au niveau de l?Union européenne par la directive
cadre sur les déchets de 2008 80 , prévoit en effet désormais que les acteurs économiques
(fabricants, distributeurs, importateurs, exportateurs) sont responsables de l?ensemble du cycle de
vie des produits qu?ils mettent sur le marché, de leur écoconception jusqu?à la fin de leur vie.
En pratique, dans chaque filière pour laquelle un mécanisme de REP a été instauré, ces acteurs
doivent assumer la charge financière de la collecte sélective puis du recyclage ou du traitement
des déchets issus de leur production. Ils peuvent le faire de façon individuelle ou collective dans le
cadre d'un éco-organisme. Dans ce dernier cas, ils adhèrent à une société agréée par les pouvoirs
publics à laquelle ils versent une contribution financière.
La loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et l?économie circulaire
dite « loi AGEC » a ajouté aux obligations préexistantes, celles d?adopter une démarche
d'écoconception des produits, de favoriser l'allongement de la durée de vie des produits, de
soutenir les réseaux de réemploi, de réutilisation et de réparation, de contribuer à des projets d'aide
au développement en matière de collecte et de traitement de leurs déchets et de développer le
recyclage des déchets issus des produits.
S?agissant du champ d?application du dispositif, la loi AGEC a étendu la REP en vigueur depuis
2008 pour les textiles d?habillement, des chaussures et le linge de maison (TLC), aux produits
textiles neufs pour la maison81.
La mission s?est demandée pourquoi les vêtements professionnels ou du moins certains d?entre
eux n?étaient pas soumis à la filière REP d?autant qu?ils incorporaient bien souvent des plastiques.
À la suite de réflexions engagées en 2014, le choix a été fait de susciter des projets volontaires de
la part des entreprises ou des administrations. La structuration d?une filière de réemploi / recyclage
industrielle des vêtements professionnels (projet "FRIVEP") a été l?un des quatre premiers
engagements pour la croissance verte, signé le 27 avril 2016. Cette démarche a notamment
débouché sur la rédaction d?un livret d?écoconception des vêtements professionnels en 202082.
L?éco-organisme qui assure les obligations des producteurs de déchets textiles s?ils le souhaitent
est Refashion (ex Eco TLC), agréé depuis 2019 et dont l?agrément a été renouvelé par arrêté du
23 décembre 2022. Un nouveau cahier des charges lui a été fixé par arrêté du 23 novembre 202383
quant à ses objectifs en matière de collecte et de valorisation des textiles usagés.
2.2.1.2 Une politique de recyclage qui ne répond pas à la pollution par les micro-
plastiques
Au sens de la loi française, le recyclage ne se traduit pas nécessairement par la fabrication du
produit pour le même usage. On distingue à cet égard, le recyclage en boucle fermée (même usage)
80 2008/98/CE du 19 novembre 2008
81 Art. L. 541-10-1 du code de l?environnement
82 « Livret d?écoconception des vêtements professionnels ; retours d?expériences du projet FRIVEP » réalisé par
OREE en juin 2020
83 Nouveaux objectifs :
? Taux de collecte des TLC usagés : 60% en 2028,
? TLC usagés triés devant être réemployés ou réutilisés : 120 000 tonnes en 2024,
? Taux de réutilisation / réemploi à moins de 1 500 km du lieu de collecte : 15% en 2027,
? Taux de recyclage des TLC usagés non réutilisées : 70% en 2024, 80% en 2027,
? Taux de recyclage des TLC usagés intégrant au moins 90% de matières synthétiques plastiques non
réutilisées : 50% en 2025, 90% en 2027,
? Au plus 0,5 % des TLC collectés ou soutenus sont éliminés (stockage, incinération sans valorisation éner-
gétique).
Source : site du ministère de la transition écologique
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 34/72
du recyclage en boucle ouverte (destination différente à la suite d?altération des propriétés du
plastique). D?ailleurs l?article R. 541-221 du code de l?environnement définit la recyclabilité comme
la capacité de recyclage effective des déchets issus de produits identiques ou similaires. Si la
matière recyclée issue du recyclage représente plus de 95% du déchet collecté, le produit peut
porter la mention « produit entièrement recyclable ». En tout cas, cette part doit être supérieure ou
égale à 50% de la masse du déchet collecté. Si l?usage et la destination du produit recyclé sont
identiques et sans perte fonctionnelle, l?information peut indiquer « produit recyclable en un produit
de même nature ».
Des sommes considérables sont investies dans la politique de recyclage du textile, notamment
dans la recherche appliquée. Cette politique est à vrai dire en ligne avec les objectifs de l?UE en
matière de recyclage des plastiques.
Techniques de recyclage des plastiques
On distingue le recyclage mécanique et le recyclage chimique.
Le recyclage mécanique conduit à broyer, laver, retrier, extruder puis transformer en granulés des polymères
homogènes sans que soit modifiée leur structure.
Le recyclage chimique englobe toute technologie de retraitement utilisant des agents ou des procédés chimiques
qui affectent directement le plastique ou le polymère lui-même. Trois grandes familles de technologie existent : la
purification à l?aide de solvants, la dépolymérisation, la dépolymérisation thermique
L?OPESCT considère que « la filière mondiale du recyclage chimique est toujours en phase de test ». La France
compterait 13 projets de recyclage chimique.
Source : note n°39 de l?Office parlementaire d?évaluation des choix scientifiques et techniques (OPECST) « Le
recyclage des plastiques » juin 2023
Les autorités françaises ont mis en place des mesures incitatives pour encourager le recyclage.
a) des objectifs particulièrement ambitieux sont assignés à Refashion qui peut les traduire via des
éco-modulations.
Ces objectifs de recyclage de plus de 50% des TLC usagés sont à comparer aux 32% du taux de
recyclage constaté en 2021. En trois ans, ce taux doit plus que doubler, surtout lorsque les produits
d?origine intègrent beaucoup de plastiques. Pour l?atteindre, l?éco-organisme Refashion va devoir
inciter les producteurs, importateurs et distributeurs par tous les outils mis à sa disposition et
notamment les éco-modulations.
Les éco-modulations
L?article L. 541-10-3 du code de l?environnement permet des modulations des contributions financières des
producteurs, sous forme de primes ou de pénalités, au regard des meilleures techniques disponibles en fonction
de critères de performance environnementale (notamment la quantité de matière utilisée, l?incorporation de matière
recyclée, l?emploi de ressources renouvelables gérées durablement, la durabilité, la réparabilité, les possibilités de
réemploi ou de réutilisation, la recyclabilité, l?absence d?écotoxicité).
Les éco-modulations sont soumises pour avis au comité des parties prenantes84, prévu par l?article L. 541-10 du
code de l?environnement, puis sont arrêtées par le ministre chargé de l?environnement après avis de la commission
interfilière. L?éco-modulation ne doit pas dépasser 20% du montant du prix de vente du produit.
Le cahier des charges prévoit des éco-modulations positives ou négatives en fonction du respect de l?affichage
environnemental quand il sera en vigueur et de la recyclabilité des TLC après production d?une étude.
84 Selon l?article L. 541-10, chaque éco-organisme crée un comité des parties prenantes, composé notamment de
producteurs, de représentants de collectivités territoriales, d?associations de protection de l?environnement agréées,
d?association de protection des consommateurs ainsi que d?opérateurs de la prévention et de la gestion des déchets,
dont ceux de l?économie sociale et solidaire
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 35/72
Mais, actuellement, seules des éco-modulations positives sont versées sous forme de primes aux producteurs de
déchets en fonction de la durabilité des TLC, des certifications par des labels environnementaux (huit sont
sélectionnées par l?arrêté85 mais l?éco-organisme peut en proposer d?autres après avis du comité des parties
prenantes) et de la quantité de matières recyclées dans les produits.
b) des obligations d?étiquetage :
L?article L. 541-9-1 du code de l?environnement et son décret d?application86 prévoient, selon un
calendrier échelonné en fonction de la taille des entreprises et de leurs ventes87, que les textiles
d?habillement et linge de maison neufs comportant des matières recyclées devront mentionner
cette composition (R. 541-221- III) et qu?ils devront également indiquer leur recyclabilité (R. 541-
221-VI) en signalant s?ils sont majoritairement ou entièrement recyclables (recyclables à plus de
95%) ou encore « recyclable en un produit de même nature » ; cette obligation ne pèse que si cinq
critères88 qui définissent la recyclabilité sont tous remplis.
Sur ce dernier point, Refashion a fait savoir à ses adhérents qu?il considérait qu?aucun d?entre eux
n?était à ce jour soumis à l?obligation d?informer les consommateurs car les cinq critères
précédemment évoqués n?étaient pas tous réunis. En effet, cet éco-organisme considère que la
filière REP TLC est tournée depuis son origine vers la réutilisation des produits, en application de
la hiérarchie des modes de traitement des déchets inscrite à l?article L. 541-1 du code de
l?environnement et qu?ainsi elle ne dispose pas des capacités de recyclage suffisantes pour
répondre au 5ème critère. En 2021, le taux de réutilisation des déchets TLC atteignait 58% et
le recyclage 32%. Refashion s?engage en revanche à réévaluer régulièrement la recyclabilité
des produits TLC en fonction de l?évolution de la filière à plus et mieux recycler.
c) Les plans de prévention et d?écoconception :
L?article L. 541-10-12 du code de l?environnement, auquel sont soumis tous les producteurs de
déchets, leur impose d?établir tous les cinq ans un plan de prévention et d?écoconception. Qu?ils
soient individuels ou communs à plusieurs entreprises, ils doivent nécessairement comporter des
chapitres expliquant comment ils comptent réduire l?usage des ressources non renouvelables,
accroitre l?utilisation de matières recyclées et la recyclabilité des produits. Dans le secteur des TLC,
ils devaient être transmis à Refashion (même si l?entreprise n?est pas adhérente) avant le 31 juillet
2023 qui doit en faire une synthèse à la fin de l?année. L?éco-organisme met en ligne des outils
pour aider les entreprises à remplir cette nouvelle obligation (guide de rédaction, trame vierge et
pré-remplie avec des exemples d?indicateurs et d?objectifs).
En premier lieu, la mission souligne là encore la priorité accordée au recyclage. Par ailleurs,
l?objectif de réduction des ressources non renouvelables n?est pas détaillé.
85 Ecocert textile, Oeko-tex, Made in Green, Bluesign, Fairtrade, Ecolabel Européen, Demeter, GOTS et Bioré
86 Décret n° 2022-748 du 29 avril 2022 qui a créé les articles R. 541-220 à 223 du code de l?environnement
87 À compter du 1er janvier 2023 pour les entreprises dont le chiffre d?affaires dépasse 50 M ¤ et qui mettent
chaque année plus de 25 000 unités, du 1er janvier 2024 pour celles pour lesquelles ces données sont supérieures
respectivement à 20M¤ et 10 000 unités, et du 1er janvier 2025 pour celles pour lesquelles elles sont supérieures
à 10M¤ et 10 000 unités,
88 Les 5 critères sont les suivants :
« 1° La capacité à être efficacement collecté à l?échelle du territoire, via l?accès de la population à des points de
collecte de proximité ;
2° La capacité à être trié, c?est-à-dire orienté vers les filières de recyclage afin d?être recyclé ;
3° L?absence d?éléments ou substances perturbant le tri, le recyclage ou limitant l?utilisation de la matière recyclée ;
4° La capacité à ce que la matière recyclée produite par les processus de recyclage mis en oeuvre représente plus
de 50 % en masse du déchet collecté ;
5° La capacité à être recyclé à l?échelle industrielle et en pratique, notamment via une garantie que la qualité
de la matière recyclée obtenue est suffisante pour garantir la pérennité des débouchés, et à ce que la filière
de recyclage puisse justifier d?une bonne capacité de prise en charge des produits pouvant s?y intégrer ».
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 36/72
En second lieu, elle considère, qu?en l?état des connaissances, le recyclage n?est pas une solution
au problème de la pollution micro-plastique puisque, a priori, rien ne permet de penser que les
textiles issus du recyclage sont moins émetteurs de micro-plastiques que le textile d?origine.
Tout d?abord, la pollution par les micro-plastiques en provenance des plastiques recyclés et des
opérations de recyclage n?est pas connue. La mission n?a pas connaissance de recherches sur ces
sujets pourtant essentiels compte tenu des objectifs de recyclage que notre pays poursuit.
L?OPESCT relève seulement que le laboratoire national de métrologie propose de mettre en place
un observatoire national sur les matériaux recyclés afin d?évaluer les risques émergents liés au
développement du recyclage89.
En absence de données sur cette question, la mission postule que le relargage de micro-plastiques
par des étoffes produites à partir de plastiques recyclés, qu?ils proviennent de bouteilles ou de
jeans, est identique à celui des produits composés de plastiques qui ont subi des opérations de
recyclage. Autrement dit, au mieux, le problème ne fait que perdurer. Il peut aussi être amplifié tout
au long du cycle de vie de la nouvelle étoffe.
Ensuite, des limites techniques demeurent : seuls quelques textiles peuvent être recyclés à
l?identique et pendant un temps limité. Le reste subit des déclassements progressifs. Dans ces
conditions, l?OPECST estime que le recyclage n?est qu?un « amortisseur temporel de la formation
des déchets, sans les éviter ». Nathalie Gontard fait la même analyse90. En outre, elle souligne
que « les industries de la mode (?) proposent de nouvelles fibres textiles en plastique recyclé pour
remplacer les fibres vierges ou naturelles ».
Enfin et ce n?est pas la moindre des observations, l?accent trop important mis sur le recyclage ne
respecte pas la hiérarchie des modes de traitement des déchets, qui devrait pourtant être la
boussole des politiques publiques en application de l?article 4 de la directive cadre déchets 2008/98
transposé à l?article L. 541-1 du code de l?environnement en France. Cet article donne la priorité à
la prévention et à la réduction des déchets notamment via la conception et les actions en faveur
du réemploi des produits. Ensuite, lorsque les déchets sont inévitables, il privilégie dans l?ordre : la
préparation à leur réutilisation, leur recyclage, toute autre valorisation, enfin seulement leur
élimination.
2.2.2 La loi AGEC tente d?apporter une solution avec l?équipement
obligatoire de filtres à micro-plastiques dans les lave-linges
La loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et l?économie circulaire,
dite « loi AGEC », comporte de nombreuses dispositions relatives à la lutte contre la pollution
plastique, notamment les micro-plastiques. Son article 79, modifié depuis par l?article 47 de la loi
n° 2021-1104 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à
ses effets, dite « loi Climat et Résilience », prévoit qu?à compter du 1er janvier 2025 les lave-linges
neufs domestiques ou professionnels vendus en France seront dotés d?un filtre à microfibres de
plastique ou de toute autre solution interne ou externe permettant leur captation. L?entrée en
vigueur de cette disposition est conditionnée à la publication des textes réglementaires qui en
fixeront les modalités d?application. Ces projets sont en cours de rédaction à la date de rédaction
du présent rapport.
Cette mesure nécessite le développement par le secteur industriel de l?électroménager, qui n?est
pourtant pas le pollueur au sens de l?application du principe pollueur-payeur ou du dispositif de
REP, de tels produits.
89 « Le recyclage des plastiques », Note scientifique de l?OPESCT de juin 2023
90 « Plastique : le grand emballement » page 155, Nathalie Gontard avec Hélène Seinglier : édition Stock, 2020
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 37/72
À ce stade, le marché ne compte que deux machines à laver le linge domestiques ainsi équipées.
Le groupe Arcelik met sur le marché deux produits ? l?un sous la marque Beko® qui a créé le
produit et l?autre sous la marque Grundig® - équipés d?un « Fibercatcher », un filtre intégré dans
une cartouche située à l?arrière du bac à lessive. La technologie ne s?active que sur le programme
synthétique, car sinon les microfibres naturelles de coton également relarguées lors des lavages
la rendraient inopérante. Le circuit d?évacuation de l?eau a été repensé pour que l?eau repasse par
le bac à lessive et donc le filtre avant d?être rejetée. La technologie « Fibercatcher » capturerait
« jusqu?à 90 % des microfibres plastiques émises lors du cycle de lavage ». La cartouche se
change tous les 6 mois environ (en fonction du nombre de cycles dédiés au lavage synthétique) :
elle coûte 19,99 euros, est fabriquée à partir de 98 % de plastique recyclé. Ces lave-linges sont
vendus entre 599 et 699 euros91.
La marque Electrolux® a fait un autre choix et propose un filtre externe qui s?adapte à toutes ses
machines à laver le linge et s?installe sur le mur au niveau de la sortie d?eau de la machine. Le prix
est similaire, machine et filtre, la promesse de captation est également de 90% de microparticules
de plus de 45 microns. Le filtre seul coûte 79,90 euros et doit être nettoyé en rejetant les résidus
dans la poubelle classique lorsque le voyant s?allume ; sa cartouche doit toutefois être changée
tous les 6 mois environ, en fonction de la fréquence des cycles dédiés au lavage des vêtements
synthétiques. Le kit Electrolux Filtre Micro-plastiques E9WHMIC1 est livré avec deux cartouches
filtrantes, soit environ un an de lavages (en fonction des habitudes) avant le rachat d?une recharge
de cartouches filtrantes, vendues par deux.
D?autres produits sont également disponibles sur le marché mais ne sont pas proposés par les
fabricants de lave-linges : autres types de filtres externes et sacs de lavage.
On notera que tous ces produits nécessitent, au-delà de l?acte d?achat, un comportement volontaire
de la part du ménage utilisateur, du lancement du bon programme, avec le regroupement du textile
synthétique, au vidage/nettoyage/échange du filtre.
L?industrie du secteur des lave-linges est mobilisée sur cet enjeu depuis l?adoption de la loi AGEC
et du règlement européen prévoyant une modification en 2025 des règles d?écoconception des
machines à laver le linge. Regroupée au sein d?APPLIA92, elle a réalisé une étude en 2020 confiée
à RISE (Research Institute of Sweden)93 qui évalue le nombre de fibres micro-plastiques issues du
lavage en machine dans l?Union européenne de 20 à 500 mg de microfibres de polyester issus
des textiles, relâchées entre le 2ème et le 5ème lavage. En prenant comme hypothèses un nombre
d?habitants de l?UE + UK de 513 M d?habitants, lavant 265 kg de linge par personne et par an dont
55% de textiles synthétiques, l?étude arrive à une émission de 15 000 tonnes de fibres émises par
an après filtrage par les stations d?épuration qui sont supposées capter 90% des fibres mais ne
traitent pas 10% des flux.
91 Sachant qu?un lave-linge premier prix (capacité de 5kg) a un prix aux alentours de 200 euros mais qu?un lave-
linge de 9kg de classe énergétique A sans filtre atteint 600 euros.
92 APPLIA (Home Appliance for Europe) ? Représente les fabricants d?électroménager européen (Arcelik, Ariston,
BSH, Candy, Daikin, De Longhi, Dyson, Electrolux, Groupe Atlantic, Gorenje, LG, Liebherr, Miele, Philips,
Panasonic, Samsung, Seb, Smeg, Vestel, Vorwerk, Whirlpool).
93 RISE est un institut de recherche suédois impliqué dans les projets de recherche sur les micro-plastiques lancés
par le gouvernement de la Suède.
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 38/72
Figure 11 : Nombre de fibres émises avec inclusion du 1er lavage (source : APLLIA)94
Néanmoins, en raison de l?absence à ce stade de méthodologie unifiée validée, l?industrie
considère que des études supplémentaires sont nécessaires pour évaluer la capacité de captation
des filtres, et même le niveau d?émission des fibres synthétiques. De nombreux facteurs entrent
en ligne de compte : type de machine (domestique, laboratoire, commerciale), nombre de lavages,
nature du filtre qui collecte les microparticules, lavage de la machine entre les tests, type d?étoffe
(polymère mais aussi méthode de tissage/tricotage, type de fil, existence d?un prétraitement),
température de lavage et type de détergent utilisé, quantité d?eau, etc. Elle reconnait néanmoins
des tendances :
? la majorité des microparticules sont émises lors des premiers lavages jusqu?aux cycles 5 à
10 ;
? la température accroit le nombre de particules émises, ainsi que l?utilisation de détergent ;
? la finesse des mailles de captation des filtres est déterminante ; dans une étude menée en
2016 par des chercheurs de la Plymouth University, la taille moyenne des fibres récoltées
était comprise entre 11,9 et 17,7 microns de diamètre ; autrement dit, une grande part de
ces microplastiques seraient passés à travers les mailles du filtre Electrolux® ;
? les tests en laboratoire et ceux dans des machines commerciales sont tout autant valables,
mais des conclusions sont difficiles à retirer des tests en laboratoire par rapport aux impacts
sur les vêtements dans la vie réelle des produits.
Il apparait donc que l?équipement obligatoire des lave-linges en filtres ne peut régler à lui seul la
question de la pollution aux micro-plastiques pour les raisons suivantes :
elle ne permet pas la captation de l?ensemble des fibres émises ;
elle arrive à un stade avancé du cycle de vie du textile alors que les émissions les plus
importantes interviennent lors de la fabrication et de la teinture des produits ;
elle doit s?accompagner de la mise en place de procédés de traitements des résidus filtrés
par les lave-linges et d?acteurs économiques en capacité de les prendre en charge ;
son efficacité repose sur le respect par les particuliers d?un certain nombre de consignes,
tout à fait nouvelles pour eux (récupérer les résidus et les déposer à certains endroits ou
envoyer le filtre régulièrement à des entreprises qui le laveront et le retourneront aux
usagers, voire, au regard des produits actuellement sur le marché, nettoyage du filtre
externe), étant souligné que seuls les acquéreurs de nouvelles machines à laver le linge
seront concernés.
94 Littérature review ? Microplastic emissions from textile laundry including emission scenarios for EU ?
08/10/2020 ? R. Landin, K. Jedvert, AC Hanning, A. Hakonen
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 39/72
Enfin, cette disposition soulève des questions vis-à-vis du droit de l?Union européenne. En premier
lieu, on peut s?interroger sur sa conformité à l?article 34 du Traité sur le fonctionnement de l?UE
(TFUE) qui prohibe les mesures équivalentes à une restriction de la libre circulation des
marchandises au sein de l?Union. Cette interdiction est néanmoins levée si la mesure peut être
regardée comme une exigence impérative d?intérêt général, nécessaire et proportionnée (art 36 du
TFUE95). Toutefois, les observations précédentes conduisent à se demander si la Cour de justice
considérerait qu?une telle exigence peut être en l?espèce reconnue. L?appréciation portée sur cette
proportionnalité devra tenir compte des éléments qui figureront dans la communication de la
Commission européenne attendue sur les micro-plastiques et notamment le maintien d?un objectif
de révision du règlement écoconception des machines à laver le linge dès 2025. Et encore faudrait-
il que cette révision soit acceptée par une majorité d?États membres. En tout état de cause, elle ne
pourrait sans doute pas intervenir avant la fin de l?année 2027.
Malgré toutes les difficultés et sous les réserves exposées précédemment, le filtre à particules
micro-plastiques, interne ou externe aux lave-linges, peut constituer une des mesures permettant
de réduire la pollution résultant des micro-plastiques d?origine textile. Elle pourrait devenir effective
progressivement, au fur et à mesure du renouvellement du parc de lave-linges des particuliers.
Néanmoins, il conviendrait, pour éviter tout contentieux, que l?échéance prévue par l?article 79 de
la loi AGEC soit repoussée, voire que la disposition soit réécrite, en adaptant le dispositif français
aux futures dispositions européennes.
2.2.3 La captation des micro-plastiques textiles dans les boues des
stations d?épuration
L?article L. 541-38 du code de l?environnement, modifié par la loi AGEC, prévoit que les référentiels
des boues d?épurations doivent au plus tard le 1er juillet 2021 prendre en compte les « particules
de plastiques » en fonction de l?évolution des connaissances. Les textes d?application96 permettant
la mise en oeuvre de ces dispositions sont en cours d?écriture par les services de l?État (ministère
de l?agriculture, avec le ministère de la transition écologique). Les projets de décret et d?arrêté ?
qui vont entrer en consultation dans le courant du second semestre 2023 - prévoient effectivement
une « teneur maximale en inertes et impuretés » dans lesquelles figurent les micro-plastiques
d?une taille supérieure à 2 mm97.
Comme indiqué précédemment, la révision en cours de la directive DERU va imposer la réalisation
de telles évaluations.
Les questions posées ici sont de deux ordres :
? Quels pourcentages de microparticules sont effectivement captées lors du traitement des
eaux usées ?
? Quelles quantités de micro-plastiques sont ensuite transférés dans les sols via l?épandage
des boues d?épuration des stations ?
95 Voir l?interprétation par la CJUE de l?article 36 du TFUE : CJUE, 11 septembre 2014, Essent Belgium, C-204/12
à C-208/12, pt. 90 ; CJCE, 20 septembre 1988, Commission c. Royaume de Danemark, C-302/86, pt. 9 ainsi que
CJUE, 23 décembre 2015, Scotch Whisky Association, C-333/14, pt. 53.
96 L?article 86 de la loi AGEC prévoyait la révision des textes réglementaires applicables à l?épandage des boues
d?épuration urbaines et industrielles, au plus tard le 1er juillet 2021, afin de mettre sur un pied d?égalité toutes les
matières fertilisantes et supports de culture (MFSC), en fixant des critères de qualité agronomique et d?innocuité,
« afin de s?assurer que leur mise sur le marché et leur utilisation ne portent pas atteinte à la santé et à
l?environnement ». À partir de cette date, les MFSC ne respectant pas les nouveaux textes, n?auraient pu être
valorisées en agriculture.
97 Projet : teneur maximale en plastique de +2 mm = 3 g/kg de matière sèche
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 40/72
Concernant la captation des microparticules de plastique par les stations d?épuration, la littérature
scientifique estime que les stations d?épuration actuelles (à l?échelle mondiale) en retirent, lors du
traitement des eaux usées, entre 58,8 et 99,9%98, et que 79% des micro-plastiques entrant dans
la station d?épuration finissent dans les boues ou encore que l?on compte entre 1 000 et 300 000
microparticules de plastique dans 1kg de boues d?épuration. La littérature scientifique met
également en avant le fait qu?en sus d?être une pollution en soi, les micro-plastiques sont également
le véhicule potentiel d?autres contaminants (métaux lourds, bactéries, produits pharmaceutiques)
qui sont transférés dans les sols et impactent leur qualité en tant qu?écosystème.
De nouvelles technologies existent permettant de retirer jusqu?à plus de 98% des micro-plastiques
présents dans les eaux usées en combinant des techniques conventionnelles de boues activées
et un traitement par bioréacteur à membrane. Elles sont proposées par l?ensemble des industriels
de la filière de traitement des eaux usées.
Bioréacteur à membrane
Un bioréacteur à membrane (BRM) est une technologie utilisée dans une station d?épuration pour améliorer la
qualité de l?eau rejetée : elle fait usage de membranes de microfiltration ou d?ultrafiltration pour séparer l?eau traitée
des flocs bactériens. Ces membranes ont une porosité inférieure à 0,1 µm et séparent toutes les bactéries et
matières en suspension de l?eau épurée. Le module membranaire peut être immergé dans le bassin biologique ou
placé à l?extérieur du bassin biologique.
Les installations BRM sont généralement plus chères et consomment plus d?énergie que les stations d?épuration
classiques. Leur gros avantage réside dans la très bonne qualité de leurs effluents.
Différents types de membranes sont disponibles en fonction de la taille de l?installation et du type d?eau usée.
En remplaçant l'étape traditionnelle de clarification gravitaire, la séparation membranaire supprime les contraintes
liées à la décantation des boues : la qualité de rejet est donc parfaitement maîtrisée.
Les problèmes posés par cette évolution technologique, qui permettrait la captation de la plupart
des micro-plastiques, sont en premier lieu son prix et son calendrier de mise en oeuvre : elle
implique en effet un équipement du parc national de stations d?épuration qui prendra du temps et
aura un coût important, alors que la France est aujourd?hui déjà confrontée à un non-respect des
obligations relatives à la directive eaux résiduaires urbaines (cf. rapport IGEDD 014474-0199 ).
Actuellement, un nombre réduit de stations d?épuration (il s?agit en général de celles qui rejettent
leurs effluents en zone sensible), ont été équipées de ce type d?installation. Cette technologie
entraine par ailleurs un surcoût énergétique de fonctionnement.
Les stations d?épuration en France
En 2020, la France compte 22 331 usines de traitement des eaux usées représentant une capacité totale de
105 000 000 équivalent-habitants (EH).
Les STEU délivrant au moins un traitement secondaire représentent 96 % de la capacité totale des installations en
activité en France et celles assurant un traitement encore plus rigoureux couvrent 80 % de cette capacité totale.
Le besoin de renouvellement annuel nécessaire pour maintenir la valeur du patrimoine d?assainissement est estimé
entre 3,9 et 5,7 millions d?euros. Ce patrimoine ferait l?objet d?un sous-investissement, principalement dans le
réseau, les postes de refoulement et les branchements, de l?ordre de 1,4 Mds/an. Cette évaluation ne prend pas
en compte les nouveaux besoins (investissements eaux pluviales, lutte contre les micropolluants et les micro-
plastiques).
98 ?Microplastic contamination in sewage sludge: Abundance, characteristics, and impacts on the environment and
human health? - Environmental Technology & Innovation 31 (2023) 103176 ? 23 avril 2023
99 https://www.igedd.developpement-durable.gouv.fr/comment-ameliorer-durablement-la-collecte-et-le-
a3734.html
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 41/72
Source :
UIE - Étude patrimoniale eau Rapport 2022
Service des données et études statistiques du ministère de la transition écologique, 2020
Mais surtout, la mise en oeuvre du concept d?économie circulaire implique que les boues
d?épuration soient utilisées au maximum de leurs capacités pour produire de l?énergie ou des
produits annexes (matériaux de construction, engrais, source d?énergie pour la production de
biogaz ou d?énergie à travers l?incinération). En France, 80% des boues d?épuration produites
sont épandues dans les champs. Or l?usage des boues d?épuration comme engrais agricole
conduit à répandre dans les sols des micro-plastiques, cette méthode devenant ainsi sans doute
l?une des principales sources de contamination des sols par les micro-plastiques.
Il en découle donc que, quand bien même l?ensemble des stations d?épuration seraient équipées
de bioréacteurs membranaires d?ici 15 ans, les micro-plastiques captés dans les boues poseraient
toujours le problème de leur gestion finale. Si l?épandage venait à être remis en cause pour être
remplacé par une élimination des boues par incinération, les volumes de boues à traiter
nécessiterait l?équipement des collectivités en incinérateurs, et donc de nouvelles dépenses
publiques. Par ailleurs, des études indiquent que l?incinération des boues peut également être
source de diffusion de micro/nano-plastiques dans l?air.
Il convient enfin de rappeler qu?une partie des micro-plastiques restent véhiculés par les eaux
pluviales (pneus et peintures routières) qui ne font pas l?objet de traitement dans les collectivités
équipées de réseaux séparatifs.
En conclusion sur ce point, la mission considère que l?utilisation des boues d?épuration comme
fertilisant dans les champs agricoles devrait faire l?objet d?un examen plus poussé afin de minimiser
les risques pour la santé humaine et les écosystèmes. Il convient de rappeler ici que l?épandage
des boues d?épuration urbaines et industrielles ne représente que 12 à 13% des épandages en
général100. L?arrêt ou la réduction de l?épandage des boues d?épuration sera donc principalement
un problème de gestion desdites boues dont le principal usage final serait modifié101.
2.2.4 Les mesures qui prolongent la durée de vie des textiles ralentissent
la pollution
Face à des étoffes composées en tout ou partie de polymères dont les émissions sont
principalement réalisées en début de cycle de vie, retarder leur fin de vie, et la gérer car elle est
susceptible à nouveau de générer de nombreux micro-plastiques dans l?eau, dans l?air, dans le sol,
peut apparaitre comme une solution, qui en plus s?inscrit dans la politique nationale et européenne
de développement de réduction de l?impact environnemental de la filière textile. À cet égard la
prohibition de l?élimination des invendus est une mesure contraignante intéressante aux yeux de
la mission. De même, les dispositifs encourageant la réparation, le réemploi et la réutilisation.
2.2.4.1 L?interdiction de l?élimination des invendus, une mesure forte
La part des invendus parmi les textiles mis en vente est estimée entre 10% et 20%102. Pour une
entreprise donnée, elle varie notamment en fonction de la gestion des volumes produits ou la
fréquence des collections.
Depuis le 1er janvier 2022, en application de l?article L. 541-15-8 du code de l?environnement, les
100 Les épandages sur terres agricoles des matières fertilisantes d'origine résiduaire ? CGEDD-CGAER 2015
https://agriculture.gouv.fr/sites/default/files/cgaaer_14074_2015_rapport.pdf
101 Entre 43% et 76% si on additionne épandage et compostage.
102 Rapport d?Eunomia « Scoping study to assess the feasibility of further EU measures on waste prevention »
publié en 2022
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 42/72
producteurs, importateurs et distributeurs notamment de produits textiles 103 sont tenus de
réemployer, y compris par le don104 à des associations caritatives ou à des structures de l?économie
sociale et solidaire dans le cadre de convention de dons, de réutiliser ou de recycler les invendus.
Refashion engage ses adhérents à repenser la structuration de leurs collections, par exemple en
augmentant la part des intemporels, à créer des produits au plus près des attentes des
consommateurs, à tester de nouvelles lignes, à minimiser les stocks, à faire des soldes attractives.
Il leur suggère également de créer des espaces de ventes de « seconde main » qui pourront
intégrer les invendus.
Tout en évitant la destruction des produits non vendus, cette mesure devrait inciter les producteurs,
importateurs et distributeurs à mieux calibrer leurs productions et leurs stocks. Elle sera, de plus,
désormais appuyée par la règlementation européenne qui va imposer la même obligation à
l?échelle de l?Union européenne (voir 2.1).
2.2.4.2 Le cahier des charges de Refashion lui impose de promouvoir la réparation, le
réemploi et la réutilisation
Comme indiqué en 2.2.1.2, le cahier des charges de l?éco-organisme prévoit des éco-modulations
en fonction de la durabilité des produits TLC105. La durabilité est notamment appréciée, par type
de textile, au regard de la résistance aux lavages, de la résistance aux abrasions, des glissements
de fils aux coutures, du boulochage.
La durabilité est par ailleurs encouragée via un fond dédié au financement de la réparation.
L?objectif est d?augmenter le nombre de réparations hors garantie de 35% en 2028 par rapport à
2019. Le fond doté de 44M¤ financera notamment les dépenses liées aux réparations réalisées
par des acteurs labélisés par l?éco-organisme. Le 11 juillet 2023, la secrétaire d?État à l?écologie, a
ainsi annoncé qu?à partir du mois d?octobre 2023, les consommateurs pourront percevoir un bonus
allant de 6 à 25 euros par réparation.
Autres leviers indirects pour limiter la production de textiles synthétiques, des objectifs de
réutilisation et de réemploi106 des TLC ont été fixés à Refashion : 120 000 tonnes de TLC usagés
doivent être réutilisés ou réemployé chaque année à compter de 2024. Un fond soutient de telles
opérations dès lors qu?elles interviennent à une distance inférieure à 1 500 km du lieu de collecte
des TLC.
2.2.5 La lente émergence d?une information des consommateurs et de
l?écoconception
2.2.5.1 De l?encadrement des allégations environnementales vers l?étiquetage
obligatoire
Avant la loi AGEC, les allégations environnementales étaient seulement soumises à la
réglementation sur la publicité trompeuse et les pratiques commerciales déloyales (Directive
2005/29/CE et articles L. 121-1 et suivants du code de la consommation). Mais des mesures
103 Cette obligation n?entre en oeuvre qu?à compter du 1er janvier 2024 pour les textiles neufs pour la maison.
104 Ce don permet de bénéficier d?une réduction fiscale
105 Voir l?annexe III du cahier des charges
106 L?article L 541-1-1 du code de l?environnement définit ainsi le réemploi et la réutilisation :
« Réemploi : toute opération par laquelle des substances, matières ou produits qui ne sont pas des déchets sont
utilisés de nouveau pour un usage identique à celui pour lequel ils avaient été conçus ; »
« Réutilisation : toute opération par laquelle des substances, matières ou produits qui sont devenus des déchets
sont utilisés de nouveau ; »
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 43/72
volontaires les concernant avaient été prises par le monde de la publicité : le guide du Conseil
national de la consommation sur les allégations environnementales (guide de 2010 réactualisé en
2023) et la « Recommandation développement durable » de l?autorité de régulation professionnelle
de la publicité (la version en ligne date d?août 2020). Ces deux types d?auto encadrement visaient
toutes les activités économiques.
Outre des mentions obligatoires sur l?intégration de matières recyclées et sur la recyclabilité des
fibres mentionnées au 2.2.2.1, le décret n° 2022-748 a prévu que les textiles d?habillement et linge
de maison neufs devront indiquer le pays où s?effectuent le tissage, la teinture et l?impression ainsi
que la confection et que ceux qui sont composés de plus de 50% de fibres synthétiques
comportent la mention « rejette des microfibres plastiques dans l?environnement lors du
lavage ».
Néanmoins, l?enquête faite par les rapporteuses auprès du secteur a démontré que seules
quelques marques appliquent cette règle dans les délais impartis.
La mission s?est demandée si la très forte délocalisation de la fabrication des textiles évoquée au
1.3.3.1 ne pouvait pas expliquer la difficulté de déploiement des nouvelles règlementations sur
l?étiquetage. En effet, des entreprises interrogées ont expliqué à la mission que leurs produits
arrivaient en France cintrés et étiquetés, prêts à être exposés en magasins. Il conviendra donc de
s?assurer que cette disposition est bien mise en oeuvre.
2.2.5.2 L?affichage environnemental devrait « valoriser » le risque de pollution par les
microparticules de plastique
D?abord prévu par l?article 15 de la loi AGEC107, l?affichage environnemental est désormais régi par
l?article 2 de la loi Climat et Résilience. Il ne s?agit pas comme pour l?étiquetage environnemental
de préciser certaines caractéristiques environnementales des produits. L?affichage
environnemental vise d?une part, à « communiquer une information précise et transparente au
consommateur pour qu?il puisse faire des choix en connaissance de cause », d?autre part, à
« encourager les producteurs à concevoir de manière plus responsable leurs produits », enfin à
« réduire l?impact environnemental de l?industrie de la mode » (Communiqué de presse de la
secrétaire d?État à l?écologie le 21 mars 2023).
Le secteur du textile connait des démarches d?affichage environnemental depuis 2010 et de
nombreux travaux ont été menés permettant de constituer un socle technique (référentiel BPX 30-
323). Quatre entreprises ont été volontaires pour tester des projets de pré-déploiement de cet
affichage de 2017 à 2020.
La loi AGEC a poursuivi et officialisé cette démarche expérimentale en prévoyant des
expérimentations pendant 18 mois, le dispositif devant être rendu obligatoire après l?entrée en
vigueur de dispositions européennes ayant le même objectif.
Ces expérimentations ont été prolongées, pour une durée maximale de cinq ans, par les
dispositions du II de l?article 2 de la loi Climat et Résilience. Elles devaient débuter notamment par
le secteur du textile d?habillement. À la différence de la loi AGEC, la loi Climat et Résilience prévoit
qu?à l?issue de ces expérimentations et après évaluation de celles-ci, l?affichage environnemental
sera rendu obligatoire par décret, prioritairement dans le secteur du textile d?habillement.
Un premier bilan de l?expérimentation de l?affichage environnemental pour les textiles d?habillement
et les chaussures a été dressé par un rapport au Parlement108, déposé en mars 2022 en application
107 Abrogé par le V de l?article 2 de la loi Climat et Résilience
108 Rapport au Parlement sur le bilan de l?expérimentation affichage environnemental textiles d?habillement et
chaussures de la loi Anti-Gaspillage pour une Economie Circulaire, article 15, Mars 2022
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 44/72
de l?article 15 de la loi AGEC. Il précise qu?environ 160 organisations s?étaient manifestées en 2020
auprès de l?ADEME pour participer à l?expérimentation mais que le nombre d?entreprises ayant
réellement mis en place des expérimentations, précisément inconnu, peut être estimé à une dizaine.
Le rapport explique cette désaffection in itinere par les difficultés liées à la crise COVID, un certain
nombre d?incompréhensions des objectifs de cette expérimentation, notamment le positionnement
par rapport aux travaux européens, l?absence de « certaines données cruciales » dans la base
Impact de l?ADEME, l?absence d?échelles de notation commune. Il souligne que, pour la plupart
des acteurs, le référentiel doit être complété mais qu?il n?y a pas de consensus entre eux sur les
choix à faire.
Il signale que sur la base de ces premiers enseignements et compte tenu du nouveau cadre posé
par la loi Climat et Résilience, une nouvelle phase d?expérimentation a été lancée en juillet 2021
avec une gouvernance et des méthodes renouvelées.
C?est ainsi que 11 méthodes de calcul et d?affichage d?une empreinte environnementale ont été
expérimentées en 2022 avec environ 470 études de cas réalisés sur des produits réels. L?ADEME
en a dressé un bilan dans un rapport109 de mars 2023 partagé avec le comité des partenaires. Six
méthodes étaient basées sur le socle ADEME, quatre sur le projet de PEFCR (voir 2.1.1.2 p. 32)
et une autre approche. Bien que, ni le projet de PEFCR, ni le socle de l?ADEME ne prennent en
compte les micro-plastiques à proprement parler, certaines méthodes ont proposé d?intégrer cet
enjeu, le considérant important : trois méthodes l?ont appréhendé en tant que sous-score de la
biodiversité et deux ont développé un nouveau critère relatif aux micro-plastiques en lien avec la
teneur en microfibres contenues dans le produit considéré.
Compte tenu des résultats de ces expérimentations, la secrétaire d?État à l?écologie a annoncé le
17 mars 2023, devant les entreprises impliquées dans les expérimentations, les représentants du
secteur et les ONG que huit critères d?impact avaient été retenus pour construire la méthode de
calcul pour le futur affichage environnemental. Les rejets de micro-plastiques seront pris en
compte par le 5ème de ces critères.
La mission ne peut qu?approuver cette orientation dès lors qu?elle permettra aux
consommateurs de prendre la mesure de l?éventuelle pollution micro-plastique engendrée
par leur achat, en la comparant à d?autres impacts environnementaux et aura par
répercussion des effets sur la conception des produits.
Une première version de la méthode de calcul devrait être mise au point au second semestre 2023.
Cette initiative française avance parallèlement aux travaux menés à l?échelle européenne sur
l?affichage environnemental (notamment sur le PEFCR). Dans ce cadre, la France tente de faire
valoir ses propres réflexions, qui convergent souvent avec celles de la Commission, par exemple
sur la durabilité des vêtements (projet Durhabi porté par l?IFTH, repris au niveau européen), sur la
réparabilité mais aussi sur les micro-plastiques.
Mais à ce jour aucune méthode n?étant fiable, plusieurs projets de recherche sont en cours afin
d?intégrer l?impact des micro-plastiques dans les analyses de cycle de vie.
2.3 Le secteur économique cherche peu à réduire la pollution à la
source
Le secteur, très dépendant des importations, déploie peu de moyens pour réduire la pollution par
les micro-plastiques à la source. Peu incité par les pouvoirs publics comme indiqué précédemment,
il ne l?est pas plus par les différents labels existants.
109 Rapport de l?ADEME : Évaluation transversale des méthodes d?affichage environnemental des textiles
d?habillement et chaussures, Mars 2023
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 45/72
2.3.1 Un secteur en transition, peu mobilisé sur la question des micro-
plastiques
2.3.1.1 Les transformations du secteur
La profession, bousculée voire fragilisée par la « fast fashion » mais aussi par la crise sanitaire de
la Covid 19, cherche avant tout à réduire son impact sur le climat, souhaite amorcer une
relocalisation de sa production comme en atteste le rapport du Comité stratégique de filière « mode
et luxe » demandé par la ministre de la transition énergétique : « Relocalisation et mode durable »
2021.
Le secteur se prépare aussi à mettre en oeuvre la loi AGEC, et notamment la réduction des
emballages en plastique, l?affichage environnemental et les mesures précédemment rappelées en
terme de recyclage et d?intégration de matières recyclées dans les étoffes.
La mission a ainsi constaté que les efforts des grosses entreprises portent surtout sur le recyclage
et la durabilité des produits, parfois sur le « coton bio » en terme d?efforts d?écoconception.
La recherche appliquée, qu?elle soit publique ou privée (comme celle portée par GEMTEX110), est
très déterminée par les demandes des entreprises, qui elles-mêmes, outre leurs stratégies propres
de recherche et développement, suivent les orientations des pouvoirs publics. Ainsi, il a été indiqué
à la mission que l?absence de dispositions contraignantes sur la teneur en polymère des textiles
ou sur leur rejet de micro-plastiques, expliquait en partie la rareté des recherches sur ces sujets.
Le centre européen des textiles innovants (CETI), centre de recherche privé, dispose d?une
installation de recyclage thermodynamique étant souligné que c?est le recyclage mécanique qui est
majoritairement utilisé. Pour développer ces procédés, il a mis en place une plateforme dénommée
CETIA dédiée au tri et au recyclage. Il considère ainsi qu?il est tout à fait possible, techniquement
et économiquement, de recycler à l?identique des mélanges de fibres (polyester/polyamide et
polyester/coton) ou de les recycler en les séparant, cette dernière solution étant plus coûteuse.
2.3.1.2 Quelques initiatives vers des textiles naturels ou moins émetteurs de micro-
plastiques
? L?exemple de la filière française du lin parait emblématique de la désindustrialisation du
secteur textile en France.
Cette filière, qui bénéficiait d?une longue tradition depuis le Moyen Âge, du Sud de la Normandie
au Nord de la France, comme dans une partie de l?Europe du Nord, a presque totalement disparu.
Ne demeurent que deux filateurs et une poignée de tisseurs et de tisserands 111 . Pourtant,
« l?Europe, en particulier la France, la Belgique et les Pays-Bas, concentre 80% de la production
mondiale de lin fibre, expédiée à 85% vers les filatures chinoises et en partie en Inde ». Elle se
mobilise aujourd?hui pour relancer ses filatures et ateliers de tissage en cherchant à se relocaliser
en France.
À cet égard, il convient de signaler l?initiative de l?Union des industries textiles (UIT) et
d?Interchanvre, lancée en juin 2023, « Bleu Blanc Lin » et « Bleu Blanc Chanvre » qui vise à « faire
renaitre une filière lin et chanvre pour un textile 100% made in France »112.
110 Laboratoire de recherche textile ? Roubaix https://www.gemtex.fr/
111 La tapisserie de Bayeux est une preuve de la présence du lin au XIe siècle « Les savoir-faire du lin textile »
Fiche d?inventaire du patrimoine culturel immatériel (page 19).
112 https://www.textile.fr/actualite/soutienfilierestextilesfrancaiseslinetchanvre
PUBLIÉ
https://www.textile.fr/actualite/soutienfilierestextilesfrancaiseslinetchanvre
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 46/72
Ce mouvement de renaissance est porté au niveau européen, par la Confédération européenne
du lin et du chanvre qui rassemble tous les acteurs de l?industrie européenne du lin dans 14 pays
de l?Union européenne.
La mission ne peut que se réjouir de ces évolutions qui, entre autres bénéfices, permettront de
mettre sur le marché français et européen, des textiles moins ou pas émetteurs de micro-plastiques.
? Le CETI participe à des projets qui cherchent à développer des fibres plus « naturelles » :
? des PLA (Acide polylactique) (TOTAL Corbion en Normandie sur le site de la raffi-
nerie de Grandpuits en Seine-et-Marne) bio plastique produit à partir de sucres de
cannes ou d?amidon (aussi d?écorces de betterave) ; il est recyclable et « compos-
table » selon Total énergie ;
? des celluloses issues de lin oléagineux (CETI) ;
? des fibres réalisées à partir de lait impropre à la consommation humaine qui sont
recyclables ou compostables ; ces fibres, en apparence proches de la laine et de
la soie, intéressent certaines entreprises du luxe mais compte tenu de leur origine
et pour des raisons éthiques (ne pas détourner la production agricole), elles ne
pourront donner lieu à une production de masse.
? Enfin, quelques rares entreprises se focalisent sur le sujet des micro-plastiques. Elles sont
principalement regroupées au sein du Consortium Microfibres (TMC)113 association qui re-
groupe différentes marques autour d?un « Engagement microfibres 2030 » : elles s?enga-
gent à rechercher un « impact nul de la fragmentation des fibres des textiles sur l?environ-
nement naturel d?ici 2030 » en choisissant de mettre la fragmentation des fibres en tête de
leur agenda environnemental. Elles réalisent des tests sur leurs matériaux qu?elles com-
muniquent au consortium et mettent à disposition des équipes de travail spécifiques sur le
sujet.
Ainsi, Décathlon® a engagé une démarche de tests de l?ensemble des étoffes de sa
collection afin d?évaluer de façon précise leur caractère émissif et de pouvoir adapter sa
production en fonction des résultats. Cette entreprise est l?une des deux marques ayant
respecté les délais en matière d?étiquetage de ses produits.
On notera également que le TMC a très largement contribué à l?élaboration des normes en
cours d?adoption (voir 2.4.2).
2.3.2 Aucun label environnemental ne semble afficher de critères sur les
émissions de micro-plastiques
Les labels environnementaux sont des outils mis à la disposition des consommateurs pour leur
permettre de choisir les produits qui paraissent offrir les meilleures garanties de préservation de
l?environnement et de la santé humaine. Ils peuvent donc conduire à des changements de
consommation non négligeables.
Certains labels sont apposés sur les produits sous la seule responsabilité des fabricants ou
distributeurs. D?autres sont certifiés ou contrôlés par un organisme tiers indépendants sur la base
d?un cahier des charges conformément à l?article L. 433-1 du code de la consommation. Parmi
ceux-ci figurent les labels conformes à la norme ISO 14024 et peuvent être appelés « Écolabel »
comme l?éco label européen.
113 Outdoor Microfibre Consortium Limited dont sont membres Adidas, CetA, Decathlon, Bureau Veritas, Eurifins,
Fashion for Good, Gap Inc, HetM Group, Helly Hansen, Kering, Next, Nike, The North Face, Patagonia, Puma,
RISE, Tesco, Textile exchange, etc? https://www.microfibreconsortium.com/signatories
PUBLIÉ
https://www.microfibreconsortium.com/signatories
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 47/72
L?ADEME a réalisé une étude sur huit labels environnementaux apposés sur les textiles en 2020114.
Cette étude est en ligne sur son site115. Depuis le 1er janvier 2023, la certification par un ou plusieurs
de ces huit labels116 donne droit à des primes réduisant les éco-contributions versées à Refashion
(voir 2.2.1.2).
Toutefois l?étude de l?ADEME ne s?intéressait pas aux micro-plastiques, en tant que tels, mais d?une
manière générale, à l?impact des produits sur le changement climatique, la perte de biodiversité, la
pollution de l?air, l?écotoxicité et l?épuisement des ressources. La question de la pollution de l?air y
était abordée mais sous l?angle des composés organiques volatiles. Par ailleurs, le critère de la
durabilité, peu utilisé, était peu précisé par cette étude.
La mission n?a pas trouvé de label mettant en avant le caractère faiblement émissif des étoffes.
2.4 De nouveaux outils qui devraient permettre de dépasser ces
freins
2.4.1 Les recherches scientifiques en cours
Afin de faire face aux incertitudes évoquées en partie 1.3, différents projets de recherche sont en
cours, pour permettre la définition des micro-plastiques, leur caractérisation, leurs impacts
toxicologiques à l?échelle internationale comme nationale, par les autorités publiques comme par
le secteur privé.
Ces projets en France117 sont notamment portés par l?ADEME, l?Institut national de l?environnement
industriel et des risques (INERIS) et l?Office français de la biodiversité (OFB). Certains visent à
évaluer la contamination des sols par les micro-plastiques (Microsof), d?autres leurs impacts
écotoxicologiques (MusselPlast), les boues d?épuration (PRO), la dégradabilité des plastiques. Ces
projets sont en phase d?achèvement et rendront des résultats d?ici fin 2024.
Par ailleurs, l?ADEME, l?OFB, l?INERIS participent au réseau européen SOILVER dans lequel un
état de l?art de la contamination dans les sols et les eaux souterraines a été réalisé par l?INERIS et
des collaborateurs belges et néerlandais (projet MISSOURI). En mars 2022, un appel à projets de
recherche (APR) a été lancé conjointement par l?ADEME et l?OFB pour évaluer le transfert des
micro-plastiques dans les écosystèmes continentaux, afin d?anticiper les besoins réglementaires
de surveillance et de gestion de ces pollutions.
Les résultats de ces projets de recherche permettront d?asseoir les décisions publiques sur des
données chiffrées. À ce stade, ils confirment la présence de micro-plastiques dans les
écosystèmes investigués.
2.4.2 De nouvelles normes devraient faciliter l?avancée des recherches sur
les émissions de micro-plastiques
Grâce à la mobilisation des acteurs du secteur dans le monde entier, des normes ISO ont
récemment été publiées ou sont en cours d?adoption. Pour la première fois, vont exister des
définitions communes des micro-plastiques et des nano-plastiques, des méthodes communes pour
déterminer les pertes de matière lors des lavages industriels et domestiques et pour les analyser.
Ces harmonisations devraient permettre un essor des travaux de recherche et de leur comparaison
114 Vêtements, chaussures et textiles : impacts environnementaux et labels, Expertises, édition 2020
115 https://agirpourlatransition.ademe.fr/particuliers/labels-environnementaux#labelsrow-3
116 Pour les noms des labels voir note 86
117 Microsof, Biomaleg, Plasticène, Cinape, Pro
PUBLIÉ
https://agirpourlatransition.ademe.fr/particuliers/labels-environnementaux%23labelsrow-3
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 48/72
et des conclusions beaucoup plus pertinentes devraient pouvoir en être tirées que ce soit par
exemple en ce qui concerne l?ampleur des émissions de micro-plastiques sur le cycle de vie des
étoffes, la réalité des pollutions dans l?environnement, les atteintes à la santé humaine, l?affichage
environnemental ou les labels.
2.4.2.1 Des définitions communes des particules fines de plastiques
Une norme (ISO/FDIS 24187118) est en cours d?élaboration et pourrait être adoptée d?ici la fin de
l?année 2023 permettant une classification unique des micro-plastiques et un faisceau de règles
permettant leur échantillonnage.
À ce stade de son élaboration, la norme définirait les micro-plastiques comme des particules
solides, non solubles dans l?eau, d?une taille allant de 1 µm à 1000 µm (soit 1 mm), les particules
allant de 1 à 5 mm étant elles qualifiées de « grands micro-plastiques » mais étant couvertes par
la même norme. De plus, cette norme indiquerait que la forme peut être régulière ou irrégulière, et
que la dimension est celle de la partie la plus longue de la particule, ce qui permettrait d?y inclure
les microfibres de moins de 5 mm de longueur. Elle devrait être validée à l?échelle internationale,
mais également européenne (CEN) et française (AFNOR).
Enfin, les nano-plastiques seraient également en cours de définition - ce qui est plus petit que 1
µm ? ces éléments étant contenus dans un document normatif écrit il y quatre ans. Une autre
définition est proposée par l?OCDE jusqu?à 100 nanomètres.
2.4.2.2 Une harmonisation des méthodes pour mesurer et analyser les pertes de
matières lors des lavages des textiles
Une norme ISO, CEN et NF 4484 porte sur cette harmonisation. Elle comporte trois parties.
La première partie concerne la détermination de la perte de matières des étoffes lors des lavages
(ISO 4484-1 : 2023)119. Elle a été publiée et est en vigueur depuis février 2023.
La troisième partie se concentre sur les méthodes pour mesurer la masse de matériaux collectés
libérés par les produits finis textiles au cours des lavages domestiques. Cette partie de la norme a
été publiée en mai 2023 au niveau international mais ne l?était pas encore en France à la date de
rédaction du présent rapport120.
La deuxième partie, qui porte sur les méthodes pour mesurer, quantifier et analyser les résultats
des matières ainsi collectées, fait encore débat. En effet, il existe déjà des travaux de normalisation
sur l?analyse des micro-plastiques dans l?eau. La plupart des pays de l?Union européenne et la
Commission souhaiteraient qu?il n?y ait qu?une seule norme (norme ISO/16084 en trois parties en
cours d?élaboration) et que la gouvernance sur ces questions soit harmonisée et confiée au
« groupe joint » entre le comité technique dans le domaine des plastiques et le comité technique
dans le domaine de l?eau, et ne fasse donc pas l?objet d?une norme séparée.
L?Union européenne a donc voté « contre » la proposition de norme ISO 4484-2. L?adoption de
cette norme poursuit néanmoins sa route et elle devrait être publiée avant la fin de l?année 2023,
mais ne sera pas applicable dans l?UE.
118 Projet de norme ISO/FDIS 24187:2023 « Principes d?analyse des micro-plastiques présents dans
l?environnement ».
119 https://standards.cencenelec.eu/dyn/www/f?p=205:110:0::::FSP_PROJECT:71617&cs=110565CE941B989550
C25BDB465B4B18A
120 https://www.iso.org/fr/standard/81035.html
PUBLIÉ
https://www.iso.org/fr/standard/81035.html
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 49/72
2.4.3 Les évolutions règlementaires à venir à l?échelle européenne
Comme évoqué en 2.1, la Commission européenne et les agences européennes travaillent
activement sur le sujet des micro-plastiques avec l?objectif de faire évoluer la règlementation
européenne sur le sujet.
Des travaux européens ont été conduits et seraient sur le point d?aboutir à la publication d?une
communication faisant état de la collecte de données sur l?émission des micro-plastiques non
intentionnels réalisée depuis 2018 et des priorités politiques que va se donner l?Union européenne
dans ce domaine. Au stade de la finalisation de ce rapport, cette communication n?a pas été
adoptée par la Commission européenne. Selon des informations recueillies par la mission, la
Commission européenne se préparerait à annoncer que la priorité sera donnée à la lutte contre les
pertes de granulés industriels. La définition de mesures visant la réduction des micro-plastiques
issus des textiles pâtirait du manque de données consolidées permettant l?évaluation quantitative
de cette pollution, et des conséquences économiques pour les secteurs concernés (industrie textile,
fabricants de lave-linges).
En parallèle, la Commission a soumis le 30 mars 2022 à l?adoption législative une règlementation
élargissant les obligations en matière d?écoconception à de nouveaux types de produits dont les
textiles (tous les produits en fait à l?exception de quelques-uns). Cette règlementation cadre est en
cours d?adoption par le Conseil et le Parlement qui a adopté sa position le 12 juillet dernier. Elle
sera suivie de la définition de règlements d?application propres à chaque secteur, comportant ses
propres règles en matière d?écoconception des produits. Cette règlementation européenne prévoit
notamment la « labellisation » des produits sur leur impact environnemental : le « passeport
produit » doit contenir les informations exactes et à jour sur les possibilités de réparation et de
recyclage, sur la durabilité du produit. Cela aidera le consommateur à faire des choix éclairés et
les autorités de contrôle des États membres à effectuer les vérifications. D?autres règles seront
également définies pour améliorer la durabilité, la sûreté, la réutilisation, l?amélioration, la
réparation, le maintien en bon état et la remise à neuf, la présence de produits à risque, l?usage de
l?énergie et l?efficacité énergétique, le contenu recyclé, la possibilité de reproduire et de recycler, la
possibilité de récupération des matériaux, les impacts environnementaux et la génération prévue
de déchets. À ce stade de la négociation, l?orientation générale du Conseil propose une interdiction
directe de destruction des produits non écoulés dans le secteur de l?industrie textile, avec une
exemption de quatre ans pour les entreprises de taille moyenne et une exemption générale pour
les petites et microentreprises121. Cette position est soutenue par le Parlement européen dans son
vote du 12 juillet 2023. Il est important de préciser que la « destruction » au sens de ce texte
européen n?intègre pas l?action de réemploi ou de re-fabrication, afin de pousser les producteurs à
envisager différentes options pour ces textiles invendus.
Une révision de la directive sur la biodégradabilité des plastiques est prévue en 2027 afin de tenir
compte des progrès dans la compréhension du phénomène de pollution.
La règlementation européenne relative à l?exportation des déchets est également en cours
d?évolution. Début juillet 2023, la Commission a abordé cette question dans le cadre de la révision,
ciblée sur les textiles, de la directive cadre sur les déchets. Elle a annoncé dans un communiqué
de presse que les mesures prévues viendront compléter celles de la proposition de nouveau
règlement concernant les transferts de déchets qui ont pour « objectif d?assurer que les transferts
de déchets textiles n?ont lieu que lorsqu?il est garanti qu?ils sont gérés d?une manière
121 « Nouvel article 20b : Interdiction de destruction des produits de consommation invendus qui sont des vêtements
ou des accessoires vestimentaires : À compter de 36 mois après l?entrée en vigueur du présent règlement, la
destruction des produits de consommation invendus qui sont des vêtements ou des accessoires du vêtements,
énumérés aux chapitres 61 et 62 du TARIC [Tarif douanier de l?Union européenne] établi par le règlement CEE
n°2658/8777 du Conseil est interdite. »
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 50/72
écologiquement durable »122.
Dans le domaine de la pollution de l?eau, la proposition de directive révisant la DERU identifie les
micro-plastiques comme de « nouveaux polluants » ayant fait leur apparition et fixe un objectif de
réduction des émissions de micro-plastiques de 9% d?ici 2040, « principalement grâce à des actions
sur la gestion améliorée des eaux de pluie ». Par ailleurs, elle prévoit que les États membres
devraient désormais « surveiller la pollution provenant des eaux de ruissellement urbain et des
surcharges dues aux pluies d?orage, les concentrations et les charges des polluants réglementés
dans la présente directive à la sortie des stations d?épuration des eaux urbaines résiduaires et la
présence de micro-plastiques (y compris dans les boues) » pour toutes les agglomérations ayant
un taux d?équivalent habitants (EH) supérieur à 10 000. Une méthodologie de mesure des micro-
plastiques dans les eaux résiduaires urbaines et les boues sera établie par la Commission
européenne dans le cadre d?actes d?exécution de la directive.
Enfin, notamment parce que les micro-plastiques peuvent être des vecteurs de substances
chimiques concernées par la DCE, notamment des additifs susceptibles d?être relargués
(plastifiants tels que le DEHP, le C10-13-chloroalcane, hexachlorobenzène, composés ignifuges
tels que l?HBCDD, ou encore des métaux (utilisés comme pigments tels que le cadmium) qui sont
des « substances prioritaires dangereuses » susceptibles d?être présentes dans les plastiques, la
Commission a proposé le 26 octobre 2022 une directive révisant la DCE, la directive sur les eaux
souterraines et celle sur les standards de qualité environnementale dans le domaine de la politique
de l?eau . Cette révision propose notamment l?introduction de nouvelles substances à mesurer dans
le cadre de l?évaluation de la qualité de l?eau et demande l?élaboration d?une méthodologie pour
évaluer les micro-plastiques présents dans l?eau. Ce texte est en cours d?examen par les instances
européennes.
L?ensemble des évolutions de ce cadre européen auront un impact sur la mise en oeuvre de la loi
AGEC et des autres mesures règlementaires en cours d?adoption en France.
122 Communiqué de presse de la Commission européenne du 5 juillet 2023 : Économie circulaire et secteur du
textile : responsabilité à l?égard de la réduction, du réemploi et du recyclage des déchets textiles et stimulation des
marchés des textiles usagés.
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 51/72
3 Afin de mieux répondre à cette pollution, il est nécessaire
de prendre en compte le cycle de vie du produit textile
D?une manière générale, il semble à la mission indispensable que les politiques publiques
s?inspirent de la hiérarchie des modes de traitement des déchets. Par ordre de priorité décroissante,
il convient donc d?abord d?encourager à l?écoconception, d?augmenter la durabilité, d?inciter à la
réparation, au réemploi, enfin à la réutilisation. Le recyclage doit donc retrouver sa place, après
ces premières mesures. Mais pour mettre en oeuvre une écoconception efficace et pertinente, la
filière a besoin que la recherche sur toutes les étapes de la vie du produit soit intensifiée.
3.1 Approfondir les efforts de recherche
Il a été souligné précédemment123 à quel point le manque de connaissances freinait tant les
décisions publiques que les choix des industriels.
Les avancées en terme de normalisation124 devraient faciliter nombre de recherches publiques ou
privées sur l?ensemble des enjeux évoqués dans ce rapport.
La mission estime que des recherches complémentaires devraient porter en priorité sur :
- les risques des micro- et les nano-plastiques sur les écosystèmes et la santé humaine ;
- la quantification des micro-plastiques émis dans l?air lors du port des vêtements ;
- l?analyse des émissions de micro-plastiques issus des étoffes produites en polymères recyclés et
des étoffes en fin de vie ;
- le devenir des micro-plastiques présents dans les boues d?épuration épandues sur les sols.
[ADEME et ANSES] Soutenir des projets de recherche sur les effets sur
les écosystèmes et la santé humaine des micro-plastiques, sur la pollution aux micro-
plastiques d?origine textile dans l?air et par l?épandage des boues d?épuration et sur la
pollution issue des textiles recyclés et en fin de vie.
3.2 Répondre aux émissions lors de la création des étoffes et des
produits
Dans le cadre de la mise en oeuvre du principe de précaution et de prévention, l?écoconception
des étoffes apparait comme une des mesures à privilégier afin de limiter leur caractère émissif en
micro-plastiques.
Deux orientations politiques sont possibles :
? Réduire la part des étoffes synthétiques dans le textile consommé en France en leur
substituant des matériaux alternatifs :
? fibres naturelles (lin, chanvre) ;
? fibres biosourcées transformées (viscose, lyocell) tout en limitant leurs autres im-
pacts environnementaux ;
? Réduire les émissions de micro-plastiques par les étoffes :
123 Voir partie 1
124 Voir en 2.4.2
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 52/72
? en améliorant leur conception : sur la base des tests qui seront réalisés, la profes-
sion va pouvoir déterminer plus précisément quels sont les types d?étoffes les plus
émetteurs ;
? en captant les émissions réalisées lors de la fabrication des étoffes, ce qui néces-
site un plan d?investissements dans les pays producteurs pour que les émissions
des usines de fabrication soient collectées, traitées, filtrées et que les déchets
soient ensuite détruits.
Parce que la substitution de matières pas ou peu émettrices de micro-plastiques nécessite de
revoir des lignes de production et des gammes de produits, et donc du temps, les plans de
prévention et d?écoconception devraient être utilisés comme aides en vue de telles transformations.
Le plan de prévention et d?écoconception prévu par l?article L. 541-10-12 du code de
l?environnement pourrait être l?occasion d?imposer aux entreprises du secteur de remettre en
question leur recours aux textiles synthétiques, qu?ils soient vierges ou recyclés, en fonction de la
gamme de chacune d?entre elle. Il pourrait même leur être demandé de se fixer à elles-mêmes un
objectif de réduction des micro-plastiques.
[MTECT/DGPR] Modifier l?article L. 541-10-12 du code de
l?environnement pour prévoir que le plan d?écoconception doit avoir comme objectif
d?augmenter la part des fibres peu ou pas émettrices de micro-plastiques
Les innovations déjà amorcées sur de nouvelles fibres naturelles ou synthétiques devraient être
accentuées. Pour accompagner cette réorientation, la reconstitution ou la constitution de filières
de fibres naturelles, telles que le lin et le chanvre, pour celles qui peuvent être produites en France
ou en Europe, devraient être encouragées et soutenues à l?échelle nationale comme européenne.
La conception d?étoffes et de produits non ou moins émetteurs de micro-plastiques devrait faire
partie des priorités des programmes de recherche entrepris par les secteurs privé et public. Des
recherches récentes, il apparait que la longueur des fibres synthétiques a une grande importance
sur leur caractère émetteur de microparticules. Si ces informations venaient à être confirmées par
les tests en cours, cette exigence relative au type de fibre pourrait figurer dans les cahiers de
charge. Même si à ce stade la biodégradabilité des plastiques synthétiques n?a pu être prouvée, la
recherche de fibres biodégradables (même si émettrices de microfibres ou particules) est
également un champ à explorer125.
Un autre sujet d?écoconception des étoffes relève des modalités de tissage ou tricotage. Sans
remettre en cause la suprématie industrielle actuelle du tricotage, qui déstabiliserait fortement la
filière, les tests sur les étoffes devraient également permettre d?analyser l?impact de la conception
des étoffes sur les émissions de microfibres.
De même, les modalités de découpe des étoffes au moment de la fabrication des produits textiles
ou d?assemblage des pièces peuvent avoir un impact sur leur caractère émissif.
En résumé, sur la base des tests qui vont pouvoir être conduits dans les 2 ou 3 prochaines années
conformément aux normes récemment adoptées ou en cours d?adoption, les cahiers de charge
des entreprises de fabrication et de diffusion des produits textiles auprès de leurs fournisseurs
pourront intégrer des critères permettant de limiter les émissions de micro-plastiques par les étoffes
et les produits achetés, qu?ils soient importés ou produits au sein de l?Union européenne.
125 L?entreprise Primaloft Bio indique avoir fabriqué le premier tissu issu de fibres synthétiques 100% recyclées et
biodégradables à 55% (Prima loft Bio Performance Fabric).
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 53/72
[MEFSIN/DGE] Soutenir le développement par la filière TLC de la
production d?étoffes en fibres naturelles alternatives au coton ou en nouvelles étoffes
synthétiques biosourcées et compostables
Pour accélérer la réduction de l?utilisation des micro-plastiques lorsque leur utilité n?est pas avérée,
il pourrait être envisagé d?interdire l?incorporation de micro-plastique dans les textiles. De telles
pratiques existent par exemple pour ennoblir les textiles ou rendre plus agréable leur portabilité
(nanoparticules pour éviter les mauvaises odeurs dégagées par les chaussettes de sport). Il s?agit
ici d?éviter l?ajout de micro-plastiques intentionnels et donc de s?aligner avec la politique
européenne visant à réglementer en priorité les micro-plastiques primaires. On pourrait à l?échelle
française étendre le champ d?application de l?article L. 541-15-12 du code de l?environnement
(inséré par l?article 82 de la loi AGEC) qui interdit l?incorporation de micro-plastique en
concentration supérieure à 0,01% dans certains produits. S?agissant de l?industrie textile, cette
interdiction devrait viser tous les micro- et nano-plastiques sauf, encore une fois, en cas de
nécessité démontrée. Cette décision doit préalablement être prise à l?échelle européenne.
Enfin, afin de limiter l?impact des micro-plastiques émis, l?écoconception devrait également se
concentrer sur les additifs. La limitation, voire l?interdiction, de certaines substances chimiques
utilisées comme additifs dans la confection des polymères peut faire l?objet d?un renforcement de
la règlementation européenne sur le sujet.
[MEFSIN/DGE ? MTECT/DGPR] Demander à l?échelle européenne l?inter-
diction de : a) l?insertion de micro et nano-plastiques additionnels pour l?embellissement et
l?ennoblissement ; b) l?ajout des additifs insérés dans les polymères textiles causant des
risques pour la santé humaine et les écosystèmes.
Enfin, la France et l?Union européenne sont mobilisées dans le cadre de leur aide au
développement sur le sujet de la gestion de l?eau dans les pays tiers. Néanmoins, la majorité des
aides est dirigée vers l?accès à l?eau potable des populations, plutôt que vers le traitement des
eaux usées ; et quand bien même des projets relatifs au traitement des eaux usées existent, les
usages des boues d?épuration sont similaires aux usages réalisés en France, à savoir l?épandage
d?une grande partie d?entre elles, et donc des micro-plastiques qui ont été captés lors du traitement.
D?échanges avec le secteur du textile, la mission retient également que l?insertion dans les cahiers
des charges de contraintes pour les producteurs de textiles des pays tiers en matière de collecte
de leurs eaux usées à la sortie de leurs usines de fabrication, n?a pas eu de résultats, les moyens
de contrôle étant inexistants et le saut technique demandé n?étant pas possible à mettre en oeuvre,
avec souvent des réseaux publics de traitement des eaux inexistant ou insuffisants pour prendre
le relais des industries. Pourtant, la traçabilité récemment mise en place devrait permettre
d?améliorer la capacité de contrôle sur les producteurs de produits textiles par les donneurs d?ordre.
L?encouragement à l?amélioration de la gestion des eaux usées dans les pays tiers producteurs de
textiles doit être poursuivi, même si des résultats ne peuvent être attendus à court terme.
[MEAE - MTECT] Aider les pays tiers dans lesquels sont produites les
étoffes à développer des systèmes de gestion des eaux et de captation des microfibres,
dans le cadre des politiques d?aide au développement et en partenariat avec les entreprises
européennes productrices et distributrices de produits textiles.
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 54/72
La commande publique, devant être « mise au service de la transition vers l?économie
circulaire » en application de l?article. L. 541-1 (dernier alinéa) du code de l?environnement,
le levier des marchés publics pourrait être aussi actionné pour les vêtements professionnels
lorsque la technicité de leur usage le permet. Un pourcentage maximum de fibres synthétiques
pourrait être inclus dans les clauses techniques des marchés correspondant et un bonus pourrait
être accordé aux tissus comportant le plus de fibres naturelles et/ou biodégradables.
3.3 Faire du consommateur un acteur éclairé de la réduction de la
pollution par les micro-plastiques
La lutte contre les micro-plastiques des textiles rejoint celle de la lutte contre les coûts
environnementaux de la surconsommation textile. D?après un sondage réalisé par OpinonWay126
auprès de 2 002 personnes, 55% des Français déclarent limiter leurs achats textiles aux besoins
réels, 46% trier leurs placards et 55% valoriser leurs textiles en leur offrant une seconde vie, 80%
ayant recours aux dons.
Figure 12 : Cycle de vie des textiles et chaussures (Source : rapport d'activité 2022 Refashion)
Une des clés de l?action politique apparait donc comme étant celle de la sensibilisation du
consommateur comme du distributeur.
L?affichage environnemental, dès lors qu?il comportera un critère sur le rejet dans l?environnement
126 https://fr.fashionnetwork.com/news/Dechets-textiles-les-francais-mobilises-mais-trop-peu-
informes,1340053.html
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 55/72
de micro-plastiques et que ce critère sera correctement valorisé, ne pourra qu?avoir des effets
positifs sur la conception des étoffes. Pour éviter de faire l?objet d?un mauvais score, les entreprises
devraient s?orienter vers des tissus comportant moins de polymères ou vers des polymères moins
émetteurs de micro-plastiques.
Eu égard à l?importance de la pollution par les micro-plastiques d?origine textile, la mission
considère qu?il est nécessaire de renforcer les contraintes d?étiquetage actuellement prévues par
le XI de l?article R. 541-221 du code de l?environnement :
- d?une part, le pourcentage de 50% de composition d?étoffe synthétique au-delà duquel les
émissions de micro-plastiques doivent être signalées apparait trop élevé puisque l?on sait que
toutes ces fibres rejettent des micro-plastiques quel que soit leur pourcentage. La mission propose
donc de faire passer le pourcentage à 5 % ;
- d?autre part, sachant que le relargage des microparticules peut aussi intervenir lors du port, de
tout autre utilisation et de la fin des étoffes, la mission propose soit de supprimer dans la mention
obligatoire les mots « lors du lavage », soit de compléter cette mention par « de l?utilisation et de
la fin de vie de l?étoffe ». Cette recommandation rejoint celle du rapport de l?OPECST de 2020 sur
la pollution plastique.
La mission rappelle qu?un pictogramme signalant de manière très claire la présence de plastiques
n?est prévu que pour certains produits à usage unique par le décret n°2021-1279 qui transpose
l?article 7 de la directive du 5/06/2019 et son règlement d?exécution UE 2020/2151. Un pictogramme
analogue pourrait accompagner la mention « rejette des microfibres plastiques dans
l?environnement ».
Les labels constituant des outils souples et rapidement mobilisables, la mission considère qu?ils
devraient mieux prendre en compte la pollution par les micro-plastiques d?origine textile. Pour les
y inciter, elle estime que l?ADEME devrait renouveler et approfondir son étude sur les labels
environnementaux.
[MTECT/CGDD - ADEME] Mieux informer le consommateur sur les mi-
cro-plastiques textile en : a) lançant des campagnes de communication sur l?émission de
micro-plastiques par les produits textiles ; b) modifiant le XI de l?article R. 541-221 du code
de l?environnement pour faire passer le seuil de présence de fibre synthétique de 50% à 5%
déclenchant une information du consommateur ; c) renouveler l?étude sur les labels envi-
ronnementaux pour les textiles en mettant en lumière les critères retenus par chacun d?eux
sur les émissions de micro-plastiques, sur le taux de présence de fibres synthétiques et
artificielles, sur la réparabilité du vêtement, sur sa durabilité.
3.4 Répondre aux émissions lors de l?usage du produit
3.4.1 Les émissions lors des lavages des produits
La partie 2 de ce rapport a souligné la difficile mise en place d?une politique de captation des micro-
plastiques issus des lavages de vêtements, qui sont supposés être l?une des principales causes
d?émission de micro-plastiques textiles en Europe.
Concernant les machines individuelles à laver le linge, la loi AGEC a fixé un objectif, auquel les
fabricants de machine ont partiellement répondu, et sa mise en oeuvre dépend principalement de
l?adoption de règles équivalentes à l?échelle européenne. La mission souhaite néanmoins attirer
l?attention sur la nécessaire proportionnalité de cette mesure d?une part, eu égard aux technologies
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 56/72
actuellement existantes qui nécessitent une forte implication de l?utilisateur de la machine (choix
des programmes, nettoyage des filtres), un risque de contradiction avec le droit européen de libre
circulation des biens et marchandises, et d?autre part sur sa temporalité de mise en oeuvre. D?après
UFC-Que-Choisir et l?INSEE, 94% des ménages sont équipés d?un lave-linge en France et la durée
de vie d?un lave-linge est estimée à 7 à 10 ans. De plus, les règles européennes et nationales
récentes visent la promotion de la fin de l?obsolescence programmée et du réemploi de
l?électroménager. Quand bien même la mesure d?installation obligatoire d?un système de filtrage
serait mise en place en France dès 2025, le temps nécessaire pour qu?une fraction suffisante des
ménages français investissent dans une machine équipée d?un tel système de filtrage ne permettra
pas d?obtenir des résultats avant 2030.
La mission s?est donc penchée sur la possibilité d?imposer l?équipement des machines à laver
industrielles d?un tel système de filtrage, solution qui apporterait a minima la garantie du bon
traitement des résidus de lavage issus du système de filtration et de la bonne application du
principe de filtration en fonction de la nature des étoffes. La loi française impose également
l?équipement des machines industrielles d?un même système de filtration.
L?idée, expertisée également par la Commission européenne, serait donc d?imposer un premier
lavage ? ou plusieurs lavages initiaux - des produits textiles distribués sur le marché européen,
qu?ils soient importés ou fabriqués dans l?Union européenne. Ce(s) premier(s) lavage(s)
permettrai(en)t non seulement la collecte des microparticules émises lors des premiers lavages, et
leur récupération puis leur élimination, mais également celles de produits/additifs chimiques nocifs
qui peuvent être utilisés dans la fabrication des étoffes. Cette solution ne peut être expérimentée
par la France seule et doit s?imposer à l?échelle de l?Union européenne.
Les solutions logistiques pour la mettre en oeuvre devraient être laissées aux distributeurs afin de
pouvoir s?intégrer dans leur chaine logistique. Néanmoins, il convient de ne pas oublier que cette
mesure entrainerait une forte déstabilisation des chaines logistiques actuellement existantes de la
plupart des marques, dont la très large majorité de la production est fabriquée à l?extérieur de
l?Union européenne, non seulement pour la production des étoffes, mais également pour leur
conception, leur étiquetage, leur emballage et même leur cintrage ce qui rend un relavage dans
l?Union européenne très complexe. Et l?imposition d?un lavage dans le pays de production du
produit ? qui n?est pas forcément celui de la production de l?étoffe elle-même ? pose les problèmes
liés au traitement des eaux usées dans les pays tiers déjà évoqué (3.1.1).
Cette solution dont l?efficacité immédiate est très séduisante, aura donc un impact majeur sur la
chaine de production et nécessiterait une mise en oeuvre progressive. L?examen devra notamment
intégrer les types de financement pouvant être apportés par la REP.
La dernière étape d?émission des micro-plastiques lors des lavages est celle des stations
d?épuration, sujet également largement abordé en partie 2.2.3. Les réglementations en cours de
mise en place à l?échelle nationale et européenne devraient permettre d?avoir rapidement une
visibilité sur l?ampleur de cette pollution par les micro-plastiques. Dans le contexte actuel d?un
renforcement de l?équipement des collectivités françaises en systèmes d?épuration des eaux usées
plus efficaces afin de respecter les obligations communautaires actuelles et à venir, la mission
pense utile que l?équipement des stations en filtres permettant une meilleure capture des
microparticules de plastique soit examinée de façon plus systématique dans le cadre des projets,
notamment pour les stations situées dans des zones sensibles. La question de l?usage des boues
d?épuration nécessite également une expertise plus poussée. En effet, la mise en oeuvre du
principe de précaution conduirait à ne pas poursuivre l?épandage des boues d?épuration dont la
teneur en microparticules de plastique est avérée. Le développement d?autres usages des boues
d?épuration doit donc être recherché.
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 57/72
[MTECT ? MESFIN/DGE] Limiter les émissions de micro-plastiques en
provenance des lavages en Europe en : a) défendant à l?échelle européenne dans le cadre
de l?évolution du règlement écoconception la mise en place de filtre sur les lave-linges
privés ; b) examinant à l?échelle européenne la possibilité d?un prélavage des produits
textiles avant leur mise en rayon par les distributeurs
[MTECT] Renforcer les filtres équipant les stations d?épuration dans les
zones sensibles et limiter l?épandage des boues d?épuration dont la contamination par les
micro-plastiques est avérée.
3.4.2 Les émissions lors du port des produits
À ce stade de l?analyse, il apparait à cette mission très difficile d?imposer des règles obligatoires.
La priorité doit être donnée à la recherche pour analyser à la fois la présence des microfibres dans
l?air, la capacité d?ingestion/adsorption de ces microfibres dans le corps humain et leur impact sur
la santé.
Dans un deuxième temps, une fois ces études complémentaires réalisées, il suffira d?étendre les
règles européennes sur la pollution de l?air aux microfibres en les rattachant aux PM2,5 et PM10.
[MTECT/DGEC] A l?échelle européenne, en fonction des résultats des
études sur les émissions de micro-plastiques dans l?air, intégrer les microparticules de
plastique dans les PM2,5 et PM10.
3.5 Répondre aux émissions lorsque le textile devient déchet
3.5.1 La collecte, le tri et les usages nouveaux (réemploi, réutilisation)
La lutte contre les micro-plastiques ne pourra que bénéficier de l?accroissement de la durabilité des
produits puisque la majorité des émissions se produisent en début de vie du produit, même si cette
assertion se heurte à l?absence de tests réalisés sur des étoffes en fin de vie ou sur des étoffes en
synthétiques recyclés.
Il convient à cette occasion de signaler que Refashion doit contribuer à la prise en charge des
opérations de collecte séparée des déchets textiles. Cette collecte séparée devient en effet
obligatoire à compter du 1er janvier 2025, en application du décret n °2021-950 du 16 juillet 2021,
comme dans le reste de l?Union européenne. Elle va augmenter la masse de déchets collectés
mais leur traitement en sera facilité et de meilleure qualité.
Quelques chiffres sur le tri et le réemploi
67 centres de tri conventionnés donc 15 en Europe hors de France
260 000 tonnes ont été récoltées dont 188 000 ont été triées (soit 23% de la mise sur le marché)
59% des volumes collectés et triés est considéré comme apte à la réutilisation.
On estime le volume des TLC réemployés à 10 000 à 30 000 tonnes par an, essentiellement vers les boutiques
des entreprises relevant de l?économie sociale et solidaire.
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 58/72
[MTECT/DGPR] Modifier le cahier des charges de l?éco-organisme de
la filière TLC pour lui fixer des objectifs de collecte, de tri, de réemploi et de réparation des
textiles synthétiques, plus ambitieux que pour les autres textiles
3.5.2 Les problèmes de pollution créés par l?exportation des déchets
textiles européens et français
Selon Refashion, 95% des TLC collectés et triés sont exportés essentiellement en Afrique (35%),
en Europe (31%) et en Asie (24%), les trois principaux pays destinataires étant le Pakistan (33 000
tonnes), la Tunisie (près de 31 000 tonnes) et la Belgique (28 000 tonnes). Rares sont les textiles
qui sont réutilisés dans ces pays en raison de leur mauvais état ou parce qu?ils ne correspondent
pas aux besoins locaux.
La plupart est donc éliminée alors que les pays importateurs de déchets n?ont bien souvent pas les
capacités de les traiter correctement. Ces exportations sont ainsi vraisemblablement génératrices
d?une très forte pollution notamment en terme de micro-plastiques.
De nombreuses voix se sont élevées contre ces pratiques qui demeurent néanmoins à l?échelle
européenne.
Le cahier des charges de Refashion n?est pas à la hauteur du problème puisqu?il prévoit seulement
qu?en 2024, 8% des TLC usagés devront être réemployés ou réutilisés à moins de 1 500 km du
lieu de collecte, cet objectif passant à 15% en 2027.
Pour la mission, il n?est pas admissible que notre pays exporte ainsi ses déchets textiles sans
s?assurer que les installations qui les accueillent seront en mesure de les traiter correctement, en
particulier en ce qui concerne les micro-plastiques.
Elle a constaté que cette position était conforme à celle préconisée tant par le Parlement européen
que par la Commission (voir 2.1.4).
[MEFSIN/DGT ? MEAE] Dans le cadre de la négociation européenne
sur la révision du règlement sur l?exportation des déchets, promouvoir la position tendant
à interdire l?exportation de déchets textiles dans les pays tiers qui ne sont pas en capacité
de gérer ces déchets
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 59/72
Conclusion
L?émission de microparticules de plastiques par le textile est avérée, a contaminé tous les milieux,
et ne va faire que s?accroitre au regard de l?augmentation de la part des étoffes synthétiques dans
la production textile mondiale. Il y a donc urgence à agir pour réduire cette pollution à l?échelle de
l?ensemble du cycle de vie des produits, les émissions se déroulant à chaque étape.
La concentration des efforts actuellement menés sur la phase lavage des produits textiles ne
permet pas de répondre à l?ensemble de la problématique et a des coûts disproportionnés par
rapport à d?autres actions qui peuvent être mises en oeuvre en amont et sont plus en phase avec
les principes pollueur-payeur et de respect du cycle de vie du produit.
La mission recommande donc d?axer prioritairement les efforts sur l?écoconception des étoffes et
des produits textiles en s?appuyant sur les nouveaux outils de normalisation récemment adoptés
ou en cours d?adoption. Dans ce secteur, il semble également indispensable que toute décision
soit prise à l?échelle européenne. Il convient enfin d?ancrer l?action de lutte contre les micro-
plastiques textiles dans le contexte et le cadre de la lutte contre la surconsommation de textiles à
bas coûts qui est au coeur de cette problématique.
Virginie DUMOULIN
Sabine SAINT GERMAIN
Inspectrice générale de
l'administration du développement durable
Inspectrice générale de
l'administration du développement durable
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 60/72
Annexes
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 61/72
Annexe 1. Lettre de mission
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 62/72
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 63/72
Annexe 2. Liste des personnes rencontrées
Organisme Date Nom Fonction
Cabinet de la SE à l?écologie 12/04/23 Léonard BRUDIEU Conseiller
DEB 19/04/23 Marie-Laure Metayer Adjointe au DEB
id Isabelle Kamil Sous-directrice, de la protection et de la gestion de l?eau, des
ressources minérales et des écosystèmes aquatiques, EARM
id Véronique NICOLAS Cheffe du bureau EARM 4
id Vincent SZLEPER Adjoint à la sous-directrice de la protection et de la restauration des
écosystèmes littoraux et marins.
DGPR/SRSEDPD/SD id Sami DRISSI-AMRAOUI Chargée de mission REACH santé environnement, produits
chimiques, agriculture/ bureau des produits chimiques
MEFSIN/DGE/Service de
l?industrie/sous-direction des
industries de santé, des biens
de consommation et de
l?agroalimentaire
21/04/23 Astrid EVEN Chef de projet Mode, Luxe et biens de consommation
France LACOEUILHE Chargée du textile au sein de l?équipe de Mme EVEN
Comité France Océan 2/05/2023 Gauthier CARLE Coordonnateur des ONG du Comité France Océan
Laboratoire GEMTEX/ENSAIT 2/05/2023 Xyanzi ZENG Directeur
Fabien SALAUN Responsable « matériau avancé »
Xavier LEGRAND Responsable « matériau composite »
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 64/72
MTECT/CGDD/SEVS 5/05/2023 Audrey COREAU Cheffe du service de l?économie verte et solidaire
Pascal DAGRAS Chef de projet affichage environnemental
Alliance du commerce 5/05/2023 Yohann PETIOT Directeur
Pascale Barthomeuf-
Lassire
Directrice des affaires économiques et juridiques
Pierre Alexandre Naud Responsable des affaires économiques et juridiques
ADEME
9/05/2023
Jean Charles
CAUDRON
Responsable de la direction de la supervision des REP
Manon LEGER Chargée de mission au sein de cette direction
GIFAM (Groupement des
marques d?appareils pour la
maison)
10/05/2023
Camille BEURDELEY
Alexandrine FADIN
SOS MAL DE SEINE 12/05/23 Laurent Colasse Président
CETI, centre européen des
textiles européens
16/05/23 Pascal DENIZART Directeur
Expedition MED 16/05/23 Bruno DUMONTET Fondateur et directeur
ETAM 16/05/23 Kache HONG ZWART Directrice RSE
Les Amis de la Terre 23/05/23 Pierre Condamine Chargé de campagne surproduction
ADEME/Service de
Coordination, d?Evaluation et de
24/05/23 Isabelle DEPORTES Ingénieure impacts sanitaires et écotoxicologiques de l?économie
circulaire
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 65/72
Valorisation (SCEV) Coordination R&D DECi
INERIS / Direction stratégie,
politique scientifique et
communication
24/05/23 Pierre BOUCARD Responsable études et recherches de l?unité économie et décision
pour l?environnement
ECOBALYSE/ADEME 24/05/23 Alban FOURNIER Responsable
DECATHLON 26/05/23 Julie Arnould Responsable de l?équipe de recherche
Marie Stephan
Antoine Cosne Doctorant
Institut Français du textile et de
l?habillement
26/05/23 Clarisse REILLE Directrice
Eva Debruyne Référente développement durable
Carole Garbowski Chargé du suivi réglementaire notamment de l?affichage
environnemental
Bureau de la normalisation de
l?industrie textile et de
l?habillement BNITH
2/06/23 Laurent Houillon Directeur
Chercheuse publique 2/06/23 Nathalie Gontard Directrice de recherche à l?INRA et professeure à l?Université de
Montpellier
Refashion 6/06/23 Hélène Daret Directrice du pôle relation avec les adhérents et responsable du
développement de l?éco conception
Bureau de la normalisation des
plastiques et de la plasturgie
20/06/23 Yan Archambeau Directeur
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 66/72
Commission de l?UE/ Direction
générale de l?environnement
23/06/23 Flora Wallace Unité B1
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 67/72
Annexe 3. Glossaire des sigles et acronymes
Acronyme Signification en français
ADEME Agence de la transition écologique
AFNOR Association française de normalisation
AGEC (Loi) Anti-gaspillage et pour une économie circulaire
ANSES
Agence nationale de sécurité sanitaire de l?alimentation, de
l?environnement et du travail
APPLIA Homa Appliance for Europe
BPA Bisphénol A
BPS Bisphénol S
BRM Bioréacteur à membrane
CGDD Commissariat Général au Développement Durable
CETI Centre européen des textiles innovants
COVID Maladie à Coronavirus
CTI Centre Technique Industriel (du textile et de l'habillement)
DCE Directive cadre sur l?eau
DCSMM Directive cadre Stratégie et milieux marins
DEHP Phtalate de bois
DGE Direction générale des entreprises
DGEC Direction Générale de l?Energie et du Climat
DGPR Direction Générale de la Prévention des Risques
DGT Direction Générale du Trésor
ECHA Agence européenne des produits chimiques
EH Equivalent habitant
EN Standard européen en matière de normalisation
ERU Eaux résiduaires urbaines
ETC Commission européenne du voyage
FRIVEP
Projet de structuration d'une filière de réemploi / recyclage industrielle
des vêtements professionnels
GEMTEX Laboratoire de recherche textile
IFTH Institut français du textile et de l'habillement
IGEDD Inspection Générale de l?Environnement et du Développement Durable
INERIS Institut national de l'environnement industriel et des risques
ISO Organisation internationale de normalisation
HBCDD Hexabromocyclododécane (composé aliphatique bromé)
HDPE Polyéthylène de haute densité
LDPE Polyéthylène à basse densité
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 68/72
Acronyme Signification en français
MEAE Ministère de l?Europe et des Affaires Etrangères
MEFSIN
Ministère de l?Economie, des Finances et de la Souveraineté
Industrielle et Numérique
MTECT Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires
Mt Million de tonnes
NMMO N-Methylmorpholine N-oxide
OCDE Organisation de Coopération et de développement économique
OEFSR Performance environnementale des organisations
OFB Office Français de la Biodiversité
ONG Organisation non gouvernementale
OPESCT
Office parlementaire d?évaluation des choix scientifiques et
technologiques
PA Polyamide
PAN Polyacrilonitrile
PBAT Polybutylène adipate-co-téréphtalate
PBS Polybutylène succinate
PCB Polychlorobiphényles
PCL Polyaprolactone
PE Parlement européen
PET Polyéthylène Téréphtalate
PEF Polyéthylène furanoate
PFAS Composés perfluorés
PEFCR Performance environnementale des produits (projet européen)
PFOA Acide perfluorooctanoic
PHA Polyhydroxyalcanoate
PLA Acide polylactique
PM2,5 Particules fines de diamètre 2,5 microns
PM10 Particules fines de diamètre 10 microns
POP Polluants organiques persistants
PP Polypropylène
PPDDT Dichlorodiphényltrichloroéthane
PPD-T Para phénylène-téréphtalamide
PS Polystyrène expansé
PU Polyuréthane
PVC Chlorure de polyvinyle
PVOH Alcool polyvinylique
REACH
Règlement européen portant sur l?enregistrement, l?évaluation et
l?autorisation des substances chimiques dans l?Union européenne
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 69/72
Acronyme Signification en français
Refashion
Eco-organisme de la Filière Textile d'habillement, Linge de maison et
Chaussure
REP Responsabilité élargie du producteur
RISE Institut de recherche de Suède
STEU Stations de traitement des eaux usées
SVHC Substance extrêmement préoccupantes
TARIC Tarif douanier européen
TFUE Traité sur le fonctionnement de l?Union européenne
TLC Produits textiles, linges de maison et chaussures
TMC Consortium Microfibres
UE Union européenne
UICN Union internationale de la Conservation de la nature
UIE Union Nationale des Industries et Entreprises de l'Eau
UIT Union des industries textiles
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 70/72
Annexe 4. Quelques chiffres sur la pollution plastique en
général
Sources :
? Stratégie européenne sur les plastiques (2018)
? The Minderoo-Monaco Commission on Plastics and Human Health
https://storage.googleapis.com/jnl-up-j-agh-
files/journals/1/articles/4056/submission/proof/4056-1-17364-2-10-20230321.pdf
? Global Plastic Outlook ? OCDE https://www.oecd-ilibrary.org/sites/de747aef-
en/1/3/2/index.html?itemId=/content/publication/de747aef-
en&_csp_=e9020c542dd024467e760066b0abe328&itemIGO=oecd&itemContentType=book#
section-d1e2597
8 300 Mt de plastiques fabriqués depuis 1945, dont plus de 50% depuis 2002, et seulement 30%
encore utilisés
460 Mt de plastiques produits en 2019 et 1231 Mt en 2060 selon les prévisions de l?OCDE
49 Mt de matières plastiques consommées dans l?Union européenne (2018)
25,8 Mt de déchets produits chaque année dans l?Union européenne, dont seulement 30% sont
récupérés pour être recyclés
Répartition de la consommation mondiale : 20% Chine, 18% USA, 18% Europe OCDE, 9% reste
OCDE
Production : 52% en Asie dont 32% en Chine, 19% Amérique du nord, 17% Europe.
Entreprises productrices : Sinopec, Exxon mobil, PetroChina, Sibur
Répartition de la production par type de plastiques : 16% PP (polypropylène ? PET), 13% fibres,
12% HDPE, 12% LDPE
Plastiques recyclés : 9% dans le monde soit 29,1 Mt en 2019 du plastique produit et 14% dans
l?UE
Plastiques à usage unique : 35% des plastiques produits soit 133 Mt en 2019
PUBLIÉ
https://storage.googleapis.com/jnl-up-j-agh-files/journals/1/articles/4056/submission/proof/4056-1-17364-2-10-20230321.pdf
https://storage.googleapis.com/jnl-up-j-agh-files/journals/1/articles/4056/submission/proof/4056-1-17364-2-10-20230321.pdf
https://www.oecd-ilibrary.org/sites/de747aef-en/1/3/2/index.html?itemId=/content/publication/de747aef-en&_csp_=e9020c542dd024467e760066b0abe328&itemIGO=oecd&itemContentType=book%23section-d1e2597
https://www.oecd-ilibrary.org/sites/de747aef-en/1/3/2/index.html?itemId=/content/publication/de747aef-en&_csp_=e9020c542dd024467e760066b0abe328&itemIGO=oecd&itemContentType=book%23section-d1e2597
https://www.oecd-ilibrary.org/sites/de747aef-en/1/3/2/index.html?itemId=/content/publication/de747aef-en&_csp_=e9020c542dd024467e760066b0abe328&itemIGO=oecd&itemContentType=book%23section-d1e2597
https://www.oecd-ilibrary.org/sites/de747aef-en/1/3/2/index.html?itemId=/content/publication/de747aef-en&_csp_=e9020c542dd024467e760066b0abe328&itemIGO=oecd&itemContentType=book%23section-d1e2597
PUBLIÉ
Site internet de l?IGEDD :
« Les rapports de l?inspection »
PUBLIÉ
https://www.igedd.developpement-durable.gouv.fr/spip.php?page=liste-actualites&lang=fr&id_mot=1187&debut_rub_actus=0
https://www.igedd.developpement-durable.gouv.fr/spip.php?page=liste-actualites&lang=fr&id_mot=1187&debut_rub_actus=0
Sommaire
Résumé
Liste des recommandations
Introduction
1 La pollution par les micro-plastiques textiles est avérée mais les analyses scientifiques et techniques restent incomplètes, ce qui freine la prise de décision
1.1 Une définition des micro-plastiques encore sujette à discussion
1.1.1 Une question de composition
1.1.2 Une question de taille et de forme
1.1.3 Une question de source
1.2 La pollution par les micro-plastiques est constatée dans l?ensemble des écosystèmes
1.2.1 La pollution aux micro-plastiques de tous les écosystèmes est avérée
1.2.2 La part respective de chaque source dans la pollution par micro-plastique reste incertaine
1.2.3 La pollution par les micro-plastiques est durable
1.3 Des incertitudes qui ralentissent la prise de décision alors que la production de textile synthétique s?accroît
1.3.1 Une quantification de la pollution par les micro-plastiques textiles incomplète
1.3.2 Des incertitudes sur les risques pour les écosystèmes et la santé humaine
1.3.3 Une croissance incontrôlée de la production de textiles synthétiques
1.3.3.1 La fabrication des étoffes est majoritairement délocalisée
1.3.3.1 Les fibres synthétiques envahissent de plus en plus les étoffes et stimulent la baisse des prix et la surconsommation
2 La réponse actuelle à la pollution par les micro-plastiques issus du textile demeure très incomplète
2.1 Les émissions de micro-plastiques textiles sont peu prises en compte dans la règlementation européenne
2.1.1 Une règlementation de l?économie circulaire qui s?oriente enfin vers la réduction de la pollution micro-plastique
2.1.1.1 Un paquet économie circulaire focalisé sur la recyclabilité du plastique
2.1.1.2 L?écoconception pour répondre aux enjeux climatiques plus qu?à la pollution
2.1.1.3 Une définition de la biodégradabilité qui tient imparfaitement compte de la capacité du plastique à se diviser en microparticules
2.1.2 Une règlementation des produits chimiques qui n?intègre pas les micro-plastiques
2.1.3 Une règlementation sur la pollution de l?eau et de l?air qui n?intégrait pas les micro-plastiques
2.1.4 Une règlementation sur l?exportation des déchets ne permettant pas leur contrôle
2.2 Les mesures adoptées en France sont insuffisantes
2.2.1 Une règlementation française centrée sur la REP et le recyclage qui ne règle pas la pollution par les micro-plastiques textiles
2.2.1.1 Le principe de la responsabilité élargie des producteurs et son application au secteur du textile
2.2.1.2 Une politique de recyclage qui ne répond pas à la pollution par les micro-plastiques
2.2.2 La loi AGEC tente d?apporter une solution avec l?équipement obligatoire de filtres à micro-plastiques dans les lave-linges
2.2.3 La captation des micro-plastiques textiles dans les boues des stations d?épuration
2.2.4 Les mesures qui prolongent la durée de vie des textiles ralentissent la pollution
2.2.4.1 L?interdiction de l?élimination des invendus, une mesure forte
2.2.4.2 Le cahier des charges de Refashion lui impose de promouvoir la réparation, le réemploi et la réutilisation
2.2.5 La lente émergence d?une information des consommateurs et de l?écoconception
2.2.5.1 De l?encadrement des allégations environnementales vers l?étiquetage obligatoire
2.2.5.2 L?affichage environnemental devrait « valoriser » le risque de pollution par les microparticules de plastique
2.3 Le secteur économique cherche peu à réduire la pollution à la source
2.3.1 Un secteur en transition, peu mobilisé sur la question des micro-plastiques
2.3.1.1 Les transformations du secteur
2.3.1.2 Quelques initiatives vers des textiles naturels ou moins émetteurs de micro-plastiques
2.3.2 Aucun label environnemental ne semble afficher de critères sur les émissions de micro-plastiques
2.4 De nouveaux outils qui devraient permettre de dépasser ces freins
2.4.1 Les recherches scientifiques en cours
2.4.2 De nouvelles normes devraient faciliter l?avancée des recherches sur les émissions de micro-plastiques
2.4.2.1 Des définitions communes des particules fines de plastiques
2.4.2.2 Une harmonisation des méthodes pour mesurer et analyser les pertes de matières lors des lavages des textiles
2.4.3 Les évolutions règlementaires à venir à l?échelle européenne
3 Afin de mieux répondre à cette pollution, il est nécessaire de prendre en compte le cycle de vie du produit textile
3.1 Approfondir les efforts de recherche
3.2 Répondre aux émissions lors de la création des étoffes et des produits
3.3 Faire du consommateur un acteur éclairé de la réduction de la pollution par les micro-plastiques
3.4 Répondre aux émissions lors de l?usage du produit
3.4.1 Les émissions lors des lavages des produits
3.4.2 Les émissions lors du port des produits
3.5 Répondre aux émissions lorsque le textile devient déchet
3.5.1 La collecte, le tri et les usages nouveaux (réemploi, réutilisation)
3.5.2 Les problèmes de pollution créés par l?exportation des déchets textiles européens et français
Conclusion
Annexes
Annexe 1. Lettre de mission
Annexe 2. Liste des personnes rencontrées
Annexe 3. Glossaire des sigles et acronymes
Annexe 4. Quelques chiffres sur la pollution plastique en général
INVALIDE) (ATTENTION: OPTION uropa.eu/info/law/better-regulation/have-your-say/initiatives/12328-Utilisation-des-boues-depuration-dans-lagriculture-Evaluation_fr
https://ec.europa.eu/info/law/better-regulation/have-your-say/initiatives/12328-Utilisation-des-boues-depuration-dans-lagriculture-Evaluation_fr
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 32/72
boues d?épuration est constituée de micro-plastiques 75 , cette évaluation conclut que cette
contamination ne peut être quantifiée à ce stade et renvoie la prise de décision à une meilleure
articulation avec la révision de la directive DERU qui est en cours76.
Concernant la pollution de l?air, les micro-plastiques sont totalement absents des normes
européennes77, même des actes en cours de révision. La règlementation des particules fines (PM10
et PM2,5) ne définit pas leur composition chimique et fait seulement référence à leur taille (particules
allant jusqu?à 10 microns ou 2,5 microns dans leur plus grande dimension). Les nano-plastiques
pourraient donc être intégrés dans cette catégorie. Néanmoins les microfibres semblent échapper
à ce cadre, d?une part, en raison de leurs dimensions, et d?autre part, parce qu?elles seraient surtout
présentes dans l?air ambiant intérieur, qui ne fait pas l?objet de textes européens actuellement.
2.1.4 Une règlementation sur l?exportation des déchets ne permettant pas
leur contrôle
Enfin, les déchets textiles ne font pas partie des produits exclus d?exportation78 et le contrôle
insuffisant des conditions dans lesquelles ils sont gérés dans les pays de destination, en particulier
dans les pays en développement, représente une lacune majeure de la règlementation actuelle.
En conséquence, l'exportation de certains déchets depuis l'UE a créé des problèmes
environnementaux et de santé publique dans les pays de destination. Le texte est lui aussi en cours
de révision afin de renforcer notamment l?autorisation d?accès aux pays tiers des exportations
susceptibles de causer des dommages environnementaux dans le pays importateur.
2.2 Les mesures adoptées en France sont insuffisantes
2.2.1 Une règlementation française centrée sur la REP et le recyclage qui
ne règle pas la pollution par les micro-plastiques textiles
Pour améliorer l?empreinte environnementale des textiles, les pouvoirs publics français ont adopté
des dispositions qui encouragent le recyclage79 et l?incorporation de matières recyclées dans les
étoffes mises sur le marché. Avant de les présenter, il convient de restituer le contexte de la
responsabilité élargie des producteurs, qui concerne également le secteur des textiles, linges de
maison et chaussures (TLC).
2.2.1.1 Le principe de la responsabilité élargie des producteurs et son application au
secteur du textile
La responsabilité élargie du producteur (REP) est une déclinaison à la fois du principe « pollueur-
payeur » posé par l?article 4 de la Charte de l?environnement mais aussi, depuis la loi AGEC, du
75 ?Microplastics removal from a primary settler tank in a wastewater treatment plant and estimations of
contamination onto European agricultural land via sewage sludge recycling, Environmental Pollution, Volume 304,
2022 https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0269749122004122
76 Au moment de l?écriture de ce rapport, la révision de la DERU est en cours d?examen par le conseil et le
Parlement européen. La poursuite de l?examen des textes est inscrite à l?agenda du 2nd semestre 2023.
77 https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:2ae4a0cc-55f8-11ed-92ed-
01aa75ed71a1.0001.02/DOC_3&format=PDF
78 Règlement sur l?exportation de déchets amendant les règlement 1257/2013 et 2020/1056 du 17/11/2021. Les
produits textiles sont listés B3030 et ne sont pas couvert par l?interdiction d?exportation, n?étant pas couverts par la
convention de Bâle.
79 L?article L. 541-1-1 du code de l?environnement définit ainsi le recyclage : « toute opération de valorisation par
laquelle les déchets, y compris les déchets organiques, sont retraités en substances, matières ou produits aux fins
de leur fonction initiale ou à d'autres fins. »
PUBLIÉ
https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0269749122004122
https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:2ae4a0cc-55f8-11ed-92ed-01aa75ed71a1.0001.02/DOC_3&format=PDF
https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:2ae4a0cc-55f8-11ed-92ed-01aa75ed71a1.0001.02/DOC_3&format=PDF
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 33/72
principe de prévention qui résulte de l?article 3 de la même Charte. Ce dispositif, initié en France
en 1992 pour les déchets ménagers et conforté au niveau de l?Union européenne par la directive
cadre sur les déchets de 2008 80 , prévoit en effet désormais que les acteurs économiques
(fabricants, distributeurs, importateurs, exportateurs) sont responsables de l?ensemble du cycle de
vie des produits qu?ils mettent sur le marché, de leur écoconception jusqu?à la fin de leur vie.
En pratique, dans chaque filière pour laquelle un mécanisme de REP a été instauré, ces acteurs
doivent assumer la charge financière de la collecte sélective puis du recyclage ou du traitement
des déchets issus de leur production. Ils peuvent le faire de façon individuelle ou collective dans le
cadre d'un éco-organisme. Dans ce dernier cas, ils adhèrent à une société agréée par les pouvoirs
publics à laquelle ils versent une contribution financière.
La loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et l?économie circulaire
dite « loi AGEC » a ajouté aux obligations préexistantes, celles d?adopter une démarche
d'écoconception des produits, de favoriser l'allongement de la durée de vie des produits, de
soutenir les réseaux de réemploi, de réutilisation et de réparation, de contribuer à des projets d'aide
au développement en matière de collecte et de traitement de leurs déchets et de développer le
recyclage des déchets issus des produits.
S?agissant du champ d?application du dispositif, la loi AGEC a étendu la REP en vigueur depuis
2008 pour les textiles d?habillement, des chaussures et le linge de maison (TLC), aux produits
textiles neufs pour la maison81.
La mission s?est demandée pourquoi les vêtements professionnels ou du moins certains d?entre
eux n?étaient pas soumis à la filière REP d?autant qu?ils incorporaient bien souvent des plastiques.
À la suite de réflexions engagées en 2014, le choix a été fait de susciter des projets volontaires de
la part des entreprises ou des administrations. La structuration d?une filière de réemploi / recyclage
industrielle des vêtements professionnels (projet "FRIVEP") a été l?un des quatre premiers
engagements pour la croissance verte, signé le 27 avril 2016. Cette démarche a notamment
débouché sur la rédaction d?un livret d?écoconception des vêtements professionnels en 202082.
L?éco-organisme qui assure les obligations des producteurs de déchets textiles s?ils le souhaitent
est Refashion (ex Eco TLC), agréé depuis 2019 et dont l?agrément a été renouvelé par arrêté du
23 décembre 2022. Un nouveau cahier des charges lui a été fixé par arrêté du 23 novembre 202383
quant à ses objectifs en matière de collecte et de valorisation des textiles usagés.
2.2.1.2 Une politique de recyclage qui ne répond pas à la pollution par les micro-
plastiques
Au sens de la loi française, le recyclage ne se traduit pas nécessairement par la fabrication du
produit pour le même usage. On distingue à cet égard, le recyclage en boucle fermée (même usage)
80 2008/98/CE du 19 novembre 2008
81 Art. L. 541-10-1 du code de l?environnement
82 « Livret d?écoconception des vêtements professionnels ; retours d?expériences du projet FRIVEP » réalisé par
OREE en juin 2020
83 Nouveaux objectifs :
? Taux de collecte des TLC usagés : 60% en 2028,
? TLC usagés triés devant être réemployés ou réutilisés : 120 000 tonnes en 2024,
? Taux de réutilisation / réemploi à moins de 1 500 km du lieu de collecte : 15% en 2027,
? Taux de recyclage des TLC usagés non réutilisées : 70% en 2024, 80% en 2027,
? Taux de recyclage des TLC usagés intégrant au moins 90% de matières synthétiques plastiques non
réutilisées : 50% en 2025, 90% en 2027,
? Au plus 0,5 % des TLC collectés ou soutenus sont éliminés (stockage, incinération sans valorisation éner-
gétique).
Source : site du ministère de la transition écologique
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 34/72
du recyclage en boucle ouverte (destination différente à la suite d?altération des propriétés du
plastique). D?ailleurs l?article R. 541-221 du code de l?environnement définit la recyclabilité comme
la capacité de recyclage effective des déchets issus de produits identiques ou similaires. Si la
matière recyclée issue du recyclage représente plus de 95% du déchet collecté, le produit peut
porter la mention « produit entièrement recyclable ». En tout cas, cette part doit être supérieure ou
égale à 50% de la masse du déchet collecté. Si l?usage et la destination du produit recyclé sont
identiques et sans perte fonctionnelle, l?information peut indiquer « produit recyclable en un produit
de même nature ».
Des sommes considérables sont investies dans la politique de recyclage du textile, notamment
dans la recherche appliquée. Cette politique est à vrai dire en ligne avec les objectifs de l?UE en
matière de recyclage des plastiques.
Techniques de recyclage des plastiques
On distingue le recyclage mécanique et le recyclage chimique.
Le recyclage mécanique conduit à broyer, laver, retrier, extruder puis transformer en granulés des polymères
homogènes sans que soit modifiée leur structure.
Le recyclage chimique englobe toute technologie de retraitement utilisant des agents ou des procédés chimiques
qui affectent directement le plastique ou le polymère lui-même. Trois grandes familles de technologie existent : la
purification à l?aide de solvants, la dépolymérisation, la dépolymérisation thermique
L?OPESCT considère que « la filière mondiale du recyclage chimique est toujours en phase de test ». La France
compterait 13 projets de recyclage chimique.
Source : note n°39 de l?Office parlementaire d?évaluation des choix scientifiques et techniques (OPECST) « Le
recyclage des plastiques » juin 2023
Les autorités françaises ont mis en place des mesures incitatives pour encourager le recyclage.
a) des objectifs particulièrement ambitieux sont assignés à Refashion qui peut les traduire via des
éco-modulations.
Ces objectifs de recyclage de plus de 50% des TLC usagés sont à comparer aux 32% du taux de
recyclage constaté en 2021. En trois ans, ce taux doit plus que doubler, surtout lorsque les produits
d?origine intègrent beaucoup de plastiques. Pour l?atteindre, l?éco-organisme Refashion va devoir
inciter les producteurs, importateurs et distributeurs par tous les outils mis à sa disposition et
notamment les éco-modulations.
Les éco-modulations
L?article L. 541-10-3 du code de l?environnement permet des modulations des contributions financières des
producteurs, sous forme de primes ou de pénalités, au regard des meilleures techniques disponibles en fonction
de critères de performance environnementale (notamment la quantité de matière utilisée, l?incorporation de matière
recyclée, l?emploi de ressources renouvelables gérées durablement, la durabilité, la réparabilité, les possibilités de
réemploi ou de réutilisation, la recyclabilité, l?absence d?écotoxicité).
Les éco-modulations sont soumises pour avis au comité des parties prenantes84, prévu par l?article L. 541-10 du
code de l?environnement, puis sont arrêtées par le ministre chargé de l?environnement après avis de la commission
interfilière. L?éco-modulation ne doit pas dépasser 20% du montant du prix de vente du produit.
Le cahier des charges prévoit des éco-modulations positives ou négatives en fonction du respect de l?affichage
environnemental quand il sera en vigueur et de la recyclabilité des TLC après production d?une étude.
84 Selon l?article L. 541-10, chaque éco-organisme crée un comité des parties prenantes, composé notamment de
producteurs, de représentants de collectivités territoriales, d?associations de protection de l?environnement agréées,
d?association de protection des consommateurs ainsi que d?opérateurs de la prévention et de la gestion des déchets,
dont ceux de l?économie sociale et solidaire
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 35/72
Mais, actuellement, seules des éco-modulations positives sont versées sous forme de primes aux producteurs de
déchets en fonction de la durabilité des TLC, des certifications par des labels environnementaux (huit sont
sélectionnées par l?arrêté85 mais l?éco-organisme peut en proposer d?autres après avis du comité des parties
prenantes) et de la quantité de matières recyclées dans les produits.
b) des obligations d?étiquetage :
L?article L. 541-9-1 du code de l?environnement et son décret d?application86 prévoient, selon un
calendrier échelonné en fonction de la taille des entreprises et de leurs ventes87, que les textiles
d?habillement et linge de maison neufs comportant des matières recyclées devront mentionner
cette composition (R. 541-221- III) et qu?ils devront également indiquer leur recyclabilité (R. 541-
221-VI) en signalant s?ils sont majoritairement ou entièrement recyclables (recyclables à plus de
95%) ou encore « recyclable en un produit de même nature » ; cette obligation ne pèse que si cinq
critères88 qui définissent la recyclabilité sont tous remplis.
Sur ce dernier point, Refashion a fait savoir à ses adhérents qu?il considérait qu?aucun d?entre eux
n?était à ce jour soumis à l?obligation d?informer les consommateurs car les cinq critères
précédemment évoqués n?étaient pas tous réunis. En effet, cet éco-organisme considère que la
filière REP TLC est tournée depuis son origine vers la réutilisation des produits, en application de
la hiérarchie des modes de traitement des déchets inscrite à l?article L. 541-1 du code de
l?environnement et qu?ainsi elle ne dispose pas des capacités de recyclage suffisantes pour
répondre au 5ème critère. En 2021, le taux de réutilisation des déchets TLC atteignait 58% et
le recyclage 32%. Refashion s?engage en revanche à réévaluer régulièrement la recyclabilité
des produits TLC en fonction de l?évolution de la filière à plus et mieux recycler.
c) Les plans de prévention et d?écoconception :
L?article L. 541-10-12 du code de l?environnement, auquel sont soumis tous les producteurs de
déchets, leur impose d?établir tous les cinq ans un plan de prévention et d?écoconception. Qu?ils
soient individuels ou communs à plusieurs entreprises, ils doivent nécessairement comporter des
chapitres expliquant comment ils comptent réduire l?usage des ressources non renouvelables,
accroitre l?utilisation de matières recyclées et la recyclabilité des produits. Dans le secteur des TLC,
ils devaient être transmis à Refashion (même si l?entreprise n?est pas adhérente) avant le 31 juillet
2023 qui doit en faire une synthèse à la fin de l?année. L?éco-organisme met en ligne des outils
pour aider les entreprises à remplir cette nouvelle obligation (guide de rédaction, trame vierge et
pré-remplie avec des exemples d?indicateurs et d?objectifs).
En premier lieu, la mission souligne là encore la priorité accordée au recyclage. Par ailleurs,
l?objectif de réduction des ressources non renouvelables n?est pas détaillé.
85 Ecocert textile, Oeko-tex, Made in Green, Bluesign, Fairtrade, Ecolabel Européen, Demeter, GOTS et Bioré
86 Décret n° 2022-748 du 29 avril 2022 qui a créé les articles R. 541-220 à 223 du code de l?environnement
87 À compter du 1er janvier 2023 pour les entreprises dont le chiffre d?affaires dépasse 50 M ¤ et qui mettent
chaque année plus de 25 000 unités, du 1er janvier 2024 pour celles pour lesquelles ces données sont supérieures
respectivement à 20M¤ et 10 000 unités, et du 1er janvier 2025 pour celles pour lesquelles elles sont supérieures
à 10M¤ et 10 000 unités,
88 Les 5 critères sont les suivants :
« 1° La capacité à être efficacement collecté à l?échelle du territoire, via l?accès de la population à des points de
collecte de proximité ;
2° La capacité à être trié, c?est-à-dire orienté vers les filières de recyclage afin d?être recyclé ;
3° L?absence d?éléments ou substances perturbant le tri, le recyclage ou limitant l?utilisation de la matière recyclée ;
4° La capacité à ce que la matière recyclée produite par les processus de recyclage mis en oeuvre représente plus
de 50 % en masse du déchet collecté ;
5° La capacité à être recyclé à l?échelle industrielle et en pratique, notamment via une garantie que la qualité
de la matière recyclée obtenue est suffisante pour garantir la pérennité des débouchés, et à ce que la filière
de recyclage puisse justifier d?une bonne capacité de prise en charge des produits pouvant s?y intégrer ».
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 36/72
En second lieu, elle considère, qu?en l?état des connaissances, le recyclage n?est pas une solution
au problème de la pollution micro-plastique puisque, a priori, rien ne permet de penser que les
textiles issus du recyclage sont moins émetteurs de micro-plastiques que le textile d?origine.
Tout d?abord, la pollution par les micro-plastiques en provenance des plastiques recyclés et des
opérations de recyclage n?est pas connue. La mission n?a pas connaissance de recherches sur ces
sujets pourtant essentiels compte tenu des objectifs de recyclage que notre pays poursuit.
L?OPESCT relève seulement que le laboratoire national de métrologie propose de mettre en place
un observatoire national sur les matériaux recyclés afin d?évaluer les risques émergents liés au
développement du recyclage89.
En absence de données sur cette question, la mission postule que le relargage de micro-plastiques
par des étoffes produites à partir de plastiques recyclés, qu?ils proviennent de bouteilles ou de
jeans, est identique à celui des produits composés de plastiques qui ont subi des opérations de
recyclage. Autrement dit, au mieux, le problème ne fait que perdurer. Il peut aussi être amplifié tout
au long du cycle de vie de la nouvelle étoffe.
Ensuite, des limites techniques demeurent : seuls quelques textiles peuvent être recyclés à
l?identique et pendant un temps limité. Le reste subit des déclassements progressifs. Dans ces
conditions, l?OPECST estime que le recyclage n?est qu?un « amortisseur temporel de la formation
des déchets, sans les éviter ». Nathalie Gontard fait la même analyse90. En outre, elle souligne
que « les industries de la mode (?) proposent de nouvelles fibres textiles en plastique recyclé pour
remplacer les fibres vierges ou naturelles ».
Enfin et ce n?est pas la moindre des observations, l?accent trop important mis sur le recyclage ne
respecte pas la hiérarchie des modes de traitement des déchets, qui devrait pourtant être la
boussole des politiques publiques en application de l?article 4 de la directive cadre déchets 2008/98
transposé à l?article L. 541-1 du code de l?environnement en France. Cet article donne la priorité à
la prévention et à la réduction des déchets notamment via la conception et les actions en faveur
du réemploi des produits. Ensuite, lorsque les déchets sont inévitables, il privilégie dans l?ordre : la
préparation à leur réutilisation, leur recyclage, toute autre valorisation, enfin seulement leur
élimination.
2.2.2 La loi AGEC tente d?apporter une solution avec l?équipement
obligatoire de filtres à micro-plastiques dans les lave-linges
La loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et l?économie circulaire,
dite « loi AGEC », comporte de nombreuses dispositions relatives à la lutte contre la pollution
plastique, notamment les micro-plastiques. Son article 79, modifié depuis par l?article 47 de la loi
n° 2021-1104 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à
ses effets, dite « loi Climat et Résilience », prévoit qu?à compter du 1er janvier 2025 les lave-linges
neufs domestiques ou professionnels vendus en France seront dotés d?un filtre à microfibres de
plastique ou de toute autre solution interne ou externe permettant leur captation. L?entrée en
vigueur de cette disposition est conditionnée à la publication des textes réglementaires qui en
fixeront les modalités d?application. Ces projets sont en cours de rédaction à la date de rédaction
du présent rapport.
Cette mesure nécessite le développement par le secteur industriel de l?électroménager, qui n?est
pourtant pas le pollueur au sens de l?application du principe pollueur-payeur ou du dispositif de
REP, de tels produits.
89 « Le recyclage des plastiques », Note scientifique de l?OPESCT de juin 2023
90 « Plastique : le grand emballement » page 155, Nathalie Gontard avec Hélène Seinglier : édition Stock, 2020
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 37/72
À ce stade, le marché ne compte que deux machines à laver le linge domestiques ainsi équipées.
Le groupe Arcelik met sur le marché deux produits ? l?un sous la marque Beko® qui a créé le
produit et l?autre sous la marque Grundig® - équipés d?un « Fibercatcher », un filtre intégré dans
une cartouche située à l?arrière du bac à lessive. La technologie ne s?active que sur le programme
synthétique, car sinon les microfibres naturelles de coton également relarguées lors des lavages
la rendraient inopérante. Le circuit d?évacuation de l?eau a été repensé pour que l?eau repasse par
le bac à lessive et donc le filtre avant d?être rejetée. La technologie « Fibercatcher » capturerait
« jusqu?à 90 % des microfibres plastiques émises lors du cycle de lavage ». La cartouche se
change tous les 6 mois environ (en fonction du nombre de cycles dédiés au lavage synthétique) :
elle coûte 19,99 euros, est fabriquée à partir de 98 % de plastique recyclé. Ces lave-linges sont
vendus entre 599 et 699 euros91.
La marque Electrolux® a fait un autre choix et propose un filtre externe qui s?adapte à toutes ses
machines à laver le linge et s?installe sur le mur au niveau de la sortie d?eau de la machine. Le prix
est similaire, machine et filtre, la promesse de captation est également de 90% de microparticules
de plus de 45 microns. Le filtre seul coûte 79,90 euros et doit être nettoyé en rejetant les résidus
dans la poubelle classique lorsque le voyant s?allume ; sa cartouche doit toutefois être changée
tous les 6 mois environ, en fonction de la fréquence des cycles dédiés au lavage des vêtements
synthétiques. Le kit Electrolux Filtre Micro-plastiques E9WHMIC1 est livré avec deux cartouches
filtrantes, soit environ un an de lavages (en fonction des habitudes) avant le rachat d?une recharge
de cartouches filtrantes, vendues par deux.
D?autres produits sont également disponibles sur le marché mais ne sont pas proposés par les
fabricants de lave-linges : autres types de filtres externes et sacs de lavage.
On notera que tous ces produits nécessitent, au-delà de l?acte d?achat, un comportement volontaire
de la part du ménage utilisateur, du lancement du bon programme, avec le regroupement du textile
synthétique, au vidage/nettoyage/échange du filtre.
L?industrie du secteur des lave-linges est mobilisée sur cet enjeu depuis l?adoption de la loi AGEC
et du règlement européen prévoyant une modification en 2025 des règles d?écoconception des
machines à laver le linge. Regroupée au sein d?APPLIA92, elle a réalisé une étude en 2020 confiée
à RISE (Research Institute of Sweden)93 qui évalue le nombre de fibres micro-plastiques issues du
lavage en machine dans l?Union européenne de 20 à 500 mg de microfibres de polyester issus
des textiles, relâchées entre le 2ème et le 5ème lavage. En prenant comme hypothèses un nombre
d?habitants de l?UE + UK de 513 M d?habitants, lavant 265 kg de linge par personne et par an dont
55% de textiles synthétiques, l?étude arrive à une émission de 15 000 tonnes de fibres émises par
an après filtrage par les stations d?épuration qui sont supposées capter 90% des fibres mais ne
traitent pas 10% des flux.
91 Sachant qu?un lave-linge premier prix (capacité de 5kg) a un prix aux alentours de 200 euros mais qu?un lave-
linge de 9kg de classe énergétique A sans filtre atteint 600 euros.
92 APPLIA (Home Appliance for Europe) ? Représente les fabricants d?électroménager européen (Arcelik, Ariston,
BSH, Candy, Daikin, De Longhi, Dyson, Electrolux, Groupe Atlantic, Gorenje, LG, Liebherr, Miele, Philips,
Panasonic, Samsung, Seb, Smeg, Vestel, Vorwerk, Whirlpool).
93 RISE est un institut de recherche suédois impliqué dans les projets de recherche sur les micro-plastiques lancés
par le gouvernement de la Suède.
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 38/72
Figure 11 : Nombre de fibres émises avec inclusion du 1er lavage (source : APLLIA)94
Néanmoins, en raison de l?absence à ce stade de méthodologie unifiée validée, l?industrie
considère que des études supplémentaires sont nécessaires pour évaluer la capacité de captation
des filtres, et même le niveau d?émission des fibres synthétiques. De nombreux facteurs entrent
en ligne de compte : type de machine (domestique, laboratoire, commerciale), nombre de lavages,
nature du filtre qui collecte les microparticules, lavage de la machine entre les tests, type d?étoffe
(polymère mais aussi méthode de tissage/tricotage, type de fil, existence d?un prétraitement),
température de lavage et type de détergent utilisé, quantité d?eau, etc. Elle reconnait néanmoins
des tendances :
? la majorité des microparticules sont émises lors des premiers lavages jusqu?aux cycles 5 à
10 ;
? la température accroit le nombre de particules émises, ainsi que l?utilisation de détergent ;
? la finesse des mailles de captation des filtres est déterminante ; dans une étude menée en
2016 par des chercheurs de la Plymouth University, la taille moyenne des fibres récoltées
était comprise entre 11,9 et 17,7 microns de diamètre ; autrement dit, une grande part de
ces microplastiques seraient passés à travers les mailles du filtre Electrolux® ;
? les tests en laboratoire et ceux dans des machines commerciales sont tout autant valables,
mais des conclusions sont difficiles à retirer des tests en laboratoire par rapport aux impacts
sur les vêtements dans la vie réelle des produits.
Il apparait donc que l?équipement obligatoire des lave-linges en filtres ne peut régler à lui seul la
question de la pollution aux micro-plastiques pour les raisons suivantes :
elle ne permet pas la captation de l?ensemble des fibres émises ;
elle arrive à un stade avancé du cycle de vie du textile alors que les émissions les plus
importantes interviennent lors de la fabrication et de la teinture des produits ;
elle doit s?accompagner de la mise en place de procédés de traitements des résidus filtrés
par les lave-linges et d?acteurs économiques en capacité de les prendre en charge ;
son efficacité repose sur le respect par les particuliers d?un certain nombre de consignes,
tout à fait nouvelles pour eux (récupérer les résidus et les déposer à certains endroits ou
envoyer le filtre régulièrement à des entreprises qui le laveront et le retourneront aux
usagers, voire, au regard des produits actuellement sur le marché, nettoyage du filtre
externe), étant souligné que seuls les acquéreurs de nouvelles machines à laver le linge
seront concernés.
94 Littérature review ? Microplastic emissions from textile laundry including emission scenarios for EU ?
08/10/2020 ? R. Landin, K. Jedvert, AC Hanning, A. Hakonen
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 39/72
Enfin, cette disposition soulève des questions vis-à-vis du droit de l?Union européenne. En premier
lieu, on peut s?interroger sur sa conformité à l?article 34 du Traité sur le fonctionnement de l?UE
(TFUE) qui prohibe les mesures équivalentes à une restriction de la libre circulation des
marchandises au sein de l?Union. Cette interdiction est néanmoins levée si la mesure peut être
regardée comme une exigence impérative d?intérêt général, nécessaire et proportionnée (art 36 du
TFUE95). Toutefois, les observations précédentes conduisent à se demander si la Cour de justice
considérerait qu?une telle exigence peut être en l?espèce reconnue. L?appréciation portée sur cette
proportionnalité devra tenir compte des éléments qui figureront dans la communication de la
Commission européenne attendue sur les micro-plastiques et notamment le maintien d?un objectif
de révision du règlement écoconception des machines à laver le linge dès 2025. Et encore faudrait-
il que cette révision soit acceptée par une majorité d?États membres. En tout état de cause, elle ne
pourrait sans doute pas intervenir avant la fin de l?année 2027.
Malgré toutes les difficultés et sous les réserves exposées précédemment, le filtre à particules
micro-plastiques, interne ou externe aux lave-linges, peut constituer une des mesures permettant
de réduire la pollution résultant des micro-plastiques d?origine textile. Elle pourrait devenir effective
progressivement, au fur et à mesure du renouvellement du parc de lave-linges des particuliers.
Néanmoins, il conviendrait, pour éviter tout contentieux, que l?échéance prévue par l?article 79 de
la loi AGEC soit repoussée, voire que la disposition soit réécrite, en adaptant le dispositif français
aux futures dispositions européennes.
2.2.3 La captation des micro-plastiques textiles dans les boues des
stations d?épuration
L?article L. 541-38 du code de l?environnement, modifié par la loi AGEC, prévoit que les référentiels
des boues d?épurations doivent au plus tard le 1er juillet 2021 prendre en compte les « particules
de plastiques » en fonction de l?évolution des connaissances. Les textes d?application96 permettant
la mise en oeuvre de ces dispositions sont en cours d?écriture par les services de l?État (ministère
de l?agriculture, avec le ministère de la transition écologique). Les projets de décret et d?arrêté ?
qui vont entrer en consultation dans le courant du second semestre 2023 - prévoient effectivement
une « teneur maximale en inertes et impuretés » dans lesquelles figurent les micro-plastiques
d?une taille supérieure à 2 mm97.
Comme indiqué précédemment, la révision en cours de la directive DERU va imposer la réalisation
de telles évaluations.
Les questions posées ici sont de deux ordres :
? Quels pourcentages de microparticules sont effectivement captées lors du traitement des
eaux usées ?
? Quelles quantités de micro-plastiques sont ensuite transférés dans les sols via l?épandage
des boues d?épuration des stations ?
95 Voir l?interprétation par la CJUE de l?article 36 du TFUE : CJUE, 11 septembre 2014, Essent Belgium, C-204/12
à C-208/12, pt. 90 ; CJCE, 20 septembre 1988, Commission c. Royaume de Danemark, C-302/86, pt. 9 ainsi que
CJUE, 23 décembre 2015, Scotch Whisky Association, C-333/14, pt. 53.
96 L?article 86 de la loi AGEC prévoyait la révision des textes réglementaires applicables à l?épandage des boues
d?épuration urbaines et industrielles, au plus tard le 1er juillet 2021, afin de mettre sur un pied d?égalité toutes les
matières fertilisantes et supports de culture (MFSC), en fixant des critères de qualité agronomique et d?innocuité,
« afin de s?assurer que leur mise sur le marché et leur utilisation ne portent pas atteinte à la santé et à
l?environnement ». À partir de cette date, les MFSC ne respectant pas les nouveaux textes, n?auraient pu être
valorisées en agriculture.
97 Projet : teneur maximale en plastique de +2 mm = 3 g/kg de matière sèche
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 40/72
Concernant la captation des microparticules de plastique par les stations d?épuration, la littérature
scientifique estime que les stations d?épuration actuelles (à l?échelle mondiale) en retirent, lors du
traitement des eaux usées, entre 58,8 et 99,9%98, et que 79% des micro-plastiques entrant dans
la station d?épuration finissent dans les boues ou encore que l?on compte entre 1 000 et 300 000
microparticules de plastique dans 1kg de boues d?épuration. La littérature scientifique met
également en avant le fait qu?en sus d?être une pollution en soi, les micro-plastiques sont également
le véhicule potentiel d?autres contaminants (métaux lourds, bactéries, produits pharmaceutiques)
qui sont transférés dans les sols et impactent leur qualité en tant qu?écosystème.
De nouvelles technologies existent permettant de retirer jusqu?à plus de 98% des micro-plastiques
présents dans les eaux usées en combinant des techniques conventionnelles de boues activées
et un traitement par bioréacteur à membrane. Elles sont proposées par l?ensemble des industriels
de la filière de traitement des eaux usées.
Bioréacteur à membrane
Un bioréacteur à membrane (BRM) est une technologie utilisée dans une station d?épuration pour améliorer la
qualité de l?eau rejetée : elle fait usage de membranes de microfiltration ou d?ultrafiltration pour séparer l?eau traitée
des flocs bactériens. Ces membranes ont une porosité inférieure à 0,1 µm et séparent toutes les bactéries et
matières en suspension de l?eau épurée. Le module membranaire peut être immergé dans le bassin biologique ou
placé à l?extérieur du bassin biologique.
Les installations BRM sont généralement plus chères et consomment plus d?énergie que les stations d?épuration
classiques. Leur gros avantage réside dans la très bonne qualité de leurs effluents.
Différents types de membranes sont disponibles en fonction de la taille de l?installation et du type d?eau usée.
En remplaçant l'étape traditionnelle de clarification gravitaire, la séparation membranaire supprime les contraintes
liées à la décantation des boues : la qualité de rejet est donc parfaitement maîtrisée.
Les problèmes posés par cette évolution technologique, qui permettrait la captation de la plupart
des micro-plastiques, sont en premier lieu son prix et son calendrier de mise en oeuvre : elle
implique en effet un équipement du parc national de stations d?épuration qui prendra du temps et
aura un coût important, alors que la France est aujourd?hui déjà confrontée à un non-respect des
obligations relatives à la directive eaux résiduaires urbaines (cf. rapport IGEDD 014474-0199 ).
Actuellement, un nombre réduit de stations d?épuration (il s?agit en général de celles qui rejettent
leurs effluents en zone sensible), ont été équipées de ce type d?installation. Cette technologie
entraine par ailleurs un surcoût énergétique de fonctionnement.
Les stations d?épuration en France
En 2020, la France compte 22 331 usines de traitement des eaux usées représentant une capacité totale de
105 000 000 équivalent-habitants (EH).
Les STEU délivrant au moins un traitement secondaire représentent 96 % de la capacité totale des installations en
activité en France et celles assurant un traitement encore plus rigoureux couvrent 80 % de cette capacité totale.
Le besoin de renouvellement annuel nécessaire pour maintenir la valeur du patrimoine d?assainissement est estimé
entre 3,9 et 5,7 millions d?euros. Ce patrimoine ferait l?objet d?un sous-investissement, principalement dans le
réseau, les postes de refoulement et les branchements, de l?ordre de 1,4 Mds/an. Cette évaluation ne prend pas
en compte les nouveaux besoins (investissements eaux pluviales, lutte contre les micropolluants et les micro-
plastiques).
98 ?Microplastic contamination in sewage sludge: Abundance, characteristics, and impacts on the environment and
human health? - Environmental Technology & Innovation 31 (2023) 103176 ? 23 avril 2023
99 https://www.igedd.developpement-durable.gouv.fr/comment-ameliorer-durablement-la-collecte-et-le-
a3734.html
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 41/72
Source :
UIE - Étude patrimoniale eau Rapport 2022
Service des données et études statistiques du ministère de la transition écologique, 2020
Mais surtout, la mise en oeuvre du concept d?économie circulaire implique que les boues
d?épuration soient utilisées au maximum de leurs capacités pour produire de l?énergie ou des
produits annexes (matériaux de construction, engrais, source d?énergie pour la production de
biogaz ou d?énergie à travers l?incinération). En France, 80% des boues d?épuration produites
sont épandues dans les champs. Or l?usage des boues d?épuration comme engrais agricole
conduit à répandre dans les sols des micro-plastiques, cette méthode devenant ainsi sans doute
l?une des principales sources de contamination des sols par les micro-plastiques.
Il en découle donc que, quand bien même l?ensemble des stations d?épuration seraient équipées
de bioréacteurs membranaires d?ici 15 ans, les micro-plastiques captés dans les boues poseraient
toujours le problème de leur gestion finale. Si l?épandage venait à être remis en cause pour être
remplacé par une élimination des boues par incinération, les volumes de boues à traiter
nécessiterait l?équipement des collectivités en incinérateurs, et donc de nouvelles dépenses
publiques. Par ailleurs, des études indiquent que l?incinération des boues peut également être
source de diffusion de micro/nano-plastiques dans l?air.
Il convient enfin de rappeler qu?une partie des micro-plastiques restent véhiculés par les eaux
pluviales (pneus et peintures routières) qui ne font pas l?objet de traitement dans les collectivités
équipées de réseaux séparatifs.
En conclusion sur ce point, la mission considère que l?utilisation des boues d?épuration comme
fertilisant dans les champs agricoles devrait faire l?objet d?un examen plus poussé afin de minimiser
les risques pour la santé humaine et les écosystèmes. Il convient de rappeler ici que l?épandage
des boues d?épuration urbaines et industrielles ne représente que 12 à 13% des épandages en
général100. L?arrêt ou la réduction de l?épandage des boues d?épuration sera donc principalement
un problème de gestion desdites boues dont le principal usage final serait modifié101.
2.2.4 Les mesures qui prolongent la durée de vie des textiles ralentissent
la pollution
Face à des étoffes composées en tout ou partie de polymères dont les émissions sont
principalement réalisées en début de cycle de vie, retarder leur fin de vie, et la gérer car elle est
susceptible à nouveau de générer de nombreux micro-plastiques dans l?eau, dans l?air, dans le sol,
peut apparaitre comme une solution, qui en plus s?inscrit dans la politique nationale et européenne
de développement de réduction de l?impact environnemental de la filière textile. À cet égard la
prohibition de l?élimination des invendus est une mesure contraignante intéressante aux yeux de
la mission. De même, les dispositifs encourageant la réparation, le réemploi et la réutilisation.
2.2.4.1 L?interdiction de l?élimination des invendus, une mesure forte
La part des invendus parmi les textiles mis en vente est estimée entre 10% et 20%102. Pour une
entreprise donnée, elle varie notamment en fonction de la gestion des volumes produits ou la
fréquence des collections.
Depuis le 1er janvier 2022, en application de l?article L. 541-15-8 du code de l?environnement, les
100 Les épandages sur terres agricoles des matières fertilisantes d'origine résiduaire ? CGEDD-CGAER 2015
https://agriculture.gouv.fr/sites/default/files/cgaaer_14074_2015_rapport.pdf
101 Entre 43% et 76% si on additionne épandage et compostage.
102 Rapport d?Eunomia « Scoping study to assess the feasibility of further EU measures on waste prevention »
publié en 2022
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 42/72
producteurs, importateurs et distributeurs notamment de produits textiles 103 sont tenus de
réemployer, y compris par le don104 à des associations caritatives ou à des structures de l?économie
sociale et solidaire dans le cadre de convention de dons, de réutiliser ou de recycler les invendus.
Refashion engage ses adhérents à repenser la structuration de leurs collections, par exemple en
augmentant la part des intemporels, à créer des produits au plus près des attentes des
consommateurs, à tester de nouvelles lignes, à minimiser les stocks, à faire des soldes attractives.
Il leur suggère également de créer des espaces de ventes de « seconde main » qui pourront
intégrer les invendus.
Tout en évitant la destruction des produits non vendus, cette mesure devrait inciter les producteurs,
importateurs et distributeurs à mieux calibrer leurs productions et leurs stocks. Elle sera, de plus,
désormais appuyée par la règlementation européenne qui va imposer la même obligation à
l?échelle de l?Union européenne (voir 2.1).
2.2.4.2 Le cahier des charges de Refashion lui impose de promouvoir la réparation, le
réemploi et la réutilisation
Comme indiqué en 2.2.1.2, le cahier des charges de l?éco-organisme prévoit des éco-modulations
en fonction de la durabilité des produits TLC105. La durabilité est notamment appréciée, par type
de textile, au regard de la résistance aux lavages, de la résistance aux abrasions, des glissements
de fils aux coutures, du boulochage.
La durabilité est par ailleurs encouragée via un fond dédié au financement de la réparation.
L?objectif est d?augmenter le nombre de réparations hors garantie de 35% en 2028 par rapport à
2019. Le fond doté de 44M¤ financera notamment les dépenses liées aux réparations réalisées
par des acteurs labélisés par l?éco-organisme. Le 11 juillet 2023, la secrétaire d?État à l?écologie, a
ainsi annoncé qu?à partir du mois d?octobre 2023, les consommateurs pourront percevoir un bonus
allant de 6 à 25 euros par réparation.
Autres leviers indirects pour limiter la production de textiles synthétiques, des objectifs de
réutilisation et de réemploi106 des TLC ont été fixés à Refashion : 120 000 tonnes de TLC usagés
doivent être réutilisés ou réemployé chaque année à compter de 2024. Un fond soutient de telles
opérations dès lors qu?elles interviennent à une distance inférieure à 1 500 km du lieu de collecte
des TLC.
2.2.5 La lente émergence d?une information des consommateurs et de
l?écoconception
2.2.5.1 De l?encadrement des allégations environnementales vers l?étiquetage
obligatoire
Avant la loi AGEC, les allégations environnementales étaient seulement soumises à la
réglementation sur la publicité trompeuse et les pratiques commerciales déloyales (Directive
2005/29/CE et articles L. 121-1 et suivants du code de la consommation). Mais des mesures
103 Cette obligation n?entre en oeuvre qu?à compter du 1er janvier 2024 pour les textiles neufs pour la maison.
104 Ce don permet de bénéficier d?une réduction fiscale
105 Voir l?annexe III du cahier des charges
106 L?article L 541-1-1 du code de l?environnement définit ainsi le réemploi et la réutilisation :
« Réemploi : toute opération par laquelle des substances, matières ou produits qui ne sont pas des déchets sont
utilisés de nouveau pour un usage identique à celui pour lequel ils avaient été conçus ; »
« Réutilisation : toute opération par laquelle des substances, matières ou produits qui sont devenus des déchets
sont utilisés de nouveau ; »
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 43/72
volontaires les concernant avaient été prises par le monde de la publicité : le guide du Conseil
national de la consommation sur les allégations environnementales (guide de 2010 réactualisé en
2023) et la « Recommandation développement durable » de l?autorité de régulation professionnelle
de la publicité (la version en ligne date d?août 2020). Ces deux types d?auto encadrement visaient
toutes les activités économiques.
Outre des mentions obligatoires sur l?intégration de matières recyclées et sur la recyclabilité des
fibres mentionnées au 2.2.2.1, le décret n° 2022-748 a prévu que les textiles d?habillement et linge
de maison neufs devront indiquer le pays où s?effectuent le tissage, la teinture et l?impression ainsi
que la confection et que ceux qui sont composés de plus de 50% de fibres synthétiques
comportent la mention « rejette des microfibres plastiques dans l?environnement lors du
lavage ».
Néanmoins, l?enquête faite par les rapporteuses auprès du secteur a démontré que seules
quelques marques appliquent cette règle dans les délais impartis.
La mission s?est demandée si la très forte délocalisation de la fabrication des textiles évoquée au
1.3.3.1 ne pouvait pas expliquer la difficulté de déploiement des nouvelles règlementations sur
l?étiquetage. En effet, des entreprises interrogées ont expliqué à la mission que leurs produits
arrivaient en France cintrés et étiquetés, prêts à être exposés en magasins. Il conviendra donc de
s?assurer que cette disposition est bien mise en oeuvre.
2.2.5.2 L?affichage environnemental devrait « valoriser » le risque de pollution par les
microparticules de plastique
D?abord prévu par l?article 15 de la loi AGEC107, l?affichage environnemental est désormais régi par
l?article 2 de la loi Climat et Résilience. Il ne s?agit pas comme pour l?étiquetage environnemental
de préciser certaines caractéristiques environnementales des produits. L?affichage
environnemental vise d?une part, à « communiquer une information précise et transparente au
consommateur pour qu?il puisse faire des choix en connaissance de cause », d?autre part, à
« encourager les producteurs à concevoir de manière plus responsable leurs produits », enfin à
« réduire l?impact environnemental de l?industrie de la mode » (Communiqué de presse de la
secrétaire d?État à l?écologie le 21 mars 2023).
Le secteur du textile connait des démarches d?affichage environnemental depuis 2010 et de
nombreux travaux ont été menés permettant de constituer un socle technique (référentiel BPX 30-
323). Quatre entreprises ont été volontaires pour tester des projets de pré-déploiement de cet
affichage de 2017 à 2020.
La loi AGEC a poursuivi et officialisé cette démarche expérimentale en prévoyant des
expérimentations pendant 18 mois, le dispositif devant être rendu obligatoire après l?entrée en
vigueur de dispositions européennes ayant le même objectif.
Ces expérimentations ont été prolongées, pour une durée maximale de cinq ans, par les
dispositions du II de l?article 2 de la loi Climat et Résilience. Elles devaient débuter notamment par
le secteur du textile d?habillement. À la différence de la loi AGEC, la loi Climat et Résilience prévoit
qu?à l?issue de ces expérimentations et après évaluation de celles-ci, l?affichage environnemental
sera rendu obligatoire par décret, prioritairement dans le secteur du textile d?habillement.
Un premier bilan de l?expérimentation de l?affichage environnemental pour les textiles d?habillement
et les chaussures a été dressé par un rapport au Parlement108, déposé en mars 2022 en application
107 Abrogé par le V de l?article 2 de la loi Climat et Résilience
108 Rapport au Parlement sur le bilan de l?expérimentation affichage environnemental textiles d?habillement et
chaussures de la loi Anti-Gaspillage pour une Economie Circulaire, article 15, Mars 2022
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 44/72
de l?article 15 de la loi AGEC. Il précise qu?environ 160 organisations s?étaient manifestées en 2020
auprès de l?ADEME pour participer à l?expérimentation mais que le nombre d?entreprises ayant
réellement mis en place des expérimentations, précisément inconnu, peut être estimé à une dizaine.
Le rapport explique cette désaffection in itinere par les difficultés liées à la crise COVID, un certain
nombre d?incompréhensions des objectifs de cette expérimentation, notamment le positionnement
par rapport aux travaux européens, l?absence de « certaines données cruciales » dans la base
Impact de l?ADEME, l?absence d?échelles de notation commune. Il souligne que, pour la plupart
des acteurs, le référentiel doit être complété mais qu?il n?y a pas de consensus entre eux sur les
choix à faire.
Il signale que sur la base de ces premiers enseignements et compte tenu du nouveau cadre posé
par la loi Climat et Résilience, une nouvelle phase d?expérimentation a été lancée en juillet 2021
avec une gouvernance et des méthodes renouvelées.
C?est ainsi que 11 méthodes de calcul et d?affichage d?une empreinte environnementale ont été
expérimentées en 2022 avec environ 470 études de cas réalisés sur des produits réels. L?ADEME
en a dressé un bilan dans un rapport109 de mars 2023 partagé avec le comité des partenaires. Six
méthodes étaient basées sur le socle ADEME, quatre sur le projet de PEFCR (voir 2.1.1.2 p. 32)
et une autre approche. Bien que, ni le projet de PEFCR, ni le socle de l?ADEME ne prennent en
compte les micro-plastiques à proprement parler, certaines méthodes ont proposé d?intégrer cet
enjeu, le considérant important : trois méthodes l?ont appréhendé en tant que sous-score de la
biodiversité et deux ont développé un nouveau critère relatif aux micro-plastiques en lien avec la
teneur en microfibres contenues dans le produit considéré.
Compte tenu des résultats de ces expérimentations, la secrétaire d?État à l?écologie a annoncé le
17 mars 2023, devant les entreprises impliquées dans les expérimentations, les représentants du
secteur et les ONG que huit critères d?impact avaient été retenus pour construire la méthode de
calcul pour le futur affichage environnemental. Les rejets de micro-plastiques seront pris en
compte par le 5ème de ces critères.
La mission ne peut qu?approuver cette orientation dès lors qu?elle permettra aux
consommateurs de prendre la mesure de l?éventuelle pollution micro-plastique engendrée
par leur achat, en la comparant à d?autres impacts environnementaux et aura par
répercussion des effets sur la conception des produits.
Une première version de la méthode de calcul devrait être mise au point au second semestre 2023.
Cette initiative française avance parallèlement aux travaux menés à l?échelle européenne sur
l?affichage environnemental (notamment sur le PEFCR). Dans ce cadre, la France tente de faire
valoir ses propres réflexions, qui convergent souvent avec celles de la Commission, par exemple
sur la durabilité des vêtements (projet Durhabi porté par l?IFTH, repris au niveau européen), sur la
réparabilité mais aussi sur les micro-plastiques.
Mais à ce jour aucune méthode n?étant fiable, plusieurs projets de recherche sont en cours afin
d?intégrer l?impact des micro-plastiques dans les analyses de cycle de vie.
2.3 Le secteur économique cherche peu à réduire la pollution à la
source
Le secteur, très dépendant des importations, déploie peu de moyens pour réduire la pollution par
les micro-plastiques à la source. Peu incité par les pouvoirs publics comme indiqué précédemment,
il ne l?est pas plus par les différents labels existants.
109 Rapport de l?ADEME : Évaluation transversale des méthodes d?affichage environnemental des textiles
d?habillement et chaussures, Mars 2023
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 45/72
2.3.1 Un secteur en transition, peu mobilisé sur la question des micro-
plastiques
2.3.1.1 Les transformations du secteur
La profession, bousculée voire fragilisée par la « fast fashion » mais aussi par la crise sanitaire de
la Covid 19, cherche avant tout à réduire son impact sur le climat, souhaite amorcer une
relocalisation de sa production comme en atteste le rapport du Comité stratégique de filière « mode
et luxe » demandé par la ministre de la transition énergétique : « Relocalisation et mode durable »
2021.
Le secteur se prépare aussi à mettre en oeuvre la loi AGEC, et notamment la réduction des
emballages en plastique, l?affichage environnemental et les mesures précédemment rappelées en
terme de recyclage et d?intégration de matières recyclées dans les étoffes.
La mission a ainsi constaté que les efforts des grosses entreprises portent surtout sur le recyclage
et la durabilité des produits, parfois sur le « coton bio » en terme d?efforts d?écoconception.
La recherche appliquée, qu?elle soit publique ou privée (comme celle portée par GEMTEX110), est
très déterminée par les demandes des entreprises, qui elles-mêmes, outre leurs stratégies propres
de recherche et développement, suivent les orientations des pouvoirs publics. Ainsi, il a été indiqué
à la mission que l?absence de dispositions contraignantes sur la teneur en polymère des textiles
ou sur leur rejet de micro-plastiques, expliquait en partie la rareté des recherches sur ces sujets.
Le centre européen des textiles innovants (CETI), centre de recherche privé, dispose d?une
installation de recyclage thermodynamique étant souligné que c?est le recyclage mécanique qui est
majoritairement utilisé. Pour développer ces procédés, il a mis en place une plateforme dénommée
CETIA dédiée au tri et au recyclage. Il considère ainsi qu?il est tout à fait possible, techniquement
et économiquement, de recycler à l?identique des mélanges de fibres (polyester/polyamide et
polyester/coton) ou de les recycler en les séparant, cette dernière solution étant plus coûteuse.
2.3.1.2 Quelques initiatives vers des textiles naturels ou moins émetteurs de micro-
plastiques
? L?exemple de la filière française du lin parait emblématique de la désindustrialisation du
secteur textile en France.
Cette filière, qui bénéficiait d?une longue tradition depuis le Moyen Âge, du Sud de la Normandie
au Nord de la France, comme dans une partie de l?Europe du Nord, a presque totalement disparu.
Ne demeurent que deux filateurs et une poignée de tisseurs et de tisserands 111 . Pourtant,
« l?Europe, en particulier la France, la Belgique et les Pays-Bas, concentre 80% de la production
mondiale de lin fibre, expédiée à 85% vers les filatures chinoises et en partie en Inde ». Elle se
mobilise aujourd?hui pour relancer ses filatures et ateliers de tissage en cherchant à se relocaliser
en France.
À cet égard, il convient de signaler l?initiative de l?Union des industries textiles (UIT) et
d?Interchanvre, lancée en juin 2023, « Bleu Blanc Lin » et « Bleu Blanc Chanvre » qui vise à « faire
renaitre une filière lin et chanvre pour un textile 100% made in France »112.
110 Laboratoire de recherche textile ? Roubaix https://www.gemtex.fr/
111 La tapisserie de Bayeux est une preuve de la présence du lin au XIe siècle « Les savoir-faire du lin textile »
Fiche d?inventaire du patrimoine culturel immatériel (page 19).
112 https://www.textile.fr/actualite/soutienfilierestextilesfrancaiseslinetchanvre
PUBLIÉ
https://www.textile.fr/actualite/soutienfilierestextilesfrancaiseslinetchanvre
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 46/72
Ce mouvement de renaissance est porté au niveau européen, par la Confédération européenne
du lin et du chanvre qui rassemble tous les acteurs de l?industrie européenne du lin dans 14 pays
de l?Union européenne.
La mission ne peut que se réjouir de ces évolutions qui, entre autres bénéfices, permettront de
mettre sur le marché français et européen, des textiles moins ou pas émetteurs de micro-plastiques.
? Le CETI participe à des projets qui cherchent à développer des fibres plus « naturelles » :
? des PLA (Acide polylactique) (TOTAL Corbion en Normandie sur le site de la raffi-
nerie de Grandpuits en Seine-et-Marne) bio plastique produit à partir de sucres de
cannes ou d?amidon (aussi d?écorces de betterave) ; il est recyclable et « compos-
table » selon Total énergie ;
? des celluloses issues de lin oléagineux (CETI) ;
? des fibres réalisées à partir de lait impropre à la consommation humaine qui sont
recyclables ou compostables ; ces fibres, en apparence proches de la laine et de
la soie, intéressent certaines entreprises du luxe mais compte tenu de leur origine
et pour des raisons éthiques (ne pas détourner la production agricole), elles ne
pourront donner lieu à une production de masse.
? Enfin, quelques rares entreprises se focalisent sur le sujet des micro-plastiques. Elles sont
principalement regroupées au sein du Consortium Microfibres (TMC)113 association qui re-
groupe différentes marques autour d?un « Engagement microfibres 2030 » : elles s?enga-
gent à rechercher un « impact nul de la fragmentation des fibres des textiles sur l?environ-
nement naturel d?ici 2030 » en choisissant de mettre la fragmentation des fibres en tête de
leur agenda environnemental. Elles réalisent des tests sur leurs matériaux qu?elles com-
muniquent au consortium et mettent à disposition des équipes de travail spécifiques sur le
sujet.
Ainsi, Décathlon® a engagé une démarche de tests de l?ensemble des étoffes de sa
collection afin d?évaluer de façon précise leur caractère émissif et de pouvoir adapter sa
production en fonction des résultats. Cette entreprise est l?une des deux marques ayant
respecté les délais en matière d?étiquetage de ses produits.
On notera également que le TMC a très largement contribué à l?élaboration des normes en
cours d?adoption (voir 2.4.2).
2.3.2 Aucun label environnemental ne semble afficher de critères sur les
émissions de micro-plastiques
Les labels environnementaux sont des outils mis à la disposition des consommateurs pour leur
permettre de choisir les produits qui paraissent offrir les meilleures garanties de préservation de
l?environnement et de la santé humaine. Ils peuvent donc conduire à des changements de
consommation non négligeables.
Certains labels sont apposés sur les produits sous la seule responsabilité des fabricants ou
distributeurs. D?autres sont certifiés ou contrôlés par un organisme tiers indépendants sur la base
d?un cahier des charges conformément à l?article L. 433-1 du code de la consommation. Parmi
ceux-ci figurent les labels conformes à la norme ISO 14024 et peuvent être appelés « Écolabel »
comme l?éco label européen.
113 Outdoor Microfibre Consortium Limited dont sont membres Adidas, CetA, Decathlon, Bureau Veritas, Eurifins,
Fashion for Good, Gap Inc, HetM Group, Helly Hansen, Kering, Next, Nike, The North Face, Patagonia, Puma,
RISE, Tesco, Textile exchange, etc? https://www.microfibreconsortium.com/signatories
PUBLIÉ
https://www.microfibreconsortium.com/signatories
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 47/72
L?ADEME a réalisé une étude sur huit labels environnementaux apposés sur les textiles en 2020114.
Cette étude est en ligne sur son site115. Depuis le 1er janvier 2023, la certification par un ou plusieurs
de ces huit labels116 donne droit à des primes réduisant les éco-contributions versées à Refashion
(voir 2.2.1.2).
Toutefois l?étude de l?ADEME ne s?intéressait pas aux micro-plastiques, en tant que tels, mais d?une
manière générale, à l?impact des produits sur le changement climatique, la perte de biodiversité, la
pollution de l?air, l?écotoxicité et l?épuisement des ressources. La question de la pollution de l?air y
était abordée mais sous l?angle des composés organiques volatiles. Par ailleurs, le critère de la
durabilité, peu utilisé, était peu précisé par cette étude.
La mission n?a pas trouvé de label mettant en avant le caractère faiblement émissif des étoffes.
2.4 De nouveaux outils qui devraient permettre de dépasser ces
freins
2.4.1 Les recherches scientifiques en cours
Afin de faire face aux incertitudes évoquées en partie 1.3, différents projets de recherche sont en
cours, pour permettre la définition des micro-plastiques, leur caractérisation, leurs impacts
toxicologiques à l?échelle internationale comme nationale, par les autorités publiques comme par
le secteur privé.
Ces projets en France117 sont notamment portés par l?ADEME, l?Institut national de l?environnement
industriel et des risques (INERIS) et l?Office français de la biodiversité (OFB). Certains visent à
évaluer la contamination des sols par les micro-plastiques (Microsof), d?autres leurs impacts
écotoxicologiques (MusselPlast), les boues d?épuration (PRO), la dégradabilité des plastiques. Ces
projets sont en phase d?achèvement et rendront des résultats d?ici fin 2024.
Par ailleurs, l?ADEME, l?OFB, l?INERIS participent au réseau européen SOILVER dans lequel un
état de l?art de la contamination dans les sols et les eaux souterraines a été réalisé par l?INERIS et
des collaborateurs belges et néerlandais (projet MISSOURI). En mars 2022, un appel à projets de
recherche (APR) a été lancé conjointement par l?ADEME et l?OFB pour évaluer le transfert des
micro-plastiques dans les écosystèmes continentaux, afin d?anticiper les besoins réglementaires
de surveillance et de gestion de ces pollutions.
Les résultats de ces projets de recherche permettront d?asseoir les décisions publiques sur des
données chiffrées. À ce stade, ils confirment la présence de micro-plastiques dans les
écosystèmes investigués.
2.4.2 De nouvelles normes devraient faciliter l?avancée des recherches sur
les émissions de micro-plastiques
Grâce à la mobilisation des acteurs du secteur dans le monde entier, des normes ISO ont
récemment été publiées ou sont en cours d?adoption. Pour la première fois, vont exister des
définitions communes des micro-plastiques et des nano-plastiques, des méthodes communes pour
déterminer les pertes de matière lors des lavages industriels et domestiques et pour les analyser.
Ces harmonisations devraient permettre un essor des travaux de recherche et de leur comparaison
114 Vêtements, chaussures et textiles : impacts environnementaux et labels, Expertises, édition 2020
115 https://agirpourlatransition.ademe.fr/particuliers/labels-environnementaux#labelsrow-3
116 Pour les noms des labels voir note 86
117 Microsof, Biomaleg, Plasticène, Cinape, Pro
PUBLIÉ
https://agirpourlatransition.ademe.fr/particuliers/labels-environnementaux%23labelsrow-3
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 48/72
et des conclusions beaucoup plus pertinentes devraient pouvoir en être tirées que ce soit par
exemple en ce qui concerne l?ampleur des émissions de micro-plastiques sur le cycle de vie des
étoffes, la réalité des pollutions dans l?environnement, les atteintes à la santé humaine, l?affichage
environnemental ou les labels.
2.4.2.1 Des définitions communes des particules fines de plastiques
Une norme (ISO/FDIS 24187118) est en cours d?élaboration et pourrait être adoptée d?ici la fin de
l?année 2023 permettant une classification unique des micro-plastiques et un faisceau de règles
permettant leur échantillonnage.
À ce stade de son élaboration, la norme définirait les micro-plastiques comme des particules
solides, non solubles dans l?eau, d?une taille allant de 1 µm à 1000 µm (soit 1 mm), les particules
allant de 1 à 5 mm étant elles qualifiées de « grands micro-plastiques » mais étant couvertes par
la même norme. De plus, cette norme indiquerait que la forme peut être régulière ou irrégulière, et
que la dimension est celle de la partie la plus longue de la particule, ce qui permettrait d?y inclure
les microfibres de moins de 5 mm de longueur. Elle devrait être validée à l?échelle internationale,
mais également européenne (CEN) et française (AFNOR).
Enfin, les nano-plastiques seraient également en cours de définition - ce qui est plus petit que 1
µm ? ces éléments étant contenus dans un document normatif écrit il y quatre ans. Une autre
définition est proposée par l?OCDE jusqu?à 100 nanomètres.
2.4.2.2 Une harmonisation des méthodes pour mesurer et analyser les pertes de
matières lors des lavages des textiles
Une norme ISO, CEN et NF 4484 porte sur cette harmonisation. Elle comporte trois parties.
La première partie concerne la détermination de la perte de matières des étoffes lors des lavages
(ISO 4484-1 : 2023)119. Elle a été publiée et est en vigueur depuis février 2023.
La troisième partie se concentre sur les méthodes pour mesurer la masse de matériaux collectés
libérés par les produits finis textiles au cours des lavages domestiques. Cette partie de la norme a
été publiée en mai 2023 au niveau international mais ne l?était pas encore en France à la date de
rédaction du présent rapport120.
La deuxième partie, qui porte sur les méthodes pour mesurer, quantifier et analyser les résultats
des matières ainsi collectées, fait encore débat. En effet, il existe déjà des travaux de normalisation
sur l?analyse des micro-plastiques dans l?eau. La plupart des pays de l?Union européenne et la
Commission souhaiteraient qu?il n?y ait qu?une seule norme (norme ISO/16084 en trois parties en
cours d?élaboration) et que la gouvernance sur ces questions soit harmonisée et confiée au
« groupe joint » entre le comité technique dans le domaine des plastiques et le comité technique
dans le domaine de l?eau, et ne fasse donc pas l?objet d?une norme séparée.
L?Union européenne a donc voté « contre » la proposition de norme ISO 4484-2. L?adoption de
cette norme poursuit néanmoins sa route et elle devrait être publiée avant la fin de l?année 2023,
mais ne sera pas applicable dans l?UE.
118 Projet de norme ISO/FDIS 24187:2023 « Principes d?analyse des micro-plastiques présents dans
l?environnement ».
119 https://standards.cencenelec.eu/dyn/www/f?p=205:110:0::::FSP_PROJECT:71617&cs=110565CE941B989550
C25BDB465B4B18A
120 https://www.iso.org/fr/standard/81035.html
PUBLIÉ
https://www.iso.org/fr/standard/81035.html
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 49/72
2.4.3 Les évolutions règlementaires à venir à l?échelle européenne
Comme évoqué en 2.1, la Commission européenne et les agences européennes travaillent
activement sur le sujet des micro-plastiques avec l?objectif de faire évoluer la règlementation
européenne sur le sujet.
Des travaux européens ont été conduits et seraient sur le point d?aboutir à la publication d?une
communication faisant état de la collecte de données sur l?émission des micro-plastiques non
intentionnels réalisée depuis 2018 et des priorités politiques que va se donner l?Union européenne
dans ce domaine. Au stade de la finalisation de ce rapport, cette communication n?a pas été
adoptée par la Commission européenne. Selon des informations recueillies par la mission, la
Commission européenne se préparerait à annoncer que la priorité sera donnée à la lutte contre les
pertes de granulés industriels. La définition de mesures visant la réduction des micro-plastiques
issus des textiles pâtirait du manque de données consolidées permettant l?évaluation quantitative
de cette pollution, et des conséquences économiques pour les secteurs concernés (industrie textile,
fabricants de lave-linges).
En parallèle, la Commission a soumis le 30 mars 2022 à l?adoption législative une règlementation
élargissant les obligations en matière d?écoconception à de nouveaux types de produits dont les
textiles (tous les produits en fait à l?exception de quelques-uns). Cette règlementation cadre est en
cours d?adoption par le Conseil et le Parlement qui a adopté sa position le 12 juillet dernier. Elle
sera suivie de la définition de règlements d?application propres à chaque secteur, comportant ses
propres règles en matière d?écoconception des produits. Cette règlementation européenne prévoit
notamment la « labellisation » des produits sur leur impact environnemental : le « passeport
produit » doit contenir les informations exactes et à jour sur les possibilités de réparation et de
recyclage, sur la durabilité du produit. Cela aidera le consommateur à faire des choix éclairés et
les autorités de contrôle des États membres à effectuer les vérifications. D?autres règles seront
également définies pour améliorer la durabilité, la sûreté, la réutilisation, l?amélioration, la
réparation, le maintien en bon état et la remise à neuf, la présence de produits à risque, l?usage de
l?énergie et l?efficacité énergétique, le contenu recyclé, la possibilité de reproduire et de recycler, la
possibilité de récupération des matériaux, les impacts environnementaux et la génération prévue
de déchets. À ce stade de la négociation, l?orientation générale du Conseil propose une interdiction
directe de destruction des produits non écoulés dans le secteur de l?industrie textile, avec une
exemption de quatre ans pour les entreprises de taille moyenne et une exemption générale pour
les petites et microentreprises121. Cette position est soutenue par le Parlement européen dans son
vote du 12 juillet 2023. Il est important de préciser que la « destruction » au sens de ce texte
européen n?intègre pas l?action de réemploi ou de re-fabrication, afin de pousser les producteurs à
envisager différentes options pour ces textiles invendus.
Une révision de la directive sur la biodégradabilité des plastiques est prévue en 2027 afin de tenir
compte des progrès dans la compréhension du phénomène de pollution.
La règlementation européenne relative à l?exportation des déchets est également en cours
d?évolution. Début juillet 2023, la Commission a abordé cette question dans le cadre de la révision,
ciblée sur les textiles, de la directive cadre sur les déchets. Elle a annoncé dans un communiqué
de presse que les mesures prévues viendront compléter celles de la proposition de nouveau
règlement concernant les transferts de déchets qui ont pour « objectif d?assurer que les transferts
de déchets textiles n?ont lieu que lorsqu?il est garanti qu?ils sont gérés d?une manière
121 « Nouvel article 20b : Interdiction de destruction des produits de consommation invendus qui sont des vêtements
ou des accessoires vestimentaires : À compter de 36 mois après l?entrée en vigueur du présent règlement, la
destruction des produits de consommation invendus qui sont des vêtements ou des accessoires du vêtements,
énumérés aux chapitres 61 et 62 du TARIC [Tarif douanier de l?Union européenne] établi par le règlement CEE
n°2658/8777 du Conseil est interdite. »
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 50/72
écologiquement durable »122.
Dans le domaine de la pollution de l?eau, la proposition de directive révisant la DERU identifie les
micro-plastiques comme de « nouveaux polluants » ayant fait leur apparition et fixe un objectif de
réduction des émissions de micro-plastiques de 9% d?ici 2040, « principalement grâce à des actions
sur la gestion améliorée des eaux de pluie ». Par ailleurs, elle prévoit que les États membres
devraient désormais « surveiller la pollution provenant des eaux de ruissellement urbain et des
surcharges dues aux pluies d?orage, les concentrations et les charges des polluants réglementés
dans la présente directive à la sortie des stations d?épuration des eaux urbaines résiduaires et la
présence de micro-plastiques (y compris dans les boues) » pour toutes les agglomérations ayant
un taux d?équivalent habitants (EH) supérieur à 10 000. Une méthodologie de mesure des micro-
plastiques dans les eaux résiduaires urbaines et les boues sera établie par la Commission
européenne dans le cadre d?actes d?exécution de la directive.
Enfin, notamment parce que les micro-plastiques peuvent être des vecteurs de substances
chimiques concernées par la DCE, notamment des additifs susceptibles d?être relargués
(plastifiants tels que le DEHP, le C10-13-chloroalcane, hexachlorobenzène, composés ignifuges
tels que l?HBCDD, ou encore des métaux (utilisés comme pigments tels que le cadmium) qui sont
des « substances prioritaires dangereuses » susceptibles d?être présentes dans les plastiques, la
Commission a proposé le 26 octobre 2022 une directive révisant la DCE, la directive sur les eaux
souterraines et celle sur les standards de qualité environnementale dans le domaine de la politique
de l?eau . Cette révision propose notamment l?introduction de nouvelles substances à mesurer dans
le cadre de l?évaluation de la qualité de l?eau et demande l?élaboration d?une méthodologie pour
évaluer les micro-plastiques présents dans l?eau. Ce texte est en cours d?examen par les instances
européennes.
L?ensemble des évolutions de ce cadre européen auront un impact sur la mise en oeuvre de la loi
AGEC et des autres mesures règlementaires en cours d?adoption en France.
122 Communiqué de presse de la Commission européenne du 5 juillet 2023 : Économie circulaire et secteur du
textile : responsabilité à l?égard de la réduction, du réemploi et du recyclage des déchets textiles et stimulation des
marchés des textiles usagés.
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 51/72
3 Afin de mieux répondre à cette pollution, il est nécessaire
de prendre en compte le cycle de vie du produit textile
D?une manière générale, il semble à la mission indispensable que les politiques publiques
s?inspirent de la hiérarchie des modes de traitement des déchets. Par ordre de priorité décroissante,
il convient donc d?abord d?encourager à l?écoconception, d?augmenter la durabilité, d?inciter à la
réparation, au réemploi, enfin à la réutilisation. Le recyclage doit donc retrouver sa place, après
ces premières mesures. Mais pour mettre en oeuvre une écoconception efficace et pertinente, la
filière a besoin que la recherche sur toutes les étapes de la vie du produit soit intensifiée.
3.1 Approfondir les efforts de recherche
Il a été souligné précédemment123 à quel point le manque de connaissances freinait tant les
décisions publiques que les choix des industriels.
Les avancées en terme de normalisation124 devraient faciliter nombre de recherches publiques ou
privées sur l?ensemble des enjeux évoqués dans ce rapport.
La mission estime que des recherches complémentaires devraient porter en priorité sur :
- les risques des micro- et les nano-plastiques sur les écosystèmes et la santé humaine ;
- la quantification des micro-plastiques émis dans l?air lors du port des vêtements ;
- l?analyse des émissions de micro-plastiques issus des étoffes produites en polymères recyclés et
des étoffes en fin de vie ;
- le devenir des micro-plastiques présents dans les boues d?épuration épandues sur les sols.
[ADEME et ANSES] Soutenir des projets de recherche sur les effets sur
les écosystèmes et la santé humaine des micro-plastiques, sur la pollution aux micro-
plastiques d?origine textile dans l?air et par l?épandage des boues d?épuration et sur la
pollution issue des textiles recyclés et en fin de vie.
3.2 Répondre aux émissions lors de la création des étoffes et des
produits
Dans le cadre de la mise en oeuvre du principe de précaution et de prévention, l?écoconception
des étoffes apparait comme une des mesures à privilégier afin de limiter leur caractère émissif en
micro-plastiques.
Deux orientations politiques sont possibles :
? Réduire la part des étoffes synthétiques dans le textile consommé en France en leur
substituant des matériaux alternatifs :
? fibres naturelles (lin, chanvre) ;
? fibres biosourcées transformées (viscose, lyocell) tout en limitant leurs autres im-
pacts environnementaux ;
? Réduire les émissions de micro-plastiques par les étoffes :
123 Voir partie 1
124 Voir en 2.4.2
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 52/72
? en améliorant leur conception : sur la base des tests qui seront réalisés, la profes-
sion va pouvoir déterminer plus précisément quels sont les types d?étoffes les plus
émetteurs ;
? en captant les émissions réalisées lors de la fabrication des étoffes, ce qui néces-
site un plan d?investissements dans les pays producteurs pour que les émissions
des usines de fabrication soient collectées, traitées, filtrées et que les déchets
soient ensuite détruits.
Parce que la substitution de matières pas ou peu émettrices de micro-plastiques nécessite de
revoir des lignes de production et des gammes de produits, et donc du temps, les plans de
prévention et d?écoconception devraient être utilisés comme aides en vue de telles transformations.
Le plan de prévention et d?écoconception prévu par l?article L. 541-10-12 du code de
l?environnement pourrait être l?occasion d?imposer aux entreprises du secteur de remettre en
question leur recours aux textiles synthétiques, qu?ils soient vierges ou recyclés, en fonction de la
gamme de chacune d?entre elle. Il pourrait même leur être demandé de se fixer à elles-mêmes un
objectif de réduction des micro-plastiques.
[MTECT/DGPR] Modifier l?article L. 541-10-12 du code de
l?environnement pour prévoir que le plan d?écoconception doit avoir comme objectif
d?augmenter la part des fibres peu ou pas émettrices de micro-plastiques
Les innovations déjà amorcées sur de nouvelles fibres naturelles ou synthétiques devraient être
accentuées. Pour accompagner cette réorientation, la reconstitution ou la constitution de filières
de fibres naturelles, telles que le lin et le chanvre, pour celles qui peuvent être produites en France
ou en Europe, devraient être encouragées et soutenues à l?échelle nationale comme européenne.
La conception d?étoffes et de produits non ou moins émetteurs de micro-plastiques devrait faire
partie des priorités des programmes de recherche entrepris par les secteurs privé et public. Des
recherches récentes, il apparait que la longueur des fibres synthétiques a une grande importance
sur leur caractère émetteur de microparticules. Si ces informations venaient à être confirmées par
les tests en cours, cette exigence relative au type de fibre pourrait figurer dans les cahiers de
charge. Même si à ce stade la biodégradabilité des plastiques synthétiques n?a pu être prouvée, la
recherche de fibres biodégradables (même si émettrices de microfibres ou particules) est
également un champ à explorer125.
Un autre sujet d?écoconception des étoffes relève des modalités de tissage ou tricotage. Sans
remettre en cause la suprématie industrielle actuelle du tricotage, qui déstabiliserait fortement la
filière, les tests sur les étoffes devraient également permettre d?analyser l?impact de la conception
des étoffes sur les émissions de microfibres.
De même, les modalités de découpe des étoffes au moment de la fabrication des produits textiles
ou d?assemblage des pièces peuvent avoir un impact sur leur caractère émissif.
En résumé, sur la base des tests qui vont pouvoir être conduits dans les 2 ou 3 prochaines années
conformément aux normes récemment adoptées ou en cours d?adoption, les cahiers de charge
des entreprises de fabrication et de diffusion des produits textiles auprès de leurs fournisseurs
pourront intégrer des critères permettant de limiter les émissions de micro-plastiques par les étoffes
et les produits achetés, qu?ils soient importés ou produits au sein de l?Union européenne.
125 L?entreprise Primaloft Bio indique avoir fabriqué le premier tissu issu de fibres synthétiques 100% recyclées et
biodégradables à 55% (Prima loft Bio Performance Fabric).
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 53/72
[MEFSIN/DGE] Soutenir le développement par la filière TLC de la
production d?étoffes en fibres naturelles alternatives au coton ou en nouvelles étoffes
synthétiques biosourcées et compostables
Pour accélérer la réduction de l?utilisation des micro-plastiques lorsque leur utilité n?est pas avérée,
il pourrait être envisagé d?interdire l?incorporation de micro-plastique dans les textiles. De telles
pratiques existent par exemple pour ennoblir les textiles ou rendre plus agréable leur portabilité
(nanoparticules pour éviter les mauvaises odeurs dégagées par les chaussettes de sport). Il s?agit
ici d?éviter l?ajout de micro-plastiques intentionnels et donc de s?aligner avec la politique
européenne visant à réglementer en priorité les micro-plastiques primaires. On pourrait à l?échelle
française étendre le champ d?application de l?article L. 541-15-12 du code de l?environnement
(inséré par l?article 82 de la loi AGEC) qui interdit l?incorporation de micro-plastique en
concentration supérieure à 0,01% dans certains produits. S?agissant de l?industrie textile, cette
interdiction devrait viser tous les micro- et nano-plastiques sauf, encore une fois, en cas de
nécessité démontrée. Cette décision doit préalablement être prise à l?échelle européenne.
Enfin, afin de limiter l?impact des micro-plastiques émis, l?écoconception devrait également se
concentrer sur les additifs. La limitation, voire l?interdiction, de certaines substances chimiques
utilisées comme additifs dans la confection des polymères peut faire l?objet d?un renforcement de
la règlementation européenne sur le sujet.
[MEFSIN/DGE ? MTECT/DGPR] Demander à l?échelle européenne l?inter-
diction de : a) l?insertion de micro et nano-plastiques additionnels pour l?embellissement et
l?ennoblissement ; b) l?ajout des additifs insérés dans les polymères textiles causant des
risques pour la santé humaine et les écosystèmes.
Enfin, la France et l?Union européenne sont mobilisées dans le cadre de leur aide au
développement sur le sujet de la gestion de l?eau dans les pays tiers. Néanmoins, la majorité des
aides est dirigée vers l?accès à l?eau potable des populations, plutôt que vers le traitement des
eaux usées ; et quand bien même des projets relatifs au traitement des eaux usées existent, les
usages des boues d?épuration sont similaires aux usages réalisés en France, à savoir l?épandage
d?une grande partie d?entre elles, et donc des micro-plastiques qui ont été captés lors du traitement.
D?échanges avec le secteur du textile, la mission retient également que l?insertion dans les cahiers
des charges de contraintes pour les producteurs de textiles des pays tiers en matière de collecte
de leurs eaux usées à la sortie de leurs usines de fabrication, n?a pas eu de résultats, les moyens
de contrôle étant inexistants et le saut technique demandé n?étant pas possible à mettre en oeuvre,
avec souvent des réseaux publics de traitement des eaux inexistant ou insuffisants pour prendre
le relais des industries. Pourtant, la traçabilité récemment mise en place devrait permettre
d?améliorer la capacité de contrôle sur les producteurs de produits textiles par les donneurs d?ordre.
L?encouragement à l?amélioration de la gestion des eaux usées dans les pays tiers producteurs de
textiles doit être poursuivi, même si des résultats ne peuvent être attendus à court terme.
[MEAE - MTECT] Aider les pays tiers dans lesquels sont produites les
étoffes à développer des systèmes de gestion des eaux et de captation des microfibres,
dans le cadre des politiques d?aide au développement et en partenariat avec les entreprises
européennes productrices et distributrices de produits textiles.
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 54/72
La commande publique, devant être « mise au service de la transition vers l?économie
circulaire » en application de l?article. L. 541-1 (dernier alinéa) du code de l?environnement,
le levier des marchés publics pourrait être aussi actionné pour les vêtements professionnels
lorsque la technicité de leur usage le permet. Un pourcentage maximum de fibres synthétiques
pourrait être inclus dans les clauses techniques des marchés correspondant et un bonus pourrait
être accordé aux tissus comportant le plus de fibres naturelles et/ou biodégradables.
3.3 Faire du consommateur un acteur éclairé de la réduction de la
pollution par les micro-plastiques
La lutte contre les micro-plastiques des textiles rejoint celle de la lutte contre les coûts
environnementaux de la surconsommation textile. D?après un sondage réalisé par OpinonWay126
auprès de 2 002 personnes, 55% des Français déclarent limiter leurs achats textiles aux besoins
réels, 46% trier leurs placards et 55% valoriser leurs textiles en leur offrant une seconde vie, 80%
ayant recours aux dons.
Figure 12 : Cycle de vie des textiles et chaussures (Source : rapport d'activité 2022 Refashion)
Une des clés de l?action politique apparait donc comme étant celle de la sensibilisation du
consommateur comme du distributeur.
L?affichage environnemental, dès lors qu?il comportera un critère sur le rejet dans l?environnement
126 https://fr.fashionnetwork.com/news/Dechets-textiles-les-francais-mobilises-mais-trop-peu-
informes,1340053.html
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 55/72
de micro-plastiques et que ce critère sera correctement valorisé, ne pourra qu?avoir des effets
positifs sur la conception des étoffes. Pour éviter de faire l?objet d?un mauvais score, les entreprises
devraient s?orienter vers des tissus comportant moins de polymères ou vers des polymères moins
émetteurs de micro-plastiques.
Eu égard à l?importance de la pollution par les micro-plastiques d?origine textile, la mission
considère qu?il est nécessaire de renforcer les contraintes d?étiquetage actuellement prévues par
le XI de l?article R. 541-221 du code de l?environnement :
- d?une part, le pourcentage de 50% de composition d?étoffe synthétique au-delà duquel les
émissions de micro-plastiques doivent être signalées apparait trop élevé puisque l?on sait que
toutes ces fibres rejettent des micro-plastiques quel que soit leur pourcentage. La mission propose
donc de faire passer le pourcentage à 5 % ;
- d?autre part, sachant que le relargage des microparticules peut aussi intervenir lors du port, de
tout autre utilisation et de la fin des étoffes, la mission propose soit de supprimer dans la mention
obligatoire les mots « lors du lavage », soit de compléter cette mention par « de l?utilisation et de
la fin de vie de l?étoffe ». Cette recommandation rejoint celle du rapport de l?OPECST de 2020 sur
la pollution plastique.
La mission rappelle qu?un pictogramme signalant de manière très claire la présence de plastiques
n?est prévu que pour certains produits à usage unique par le décret n°2021-1279 qui transpose
l?article 7 de la directive du 5/06/2019 et son règlement d?exécution UE 2020/2151. Un pictogramme
analogue pourrait accompagner la mention « rejette des microfibres plastiques dans
l?environnement ».
Les labels constituant des outils souples et rapidement mobilisables, la mission considère qu?ils
devraient mieux prendre en compte la pollution par les micro-plastiques d?origine textile. Pour les
y inciter, elle estime que l?ADEME devrait renouveler et approfondir son étude sur les labels
environnementaux.
[MTECT/CGDD - ADEME] Mieux informer le consommateur sur les mi-
cro-plastiques textile en : a) lançant des campagnes de communication sur l?émission de
micro-plastiques par les produits textiles ; b) modifiant le XI de l?article R. 541-221 du code
de l?environnement pour faire passer le seuil de présence de fibre synthétique de 50% à 5%
déclenchant une information du consommateur ; c) renouveler l?étude sur les labels envi-
ronnementaux pour les textiles en mettant en lumière les critères retenus par chacun d?eux
sur les émissions de micro-plastiques, sur le taux de présence de fibres synthétiques et
artificielles, sur la réparabilité du vêtement, sur sa durabilité.
3.4 Répondre aux émissions lors de l?usage du produit
3.4.1 Les émissions lors des lavages des produits
La partie 2 de ce rapport a souligné la difficile mise en place d?une politique de captation des micro-
plastiques issus des lavages de vêtements, qui sont supposés être l?une des principales causes
d?émission de micro-plastiques textiles en Europe.
Concernant les machines individuelles à laver le linge, la loi AGEC a fixé un objectif, auquel les
fabricants de machine ont partiellement répondu, et sa mise en oeuvre dépend principalement de
l?adoption de règles équivalentes à l?échelle européenne. La mission souhaite néanmoins attirer
l?attention sur la nécessaire proportionnalité de cette mesure d?une part, eu égard aux technologies
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 56/72
actuellement existantes qui nécessitent une forte implication de l?utilisateur de la machine (choix
des programmes, nettoyage des filtres), un risque de contradiction avec le droit européen de libre
circulation des biens et marchandises, et d?autre part sur sa temporalité de mise en oeuvre. D?après
UFC-Que-Choisir et l?INSEE, 94% des ménages sont équipés d?un lave-linge en France et la durée
de vie d?un lave-linge est estimée à 7 à 10 ans. De plus, les règles européennes et nationales
récentes visent la promotion de la fin de l?obsolescence programmée et du réemploi de
l?électroménager. Quand bien même la mesure d?installation obligatoire d?un système de filtrage
serait mise en place en France dès 2025, le temps nécessaire pour qu?une fraction suffisante des
ménages français investissent dans une machine équipée d?un tel système de filtrage ne permettra
pas d?obtenir des résultats avant 2030.
La mission s?est donc penchée sur la possibilité d?imposer l?équipement des machines à laver
industrielles d?un tel système de filtrage, solution qui apporterait a minima la garantie du bon
traitement des résidus de lavage issus du système de filtration et de la bonne application du
principe de filtration en fonction de la nature des étoffes. La loi française impose également
l?équipement des machines industrielles d?un même système de filtration.
L?idée, expertisée également par la Commission européenne, serait donc d?imposer un premier
lavage ? ou plusieurs lavages initiaux - des produits textiles distribués sur le marché européen,
qu?ils soient importés ou fabriqués dans l?Union européenne. Ce(s) premier(s) lavage(s)
permettrai(en)t non seulement la collecte des microparticules émises lors des premiers lavages, et
leur récupération puis leur élimination, mais également celles de produits/additifs chimiques nocifs
qui peuvent être utilisés dans la fabrication des étoffes. Cette solution ne peut être expérimentée
par la France seule et doit s?imposer à l?échelle de l?Union européenne.
Les solutions logistiques pour la mettre en oeuvre devraient être laissées aux distributeurs afin de
pouvoir s?intégrer dans leur chaine logistique. Néanmoins, il convient de ne pas oublier que cette
mesure entrainerait une forte déstabilisation des chaines logistiques actuellement existantes de la
plupart des marques, dont la très large majorité de la production est fabriquée à l?extérieur de
l?Union européenne, non seulement pour la production des étoffes, mais également pour leur
conception, leur étiquetage, leur emballage et même leur cintrage ce qui rend un relavage dans
l?Union européenne très complexe. Et l?imposition d?un lavage dans le pays de production du
produit ? qui n?est pas forcément celui de la production de l?étoffe elle-même ? pose les problèmes
liés au traitement des eaux usées dans les pays tiers déjà évoqué (3.1.1).
Cette solution dont l?efficacité immédiate est très séduisante, aura donc un impact majeur sur la
chaine de production et nécessiterait une mise en oeuvre progressive. L?examen devra notamment
intégrer les types de financement pouvant être apportés par la REP.
La dernière étape d?émission des micro-plastiques lors des lavages est celle des stations
d?épuration, sujet également largement abordé en partie 2.2.3. Les réglementations en cours de
mise en place à l?échelle nationale et européenne devraient permettre d?avoir rapidement une
visibilité sur l?ampleur de cette pollution par les micro-plastiques. Dans le contexte actuel d?un
renforcement de l?équipement des collectivités françaises en systèmes d?épuration des eaux usées
plus efficaces afin de respecter les obligations communautaires actuelles et à venir, la mission
pense utile que l?équipement des stations en filtres permettant une meilleure capture des
microparticules de plastique soit examinée de façon plus systématique dans le cadre des projets,
notamment pour les stations situées dans des zones sensibles. La question de l?usage des boues
d?épuration nécessite également une expertise plus poussée. En effet, la mise en oeuvre du
principe de précaution conduirait à ne pas poursuivre l?épandage des boues d?épuration dont la
teneur en microparticules de plastique est avérée. Le développement d?autres usages des boues
d?épuration doit donc être recherché.
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 57/72
[MTECT ? MESFIN/DGE] Limiter les émissions de micro-plastiques en
provenance des lavages en Europe en : a) défendant à l?échelle européenne dans le cadre
de l?évolution du règlement écoconception la mise en place de filtre sur les lave-linges
privés ; b) examinant à l?échelle européenne la possibilité d?un prélavage des produits
textiles avant leur mise en rayon par les distributeurs
[MTECT] Renforcer les filtres équipant les stations d?épuration dans les
zones sensibles et limiter l?épandage des boues d?épuration dont la contamination par les
micro-plastiques est avérée.
3.4.2 Les émissions lors du port des produits
À ce stade de l?analyse, il apparait à cette mission très difficile d?imposer des règles obligatoires.
La priorité doit être donnée à la recherche pour analyser à la fois la présence des microfibres dans
l?air, la capacité d?ingestion/adsorption de ces microfibres dans le corps humain et leur impact sur
la santé.
Dans un deuxième temps, une fois ces études complémentaires réalisées, il suffira d?étendre les
règles européennes sur la pollution de l?air aux microfibres en les rattachant aux PM2,5 et PM10.
[MTECT/DGEC] A l?échelle européenne, en fonction des résultats des
études sur les émissions de micro-plastiques dans l?air, intégrer les microparticules de
plastique dans les PM2,5 et PM10.
3.5 Répondre aux émissions lorsque le textile devient déchet
3.5.1 La collecte, le tri et les usages nouveaux (réemploi, réutilisation)
La lutte contre les micro-plastiques ne pourra que bénéficier de l?accroissement de la durabilité des
produits puisque la majorité des émissions se produisent en début de vie du produit, même si cette
assertion se heurte à l?absence de tests réalisés sur des étoffes en fin de vie ou sur des étoffes en
synthétiques recyclés.
Il convient à cette occasion de signaler que Refashion doit contribuer à la prise en charge des
opérations de collecte séparée des déchets textiles. Cette collecte séparée devient en effet
obligatoire à compter du 1er janvier 2025, en application du décret n °2021-950 du 16 juillet 2021,
comme dans le reste de l?Union européenne. Elle va augmenter la masse de déchets collectés
mais leur traitement en sera facilité et de meilleure qualité.
Quelques chiffres sur le tri et le réemploi
67 centres de tri conventionnés donc 15 en Europe hors de France
260 000 tonnes ont été récoltées dont 188 000 ont été triées (soit 23% de la mise sur le marché)
59% des volumes collectés et triés est considéré comme apte à la réutilisation.
On estime le volume des TLC réemployés à 10 000 à 30 000 tonnes par an, essentiellement vers les boutiques
des entreprises relevant de l?économie sociale et solidaire.
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 58/72
[MTECT/DGPR] Modifier le cahier des charges de l?éco-organisme de
la filière TLC pour lui fixer des objectifs de collecte, de tri, de réemploi et de réparation des
textiles synthétiques, plus ambitieux que pour les autres textiles
3.5.2 Les problèmes de pollution créés par l?exportation des déchets
textiles européens et français
Selon Refashion, 95% des TLC collectés et triés sont exportés essentiellement en Afrique (35%),
en Europe (31%) et en Asie (24%), les trois principaux pays destinataires étant le Pakistan (33 000
tonnes), la Tunisie (près de 31 000 tonnes) et la Belgique (28 000 tonnes). Rares sont les textiles
qui sont réutilisés dans ces pays en raison de leur mauvais état ou parce qu?ils ne correspondent
pas aux besoins locaux.
La plupart est donc éliminée alors que les pays importateurs de déchets n?ont bien souvent pas les
capacités de les traiter correctement. Ces exportations sont ainsi vraisemblablement génératrices
d?une très forte pollution notamment en terme de micro-plastiques.
De nombreuses voix se sont élevées contre ces pratiques qui demeurent néanmoins à l?échelle
européenne.
Le cahier des charges de Refashion n?est pas à la hauteur du problème puisqu?il prévoit seulement
qu?en 2024, 8% des TLC usagés devront être réemployés ou réutilisés à moins de 1 500 km du
lieu de collecte, cet objectif passant à 15% en 2027.
Pour la mission, il n?est pas admissible que notre pays exporte ainsi ses déchets textiles sans
s?assurer que les installations qui les accueillent seront en mesure de les traiter correctement, en
particulier en ce qui concerne les micro-plastiques.
Elle a constaté que cette position était conforme à celle préconisée tant par le Parlement européen
que par la Commission (voir 2.1.4).
[MEFSIN/DGT ? MEAE] Dans le cadre de la négociation européenne
sur la révision du règlement sur l?exportation des déchets, promouvoir la position tendant
à interdire l?exportation de déchets textiles dans les pays tiers qui ne sont pas en capacité
de gérer ces déchets
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile
Page 59/72
Conclusion
L?émission de microparticules de plastiques par le textile est avérée, a contaminé tous les milieux,
et ne va faire que s?accroitre au regard de l?augmentation de la part des étoffes synthétiques dans
la production textile mondiale. Il y a donc urgence à agir pour réduire cette pollution à l?échelle de
l?ensemble du cycle de vie des produits, les émissions se déroulant à chaque étape.
La concentration des efforts actuellement menés sur la phase lavage des produits textiles ne
permet pas de répondre à l?ensemble de la problématique et a des coûts disproportionnés par
rapport à d?autres actions qui peuvent être mises en oeuvre en amont et sont plus en phase avec
les principes pollueur-payeur et de respect du cycle de vie du produit.
La mission recommande donc d?axer prioritairement les efforts sur l?écoconception des étoffes et
des produits textiles en s?appuyant sur les nouveaux outils de normalisation récemment adoptés
ou en cours d?adoption. Dans ce secteur, il semble également indispensable que toute décision
soit prise à l?échelle européenne. Il convient enfin d?ancrer l?action de lutte contre les micro-
plastiques textiles dans le contexte et le cadre de la lutte contre la surconsommation de textiles à
bas coûts qui est au coeur de cette problématique.
Virginie DUMOULIN
Sabine SAINT GERMAIN
Inspectrice générale de
l'administration du développement durable
Inspectrice générale de
l'administration du développement durable
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 60/72
Annexes
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 61/72
Annexe 1. Lettre de mission
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 62/72
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 63/72
Annexe 2. Liste des personnes rencontrées
Organisme Date Nom Fonction
Cabinet de la SE à l?écologie 12/04/23 Léonard BRUDIEU Conseiller
DEB 19/04/23 Marie-Laure Metayer Adjointe au DEB
id Isabelle Kamil Sous-directrice, de la protection et de la gestion de l?eau, des
ressources minérales et des écosystèmes aquatiques, EARM
id Véronique NICOLAS Cheffe du bureau EARM 4
id Vincent SZLEPER Adjoint à la sous-directrice de la protection et de la restauration des
écosystèmes littoraux et marins.
DGPR/SRSEDPD/SD id Sami DRISSI-AMRAOUI Chargée de mission REACH santé environnement, produits
chimiques, agriculture/ bureau des produits chimiques
MEFSIN/DGE/Service de
l?industrie/sous-direction des
industries de santé, des biens
de consommation et de
l?agroalimentaire
21/04/23 Astrid EVEN Chef de projet Mode, Luxe et biens de consommation
France LACOEUILHE Chargée du textile au sein de l?équipe de Mme EVEN
Comité France Océan 2/05/2023 Gauthier CARLE Coordonnateur des ONG du Comité France Océan
Laboratoire GEMTEX/ENSAIT 2/05/2023 Xyanzi ZENG Directeur
Fabien SALAUN Responsable « matériau avancé »
Xavier LEGRAND Responsable « matériau composite »
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 64/72
MTECT/CGDD/SEVS 5/05/2023 Audrey COREAU Cheffe du service de l?économie verte et solidaire
Pascal DAGRAS Chef de projet affichage environnemental
Alliance du commerce 5/05/2023 Yohann PETIOT Directeur
Pascale Barthomeuf-
Lassire
Directrice des affaires économiques et juridiques
Pierre Alexandre Naud Responsable des affaires économiques et juridiques
ADEME
9/05/2023
Jean Charles
CAUDRON
Responsable de la direction de la supervision des REP
Manon LEGER Chargée de mission au sein de cette direction
GIFAM (Groupement des
marques d?appareils pour la
maison)
10/05/2023
Camille BEURDELEY
Alexandrine FADIN
SOS MAL DE SEINE 12/05/23 Laurent Colasse Président
CETI, centre européen des
textiles européens
16/05/23 Pascal DENIZART Directeur
Expedition MED 16/05/23 Bruno DUMONTET Fondateur et directeur
ETAM 16/05/23 Kache HONG ZWART Directrice RSE
Les Amis de la Terre 23/05/23 Pierre Condamine Chargé de campagne surproduction
ADEME/Service de
Coordination, d?Evaluation et de
24/05/23 Isabelle DEPORTES Ingénieure impacts sanitaires et écotoxicologiques de l?économie
circulaire
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 65/72
Valorisation (SCEV) Coordination R&D DECi
INERIS / Direction stratégie,
politique scientifique et
communication
24/05/23 Pierre BOUCARD Responsable études et recherches de l?unité économie et décision
pour l?environnement
ECOBALYSE/ADEME 24/05/23 Alban FOURNIER Responsable
DECATHLON 26/05/23 Julie Arnould Responsable de l?équipe de recherche
Marie Stephan
Antoine Cosne Doctorant
Institut Français du textile et de
l?habillement
26/05/23 Clarisse REILLE Directrice
Eva Debruyne Référente développement durable
Carole Garbowski Chargé du suivi réglementaire notamment de l?affichage
environnemental
Bureau de la normalisation de
l?industrie textile et de
l?habillement BNITH
2/06/23 Laurent Houillon Directeur
Chercheuse publique 2/06/23 Nathalie Gontard Directrice de recherche à l?INRA et professeure à l?Université de
Montpellier
Refashion 6/06/23 Hélène Daret Directrice du pôle relation avec les adhérents et responsable du
développement de l?éco conception
Bureau de la normalisation des
plastiques et de la plasturgie
20/06/23 Yan Archambeau Directeur
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 66/72
Commission de l?UE/ Direction
générale de l?environnement
23/06/23 Flora Wallace Unité B1
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 67/72
Annexe 3. Glossaire des sigles et acronymes
Acronyme Signification en français
ADEME Agence de la transition écologique
AFNOR Association française de normalisation
AGEC (Loi) Anti-gaspillage et pour une économie circulaire
ANSES
Agence nationale de sécurité sanitaire de l?alimentation, de
l?environnement et du travail
APPLIA Homa Appliance for Europe
BPA Bisphénol A
BPS Bisphénol S
BRM Bioréacteur à membrane
CGDD Commissariat Général au Développement Durable
CETI Centre européen des textiles innovants
COVID Maladie à Coronavirus
CTI Centre Technique Industriel (du textile et de l'habillement)
DCE Directive cadre sur l?eau
DCSMM Directive cadre Stratégie et milieux marins
DEHP Phtalate de bois
DGE Direction générale des entreprises
DGEC Direction Générale de l?Energie et du Climat
DGPR Direction Générale de la Prévention des Risques
DGT Direction Générale du Trésor
ECHA Agence européenne des produits chimiques
EH Equivalent habitant
EN Standard européen en matière de normalisation
ERU Eaux résiduaires urbaines
ETC Commission européenne du voyage
FRIVEP
Projet de structuration d'une filière de réemploi / recyclage industrielle
des vêtements professionnels
GEMTEX Laboratoire de recherche textile
IFTH Institut français du textile et de l'habillement
IGEDD Inspection Générale de l?Environnement et du Développement Durable
INERIS Institut national de l'environnement industriel et des risques
ISO Organisation internationale de normalisation
HBCDD Hexabromocyclododécane (composé aliphatique bromé)
HDPE Polyéthylène de haute densité
LDPE Polyéthylène à basse densité
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 68/72
Acronyme Signification en français
MEAE Ministère de l?Europe et des Affaires Etrangères
MEFSIN
Ministère de l?Economie, des Finances et de la Souveraineté
Industrielle et Numérique
MTECT Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires
Mt Million de tonnes
NMMO N-Methylmorpholine N-oxide
OCDE Organisation de Coopération et de développement économique
OEFSR Performance environnementale des organisations
OFB Office Français de la Biodiversité
ONG Organisation non gouvernementale
OPESCT
Office parlementaire d?évaluation des choix scientifiques et
technologiques
PA Polyamide
PAN Polyacrilonitrile
PBAT Polybutylène adipate-co-téréphtalate
PBS Polybutylène succinate
PCB Polychlorobiphényles
PCL Polyaprolactone
PE Parlement européen
PET Polyéthylène Téréphtalate
PEF Polyéthylène furanoate
PFAS Composés perfluorés
PEFCR Performance environnementale des produits (projet européen)
PFOA Acide perfluorooctanoic
PHA Polyhydroxyalcanoate
PLA Acide polylactique
PM2,5 Particules fines de diamètre 2,5 microns
PM10 Particules fines de diamètre 10 microns
POP Polluants organiques persistants
PP Polypropylène
PPDDT Dichlorodiphényltrichloroéthane
PPD-T Para phénylène-téréphtalamide
PS Polystyrène expansé
PU Polyuréthane
PVC Chlorure de polyvinyle
PVOH Alcool polyvinylique
REACH
Règlement européen portant sur l?enregistrement, l?évaluation et
l?autorisation des substances chimiques dans l?Union européenne
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 69/72
Acronyme Signification en français
Refashion
Eco-organisme de la Filière Textile d'habillement, Linge de maison et
Chaussure
REP Responsabilité élargie du producteur
RISE Institut de recherche de Suède
STEU Stations de traitement des eaux usées
SVHC Substance extrêmement préoccupantes
TARIC Tarif douanier européen
TFUE Traité sur le fonctionnement de l?Union européenne
TLC Produits textiles, linges de maison et chaussures
TMC Consortium Microfibres
UE Union européenne
UICN Union internationale de la Conservation de la nature
UIE Union Nationale des Industries et Entreprises de l'Eau
UIT Union des industries textiles
PUBLIÉ
Rapport n° 014908-01
septembre 2023
La pollution par les micro-plastiques d?origine textile Page 70/72
Annexe 4. Quelques chiffres sur la pollution plastique en
général
Sources :
? Stratégie européenne sur les plastiques (2018)
? The Minderoo-Monaco Commission on Plastics and Human Health
https://storage.googleapis.com/jnl-up-j-agh-
files/journals/1/articles/4056/submission/proof/4056-1-17364-2-10-20230321.pdf
? Global Plastic Outlook ? OCDE https://www.oecd-ilibrary.org/sites/de747aef-
en/1/3/2/index.html?itemId=/content/publication/de747aef-
en&_csp_=e9020c542dd024467e760066b0abe328&itemIGO=oecd&itemContentType=book#
section-d1e2597
8 300 Mt de plastiques fabriqués depuis 1945, dont plus de 50% depuis 2002, et seulement 30%
encore utilisés
460 Mt de plastiques produits en 2019 et 1231 Mt en 2060 selon les prévisions de l?OCDE
49 Mt de matières plastiques consommées dans l?Union européenne (2018)
25,8 Mt de déchets produits chaque année dans l?Union européenne, dont seulement 30% sont
récupérés pour être recyclés
Répartition de la consommation mondiale : 20% Chine, 18% USA, 18% Europe OCDE, 9% reste
OCDE
Production : 52% en Asie dont 32% en Chine, 19% Amérique du nord, 17% Europe.
Entreprises productrices : Sinopec, Exxon mobil, PetroChina, Sibur
Répartition de la production par type de plastiques : 16% PP (polypropylène ? PET), 13% fibres,
12% HDPE, 12% LDPE
Plastiques recyclés : 9% dans le monde soit 29,1 Mt en 2019 du plastique produit et 14% dans
l?UE
Plastiques à usage unique : 35% des plastiques produits soit 133 Mt en 2019
PUBLIÉ
https://storage.googleapis.com/jnl-up-j-agh-files/journals/1/articles/4056/submission/proof/4056-1-17364-2-10-20230321.pdf
https://storage.googleapis.com/jnl-up-j-agh-files/journals/1/articles/4056/submission/proof/4056-1-17364-2-10-20230321.pdf
https://www.oecd-ilibrary.org/sites/de747aef-en/1/3/2/index.html?itemId=/content/publication/de747aef-en&_csp_=e9020c542dd024467e760066b0abe328&itemIGO=oecd&itemContentType=book%23section-d1e2597
https://www.oecd-ilibrary.org/sites/de747aef-en/1/3/2/index.html?itemId=/content/publication/de747aef-en&_csp_=e9020c542dd024467e760066b0abe328&itemIGO=oecd&itemContentType=book%23section-d1e2597
https://www.oecd-ilibrary.org/sites/de747aef-en/1/3/2/index.html?itemId=/content/publication/de747aef-en&_csp_=e9020c542dd024467e760066b0abe328&itemIGO=oecd&itemContentType=book%23section-d1e2597
https://www.oecd-ilibrary.org/sites/de747aef-en/1/3/2/index.html?itemId=/content/publication/de747aef-en&_csp_=e9020c542dd024467e760066b0abe328&itemIGO=oecd&itemContentType=book%23section-d1e2597
PUBLIÉ
Site internet de l?IGEDD :
« Les rapports de l?inspection »
PUBLIÉ
https://www.igedd.developpement-durable.gouv.fr/spip.php?page=liste-actualites&lang=fr&id_mot=1187&debut_rub_actus=0
https://www.igedd.developpement-durable.gouv.fr/spip.php?page=liste-actualites&lang=fr&id_mot=1187&debut_rub_actus=0
Sommaire
Résumé
Liste des recommandations
Introduction
1 La pollution par les micro-plastiques textiles est avérée mais les analyses scientifiques et techniques restent incomplètes, ce qui freine la prise de décision
1.1 Une définition des micro-plastiques encore sujette à discussion
1.1.1 Une question de composition
1.1.2 Une question de taille et de forme
1.1.3 Une question de source
1.2 La pollution par les micro-plastiques est constatée dans l?ensemble des écosystèmes
1.2.1 La pollution aux micro-plastiques de tous les écosystèmes est avérée
1.2.2 La part respective de chaque source dans la pollution par micro-plastique reste incertaine
1.2.3 La pollution par les micro-plastiques est durable
1.3 Des incertitudes qui ralentissent la prise de décision alors que la production de textile synthétique s?accroît
1.3.1 Une quantification de la pollution par les micro-plastiques textiles incomplète
1.3.2 Des incertitudes sur les risques pour les écosystèmes et la santé humaine
1.3.3 Une croissance incontrôlée de la production de textiles synthétiques
1.3.3.1 La fabrication des étoffes est majoritairement délocalisée
1.3.3.1 Les fibres synthétiques envahissent de plus en plus les étoffes et stimulent la baisse des prix et la surconsommation
2 La réponse actuelle à la pollution par les micro-plastiques issus du textile demeure très incomplète
2.1 Les émissions de micro-plastiques textiles sont peu prises en compte dans la règlementation européenne
2.1.1 Une règlementation de l?économie circulaire qui s?oriente enfin vers la réduction de la pollution micro-plastique
2.1.1.1 Un paquet économie circulaire focalisé sur la recyclabilité du plastique
2.1.1.2 L?écoconception pour répondre aux enjeux climatiques plus qu?à la pollution
2.1.1.3 Une définition de la biodégradabilité qui tient imparfaitement compte de la capacité du plastique à se diviser en microparticules
2.1.2 Une règlementation des produits chimiques qui n?intègre pas les micro-plastiques
2.1.3 Une règlementation sur la pollution de l?eau et de l?air qui n?intégrait pas les micro-plastiques
2.1.4 Une règlementation sur l?exportation des déchets ne permettant pas leur contrôle
2.2 Les mesures adoptées en France sont insuffisantes
2.2.1 Une règlementation française centrée sur la REP et le recyclage qui ne règle pas la pollution par les micro-plastiques textiles
2.2.1.1 Le principe de la responsabilité élargie des producteurs et son application au secteur du textile
2.2.1.2 Une politique de recyclage qui ne répond pas à la pollution par les micro-plastiques
2.2.2 La loi AGEC tente d?apporter une solution avec l?équipement obligatoire de filtres à micro-plastiques dans les lave-linges
2.2.3 La captation des micro-plastiques textiles dans les boues des stations d?épuration
2.2.4 Les mesures qui prolongent la durée de vie des textiles ralentissent la pollution
2.2.4.1 L?interdiction de l?élimination des invendus, une mesure forte
2.2.4.2 Le cahier des charges de Refashion lui impose de promouvoir la réparation, le réemploi et la réutilisation
2.2.5 La lente émergence d?une information des consommateurs et de l?écoconception
2.2.5.1 De l?encadrement des allégations environnementales vers l?étiquetage obligatoire
2.2.5.2 L?affichage environnemental devrait « valoriser » le risque de pollution par les microparticules de plastique
2.3 Le secteur économique cherche peu à réduire la pollution à la source
2.3.1 Un secteur en transition, peu mobilisé sur la question des micro-plastiques
2.3.1.1 Les transformations du secteur
2.3.1.2 Quelques initiatives vers des textiles naturels ou moins émetteurs de micro-plastiques
2.3.2 Aucun label environnemental ne semble afficher de critères sur les émissions de micro-plastiques
2.4 De nouveaux outils qui devraient permettre de dépasser ces freins
2.4.1 Les recherches scientifiques en cours
2.4.2 De nouvelles normes devraient faciliter l?avancée des recherches sur les émissions de micro-plastiques
2.4.2.1 Des définitions communes des particules fines de plastiques
2.4.2.2 Une harmonisation des méthodes pour mesurer et analyser les pertes de matières lors des lavages des textiles
2.4.3 Les évolutions règlementaires à venir à l?échelle européenne
3 Afin de mieux répondre à cette pollution, il est nécessaire de prendre en compte le cycle de vie du produit textile
3.1 Approfondir les efforts de recherche
3.2 Répondre aux émissions lors de la création des étoffes et des produits
3.3 Faire du consommateur un acteur éclairé de la réduction de la pollution par les micro-plastiques
3.4 Répondre aux émissions lors de l?usage du produit
3.4.1 Les émissions lors des lavages des produits
3.4.2 Les émissions lors du port des produits
3.5 Répondre aux émissions lorsque le textile devient déchet
3.5.1 La collecte, le tri et les usages nouveaux (réemploi, réutilisation)
3.5.2 Les problèmes de pollution créés par l?exportation des déchets textiles européens et français
Conclusion
Annexes
Annexe 1. Lettre de mission
Annexe 2. Liste des personnes rencontrées
Annexe 3. Glossaire des sigles et acronymes
Annexe 4. Quelques chiffres sur la pollution plastique en général
INVALIDE)