Identification des alternatives au glyphosate pour les usages non agricoles
MENORET, Bernard ;DUFOUR, Anne ;LARGUIER, Michel
Auteur moral
France. Conseil général de l'environnement et du développement durable
;France. Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux
Auteur secondaire
Résumé
<div style="text-align: justify;">La mission d'expertise conjointe portant sur l'identification des alternatives au glyphosate pour les usages non agricoles et non forestiers s'inscrit dans le plan de sortie du glyphosate qui prévoit de mettre fin aux principaux usages du glyphosate d'ici la fin de l'année 2020 au plus tard, et d'ici la fin de l'année 2022 pour l'ensemble des usages. L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) est chargée notamment de procéder à l'évaluation comparative des produits phytopharmaceutiques contenant du glyphosate, en vue d'une éventuelle substitution, selon les critères définis par l'article 50 du règlement 1107/2009. Le glyphosate relève de l'article 50.2. et, en conséquence, la substitution doit se faire par une méthode non chimique, et non par une autre substance active. Dans le cadre d'une cartographie des utilisations du glyphosate, l'étude réalisée a été centrée sur le réseau ferroviaire, les postes électriques du réseau de transport d'électricité, les sites industriels relevant des installations classées pour la protection de l'environnement, les autoroutes, routes et rues, les aéroports, les différentes sortes de gazons, les cimetières, le patrimoine historique bâti et les clôtures. La mission a pris la mesure de la grande diversité des utilisations de glyphosate en zone non agricole (ZNA) ainsi que les méthodes alternatives non chimiques. Les quantités de glyphosate employées en ZNA sont très faibles comparées aux usages agricoles et la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) en est le principal consommateur. Le recours au glyphosate en ZNA est, entre autres, une réponse aux exigences de textes normatifs, réglementaires ou internes aux entreprises. Ces référentiels en ZNA impliquent l'élimination de la végétation pour satisfaire des enjeux de sécurité des personnes et des biens, des motifs culturels (cimetières, patrimoine) ou des préoccupations commerciales. De tels usages peuvent ainsi être considérés comme sensibles. La loi Labbé a introduit un découpage complexe entre les zones où l'emploi des produits phytopharmaceutiques est interdit, et celles où il reste autorisé dans la sphère publique. Des méthodes non chimiques alternatives très diverses existent, mais la notion d'usage courant, un des critères de l'article 50, apparaît comme très sélective. La mission a recensé les inconvénients de ces méthodes pour les principales utilisations. Au final, l'article 50 fixe des critères qui font apparaître l'évaluation comparative comme un levier d'un intérêt limité pour les usages non agricoles. Enfin, la mission appelle l'attention sur des pistes de réflexion pour intégrer les professionnels opérant dans les ZNA dans la task force, favoriser les travaux de la recherche publique et les actions de transfert nécessaires aux ZNA, être très vigilant sur les effets du report vers d'autres herbicides chimiques, et élargir l'épidémiosurveillance aux adventices dans les zones non agricoles. Une réflexion peut être conduite pour introduire dans les autorisations de mise sur le marché (AMM) de produits à base de glyphosate, pour leurs usages spécifiques en ZNA classés comme mineurs, une utilisation limitée aux seuls motifs de la sécurité des personnes et des biens, et d'ordre culturel.</div>
Editeur
CGEDD
Descripteur Urbamet
pollution du sol
;jardin
;polluant
;impact
;santé
;pollution de l'eau
;réseau de transport
;réseau de distribution d'électricité
;site industriel
;route
;autoroute
;rue
;besoin
;recherche
Descripteur écoplanete
traitement phytosanitaire
;produit phytosanitaire
;pesticide
;réseau ferroviaire
;désherbage
;prévention des pollutions
Thème
Ressources - Nuisances
;Environnement - Paysage
Texte intégral
MINISTÈRE DE LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE ET SOLIDAIRE
MINISTÈRE DE L'AGRICULTURE ET DE L'ALIMENTATION
Conseil général de l'environnement, et du développement durable CGEDD n° 012708-01
Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux CGAAER n° 19034
Identification des alternatives au glyphosate pour les usages non agricoles
Bernard MÉNORET
eaux et des forêts
U
B
établi par Anne DUFOUR
vétérinaire Membre du CGAAER
Ingénieur général des ponts, des
Inspecteur général de santé publique
Membre du CGEDD
P
LI
Octobre 2019
É
Michel LARGUIER
Ingénieur général des ponts, des eaux et des forêts Membre du CGAAER
PUBLIÉ
SOMMAIRE
RESUME........................................................................................................................................... 7 1. INTRODUCTION ........................................................................................................................... 11 2. LE CONTEXTE DU GLYPHOSATE EN ZONES NON AGRICOLES ET NON FORESTIERES ........................... 13
2.1. La situation spécifique du glyphosate en France ..................................................... 13 2.1.1. Le plan d'action de sortie du glyphosate ................................................................ 13 2.1.2. La loi Labbé ........................................................................................................... 15 2.2. La réglementation européenne pour la mise sur le marché vis-à-vis des produits phytopharmaceutiques ............................................................................................ 17 2.2.1. Le règlement (CE) 1107/2009 ................................................................................ 17 2.2.2. Le renouvellement de l'approbation européenne du glyphosate ............................ 20 2.3. L'emploi du glyphosate en zone non agricole .......................................................... 22 2.3.1. L'hétérogénéité des zones non agricoles (ZNA) .................................................... 22 2.3.2. Une valeur d'usage singulière ............................................................................... 23 2.3.3. Les six usages autorisés pour des utilisations très variées .................................... 24 2.3.4. Les quantités de glyphosate en ZNA ..................................................................... 25 2.3.5. Les particularités des zones non agricoles lourdement artificialisées .................... 28
2.3.5.1 Des surfaces artificialisées .......................................................................................... 28 2.3.5.2 L'absence d'usage alimentaire et d'impact direct sur la biodiversité sur ces surfaces complètement artificialisées ........................................................................................................ 29 2.3.5.3 Des obligations de collecte des eaux de plate-forme .................................................. 30
2.3.6. Les enjeux du glyphosate en ZNA ......................................................................... 31
2.3.6.1 2.3.6.2 2.3.6.3 2.3.6.4 2.3.6.5 2.3.6.6 Sécurité des travailleurs (hors exposition aux PPP) .................................................... 32 Sécurité des usagers et clients (hors exposition aux PPP) ......................................... 32 Sécurité industrielle ...................................................................................................... 33 Conservation et sécurité des ouvrages dans le temps ................................................ 33 Accessibilité et praticabilité .......................................................................................... 33 Les enjeux commerciaux (dont sportifs) et culturels .................................................... 34
3. L'EVALUATION COMPARATIVE ET LES CLARIFICATIONS POUR LA MISE EN OEUVRE DE L'ARTICLE 50.2.. 35
3.1. L'évaluation comparative des produits phytopharmaceutiques ................................ 35 3.2. La saisine de l'ANSES pour une évaluation comparative ........................................ 36 3.3. La notion d'usage .................................................................................................... 37 3.3.1. Définition d'un usage lié à une AMM : utilisation versus usage .............................. 37 3.3.2. La segmentation des utilisations ............................................................................ 40
3.3.2.1 3.3.2.2 3.3.3.1 3.3.3.2 3.3.3.3 3.3.3.4 Par activité économique ou par objet technique .......................................................... 41 La diversité des objets techniques ............................................................................... 42 L'adaptation à l'objet technique ................................................................................... 43 L'effet économique des meilleures techniques disponibles ......................................... 44 Les micromarchés ........................................................................................................ 44 Le point de départ de l'appréciation de l'usage courant .............................................. 45
3.3.3. La notion d'usage courant ..................................................................................... 43
3.3.4. La notion d'usage sensible .................................................................................... 45 3.3.5. La notion d'utilisation mineure ............................................................................... 46 3.4. Le référentiel ............................................................................................................ 47
3.5. Les conditions économiques .................................................................................... 48 3.5.1. Les cadres économiques variés des activités en ZNA ........................................... 48 3.5.2. Les différentes logiques ......................................................................................... 49
3.5.2.1 3.5.2.2 3.5.2.3 3.5.2.4 Les secteurs monopolistiques régulés ......................................................................... 49 Les concessions ........................................................................................................... 50 Le secteur public .......................................................................................................... 50 Le secteur privé ............................................................................................................ 51 Page 3/133
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3.5.3. Des alternatives estimées 5 à 10 fois plus chères par les utilisateurs .................... 51 3.5.4. Quelques écueils en conclusion ............................................................................ 53 4. LES METHODES ALTERNATIVES EN ZNA ......................................................................................... 55
4.1. Les méthodes non chimiques curatives ................................................................... 55 4.1.1. Traitement manuel et mécanique........................................................................... 55 4.1.2. Traitement thermique............................................................................................. 58 4.2. Méthodes non chimiques préventives ...................................................................... 60 4.3. Les solutions chimiques ou biologiques ................................................................... 62 4.3.1. Autres herbicides chimiques .................................................................................. 62 4.3.2. Les herbicides chimiques de biocontrôle ............................................................... 63 4.3.3. Produits à faible risque .......................................................................................... 63 4.3.4. Un effet report prévisible ........................................................................................ 64
5. CARTOGRAPHIE DES UTILISATIONS DU GLYPHOSATE EN ZNA ET DES ALTERNATIVES NON CHIMIQUES ................................................................................................................................. 65
5.1. Le réseau ferroviaire ................................................................................................ 66 5.1.1. Les exigences du référentiel .................................................................................. 66 5.1.2. Un plan de substitution par d'autres herbicides chimiques..................................... 67 5.1.3. Des solutions non chimiques irréalistes à l'échelle du réseau ................................ 69 5.1.4. Évaluation financière ............................................................................................. 69
5.1.4.1 5.1.4.2 Évaluation des coûts des solutions alternatives .......................................................... 69 Éléments financiers pour SNCF Réseau ..................................................................... 70
5.1.5. Points de vigilance et questions collatérales à traiter ............................................. 71 5.1.6. Les transports guidés ............................................................................................ 71 5.2. Les postes électriques du réseau de transport d'électricité ...................................... 72 5.2.1. Les exigences du référentiel .................................................................................. 72 5.2.2. Des essais de substitution par d'autres herbicides chimiques ............................... 73 5.2.3. Des solutions non chimiques irréalistes dans les postes actuels ........................... 74 5.2.4. Évaluation financière ............................................................................................. 74 5.2.5. Des solutions alternatives permises par une reconception des postes .................. 74 5.3. Les sites industriels ................................................................................................. 76 5.3.1. Les exigences du référentiel .................................................................................. 77 5.3.2. La substitution par d'autres herbicides chimiques .................................................. 77 5.3.3. Des solutions non chimiques irréalistes ................................................................. 77 5.3.4. Évaluations financières .......................................................................................... 78 5.3.5. Le cas particulier des sites militaires ..................................................................... 78 5.3.6. Questions collatérales à prendre en compte .......................................................... 78 5.4. Les autoroutes, routes et rues ................................................................................. 79 5.4.1. Les différents maîtres d'ouvrage............................................................................ 79
5.4.1.1 5.4.1.2 5.4.1.3 5.4.2.1 5.4.2.2 5.4.2.3 5.4.2.4 Les autoroutes concédées ........................................................................................... 79 Le réseau routier national ............................................................................................ 80 Les routes départementales et la voirie communale ................................................... 80 Les autoroutes concédées ........................................................................................... 81 La sécurité et le service à l'usager ............................................................................... 82 Le cas des ouvrages d'art ............................................................................................ 82 Les autres réseaux routiers ......................................................................................... 82
5.4.2. Un abaissement du référentiel ............................................................................... 81
5.4.3. Limites des solutions alternatives .......................................................................... 83 5.4.4. Évaluations financières .......................................................................................... 83
5.4.4.1 5.4.4.2 5.4.4.3 Les autoroutes concédées ........................................................................................... 83 Le réseau routier national ............................................................................................ 84 Les routes départementales et les voies communales ................................................ 84
5.4.5. Points de vigilance et questions collatérales à traiter ............................................. 84 5.5. Les aéroports et installations liées au trafic aérien .................................................. 85
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5.6. Les gazons et les allées de structures non soumises à une concurrence commerciale ............................................................................................................ 86 5.6.1. Équipements sportifs ............................................................................................. 86 5.6.2. Autres structures ................................................................................................... 87 5.7. Les gazons et allées de structures soumises à une concurrence commerciale ....... 87 5.7.1. Les gazons de placage.......................................................................................... 87 5.7.2. Les équipements sportifs collectifs à usage professionnel ..................................... 88 5.7.3. Les golfs ................................................................................................................ 88 5.7.4. Les parcs privés ouverts au public......................................................................... 90 5.7.5. Les exigences commerciales des autres établissements soumis à concurrence ... 90 5.8. Les cimetières.......................................................................................................... 91 5.9. Les clôtures ............................................................................................................. 92 5.10. Le patrimoine historique bâti .................................................................................. 93
6. PISTES DE REFLEXION DANS LE CADRE DE L'ARTICLE 50 ................................................................ 95 7. APPUI PAR LA RECHERCHE PUBLIQUE ........................................................................................... 97
7.1. État des lieux ........................................................................................................... 97 7.2. Les besoins des acteurs et les pistes de recherche ................................................. 97 7.2.1. Besoins en produits phytopharmaceutiques alternatifs .......................................... 97 7.2.2. Besoins en pulvérisation ultralocalisée pour réduire les quantités ......................... 98 7.2.3. Besoins en matériel de désherbage mécanique .................................................... 99 7.2.4. Besoins pour réduire la pénibilité du travail ........................................................... 99 7.2.5. Besoins en automatisation................................................................................... 100 7.2.6. Besoins en technologie de rupture ...................................................................... 100 7.2.7. Besoins en biovigilance ....................................................................................... 102
CONCLUSION ................................................................................................................................ 104 ANNEXES ..................................................................................................................................... 107 : LETTRE DE MISSION ............................................................................................ 109 : LISTE DES PERSONNES RENCONTREES ................................................................ 111 : LISTE DES SIGLES UTILISES ................................................................................. 116 : LES PRODUITS ALTERNATIFS AUX PRODUITS PHYTOPHARMACEUTIQUES DE ............................................................................................................................ 118 : EXTRAIT DE L'INTERVIEW DU SENATEUR JOËL LABBE ............................................ 129 : DONNEES COMPLEMENTAIRES SUR LES METHODES ALTERNATIVES NON CHIMIQUES 131 : AMELIORATION DE L'ERGONOMIE AVEC UN DESHERBEUR ....................................... 132
SYNTHESE
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RESUME
Le ministre de la transition écologique et solidaire, et le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, ont confié au Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) et au Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) une mission conjointe portant sur l'identification des alternatives au glyphosate pour les usages non agricoles et non forestiers. Cette mission d'expertise s'inscrit dans le plan de sortie du glyphosate qui prévoit de mettre fin aux principaux usages du glyphosate d'ici la fin de l'année 2020 au plus tard, et d'ici la fin de l'année 2022 pour l'ensemble des usages. L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) doit examiner les autorisations de mise sur le marché (AMM) des produits phytopharmaceutiques contenant du glyphosate. Elle est chargée notamment de procéder à l'évaluation comparative de ces produits, en vue d'une éventuelle substitution, selon les critères définis par l'article 50 du règlement 1107/2009. Le glyphosate relève de l'article 50.2. et, en conséquence, la substitution doit se faire par une méthode non chimique, et non par une autre substance active. L'Institut national de la recherche agronomique, l'Office national des forêts et la mission CGEDD-CGAAER ont été chargés, chacun dans leur domaine, de présenter les données nécessaires à cette procédure respectivement pour les usages agricoles, forestiers et non agricoles. Dans le cadre d'une cartographie des utilisations du glyphosate, l'étude réalisée a été centrée sur le réseau ferroviaire, les postes électriques du réseau de transport d'électricité, les sites industriels relevant des installations classées pour la protection de l'environnement, les autoroutes, routes et rues, les aéroports, les différentes sortes de gazons, les cimetières, le patrimoine historique bâti et les clôtures. La mission a pris la mesure de la grande diversité et de l'hétérogénéité des utilisations de glyphosate en zone non agricole (ZNA). Elle a donc jugé nécessaire d'examiner dans le détail les caractéristiques de ces zones et des utilisations non agricoles du glyphosate ainsi que les méthodes alternatives non chimiques : désherbage manuel, mécanique, thermique, paillage, minéralisation des surfaces, plantes couvre-sols, robots de tonte... Afin de collecter des données et des informations représentatives des pratiques de terrain et des alternatives, la mission a mené une trentaine d'entretiens avec un grand nombre d'acteurs : ANSES, délégué interministériel au plan de sortie du glyphosate, organismes de recherche, administrations centrales et déconcentrées, entreprises et collectivités utilisatrices de glyphosate, applicateurs professionnels de produits phytopharmaceutiques, associations environnementalistes ... Ainsi, la mission observe que les quantités de glyphosate employées en ZNA sont très faibles comparées aux usages agricoles. En 2018, les usages non agricoles et non forestiers représentent moins de 1,5 % du glyphosate vendu en France. La Société nationale des chemins de fer français (SNCF) est le principal consommateur de glyphosate avec 45 tonnes appliquées, à comparer aux 107 tonnes vendues pour des usages professionnels en zones non agricoles. Par ailleurs, tous les usages spécifiques aux ZNA sont classés comme des usages mineurs dans le catalogue national. L'article 50.1. du règlement communautaire précise que les utilisations mineures doivent être prises en compte dans l'étude de la substitution.
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Les zones non agricoles lourdement artificialisées présentent des caractéristiques qui les distinguent significativement des zones agricoles. Les impacts des produits phytopharmaceutiques y sont moindres en regard de la non consommation des produits et des exigences en matière de gestion des eaux. De surcroît, un grand nombre de méthodes non chimiques alternatives ne sont pas transposables depuis les zones agricoles vers les ZNA. Le recours au glyphosate en ZNA est, entre autres, une réponse aux exigences de textes normatifs, réglementaires ou internes aux entreprises. Ces référentiels en ZNA impliquent l'élimination de la végétation pour satisfaire des enjeux de sécurité des personnes et des biens, des motifs culturels (cimetières, patrimoine) ou des préoccupations commerciales. De tels usages peuvent ainsi être considérés comme sensibles. La loi Labbé a introduit un découpage complexe entre les zones où l'emploi des produits phytopharmaceutiques est interdit, et celles où il reste autorisé dans la sphère publique. Une dérogation est accordée lorsqu'il y a des enjeux de sécurité des personnes. Il est à noter que d'éventuelles limitations ou suppressions d'autorisations du glyphosate sont susceptibles de supprimer des effets de cette loi. L'évaluation comparative préalable à la substitution du glyphosate doit être conduite selon les critères définis par l'article 50 du règlement 1107/2009. Dans le cas du glyphosate, il fixe trois critères principaux : une méthode non chimique de prévention ou de lutte doit exister pour la même utilisation, elle doit être d'usage courant dans l'État membre, et elle ne doit pas présenter d'inconvénients économiques ou pratiques majeurs. Des méthodes non chimiques alternatives très diverses existent, mais la notion d'usage courant apparaît comme très sélective. Elle est définie comme désignant, à la date du retrait d'AMM, un outil au stade opérationnel, disponible sur le marché, mis sur le marché par son fabricant à hauteur de la demande, et adapté à chaque objet technique à désherber et qui présente un caractère habituel, ordinaire au moment présent. La mission a recensé les inconvénients de ces méthodes pour les principales utilisations. Ainsi, les alternatives sont de 5 à 10 fois plus chères selon tous les interlocuteurs rencontrés en raison de l'allongement du temps de travail, et de la nécessité de faire plusieurs passages. Les employeurs soulignent que leur personnel est exposé à des risques quantitativement plus importants liés à la pénibilité plus importante du désherbage mécanique ou manuel. Ils déplorent tous la difficulté à recruter déjà aujourd'hui de la main d'oeuvre pour ces travaux jugés pénibles et peu gratifiants. Au final, l'article 50 fixe des critères qui font apparaître l'évaluation comparative comme un levier d'un intérêt limité pour les usages non agricoles. Sauf exception, dans les ZNA les plus consommatrices de glyphosate, les qualités techniques et économiques de cet herbicide n'ont pas permis l'émergence de solutions alternatives que la mission qualifierait d'usage courant. Ainsi, le projet de la SNCF est fondé sur la substitution du glyphosate par un mélange chimique d'acide pélargonique et de flazasulfuron, avec une attention à apporter au phasage du remplacement des unités des trains désherbeurs. Le flazasulfuron présente l'inconvénient avéré de provoquer l'apparition d'adventices résistantes. Ce mélange n'apparaît pas sensiblement plus sûr pour l'environnement.
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La reconception des sites désherbés avec du glyphosate (cimetières, réseau électrique) pour les rendre moins favorables aux adventices s'avère indispensable pour maîtriser les coûts du désherbage, ce qui est loin d'un usage courant. Bien qu'ils ne peuvent pas alimenter la procédure d'évaluation comparative, les produits de biocontrôle herbicides sur le marché, à base d'acide pélargonique, d'acide acétique et d'acide caprylique sont une alternative au glyphosate. Mais leur emploi est limité par leur coût important, leur efficacité moindre et leur volume d'application. Ils ont tendance à être évincés par des produits non autorisés tels que le vinaigre et les sels de déneigement. Par ailleurs, les produits phytopharmaceutiques à faible risque, au sens du règlement 1107/2009, ne comportent aucun herbicide. Enfin, la mission appelle l'attention sur des pistes de réflexion pour intégrer les professionnels opérant dans les ZNA dans la task force, favoriser les travaux de la recherche publique et les actions de transfert nécessaires aux ZNA, être très vigilant sur les effets du report vers d'autres herbicides chimiques, et élargir l'épidémiosurveillance aux adventices dans les zones non agricoles. S'il est souhaité de rester cohérent avec la loi Labbé, une réflexion peut être conduite pour introduire dans les AMM de produits à base de glyphosate, pour leurs usages spécifiques en ZNA classés comme mineurs, une utilisation limitée aux seuls motifs de la sécurité des personnes et des biens, et d'ordre culturel.
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1. INTRODUCTION
Le 22 juin 2018, le gouvernement annonce la sortie du glyphosate en deux temps : mettre fin aux principaux usages du glyphosate d'ici la fin de l'année 2020 au plus tard, et d'ici la fin de l'année 2022 pour l'ensemble des usages. Il se dote d'un plan de sortie et d'une « task force » pour s'assurer de sa mise en oeuvre. À cette fin, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) est chargée d'examiner le devenir des autorisations de mise sur le marché (AMM) des produits phytopharmaceutiques contenant du glyphosate. L'agence appliquera notamment les procédures d'évaluation comparative, à des fins de substitution, prévues par l'article 50. du règlement 1107/2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques. Pour alimenter ce dispositif, l'évaluation des usages agricoles du glyphosate est confiée à l'Institut national de la recherche agronomique (INRA), et celle des usages forestiers à l'Office national des forêts (ONF). Le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) et le Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) sont saisis le 11 février 2019 par les ministres chargés de l'écologie et de l'agriculture pour une mission portant sur l'identification des alternatives au glyphosate pour les usages non agricoles et non forestiers. Les objectifs formulés dans la lettre de mission sont les suivants : examiner les usages non agricoles et non forestiers du glyphosate, en évaluant en priorité les usages correspondants aux quantités les plus importantes de glyphosate, et les usages professionnels sensibles ; identifier pour ces usages les méthodes alternatives non chimiques de prévention ou de lutte ; déterminer si ces méthodes non chimiques sont d'un usage courant, et quels sont leurs avantages et leurs inconvénients sur les plans pratiques et économiques. Ces informations correspondent aux critères de l'évaluation comparative des produits à base de glyphosate au titre de l'article 50.2 du règlement 1107/2009 ; indiquer les usages pour lesquels la recherche publique pourrait jouer un rôle d'animation ou d'appui renforcé.
Pour mettre en oeuvre ce programme de travail, la mission a conduit une trentaine d'entretiens avec un grand nombre d'acteurs : ANSES, délégué interministériel au plan de sortie du glyphosate, organismes de recherche, administrations centrales et déconcentrées, entreprises et collectivités utilisatrices de glyphosate, applicateurs professionnels de produits phytopharmaceutiques, associations environnementalistes, fabricants de produits alternatifs et de matériels de désherbage... La lettre de mission précise que la SNCF est le plus important consommateur individuel de glyphosate, et il est largement traité dans ce rapport. Mais la mission a également pris en compte la grande diversité des utilisateurs de glyphosate en zone non agricole et non forestière. Enfin, pour délimiter son travail, la mission a apporté des clarifications sur les notions de référentiel quant aux objectifs du désherbage en zone non agricole, d'usage professionnel sensible, et d'utilisation courante pour les méthodes alternatives non chimiques.
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2. LE CONTEXTE DU GLYPHOSATE EN ZONES NON AGRICOLES ET NON
FORESTIERES
2.1. La situation spécifique du glyphosate en France
2.1.1. Le plan d'action de sortie du glyphosate
Le débat public sur le glyphosate s'inscrit dans une controverse plus large sur l'évolution des modes de production végétale, et sur la réduction de l'impact des produits phytopharmaceutiques. Les questions sur les conséquences du glyphosate pour la santé publique sont focalisées sur l'apparente contradiction entre : l'évaluation du Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), qui classe le glyphosate dans la catégorie des cancérogènes probables pour l'homme (catégorie 2A) qui se rapproche de la catégorie 1B du règlement (CE) n° 1272/2008. Cette évaluation1, présentée le 20 mars 2015, porte sur les formulations contenant du glyphosate. Elle est fondée sur des études épidémiologiques, des résultats d'expérimentations sur des animaux, et des études sur les mécanismes de carcinogenèse. la mise en oeuvre des guides d'évaluation communautaires sur les risques liés aux produits phytopharmaceutiques, qui ne conduit pas les agences sanitaires à retenir le caractère cancérogène de cette substance. En effet, dans son avis du 12 novembre 2015, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a estimé qu'il était « improbable que le glyphosate fasse courir aux humains un danger cancérogène ». En conséquence, l'EFSA n'a pas retiré le glyphosate de la liste des substances actives entrant dans la composition des produits phytopharmaceutiques. Les agences sanitaires nationales des pays de l'Union européenne (en France : l'ANSES) n'ont, par conséquent, pas retiré du marché toutes les spécialités commerciales contenant cette substance active. Les mêmes décisions ont été prises dans d'autres parties du monde,
L'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) a analysé cette divergence d'appréciation. Il conclut notamment que : « la portée des travaux du CIRC et de l'EFSA diffère : le CIRC se concentre sur la question du danger causé par le glyphosate (indépendamment du degré d'exposition), alors que l'EFSA analyse les risques encourus pour la santé humaine ou l'environnement (combinant danger et exposition). ». En 2017, l'Union européenne devait décider du renouvellement ou non de l'approbation du glyphosate, qui arrivait à échéance le 15 décembre. Une majorité qualifiée s'est dégagée le 27 novembre 2017 au sein des États membres pour décider un renouvellement pour cinq ans (au lieu de 10 ans) du glyphosate, soit jusqu'au 15 décembre 2022. Dans le prolongement de la position française lors des votes au niveau communautaire, un plan de sortie du glyphosate est adopté le 22 juin 2018. Il annonce « la décision du gouvernement de mettre fin aux principaux usages du glyphosate d'ici trois ans au plus tard et d'ici cinq ans pour l'ensemble des usages, tout en précisant que les agriculteurs ne seraient pas laissés dans une impasse. »
1
Monographies du CIRC sur l'évaluation des risques de cancérogénicité pour l'homme, volume 112 (2015).
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En France, l'animation du plan de sortie du glyphosate est confiée à une task force réunissant le ministère de la transition écologique et solidaire, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation, l'INRA, l'Association de coordination technique agricole (ACTA) et l'Assemblée permanente des Chambres d'agriculture (APCA). Elle est présidée par le préfet Pierre-Étienne Bisch, coordinateur interministériel du plan de sortie. Les organismes de développement agricole, les réseaux d'expérimentation et de démonstration, l'enseignement agricole et les organismes de recherche sont mobilisés, avec le soutien de plusieurs dispositifs (Programme ECOPHYTO, ANR2, Programme Cadre H20203, fond CASDAR4), pour développer et tester des alternatives pratiques aux usages du glyphosate. Afin d'accompagner les agriculteurs, un centre de ressources sous forme de site web a été créé. Il rassemble plusieurs dizaines de solutions techniques alternatives à l'usage du glyphosate. La mission constate que la task force ne comporte pas d'acteurs opérant dans les zones non agricoles. Par ailleurs, le site web du centre de ressources n'aborde pas les éventuelles techniques alternatives utilisables dans les zones non agricoles pour se passer de glyphosate. Des informations sont données par le site ECOPHYTO PRO5, mais ce site présente essentiellement des informations dans un objectif de réduction d'emploi des PPP. À la suite de la consultation publique de novembre-décembre 2018, le plan ECOPHYTO II+ intègre les actions prévues par le plan de sortie du glyphosate. Il maintient les objectifs de réduction du recours aux produits phytopharmaceutiques de 25 % en 2020 par la généralisation et l'optimisation des techniques disponibles, et de 50 % en 2025 par une mutation profonde des systèmes de productions et des filières. Le plan ECOPHYTO II+ comporte un axe 4 dédié à l'accélération de la transition vers l'absence de recours aux produits phytosanitaires dans les jardins, espaces végétalisés et infrastructures (JEVI). L'axe 3 du plan ECOPHYTO II+ porte sur l'évaluation et la maîtrise des risques et des impacts des produits phytopharmaceutiques. Dans ce cadre, l'action 15 porte sur l'accélération du retrait des substances les plus préoccupantes et l'évolution des procédures d'approbation des substances actives. Enfin, l'action 15.3 s'intitule : « Réussir la sortie du Glyphosate ». Cette action 15.3 rappelle les échéances de fin 2020 et fin 2022 pour la sortie du glyphosate, le dispositif de la task force, et les travaux en cours sur les alternatives à l'emploi de cette substance active. Elle indique également les études confiées à l'ANSES et à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) sur les risques pour la santé publique liés au glyphosate. En revanche, la mission note que cette action 15.3 : ne mentionne pas les zones non agricoles ; ne cite pas de travail spécifique pour la recherche d'alternative au glyphosate dans ce domaine.
ANR : l'Agence nationale de la recherche est une agence de moyens qui finance la recherche publique et la recherche partenariale en France. 3 Le programme Cadre H2020 est le programme européen pour la recherche et le développement pour la période 2014-2020. 4 Le CASDAR est le compte d'affectation spéciale développement agricole et rural. Il a pour objet de financer les actions de développement agricole et rural selon les priorités fixées par le Programme national pour le développement agricole et rural. 5 https://www.ecophyto-pro.fr
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En résumé, la mission constate l'absence de prise en compte des zones non agricoles dans le dispositif mis en place par le plan de sortie. Leurs spécificités quant à la recherche et au déploiement de méthodes alternatives sont ignorées. Quant à l'axe 4 du plan ECOPHYTO II+, il traite des JEVI dans une perspective de réduction des produits phytopharmaceutiques, mais sans citer la sortie du glyphosate et ses particularités.
Pour ces raisons, les points de vigilance suivants sont proposés. Intégrer les zones non agricoles et les professionnels concernés dans le dispositif préparant le retrait du glyphosate : Accueillir dans la task force des professionnels opérant dans les zones non agricoles ; Élargir aux zones non agricoles le contenu du centre de ressources pour les solutions techniques alternatives à l'usage du glyphosate ; Inclure dans l'action 15.3 « Réussir la sortie du Glyphosate » du plan ECOPHYTO II+, des dispositions prenant en compte les spécificités des zones non agricoles quant à la recherche et au déploiement de méthodes alternatives.
2.1.2. La loi Labbé
En France, l'utilisation de tous les produits phytopharmaceutiques de synthèse, et donc du glyphosate, est déjà interdite dans la grande majorité des zones non agricoles fréquentées par le public. La loi n° 2014-110 du 6 février 2014 (dite loi Labbé) modifiée6 visant à mieux encadrer l'utilisation des produits phytosanitaires sur le territoire national, modifie le code rural et de la pêche maritime pour fixer les dispositions suivantes : à compter du 1er janvier 2017, « il est interdit aux personnes publiques [...] d'utiliser ou de faire utiliser des produits phytopharmaceutiques [...] pour l'entretien des espaces verts, des voiries, des forêts ou des promenades accessibles ou ouverts au public et relevant de leur domaine public ou privé. » (article L.253-7-II). cette première interdiction ne s'applique pas : « aux produits de biocontrôle figurant sur une liste établie par l'autorité administrative, aux produits qualifiés à faible risque [...], ni aux produits dont l'usage est autorisé dans le cadre de l'agriculture biologique » ; « aux traitements et mesures nécessaires à la destruction et à la prévention de la propagation des organismes nuisibles » classés en lutte obligatoire ; aux traitements « nécessaires pour lutter contre un danger sanitaire grave menaçant la pérennité du patrimoine historique ou biologique, et ne pouvant être maîtrisé par un autre moyen, y compris une méthode non chimique » ;
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La loi n° 2015-992 du 17 août 2015 a modifié la loi Labbé pour élargir l'interdiction d'emploi des produits de synthèse aux voiries, mais en prévoyant une dérogation pour motif de sécurité pour les employés et les usagers ou en cas de sujétions disproportionnées.
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« pour l'entretien des voiries dans les zones étroites ou difficiles d'accès, telles que les bretelles, échangeurs, terre-pleins centraux et ouvrages, dans la mesure où leur interdiction ne peut être envisagée pour des raisons de sécurité des personnels chargés de l'entretien et de l'exploitation ou des usagers de la route, ou entraîne des sujétions disproportionnées sur l'exploitation routière » ; à compter du 1er janvier 2019, « la mise sur le marché, la délivrance, l'utilisation et la détention des produits [...] pour un usage non professionnel sont interdites » (article L. 253-7-III) ; cette seconde interdiction ne s'applique pas : « aux produits de biocontrôle figurant sur une liste établie par l'autorité administrative, aux produits qualifiés à faible risque [...], ni aux produits dont l'usage est autorisé dans le cadre de l'agriculture biologique. » ; « aux traitements et mesures nécessaires à la destruction et à la prévention de la propagation des organismes nuisibles » classés en lutte obligatoire.
En pratique, sauf en cas d'impératif lié à la sécurité des personnes, cette réglementation interdit l'emploi des herbicides à base de glyphosate dans les espaces verts, forêts et promenades accessibles ou ouvertes au public appartenant aux personnes publiques. En revanche, les traitements restent autorisés : pour les gestionnaires d'espaces privés recevant du public, dont les parcs d'attractions, golfs, entreprises avec espaces végétalisés, terrains de sport à usage professionnel... dans les terrains de sport et les cimetières ; sur un fondement de sécurité, avec l'entretien de voiries telles que définies dans la loi.
La loi Labbé interdit les usages non professionnels de produits de synthèse. En clair, dans les jardins, l'interdiction se rapporte aux jardiniers et non aux jardins. Contrairement aux dispositions relatives aux personnes publiques, la loi ne prévoit pas d'interdire l'utilisation de produits phytopharmaceutiques dans les jardins des particuliers, sous réserve que ces traitements soient réalisés par des entreprises (paysagistes, prestataires...) agréées par les Directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (DRAAF) et non par des particuliers. Plusieurs associations jugent les dispositions prévues par la loi Labbé insuffisantes. Ainsi, une pétition intitulée «Zéro pesticide sur toutes les zones non agricoles» est lancée depuis mars 2019 par l'association NOÉ. Huit autres associations, dont la Fondation Nicolas Hulot pour la nature et l'homme, Générations futures, la Ligue pour la protection des oiseaux, etc. soutiennent cette démarche. Elles « demandent, au nom de la biodiversité et de la santé humaine, l'interdiction des pesticides de synthèse sur toutes les zones non agricoles dès 2020 »7, y compris en forêt et pour la SNCF. Toujours dans un souci de protection des personnes, des textes autres que la loi Labbé imposent des interdictions dans des zones non agricoles : l'article L.253-7-1 du code rural et de la pêche maritime interdit l'utilisation des produits phytopharmaceutiques dans les cours de récréation et autres lieux fréquentés par les
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https://www.change.org/p/0-pesticide-sur-toutes-les-zones-non-agricoles. Consulté le 18 septembre 2019
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enfants ; l'arrêté du 27 juin 2011 est relatif à l'interdiction d'utilisation de certains produits phytopharmaceutiques dans des lieux fréquentés par le grand public ou des groupes de personnes vulnérables : dans tous les lieux extérieurs des établissements accueillant des enfants ; à moins de 50 mètres des établissements de soins «sans que cette interdiction s'applique au-delà de la limite foncière de ces derniers».
La mission prend note : du découpage complexe induit par la loi Labbé entre les zones où l'emploi du glyphosate est interdit, et celles où il reste autorisé ; de la dérogation accordée par la loi Labbé pour maintenir l'emploi du glyphosate sur les voiries lorsqu'il y a des enjeux de sécurité des personnels et des usagers.
2.2. La réglementation européenne pour la mise sur le marché vis-à-vis des produits phytopharmaceutiques
La directive 2009/128/CE instaure un cadre d'action communautaire pour parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable. L'article 12 permet aux États membres de restreindre ou d'interdire l'utilisation de pesticides dans certaines zones spécifiques. Comme on le verra par la suite, un autre choix a été fait en vue de la mise en oeuvre du plan de sortie du glyphosate à travers la mise en oeuvre de l'article 50 (cf. : 3.1. ).
2.2.1. Le règlement (CE) 1107/2009
Le règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement Européen et du Conseil du 21 octobre 2009 définit les règles relatives à la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques. Dans ce dispositif, il est nécessaire de distinguer ce qui relève : des substances actives, qui exercent une activité biologique sur les organismes nuisibles ; des préparations de produits phytopharmaceutiques (ou spécialités commerciales), qui sont des formulations composées : o o de substances actives ; de coformulants : adjuvants dépourvus d'activité biologique comme les mouillants, les tensioactifs, les antioxydants, les stabilisateurs, les émulsifiants, les répulsifs, les émétiques, les colorants, les parfums d'alerte... de phytoprotecteurs8 ;
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Un phytoprotecteur est un composé chimique induisant chez certaines plantes les mécanismes de détoxication endogène. Les phytoprotecteurs sont généralement employés avec des substances actives herbicides.
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de synergisants9.
Le règlement prévoit deux niveaux de compétences dans la procédure d'autorisation : une compétence européenne pour les substances actives, après une évaluation faite par un ou plusieurs États membres désignés comme rapporteurs. Pour le renouvellement du glyphosate en 2017, l'Allemagne avait été désignée comme rapporteur. une compétence nationale pour les produits phytopharmaceutiques. Chaque État membre autorise ou non la mise sur le marché sur son territoire, en respectant les procédures et les exigences fixées dans le cadre communautaire. Le règlement prévoit également une mutualisation zonale des évaluations des spécialités commerciales. Un État membre est alors tenu de reconnaître l'évaluation réalisée par un pays de la même zone, sauf s'il formule des objections argumentées.
L'approche zonale de l'évaluation des produits phytopharmaceutiques est fondée sur une répartition des États membres en trois zones sud, centre et nord, comme indiqué dans la carte suivante.
Figure 1 : Répartition des États membres en trois zones sud, centre et nord pour l'évaluation
zonale des produits phytopharmaceutiques (source : ANSES10)
La France est classée en zone sud, avec des pays comme l'Espagne et l'Italie. Dans le cas des produits phytopharmaceutiques contenant du glyphosate, l'évaluation des dossiers de demande
Un synergisant accroît l'efficacité de la substance active. Il permet de réduire les quantités appliquées, les coûts de fabrication et d'utilisation, et les risques pour l'environnement et la santé publique 10 AMM des produits phytopharmaceutiques : des exigences pour limiter les risques pour la santé humaine et l'environnement. MarieChristine de Guénin, Agnès Lefranc. ANSES. Séminaire du 3 octobre 2018. La santé végétale dans le concept One Health : quelle contribution ?
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de renouvellement des AMM a justement été répartie entre ces trois États membres.
Ces pays doivent respecter les principes uniformes d'évaluation et d'autorisation des produits phytopharmaceutiques définis par le règlement (CE) n° 546/2011, et suivre les documents guides de l'EFSA. L'évaluation des produits doit permettre de vérifier si les exigences de l'article 4 du règlement (CE) 1107/2009 sont satisfaites : « Un produit phytopharmaceutique, dans des conditions d'application conformes aux bonnes pratiques phytosanitaires et dans des conditions réalistes d'utilisation, satisfait aux conditions suivantes : a) il est suffisamment efficace ; b) il n'a pas d'effet nocif immédiat ou différé sur la santé humaine, y compris les groupes vulnérables, ou sur la santé animale, directement ou par l'intermédiaire de l'eau potable (compte tenu des substances résultant du traitement de l'eau), des denrées alimentaires, des aliments pour animaux ou de l'air, ou d'effets sur le lieu de travail ou d'autres effets indirects, compte tenu des effets cumulés et synergiques connus lorsque les méthodes d'évaluation scientifiques de ces effets, acceptées par l'Autorité, sont disponibles ; ou sur les eaux souterraines ; c) il n'a aucun effet inacceptable sur les végétaux ou les produits végétaux ; d) il ne provoque ni souffrances ni douleurs inutiles chez les animaux vertébrés à combattre ; e) il n'a pas d'effet inacceptable sur l'environnement, compte tenu particulièrement des éléments suivants, lorsque les méthodes d'évaluation scientifiques de ces effets, acceptées par l'Autorité, sont disponibles ; i) son devenir et sa dissémination dans l'environnement, en particulier en ce qui concerne la contamination des eaux de surface, y compris les eaux estuariennes et côtières, des eaux souterraines, de l'air et du sol, en tenant compte des endroits éloignés du lieu d'utilisation, en raison de la propagation à longue distance dans l'environnement ; ii) son effet sur les espèces non visées, notamment sur le comportement persistant de ces espèces; iii) son effet sur la biodiversité et l'écosystème. » Seule la conformité à l'ensemble de ces critères d'innocuité et d'efficacité, basée sur l'expertise scientifique de l'ensemble des données, permet d'autoriser l'usage d'un produit phytopharmaceutique, dans des conditions permettant de garantir cette innocuité. Les informations requises dans les dossiers de demande d'AMM et les méthodologies à mettre en oeuvre sont définies par les règlements n° 283/2013 pour les substances actives et n° 284/2013 pour les préparations. L'expertise scientifique porte sur les sources d'information suivantes : les données produites par le demandeur selon la méthodologie, le format et la qualité exigés ; les autres données issues de la revue de la littérature scientifique, des observations et de la phytopharmacovigilance (dispositifs de surveillance et de vigilance).
En France, dans le cadre des dispositions prévues par ces textes communautaires, l'ANSES est chargée de :
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faire des évaluations de substances actives pour le compte de l'EFSA ; faire des évaluations de produits phytopharmaceutiques ; prendre les décisions d'autorisation de mise sur marché pour la France (qui seront reconnues par les pays de la zone sud au titre de l'évaluation zonale).
Les décisions d'autorisation de mise sur le marché contiennent les informations suivantes : les informations décrivant le produit : nom, substance active, type, formulation, détenteur... la nature et la contenance de l'emballage ; les classifications toxicologiques et écotoxicologiques du produit ; les usages autorisés, en précisant les restrictions éventuelles d'emploi11, mais aussi le stade et le nombre d'applications, le délai avant récolte, la dose maximale d'emploi, la distance de la zone non traitée (ZNT), l'exigence d'un dispositif végétalisé permanent (DVP), la mention abeilles... les conditions générales d'emploi pour la protection de l'opérateur et du travailleur et la protection de l'environnement (eau, faune...) ; etc.
Les décisions de l'ANSES sont rendues publiques sur internet avec : le registre12 des décisions d'autorisations de mise sur le marché et des conclusions d'évaluation ; le catalogue des produits phytopharmaceutiques et de leurs usages : EPHY13.
2.2.2. Le renouvellement de l'approbation européenne du glyphosate
La chronologie14 pour le processus de renouvellement de l'approbation du glyphosate a été la suivante : mai 2012 : l'Allemagne reçoit le dossier à l'appui pour le renouvellement du glyphosate, car elle a été désignée comme l'État membre rapporteur pour cette ré-évaluation ; décembre 2013 : L'Allemagne envoie à l'EFSA son projet de rapport d'évaluation de renouvellement (RAR), rédigé par l'Institut fédéral allemand d'évaluation des risques (BfR) ; janvier 2014, le RAR est envoyé pour consultation et commentaires aux États membres et aux pétitionnaires ; mars 2014 : lancement d'une consultation publique d'une durée de 60 jours ; juillet 2014 : l'Allemagne évalue les commentaires reçus ; août 2014 : des renseignements supplémentaires sont demandés aux pétitionnaires ;
Par exemple pour le KATOUN à base d'acide pélargonique, l'usage 01001026 Usages non agricoles*Désherbage*Zones herbeuses est autorisé mais avec la restriction suivante : « Uniquement sur sites industriels, routes, autoroutes, chemins de fer et zones herbacées extensives. Application entre avril et septembre ». https://ephy.anses.fr/ppp/katoun. Consulté le 13 septembre 2019. 12 https://www.anses.fr/fr/content/registre-des-d%C3%A9cisions-d%E2%80%99autorisations-de-mise-sur-le-march%C3%A9-et-desconclusions-d%E2%80%99%C3%A9valuation. Consulté le 13 septembre 2019. 13 https://ephy.anses.fr/ 14 .L'évaluation des risques expliquée par l'EFSA : Glyphosate. https://www.efsa.europa.eu/fr/corporate/pub/glyphosate151112. Consulté le 13 septembre 2019.
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février-mars 2015 : l'EFSA organise des consultations auprès des experts en toxicologie et écotoxicologie ; 29 avril 2015 : à la suite des conclusions du Centre international de recherche sur le cancer quant au potentiel cancérogène du glyphosate, la Commission charge l'EFSA d'examiner cette évaluation ; août 2015 : les commentaires des États membres sur l'évaluation réalisée sont demandés ; septembre 2015 : après réception des observations, l'EFSA organise une deuxième consultation auprès des experts sur la cancérogénicité et la toxicologie chez les mammifères ; octobre 2015 : l'autorisation du glyphosate est provisoirement prolongée jusqu'en juin 2016 ; novembre 2015 février 2016 : un échange de courriers15 a lieu entre l'EFSA et le professeur Christopher Portier, qui a participé à l'élaboration du rapport sur le glyphosate publié par le CIRC, classant le glyphosate dans la catégorie des cancérogènes probables pour l'homme ; 29 juin 2016 : pour éviter un vide juridique, la Commission prolonge de 18 mois l'autorisation du glyphosate, afin de permettre à l'Agence européenne des produits chimiques (ECHA) de procéder à l'évaluation de la cancérogénicité potentielle du glyphosate ; mars 2017 : l'ECHA écarte le risque cancérogène du glyphosate, conduisant la Commission Européenne à proposer le renouvellement de la licence pour 10 ans ; juillet 2017 : nouvel échange de courriers entre le professeur Christopher Portier, l'EFSA et l'ECHA sur l'évaluation des risques cancérogènes du glyphosate ; 27 novembre 2017 : après plusieurs reports, les représentants des États membres votent à la majorité qualifiée pour la proposition de l'exécutif européen, favorable au renouvellement du glyphosate ; 12 décembre 2017 : la Commission européenne adopte le règlement d'exécution (UE) 2017/2324 renouvelant l'approbation de la substance active glyphosate pour cinq ans, c'est-à-dire du 16 décembre 2017 au 15 décembre 2022.
La décision de renouveler ou non l'approbation du glyphosate devant être prise au plus tard en décembre 2022, les entreprises concernées devront déposer une demande de renouvellement trois ans avant l'échéance, soit d'ici à la fin 2019. À propos de la relance du cycle des travaux sur la réapprobation, l'ANSES précise16 : « L'Union européenne a nommé la France, la Hongrie, les Pays-Bas et la Suède conjointement responsables de la prochaine réévaluation du glyphosate, substance active phytopharmaceutique. [...] En principe, l'évaluation d'une demande d'autorisation est réalisée par un seul État membre désigné comme État membre rapporteur (EMR). En raison de la multitude des études et publications sur le glyphosate, la Commission européenne a proposé qu'un groupe d'États membres agisse
15 16
https://www.efsa.europa.eu/fr/press/news/160113. Consulté le 13 septembre 2019. https://www.anses.fr/fr/content/la-france-la-hongrie-les-pays-bas-et-la-su%C3%A8de-proc%C3%A8deront-conjointement-%C3%A0-laprochaine. Consulté le 13 septembre 2019
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conjointement en tant qu'EMR pour la prochaine évaluation de cette substance ».
2.3. L'emploi du glyphosate en zone non agricole
2.3.1. L'hétérogénéité des zones non agricoles (ZNA)
La principale caractéristique de la catégorie « zones non agricoles » est son hétérogénéité comparée aux zones agricoles (ZA), identifiables comme des zones de production végétale. Le fait de nommer cette catégorie sous une forme négative crée une logique de fourre-tout qui accentue la difficulté de tirer des conclusions de portée générale. Pour cette raison, le présent rapport présente un examen au cas par cas des utilisations du glyphosate en ZNA, après avoir défini la granulométrie mise en oeuvre. Le Catalogue17 national des usages phytopharmaceutiques présente la définition suivante : « Les Zones Non Agricoles (ZNA) professionnelles et amateurs sont définies comme étant des espaces aménagés et/ ou végétalisés où les plantes ne sont pas cultivées à des fins commerciales ». Par exception, Il est précisé que « Le choix de cette assimilation des gazons de placage aux gazons de graminées des zones non agricoles18 (ZNA) a été opéré à des fins de simplification des usages », eu égard aux similitudes en matière de sensibilité aux organismes nuisibles avec les gazons de graminées. Si les zones non agricoles professionnelles sont aussi définies suivant l'Association française de protection des plantes en 1999 comme des «espaces de nature où les végétaux ne sont pas cultivés pour un commerce alimentaire », il s'avère que ces deux définitions portent à confusion. En effet, l'essentiel des ZNA concernées par l'emploi de glyphosate, maintenant que les jardins, espaces verts sont exclus par la loi Labbé, est constitué d'objets artificiels « en dur », comme des chaussées de routes, des ouvrages d'art, etc. où la végétation n'a pas sa place. En effet les règles de conception de ces objets les interdisent. Le fait que ces objets sont « à l'air libre » les soumet au développement d'une végétation indésirable en ce sens qu'elle en perturbe le fonctionnement et qu'elle en menace la pérennité. Si partie de ces ZNA, est donc lourdement artificialisée en leur coeur, leurs abords sont le plus souvent végétalisés au double motif d'une économie un revêtement en dur est toujours beaucoup plus onéreux qu'un terrain meuble et la superficie des abords peut être très importante, plus même que celle des objets « en dur » et d'une esthétique du paysage. Dans certains cas particuliers de talus artificiellement créés, la végétation peut même contribuer à leur maintien. Ces abords ne sont pas destinés à être occupés par un public ou des usagers, sauf en de rare cas d'urgence. D'autres ZNA existent où effectivement des plantes sont cultivées. On peut donc classer les ZNA en deux grandes catégories : · les premières lourdement artificialisées où la végétation n'a pas sa place sur les objets « en dur », mais dont les espaces paysagers accueillent une végétation choisie, maîtrisée et contenue dans les lieux prévus à cet effet et non accessibles au public ou à des usagers ; · les secondes où les plantes ne sont pas directement cultivées à des fins commerciales, mais où elles participent d'une activité où elles sont nécessaires et qui reçoit du public. Dans la première, on trouve notamment :
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Note de service DGAL/SDQPV/2015-253 du 10/03/2015. Par exemple les terrains de sport engazonnés
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· les infrastructures (routes, chemin de fer, aéroports) dont seuls les abords peuvent être qualifiés d'espaces de nature ; · les zones industrielles (sites de stockage ou de production, soumis ou non au régime des installations classées pour l'environnement ...), lourdement artificialisées où la végétation n'a qu'une fonction limitée d'esthétique. Dans la seconde, on trouve notamment : · les espaces communaux (cimetières) ; · les terrains de nombreux sports qu'ils soient utilisés à titre professionnel, amateur ou de simple loisir.
2.3.2. Une valeur d'usage singulière
Selon le Commissariat général au développement durable (CGDD)19 : « Le glyphosate est l'herbicide le plus utilisé dans le monde avec plus de 800000 t vendues en 2014. La France en utilise 1 % (8800 t). Il s'agit, après le soufre (12 318 t) utilisé en agriculture conventionnelle et biologique-, de la deuxième substance active la plus utilisée en France, avec 12 % du total des ventes sur la période 2015-2017. Sur la période 2009-2017, il est également l'herbicide le plus vendu au niveau national parmi les 119 substances actives à usage herbicide. » La recherche d'alternatives au glyphosate est rendue ardue par les qualités agronomiques et économiques des herbicides contenant cette substance active. La haute valeur d'usage de ces préparations s'explique par les points suivants20 : le glyphosate est un herbicide foliaire : les feuilles sont la seule voie de pénétration dans les végétaux ; le glyphosate est un herbicide systémique : cette substance active est absorbée par les feuilles, et entraînée par la sève vers les organes de croissance (bourgeons, apex racinaires) ; c'est un herbicide à large spectre, dont l'effet s'exerce à la fois sur monocotylédones et dicotylédones, qu'elles soient annuelles ou vivaces. En plus des angiospermes, il est également efficace sur les fougères et les gymnospermes. Pour ces raisons, il est qualifié de désherbant non sélectif ou d'herbicide total. il ne présente pas d'action persistante pour le sol. Le produit qui tombe au sol est rapidement bloqué par le complexe argilo-humique et n'atteint pas les racines. le glyphosate est un produit devenu très bon marché, car cette substance active est tombée dans le domaine public en 2000. Lors de son apparition en France en 1985, elle était considérée comme très efficace, mais très chère. Les guides techniques conseillaient de limiter son emploi à des taches de mauvaises herbes.
Enfin, la faible présence en France de mauvaises herbes résistantes au glyphosate est à noter. Des cas de ray-grass résistants dans des parcelles de vigne sont signalés depuis décembre 201721. En
19
Plan de réduction des produits phytopharmaceutiques et sortie du glyphosate : état des lieux des ventes et des achats en France. Commissariat général au développement durable. Avril 2019. 20 L'usage du glyphosate est-il devenu indispensable pour l'agriculture contemporaine ? Jean-Louis BERNARD. Vice-président de l'Académie d'agriculture de France. https://www.academie-agriculture.fr/actualites/academie/jean-louis-bernard-apporte-quelqueselements-de-reponse-la-question-lusage-du. Consulté le 13 septembre 2019. 21 Bonnes pratiques d'utilisation des spécialités à base de glyphosate. Union des industries de la protection des plantes.
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revanche, des situations plus préoccupantes sont observées sur le continent américain et dans d'autres parties du monde.
2.3.3. Les six usages autorisés pour des utilisations très variées
L'autorisation de mise sur le marché d'un produit phytopharmaceutique est attribuée pour un ou plusieurs usages phytopharmaceutiques définis par l'arrêté du 26 mars 201422. Le dernier catalogue publié au Bulletin officiel du ministère chargé de l'agriculture date de mars 201523. Il constitue le référentiel national pour délivrer les AMM. Un opérateur souhaitant commercialiser une spécialité commerciale dépose une demande auprès de l'ANSES mentionnant les usages revendiqués. Ils sont acceptés ou non par l'ANSES en fonction de l'efficacité du produit et de ses impacts sur l'environnement et la santé humaine : travailleurs, riverains, consommateurs.... Un produit phytopharmaceutique peut avoir plusieurs usages autorisés. L'ANSES a la capacité, dans la décision d'autorisation, de définir des restrictions d'emploi d'une part sur la base des dossiers des pétitionnaires et d'autre part au sein des usages revendiqués. Elle impose par exemple, une fréquence maximale de traitement, un intervalle entre deux traitements ou encore en mettant des restrictions sur la cible (ex. : pour BARCLAY GALLUP XTRA 450 ESPACES VERTS : - Adventices vivaces (zones perméables) annuelles et bisannuelles (zones imperméables) | - 6,4 L/ha par tache) Pour ce qui concerne le glyphosate en zone non agricole, les produits phytopharmaceutiques sur le marché se classent dans les six usages répertoriés dans le tableau suivant :
Usages autorisés avec AMM pour les spécialités contenant du Secteurs d'utilisation glyphosate (au 09/04/2019) 11015925 Traitements généraux*Destruct. Souches
Mixte (ZA et ZNA)
11015910 Traitements généraux*Dévitalisation*Arb. sur pied Souches Mixte (ZA et ZNA) 11015911 Traitements généraux*Dévital. Broussailles 11015904 Usages non agricoles*Désherb. Total 01001002 Usages non agricoles*Désherb. total*Sites Indust. 11015903 Usages non agricoles*Désherbage*All. PJT, Cimet., Voies
Mixte (ZA et ZNA) ZNA ZNA ZNA
Tableau 1 : usages du glyphosate en ZNA (source ANSES)
Ces usages permettent aux responsables de structures très variées de traiter ou faire traiter par un professionnel, les entités ou objets techniques dont ils sont propriétaires ou gestionnaires, pour atteindre l'objectif souhaité ou imposé pour divers motifs (propreté, accès, sécurité, prix, etc.). Ce traitement est dénommé utilisation dans la suite du rapport.
22 23
Arrêté du 26 mars 2014relatif à la mise en oeuvre du catalogue national des usages phytopharmaceutiques. Note de service DGAL/SDQPV/2015-253 du 10 mars 2015: catalogue des usages
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2.3.4. Les quantités de glyphosate en ZNA
Le Commissariat général au développement durable a réalisé un état des lieux des ventes et des achats de glyphosate en avril 2019 : 8831 tonnes ont été vendues en 2017, tous secteurs confondus24. Pour extraire les quantités vendues en zone non agricole, la Direction Générale de l'Alimentation (DGAL) a procédé, à la demande de la mission, à une exploitation plus fine de la banque nationale des ventes (BNV-D) et réparti les quantités de glyphosate en fonction des AMM des produits sur le marché (tableau 2).
Libellé du segment Usages agricoles Usages mixtes agricoles et non agricoles Usages professionnels zones non agricoles Usages amateurs zones non agricoles Autres usages Total (tonnes)
Quantités par année en tonnes 2015 6993 68 188 1165 54 8469 2016 7502 49 174 976 49 8750 2017 7940 62 115 671 43 8831 2018 8880 39 107 427 38 9491
% pour l'année 2018 93,56 % 0,41 % 1,13 % 4,50 % 0,40 % 100 %
Tableau 2 : quantités en tonnes de glyphosate vendu par segment (source DGAL) (le périmètre minimum de la mission est mis en évidence sur fond jaune)
Les quantités vendues en zone non agricole pour une utilisation professionnelle représentent a minima 107 t, soit 1,13 % des quantités vendues en 2018 et a maxima, 146 t, soit 1,54 % (en attribuant au secteur ZNA tous les achats de produits ayant une AMM pour un usage mixte agricole et non agricole).
Le présent rapport ne prend pas en compte les usages amateurs interdits depuis le 1er janvier 2019. La mission en interrogeant les acteurs et par ses propres estimations a tenté de cerner la consommation. Il s'agit des quantités appliquées, soit déclarées soit calculées par la mission à partir de données aussi fiables que possible, qui peuvent être notablement différentes des quantités vendues en raison de phénomènes de stockage. La consommation d'autres secteurs, a priori très faibles n'a pu être précisée25. Compte tenu de l'émiettement des acteurs, la répartition entre les différents secteurs économiques rencontrés en zone non agricole est estimée comme suit :
24
Plan de réduction des produits phytopharmaceutiques et sortie du glyphosate : état des lieux des ventes et des achats en France. Avril 2019. DATALAB, Essentiel. Commissariat général au développement durable. 25 À noter l'existence de surfaces de pelouses privées pour lesquelles il n'a pas été possible de collecter les données.
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Secteurs économiques
Quantités de glyphosate appliquées en 2018
« Surfaces » potentiellement concernées par an 34 000 ha
Réseau ferré national (SNCF Réseau) Sites industriels traités par les adhérents de l'AAPP (estimation mission) Sites militaires (estimation mission) Autoroutes concédées (ASFA) Réseau Transport Électrique (RTE) Aéroports (estimation mission) Golfs (estimation Fédération) Gazons de placage (estimation mission) Routes nationales (MTES)
45000 kg
environ 10 000 kg
3 400 ha
environ 5 500 kg 2 750 kg* 3790 kg
1 400 ha 8 950 km de linéaire 1 473 ha
3 000 kg* 600 kg* 250 à 500 kg
35 000 ha 33 000 ha 900 ha
101 kg
12 200 km de linéaire
Tableau 3 : quantités de glyphosate appliquées, déclarées par les professionnels ou estimées par la mission pour certains secteurs économiques en 2018.
* la mission n'a pas réussi à faire préciser s'il s'agissait de quantité de spécialités commerciales contenant du glyphosate ou quantité de glyphosate
L'exercice de la présente mission étant parallèle à celui effectué par l'INRA en zone agricole, la différence d'ordre de grandeur entre les quantités de glyphosate employées en ZNA et en zones agricoles doit être soulignée. Les représentations graphiques ci-dessous illustrent les différences d'échelle et d'évolution.
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Graphique 1 : évolution des quantités de glyphosate vendues pour les usages agricoles et pour les usages professionnels dans les ZNA de 2008 à 2018 (sources données : DGAL).
Graphique 2 : évolution des quantités de glyphosate vendues pour les usages amateurs en ZNA, les usages professionnels dans les ZNA, les usages mixtes agricoles et non agricoles, et autres usages de 2008 à 2018 (sources données : DGAl).
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Au final, en 2018, les ZNA reçoivent moins de 1,5 % du glyphosate vendu en France. La proximité de ces lieux avec le citoyen ou encore l'importance de la présence de l'État dans les structures met toutefois ces utilisations en valeur, comme en témoignent les nombreux articles de presse relatifs à l'usage du glyphosate par la SNCF qui publie sa consommation annuelle. La structuration de la BNV-D ne permet pas de disposer des quantités utilisées par secteur d'activité. La faiblesse des consommations rend très difficile l'étude détaillée des usages.
À l'instar de la présente mission, l'INRA procède à l'identification des méthodes alternatives non chimiques au glyphosate, de l'existence d'un usage courant ou non de ces méthodes, et de leurs inconvénients économiques et pratiques. Cette démarche est actuellement menée pour quelques cultures choisies : la viticulture (747 000 ha), les grandes cultures céréalières (9 000 000 ha) et l'arboriculture (165 000 ha)26. Si ces trois cultures représentent à elles seules la majorité du tonnage de glyphosate appliqué, d'autres n'en emploient certainement pas moins des quantités significatives. La cohérence veut que soient traitées de manière homogène les cultures, qu'elles proviennent de l'agriculture ou des ZNA. En effet, le catalogue des usages classe de manière conventionnelle en ZNA les gazons de graminées et les gazons de placage, alors qu'il classe en zone agricole les plantes d'ornement27. En conséquence, il sera important d'instruire de manière homogène les différentes filières au titre de l'article 50 du règlement 1107/2009 pour les éventuelles interdictions ou limitations d'emploi des futures AMM de produits à base de glyphosate.
2.3.5. Les particularités des zones non agricoles lourdement artificialisées
Dans ce paragraphe, le terme ZNA ne concerne ni les gazons de placage ni les jardins publics ou privés ni les espaces verts. Ces ZNA ont des caractéristiques générales qui les distinguent significativement, quant à l'impact des produits phytopharmaceutiques (PPP), de celui de leur usage dans les zones agricoles. 2.3.5.1 Des surfaces artificialisées Les surfaces de ces ZNA sont par nature lourdement artificialisées pour répondre à un besoin qui est sans rapport avec le terrain naturel, même éventuellement préparé comme une terre agricole. Elles présentent des caractéristiques spécifiques. En conséquence, les méthodes alternatives employées en zone agricole ne sont pas transposables. À titre d'exemple :
26 27
Les superficies en hectares proviennent de sources Agreste. Par ailleurs, des cultures dont les surfaces diffèrent de plusieurs ordres de grandeur représentent des consommations de glyphosate variant également de plusieurs ordres de grandeur. Les exemples suivants sont éclairants des différences potentielles d'instruction. Les plantes d'ornement et les semences de graminées, qui ne font donc pas partie de l'étude de l'INRA, représentent respectivement 18 900 ha et 13 300 ha alors que les gazons de placage en ZNA ne représentent que 900 ha. Les pommes de terre et les légumes frais de plein champ, qui ne font pas partie de l'étude de l'INRA, représentent respectivement 200 000 ha et 50 500 ha et les surfaces sportives en gazon naturel en ZNA ne représentent que 43 600 ha.
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Ces surfaces ne sont pas labourables. Dans certains cas particuliers, elles peuvent être tondues. Mais ces tontes, au contraire du glyphosate qui a un effet systémique, ne permettent pas d'éradiquer les systèmes racinaires qui très souvent produisent rapidement de nouvelles parties aériennes. Or un des enjeux de ces surfaces est leur maintien dans le temps. Les différents éléments des infrastructures sont conçus spécifiquement pour la fonction qu'ils ont à remplir, mais aussi, puisqu'il s'agit d'investissements consentis comme tels pour du temps long, à partir d'un calcul économique initial permettant de comparer le coût global de l'investissement et de l'entretien en fonction de différentes variantes techniques. Un changement de méthode d'entretien remettrait en cause cette optimisation. Enfin, le rapport entre les coûts d'investissements et ceux de maintenance est considérablement plus élevé pour les infrastructures que celui des activités agricoles ou industrielles stricto sensu. En conséquence, toute reprise éventuelle d'une infrastructure par un investissement supplémentaire pour s'adapter à l'impact d'un changement de méthode d'entretien a un impact économique beaucoup plus fort. Ces surfaces sont donc conçues et réalisées pour durer. Il n'est donc de fait pas possible économiquement de les modifier, sauf à la marge dans le cadre de gros travaux de régénération programmés. Des protections rapportées comme des géotextiles dont la durée de l'efficacité n'est que de quelques années, bien loin des durées de vie des infrastructures elles-mêmes - ne peuvent couvrir que des proportions marginales des surfaces considérées. Il n'y a pas d'équivalent à des «alternatives culturales», contrairement à l'agriculture, où il existe bien des «alternatives culturales». Encore une fois, les options techniques des aménagements et des infrastructures, décidées en leur temps et pour des investissements sur du temps long, ont tenu compte des possibilités existantes du moment pour leur entretien, leur maintien, et leur exploitation. La rapidité d'exécution du traitement pour satisfaire à des exigences d'exploitation, à l'encombrement28 des lieux et aux risques qu'ils présentent (électrique, explosif, incendie notamment) crée de fortes contraintes qui limitent les solutions alternatives et découragent un éventuel usage courant de celles-ci. Des couvertures végétalisées alternatives posent aussi la question de leur praticabilité, voire de leur accessibilité, par exemple, par temps de pluie. 2.3.5.2 L'absence d'usage alimentaire et d'impact direct sur la biodiversité sur ces surfaces complètement artificialisées
Tout d'abord, il convient de rappeler une évidence, à savoir qu'en dehors des jardins de particulier et des activités de glanage, aucun des végétaux qui poussent en ZNA n'a vocation à être consommé, que ce soit par l'homme ou par l'animal de rente. La question cruciale des limites maximales de résidu (LMR) ne se pose donc pas. Or, les conditions d'emploi de beaucoup de produits sont conçues pour leur efficacité agronomique. Ils doivent ensuite respecter les LMR ; par exemple, certains produits ne peuvent être appliqués sur des cultures seulement si elles ne sont pas destinées à l'alimentation humaine ou animale29.
28 29
Voir l'annexe 7 qui présente une appréciation du gabarit du matériel employé selon les méthodes alternatives non chimiques. Exemple du DEFENSA 360, herbicide de Monsanto contenant du glyphosate.
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Par ailleurs, l'ANSES doit examiner la conformité aux compléments récents de la réglementation européenne sur le glyphosate, notamment relativement à la biodiversité. Il est possible qu'un nombre non négligeable de spécialités, en l'absence de données nouvelles fournies par les demandeurs de renouvellement des autorisations, ne puisse satisfaire ces nouvelles obligations sauf peut-être en ZNA compte tenu de leurs singularités qui font qu'elles ne seraient pas concernées par ces compléments. 2.3.5.3 Des obligations de collecte des eaux de plate-forme La loi sur l'eau n° 64-1245 du 16 décembre 1964 complétée par la loi 92-3 du 3 janvier 1992 après différentes évolutions techniques depuis le XIXe siècle impose des obligations sous forme d'autorisations après enquête publique en matière de gestion des eaux des aménagements, quels qu'ils soient, notamment lors de toute création d'infrastructures nouvelles, ayant un impact sur la ressource en eau et le milieu aquatique. L'objectif est de maîtriser notamment les écoulements des ouvrages. Ainsi les incidences des aménagements sur la ressource en eau, sur le milieu aquatique, l'écoulement, le niveau et la qualité des eaux, y compris de ruissellement, ainsi que sur chacun des éléments mentionnés à l'article 2 de la loi du 3 janvier 1992, doivent être évaluées en fonction des procédés mis en oeuvre, des modalités d'exécution des travaux ou de l'activité, du fonctionnement des ouvrages ou installations, de la nature, de l'origine et du volume des eaux utilisées ou concernées. Le maître d'ouvrage doit préciser, s'il y a lieu, les mesures compensatoires ou correctives envisagées et la compatibilité du projet avec le schéma directeur ou le schéma d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE ou SAGE) et avec les objectifs de qualité des eaux prévus. La réglementation définit ainsi différentes rubriques dont relèvent les ouvrages en fonction de leurs caractéristiques. À titre d'exemple, la rubrique 5.3.0. intitulée « Rejets d'eaux pluviales et dans les eaux superficielles ou dans un bassin d'infiltration » qui s'applique à partir de 1 ha vise les perturbations potentiellement générées par les rejets pluviaux, tant sous l'angle hydraulique (modifications des écoulements, inondations) que sous l'angle pollution des milieux aquatiques. En particulier pour les surfaces imperméabilisées, ces obligations conduisent les maîtres d'ouvrage à doter les infrastructures de réseaux de collecte et de bassins largement dimensionnés, étanches qui, outre un effet hydraulique tampon, ont un effet de décantation pour les pollutions de toute nature qu'ils reçoivent. Ainsi les ouvrages doivent être au moins dimensionnés pour écrêter et en conséquence recevoir des pluies décennales, ce qui est à comparer à la demi-vie du glyphosate qui est de 1 à 4 jours dans l'eau.
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Ainsi et à l'exception des voies ferrées, les infrastructures notamment routières sont le plus souvent imperméabilisées et récupèrent les eaux pluviales et les stockent longuement dans des bassins.
En conclusion, les caractéristiques propres des ZNA les distinguent significativement des zones agricoles quant à l'impact de l'utilisation de PPP en général et du glyphosate en particulier, sensiblement plus réduit au regard des critères en jeu. Si elles sont d'ores et déjà, prises en compte dans les AMM, elles méritent d'être présentes à l'esprit pour apprécier les enjeux, en plus du caractère extrêmement limité des quantités considérées.
2.3.6. Les enjeux du glyphosate en ZNA
Les infrastructures ou les installations en ZNA avec les différents objets techniques30 qui les composent, sont conçues de telle sorte que la végétation n'y a pas sa place, sauf exception voulue et organisée, comme les aménagements paysagers ou la couverture de talus31. Par souci d'économie, des terrains stabilisés non végétalisés peuvent également exister, mais là encore la végétation n'y a pas sa place, même si elle a tendance à s'y développer. Les PPP sont utilisés uniquement pour l'élimination de cette végétation indésirable au regard des fonctions de ces objets techniques et des conséquences négatives de cette présence. La maîtrise de la végétation n'est organisée que dans les espaces où cette dernière est volontairement décidée à la conception. Tant l'élimination que la maîtrise visent à lutter contre diverses nuisances qu'occasionne cette végétation pour assurer le respect d'exigences de tous ordres ; sécuritaires, fonctionnelles, de pérennité des constructions, esthétiques. Ces exigences font l'objet de prescriptions, le plus souvent sous la forme d'obligations de résultat, du plus général à travers la loi, jusqu'au plus particulier, par exemple, à travers des normes internes aux entreprises, en particulier les entreprises monopolistiques. Le désherbage vise donc à exclure toute végétation, y compris le système racinaire, de la zone traitée. Le recours aujourd'hui massif au seul glyphosate, dernière molécule d'une succession de PPP disponibles depuis l'après-guerre, tient à son efficacité, sa praticité (simple, rapide) et son faible coût. Le cas échéant associé à un antigerminatif, un, voire deux passages dans l'année suffisent à obtenir le résultat souhaité32. Ce produit n'a pas de concurrent présentant toutes ses qualités : «Parmi les herbicides, le glyphosate est sans aucun doute le plus performant et il est potentiellement moins toxique que ses prédécesseurs»33. «De plus, [.] il n'y a pas d'autres molécules de désherbage qui auraient la même efficacité tout en ayant moins d'impact environnemental et toxicologique» 33. La maîtrise dans les espaces dévolus à la végétation s'effectue quant à elle à travers des moyens
Comme les ouvrages d'art, les chaussées des routes, le ballast des voies ferrées Les objets techniques dont nous parlons ici sont conçus et dimensionnés sans végétaux, ce qui garantit leur bon fonctionnement et leur pérennité. L'objectif de leur entretien est bien l'élimination des végétaux. Même si les infrastructures et les usines sont « paysagées », c'est dans des espaces bornés lors de leur conception. Sauf cas exceptionnel (dessouchage, allées) on n'utilise pas de glyphosate, mais des moyens classiques comme le fauchage, ces espaces étant conçus pour cela. En effet l'emploi de glyphosate sur ces espaces conduirait à un « paysage brûlé », ce qui est contraire à l'objectif d'insertion paysagère et supposerait en plus de refaire régulièrement des semis. 32 Source UNEP 33 Source Interview de P. Mauguin Président de l'INRA au Figaro 1er mars 2019.
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mécaniques comme le fauchage ou l'élagage, et lorsque cela est nécessaire quand la végétation ligneuse s'est par trop développée, par dévitalisation de la souche au moyen de divers PPP dont le glyphosate. Pointés par les opérateurs rencontrés par la mission, six grands motifs d'élimination de la végétation sont développés ci-après, sans classement hiérarchique. 2.3.6.1 Sécurité des travailleurs (hors exposition aux PPP) La sécurité des travailleurs, organisée dans le Code du travail qui prescrit des obligations aux employeurs dans tous les domaines portant enjeux de sécurité des travailleurs jusqu'à un niveau très fin d'arrêtés, est une raison invoquée par tous les responsables d'infrastructures ou d'installations industrielles. Leurs obligations d'entretien imposent l'intervention humaine sur les voies de chemin de fer, les routes, les postes électriques, les usines. Pour la sécurité des intervenants, une bonne visibilité est essentielle pour éviter les chutes dans un environnement dangereux par nature et un temps d'intervention minimum. En zone électrique se rajoute la nécessité de matériaux de surfaces résistifs variable selon le risque, et en zone chimique le respect des normes relatives aux atmosphères explosives (ATEX). Pour l'employeur, il importe donc de garantir la sécurité et éviter le recours au droit de retrait en luttant contre les adventices. Dans ce cadre, l'élimination de la végétation s'effectue avec le produit le plus performant, soit en quasi-totalité des cas avec du glyphosate ou des produits plus spécialisés pour la dévitalisation des souches. 2.3.6.2 Sécurité des usagers et clients (hors exposition aux PPP) L'absence de végétation répond également à une exigence de sécurité pour les usagers et clients, sur la structure stricto sensu, mais également ses abords. Ces exigences font également l'objet de textes normatifs, réglementaires ou internes aux entreprises. Côté circulation routière, l'élimination ou la maîtrise de la végétation permet de maintenir la visibilité des panneaux de signalisation et des possibilités d'arrêt sécurisé en dehors de la chaussée, etc. Côté SNCF, la végétation sur les voies peut altérer les systèmes de drainage, augmenter le risque électrique, déformer la voie, et compromettre les inspections laser du réseau 34. Ce motif impose aujourd'hui l'absence complète de végétation sur le ballast. Par ailleurs, les pistes situées le long des rails doivent pouvoir servir pour l'évacuation des passagers. Tout comme les agents d'entretien de la SNCF, ils doivent pouvoir y marcher en sécurité. Enfin, une végétation sèche accroît les risques d'incendie. Des étincelles pouvant se produire au passage des trains, il importe de limiter sa présence.
Des clôtures sont implantées le long des voies de chemin de fer et des autoroutes pour réduire les intrusions en zone dangereuse. Un entretien régulier35 et efficace est fondamental pour éviter leur dégradation. Une rupture de ces barrières sécuritaires engagerait la responsabilité du gestionnaire.
34 35
Mesure de la géométrie des voies par détection laser. La présence de végétaux perturbe les mesures. Exemple société d'autoroute SANEf : marché sous-traité pour le traitement chimique des clôtures recouverte de plantes envahissantes tels que clématites, renouées et dicotylédones. (source : les dépendances vertes des autoroutes Alexis Duconseil 07/05/2019)
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2.3.6.3 Sécurité industrielle Bon nombre de sites industriels sont sous le régime des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE). Les prescriptions réglementaires sont globalement très génériques vis-àvis de la végétation et fixent des obligations de résultat : le site doit être entretenu pour l'intégration du paysage et/ou la prévention des envols de poussières. Certains arrêtés ministériels peuvent avoir des dispositions plus ciblées. La méthode utilisée n'est pas pour autant pas imposée. Les installations qui stockent ou manipulent des produits inflammables prennent des mesures pour réduire le risque incendie lié à une végétation sèche. Les industriels concernés utilisent du glyphosate pour éliminer toute végétation sous et à proximité immédiate de leurs installations. Par rapport aux assurances, toute autre solution devra aboutir à garantir un niveau de risque identique. Les sites industriels sont clôturés pour lutter contre les intrusions. Certaines clôtures sont dotées de dispositifs de détection et d'intrusion périmétrique pour alerter rapidement l'industriel. Une végétation au-delà de 20 cm peut déclencher les alarmes. Lors d'épisodes climatiques particuliers, la pousse peut être très importante. Leur entretien manuel est fastidieux et les outils employés peuvent être une source de dégradation des clôtures. Un traitement chimique au glyphosate est la solution la plus efficace et économique à ce jour. 2.3.6.4 Conservation et sécurité des ouvrages dans le temps En colonisant notamment des ouvrages d'art ou les murs de bâtiments qui ne sont pas conçus pour la recevoir, la végétation les dégrade. Elle agit soit par des mécanismes d'action directe (fractures des matériaux sous la pression due à la croissance des racines) ou indirecte (dissolution chimique des matériaux par les diverses sécrétions des racines favorisant également une rétention et une stagnation d'eau, entraînant un effet mécanique dû aux cycles gel/dégel). C'est particulièrement vrai pour les plantes ligneuses. Exceptionnellement, une végétation apportée et maîtrisée peut ne pas être une source de dégradation. Dans certains cas, une végétation appropriée peut être retenue comme solution de conservation du bâti et également pour des raisons esthétiques (ex. : arases végétalisées du château de Coucy), mais elle n'est pas généralisable et suppose certainement un entretien plus important. 2.3.6.5 Accessibilité et praticabilité La présence de végétation peut réduire la praticabilité des voies de circulation piétonnes36 soit en accroissant le risque des glissades et de chutes soit en rendant le terrain trop humide pour qu'il soit praticable.
La préservation d'accessibilité rapide des lieux après une intervention phytosanitaire peut être un autre motif de traitement au glyphosate. En effet, la réglementation impose un délai durant lequel l'entrée dans la surface traitée est interdite, ce qui est potentiellement très handicapant. Ainsi, l'entreprise Réseau de transport d'électricité (RTE) impose de pouvoir intervenir dans les postes électriques sous six heures pour des raisons de maintenance et d'intervention en cas d'incident ce qui restreint fortement la liste des produits utilisables.
36
Allées des cimetières, chemin de dessertes d'habitation, chemins d'accès aux installations sportives engazonnées, etc.
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2.3.6.6 Les enjeux commerciaux (dont sportifs) et culturels Dans ce domaine, la présence d'adventices peut être jugée inesthétique ; elle est souvent associée à un signe d'abandon ou de négligence. Pour les zones commerciales, la propreté visuelle est un enjeu d'attractivité et un élément de l'image de marque qu'il faut préserver. Les enjeux « culturels » au sens anthropologique du terme sont analogues. Ils concernent au plus haut point les cimetières qui font, justement et à l'instar de la voirie sous certaines conditions, l'objet d'une exception aux interdictions de PPP dans le domaine public accessible au public. Pour les terrains sportifs engazonnés, les golfs et les gazons de placage, les adventices, en particulier les touffes de vivaces envahissantes, doivent être combattues pour conserver les qualités techniques et en conséquence commerciales du terrain (les vivaces peuvent modifier la trajectoire de la balle, gêner sa frappe). Il s'agit ici d'une élimination très sélective de la végétation, mais justement en l'absence de produit sélectif efficace, le glyphosate s'avère être la seule solution pour les éradiquer. Cette éradication a lieu : avant les semis de gazons sur le terrain sportif rendu nu sur tout ou une petite partie de sa surface, lors de la confection de gazons de placage sur le lieu de leur production.
Enfin, la vitesse d'exécution, d'un chantier peut réduire ou limiter le service commercial. C'est en particulier le cas de la SNCF lorsqu'elle mobilise des sillons37 pour désherber ses voies.
L'usage du glyphosate en ZNA répond donc à diverses exigences, qui font le plus souvent l'objet de textes normatifs, réglementaires ou internes aux entreprises. Dans tous les cas, des référentiels justifient l'absence de végétation et donc son élimination. Ces référentiels sont soit explicites pour répondre à des enjeux maîtrisés par la technique, soit implicites, pour répondre à des enjeux commerciaux ou culturels. La sécurité des personnels et des usagers est au premier rang de ces exigences et les référentiels correspondants sont parfaitement documentés. Cette exigence de résultat a conduit à retenir le glyphosate comme moyen le plus pertinent à ce jour. Ainsi l'ensemble des exigences précitées peuvent justifier les usages sensibles que la lettre de mission invite à dégager.
37
Un sillon ferroviaire est la capacité d'infrastructure requise pour faire circuler un train donné d'un point à un autre à un moment donné.
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3. L'EVALUATION COMPARATIVE ET LES CLARIFICATIONS POUR LA MISE EN OEUVRE DE L'ARTICLE 50.2
3.1.
L'évaluation comparative des produits phytopharmaceutiques
Le règlement (CE) n° 1107/2009 impose, dans son article 50, aux États membres la réalisation d'une évaluation comparative lors de l'examen de toute demande d'autorisation d'un produit phytopharmaceutique contenant une substance active approuvée dont on envisage la substitution38. Le glyphosate ne fait pas partie de ces substances actives. Toutefois, l'article 50.2 autorise par dérogation un État membre, « dans des cas exceptionnels », à appliquer les dispositions précédentes lorsqu'un produit phytopharmaceutique ne contient aucune substance dont on envisage la substitution. Des exigences sont alors formulées : il existe une méthode non chimique de prévention ou de lutte pour la même utilisation ; cette méthode non chimique est d'usage courant dans cet État membre.
Le glyphosate relève de l'article 50.2. En conséquence, il est important de souligner que la substitution doit se faire par une méthode non chimique, et non par une autre substance active. L'examen des autres substances chimiques en comparaison avec le glyphosate ne rentre donc pas dans le champ de l'évaluation comparative qui motive cette mission.
L'article 50.2 renvoie vers l'article 50.1 relatif aux substances actives dont on envisage la substitution. Lorsque les critères précisés dans cet article sont respectés, alors « les États membres n'autorisent pas ou limitent l'utilisation d'un produit phytopharmaceutique pour une culture donnée etc. » La mission s'est interrogée sur le terme de « culture » employé dans ce texte (« crop » dans la version en anglais), sachant qu'il n'y a pas de végétaux cultivés sur une grande partie des ZNA traités avec du glyphosate. Dans la logique de la construction du texte, cette phrase invite à considérer l'usage du produit phytopharmaceutique examiné plutôt que la nature du couvert végétal de la parcelle. Les exigences fixées par l'article 50.1 pour les substances actives dont on envisage la substitution doivent donc également être respectées dans le cas du glyphosate : la méthode non chimique de prévention ou de lutte doit être sensiblement plus sûre pour la santé humaine ou animale ou l'environnement ; la méthode non chimique de prévention ou de lutte ne doit pas présenter d'inconvénients économiques ou pratiques majeurs ; la diversité chimique des substances actives, le cas échéant, ou les méthodes et pratiques de gestion des cultures et de prévention des ennemis des cultures sont de nature à réduire autant que possible l'apparition d'une résistance dans l'organisme cible ;
38
Ces substances actives sont classées ainsi lorsque leur évaluation toxicologique conclut qu'elles remplissent l'une des conditions énoncées au point 4 de l'annexe II du règlement. Les substances dont on envisage la substitution sont énumérées séparément des autres substances approuvées
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les conséquences sur les autorisations pour des utilisations mineures sont prises en compte.
L'annexe IV du règlement précise les conditions de l'évaluation comparative, et la notion de différence significative en matière de risques. Elle détaille les inconvénients pratiques ou économiques significatifs comme suit : « L'inconvénient pratique ou économique significatif pour l'utilisateur se définit comme une atteinte quantifiable importante aux pratiques de travail ou aux activités commerciales entraînant l'incapacité de conserver un contrôle suffisant de l'organisme cible. Cette atteinte importante résulte, par exemple, de l'absence d'infrastructures techniques permettant d'utiliser la solution de remplacement ou du caractère économiquement irréaliste de telles infrastructures. Lorsqu'une évaluation comparative met en évidence que les restrictions et/ou les interdictions d'utilisation d'un produit phytopharmaceutique peuvent entraîner de tels inconvénients, il en est tenu compte au cours du processus de décision. Cette décision est motivée. » L'article 50.2 est fondé sur la notion de méthodes non chimiques. L'article 3 du règlement 1107/2009 les définit de la façon suivante : « Méthodes non chimiques : les méthodes de substitution aux pesticides chimiques pour la protection phytosanitaire et la lutte contre les ennemis des cultures, fondées sur des techniques agronomiques telles que celles visées au point 1 de l'annexe III de la directive 2009/128/CE, ou les méthodes physiques, mécaniques ou biologiques de lutte contre les ennemis des cultures. » Les techniques agronomiques39 citées dans la directive 2009/128/CE sont des pratiques de lutte intégrée qui ne sont pas transposables au cas particulier de la substitution du glyphosate dans les zones non agricoles. Par ailleurs, il n'existe pas encore en France de méthode de lutte biologique contre les mauvaises herbes. Seules seront utilisables les méthodes physiques et mécaniques.
En pratique, l'ANSES tiendra compte de ces différents critères, mais les points clefs examinés pour les utilisations des produits contenant du glyphosate seront les suivants : existe-t-il une méthode non chimique de prévention ou de lutte pour la même utilisation du glyphosate ? est-elle d'un usage courant en France ? présente-t-elle des inconvénients économiques ou pratiques majeurs ?
3.2. La saisine de l'ANSES pour une évaluation comparative
Les ministres chargés de l'agriculture, de l'écologie et de la santé ont saisi l'ANSES pour examiner les produits phytosanitaires contenant du glyphosate selon deux axes : 1. la réévaluation de l'efficacité et des risques de ces produits en vue du renouvellement de leur autorisation de mise sur le marché. Dans le cadre de la réglementation communautaire, cette réévaluation porte début 2019 sur : 58 produits pour lesquels une demande de renouvellement de l'autorisation de mise sur le marché a été déposée avant la date limite du 15 mars 2018.
39
Rotation de cultures, lit de semis, cultivars résistants, fertilisation équilibrée, mesures d'hygiène, prophylaxie, etc.
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11 demandes de nouvelles AMM
L'Espagne et l'Italie doivent également réaliser l'évaluation des risques pour les produits qui leur ont été confiés au titre de l'évaluation zonale, et communiquer leurs conclusions aux États membres. À l'issue de cette première phase d'évaluation, l'ANSES clôturera la procédure pour les produits ne respectant pas, pour l'ensemble des usages revendiqués, les principes uniformes d'évaluation et d'autorisation prévus au règlement (UE) 546/2011 en matière de santé humaine, d'environnement ou d'efficacité. Pour les autres produits, l'ANSES procédera alors à la seconde phase d'évaluation, comme suit.
2. l'évaluation comparative des produits pour les usages autorisés du glyphosate.. Cette évaluation comparative sera réalisée en mettant en oeuvre les critères prévus par l'article 50.2 du règlement (UE) 1107/2009. Cette phase comporte plusieurs étapes : l'identification des alternatives non chimiques, d'usage courant en France, et de leurs inconvénients pratiques et économiques ; la comparaison des risques entre le glyphosate et ces alternatives, qui doivent être « sensiblement plus sûres » ; la garantie d'une diversité suffisante de méthodes et produits alternatifs pour prévenir le risque d'apparition de résistances dans les organismes cibles ; la prise en compte de l'impact de la substitution sur les autorisations pour des usages mineurs.
Par ailleurs, l'ANSES procédera à l'identification des produits inscrits sur la liste des produits de biocontrôle et des produits à base de substances à faible risque, qui représenteraient une alternative à chacun des usages du glyphosate et devraient être pris en compte dans l'évaluation comparative. Le gouvernement a effectué des saisines de l'INRA, de l'ONF, du CGEDD et du CGAAER pour traiter les domaines relatifs à l'agriculture, la sylviculture et aux zones non agricoles. La « Task Force » mise en place par le gouvernement, et présidée par le Préfet Pierre-Étienne Bisch, organisera la concertation et la consultation avec les instituts techniques et filières concernées. Ce processus selon deux axes conduira, pour les produits qui ne répondent pas aux exigences formulées, au retrait ou à la non-délivrance de l'autorisation pour un usage ou une partie d'usage. Il est prévu que les décisions relatives aux autorisations de mise sur le marché des produits à base de glyphosate soient notifiées au plus tard au 1er décembre 2020.
3.3. La notion d'usage
3.3.1. Définition d'un usage lié à une AMM : utilisation versus usage
Une décision d'autorisation de mise sur le marché précise les usages pour lesquels le produit bénéficiaire est autorisé. Pour éviter les confusions, le présent rapport utilise le terme « usage » dans le sens défini pour les AMM.
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La note de service40 de la DGAL relative au catalogue national des usages phytopharmaceutiques précise la définition des usages au sens des AMM : « Un usage correspond de manière générale à la combinaison d'une espèce végétale ou d'un groupe agronomique de végétaux avec un mode de traitement et une fonction ou un bioagresseur ou un groupe agronomique de bioagresseurs considéré. » Cette définition montre que la conception des usages est essentiellement prévue pour les cultures dans les zones agricoles. Typiquement, un usage est défini par un numéro de référence renvoyant vers un triplet végétal * type de traitement * organisme nuisible, par exemple : 12703203 Vigne*Trt Part.Aer.*Mildiou(s) Ce genre de libellé ne peut avoir une portée universelle, car il ne couvre pas la variété des pratiques agricoles. Ainsi, le désherbage nécessite d'autres libellés, comme : 12705902 Vigne*Désherbage*Cult. Installées Les traitements généraux constituent une catégorie d'usages permet l'autorisation de préparations sur l'ensemble des cultures du catalogue des usages, avec des libellées comme suit : 11015921 Traitements généraux*Désherbage*Zones Cult. Avt Plantat. 11015933 Traitements généraux*Désherbage*Zones non cult. Les ZNA professionnelles et amateurs sont définies comme étant des « espaces aménagés et/ou végétalisés où les plantes ne sont pas cultivées à des fins commerciales ». Ces espaces comprennent41 notamment :
« des compartiments entretenus par un public professionnel :
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les espaces communaux, de collectivités territoriales, et certains espaces privés (jardins - espaces verts, parcs d'attraction et de loisirs, plantations d'alignement et à massifs, abords de bâtiments, voirie, trottoirs et îlots directionnels, terrains de sport, cimetières, cours et plans d'eau, et zones subaquatiques, arboretums, etc.) ; les réseaux de communication (routes et autoroutes, chemins de fer, aéroports, zones fluviales et portuaires), ainsi que leurs abords et accotements ; les zones engazonnées (terrains de sports, golfs, hippodromes, pelouses d'espaces collectifs divers), les zones industrielles en activité (sites de production, de transformation et de transport d'électricité, installations classées Seveso, ou non, centres de fret, aires de stockage, etc.), ainsi que les friches industrielles ; les enceintes militaires ; les forêts suburbaines ainsi que divers espaces naturels ;
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des compartiments entretenus par un public non professionnel amateur : ces espaces dits « jardins amateurs » et jardins partagés regroupent divers compartiments dont des espaces cultivés plantés d'espèces fruitières, potagères, ou ornementales, abords de maison, allées de jardins. ».
40 41
Note de service DGAL/SDQPV/2015-253 du 10/03/2015. Note de service DGAL/SDQPV/2015-253 du 10/03/2015.
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Une distinction nette doit être faite entre le terme « usage » au sens des AMM, tel qu'il vient d'être présenté, et le terme « utilisation ». Pour mémoire, la mission a choisi d'écrire « utilisation » dans le présent rapport lorsqu'il s'agit de qualifier plus précisément un emploi par les opérateurs, notamment sur les infrastructures, sur les voies ferrées, sur les clôtures, avant gazon... La mission considère également que la notion de « usage courant », dans le cadre de l'article 50.2, doit s'entendre comme l'« utilisation courante » à la date de la décision de retrait ou de renouvellement des autorisations pour les produits contenant du glyphosate. À titre d'illustration, le tableau ci-dessous élaboré par la mission, citant la note de service DGAL sur le catalogue des usages, montre des exemples de comparaison entre les notions d'usage et d'utilisation.
Usages des PPP en ZNA au sens des AMM
(non exhaustif)
Utilisations des PPP en ZNA
(non exhaustif)
Usage « Désherbage total »
Utilisations dans des sites désherbés essentiellement pour des raisons de sécurité (risques d'incendie, d'intrusion, de maintien du bon état de réseaux ou d'ouvrages d'art...etc.) avec des produits à fort niveau d'efficacité, montrant un spectre d'activité très large et polyvalent, avec une persistance suffisante pour maintenir un faible niveau d'enherbement toute l'année. Les sites industriels, les voies ferrées, les centrales de transformation et de production d'électricité, etc. constituent les compartiments principaux inclus dans cet usage.
Usages « Désherbage des Utilisations pour l'entretien des zones herbacées extensives zones herbeuses » « sécurisées » peu ou pas fréquentées par le public, dont la
végétation a pour rôle essentiel d'assurer une couverture destinée à ralentir les flux hydrologiques, à réduire l'érosion des sols et à assurer un fond paysager d'accompagnement des infrastructures. Ce sont par exemple les zones herbeuses recouvrant les accotements routiers et autoroutiers, les abords de chemin de fer, de zones aéroportuaires, des sites industriels, etc. Ces zones sont constituées d'une végétation composée d'une multitude d'espèces herbacées à dominante de graminées et autre végétaux de taille basse, résultant d'une pousse naturelle ou d'un ensemencement ou/et plantation. Les objectifs d'entretien de ces zones visent à réguler une végétation herbacée, semi-ligneuse et ligneuse à fort potentiel de développement, allergisante ou urticante, pouvant porter atteinte aux fonctionnalités recherchées (visibilité, sécurité, stabilité, incendie...) pour le maintien d'un bon usage des infrastructures. Les zones herbeuses n'incluent pas les usages « gazons de
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Usages des PPP en ZNA au sens des AMM
(non exhaustif)
Utilisations des PPP en ZNA
(non exhaustif)
graminées » qui constituent un compartiment fondamentalement différent en termes de fonctionnalité et d'objectif d'entretien
Usage « PJT42, cimetière, voies de communication »
Compartiments régulièrement entretenus, fréquentés par le public, souvent en partie plantés, entretenus pour des raisons esthétiques, sanitaires ou commoditaires43, avec des exigences de sélectivité des produits utilisés vis-à-vis des végétaux environnants. Utilisations en zones engazonnées, y compris en production de gazons de placage, dont l'importance à l'échelon national ne pouvait justifier l'attribution d'usages spécifiques. Tous les produits homologués pour ces usages peuvent ainsi être utilisés pour la protection des gazons de placage. La partie engazonnée des terrains de sport rentre dans cette catégorie.
Usages « gazons de graminées »
Tableau 4 : Exemples de correspondance entre les usages et les utilisations de produits phytopharmaceutiques dans les zones non agricoles (Source : DGAL44+ compléments par la mission).
3.3.2. La segmentation des utilisations
Les firmes détentrices des produits phytopharmaceutiques demandent des AMM pour des usages listés dans le catalogue national. Or, ces usages sont définis de façon très globale pour les ZNA, comme «usages non agricoles * désherbage * zones herbeuses». Il n'est pas possible de répondre aux questions posées par l'article 50.2 avec la nomenclature existante. En effet, les usages sont déterminés en zone agricole en fonction de l'efficacité et des impacts sur chaque culture, et les usages définis dans l'AMM recouvrent les utilisations. Il n'en est pas de même en ZNA où existent des utilisations par rapport à des objectifs propres aux industriels lesquels sont d'un autre ordre que la pratique agricole. Parce que l'article 50.2 est construit sur l'existence de méthode non chimique, son application nécessite de préciser les utilisations du glyphosate, suivant les critères introduits par cet article. Ce qui impose l'introduction d'une dimension supplémentaire, non liée au produit, ni à son impact, ni à son efficacité, par rapport au catalogue des usages. Cela conduira à raisonner sur une nouvelle segmentation plus détaillée dans un catalogue révisé. Cette segmentation doit permettre de répondre, pour chacune d'entre elles, de façon plus précise aux questions suivantes :
42 43
PJT : parcs, jardins, trottoirs. Nuisances sur mobilier urbain ou tout bien 44 Note de service DGAL/SDQPV/2015-253 du 10/03/2015.
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Existe-t-il des méthodes alternatives non chimiques ? Sont-elles d'un emploi courant ? Présentent-elles des inconvénients majeurs sur les plans économiques et pratiques ?
Les paragraphes suivants vont proposer une segmentation adaptée aux besoins induits par l'article 50.2. 3.3.2.1 Par activité économique ou par objet technique Se pose donc une première question sur la nature de la segmentation des utilisations à savoir : par activité économique générale (routière, ferroviaire, industrielles, etc.) ; par objet traité (rails et ballast, chaussée, ouvrage d'art, terrain support d'installation industrielle, clôture, pelouses de terrain de sport, etc.).
L'article 50.2 renvoie au 50.1 pour le détail de l'évaluation. Ce dernier article mentionne «que la substitution... ne présente pas d'inconvénient économique majeur», ce qui invite à un examen par activité économique générale. En revanche, l'examen de l'usage courant d'une utilisation et de la même manière de l'inconvénient pratique majeur - n'a de sens que pour chaque objet technique. Par exemple, les clôtures sont communes à toutes ces activités et elles sont très souvent en ZNA des obligations réglementaires. Dans ces conditions se pose la question de savoir comment et avec quoi réglementer «l'utilisation» en ZNA. De fait, l'ANSES avec la DGAL se propose d'ajouter cette dimension sous forme de mentions supplémentaires dans le catalogue des usages et/ou des mentions supplémentaires dans les AMM. Mais cet ajout d'un critère supplémentaire résultant de l'article 50.2 devra évidemment être documenté et traçable par l'ANSES. Il ne pourra en aucun cas être d'initiative du demandeur de l'autorisation, qui évidemment ne peut ni connaître ni se prononcer sur une appréciation au sens des critères de l'article 50.2. Cette considération suffit d'ailleurs à établir qu'il s'agit bien d'une dimension nouvelle par rapport à celle du catalogue des usages. En conséquence, ne laisser personne sans solution à court terme en ZNA conduira probablement à maintenir des AMM dont les usages/utilisations seront restreints aux seuls besoins de certains objets techniques. À titre d'exemple, la considération d'une dizaine d'activités économiques générales et d'une dizaine d'objets techniques conduirait à une centaine de mentions, dont la cohérence d'ensemble serait pour le moins peu perceptible. Ainsi, il ne manquera pas d'apparaître contradictoire, pour un même objet technique (par exemple, les ouvrages d'art ou les clôtures), d'autoriser l'usage du glyphosate dans un secteur économique (par exemple, le transport ferroviaire) au motif d'un «inconvénient économique majeur» et l'interdire dans un autre secteur (par exemple, les concessions autoroutières) au motif que l'inconvénient économique n'y serait pas majeur. Malgré tout, la mission ne peut éviter de prendre en considération en même temps une segmentation par activité économique et une segmentation par objet technique pour l'application de l'article 50.2.
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3.3.2.2 La diversité des objets techniques La seconde question est celle du détail de cette segmentation des utilisations, alors que les objets techniques sont les plus variés et que leur traitement est très spécialisé. L'analyse menée au titre du 50.2 doit ainsi porter de manière détaillée sur chacun de ces objets techniques. Le concept fondamental à considérer est celui d'une technique alternative (non chimique) dans le détail de chaque utilisation. L'usage courant doit aussi, s'apprécier dans le détail de chaque utilisation précisément identifiée. Par exemple, le fauchage est une technique très répandue. Pour autant, elle n'est pas une technique alternative dans le détail de chaque utilisation. Le glyphosate sur les routes est utilisé par exemple non pas "à la place du fauchage45", mais bien parce que pour certaines utilisations très précises, il constitue la seule méthode possible : au regard de la conception de l'infrastructure46 ; dans les conditions normales de son exploitation (service à l'usager, risque pour les travailleurs, etc.).
Cette conception tient évidemment compte de l'état de l'art dont fait partie emploi de PPP depuis les années 1920-1930 et un développement massif dans l'après-guerre. L'exemple des postes électriques est éclairant à cet égard : construire des postes électriques avec des terrains végétalisés suppose une autre conception et ils sont plus coûteux. L'exemple du bunker de golf est aussi éclairant. Faucher un bunker (qui est un objet technique particulier au sein d'un ensemble et d'une activité qui s'appelle un golf) n'est tout simplement pas possible. En effet, par exigence fonctionnelle de ce sport qu'est le golf, un bunker est un obstacle construit en sable aussi pur que possible et maintenu intact dans le temps pour que les joueurs soient confrontés exactement aux mêmes difficultés et que l'on puisse comparer leurs performances à des années d'intervalle. Il n'y a pas de méthode alternative aux PPP autre que le désherbage manuel (sauf peut-être le remplacement complet du sable des bunkers régulièrement). On peut aussi, citer les gazons de placage (proches de l'agriculture et à rapprocher de l'enherbement maîtrisé pratiqué en viticulture). Pour contenir ou supprimer les plantes vivaces, on pourrait considérer qu'il existe une alternative non chimique au glyphosate, à savoir le fauchage et le labourage profond. Or, au regard de l'état de l'art et des exigences sur le gazon de placage, ni le labourage profond ni le fauchage préalable aux semis ne sont en mesure de respecter les exigences du gazon de placage. Le fauchage et le labourage profond ne sont donc pas des alternatives non chimiques à considérer pour le gazon de placage. La diversité des objets techniques est ainsi extrême. Sauf à mener un travail de réingénierie gigantesque sans parler de savoir à l'initiative de qui ou qui pourrait en prendre la responsabilité d'en tirer des conséquences -, analyser dans le détail, pour chaque objet technique, si des méthodes alternatives pourraient être disponibles est impossible.
45
puisque les agents d'entretien des routes et autoroutes passent l'essentiel de leur temps à faire du fauchage avec des tracteurs équipés à des endroits conçus pour être enherbés, sur des bas-côtés, des talus, bandes d'urgence enherbées, etc. 46 tant dans sa conception d'ensemble (type de terre-plein centraux (TPC) par exemple) que dans sa conception détaillée (joints de chaussée ou d'assainissement par exemple et ouvrages d'art)
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Il convient donc de raisonner sur des objets appréhendés suivant leurs caractéristiques techniques (et non pas leur caractéristique d'usage), en considération de ce que cette fonction impose quant aux conditions d'entretien au regard de la végétation. À titre d'illustration, le cas d'un giratoire est éclairant. Un giratoire est un cas particulier d'une route, conçu pour organiser des croisements à niveau. Il y a une unicité de fonction, mais c'est un ensemble d'objets techniques extrêmement variés (de façon non exhaustive, des bords en béton, de la terre, de l'enrobé voire des ouvrages d'art, etc.). Suivant les cas, son centre peut ou non être entretenu sans glyphosate non seulement en fonction de ses caractéristiques générales, mais aussi de ses conditions d'exploitation. S'engager dans une voie où, de manière réglementaire, seraient définis et segmentés, au regard de l'autorisation ou de l'interdiction de l'usage du glyphosate, des ensembles d'objets techniques comme les giratoires, ne paraît pas pertinent. Une approche fonctionnelle - au sens donc de la technique et non pas de l'usage s'impose ; par exemple, le «rail et ballast» des voies ferrées, les «chaussées» des routes, les «dispositifs de séparation de trafic et de sécurité» des routes, les «systèmes d'assainissement» des terrains artificialisés, les «pistes» des aéroports, les «clôtures», les «ouvrages d'art» des infrastructures. Cette analyse préalable est nécessaire pour, dans la suite du rapport, structurer les informations quant à la mise en oeuvre des critères définis par l'article 50.2.
3.3.3. La notion d'usage courant
Cette notion «d'usage courant» n'est pas plus avant définie dans le règlement CE 1107/2009. Il convient donc d'examiner comment elle doit concrètement être analysée. 3.3.3.1 L'adaptation à l'objet technique Le mot important est ici le mot courant. Ainsi, il ne saurait être regardé comme un usage courant : La simple existence d'une utilisation particulière dans une situation technique singulière (cf. supra) ou au sein d'une activité économique générale ; La possibilité, à un terme quel qu'il soit, de recourir à une alternative nouvelle résultant par exemple, de la recherche et du développement public ou privé, ne saurait être regardée comme un usage courant.
L'usage courant suppose : L'existence de l'outil au stade opérationnel ; Une technique disponible sur le marché ; Que son fabricant peut mettre sur le marché à hauteur de la demande ; Que cet outil soit adapté à chaque objet technique considéré ; Un caractère habituel, ordinaire au moment présent.
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3.3.3.2 L'effet économique des meilleures techniques disponibles On doit observer que, au regard des objets techniques, il n'y a pas d'usage courant d'une alternative à la technique dominante par simple effet économique. En effet, et sauf cas exceptionnel (micromarché, transition avérée avec des techniques émergentes sur un marché...), tout le monde se range à la meilleure technique disponible47, adaptée à chaque objet technique, ce qu'est le glyphosate en l'état actuel des choses s'agissant de l'élimination des végétaux, cette élimination étant nécessaire au regard des exigences auxquelles doivent répondre ces objets. L'histoire en témoigne, puisque depuis les années 1920-1930, le traitement chimique des voies ferrées s'est imposé, se substituant à la main d'oeuvre des compagnies ferroviaires constituée pour cette activité de détenus soumis ou non au régime des travaux forcés. De ce point de vue, le fait que le glyphosate soit le dernier de ces PPP désherbant total, et hégémonique, démontre que sa molécule est la plus efficace parmi celles de ces PPP Cette situation résulte d'une période suffisamment longue depuis l'après-guerre, pour que se structure progressivement une adaptation des objets techniques aux PPP en général et à la toute dernière remarquable efficacité du glyphosate en particulier. Ainsi les objets techniques se sont adaptés de manière de plus en plus fine à cette efficacité, mais cette efficacité a nourri en retour des performances attendues supérieures pour ces objets techniques. Par exemple, certains des systèmes de sécurité des trains utilisent maintenant comme support les rails des chemins de fer, parce que le glyphosate garantit qu'ils ne seront pas perturbés par la végétation. 3.3.3.3 Les micromarchés La considération de l'existence de micromarchés pourrait faire accroire qu'une technique distincte des techniques usuelles et utilisée dans le cadre de ces micromarchés serait de ce fait même une technique alternative d'usage courant. Ces micromarchés constituent des activités économiques distinctes, car les modèles économiques sont différents. Ces micromarchés sont le résultat d'une recherche de différenciation avec les marchés prédominants différenciation qui peut même justement passer par l'affichage d'une technique différente - qui permet des prix plus élevés au nom de cette différenciation. Pour illustrer le propos, les techniques employées par le «luxe» ne sont donc pas opposables ici d'un usage courant aux techniques employées par le «low cost», même dans un secteur d'activité de même nature, sauf à remettre en question le modèle économique de ce «low cost». Ainsi une clientèle particulière peut-elle accepter de payer cher une «technique» singulière. Mais la particularité de cette clientèle montre que ce n'est pas le même modèle économique. En conséquence, le constat de l'existence d'un micromarché qui ferait 10 % du marché total avec une technique «chère», ne peut permettre d'alléguer que cette technique est d'un usage courant si 90 % du marché fonctionne avec un autre modèle économique, c'est-à-dire une autre clientèle et une technique moins chère. C'est une distinction que l'on peut observer notamment dans le sport, les monuments historiques et même les communes. Pour cette raison, une pratique alternative non chimique que l'on constaterait dans le sport professionnel, le patrimoine historique et même les communes ne signifierait pas que cette même méthode alternative pourrait devenir d'usage courant.
47
Cette meilleure technique disponible ne renvoie pas à la seule efficacité technique, mais également à la réalité de sa diffusion à grande échelle et donc corrélativement à sa performance économique.
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Une approche, qui ne prendrait en considération que l'objet technique lui-même, ne respecterait donc pas l'approche double déterminée précédemment qui impose de prendre en compte la réalité économique de marchés distincts. 3.3.3.4 Le point de départ de l'appréciation de l'usage courant L'intervention en France de la loi n° 2017-110 du 6 février 2014 modifiée dite «loi Labbé» a modifié récemment les obligations relatives aux collectivités et aux particuliers quant à l'utilisation des PPP. Ainsi se pose la question de savoir si l'usage courant, est celui antérieur à la loi ou postérieur à celleci. Par exemple, s'agissant des grandes voiries, hors trottoirs, le fauchage régulier de leurs dépendances par les agents d'entretien et d'exploitation et le matériel déployé témoignent d'un emploi déjà limité des PPP en général et du glyphosate en particulier. La considération de ce que la loi Labbé prévoit des exceptions au motif de la sécurité et de l'exploitation routière confirme que de fait il n'y a pas eu de changement de référentiel (cf. infra). La mission constate que le volontarisme de certains maîtres d'ouvrages affiché depuis l'émergence du débat sur les PPP apparaît comme un phénomène analogue à celui des micromarchés. Ainsi des différenciations politiques sont affirmées, mais sans que les moyens soient toujours ajustés au regard des conséquences à long terme. Cette situation se traduit concrètement par une dégradation progressive de l'entretien de ces infrastructures rapportée par les gestionnaires routiers notamment, sans forcément de vision sur la pérennité des structures. Ces éléments d'analyse permettront d'éclairer l'appréciation d'un usage courant ou non pour les utilisations en ZNA qui seront détaillées plus loin.
3.3.4. La notion d'usage sensible
Les usages sensibles que la lettre de mission invite à examiner sont, à notre sens, à rapprocher des enjeux fonctionnels. En effet, les installations ou infrastructures ont été conçues pour répondre à des enjeux fonctionnels bien précis ; il en va de même avec les objets techniques qui les constituent. Les usages sensibles sont donc à rapprocher des référentiels auxquels elles sont soumises. Elles sont construites et exploitées en fonction des réglementations, normes, bonnes pratiques, etc. qui s'appliquent à elles pour des motifs généraux de protection des personnes et des biens. Et par définition, une réglementation en son sens premier existe pour encadrer un usage dans un souci de protection. Elle tient compte d'un grand nombre de facteurs et au premier chef de la sécurité des personnels qui les exploitent, des usagers dans le cas des infrastructures et des riverains. C'est donc aussi, au regard de ce même sens d'enjeux fonctionnels/usages sensibles/référentiels que peuvent notamment s'apprécier les inconvénients pratiques majeurs mentionnés à l'article 50.1. Mais ils doivent être étendus aux autres référentiels commerciaux ou culturels. Le cas de la voirie et des cimetières est éclairant à cet égard avec le débat qu'a provoqué la proposition de loi Labbé. Cette proposition prévoyait notamment en son article 1 « A compter du 1er janvier 2018, il est interdit aux personnes publiques [...] d'utiliser des produits phytopharmaceutiques [...] à l'exception des préparations naturelles peu préoccupantes [...] pour l'entretien des espaces verts, de forêts et de promenades relevant de leur domaine public ou privé ».
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Après avoir été une première fois complétée à l'occasion du vote de la loi, cette formulation a fait l'objet d'un nouveau complément notable avec la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte et son article 68 en ajoutant explicitement la voirie. Mais ce faisant, elle a en même temps prévu l'exemption de l'interdiction de l'usage de PPP au motif de la sécurité des personnels et des usagers de la route lorsque celle-ci était en jeu. Ainsi la loi dite Labbé modifiée, en définissant et organisant des exceptions a déjà confirmé, par là même, que la seule solution existante pour l'entretien d'un certain nombre des objets techniques qui constituent des routes, sont, dans des conditions bien définies, les PPP dont le glyphosate. C'est un exemple d'usage sensible pour lequel il n'existe donc pas de solution non chimique alternative aux PPP d'un usage courant qui aurait pu être raisonnablement imposée. S'agissant des cimetières, la mission fait le constat qu'ils ne sont pas mentionnés dans la loi Labbé. Mais il est admis ce qu'ont révélé les entretiens avec tous les acteurs qu'ils peuvent être traités avec des PPP. Même non explicitement prévue par la loi, cette possibilité laissée ouverte qui concerne les cimetières qui ne peuvent être assimilés à des promenades (et qui ne sont donc d'ores et déjà pas considérés comme des « espaces verts ») confirme en elle-même que des référentiels culturels sont d'ores et déjà également pris en compte par la loi.
Les usages peuvent être considérés comme sensibles lorsqu'ils renvoient à des référentiels motivés par des enjeux de sécurité ou des référentiels culturels y compris dans des aspects commerciaux.
3.3.5. La notion d'utilisation mineure
Trois notions proches sont rencontrées dans les textes réglementaires et infra-réglementaires : utilisation mineure, culture mineure et usage mineur. L'article 50.1 du règlement 1107/2009 précise que lors de l'évaluation comparative mettant en balance les risques et les bénéfices de la substitution, « les conséquences sur les autorisations pour des utilisations mineures sont prises en compte ». L'article 3 apporte la définition suivante : « Utilisation mineure ; l'utilisation d'un produit phytopharmaceutique, dans un État membre particulier, sur les végétaux ou produits végétaux qui : a) ne sont pas largement cultivés dans cet État membre ; ou b) sont largement cultivés, pour répondre à un besoin exceptionnel en matière de protection des végétaux. » Dans le cadre de la fixation des limites maximales de résidus, la Commission européenne a précisé dans un document guide48 les critères définissant une « culture majeure ». Il s'agit de valeurs de consommation, de surfaces cultivées et de quantités produites. Ce texte présente également la liste de toutes les cultures majeures au sens communautaire. Il est précisé que les cultures qui ne sont pas citées sont des « cultures mineures. »
48
Guidance document. Guidelines on comparability, extrapolation, group tolerances and data requirements for setting MRLs.SANCO 7525/VI/95 Rev. 10.3. 13 June 2017.
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Enfin, dans le catalogue national des usages phytopharmaceutiques, il est indiqué : « On entend par usage mineur sur une culture majeure un usage de faible importance, de surface limitée par rapport à la couverture de la culture, ayant un caractère aléatoire (fréquence d'apparition et importance). Tous les usages sont considérés comme mineurs pour les cultures mineures. »
Le point essentiel à retenir de cette analyse est que, dans le catalogue, tous les usages dont le libellé commence par « Usages non agricoles » sont classés comme des usages mineurs. Par comparaison, dans la viticulture, les grandes cultures et l'arboriculture, le plus grand nombre des usages sont classés comme majeurs. À l'inverse les usages en cultures maraichères, ornementales et aromatiques sont le plus souvent classés en usages mineurs.
3.4. Le référentiel
Un usage courant n'est pas le fruit du hasard et il n'est en fait que le résultat de différentes contraintes qui s'appliquent au maître d'ouvrage. Figurent parmi ces contraintes, des considérations techniques d'ordre réglementaire de degré divers, mais aussi, des considérations commerciales, voire des considérations culturelles. Ces contraintes extérieures peuvent être regroupées sous le terme de référentiel. De fait, la notion d'usage courant renvoie à une utilisation qui permet de respecter le référentiel qui s'applique à l'objet technique considéré. Cela confirme que l'analyse de l'usage courant doit se faire par rapport à chaque objet technique, renforcé de son référentiel. Et à titre d'exemple, la piste d'un aéroport n'est pas le même objet technique que la chaussée d'une autoroute. Ipso facto, l'appréciation de l'usage courant au sens de l'article 50.2 doit se faire à isoréférentiel quant à l'objectif d'élimination de la végétation à atteindre. Si une interdiction du glyphosate venait à être décidée, les maîtres d'ouvrages pourraient bien sûr envisager ultérieurement une évolution de leur référentiel, voire une reconception de leurs objets techniques en fonction au premier chef de considérations économiques. Les référentiels sont notamment illustrés : pour ceux techniques d'ordre réglementaire : par les objets techniques des voies ferrées, ceux des routes, ceux des postes électriques ou ceux des industries classées comme installations classées pour la protection de l'environnement ; pour les référentiels d'ordre commerciaux : par les exigences des activités sportives, tout spécialement celles de haut niveau ou les golfs, et celles des gazons de placage ; pour les référentiels culturels : comme le cas des cimetières49, y compris avec des considérations relatives à la praticabilité et à l'accessibilité, par exemple, en temps de pluie, ou des considérations esthétiques.
Ces derniers référentiels sont évidemment les plus flous, même s'ils n'en sont pas moins les plus porteurs d'enjeux pour les individus50, et c'est donc bien à leur endroit que s'exprime la question d'un changement de référentiel sous la formule d'une invitation à changer de regard sur leur
49 50
Pour lesquels il ne faudra pas oublier de prendre en compte les cimetières de combattants étrangers morts au combat en France. Ce dont témoigne la loi n° 2014-110 du 6 février 2014 modifiée dite « loi Labbé » et ses débats parlementaires.
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apparence. Formellement plus souples, on observe concrètement aujourd'hui pour ces derniers référentiels une volatilité nouvelle qui résulte de choix très locaux des collectivités, eux-mêmes dépendants de l'expression ressentie de leurs habitants. De ce point de vue, un phénomène analogue à celui des micros-marchés est observable dans les communes, confirmé par les entretiens de la mission, à savoir des différenciations politiques affirmées à travers le choix des techniques, avec à la clef, soit des conséquences assumées en termes de coûts induits, soit des conséquences assumées en termes d'apparence de l'espace public. La mission constate à travers ses entretiens que depuis la loi Labbé un changement de référentiel tacite et non affiché, qui se traduit concrètement sous la forme d'un abandon par délaissement de l`entretien d'un certain nombre d'espaces publics. Dans le meilleur des cas, la sortie de cette situation nécessiterait une reconception, mais celle-ci est coûteuse et nécessitera un choix difficile entre minéralisation et végétalisation maîtrisée sans que la tenue dans le temps soit en rapport avec la durée de vie attendue des objets techniques.
3.5. Les conditions économiques
3.5.1. Les cadres économiques variés des activités en ZNA
L'analyse des conditions économiques n'intervient au titre de l'article 50.2 qu'après l'examen de l'usage courant de techniques alternatives non chimiques. Or, en l'absence d'interdiction des herbicides par la réglementation ou la pression sociale, la logique économique elle-même conduit à l'absence de telles alternatives au glyphosate parce que cette technique est à la fois la plus efficace et la moins coûteuse des méthodes d'élimination de la végétation. De plus, les activités économiques dont ressortent les ZNA sont extrêmement diverses. Elles sont parfois monopolistiques comme les voies ferrées et les postes électriques, mais parfois avec des donneurs d'ordre extrêmement dispersés comme pour les voiries. Elles relèvent de la sphère publique ou de la sphère privée avec au milieu le régime des concessions. Chaque concession est un cas particulier gouverné par son contrat propre, donc avec des conséquences variables, à la suite de toute modification du paysage autour du contrat, sur le concédant ou le concessionnaire. Leurs dispositifs de régulation sont aussi, très divers : ils peuvent être des autorités indépendantes51 dont le rôle n'est jamais exactement le même suivant l'activité considérée, chaque contrat de concession, ou directement la concurrence. La logique économique de chaque secteur est aussi, extrêmement variable entre le monopolistique régulé, le concessif, le public et sa logique budgétaire, enfin le privé pur. Enfin, la situation économique des acteurs peut-elle être très variable, y compris au sein d'une même activité, et elle n'est pas réellement connue, au premier rang celle des communes. Il n'est donc pas possible de fournir des éléments statistiques sur les conséquences financières d'un secteur d'activité autre que les secteurs monopolistiques.
51
Comme l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (ARAFER) ou la Commission de régulation de l'énergie (CRE).
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Par ailleurs, si l'article 50.1 mentionne des inconvénients économiques, il semble qu'il faille plutôt l'apprécier comme une conséquence financière majeure sur les entreprises concernées. En effet, l'appréciation de l'inconvénient économique majeur n'aurait de sens économique (ce qui est différent stricto sensu du sens financier) que si une comparaison très globale était réalisable. Il faudrait comparer : l'augmentation des coûts liés à l'interdiction du glyphosate ; le chiffre d'affaires ; les conditions de sa couverture par des recettes nouvelles ; le gain économique global y compris toutes les externalités de cette interdiction comme les bénéfices pour l'environnement et la santé publique.
Ce calcul n'est pas atteignable. En effet, une AMM est délivrée seulement si les évaluations52 concluent que : il n'y a pas d'effet nocif immédiat ou différé sur la santé humaine ou sur la santé animale, soit directement ou par l'intermédiaire de l'eau potable, des denrées alimentaires, des aliments pour animaux, de l'air, des effets sur le lieu de travail... il n'y a pas d'effet inacceptable sur les végétaux ou produits végétaux ; il ne provoque pas de douleurs ou de souffrances chez les animaux vertébrés à combattre ; il n'y a pas d'effet inacceptable sur l'environnement.
La logique de délivrance des AMM ne permet donc pas de faire ce type de calcul. Par ailleurs, il ne semble pas exister d'évaluation des coûts que génère l'emploi du glyphosate pour la société à travers ses impacts pour la santé et l'environnement. Dans ces conditions, il n'apparaît pas possible pour la mission de qualifier ce que serait un impact économique majeur, apprécié d'un point de vue économique stricto sensu ou d'un point de vue financier pour les entreprises. La mission s'efforcera néanmoins de donner quelques éléments significatifs, parfois illustrés de chiffres et qui seront relatifs à des considérations financières.
3.5.2. Les différentes logiques
3.5.2.1 Les secteurs monopolistiques régulés Justement parce qu'ils sont monopolistiques et qu'à ce titre, les tarifs sont potentiellement sans limites fixées par la concurrence, ces secteurs sont régulés, le meilleur exemple étant SNCF Réseau. Toute charge d'exploitation supplémentaire sera donc répercutée sur le tarif sous le contrôle de l'autorité de régulation. Mais pour les activités déjà subventionnées, la puissance publique devra financer cette charge.
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Règlement (CE) n°1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques.
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3.5.2.2 Les concessions L'éventail des logiques économiques des concessions et conséquemment du partage du risque entre concédant et concessionnaire est totalement ouvert entre des concessions «aux risques et périls» pour lesquelles le concessionnaire fixe librement le tarif, et des concessions totalement encadrées qui s'apparentent de fait à une gestion directe par le concédant, même si le financement reste externe et s'il y a paiement d'un tarif. Une des caractéristiques majeures des concessions est de faire appel à des capitaux et des emprunts extérieurs sur un terme long, à la mesure de la durée de vie des infrastructures. Ils doivent être raisonnablement rémunérés. À l'exception rare du véritable «risques et périls», la logique des concessions est ainsi de convenir au départ de ces rémunérations. Le contrat comporte corolairement des clauses de toutes sortes destinées à les garantir, dans le temps limité de la concession, notamment par rapport aux éventuelles modifications unilatérales du contrat par le concédant. De plus, le même mot de «concession» recouvre de fait deux réalités économiques et financières radicalement différentes. Dans un cas, la concession est extrêmement rentable si le trafic est important, car assise sur un monopole de fait. L'enjeu est alors de contrôler la hausse des tarifs du concessionnaire. C'est le cas, par exemple, des sociétés d'autoroutes et d'Aéroports de Paris même s'il ne s'agit pas pour ce dernier d'une concession stricto sensu. Dans l'autre cas, la concession est naturellement déficitaire compte tenu d'une relative faiblesse des recettes commerciales liée à un trafic limité ou à un tarif acceptable trop bas. Elle nécessite alors un apport parfois seulement en subvention d'investissement, mais le plus souvent sous la forme d'une subvention annuelle d'exploitation de l'autorité concédante. C'est, par exemple, le cas pour les concessions des collectivités locales, par exemple de leurs aéroports.
Si chaque concession est un cas particulier gouverné par son contrat propre, et si la solution ultime à tout conflit se trouve chez le juge administratif assez peu prévisible à ce stade, la jurisprudence est clairement celle d'une prise en charge par l'autorité concédante. Cela se traduit naturellement le plus souvent par une augmentation des tarifs dans le premier cas et par une inévitable augmentation de la subvention dans le second. 3.5.2.3 Le secteur public La logique budgétaire gouverne le secteur public. Comme les charges d'exploitation liées à une interdiction éventuelle du glyphosate sont récurrentes, les recettes d'exploitation doivent les financer, dans un cadre doublement contraint, celui de la baisse des dotations de l'État et celui de la diminution des assiettes de leur fiscalité propre. Par ailleurs, la variété des situations financières des collectivités est extrême, sans même pouvoir les corréler à leur taille, ou à leur potentiel fiscal53.
53
Le potentiel fiscal est un indicateur qui peut permettre de comparer la richesse fiscale potentielle des collectivités les unes par rapport aux autres. Un produit fiscal théorique est ainsi calculé, correspondant au montant d'impôts qu'encaisserait chaque collectivité si elle appliquait à ses bases nettes d'imposition les taux ou tarifs moyens. Ce potentiel fiscal est rapporté au nombre d'habitants afin de permettre des analyses et des comparaisons que les montants bruts ne peuvent autoriser à eux seuls.
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Cette variété des situations confirme ce qui a été confié à la mission par des acteurs, à savoir que le coût d'opportunité de l'emploi ou non de PPP dans une collectivité par rapport à une autre dépense n'est de fait que le résultat de considérations politiques quant aux attentes et aux réactions de ses habitants relatives à ces dépenses. 3.5.2.4 Le secteur privé L'appréciation du caractère majeur ou non des inconvénients économiques des alternatives, revient à se poser la question de leur incidence financière pour les entreprises considérées. Or dans une entreprise bien gérée, le chiffre d'affaires et les prix qui le sous-tendent sont par nature au plus haut niveau de ce qu'ils peuvent être. C'est encore plus vrai dans un monde de concurrence libre et ouverte en Europe pour des produits dont le marché dépasse les frontières françaises. Considérer a priori que les prix et le chiffre d'affaires pourront s'ajuster n'est pas possible. Ces indicateurs ne sont d'ailleurs pas les indicateurs de la santé financière d'une entreprise ou d'un secteur d'activité. La variété de la structuration des entreprises, plus ou moins intégrées avec notamment l'existence de filiales de différents périmètres sociaux, conduit à des incidences très différentes d'une augmentation d'une charge d'exploitation, comme celle liée à l'abandon du glyphosate, sur les indicateurs financiers de chaque société. Pour éviter un biais dans l'évaluation de cette incidence, celle-ci doit être prise en compte à la fois tout en amont au plus près de l'utilisation d'herbicide pour la fonction considérée d'élimination de la végétation, et à la fois tout en aval au niveau du résultat économique global de la société. La prédominance de l'impact sur l'amont ou sur l'aval dépend de la structure de l'entreprise et de la part qu'y prend l'utilisation du glyphosate. Aussi, la mission suggère de retenir deux critères : l'augmentation du coût complet de l'utilisation de la méthode alternative non chimique pour la fonction d'élimination de la végétation ; la diminution du résultat d'exploitation ou marge opérationnelle voire de l'excédent brut d'exploitation.
Le dépassement du seuil de tolérance d'un seul d'entre eux établit le caractère majeur de l'incidence économique. À noter que dans les activités de luxe (golf, sport de haut niveau, etc.) l'impact est moindre compte tenu d'un résultat d'exploitation généralement beaucoup plus élevé et une élasticité plus importante des prix, ce qui est aussi, le propre de ces micros-marchés. Mais aucune activité ne se concentre sur le seul luxe. Ainsi toute diminution du résultat d'exploitation liée à cette modification ne sera pas rattrapable au regard de la concurrence pour les secteurs qui y sont soumis. Le résultat sera l'arrêt ou le déplacement de l'activité.
3.5.3. Des alternatives estimées 5 à 10 fois plus chères par les utilisateurs
L'estimation des coûts de techniques alternatives, qu'elles soient chimiques ou non chimiques, est extrêmement difficile, en l'absence justement d'usage à une échelle significative pour les différentes utilisations, sans même considérer qu'il est ou non courant, de ces techniques alternatives. Ce point confirme l'effet économique sur le long terme des meilleures techniques disponibles examiné précédemment.
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En effet, les acteurs rencontrés expriment l'extrême imprécision de toute évaluation, voire leur impossibilité faute d'expérience aujourd'hui, et même leur irréalité matérielle. C'est notamment le cas des techniques mixtes mécaniques et manuelles54 pour lesquels les entreprises spécialisées expriment déjà leur difficulté à trouver de la main d'oeuvre pour ces travaux ingrats, et sûrement leur incapacité à faire face à une demande qui exploserait. D'ores et déjà, elles ont recours à une main d'oeuvre constituée pour l'essentiel de personnel détaché au sens communautaire. Hors le cas de la SNCF dont les surcoûts sont proportionnellement encore plus élevés, compte tenu des enjeux de vitesse pour le désherbage des voies et pistes qui implique de consommer le moins possible de capacité de la voie (sillons) et des enjeux de sécurité au travail sous circulation, l'expression des différents maîtres d'ouvrage et entreprises interrogées par la mission est convergente, même dans l'incertitude. Par rapport à l'emploi de glyphosate, le coût d'une alternative non chimique est estimé en moyenne à 10 fois, voire 20 fois plus cher, et le coût d'une alternative chimique est estimé en moyenne à 5 fois plus cher. La variation autour de la moyenne est estimée de 1 à 2, ce qui montre la grande dispersion des estimations. Certaines méthodes, thermiques notamment, ne sont pas évoquées dans ce paragraphe, car elles sont d'une utilisation trop marginale et le cas échéant seulement complémentaire des techniques précédentes. En tout état de cause, elles resteraient dans une fourchette de coût de 5 à 10 fois plus cher. Ces écarts considérables s'expliquent à travers plusieurs observations. Le glyphosate est systémique, en ce sens que, détruisant les racines, les plantes ne repoussent pas. En conséquence, le nombre de passages annuel est limité, le plus souvent à un seul. Ce n'est pas le cas des autres PPP ni des moyens mécaniques motorisés qui nécessitent 4, voire plus, passages par an. Seul l'arrachage des racines avec des outils manuels présente les mêmes caractéristiques, mais seulement pour des végétaux au système racinaire non traçant. Le glyphosate permet une grande vitesse de mise en oeuvre (typiquement 10 km/h hors cas particulier du ferroviaire), au contraire des méthodes mécaniques, très coûteuses en temps (typiquement le pas de l'homme), et manuelles, considérablement coûteuses en temps (arrachage des racines une à une). Le glyphosate est significativement moins onéreux à l'hectare que les autres PPP disponibles sur le marché qui de plus n'en présentent pas l'efficacité. Contrairement aux méthodes mécaniques, le glyphosate ne nécessite pas d'investissement supplémentaire en matériel souvent très onéreux.
Le cumul de ces considérations, et notamment les deux premières en raison du coût de la main d'oeuvre explique cet écart d'un facteur 10 voire 20, à 5 suivant la méthode alternative envisagée55. La baisse des coûts correspondants est peu probable. D'une part, parce que travail est réalisé manuellement par des salariés. D'autre part, car aujourd'hui, pour le marché des jardins et espaces végétalisés, la mécanisation reste limitée : de nombreux outils manuels sont encore indispensables. En revanche, la probabilité que les coûts augmentent est forte. En effet, aujourd'hui les prix calculés apparaissent exorbitants tant aux yeux des maîtres d'ouvrage qu'à celui des prestataires de service.
54
Ces techniques correspondent à des moyens mécaniques motorisés mais limités, portés le plus souvent, et conduits « à la main », comme les débroussailleuses, rotofils, tondeuses etc. et le plus souvent accompagnés, compte tenu de leur efficacité limitée en ce qu'ils n'atteignent pas les racines des végétaux, d'outils manuels comme les couteaux, binettes, houes, sarcloirs etc. 55 Source UNEP. Fiche d'entretien Désherbage mécanique et manuel
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En conséquence, les clients hésitent à passer commande et ces prestataires peuvent être tentés de commencer à travailler à perte au moins dans un premier temps pour ne pas perdre leurs marchés. Un tel écart de coûts d'un facteur 10 confirme l'absence de toute possibilité économique qu'une méthode alternative non chimique existe face à un usage répandu du glyphosate et soit d'un usage courant, sauf dans le cas exceptionnel de micromarchés où, à l'image de l'agriculture biologique, pourrait exister une frange de consommateurs prêts à payer le surcoût correspondant. Or la mission n'a pas rencontré d'interlocuteurs identifiant de tels micromarchés pour les activités classées en ZNA, sauf d'une certaine manière pour le sport et certaines collectivités. Enfin, un tel écart de coûts d'un facteur 10 traduit également, et même quantifie l'ampleur des inconvénients pratiques liés à la mise en oeuvre d'une méthode alternative non chimique. Cet écart de coût résulte pour l'essentiel d'une augmentation du temps passé, ce qui représente donc une multiplication au moins équivalente de la main d'oeuvre correspondante. À une telle échelle surgit la question de la disponibilité d'une telle main d'oeuvre, de surcroît en un laps de temps aussi court que 18 mois au regard du besoin au printemps 2021. Lors des entretiens menés par la mission, tous les acteurs lui ont fait part de leur inquiétude sur une indisponibilité certaine de cette main d'oeuvre, déjà difficile à recruter, notamment compte tenu de la pénibilité du travail manuel très physique correspondant. En particulier, les représentants des entreprises d'entretien des espaces, contrairement à ce qui est habituellement observé lorsqu'une augmentation du chiffre d'affaires est attendue, s'inquiètent de la perspective de l'abandon du glyphosate, tant au regard de cette question de la main d'oeuvre qu'au regard de perspectives d'une activité en baisse. L'explosion certaine des coûts conduira à un renoncement des maîtres d'ouvrage, renoncement déjà observé par certains interlocuteurs de la mission, clients et fournisseurs.
3.5.4. Quelques écueils en conclusion
Au contraire de l'agriculture avec son modèle économique bien connu par l'administration en fonction de chaque type d'exploitation, ne serait-ce que pour justifier des aides économiques, pour les ZNA, à l'exception des monopoles régulés par l'État comme SNCF Réseau, les sociétés d'autoroutes ou d'ouvrages concédés56 ou RTE, une vision synthétique et quantifiée des conséquences financières d'une interdiction du glyphosate pour le secteur privé n'est pas atteignable sans des analyses détaillées qui sortent du cadre de la présente mission. Mais même si ces éléments étaient accessibles, deux écueils supplémentaires apparaissent. Pour une même utilisation, maintenir ou non l'autorisation des produits contenant du glyphosate, pour des maîtres d'ouvrage variés, sur la base d'un impact financier réparti de façon continue, ce qui est le cas des secteurs considérés, semble impossible au titre du 50.2. Cette continuité peut s'illustrer, par exemple, à travers la diversité des situations des collectivités et des concessions, ou à travers le cas de l'industrie, notamment celle relevant de la réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement. Maintenir ou non l'autorisation, au sein d'une activité, suivant que sur un segment elle relèverait du luxe avec des marges élevées et une faible élasticité au prix (ex. : golf de haut niveau) et que sur un autre s'exercerait une concurrence certaine sur les prix avec des marges faibles et une élasticité importante (ex. : les autres golfs) semble également impossible à justifier.
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Des ouvrages sont aussi concédés par des collectivités locales qui sont alors leurs régulateurs.
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4. LES METHODES ALTERNATIVES EN ZNA
Pour mettre en oeuvre l'article 50.2 du Règlement 1107/2009, il est indispensable de disposer de méthodes non chimiques. Les principales méthodes -curatives et préventives- de désherbage et de maîtrise de la végétation utilisées par les professionnels de l'entretien sont traitées dans ce chapitre. Il ne traite pas de l'usage courant ou non de la méthode selon le secteur économique considéré, décrit dans le chapitre suivant. Toutefois, cette voie réglementaire n'étant pas la seule piste pour réduire l'usage du glyphosate, une troisième partie traite des alternatives chimiques.
4.1. Les méthodes non chimiques curatives
De nombreuses techniques non chimiques existent. Comme toutes méthodes, elles présentent des avantages et des inconvénients ; leur emploi doit être raisonné en fonction d'objectif à atteindre, de la configuration des lieux et du budget disponible. Elles peuvent se combiner entre elles. D'autres méthodes non encore développées sont de l'ordre de méthodes de rupture. Le désherbage électrique usité au Brésil et en cours de développement en Europe sera présenté en chapitre 6.
4.1.1. Traitement manuel et mécanique
Le traitement manuel consiste à éliminer les adventices par arrachage à la main ou à l'aide d'un outil (binette ou matériel porté). C'est un travail pénible et laborieux peu adapté aux grandes surfaces. Le recours à un traitement mécanique par des engins tractés offre des possibilités d'intervention plus importantes si les lieux sont accessibles. Mais ce traitement reste superficiel. Hors arrachage, voire un binage si la configuration de l'objet technique s'y prête, aucun de ces traitements n'éradique le système racinaire qui produit rapidement de nouvelles parties aériennes. Il nécessite donc un nombre de passes supérieur d'un facteur 4 à 5 par rapport à l'emploi de glyphosate. Le traitement mécanique n'est donc pas adapté à l'élimination des végétaux dans les objets techniques non spécialement conçus pour cela. Il est en revanche adapté pour les lieux déjà volontairement végétalisés.
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Tableau 5: solutions manuelles et mécaniques (source UNEP)
Le tableau ci-dessus communiqué par l'Union Nationale des Entreprises du Paysage (UNEP) précise le détail des méthodes manuelles et mécaniques déployées sur les pelouses, le sol nu avant plantation, la voirie et les allées gravillonnées. Leurs avantages sont décrits, mais aussi leurs inconvénients, ce qui permet de mesurer les limites des méthodes alternatives. En revanche, la mission ne peut pas entériner dans ce tableau l'emploi du binage dans le cas des voiries, dans la mesure où il s'agit sauf exception de surfaces dures. En effet, le binage est défini selon la mission par l'ouverture de la surface du sol pour en extirper les mauvaises herbes. La pratique est plutôt d'araser le sol pour trancher au ras les végétaux. L'outil ne pénètre pas le matériau ou juste sa surface pour ne pas le détériorer (enrobés) ou le déstabiliser (compaction des graves). Il convient d'ajouter à ce tableau un inconvénient cité par les interlocuteurs de la mission, à savoir la fréquence de passage plus élevée du désherbage mécanique, car c'est le propre des façons 57 superficielles. L'Annexe 6 présentant des données complémentaires sur les méthodes alternatives non chimiques montre des appréciations sur ces fréquences d'intervention.
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Opération qui a pour but le travail de la terre
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Pour les routes, le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement58 (CEREMA), propose un classement un peu différent avec du nettoyage-balayage et du fauchage, technique la plus utilisée, en particulier parce que les abords des routes sont largement végétalisés et donc alors traités par fauchage59.
Tableau 6 : domaine d'application des différentes méthodes alternatives à l'utilisation des PPP sur les dépendances routières. CEREMA
La loi Labbé a démultiplié les interventions manuelles et secondairement mécaniques. Le personnel est exposé à des risques quantitativement plus importants. Risque de troubles musculosquelettiques (TMS) : ces techniques sont physiquement plus éprouvantes que le passage avec un produit phytopharmaceutique, avec l'arrachage manuel, la manipulation de machines à brosse de 70 kg, l'exposition aux vibrations de l'appareil, posture pour guider la machine ; Risques psychosociaux : manque de considération et incivilité des citoyens lors du travail à pied dans les villes ; Risques de sécurité : accidents liés au temps de travail, nouveau ou augmenté, sur la chaussée ; nouveaux risques de contamination (déjections, huile de vidange...) à prendre en compte.
58 59
Établissement public rattaché aux ministères chargés de l'écologie et de la cohésion des territoires Techniques alternatives à l'usage des produits phytosanitaires. Synthèse des types de gestions alternatives appliquées aux infrastructures du réseau routier national Juin 2016.
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Les entreprises du paysage éprouvent d'importantes difficultés à recruter. SNCF et Réseau de transport d'électricité (RTE) relatent également la difficulté à conclure des marchés, traditionnellement à obligation de résultat, les entreprises ne sachant pas estimer les facteurs de coûts de ces nouvelles prestations. Pour un même résultat (isoréférentiel) qu'avec le glyphosate, ces techniques manuelles sont jusqu'à 20 fois plus onéreuses et les techniques mécaniques le sont de 5 à 10 fois. Le nombre de passages requis est multiplié par 4 à 8 60 avec des durées multipliées pour chaque passage : par 5 en manuel et par 2 à 5 par voie mécanique. Lorsque les moyens internes (nombre et compétence de la main d'oeuvre) ne sont plus disponibles au regard du changement de l'ordre de grandeur des heures de travail requises, une externalisation nécessite d'augmenter les budgets d'entretien. Ces derniers sont souvent insuffisants comme cela a été établi sur les routes nationales. Pour l'entretien du réseau national routier, le CEREMA a chiffré quelques méthodes, mais sans procéder à la comparaison entre la méthode chimique et non chimique.
4.1.2. Traitement thermique
Les végétaux sont éliminés en provoquant un choc thermique de leurs parties aériennes ; les cellules végétales éclatent, mais les racines restent intactes contrairement au glyphosate. Le choc thermique entraîne aussi, une levée de la dormance de certaines graines. Ces inconvénients techniques expliquent l'augmentation du nombre de passages pour obtenir un résultat satisfaisant. Quatre techniques existent sur le marché (Tableau 7). Selon UNEP, le désherbage thermique à flamme notamment pulsée est assez couramment utilisé, mais il ne peut l'être que sur certaines surfaces qui peuvent y résister ; le désherbage à infrarouge et celui à eau sont en réduction. Le risque incendie exclut les interventions thermiques à flamme et oriente vers le désherbage vapeur, mais on observe en même temps que ce dernier a quasiment disparu. Ces systèmes sont tous lents, gros consommateurs d'énergie fossile et émetteurs de gaz à effet de serre. Les lances ou les rampes nécessitent un temps d'exposition à la chaleur minimum pour agir et une intervention humaine pour les placer avec précision.
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Source : UNEP
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Tableau 7: comparatifs solutions thermiques. Plante et Cité
Certaines structures supportent mal leur passage (les flammes sont préjudiciables aux composants plastiques, l'humidité peut endommager les installations de sécurité SNCF) ; un certain nombre de sites ICPE ne sont pas accessibles à du matériel thermique pour des motifs de sécurité, et la quasi - totalité dans l'industrie chimique, pétrolière, gazière etc. Là encore, pour un résultat identique qu'avec le glyphosate, ces techniques sont de 5 à 10 fois plus onéreuses. Le nombre de passages est aussi multiplié par 3 à 4 avec des durées augmentées pour chaque passage de 2 à 3. Il tient aussi à l'achat de matériel plus onéreux. Plante et Cité a réalisé une étude entre le coût du manuel, du thermique (brûleur) et du chimique qui révèle une nette augmentation du coût d'entretien lorsque l'on se passe de chimique et une grande variabilité dans les coûts annuels.
L'étude Compamed ZNA (COMparaison des MEthodes de Désherbage utilisées en zones non agricoles) présente l'évaluation globale des techniques de désherbage curatif. De 2010 à 2013, une enquête, un observatoire national et plusieurs expérimentations ont fourni les données nécessaires pour évaluer leur efficacité et leurs impacts environnementaux à partir d'une Analyse du Cycle de Vie (ACV). Les résultats s'adressent aux gestionnaires d'espaces verts des collectivités territoriales, aux professionnels du paysage et aux gestionnaires d'infrastructures de transport et de sites industriels.
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Itinéraires : imperméable contraignant (35 m linéaires) Perméable contraignant (20m²)
Nombre de passages
Temps par passage
Temps total
Passages
Ratio/ référence chimique
Durée en minutes
Ratio/ référence chimique
Durée en minutes
Ratio/ référence chimique
Chimique Mécanique Binette Thermique eau chaude Chimique Mécanique Binette Thermique eau chaude
7,7 20,3 15,7 17,3 8 15 18 12
1 2,6 2,0 2,2 1 1,875 2,25 1,5
5,1 90,2 123,7 58 9,2 18 206 91
1 18 24 11 1 2 22 10
39 1831 1942 1003 8 29 403 119
1 47 49 26 1 4 50 15
Tableau 8 : calcul du temps de traitement sur surfaces imperméables/perméables à partir de données d'étude Compamed ZNA61
Dans le tableau ci-dessus, on observe une grande variation des temps de traitement selon les surfaces et les méthodes. Or, ce sont bien les temps de traitement à travers la mobilisation de ressources humaines qui gouvernent au principal les coûts.
4.2. Méthodes non chimiques préventives
Pour lutter contre les mauvaises herbes, une autre solution consiste à réaménager les surfaces pour un entretien sans désherbage de manière à limiter la végétation future ou au contraire intégrer le développement de plantes dans la conception. Le paillage
Minéraux, organiques ou sous forme de films, les paillages peuvent présenter de nombreux autres intérêts (esthétiques, économie d'eau ou entretien de la microfaune du sol pour les paillages organiques). Sur le réseau routier, le paillage est une solution ponctuellement utilisée. Mais il ne peut se pratiquer que sur des surfaces engazonnées et conçues comme telles, par exemple, sous les glissières de sécurité implantées sur des bas-côtés engazonnés. Mais si le paillage retarde l'apparition de végétation indésirable, il ne l'empêche pas. Cette végétation réapparaît au bout de 3 à 5 ans et nécessite un gros travail de reprise.
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Evaluation du nombre d'interventions sur une année de désherbage. Essais surfaces perméables/imperméables 2013
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La minéralisation des surfaces/ pontage des fissures sur le revêtement
Ces techniques ont pour objectif de supprimer la surface colonisable et de ne pas laisser d'interstices profitables au développement des adventices. Elles ont un impact paysagé négatif non négligeable en se substituant à l'espace végétalisé recherché à l'origine. La minéralisation représente un coût supplémentaire, car elle correspond à une reconception de tout ou partie de l'infrastructure. Elle ne peut se faire que très progressivement, au rythme des programmes de grosses réparations et des budgets. Le pontage des fissures est déjà une pratique nécessaire. Mais les coulis vieillissent de manière différenciée, notamment suivant l'intensité des usages et les conditions locales. Leur reprise ne peut se faire au fur et à mesure de l'apparition des fissures ce qui rendrait de fait l'infrastructure indisponible. Ainsi ce pontage n'est programmé qu'en fonction d'une dégradation significative et d'ensemble sur tout ou partie de l'infrastructure, ce qui peut prendre plusieurs années. Le traitement des adventices doit donc se faire régulièrement dans l'intervalle, ne serait-ce que pour prévenir une dégradation plus rapide encore consécutive à la présence de ces végétaux. Les plantes couvre-sol, l'enherbement choisi et la tonte de la végétation spontanée
Dans cette configuration, le gestionnaire change de référentiel en acceptant et favorisant la présence d'une végétation qu'il maîtrise : une végétation choisie qui ne laissera pas de place pour le développement d'adventices ou une végétation spontanée maintenue à une hauteur raisonnable par une tonte régulière. Le respect des exigences réglementaires de sécurité est pour autant une limite. Concrètement, ce changement de référentiel conduit à une reconception des espaces et donc là encore à un nouvel investissement qui ne peut être que très progressif. o L'usage de plantes couvre-sol est courant dans les massifs. Certaines constructions de monuments historiques sont protégées de la sorte avec un enjeu esthétique (les arases des remparts) ; L'enherbement peut être une solution dans certains cas particuliers. Mais se pose la question de la praticabilité en cas de pluie, par exemple, dans les cimetières compte tenu des cheminements. Il peut être spontané, sans ou avec apport de substrat, mais nécessite la mobilisation de moyens pour l'entretenir (tonte, fauche). Quelques cas particuliers sont étudiés. La SNCF teste un ensemencement choisi en accompagnant un doctorant ; RTE a lancé un marché cadre d'étude avec des écologues pour choisir les semences selon les régions. Ces techniques ne sont pas encore d'un usage courant dans leur domaine spécifique d'activité ; La hauteur de la végétation est réduite par l'usage de rotofil, de robots de tonte ou encore la mise en place temporaire de moutons (écopâturage) : Le rotofil est une méthode courante, mais longue et avec une forte pénibilité pour le personnel ; il suppose de plus des surfaces exemptes de matières susceptibles d'être projetées, graviers notamment. Les robots de tonte se sont développés sur le marché des pelouses, mais le travail à fournir dans les zones industrielles, le long des réseaux de communication n'est pas identique. La société Vitirover cherche à développer une solution en viticulture et dans d'autres secteurs ZNA en particulier avec les entreprises de fourniture d'énergie éolienne (BayWa en Allemagne, RWA en Autriche). La SNCF conduit une expérimentation sur des voies à grande vitesse.
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Les moutons ont pour inconvénient de salir les parcelles ; le personnel de l'entreprise s'interroge également sur les risques et inconvénients qu'ils peuvent représenter (RTE). Leur présence peut nécessiter une double clôture pour éviter l'introduction des animaux sur les voies de circulation. Malgré les apparences, c'est une solution qui implique une intendance lourde, et qui n'est pas à l'échelle des surfaces à traiter ni des conditions à remplir pour ce traitement.
4.3. Les solutions chimiques ou biologiques
4.3.1. Autres herbicides chimiques
Il existe sur le marché des produits phytopharmaceutiques des herbicides autres que le glyphosate autorisés pour les zones non agricoles. Début 2019, 25 produits sans glyphosate ont une AMM pour une action herbicide autorisée en ZNA professionnelle. Mais aucun n'est à la fois un herbicide systémique62 et un désherbant total.
Tableau 9 : liste des produits herbicides sans glyphosate utilisables en ZNA à usage professionnel (extraction au 9 avril 2019)
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Parmi les autres herbicides autorisés pour des usages ZNA, certains peuvent avoir une action systémique comme le 2,4 D, le tryclopyr, le fluroxypir. Cependant ces derniers ne sont pas des herbicides totaux.
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Certains, en particulier les sulfonylurées, ont déjà sélectionné des adventices résistantes en France. Leur utilisation massive en solution de remplacement du glyphosate pourrait aggraver ces effets négatifs, tout en sachant que le glyphosate lui-même a déjà fait émerger du ray-grass résistant en vigne. Les produits à base d'acide pélargonique nécessitent des quantités de spécialité commerciale à l'hectare, comprises entre 16 et 1000 l/ha pour les usages professionnels contre 5 à 15 l/ ha pour le glyphosate, suivant notamment les concentrations du principe actif. Le glyphosate doit être utilisé peu dilué. Ce point a évidemment une incidence sur les autres intrants (carburant, eau, matériel...).
4.3.2. Les herbicides chimiques de biocontrôle
La France est le seul État membre à avoir défini par la voie réglementaire la notion de produits de biocontrôle63. Leur spécificité est liée à leur caractère naturel ou leur mode d'action reposant sur des mécanismes naturels et exempts de certains classements toxicologiques et écotoxicologiques. Une présentation plus détaillée des produits de biocontrôle est donnée en Annexe 4. La DGAL publie mensuellement la liste officielle des produits de biocontrôle. Une vingtaine de spécialités ont un usage désherbage professionnel. Ce sont des préparations contenant de l'acide pélargonique, acétique ou caprylique. Même si ce sont des désherbants totaux, aucun n'a d'action systémique. Le délai de rentrée pour l'acide pélargonique est de 24 h ou 48 h.
4.3.3. Produits à faible risque
Le règlement CE n° 1107/2009 les définit : 1 - les substances à faible risque dans l'article 22 : «Par dérogation à l'article 5, une substance active satisfaisant aux critères prévus à l'article 4 est approuvée pour une période n'excédant pas quinze ans, si elle est considérée comme une substance active à faible risque et s'il est prévisible que les produits phytopharmaceutiques contenant cette substance ne présenteront qu'un faible risque pour la santé humaine, la santé animale et l'environnement, conformément à l'article 47, paragraphe 1.» 2 les produits phytopharmaceutiques à faible risque dans l'article 47 : «Lorsque toutes les substances actives contenues dans un produit phytopharmaceutique sont des substances actives à faible risque telles que visées à l'article 22, ce produit est autorisé comme produit phytopharmaceutique à faible risque à condition ...» Les produits à faible risque sont présentés plus en détail dans l'Annexe 4.
Les produits à faible risque au sens du règlement 1107/2009 sont des produits de lutte biologique, des stimulateurs de défenses naturelles et du phosphate ferrique. Aucun herbicide ne figure dans cette catégorie.
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Article L. 253-6 du code rural et de la pêche maritime. Les produits phytopharmaceutiques de biocontrôle sont des produits phytopharmaceutiques. Ils sont autorisés à l'issue d'une évaluation complète des risques pour la santé humaine, la santé animale et l'environnement et conforme aux exigences européennes.
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4.3.4. Un effet report prévisible
Compte tenu des conséquences économiques et des inconvénients pratiques des méthodes non chimiques, l'interdiction des produits contenant du glyphosate conduira probablement à un report, sur l'utilisation d'autres substances autorisées. Parmi celles-ci, on peut d'ores et déjà, citer l'acide pélargonique, qui associé à des sulfonylurées font l'objet de tests poussés par la SNCF. Or, déjà, en 2015, une association environnementale avait alerté sur le recours à l'acide pélargonique en remplacement d'autres herbicides64, en raison du contenu de la fiche de données de sécurité et de données écotoxicologiques.
Des pratiques non autorisées sont signalées auprès de la mission chez les particuliers et dans des collectivités territoriales telles qu'un usage intensif de vinaigre65, de sels de déneigement, etc. En conséquence, l'impact de ces reports mérite d'être évalué avec soin avant toute décision, car quand bien même, il existerait une méthode non chimique, usuelle et dont les inconvénients économiques et techniques seraient suffisamment limités pour faire usage de l'article 50.2 du règlement CE 1107/2009, les utilisateurs devraient eu égard au coût préférer la méthode chimique. Or le règlement ne fournit aucun moyen pour empêcher ces reports, sauf à vouloir interdire ces autres substances à travers une nouvelle procédure. Pour ces motifs, le point de vigilance suivant est formulé. Être vigilant sur l'impact des reports vers d'autres herbicides chimiques autorisés, en raison de leurs spécificités et des volumes appelés à augmenter.
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https://deuxsevres.eelv.fr/19/les-nouveaux-desherbants-bio-un-miroir-aux-alouettes/. Consulté le 2 septembre 2019. Le vinaigre est approuvé en tant que substance de base (et non substance active) depuis juillet 2015 par le règlement 2015/1108, pour des fonctions bactéricide et fongicide (traitement de semences et désinfection outils), puis herbicide dans des conditions restreintes. Le rapport SANCO/12896/2014 rev3 du 13 décembre 2018 précise que les utilisations autorisées portent uniquement sur les plantes médicinales, aromatiques ou plantes à parfum (PPAMC) avant la levée de la culture, en raison d'un risque de phytotoxicité sur jeunes plantes. Il n'est donc pas possible d'utiliser le vinaigre comme herbicide en ZNA.
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5. CARTOGRAPHIE DES UTILISATIONS DU GLYPHOSATE EN ZNA ET DES
ALTERNATIVES NON CHIMIQUES
La mission a établi cette cartographie à partir des entretiens menés avec différents maîtres d'ouvrage ou leur représentant À l'intérieur de cette cartographie, la mission n'a pas cru devoir segmenter plus avant les utilisations du glyphosate. En effet, outre que les quantités en jeu sont en elles-mêmes déjà très faibles, elles sont mal connues dans le détail comme pointé précédemment. Toute approche encore plus fine serait illusoire, alors déjà que le glyphosate n'est utilisé que sur les objets techniques où il est nécessaire, sous réserve d'optimisation. La mission souligne que ces maîtres d'ouvrages, qui s'étaient le plus souvent engagés dans des démarches volontaires de réduction de l'usage des pesticides à travers notamment les plans ÉCOPHYTO et assimilés, ont tous découvert lors des entretiens le changement de méthode qu'impliquait le passage par l'article 50.2. du règlement CE 1107/2009. D'une démarche progressive dans le temps, basée sur les meilleurs efforts, ils pourraient être confrontés à une démarche d'interdiction pure et simple applicable dès 2021. Il n'est encore pas certain que les acteurs en aient mesuré toutes les conséquences concrètes pour leurs activités. Par ailleurs, la méthode même de l'article 50.2. est apparue peu lisible pour les interlocuteurs de la mission, puisque nécessitant pour son instruction des évaluations menées sur la base de méthodes non chimiques c'est-à-dire de fait mécaniques et manuelles, compte tenu du caractère marginal des autres méthodes, thermiques notamment. Ces méthodes semblaient parfaitement irréalistes aux yeux de ces maîtres d'ouvrages et par conséquent n'ont jamais été sérieusement envisagées. Audelà de ce constat, il peut en être aussi conclu que les décideurs se tourneront soit vers des méthodes alternatives chimiques en raison de leurs moindres coûts, soit vers de la reconception lorsque cela est possible. Cette solution est bien une alternative mais elle sort alors du cadre du 50.2. Enfin, même si l'absence de méthode alternative d'usage courant au titre de l'article 50.2. est identifiée en ZNA, la mission apportera dans la mesure du possible des éléments relatifs tant aux inconvénients pratiques que économiques majeurs au titre du 50.1.. Enfin, des pistes concrètes de progrès (réduction significative des quantités, réaménagements par exemple) seront le cas échéant mentionnées. S'agissant des Outre-mer, les spécificités floristiques et climatologiques rendent la dépendance aux produits phytopharmaceutiques, et au glyphosate en particulier, encore plus prégnante. Les analyses de la mission s'y appliqueront d'autant plus.
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5.1. Le réseau ferroviaire
SNCF Réseau66 exploite en quasi-totalité le réseau ferroviaire français 67 soit de 30000 km de lignes composées d'une ou plusieurs voies. Ces lignes représentent 61000 km de voies, dont 49000 km de voies principales et 12000 km de voies de service (voies de garage, de triage, etc.). Le patrimoine foncier à entretenir au titre de la végétation est de 95000 ha, dont 34000 ha de voies et de pistes latérales à ces voies. La consommation d'herbicides représente suivant les années environ 63 t pour un montant d'environ 4 M/an. Ceci correspond à 53 t d'herbicides totaux, dont 45 t de glyphosate. Le dosage de 1,8 kg/ha appliqué par SNCF Réseau respecte la dose maximale fixée par l'AMM. Il est plus élevé qu'en agriculture, car le terrain et le type de végétation rencontrée ne sont pas identiques. Le traitement de la végétation (désherbage, suppression des arbres à risque pour la circulation, etc.) représente au total 120 M à 130 M/an sur les voies, pistes et sur les abords, variable en fonction de l'année (besoins d'intervention, gestion des stocks, etc.). Le désherbage des voies et des pistes représente 28,7 M, dont 26,2 M pour le désherbage chimique (y compris le glyphosate) et 2,4 M pour le cas échéant un rattrapage mécanique. Ce traitement est réalisé avec des trains désherbeurs spécialement conçus à cet effet qui pulvérisent le produit sur les voies et les pistes dans le respect des AMM. Certains de ces trains dits à grand rendement peuvent rouler jusqu'à 60 km/h, ce qui permet, outre une grande productivité de l'activité, de ne consommer qu'un minimum de sillons, loués aux entreprises ferroviaires et qui fournissent les recettes de SNCF Réseau.
5.1.1. Les exigences du référentiel
Le référentiel actuel d'entretien exige une absence de végétation sur les voies et sur les pistes. Il est identique pour tous les pays européens regroupés au sein de la Communauté européenne du rail (CER). Il a été conçu pour répondre aux exigences suivantes : Sécurité des circulations : en effet, la voie ferrée est largement instrumentée et la sensibilité des capteurs implique l'absence de végétation. Par exemple, le contrôle des voies par mesures laser est perturbé lorsque la végétation s'installe ; Pérennité et sécurité de l'infrastructure : la végétation, de par le colmatage du drainage, a des effets sur le ballast et entraîne la déformation des voies qui y sont posées. Par ailleurs, les ouvrages d'art doivent également être exempts de végétation, celle-ci entravant la circulation de l'eau et entraînant des déformations ; Sécurité des personnels qui circulent sur les pistes et qui interviennent à partir de cellesci pour la maintenance (les pistes permettent également l'évacuation des voyageurs en cas de nécessité). Elles doivent être à tout moment praticables aisément, en particulier prévenir tout risque de chute et de fait ressembler à un sol nu ; Sécurité incendie : la circulation des trains et leur freinage engendrent des étincelles qui enflamment la végétation l'été.
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SNCF Réseau : SNCF Réseau est l'un des trois établissements publics à caractère industriel et commercial composant le groupe SNCF. L'entreprise est chargée de la maintenance et de l'entretien du réseau ferré, de la construction de nouvelles lignes ferroviaires et gère la circulation de tous les trains empruntant le réseau ferré national Les exceptions sont notamment les Lignes à grande vitesse réalisées à travers un partenariat public-privé, le tunnel sous la Manche, certaines lignes secondaires ou touristiques, les chemins de fer Corse, la ligne Nice-Digne, les voies ferrées portuaires, les voies ferrées des installations industrielles et leurs embranchements.
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Ce référentiel est atteint avec l'emploi de glyphosate, molécule la plus efficace car avec un effet herbicide total et systémique et parmi les moins chers des désherbants. Il est inatteignable à ce jour avec une autre substance active. Mais ce référentiel a également d'autres exigences, par exemple, sur les talus :, Leur stabilité doit être assurée : ils doivent donc être dotés d'une couverture de végétation adaptée qui à la fois les stabilise, mais dont le développement ne conduit ni à leur ruine, ni n'est source d'inconvénients pour les voies et pistes ; Ils doivent éviter de s'enflammer au contact d'étincelles, directement ou via de la végétation sur les pistes ; Le développement des arbres doit être maîtrisé de telle sorte que leur chute ne puisse provoquer d'accidents de circulation, et que la chute de leur feuille en automne n'empêche les trains de circuler (on rappelle que le contact fer/fer entre les roues et la voie de chemin de fer est très limité et sujet au glissement).
Du fauchage, avec des débroussaillants et ponctuellement du glyphosate pour la dévitalisation des souches permettent le respect de ces exigences. Dans cet exemple, on voit bien que le glyphosate n'est pas une alternative au fauchage et réciproquement.
5.1.2. Un plan de substitution par d'autres herbicides chimiques
Depuis les années 1920/1930, le désherbage est chimique. Concomitamment, l'augmentation des exigences techniques sur les voies, nécessaires pour permettre l'augmentation des performances tout en garantissant la sécurité, a conduit au développement de l'utilisation de méthodes chimiques. Face aux annonces sur l'interdiction à terme du glyphosate, SNCF Réseau a mis en place un programme de recherche de solutions par d'autres herbicides, mais qui n'ont pas encore fait l'objet d'expérimentation sur une grande échelle. Suite à une expérimentation en 2018 sur quelques centaines de mètres qui s'est montrée encourageante, un essai a été conduit en 2019 sur 6 x 20 km dans différentes régions avec un mélange d'acide pélargonique (produit de biocontrôle) et de flazasulfuron. Les résultats ne sont pas encore évalués. Néanmoins, par la force des choses, ces expérimentations ont été conduites au cours de deux années particulièrement sèches et donc plutôt favorables à de bons résultats. Si cette méthode s'avérait concluante, ce changement de traitement entraînerait une modification substantielle des trains désherbeurs et nécessiterait un appel d'offres pour l'acquisition de nouveau matériel. En effet, l'acide pélargonique est un acide gras, et les pompes des trains désherbeurs ne sont pas conçues pour un tel produit. SNCF Réseau doit simultanément continuer à mobiliser ses trains désherbeurs actuels et se doter de modules nouveaux adaptés. Ceux-ci ne pourront pas être opérationnels dans le meilleur des cas avant la campagne de 2021. SNCF Réseau est donc confronté à un double risque, en cas d'interdiction du glyphosate applicable dès 2021, à savoir un risque industriel et un risque de calendrier, même si ces deux risques se recoupent. Les points critiques sont les suivants : Des résultats d'essais insatisfaisants ou réalisés avec des conditions météorologiques par trop favorables (ce qui est déjà le cas de l'année 2019) ;
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De nouveaux trains désherbeurs difficiles à mettre au point, voire impossibles et/ou un retard dans leur fabrication et leur déploiement sur l'ensemble du réseau ; La maîtrise de la détection automatique des adventices, puisque l'acide pélargonique est utilisable uniquement par «tache» de mauvaises herbes ; La disponibilité des quantités nécessaires d'acide pélargonique (fabrication à partir de la récolte de colza 2020 sous réserve d'une anticipation de commande à juin de cette même année) et de flazasulfuron.
Les pistes étant l'élément le plus sensible pour le développement de la végétation indésirable, ce seront les agents de SNCF Réseau qui feront face au risque correspondant en tout premier lieu. Une interdiction administrative dès 2020 rendrait tout retour en arrière problématique pour la campagne 2021, alors même que les trains désherbeurs de glyphosate sont toujours disponibles. Enfin les caractéristiques mêmes du flazasulfuron exposent à un risque avéré de sélection d'une végétation résistante qui pourrait devenir impossible à contrôler avec des conséquences industrielles majeures. Un tel risque ne peut être évalué à un premier niveau avant des essais significatifs sur une période d'au moins trois ans. Ces contingences rendent ce projet très incertain pour 2021 et exposerait durablement SNCF Réseau à un risque industriel.
Par ailleurs, le coût et les limites de cette alternative chimique qui nécessiterait au moins 2 passages par an, à comparer à un seul passage général complété le cas échéant par une opération de rattrapage ponctuel pour le glyphosate, a conduit SNCF Réseau à examiner un éventuel référentiel révisé. Il accepterait : une emprise de végétation de l'ordre de 5 % de la surface sur les voies principales (valeur limite par rapport à l'humidité et à la déformation engendrée) ; une hauteur de 10 cm de végétation sur les pistes ; une hauteur de végétation limitée au champignon du rail (10 cm) sur les voies de service et les voies sans voyageurs à petite vitesse, cette végétation étant choisie et ensemencée à cet effet.
Ces standards sont toujours à l'étude. SNCF Réseau ne les a pas validés à ce jour.
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5.1.3. Des solutions non chimiques irréalistes à l'échelle du réseau
Pour SNCF Réseau, un traitement mécanique, voire thermique, est irréaliste à l'échelle du réseau : au regard des risques pour les agents, de la pénibilité du travail et de la mobilisation du personnel nécessaire, même en ayant recours à des prestataires de service. Le pic de main d'oeuvre nécessaire a lieu d'avril à septembre. SNCF Réseau souligne la difficulté pour leur prestataire à disposer de la main d'oeuvre nécessaire ponctuellement même actuellement pour du désherbage manuel. En Allemagne, pour la Deutsche Bahn Netz68 cette main d'oeuvre ponctuelle vient des pays de l'Est, la Roumanie essentiellement. En France, les travaux de désherbage sont très souvent réalisés avec des travailleurs détachés. vis-à-vis de l'exploitation. En effet, le désherbage des voies et pistes ne doit pas engager la capacité à faire passer des trains, c'est-à-dire les sillons qui à ce titre fournissent les recettes de SNCF Réseau. C'est la raison pour laquelle des trains désherbeurs à grand rendement qui peuvent rouler jusqu'à 60 km/h sont employés. Toute autre méthode mécanique doit se faire sous circulation, c'est-à-dire entre le passage des trains. Outre un temps et des moyens humains considérables, cela multiplierait d'autant le risque d'accident pour les agents.
Aujourd'hui, SNCF Réseau traite les 1000 km de ZNT eau (qui correspondent à 22000 coupures courtes pour les cours d'eau) au coup par coup sur alerte après surveillance, au rotofil pour les pistes et à la main pour les voies. Leur traitement coûte environ 2 M/an. De fait, le référentiel correspondant est déjà dégradé sur ces coupures, et l'intervention n'est possible que parce que ce sont des zones courtes en pointillé qui n'engagent pas trop de sillons. Cette solution n'est évidemment pas généralisable à l'ensemble du réseau. De manière analogue, des solutions de reprise de l'infrastructure comme des géotextiles ne sont pas à l'échelle. Outre la limite de leur efficacité dans le temps et les difficultés considérables qu'ils poseraient dans leur mise en oeuvre (à savoir leur enlèvement par les suites rapides de trains-usines spécialisés), leur pose ne peut s'effectuer qu'à l'occasion des travaux de régénération, lesquels représentent seulement 1000 km par an sur un patrimoine de 61000 km de voies.
5.1.4. Évaluation financière
5.1.4.1 Évaluation des coûts des solutions alternatives L'évaluation menée sous la responsabilité de SNCF Réseau en 2017, a permis d'identifier et de chiffrer les différentes alternatives, en fonction des objets techniques auxquels elles pouvaient s'appliquer. Elle rassemblait en synthèse les solutions les plus économiques, en particulier les solutions de traitement par d'autres produits chimiques. À la demande de la mission, la SNCF a repris également les chiffres correspondant seulement aux alternatives non chimiques conformément aux exigences de l'article 50.2. Il en ressort une étude détaillée avec les limites imposées par l'appréciation des coûts de solutions non validées industriellement et pour certaines irréalistes. Elle ne prend en compte que les coûts directs69, en valeur 2017 :
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Équivalent de SNCF Réseau en Allemagne Selon SNCF Réseau, ses résultats sont cohérents avec ceux des autres gestionnaires d'infrastructure de la CER.
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le coût actuel du désherbage des voies et pistes avec du glyphosate se monte à 29 M/an ; le coût d'une solution mécanique à standard constant se monterait à 1220 M/an. Il est à noter que ce serait la référence à prendre en compte au titre de l'article 50 du règlement CE 1107/2009. Il représente un facteur 42 par rapport à la situation actuelle, supérieur au facteur 10 mentionné au paragraphe 4.1.1. et qui s'explique par les contraintes propres considérables du ferroviaire ; le coût d'une solution de substitution chimique à standard constant se monterait à 472 M/an. Il représente un facteur 16 par rapport à la situation actuelle ; le coût d'une solution de substitution chimique à standards révisés se monterait à 274 M/an. Il représente un facteur 9 par rapport à la situation actuelle. 5.1.4.2 Éléments financiers pour SNCF Réseau
Au regard de la situation singulière de SNCF Réseau, de son monopole, de ses recettes, et de son mode de régulation par l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (ARAFER), il est seulement possible pour la mission de rapprocher les coûts mentionnés ci-dessus de quelques éléments des comptes de SNCF Réseau, et notamment ses recettes. Leur marge d'augmentation est extrêmement limitée et repose soit sur l'augmentation de la redevance de circulation et/ou de la redevance de marché qui correspondent à des recettes commerciales, soit de la redevance d'accès qui correspond de fait à une subvention. Une autre piste est l'augmentation de la productivité. Au titre des directives européennes, une augmentation de la redevance de circulation et/ou de la redevance de marché ne peut être imposée que si le marché s'y prête. Ces augmentations tarifaires doivent être réparties à due proportion des dépenses relatives aux types de voies concernées, LGV ou lignes classiques : S'agissant des péages des services librement organisés (SLO) et qui correspondent de fait aux trains à grande vitesse (TGV), le montant perçu est d'environ 2000 M/an. Or dès 2021, ces services seront ouverts à la concurrence et plusieurs entreprises ferroviaires européennes se préparent à faire rouler des trains en France, tant sur lignes à grande vitesse (LGV) que sur lignes classiques. L'ARAFER estime que tant la SNCF que les entreprises concurrentes ne pourraient faire face à des augmentations. Aussi l'ARAFER, constatant de fait les limites atteintes pour les TGV, et cette ouverture à la concurrence, maintient-elle les péages en euros constants. Il en est de même s'agissant des péages des services conventionnés (essentiellement avec les régions) alors qu'une augmentation de 2,4 % avait été demandée.
La redevance d'accès d'un montant d'environ 2000 M est de fait une subvention de l'État et apparaît comme la seule autre variable d'ajustement. S'agissant de l'équation financière de SNCF Réseau, le résultat d'exploitation est de 517 M, le résultat financier est négatif à hauteur de 1484 M et le résultat courant est donc négatif de 967 M. Le service de la dette représente 1300 M.
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Mais les résultats comptables de SNCF Réseau sont conventionnels. En effet, le fait que les redevances de l'État ne sont pas affectées à la dette ne permet pas de faire apparaître un résultat d'exploitation qui soit significatif de la réalité opérationnelle de la gestion. Seule la reconstruction d'un coût normatif de production, et à partir de celui-ci, d'un coût moyen pondéré du capital (CMPC) qui correspond à la rémunération attendue par les financeurs d'une entreprise, à savoir les actionnaires et les banquiers, permettrait de faire apparaître un résultat d'exploitation réellement significatif. Surtout, la trajectoire financière de SNCF Réseau est maintenant encadrée par l'article L. 2111-101 du code des transports qui définit un ratio entre sa dette financière nette et sa marge opérationnelle. Ce ratio ne peut dépasser une limite fixée par décret et le tout constitue ce que l'on baptise la « règle d'or ». Le surcoût lié à toute solution alternative au glyphosate qui pèse sur l'exploitation réduira d'autant la marge opérationnelle et augmentera à due proportion ce ratio. Cela aura pour effet une limitation supplémentaire des investissements de SNCF Réseau dont il convient qu'en soient évaluées toutes les conséquences. Enfin, les gains de productivité sont déjà préemptés sur les cinq années du contrat d'objectif et de performance qui encadre la trajectoire de SNCF Réseau.
5.1.5. Points de vigilance et questions collatérales à traiter
En cas de maintien des AMM pour les produits contenant du glyphosate utilisés sur les voies ferrées, il conviendrait de s'interroger sur la pertinence de la poursuite de la démarche volontariste de substitution du glyphosate par SNCF Réseau, compte tenu des conséquences listées ci-dessus. En effet, en cas de basculement sur d'autres produits chimiques, la mission rappelle que les interrogations qui pèsent sur les effets d'une utilisation conséquente d'acide pélargonique et de sulfonylurées trouvent particulièrement à s'appliquer à SNCF Réseau vu des quantités en jeu et de la répétition de leur application. Il est à noter que les trains désherbeurs ne sont pas équipés de système de détection des adventices qui permettraient de réduire la consommation de glyphosate. Une application systématique est réalisée le long de la voie et des pistes, avec une coupure dans les ZNT pour l'eau, pilotée par un système de localisation par satellite. Avec l'entreprise Bayer, SNCF Réseau mène des essais encourageants pour équiper ses trains de dispositifs de détection des végétaux et de pilotage en conséquence des buses d'application. Sur la base de constats faits sur le réseau, une réduction de 70 % des surfaces traitées et donc des quantités appliquées est attendue. L'enjeu est donc important au regard des quelque 45 t de glyphosate utilisées annuellement par SNCF Réseau puisque cela permettrait une réduction annuelle de 30 t.
5.1.6. Les transports guidés
Les transports guidés comme les métros et tramways présentent des problématiques analogues à celles de la SNCF, dans leurs installations terminales, mais aussi les voies classiques, par exemple celles des RER en Île-de-France. En effet certaines voies à l'air libre, si elles sont végétalisées, ont fait l'objet d'une végétation choisie à la conception et la plateforme elle-même est conçue pour la recevoir sans dommage. Le choix délibéré d'une végétalisation par le maître d'ouvrage résulte de
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considérations urbaines et paysagères, fonction notamment des lieux où s'insère le système de transport. Cette végétation est entretenue mécaniquement. En revanche les installations terminales à l'air libre et les voies classiques sont conçues de manière plus économe de moyens. Elles sont donc soumises au développement d'une végétation spontanée qui leur est dommageable et qui doit donc être éliminée. Les contraintes d'exploitation du transport guidé sont en général renforcées compte tenu d'un trafic très dense sur des amplitudes, horaires notamment, très étendues. Du glyphosate y est donc employé, de manière analogue aux installations ferroviaires, pour répondre aux mêmes contraintes. Les analyses précédentes relatives aux voies ferrées s'appliquent ainsi tout naturellement aux transports guidés. Par exemple en 2018 la RATP a appliqué 311 kg de glyphosate sur une surface de 100 ha. Le montant annuel des prestations de désherbage et qui utilisait du glyphosate s'élevait à 250 000 . Il est estimé à 4 000 000 au minimum le coût d'un traitement sans PPP sur les voies et 1 130 000 avec un autre PPP que le glyphosate pour les parcs et ateliers. De manière générale, les surcoûts s'imputent sur les subventions versées par l'autorité organisatrice de transports (AOT), soit dans le cas d'espèce Île-de-France mobilités. Mais ils peuvent aussi être répartis d'un commun accord entre l'AOT et l'opérateur de transport public.
5.2. Les postes électriques du réseau de transport d'électricité
Le désherbage chimique ne concerne à Réseau de transport d'électricité (RTE), filiale d'Électricité de France (EDF) que les postes électriques dont il est le propriétaire du terrain. Le traitement est aujourd'hui chimique en totalité sur les 529 sites, qui peuvent rassembler plusieurs postes et qui représentent 1 473 ha. Le glyphosate est la molécule utilisée en quasi-totalité soit 3,79 t en 2018. RTE sous-traite à des entreprises spécialisées. Cependant au titre d'une démarche volontariste menée dans le cadre du plan Écophyto, RTE entretient déjà en zéro-phyto une partie de ses 71 sites de moins de 5 000 m² et à ce titre considérés comme «petits». Par ailleurs, les clôtures sont désherbées chimiquement sauf exception dans quelques cas de configuration favorable où les abords peuvent faire l'objet d'un entretien mécanique. L'objectif est d'avoir un accès sans gêne à toute la zone et un contrôle visuel des ouvrages.
5.2.1. Les exigences du référentiel
Le jeu de barres qui constitue le coeur d'un poste électrique doit avoir zéro végétation pour prévenir le risque électrique. Cette zone fait l'objet de désherbage chimique au glyphosate. Les référentiels techniques sont soit génériques à savoir ; l'arrêté technique de 2001 qui définit les conditions techniques auxquelles doivent satisfaire les distributions d'énergie électrique et ses articles 43 et 44 relatifs aux postes et qui définit des obligations de résultat la norme NF C 18-510 (§ 4.3.1 sur la prévention du risque électrique).
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le Code du travail et ses circulaires qui fixent des distances de sécurité des opérateurs visà-vis de la végétation. le Code du travail avec ses articles R4323-41, R4534-11, R4534-13, R4323-553 relatifs à la manutention d'engins.
Soit des référentiels propres à RTE : le référentiel technique poste HTB NT-DI-CNER-DP-ACS-18-51215 qui définit les spécifications relatives aux aménagements de surfaces des postes. Elles prévoient une hauteur de gravier de 7 cm. la note NT-MAIN-DMRP-18-00055 qui établit les règles relatives à la prise en compte du risque électrique en fonction de ces mêmes aménagements de surfaces et qui s'appuie sur les normes suivantes : la norme CEI 60479 qui définit les valeurs de tension maximales admissibles par le corps humain en distinguant : celles relatives aux travailleurs à l'intérieur d'un poste électrique ; et la norme CEI 909 qui définit les critères d'évaluation des contraintes électriques en cas de défaut.
Sauf exception historique (postes très anciens de conception différente), le standard est depuis l'après-guerre le zéro végétation sur gravier. Il est lié à la sécurité électrique du personnel (la résistivité du sol varie d'un facteur 5 entre du gravier seul et de la végétation), notamment en cas de défaut électrique dans les postes, qui par nature et parce qu'ils sont le point de raccordement des lignes, concentrent ces défauts. En effet, à partir du moment où la végétation dépasse 2 cm de haut, elle anéantit le pouvoir isolant des semelles des chaussures de sécurité compte tenu des dispositifs de protection actuels conçus avec les possibilités offertes par les PPP. Par ailleurs, les clôtures représentent un véritable enjeu et leur entretien est chimique. En effet, certains postes sont classés «points d'importance vitale» au sens de la protection contre le sabotage et ont des doubles clôtures. Elles sont de plus en plus instrumentées (vidéo surveillance notamment).
5.2.2. Des essais de substitution par d'autres herbicides chimiques
Un site de 47000 m² a fait l'objet d'une expérimentation avec de l'acide pélargonique. Pour obtenir une absence de végétation, il a fallu 3 passages et 1260 litres de la spécialité contre 1 passage et 23 litres pour le glyphosate pour un poste comparable et de même surface. S'agissant d'un traitement chimique, la question est aussi celle du délai de rentrée sur le terrain traité. Il est beaucoup plus long pour l'acide pélargonique soit 24 h. Or l'exploitation du poste impose de pouvoir intervenir en temps quasi réel en cas d'incidents électriques ou d'interventions pour entretien qui arrivent régulièrement. Ainsi les clauses de RTE imposent 6 heures.
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5.2.3. Des solutions non chimiques irréalistes dans les postes actuels
Au regard de la conception actuelle des postes, la compatibilité apparaît comme quasi nulle entre les critères d'acceptabilité de la végétation avec les contraintes d'exploitation et la capacité à respecter les préconisations d'entretien sur de grandes surfaces non aménagées sans produit phytosanitaire, en particulier sous du matériel électrique. Les possibilités de traitement mécanique (tondeuse, fauchage...) sont des plus limitées. Par exemple, employer des rotofils sur du gravier est impossible (risque important de projection), et encore moins quand le poste est sous tension alors que c'est le cas avec un traitement chimique - pour cause de risque électrique. Il en est de même pour des tondeuses. Ceci rend quasi impossible le traitement de grandes surfaces sans produit phytopharmaceutique. Par ailleurs, la tondeuse ne permet pas de maintenir une végétation à moins de 2 cm, limite au-delà de laquelle, le caractère isolant de la semelle des chaussures de sécurité n'est plus assuré. RTE a cependant commencé à demander à ses prestataires de se passer du glyphosate, mais certaines entreprises ont du mal à s'engager sur des marchés traditionnellement à obligation de résultat, sur 3 ans sous la contrainte du zéro-phyto. Si la première année bénéfice d'effets résiduels des traitements chimiques et la végétation encore maîtrisée, les professionnels savent que la situation sera de plus en plus compliquée les années suivantes. Les entreprises ne savent donc pas où elles vont en termes de coûts et éprouvent d'importantes difficultés pour disposer des moyens nécessaires en personnel. Ce qui apparaît possible pour l'entretien d'une petite surface avec un désherbage mécanique et manuel ne l'est pas en grande surface. Cela impliquerait trop de personnes en zone électrique, si tant est que les prestataires puissent trouver le personnel en nombre suffisant. Un entretien sans désherbage des grandes surfaces supposerait un réaménagement pour ce faire, mais au prix d'un coût important sans service rendu direct supplémentaire.
5.2.4. Évaluation financière
RTE a commencé à conduire des évaluations financières, mais leurs résultats et le caractère irréaliste des méthodes sous-jacentes ont conduit à examiner d'autres solutions qui seront développées au paragraphe suivant. Sur la base d'essais sur des petits postes, le coût d'un traitement mécanique et manuel ressortirait à 0,95 /m² contre 0,20 /m² avec du glyphosate, soit environ 5 fois plus cher. Sur de grandes surfaces et après plusieurs années, l'écart ne pourrait aller qu'en grandissant. Le coût annuel de l'entretien avec du glyphosate des 1473 ha de postes est de 2,9 M. Il passerait à 14,0 M sur cette première base avec des méthodes mécaniques et manuelles.
5.2.5. Des solutions alternatives permises par une reconception des postes
Au regard de ses objectifs dans le cadre du plan Écophyto, les surcoûts et l'inadaptation des postes aux contraintes du zéro-phyto ont donc conduit RTE à imaginer leur réaménagement, prenant en compte les contraintes de l'existant, y compris du maintien de la tension pendant les travaux.
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Deux options sont ouvertes en fonction de la résistivité des sols et de la configuration des postes : une végétalisation choisie (1 à 8 /m² en investissement et 0,37 /m²/an en entretien) avec des plantes couvre-sol qui empêchent les végétaux indésirables de s'installer. Le semis a lieu avec des végétaux qui auront une hauteur limitée. Cette hauteur doit être maîtrisée en fonction des contraintes d'exploitation des installations électriques : 15 cm sous du matériel électrique. Le choix de la végétation dépend de nombreux facteurs : l'existant, la résistivité du sol, le renforcement de la protection électrique, leurs coûts respectifs. La végétalisation impose une étude systématique de la résistivité des sols et donc de mobiliser les électrotechniciens. Or cette ressource est limitée. Un marché-cadre d'étude est lancé avec des écologues pour choisir les semences selon les régions (action de RTE en faveur du végétal local). RTE a choisi de ne pas laisser une végétation spontanée pour aller plus vite et avoir une meilleure maîtrise de la végétation qui s'installe ; le paillage minéral (40 /m²) avec un géotextile et trois couches minérales, plus complexe à mettre en oeuvre. Ce paillage permet de créer un milieu sec et très pauvre défavorable à la pousse. L'entretien est plus limité, mais nécessite cependant un arrachage manuel des pousses, et il y a des doutes sur la pérennité d'un tel aménagement au regard de la maîtrise de la végétation dans le temps.
Par rapport à un objectif de 100 % des postes aménagés pour pouvoir se passer de glyphosate, RTE estime qu'environ 80 % des sites pourraient être simplement végétalisés (végétalisation choisie) et qu'environ 20 % des sites devraient recevoir un paillage minéral. Cependant, ce dernier est complexe à mettre en oeuvre, et il y a des doutes sur sa pérennité. En considération du plan Écophyto dans lequel il s'est engagé et dans le cadre du schéma de développement du réseau, RTE estime le besoin en investissements supplémentaires pour aménager ses sites existant à 139 M. Cela nécessite une prise en compte de ce besoin dans le futur Tarif d'utilisation du réseau public d'électricité (TURPE) qui doit être élaboré puis validé par la Commission de régulation de l'électricité (CRE) avant fin 2020. Les travaux correspondants qui pourraient s'étaler a minima jusqu'à 2024 ne rendront pas possible, si une interdiction du glyphosate était prononcée en 2020, et même en prenant en compte une certaine latence dans la repousse de la végétation, de respecter le référentiel technique. La situation serait difficile. Elle occasionnerait une augmentation des dépenses pour maintenir l'absence de végétation, et rendrait nécessaire de trouver des entreprises extérieures. En revanche, et sous réserve de disposer des ressources nécessaires, l'entreprise pourrait se passer partiellement de glyphosate en 2022, date à laquelle 65 % des sites pourraient déjà se passer de PPP. Pour les 71 postes de moins de 5000 m² précités, RTE considère que la végétalisation ou le paillage minéral sont trop onéreux au regard du surcoût d'un entretien mécanique ou manuel. Au titre du plan Écophyto, RTE a d'ores et déjà, décidé d'imposer à ses prestataires de renoncer aux produits phytosanitaires au fur et à mesure du renouvellement à l'échéance des contrats d'entretien. RTE a décidé de prendre dès à présent en charge les surcoûts correspondants, mais les réintègrera dans l'enveloppe de surcoûts exposés en vue du futur TURPE.
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5.3. Les sites industriels
Les sites industriels relèvent souvent de la réglementation des Installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), au premier rang desquels figurent ceux de l'industrie chimique, de l'industrie pétrolière et parapétrolière et du gaz. Leurs installations sont implantées en plein air sur des terrains le plus souvent simplement stabilisés qui voient inévitablement un développement de la végétation. Aussi ces industriels emploient-ils tous du glyphosate pour l'élimination de cette végétation qui présente un risque dans un environnement industriel, puisqu'inflammable et source, avec le vent, d'envols de poussières végétales enflammées. Ici plus qu'ailleurs, la diversité des établissements et de l'organisation des sociétés qui les gèrent ne permet pas de disposer d'éléments économiques et financiers et conséquemment de mesurer l'impact de l'arrêt du glyphosate. En revanche, un surcoût est estimé par les entreprises.
Les adhérents de l'Association des applicateurs de produits phytopharmaceutiques (AAPP) qui est la principale fédération professionnelle intervenant en entreprises, désherbent 3 200 ha de surfaces de type industrielles avec des produits phytopharmaceutiques à base de glyphosate et aucune surface industrielle en mécanique/thermique.
GLYPHOSATE
Surface Industrielles Publiques Particuliers
BIOCONTRÔLE
Industrielles Publiques Particuliers
THERMIQUE/ MÉCANIQUE
Industrielles Publiques Particuliers
3400 ha
94 %
2% 96,2 %
0,2 %
0,1 %
2% 2,1 %
0%
0%
1,7 % 1,7 %
0%
Tableau 10 : répartition des surfaces traitées par les adhérents de l'Association des applicateurs professionnels de produits phytopharmaceutiques, en fonction du type de méthode et de la nature des terrains.
Ces chiffres confirment qu'aucune autre méthode n'est par ailleurs, pratiquée au titre de la réglementation des ICPE. La consommation annuelle correspondante par les entreprises industrielles est très grossièrement estimée aux alentours de 10 t en regard des concentrations et conditions d'AMM pour différentes spécialités commerciales.
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5.3.1. Les exigences du référentiel
Plusieurs arrêtés techniques ministériels généraux fixent des obligations de résultat, pour prévenir le risque incendie, suivant les différentes rubriques de la nomenclature de ces ICPE. Ces obligations nécessitent une absence de végétaux sous et à proximité des installations. De fait, la méthode retenue, pour ne pas prendre le moindre risque et qui est aussi la méthode la moins onéreuse, est l'emploi du glyphosate. De plus, l'atmosphère explosive autour de ces installations impose le respect de normes spécifiques ATEX, notamment pour l'emploi de matériels électriques ou autres.
5.3.2. La substitution par d'autres herbicides chimiques
Selon les industriels, l'utilisation d'un PPP alternatif au glyphosate, mais qui alors ne détruit pas les systèmes racinaires, multiplierait par 4 ou par 6 environ la fréquence de passage nécessaire pour aboutir au même résultat. En raison de ce constat, les industriels n'ont pas jugé pertinent de développer cette voie.
5.3.3. Des solutions non chimiques irréalistes
Les solutions non chimiques ne sont pas compatibles avec les arrêtés techniques ministériels pour ce qui concerne la protection contre l'incendie. Même si une hypothèse contraire était retenue, la substitution d'une zone traitée avec un PPP par une zone végétalisée nécessiterait une tonte régulière. Cette option n'est pas envisageable dans les zones avec restrictions ATEX en raison des risques d'explosion et du matériel de tonte considéré. Par ailleurs, les zones inaccessibles aux engins peuvent représenter jusqu'à 90 % des zones traitées par le glyphosate aujourd'hui. En conséquence il serait alors nécessaire de recourir à du désherbage manuel permanent et prendre en compte l'exposition du personnel à de nouveaux risques notamment à des troubles musculosquelettiques.
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Pour des raisons identiques, le traitement thermique à la flamme est exclu. Une artificialisation en dur, par exemple en enrobés, serait un investissement coûteux et impliquerait une reconception complète du site avec certainement des incidences sur les superstructures.
5.3.4. Évaluations financières
Aucune évaluation financière d'une alternative non chimique n'a été menée compte tenu de son caractère irréaliste. Les gestionnaires de ces sites estiment le coût d'une substitution du glyphosate par un autre PPP à un facteur 6, compte tenu d'un coût plus important du produit et surtout de l'augmentation de la fréquence des interventions. Le coût passe à 10 fois le coût de référence pour des procédés mécaniques. En fonction de la taille et de l'activité des établissements, le surcoût peut approcher le million d'euros.
5.3.5. Le cas particulier des sites militaires
Le domaine public occupé par les armées est de 258 000 ha en métropole. Il y est appliqué environ au moins 15 000 l/an de produit à base de glyphosate. Les données disponibles ne concernant que 205 000 ha. Ce qui correspond à environ 5 500 kg de glyphosate, en prenant des produits dosés à 360g/l et une surface traitée de 1 400 ha. Les sites militaires à caractère industriel, par exemple les stockages d'hydrocarbures, sont soumis aux mêmes obligations que les ICPE même si leur inspection est interne au ministère de la défense. Certains sites sont encore plus sensibles, comme les dépôts de munitions vis-à-vis du risque incendie. Les clôtures sont également des installations encore plus sensibles que celles relevant du civil, sachant que de très grands espaces doivent être sécurisés comme les terrains de manoeuvre. Du glyphosate est employé, de manière analogue aux installations civiles, pour répondre aux mêmes contraintes. Les analyses précédentes s'appliquent ainsi tout naturellement aux sites militaires. En particulier l'entretien des zones à risques pyrotechniques et d'incendie avec des moyens mécaniques ou thermiques est exclu pour des raisons de sécurité. Par ailleurs aucune alternative non chimique n'est possible pour l'entretien de clôtures. Et suivant les armées, il en est de même des joints des pistes (les alternatives mécaniques et thermiques les détériorent dès le premier usage) et de certains dispositifs de sécurité sur les plateformes aéronautiques. Les espaces militaires sont aussi concernés par des référentiels culturels qui exigent un ordre et une propreté absolue. Ils trouvent à s'appliquer au premier chef aux places d'armes et autres lieux symboliques, mais également aux casernements et plus généralement à toutes les installations.
5.3.6. Questions collatérales à prendre en compte
En cas de basculement sur d'autres produits chimiques, la mission rappelle que les interrogations qui pèsent sur les effets d'une utilisation conséquente d'acide pélargonique et de sulfonylurées trouvent aussi à s'appliquer au secteur industriel vu les quantités en jeu et de la répétition de leur application.
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5.4. Les autoroutes, routes et rues
Le réseau routier français est constitué de 8950 km de réseau autoroutier concédé, de 12200 km de réseau routier national (RRN) qui comprend les autoroutes et voies rapides non concédées), de 376000 km de routes départementales (RD) et de 673000 km de voirie communale (VC). Si chaque réseau véhicule sa propre image, les caractéristiques techniques en sont éminemment variables. Certaines RD ou VC présentent des caractéristiques quasi autoroutières, comme le boulevard périphérique parisien qui est une VC. De plus, si la gestion du RRN est unique, celle des RD et des VC est assurée par autant de collectivités. La consommation d'herbicides sur ces réseaux ne peut ainsi qu'être estimée, même si les ordres de grandeur sont exacts.
5.4.1. Les différents maîtres d'ouvrage
5.4.1.1 Les autoroutes concédées Les autoroutes concédées, représentées par l'Association française des sociétés d'autoroutes (ASFA), consomment annuellement 5500 kg de produits phytopharmaceutiques dont environ la moitié de produits composés exclusivement ou partiellement de glyphosate, ce qui correspond à peu près à 0,06 kg de substance active annuellement utilisée par km de leur réseau. Les zones traitées sont les zones à enjeux pour la sécurité du personnel (situations à risque, zones de pente, position de travail, matériels dangereux de type taille-haies et avec des obligations liées à la visibilité de la signalisation et à l'entretien des ouvrages d'art). Cela concerne quasi exclusivement : Les terre-pleins centraux (TPC) qui doivent assurer en plus de la retenue des véhicules en cas de sortie de route - une signalisation visible, une accessibilité pour les ouvriers et un refuge. La sécurité est donc le premier motif du désherbage. Les dispositifs d'assainissement en TPC et en bord de chaussée notamment, au titre du maintien du patrimoine construit et de l'absence de retenues d'eau. Les sites techniques (radios, sous-postes électriques/transformateurs, ouvrages d'art dont certaines zones sont sensibles comme les perrés70) ; Les clôtures pour prévenir le passage des animaux. En cas d'accident avec des animaux, le juge recherche systématiquement la responsabilité de la société d'autoroute. En conséquence elles sont méthodiquement surveillées et entretenues. En effet les clôtures sont envahies en deux ans par la végétation spontanée. Les zones d'espèces invasives, pour lesquelles le glyphosate reste le recours le plus efficace.
Les bandes d'arrêt d'urgence, lorsqu'elles ne sont pas en enrobés, sont traitées par fauchage, comme les dépendances paysagères. Les aires de service et de repos pour lesquelles il y a un enjeu commercial fort font l'objet d'interventions chimiques ponctuelles.
70
Un perré est un revêtement en pierre sèche ou en pierre liée que l'on aménage au pied ou sur le flanc d'un talus sujet à des glissements ou d'une tranchée susceptible d'être dégradée par les eaux.
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Depuis les lois Grenelle de 2010, les sociétés d'autoroutes ont choisi d'engager des politiques volontaristes pour réduire massivement les consommations de PPP. Les sociétés d'autoroutes ont volontairement déclaré se soumettre à la loi Labbé, ses dérogations leur permettant de respecter leurs obligations, à l'exception de la société APRR qui considère que, comme privé concessionnaire, elle n'y est pas soumise. Dans les deux cas, il s'agit essentiellement d'une présentation, puisque la loi, au regard des exceptions qu'elle prévoit, ne fait que confirmer les pratiques ; à savoir une utilisation du glyphosate et des PPP seulement dans des situations très particulières au regard de la sécurité des personnels et des usagers (Ouvrages d'art, TPC etc.), l'entretien des dépendances vertes définies comme telles lors de la conception étant réalisé par fauchage. Une augmentation forte des accidents des personnels autoroutiers liés au balisage des chantiers est constatée sur les autoroutes concédées pour atteindre 187 accidents en 2017. Elle est attribuée à l'augmentation constatée de l'usage du smartphone au volant. Dans ce contexte, toute augmentation significative des interventions sur les autoroutes entraînerait une augmentation proportionnelle des accidents. Or, l'arrêt de l'emploi du glyphosate sans procédure dérogatoire, telle celle de la loi Labbé pour la sécurité, induira une augmentation et un allongement des chantiers pour la mise en oeuvre du désherbage mécanique, thermique ou manuel. Par exemple un balisage d'une durée de 1 jour peut alors se prolonger sur 4 jours en raison du nombre de passages nécessaires plus élevé, voire 10 jours ou plus en prenant en compte un temps plus long avec une méthode non chimique. Ce ne serait pas non plus sans conséquence sur le service rendu aux usagers. 5.4.1.2 Le réseau routier national Sur instruction de leur administration centrale, les gestionnaires du RRN appliquent depuis 2010 une politique volontariste de réduction de l'usage des PPP en général et en conséquence du glyphosate, pour passer au zéro-phyto. En 2018, 90 % des 220 Centres d'entretien et d'intervention71 (CEI,) ont déclaré ne plus utiliser de PPP. Ainsi la consommation de glyphosate, qui représente 95 % des PPP utilisés, est passée de 378 kg en 2015 à 101 kg en 2018. Ce glyphosate a servi à traiter un linéaire de 562 km le long des voies, bretelles et terre-pleins centraux sur une surface estimée à 83 ha. Six des sept Directions interrégionales des routes (DIR) ont consommé moins de 30 l chacune. La dernière en ayant utilisé 200 l, considérant qu'elle ne peut raisonnablement s'en passer au regard des termes de la loi Labbé. Les CEI font donc un usage très ponctuel pour traiter, comme sur le réseau autoroutier concédé, des zones difficiles d'accès ou trop dangereuses pour les agents ainsi que les ouvrages d'art. 5.4.1.3 Les routes départementales et la voirie communale Si le nombre de maîtres d'ouvrage du réseau routier national et des autoroutes concédées est limité, celui des routes départementales et de la voirie communale est considérable. Il n'a donc pas été possible à la mission de mener des recensements précis sur l'usage du glyphosate, les conditions de son utilisation, et les conséquences de son abandon.
71
Unités de base de gestion du réseau
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Toutefois, l'association des directeurs techniques des départements, métropoles et régions (ADTech) a réalisé un sondage à la demande de la mission sur les routes départementales. Seulement vingt-cinq départements ont répondu ; quatre y utilisent encore des PPP pour des raisons de sécurité, conformément aux possibilités ouvertes par la loi Labbé. Même si cela apparaît mineur, il n'est pas anecdotique de constater qu'un grand nombre d'entre eux laissent l'entretien de leur giratoire aux communes. Mais le taux de réponse au sondage est assez faible et il peut y avoir un biais dans les résultats. S'agissant de la voirie communale, aucun recensement ou sondage ne semble disponible, au-delà des entretiens menés par la mission. Enfin, encore plus que le réseau routier national, les réseaux départemental et communal sont extrêmement hétérogènes quant à leurs caractéristiques et conditions d'exploitation. Certaines sections sont quasi-autoroutières, avec des trafics extrêmement denses quand il s'agit de voies rapides urbaines, d'autres sont de « petites routes de campagne », d'autres enfin sont des rues de centre-ville avec des trottoirs. Les grandes tendances suivantes apparaissent cependant. Un certain nombre de départements et communes ont décidé d'arrêter d'utiliser des PPP par choix volontaire clairement affiché comme tel, avant la loi Labbé. Les procédés alternatifs sont mécaniques ou manuels, toutes les autres techniques s'étant révélées décevantes quant à leur efficacité, y compris la substitution du glyphosate par de l'acide pélargonique. Ces procédés nécessitent des mesures de sécurité adéquates. Les conséquences de l'arrêt du glyphosate déjà constatées pour les ouvrages d'art font émerger de fortes inquiétudes quant à leur pérennité à terme. Un surcoût est certain, mais il n'est pas calculé. Il peut se traduire ou non budgétairement, en fonction d'une externalisation éventuelle. Enfin l'achat de matériel supplémentaire est nécessaire. Une prolifération des plantes invasives (ambroisie, renouée du Japon notamment) est observée, possiblement liée à l'arrêt d'emploi des produits phytopharmaceutiques.
5.4.2. Un abaissement du référentiel
Hors autoroutes concédées, l'abandon des PPP entraîne une série d'inconvénients qui a conduit à un abaissement du référentiel. Sans préjuger des aspects quantitatifs, ces conséquences sont techniques comme dans le cas des ouvrages d'art, mais portent aussi sur la sécurité et le service à l'usager. 5.4.2.1 Les autoroutes concédées Les sociétés d'autoroutes, si elles ont une politique de réduction de l'usage des PPP, considèrent que l'on est sur une asymptote qui ne sera pas à zéro. En effet, les autoroutes concédées sont une exception car elles considèrent les PPP comme toujours nécessaires au respect de leurs référentiels. Ils renvoient non seulement aux enjeux de sécurité, au sens large c'est-à-dire y compris
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des biens à savoir les ouvrages d'art et certains sites techniques, mais également aux enjeux commerciaux liés en premier lieu au service à l'usager (neutralisations des voies considérablement allongées en temps) et également à l'apparence des lieux. 5.4.2.2 La sécurité et le service à l'usager Dans les zones actuellement traitées au glyphosate pour des enjeux de sécurité, le nombre de passes annuelles passerait de 1 à 4 avec des alternatives chimiques et à 10 avec des alternatives non chimiques, multiplierait dans les mêmes proportions le temps des chantiers, et donc le temps d'exposition, en conséquence les risques, et donc in fine les accidents, pour le personnel d'exploitation et pour les usagers des routes. Ce risque avéré est a priori plus élevé sur les voies rapides que sur les voies dont la limitation de vitesse est plus basse. Cependant la question de l'augmentation de ce risque se pose sur l'ensemble du réseau, et doit y être prise en considération. De la même manière, la multiplication des temps de chantier a un effet très néfaste sur le service à l'usager. Les études économiques évaluent le gain de temps comme déterminant à 80 % pour l'usager et son bénéfice. 5.4.2.3 Le cas des ouvrages d'art Les ouvrages d'art sont plus que tous autres, un lieu où la végétation n'a pas sa place, sauf le cas échéant dans des « jardinières » prévues à cet effet. Partout ailleurs, et parce qu'elle menace les constructions qui n'ont pas été prévues pour elle et qui ne peuvent d'ailleurs pas l'être -, elle doit être éliminée. Tous les gestionnaires questionnés soulignent les effets délétères observés à la suite de l'abandon du glyphosate sur les ouvrages d'art. Ils constatent déjà la présence de peupliers, figuiers et acacias, notamment, qui se sont rapidement développés et s'inquiètent des conséquences qui apparaîtront à échéance de très peu d'années. Ces conséquences structurelles nécessiteront des travaux d'importantes réparations programmées et qui devront être largement anticipés, la nature reprenant très vite ses droits. L'effet économique sur la durée de vie de ces ouvrages est substantiel alors qu'ils ont été conçus pour une durée a priori illimitée. 5.4.2.4 Les autres réseaux routiers Les gestionnaires des autres réseaux routiers signalent tous la nécessité de gérer l'acceptabilité sociale des nouveaux modes de gestion à « zéro-phyto », en expliquant que le fait de laisser des herbes à la vue des usagers ne signifie pas pour autant la mise en péril du patrimoine ou un abaissement de la sécurité. Néanmoins ces usagers vérifient par eux-mêmes au coeur de la maçonnerie des ouvrages d'art la présence de véritables arbres. Par ailleurs des bas-côtés d'herbes hautes ne permettent pas à l'usager de s'assurer lui-même de sa propre sécurité en cas d'arrêt d'urgence. En effet, il est constaté que la présence massive d'herbes sur les bas-côtés des routes favorise considérablement l'abandon de détritus de toute nature sur celles-ci. L'abandon de l'entretien d'un lieu, même seulement perçu, a un effet boule de neige bien connu qui s'observe notamment sur le réseau routier francilien.
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5.4.3. Limites des solutions alternatives
Les sociétés d'autoroute ont déjà conclu après quelques essais que les solutions alternatives au glyphosate étaient irréalistes. Sur le RRN, les CEI continuent à chercher de nouvelles solutions alternatives. En effet celles utilisées se limitent à l'extension du domaine d'emploi de techniques habituelles, mais avec un nombre de chantiers multiplié compte tenu des passages supplémentaires nécessaires et un temps de travail lui-même multiplié sur les chantiers. Elles nécessitent néanmoins des achats de matériels supplémentaires. Par ailleurs un mouvement général de minéralisation locale des abords des chaussées est observé. Mais ce mouvement est limité et s'effectue ponctuellement en fonction des disponibilités budgétaires et de la réalisation de chantiers plus importants. De l'acide pélargonique a été testé (notamment 65 l sur un site de 1000 m2 du RRN, et sur un réseau départemental), mais le retour d'expérience n'est pas suffisamment concluant pour y voir une solution fiable et pérenne sur le réseau routier. Il en est de même des techniques thermiques qui endommagent les supports et dont le rendement extrêmement faible fait qu'elles sont hors de portée des agents d'entretien. À noter que des CEI qui n'ont pas consommé de produit en 2018 envisagent d'en utiliser en 2019. Enfin tous les gestionnaires, depuis le niveau central jusqu'au niveau local observent les conséquences très négatives du passage au zéro-phyto, sur la sécurité des agents, sur le niveau de service et l'acceptation des usagers, sur la pérennité du patrimoine, et sur le coût des solutions alternatives, tant en entretien qu'en investissement. Ils relèvent que la maintenance de points pourtant ponctuels comme les ouvrages d'art et les clôtures sont essentiels. Si des constats analogues peuvent être faits sur le réseau routier départemental, l'appréciation de leur ampleur est plus variable, ce qui s'explique sans doute par les caractéristiques générales de ce réseau (ouvrages d'art notamment) et de son exploitation (trafic notamment), qui nécessitent le plus souvent sensiblement moins de recourir aux PPP.
5.4.4. Évaluations financières
5.4.4.1 Les autoroutes concédées Le chiffre d'affaires du secteur autoroutier concédé est de 10 G HT soit 12 G TTC. Sur 10 de péage HT, 1,20 est consacré à l'entretien et l'exploitation, soit environ un volume de 1,5 G. Aucune estimation du coût du passage à une alternative non chimique n'existe. Si des expérimentations de techniques alternatives non chimiques ont été menées à bien (par exemple thermiques), elles ont été limitées, car leur résultat est inadapté à une utilisation à grande échelle. En conséquence il n'a pas été procédé à des tests de marché avec des sociétés prestataires. L'ASFA ne dispose au niveau sectoriel d'aucun scénario alternatif mécanique/manuel/thermique aux PPP.
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Sur l'impact financier, l'ASFA souligne le caractère économique singulier des concessions qui par définition ont une fin. L'indicateur pertinent du contrat est donc celui de son taux de rentabilité interne (TRI) à sa fin. Une simple variation de TRI de 0,1 % est ainsi un enjeu énorme. Toute charge supplémentaire au titre des contrats de concession doit donc à son sens se voir compensée. D'un point de vue juridique, si l'usage du glyphosate restait autorisé dans d'autres ZNA, en particulier celles qui seraient plus consommatrices, il ne pourra être argué par le concédant que son interdiction est une mesure générale et à ce titre de droit commun, ne nécessitant pas un ajustement du contrat de concession. Un ajustement, quel qu'il soit, ne serait pas un précédent, puisque dans une situation analogue qui était bien alors une mesure générale, l'État a pris en charge le coût du changement des panneaux de limitation de vitesse à 80 km/h lorsqu'elle a été abaissée, quelle que soit leur domanialité. 5.4.4.2 Le réseau routier national La Direction des infrastructures de transport estime le coût total associé aux techniques alternatives sur le réseau à hauteur de 8 M/an. Elle pèse sur un budget de 800 M (hors salaires des 6000 agents d'exploitation) déjà insuffisant de 200 M (tel qu'évalué par un audit indépendant), et qui doit déjà porter la situation critique des ouvrages d'art. 5.4.4.3 Les routes départementales et les voies communales Hormis quelques exemples ponctuels peu généralisables et la mise en exergue de la nécessité d'investir dans du matériel supplémentaire spécifique pour le fauchage, aucune évaluation financière n'est disponible. Cela s'explique notamment par les caractéristiques de la gestion publique de ces réseaux.
5.4.5. Points de vigilance et questions collatérales à traiter
La proposition de loi Labbé a été votée après avoir fait l'objet d'un débat au parlement. À cette occasion, l'usage des PPP pour les routes et autoroutes publiques y a été réintroduit au motif de la sécurité. Or, le glyphosate est de loin le plus employé. Il y aurait donc une contradiction apparente à ce que, par une décision administrative qui ne manquera pas d'être contestée, une autorité indépendante revienne sur l'exception au motif de la sécurité d'une loi largement débattue, et qui plus est très récente.
Enfin, une interdiction du glyphosate aurait pour immanquable conséquence sa substitution, notamment pour les autoroutes concédées, par d'autres herbicides chimiques comme les sulfonylurées. Comme pour SNCF Réseau, l'usage significatif et répétitif de ces mêmes substances actives sur tout le territoire, présente l'inconvénient documenté dans la bibliographie de favoriser la sélection d'adventices résistantes, susceptibles de s'étendre aux zones agricoles.
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5.5. Les aéroports et installations liées au trafic aérien
Plus encore que d'autres sortes de ZNA, la variété des aéroports et des installations terrestres intéressant le transport aérien est considérable, depuis l'aéroport Charles de Gaulle d'Aéroports de Paris (ADP) jusqu'au plus petit des terrains de l'aviation légère de loisir. Il existe en France 160 aéroports publics commerciaux et 70 aéroports privés. Cette diversité ne permet pas que soient rapidement disponibles, même après enquête, des chiffres significatifs sur l'emploi et ses conséquences des PPP, et encore moins de glyphosate. Toutefois, la consommation de glyphosate semble être inférieure à 3 000 kg/an. Les aéroports représentent environ 50 000 ha dont 35 000 ha d'espaces verts non ouverts au public côté piste où se situent les enjeux techniques. A l'inverse, les enjeux commerciaux se concentrent sur le côté ville. Si les aéroports disposent de pistes qui sont de même nature qu'une chaussée et de bâtiments, ils sont surtout constitués de grandes étendues enherbées. Elles accueillent aussi des dispositifs d'aide à la navigation aérienne, incluant notamment les « Instrument landing systems (ILS) ». Les exigences du référentiel en matière d'aviation sont singulièrement différentes de celles des ZNA étudiées précédemment. Les zones enherbées des aéroports représentent d'abord une économie par rapport à une artificialisation lourde du terrain. Toutefois leur entretien doit répondre à des exigences précises. Cet entretien s'effectue par fauchage qui doit d'abord ménager une visibilité suffisante sur toute la plateforme. Mais il doit aussi ne pas mettre le terrain à nu, qui multiplie le risque aviaire en attirant les oiseaux à la recherche de vers de terre. Les dispositifs d'aide à la navigation qui y sont implantés sont en nombre limité. Ils sont dégagés des interférences de la végétation soit par du fauchage, soit par une artificialisation à leur entour, soit enfin par la pulvérisation de PPP contenant du glyphosate sur une zone limitée. Les exigences sur le fauchage jusqu'à 12 fois par an - ne rendent pas ces opérations significatives en temps passé supplémentaire de fauchage. De plus les conditions de ce fauchage, sur du terrain plat et dégagé, en dehors du trafic des avions, ne présente pas de risque supplémentaire des personnels. Sur les pistes, les joints entre les carrés qui les constituent sont sources du développement d'une végétation qu'il convient d'éliminer. Mais les pistes font désormais l'objet d'un balayage fréquent afin d'ôter tout objet pouvant dégrader les aéronefs. Il n'est donc plus nécessaire d'utiliser des herbicides et donc du glyphosate. En revanche la question des clôtures reste entière et celles-ci concentrent l'utilisation du glyphosate, même s'il n'est pas possible de distinguer le tonnage correspondant. En particulier leurs pieds doivent rester visibles pour des raisons liées à la sécurité. S'il existe une solution alternative qui consiste à bétonner le bas des grillages, elle est lourde à mettre en oeuvre, onéreuse car elle impose de changer la totalité de la clôture, et qu'elle ne peut s'envisager que comme un investissement à programmer. En conséquence, et à l'exception des clôtures, on doit pouvoir considérer que des alternatives non chimiques d'usage courant existent pour l'entretien des aéroports.
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5.6. Les gazons et les allées de structures non soumises à une concurrence commerciale
Il existe une très grande diversité de structures disposant de pelouses de jeux ou d'espaces verts avec leurs voies de desserte nécessitant un entretien.
5.6.1. Équipements sportifs
La France dispose de 50500 terrains de sports communaux engazonnés avec 43600 ha de gazon naturel dont les ¾ sont dévolus à la pratique du football72. L'entretien est encore possible par les produits phytopharmaceutiques, pour les espaces clos appartenant aux collectivités, et sans restriction pour les structures privées. Le nombre de communes ayant banni tous produits phytopharmaceutiques est aujourd'hui non négligeable. 28 % en Bretagne et 78 % en Île-de-France, selon la dernière enquête de l'IUA IdF73 où ces communes déclarent ne plus utiliser de pesticides dans la gestion des terrains de sport, ce qui témoigne de l'existence de solutions alternatives non chimiques à l'usage du glyphosate. Leur usage est cependant plus fréquent dans les communes urbaines ce qui est mis en relation avec une exigence accrue d'entretien pour les équipes de niveau élevé souvent issues de celles-ci. Pour celles faisant usage de produits phytopharmaceutiques, l'emploi du glyphosate est très probablement exceptionnel sur l'aire de jeu, lequel ne nécessite pas de désherbage total. Le sénateur Labbé, dans son interview (Annexe 5), indique : « Mais surtout, un terrain de foot ou de rugby ne se conçoit pas avec des pelouses pleines d'adventices pour la sécurité des joueurs. Vu le nombre de ces terrains sur le territoire, interdire l'usage des pesticides sans véritable solution alternative aurait été une erreur. » On peut imaginer qu'il perdure pour venir à bout des plantes invasives. Ou qu'il soit encore utilisé pour l'entretien des allées de desserte. Mais la contrainte ressentie de la loi Labbé et le caractère récent de cette contrainte, ainsi que les choix très variables des communes (certaines reviennent même sur leur choix) qui peuvent s'apparenter au choix délibéré de se positionner sur un micromarché tant en fonction des orientations de leur population, que de leur capacité financière, conduisent à rendre incertain une qualification d'usage courant. À noter qu'une des solutions en plein essor est le passage aux terrains synthétiques qui ne sont pas non plus dénués d'inconvénients. L'incidence économique d'arrêt du glyphosate sur le budget de la commune n'est pas mesurable compte tenu de la diversité des situations et de l'arbitrage politique qui y est étroitement attaché. Il impacte suivant les cas le budget de fonctionnement ou d'investissements (achat de machines, implantation d'un terrain de synthèse). Les témoignages recueillis par la mission mettent toutefois en avant une distorsion entre les grandes communes et les plus petites, ces dernières ayant nettement plus de difficulté à faire face à l'arrêt des produits phytopharmaceutiques. L'accompagnement des communes est à ce propos estimé primordial par des représentants locaux de DRAAF. Un point de vigilance s'impose, car il est reconnu que les difficultés s'accroissent entre la première année d'arrêt et la troisième. Or la loi Labbé n'offre que 2 ans de recul.
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Information Plante et cité. Présentation en groupe de travail JEVI ; juin 2019 Note rapide de l'institut d'aménagement et d'urbanisme - Île-de-France. Environnement juillet 2019
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Il existe également des équipements sportifs avec des surfaces de jeux non engazonnés comme les boulodromes et hippodromes, utilisateurs potentiels de glyphosate, mais la mission n'a pas exploré ces éventuels micro-utilisateurs.
5.6.2. Autres structures
Aujourd'hui, tous les propriétaires privés ou collectifs (copropriétés) peuvent légalement faire traiter leur bien par du glyphosate en faisant appel aux professionnels des espaces verts. Ces traitements visent à entretenir les propriétés selon un référentiel culturel en plus de maintenir la praticabilité des allées. En effet, les résidents sont attentifs à l'apparence de leur lieu de vie. Ils ont toujours une mauvaise perception vis-à-vis de la présence d'adventices qui donne une impression de laisser-aller et d'abandon. Selon l'UNEP, il apparaît possible de supprimer encore quelques usages dans ce domaine sous réserve de changer le regard des clients et usagers en acceptant des adventices. Au regard de l'actualité, la mission signale la contradiction entre ces traitements dans des résidences et la démarche actuelle visant à adopter un décret et un arrêté interministériel destinés à éloigner des lieux d'habitation les traitements phytosanitaires réalisés par les agriculteurs.
5.7. Les gazons et allées de structures soumises à une concurrence commerciale
5.7.1. Les gazons de placage
Développé depuis une vingtaine d'années, le gazon de placage est un gazon naturel cultivé en gazonnière sur terrain naturel puis livré sous forme de rouleaux ou de pavés. La filière gazon de placage occupe environ 900 ha. Trois acteurs principaux produisent environ 50 % du total. Le restant est fourni par des pépiniéristes pour des utilisations locales (surfaces d'environ 6 à 10 ha). Une concurrence très importante est exercée par les producteurs hollandais, espagnols, italiens et portugais. Ils disposeraient de produits phytopharmaceutiques qui leur permettent d'avoir des gazons plus propres (moins de 1 % de pâturin annuel) et ainsi de répondre aux hauts standards des pelouses professionnelles avec un coût de production moindre. Il faut compter entre 14 à 18 mois pour obtenir du gazon, selon la période à laquelle il a été semé (printemps ou automne). Les semis sont réalisés sur un sol propre, soit parce qu'ils sont réalisés immédiatement après la précédente récolte, soit parce qu'il a été appliqué une demi-dose de glyphosate entre les deux semis, soit parce qu'on a pratiqué un faux semi avec application d'une demi-dose de glyphosate avant le dernier semis. En raison de la présence de chiendent, de graminées exotiques envahissantes, ou encore des «Plantain, Sétaire verte, Digitaire» (PSD), plus de 60 % de la surface (+- 20 % selon les années) aura été traité au glyphosate. Il n'existe pas de solution non chimique pour les terrains contaminés par du chiendent (le labour est contre-indiqué pour le chiendent qu'il contribue à propager). Pour les autres plantes envahissantes, le labour et d'autres produits phytopharmaceutiques sélectifs peuvent être envisagés.
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Selon les professionnels, sans glyphosate, la présence de chiendent conduira à stopper net la production sur les parcelles concernées. Pour les autres adventices, la disparation des traitements sélectifs entraînera petit à petit le déclin de la filière.
5.7.2. Les équipements sportifs collectifs à usage professionnel
La part des équipements sportifs de haut niveau n'est pas connue par la mission. À titre d'exemple, le stade de France c'est 11000 m² de surface engazonnée et 9000 m² de pelouse pure. Le modèle économique des stades repose essentiellement sur un partenariat public-privé (ou bail emphytéotique ou délégation d'exploitation...). Les collectivités restent propriétaires du stade, mais des opérateurs privés en assurent l'exploitation et la maintenance, puis mettent le stade à disposition des clubs qui reversent un loyer aux collectivités. Le règlement des terrains et installations sportives de la fédération française de football, par exemple, impose que l'aire de jeu permette le classement à tous les niveaux sous réserve de la qualité et l'uniformité de la couverture végétale, laquelle doit faire l'objet d'un entretien régulier. Pour les rencontres internationales, il est nécessaire de respecter les règlements en vigueur (pour le football, fixés par la FIFA, l'UEFA.). Pour le renouvellement de la surface de jeu, les référentiels revoient sur les professionnels du gazon pour replaquer un terrain (en général en situation de crise) ou l'ensemencer.74 ; on se retrouve alors dans la situation technique identique à celle du gazon de placage. Force est de constater qu'il n'existe pas d'alternative non chimique d'usage courant pour ces clubs professionnels, qu'ils concernent le football ou d'autres sports Par ailleurs, les conséquences économiques d'un arrêt du glyphosate sont délicates à évaluer au regard de l'extrême variabilité de la situation financière des structures, de leur niveau et de la variété de leurs ressources en fonction du sport considéré. Si pour le football, le CA généré par les 43 clubs professionnels de football français est chiffré à 2,1 G 75 ; toutefois, «la dynamique fabuleuse dont profitent quelques clubs ne doit pas masquer la réalité des autres clubs, de Ligue 2 notamment». Introduire une nouvelle dimension dans le catalogue des usages qui distinguerait des sports et/ou des niveaux de sport pour tenir compte des recettes des clubs pour délivrer ou non une AMM semble hasardeux au regard d'une coupure extrêmement difficile à établir et donc à justifier.
5.7.3. Les golfs
Il existe environ 700 golfs en France pour 33000 ha. La moitié est aujourd'hui gérée par des sociétés indépendantes et 16 % par des chaînes. Les golfs gérés par des associations (26 %) et les golfs gérés en régie par des collectivités (8 %) complètent le paysage. Un golf de 18 trous occupe une surface d'environ 60 ha dont 60 % sont des surfaces de jeu engazonnées entretenues. La croissance de l'offre a permis au golf de passer du statut de «sport d'élite» à celui de «sport loisir», pratiqué par près de 800000 personnes.
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Directives de l'UEFA en matière de qualité des terrains Gestion des terrains en gazon naturel .édition 2018 Baromètre des impacts économiques et sociaux du football professionnel Changement de rythme novembre 2017.
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Aucune donnée précise n'est fournie par les distributeurs pour glyphosate dans ce secteur, le golf étant englobé avec les autres usages. 700 à 800 litres sont évoqués par la profession. Sachant que les produits homologués ont une concentration variant de 360 g/l à 639 g/l cela pourrait être traduit par une fourchette allant de 250 à 500 kg par an. Le contexte réglementaire de plus en plus contraignant et la prise de conscience de la pression de l'opinion publique poussent de plus en plus de gestionnaires de golfs à tester ou développer des matériels et stratégies alternatives pour remplacer le glyphosate (désherbage manuel, à eau chaude, etc.). Cependant, l'usage du glyphosate au sein des golfs demeure essentiel pour maîtriser les espèces dites envahissantes : En traitement par taches, pour la maîtrise de graminées invasives d'origine tropicales, localisées ; Pour la destruction du gazon existant avant semis d'une nouvelle graminée plus résistante à la sécheresse et aux maladies. Lorsqu'il y a présence de graminées d'origine tropicale ou que la période de levées des PSD est effective, le glyphosate est le seul moyen de les contrôler efficacement et de réussir la conversion de flore.
Hors présence de ces plantes, une tonte très rase puis semis, avec parfois l'utilisation d'un régulateur de croissance est une alternative praticable. La transition sans glyphosate est en cours, mais pour y parvenir sans impacter négativement les exploitants, une solution chimique ou alternative est indispensable. Et sans doute, cette expérimentation est le fait des structures les plus riches, ce qui témoigne d'un phénomène du type micromarché. Force est de constater qu'il n'existe pas à ce jour de solution alternative non chimique d'usage courant.
Leur CA est extrêmement variable de même que leur santé économique, très hétérogène : Une étude de 2018 sur le poids économique mentionne 44 % des golfs commerciaux et 32 % des golfs associatifs ou gérés en régie déclarent une rentabilité nette négative76.
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Les enjeux économiques du golf en France septembre 2018
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Sans surprise, les plus petites structures sont les plus fragiles économiquement (CA moyen de 131 k contre 978 k pour les plus grosses structures). L'impact économique sur l'interdiction du glyphosate n'est pas chiffrable et dépend éminemment du degré d'utilisation actuel et de la santé économique de la structure. Et là encore le maintien ou non d'une AMM en fonction de considérations économiques semble hasardeux.
5.7.4. Les parcs privés ouverts au public
Ils ne sont pas concernés par la loi Labbé et peuvent donc avoir recours à du glyphosate à travers des prestataires agréés. Toutefois, selon l'organisation Vielles Demeures Françaises, les jardins privés ouverts au public se sont orientés depuis plusieurs années, tout comme les jardins du patrimoine public, vers des solutions alternatives et ne traitent plus les allées avec un produit chimique conventionnel. Selon le ministère de la culture, en regard de sa vision sur son propre patrimoine, l'impact d'un arrêt du glyphosate est probablement faible. Ceci est lié à un référentiel qui évolue pour s'adapter aux nouvelles contraintes que ce soit en termes de main d'oeuvre ou de disponibilité de produits phytopharmaceutiques. Il est possible d'en déduire que l'usage de méthodes alternatives non chimique est courant et a été adopté sans inconvénient économique majeur pour ceux qui les mettent en oeuvre. Néanmoins, la mission n'a pas recueilli d'éléments chiffrés sur le coût que représente le non-usage des produits phytopharmaceutiques dans ces espaces ni l'impact sur leur modèle économique. Elle ne peut exclure que l'arrêt du glyphosate ait un impact important pour certains propriétaires.
5.7.5. Les exigences commerciales des autres établissements soumis à concurrence
D'autres établissements/structures ont une exigence vis-à-vis de leur présentation, même en l'absence de référentiel réglementaire et technique. On est purement dans du référentiel culturel qui veut qu'une entreprise qui fonctionne bien ne présente pas de «laisser-aller» ne serait-ce que du côté des végétaux sur leurs gazons ou voies de desserte. Elles font appel à des entreprises du paysage ou disposent des agréments nécessaires pour traiter par elles-mêmes (ex. : organismes HLM). L'arrêt du glyphosate augmenterait le coût du traitement de 5 à 10 fois, sauf à reconcevoir les espaces et à acculturer les usagers à ce nouveau paradigme. Vu la diversité des structures, il est impossible de chiffrer l'impact économique.
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5.8. Les cimetières
Les cimetières représentent un cas particulier parmi les zones non agricoles en raison des attentes des citoyens à l'égard du respect dû aux personnes décédées. Ainsi, les cimetières constituent une exception à l'interdiction d'emploi des produits phytopharmaceutiques de synthèse prévue par la loi Labbé. Il s'agit bien souvent du dernier espace à passer en «zéro phyto». La France métropolitaine compte 40000 cimetières dont 95 % avec moins de 1,5 ha pour une surface totale de 20000 ha77. La commune doit assurer la gestion des parties communes tandis que les concessions sont à la charge des familles. Les cimetières ont des caractéristiques bien particulières, car leur espace est très morcelé. Le coût moyen d'entretien est de 3500 par ha avec une médiane à 2261 . Le temps d'entretien varie de selon le type d'ambiance générale78, avec une valeur médiane de 460 à 730 h/ha/an (les valeurs maximales correspondent aux communes sans pesticides). Dans son étude79 sur plus de 233 collectivités, Plante & Cité rapporte que 35 % des communes ont en 2017 eu recours aux produits phytopharmaceutiques, en majorité des herbicides de synthèse. Néanmoins, les petites communes de moins de 10000 habitants sont sous-représentées dans l'enquête. L'Institut d'aménagement et d'urbanisme de la région Île-de-France (IAU îdF)80 identifie que seulement 27 % des communes (échantillon de 690 communes sur un total de 1276) ont encore recours aux produits phytopharmaceutiques pour leur cimetière. Compte tenu des usages en ces lieux, nous pouvons estimer que 90 % des utilisations portent sur des produits contenant du glyphosate. Au vu de ces deux enquêtes, nous pouvons considérer qu'une part des cimetières en France ne sont plus désherbés avec du glyphosate. Ces derniers peuvent avoir fait l'objet d'une reconception et d'un réaménagement destinés à limiter les travaux d'entretien, soit avec une végétalisation partielle (gazon, plantes couvrantes, végétation spontanée..., même si les allées restent en gravillons pour rester praticables en temps de pluie), soit avec une minéralisation du site, soit avec une combinaison des deux approches selon les zones de l'espace. Une augmentation des coûts d'entretien est observée, notamment avec les opérations de tonte et d'arrachage manuel qui restent nécessaires. Dans les cimetières qui continuent à employer du glyphosate, les méthodes alternatives ont été freinées par les problèmes de surcoût en main d'oeuvre et en équipement, par la pénibilité du travail, par manque de matériel adapté et par la qualité insuffisante du désherbage. Concernant le recours aux méthodes alternatives non chimiques, nous pouvons estimer que : dans les cimetières aménagés (qui ont de fait été réaménagés et qui ont supposé de fait un investissement) pour limiter le développement des mauvaises herbes et entretenus sans glyphosate, elles sont d'un usage courant, tout en sachant que les besoins de maîtrise des adventices restent importants et que les allées, qui restent gravillonnées pour des motifs de praticabilité, posent toujours des difficultés d'entretien ;
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Source info : plante et cité p.36/37 Sont en général distingués les cimetières paysagers, enherbés et arborés, arborés, enherbés, mixtes avec une partie minérale et une végétale, minéral 79 Paysage et entretien des cimetières. Plante&Cité ; novembre 2017 80 https://www.iau-idf.fr/fileadmin/NewEtudes/Etude_1833/NR_814_web.pdf
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dans les autres cimetières, traités avec du glyphosate, les méthodes alternatives non chimiques ne sont pas d'un usage courant. Enfin, l'entretien d'un certain nombre de cimetières est limité compte tenu des contraintes, certaines communes renvoyant même implicitement ou explicitement cet entretien aux particuliers. L'impression peut être celle d'un abandon aux «mauvaises herbes».81
Il existe donc des alternatives à l'usage du glyphosate, mais elles ont des incidences qui peuvent être importantes en termes de budget de fonctionnement ou d'investissement sans que le caractère majeur ou non puisse être quantifié compte tenu de la diversité des situations., même s'il apparaît que les conséquences (investissement, abandon, ou transfert aux particuliers) sont manifestement inhabituelles pour la commune considérée. Le législateur en 2014 a choisi de ne pas appliquer la loi Labbé aux cimetières après avoir fait l'objet d'un débat nourri au parlement. Le sénateur Labbé confirme (cf. son interview parue en juillet 2018 dans la revue professionnelle « En vert et avec vous » : en Annexe 5) que le maintien de ces lieux dans le même état que celui antérieurement constaté résultant des pratiques antérieures n'est pas atteignable, bien au-delà même d'une question de budget ou d'effort humain. De surcroît, si la décision administrative de suppression de l'usage du glyphosate dans les cimetières n'est pas parfaitement justifiée, elle serait susceptible d'être contestée par voie politique compte tenu de la contradiction entre la loi et cette décision.
5.9. Les clôtures
Le cas des clôtures permet d'illustrer la complexité du sujet pour conserver une logique d'ensemble dans la mise en oeuvre de l'article 50.2. En effet, sans être une activité économique en ZNA, elles sont un objet technique commun a un grand nombre de ces activités82, dont la présence est parfois requise par la réglementation, comme c'est le cas notamment pour les voies ferrées et les points d'importance vitale83, et requise par la jurisprudence comme c'est notamment le cas pour les autoroutes84. Ces clôtures sont envahies par de la végétation, ligneuse en particulier. Or non seulement elles doivent assurer leur fonction, mais de plus elles doivent pouvoir être facilement contrôlées visuellement, et en particulier les pieds de clôture pour en relever les brèches éventuelles.
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Toulouse : sans pesticide c'est la jungle. La dépêche.fr. 05/09/2019Gilles-R. Soulliés Les utilisateurs de clôtures sont très nombreux. Parmi ceux-ci : la SNCF, les autoroutes, les sites ICPE, les poste de transformation RTE, les aéroports. Définis au titre de la législation et la réglementation sur les secteur d'activité d'importance vitale. Parce qu'elles concourent à la production et à la distribution de biens ou de services indispensables à l'exercice de l'autorité de l'État, au fonctionnement de l'économie, au maintien du potentiel de défense ou à la sécurité de la Nation, certaines activités sont considérées comme « d'importance vitale ». La responsabilité des gestionnaires est systématiquement engagée en cas d'accidents de la route consécutifs au heurt d'animaux errants dans l'emprise de l'autoroute.
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De plus, certaines sont équipées de dispositifs de sécurité qui compliquent leur entretien : Des barbelés gênant toute intervention manuelle ; Des alarmes dont le détecteur doit être proche du sol. Certains systèmes sont déclenchés par la pousse de végétation.
De fait, le seul usage courant pour l'entretien de ces clôtures est le glyphosate. Un entretien mécanique n'est évidemment pas suffisant et le coût d'un éventuel entretien manuel dépasserait encore le facteur 10 relevé précédemment. Aux difficultés techniques s'ajoutent en effet, des difficultés d'ordre sécuritaires et logistiques (difficultés d'accès au site, accessibilité du matériel, protocoles d'entrée longs, travailleurs isolés dans des zones dangereuses, etc.), et de fait, d'ordre économique. Pour un entretien sans produits chimiques, les passages sur ces sites seraient à l'année de l'ordre de 30 ou 40. Renchérissant au moins d'autant le coût d'entretien. Par ailleurs, les tonnages correspondant à cette utilisation spécifique sont manifestement très faibles, alors qu'ils sont de plus impossibles à appréhender. Ainsi l'emploi du glyphosate pour les clôtures relève assurément d'un usage mineur. Et son usage doit continuer à rester possible avec du glyphosate, indépendamment du secteur d'activité auquel la clôture est destinée.
5.10. Le patrimoine historique bâti
La France compte 44 000 monuments historiques protégés ; 3% seulement appartiennent à l'État et à ses différents ministères (une faible proportion est gérée par le ministère chargé de la culture, essentiellement des parcs), 50% aux collectivités territoriales et sont en grande majorité des églises ; le restant est entre les mains de personnes privées. Mais il existe un beaucoup plus grand nombre de monuments d'intérêt patrimonial qui n'est pas protégé. Les propriétaires-gestionnaires désireux de préserver et mettre en valeur leurs monuments, notamment dans une démarche d'accueil du public sont amenés à utiliser le glyphosate essentiellement pour l'entretien des allées des jardins ou des cours ainsi que pour la préservation des éléments bâtis type douves à sec, murs, enceintes ou ruines particulièrement touchées par la végétation spontanée. Cette végétation a des effets destructeurs sur les vieux murs ce que rappelle par exemple l'appellation familière de la linaire cymbalaire, plante vivace herbacée rebaptisée « ruine-de-Rome ». Néanmoins aucune estimation des consommations de glyphosate ne peut être avancée.
S'agissant du bâti, le ministère de la culture dans son manuel de sensibilisation à la restauration de la maçonnerie éditée en 2006 fait mention de l'emploi d'herbicide commercial. Les préparations à base de glyphosate sont probablement prépondérantes au regard du marché correspondant, même si le terme n'apparaît pas, une autorité publique ne pouvant privilégier un produit. La mission n'a pu identifier aucune méthode alternative en entretien au glyphosate.
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Pour les travaux de rénovation qui dépassent l'entretien et réalisés par des entreprises sélectionnées, les maîtres d'oeuvre spécialisés en restauration du patrimoine bâti prescrivent un désherbage manuel avant de rejointoyer les pierres pour avoir la certitude d'éliminer tout matériel biologique et toute humidité interne.
Le désherbage manuel nécessite généralement le recrutement d'un ou plusieurs jardiniers à mi-temps ou à plein-temps, selon les surfaces concernées et les saisons. L'enveloppe moyenne des dépenses actuelles est estimée par une association de propriétaires privés entre 5 000 et 15 000 par an selon les cas. Les écarts s'expliquent notamment par le fait que, s'agissant des allées des jardins et cours de demeures historiques, la fréquentation du public est un facteur essentiel. En effet le piétinement est le moyen le plus sûr et le plus économique d'élimination de la végétation. Le désherbage mécanique nécessite outre du temps homme, un investissement en matériel adapté. À titre d'exemple, il faut compter environ 2 000 pour un matériel thermique et 3 à 5 000 pour un matériel mécanique. Mais l'un et l'autre sont inefficaces sur les éléments bâtis (douves, murs d'enceinte ou ruines) ou difficilement accessibles, ou dans les espaces non bâtis dont la topologie ne permet pas le passage dudit matériel. En tout état de cause, les propriétaires-gestionnaires sont désireux que soient mises au point des techniques nouvelles et attendent des conseils de l'État. Ces coûts peuvent être mis en relation avec la faiblesse des recettes générées par la visite du public lorsqu'elles existent. L'activité d'ouverture au public est déficitaire pour la plupart des monuments historiques. Aussi, un éventuel coût supplémentaire généré par le non-usage du glyphosate serait une charge supplémentaire directe, d'autant que les propriétaires-gestionnaires ne peuvent s'exonérer de l'entretien des éléments bâtis ou des parcs et jardins. En effet la Charte de Venise (1964) rappelle dès son article 4 que « La conservation des monuments impose d'abord la permanence de leur entretien ». L'absence d'entretien courant risque d'entraîner la disparition des monuments et jardins, ou d'imposer des travaux de restauration substantiels pour en permettre la réhabilitation, travaux davantage coûteux. Cette dialectique entre entretien et travaux de conservation apparaît clairement au ministère de la culture qui regrette que l'entretien courant soit délaissé en général ce qui impose ensuite d'intervenir et de subventionner les travaux nécessaires pour la conservation. Le cas des remparts de Dinan est éclairant à cet égard puisqu'après un désherbage chimique en 2002, une partie des remparts s'est écroulée en 2013 suite à un entretien défectueux. Il n'est pas douteux qu'un renchérissement du coût de l'entretien conduise à une baisse du volume de celui-ci. En toute logique s'appliquerait aussi aux monuments une dérogation au titre de la sécurité des biens, à l'instar des ouvrages d'art et des infrastructures même si le référentiel est implicite.
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6. PISTES DE REFLEXION DANS LE CADRE DE L'ARTICLE 50
Sans préjuger de l'interprétation finale sur l'évaluation comparative qui appartient à l'ANSES, la mission a souhaité examiner les conditions souhaitables d'un retrait des produits phytopharmaceutiques à base de glyphosate dans les ZNA dans le cadre de l'article 50. Les paragraphes ci-dessous développent des préoccupations sur trois points : le morcellement de la réglementation ; la cohérence avec le contenu de la loi Labbé ; les enjeux liés à la sécurité de personnes et des biens et les enjeux culturels.
Sur le premier point, les limitations ciblées au sein des usages risqueraient d'aller à l'encontre d'une réglementation lisible, compréhensible et cohérente. Il faudrait en effet prévoir dans les AMM des traitements différents en fonction du secteur d'activité considéré pour des utilisations sur des objets techniques pourtant analogues. Ni les risques juridiques que porterait une telle réglementation, ni la complication pour les gestionnaires ni le volume de travail à fournir par l'ensemble des acteurs ne semblent en rapport avec les très faibles quantités en jeu.
Sur le second point, la loi Labbé est une dimension supplémentaire à prendre en compte, notamment à l'égard des cimetières, les terrains de sport et des propriétés des particuliers. La loi Labbé et la délivrance des AMM suivent deux logiques différentes, ce qui complique leur articulation : la loi Labbé, déjà complexe, est structurée par la considération des collectivités publiques et par l'accessibilité du public ; les AMM ne portent que les usages sur la base d'une analyse de risque normalisée par des textes communautaires. Ainsi, les AMM ne sont pas modulées selon l'accessibilité ou non du public85. En effet l'impact d'une substance sur les tiers, riverains ou passants, est déjà pris en compte en amont dans les études préalables aux AMM conformément aux règles qui président aux évaluations. L'article 50 ne permettra pas de surmonter cette difficulté car il ne fait pas de « l'accès au public » un critère discriminant de l'évaluation comparative.
La juxtaposition de ces deux logiques risque de faire apparaître des contradictions dans les effets de la loi. Ainsi, une limitation d'AMM qui ne prévoirait pas l'utilisation de glyphosate pour chacune de ces utilisations encore permises par la loi Labbé, par exemple dans les cimetières viderait la loi de son contenu sur ces points. De même, des AMM qui ne comporteraient pas une utilisation pour les routes au motif de la sécurité rendraient inopérante la dérogation prévue par la loi.
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Sachant que l'accessibilité de l'espace public considéré reste toujours sous la maîtrise de la collectivité, en particulier pendant une éventuelle pulvérisation.
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Sur le troisième point, la mission souligne que les quantités en jeu représentent moins de 1,5 % des ventes de produits à base de glyphosate. Ceci est à rapprocher de l'exigence fixée par l'alinéa d) de l'article 50.1. (déclenché par l'article 50.2. dans le cas du glyphosate) qui dispose « que les conséquences sur les utilisations mineures sont prises en compte ». À ce titre, il semblerait possible d'interdire de façon générale des utilisations de produits, mais d'en conserver certaines dès lors qu'elles sont mineures. S'il est souhaité de rester cohérent avec la loi Labbé, une réflexion peut être conduite pour maintenir l'emploi de produits à base de glyphosate pour répondre au motif de la sécurité des personnes et des biens et pour des motifs culturels. Ce dernier terme peut être entendu comme l'ensemble des emplois phytopharmaceutiques encore permis par la loi Labbé. Tous les usages spécifiques en ZNA étant d'ores et déjà classés comme mineurs dans le catalogue national des usages, ce dispositif respecterait à ce titre l'article 50.
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7. APPUI PAR LA RECHERCHE PUBLIQUE
7.1. État des lieux
Lors de ses entretiens sur les alternatives non chimiques au glyphosate dans les zones non agricoles avec les acteurs concernés, la mission a noté le thème récurrent de la faible attractivité de ce domaine pour la recherche privée et la recherche publique. Le marché des zones non agricoles est trop restreint pour motiver la recherche privée et l'inciter à inventer des solutions spécifiques, tout en espérant un retour sur investissement satisfaisant. En pratique, les innovations sont en premier lieu destinées aux zones agricoles ou au secteur industriel, puis un transfert vers les zones non agricoles peut être envisagé. Dans le cas des chemins de fer, il n'y a pas de modèle transférable depuis ce secteur vers les zones agricoles. Les principaux acteurs de la recherche publique dont les travaux peuvent donner lieu à des transferts vers les ZNA sont les suivants : l'Institut national de la recherche agronomique (INRA), dans le domaine de la recherche agronomique. Les zones non agricoles ne font pas partie de son périmètre d'action, mais des alternatives mises au point pour les zones agricoles peuvent faire l'objet d'un transfert vers les ZNA. l'Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (IRSTEA). Ses travaux dans le domaine du machinisme et des robots autonomes se rapprochent des problématiques rencontrées dans les ZNA. Ainsi, l'IRSTEA est en relation avec la SNCF sur les questions de désherbage des voies ferrées.
Au 1er janvier 2020, l'INRA et l'IRSTEA fusionneront pour créer un Établissement public à caractère scientifique et technologique dans les domaines de l'agriculture, de l'alimentation et de l'environnement.
7.2. Les besoins des acteurs et les pistes de recherche
7.2.1. Besoins en produits phytopharmaceutiques alternatifs
La recherche de produits alternatifs aux pesticides de synthèse est réalisée par les entreprises privées, notamment sous la forme de startups, en vue d'une demande d'autorisation de mise sur marché auprès de l'ANSES. Les produits de biocontrôle bénéficient d'un cadre réglementaire favorable à leur développement, notamment à la suite de la loi EGALIM. Mais, actuellement, il y a peu de solutions de biocontrôle pour la lutte contre les mauvaises herbes (voir Annexe 4). Des travaux de recherche et développement sont conduits par exemple sur la radulanine A86, une substance une substance naturelle contenue dans les hépatiques, des mousses végétales. Toutefois, les acteurs rencontrés par la mission ne prévoient pas l'arrivée à court terme d'herbicides avec des qualités très supérieures à celles des produits de biocontrôle déjà présents sur le marché.
86
Un nouvel herbicide d'origine naturelle. Bastien Nay Chercheur CNRS. http://www.cnrs.fr/fr/un-nouvel-herbicide-dorigine-naturelle. Consulté le 15 octobre 2019.
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Dans le récent rapport87 de l'Assemblée nationale sur l'état des lieux du biocontrôle, il est souligné que ces produits ne répondent pas encore à toutes les attentes des utilisateurs, et qu'un soutien des autorités publiques est nécessaire, notamment pour la recherche et le développement. Le rapport88 du CGAAER sur le développement des produits de biocontrôle a réalisé le constat suivant : « La recherche publique a surtout vocation à affiner la compréhension des interactions qui permettront un développement efficace des solutions de biocontrôle. Il s'agira en particulier d'acquérir des connaissances sur les mécanismes biologiques à l'origine des interactions entre plantes cultivées, organismes nuisibles, agents de biocontrôle et les milieux. À ce titre, l'utilisation de toutes les ressources de la biologie moderne (génomique notamment) sera utile pour mieux approcher le fonctionnement de milieux biologiquement complexes comme, par exemple, le microbiote des sols cultivés ». Ainsi, une incitation de la recherche publique (CNRS, INRA) pour travailler dans le domaine des interactions entre les végétaux, du jeu d'acteurs et de la mise au point de méthodes d`évaluation permettrait d'accélérer la mise sur le marché d'herbicides de biocontrôle, à la fois pour les zones agricoles et non agricoles. La liste des produits phytopharmaceutiques à faible risque au sens du règlement 1007/2009 ne contient actuellement aucun herbicide (voir Annexe 4). Il s'agit de produits de lutte biologique (bactéries, champignons microscopiques), de stimulateurs de défense naturelle et de phosphate ferrique. Les interlocuteurs de la mission n'ont pas laissé espérer l'arrivée prochaine de produits à faible risque destinés au désherbage. Des travaux de recherche fondamentale pourraient déboucher à long terme sur des méthodes de lutte biologique contre les adventices, mais elles nécessiteront des études spécifiques pour évaluer les risques pour la biodiversité.
7.2.2. Besoins en pulvérisation ultralocalisée pour réduire les quantités
Les produits de biocontrôle herbicides présentent des volumes d'application élevés et ils sont onéreux. Ils peuvent être appliqués aussi en mélange avec un herbicide chimique antigerminatif pour élargir leur efficacité. Outre les enjeux de santé publique et environnementaux, les opérateurs ont tout intérêt à réduire les quantités appliquées. L'innovation dans les techniques de pulvérisation d'herbicides devrait permettre d'éviter de réaliser des applications en plein, au profit de traitements ultralocalisés uniquement sur les adventices présentes. Des dispositifs sont expérimentés par la recherche privée et la recherche publique (IRSTEA), combinant sur du matériel de pulvérisation : un GPS, des caméras et un système de détection des mauvaises herbes, voire plus tard d'identification de ces adventices. Ces travaux portent sur les zones agricoles et les voies ferrées de la SNCF. Une fois ces dispositifs opérationnels, un transfert vers les zones non agricoles peut être envisagé, notamment pour équiper des camions spécialisés dans les travaux de pulvérisation.
87
Rapport fait au nom de la Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire sur le projet de loi, après engagement de la procédure accélérée, de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2018 (n° 1947), par M. Joël GIRAUD, rapporteur général, député. Annexe n°5, agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales : sécurité alimentaire. Rapporteur spécial : M. Michel LAUZZANA, député. 5 juin 2019. http://www.assemblee-nationale.fr/15/rapports/r1990-a5.asp. Consulté le 24 septembre 2019. 88 Les produits de biocontrôle pour la protection des cultures. Jean-Pierre Chomienne, Sylvie Dutartre, Michel Larguier, Didier Pinçonnet, Robert Tessier. CGAAER. 2017.
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La recherche publique peut appuyer le développement de ces travaux, mais la problématique spécifique des ZNA ne pourra être prise en compte que lorsque le transfert technologique sera envisageable. Les ZNA pourront alors bénéficier des capteurs et des dispositifs de détection et d'identification développés pour les zones agricoles.
7.2.3. Besoins en matériel de désherbage mécanique
L'interdiction d'emploi des produits phytopharmaceutiques contenant du glyphosate pourrait entraîner dans plusieurs domaines un recours accru au désherbage mécanique. Or, des interlocuteurs de la mission ont signalé la faiblesse de l'offre en matériel adapté à leurs zones d'intervention, avec des contraintes importantes d'accès, de poids, et de pénibilité du travail pour les employés. L'INRA et l'IRSTEA travaillent sur le thème des liens entre les agroéquipements et l'agroécologie. Mais la recherche et le développement du matériel pour le désherbage mécanique reviennent aux entreprises de machinisme. La mission a dû constater leur peu d'empressement. Sans doute considèrent-elles que le marché est d'une part extrêmement limité ce que montre le classement en usage mineur des usages du glyphosate en ZNA et les quantités estimées -, d'autre part extrêmement morcelé.
7.2.4. Besoins pour réduire la pénibilité du travail
La pratique du désherbage manuel et du désherbage mécanique pourrait également augmenter à la suite de la limitation ou de l'interdiction du glyphosate. Or, plusieurs employeurs de main d'oeuvre ont signalé la pénibilité du travail dans leurs périmètres d'intervention : postures malcommodes, travail répétitif, risques de troubles musculosquelettiques, manutention de charges, risques liés à l'hygiène et à l'incivisme dans la voirie, zones difficiles d'accès dans les sites industriels avec des risques électriques ou d'incendie... Dans les entreprises spécialisées dans les travaux de maîtrise de la végétation, les possibilités d'étalement et de partage de la pénibilité grâce à la planification du travail sont limitées. Le domaine de l'ergonomie appliquée au désherbage manuel ou mécanique paraît peu développé. Par ailleurs, le problème de la pénibilité du travail et de l'ergonomie se pose également pour les autres méthodes non chimiques. À titre d'illustration des travaux sur ce thème, l'Annexe 7 présente un système de harnais destiné à l'amélioration de l'ergonomie pour un désherbeur thermique. La recherche dans les domaines médicaux et industriels travaille sur des projets d'exosquelette d'assistance à l'effort. Selon l'Institut national de recherche et de sécurité89 (INRS) pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles : « De nombreuses entreprises sont aujourd'hui tentées par l'acquisition d'exosquelettes. Avec l'objectif d'assister les salariés lors de la réalisation de certaines tâches, leur usage fait naître un espoir légitime d'améliorer les conditions de travail grâce à la réduction de la charge physique et des risques de troubles musculosquelettiques (TMS). Bien que les exosquelettes s'implantent le plus souvent dans les entreprises sous forme de prototypes ou de premières versions à parfaire, les concepteurs et intégrateurs annoncent leur
Dossier exosquelettes : ce qu'il faut retenir. INRS. http://www.inrs.fr/risques/exosquelettes/ce-qu-il-faut-retenir.html. Consulté le 24 septembre 2019.
89
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volonté de déployer rapidement ces nouvelles technologies dans les années à venir. »
Si l'emploi des dispositifs d'assistance physique se banalise dans les entreprises, un transfert vers les opérateurs en zones non agricoles sera à envisager. L'innovation dans ce domaine est toutefois soutenue par les sociétés privées, qui en sont plus à un stade de développement que de recherche. Il est cependant à noter que les exosquelettes, de par leur conception même, continuent à « employer » un être humain et qu'il n'agit qu'à la vitesse de ce dernier. En conséquence, la question de la productivité reste entière.
7.2.5. Besoins en automatisation
Les entreprises confrontées à une pratique accrue du désherbage manuel et mécanique ont signalé à la mission leurs difficultés pour recruter et conserver leur personnel, en raison de la pénibilité accrue du travail. Dans le domaine agricole, une alternative aux problèmes de main d'oeuvre se présente sous la forme de robots désherbeurs autonomes. Un projet de développement est constaté avec la société VITIROVER et la SNCF. Le dispositif de VITIROVER est fondé sur des robots désherbeurs autonomes qui pratiquent la tonte des adventives. Le système a pour le moment été déployé à petite échelle sur des parcelles de vigne. Des expérimentations sont en cours en vue du désherbage des pistes -auxquelles il devrait se limiter- longeant les lignes à grande vitesse de SNCF Réseau.
Là encore, le déploiement des robots autonomes dans les zones agricoles devra permettre d'élargir les transferts de technologie vers les zones non agricoles, au-delà du cas particulier du chemin de fer. La recherche dans ce domaine est dynamique et elle est portée par des sociétés privées. Toutefois, les obstacles à lever pour les entreprises mettant au point ces appareils concernent principalement des ressources financières plutôt qu'un appui par la recherche publique.
7.2.6. Besoins en technologie de rupture
Au-delà de l'amélioration continue des technologies existantes, un besoin est exprimé pour des technologies radicalement différentes. Pour ce qui est de ces technologies de rupture, la mission a pu constater que beaucoup d'interlocuteurs ne pensent pas que celle-ci puisse venir d'une nouvelle substance active qui aurait les mêmes qualités agronomiques que le glyphosate.
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Le traitement électrique est un exemple de ces technologies de rupture. Cette technique est étudiée depuis fort longtemps pour le désherbage90, mais elle n'a jamais été déployée jusqu'à présent de manière industrielle. Le désherbage haute tension vise à agir comme le glyphosate avec une action systémique : il vise à détruire les parties aériennes et racinaires par conduction en éclatant des cellules. Le résultat est fonction du nombre de watts absorbés par la plante, lequel dépend de nombreux paramètres dont une durée de contact minimale de la plante avec une des deux électrodes, l'autre étant au contact du sol. Mais dans ces conditions, les plantules situées audessous du niveau de la première électrode ne sont pas touchées. Le contrôle de la puissance nécessaire pour atteindre les racines est délicat et le résultat encore aléatoire sur ces dernières. Enfin, le contact avec les plantes suppose un certain développement de celles-ci qui n'est pas toujours compatible avec les objectifs en ZNA. Ce traitement ne peut donc même s'envisager que sur un terrain plat, et n'est en aucun cas possible pour les ouvrages d'art, murs, etc. L'IRSTEA associé avec quatre partenaires dans le consortium WeedElec développe un «robot de désherbage localisé par procédé électrique haute tension combinée avec une gestion prédictive par vision hyperspectrale et post évaluation par drone»91. Au Brésil92, l'entreprise Zasso a développé une technologie. Elle y dispose d'une trentaine de matériels fonctionnant en ZNA sur route et autoroute, pour traiter les bas-côtés enherbés. Elle travaille avec les instances allemandes pour obtenir les certificats nécessaires à la mise sur le marché européen. Leur matériel avance de 3 à 5 km/heure en zone agricole, et de 10 km/h sur les voies ferrées (test en Allemagne), permet d'agir sur des racines entre 5 et 15 cm de profondeur, n'apporte pas de chaleur au sol et ne remue pas la terre93. Le professionnel a pour ambition de proposer une solution à un tarif équivalent, au moyen terme, au modèle glyphosate. Actuellement le prix serait de 10 à 15 % plus cher. Il resterait, toujours suivant le professionnel, toutefois bien moins onéreux que les autres solutions de désherbage mécanique ou thermique. Pour la mission, un tel résultat suppose un seul passage annuel et en conséquence que soit trouvé le moyen que soient traitées en même temps les plantules qui ne dépassent pas la
90 91
Plusieurs brevets ont été déposés aux USA dès les années 1900 Projet WeedElec ; Challenge Rose 92 Une trentaine de matériels de l'entreprise ZASSO fonctionne en ZNA sur route, autoroute et lignes à haute tension. Sao Paulo a été désherbée avec cette technique pendant 5 ans 93 Des études sont en cours pour évaluer les impacts sur les vers de terre et les collemboles. Les premières études montrent qu'il faudrait 3 fois plus de puissance que celle développée actuellement pour porter atteinte aux vers de terre.
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hauteur de l'électrode et que l'on ait l'assurance d'une destruction complète des racines, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
7.2.7. Besoins en biovigilance
L'usage répété pendant des années du glyphosate avec un objectif d'élimination de la végétation a permis de réduire sensiblement le stock de semences du sol. La diminution drastique ou l'arrêt des traitements entrainera une reconstitution de ce stock, avec à terme des problèmes de maîtrise de la végétation. Pour cette raison, des interlocuteurs de la mission ont souligné la nécessité de surveiller l'évolution de la flore spontanée sur une échelle de plusieurs années dans les zones non agricoles. Si des années humides se succèdent, elles favoriseront la croissance des mauvaises herbes. Des évolutions floristiques peuvent se produire, et nécessiter une adaptation du pilotage des méthodes de désherbage. L'utilisation répétée d'acide pélargonique peut favoriser les populations de pâturin annuel (Poa annua), plantes pionnières dans les zones avec des revêtements peu piétinés. Ce développement peut être à l'origine de leur soulèvement. D'ores et déjà les exploitants routiers observent un développement d'espèces invasives (ambroisie et renouée du japon) qu'ils n'arrivent plus à contrôler. La mission s'est interrogée sur l'impact du retrait total du glyphosate sur la maîtrise des plantes invasives. En effet, le rapport de l'INRA de novembre 2017 sur « Les usages et alternatives au glyphosate dans l'agriculture française » cite une contribution de l'Association de coordination technique agricole (ACTA) : « L'objectif est d'identifier des situations qui rencontreront d'importantes difficultés dans le cas d'une interdiction du glyphosate. Nous avons identifié 4 catégories de situations jugées comme très difficiles ou critiques (absence totale d'alternative) : flore invasive ou à enjeu de santé publique, productions sensibles, semis direct sous couverts, utilisations conjoncturelles imposées par le contexte pédoclimatique. » L'ACTA cite notamment l'ambroisie à feuilles d'armoise qui fait l'objet d'une lutte obligatoire en raison de son pollen allergisant. Les grandes renouées (Reynoutria japonica, Reynoutria sacchalinensis, Polygonum polystachyum), et des plantes exotiques (Grand Pétasite, Grande Berce du Caucase, Impatiens glanduleux...) sont également mentionnées. La question de l'impact du retrait total du glyphosate en ZNA sur le développement des plantes invasives nécessiterait une étude spécifique. À défaut, la mission propose d'inclure les plantes invasives dans les actions d'épidémiosurveillance en ZNA afin de piloter le désherbage dans ces secteurs. Il devrait également comprendre la périphérie de ces sites, et notamment s'intéresser aux zones agricoles à proximité.
La recherche publique peut apporter un appui méthodologique sur le dispositif de surveillance à mettre en place sur l'évolution à long terme de la végétation spontanée en ZNA. La surveillance proprement dite relève des réseaux d'épidémiosurveillance qui doivent être renforcés dans les zones non agricoles et élargis aux adventices. Une attention particulière doit être apportée aux plantes invasives. En fonction des évolutions observées, le pilotage du désherbage pourra être ajusté. Un tel dispositif mérite d'être immédiatement mis en place pour déterminer un point de départ des évolutions floristiques dans les ZNA, actuellement traitées au glyphosate.
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Sur la base de ce constat, la mission propose d'abord d'élargir le dispositif d'épidémiosurveillance aux adventices dans les zones non agricoles et à leur périphérie, pour exercer une biovigilance sur l'évolution dans la durée de la flore, en particulier invasive, afin de piloter le désherbage. La mission constate que les principaux domaines d'innovation où la recherche publique peut apporter une animation ou un appui sont : en premier lieu les produits de biocontrôle à effet herbicide, qui peuvent rapidement être appliqués dans les zones non agricoles ; en second lieu la mise au point de capteurs et de dispositifs de détection et d'identification d'adventices, avec un transfert de technologie à réaliser des zones agricoles vers les zones non agricoles.
Les autres innovations bénéficient de la dynamique de la recherche privée. Leur application ultérieure aux zones non agricoles depuis l'agriculture ou l'industrie soulèvera des questions de transfert plus que de recherche. La fusion INRA-IRSTEA est une opportunité pour mieux prendre en compte les besoins des opérateurs dans les zones non agricoles. Il est nécessaire que ce nouvel institut soit ouvert aux professionnels des ZNA et écoute leurs demandes en recherche et en transfert .
Pour répondre aux préoccupations liées au monde de la recherche publique, la mission propose de favoriser en amont et en aval des travaux de la recherche publique à travers : les études pouvant déboucher de nouvelles substances ou agents présentant des effets herbicides, et susceptibles d'être développés sous forme de produits de biocontrôle ; les transferts de technologie depuis les secteurs agricoles ou industriels, répondant aux besoins des opérateurs en zones non agricoles ; l'écoute des acteurs des zones non agricoles au sein du futur institut résultant de la fusion de l'INRA et de l'IRSTEA, notamment en identifiant un point de contact.
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CONCLUSION
La présente mission a pour objet de contribuer, pour les zones non agricoles et non forestières, au plan de sortie du glyphosate, qui prévoit de mettre fin aux principaux usages du glyphosate d'ici la fin de l'année 2020 au plus tard, et d'ici la fin de l'année 2022 pour l'ensemble des usages. L'article 50 du règlement 1007/2009 a été proposé comme levier pour retirer les autorisations des produits phytopharmaceutiques contenant du glyphosate. Le glyphosate relève de l'article 50.2. et, en conséquence, la substitution doit se faire par une méthode non chimique, et non par une autre substance active. Dans ce cadre, la mission a recensé les principales utilisations du glyphosate en ZNA, et examiné les alternatives envisageables en fonction des critères des alinéas 50.2. et 50.1. Ces éléments doivent pouvoir éclairer l'ANSES dans la mise en oeuvre de l'évaluation comparative définie par cet article. La cartographie des utilisations du glyphosate en ZNA a conduit à centrer l'étude sur le réseau ferroviaire, les postes électriques du réseau de transport d'électricité, les sites industriels, les autoroutes, routes et rues, les aéroports, les différentes sortes de gazons, les cimetières, le patrimoine historique bâti et les clôtures. Les quantités de glyphosate employées pour ces utilisations sont extrêmement faibles, comparées aux usages agricoles. Ces usages peuvent être considérés comme sensibles lorsqu'ils renvoient à des référentiels motivés par des enjeux de sécurité ou des référentiels culturels (cimetières, patrimoine...) voire dans des aspects commerciaux. L'article 50 définit trois critères principaux pour mettre en oeuvre l'évaluation comparative. Le premier est l'existence d'une méthode non chimique de prévention ou de lutte pour la même utilisation que le glyphosate. Selon les utilisations, des méthodes non chimiques alternatives très diverses existent : désherbage manuel, mécanique, thermique, paillage, minéralisation des surfaces, plantes couvre-sols, robots de tonte... Le deuxième point clef est que la méthode non chimique doit être d'un usage courant en France. La notion d'usage courant est définie comme désignant, à la date du retrait d'AMM, un outil au stade opérationnel, disponible sur le marché, mis sur le marché par son fabricant à hauteur de la demande, adapté à chaque objet technique à désherber, et présentant un caractère habituel, ordinaire au moment présent. Ce point fondamental est extrêmement contraignant aujourd'hui. Ainsi, des solutions nouvelles ne sont pas encore opérationnelles dans les ZNA. Des essais sont en cours, comme les robots désherbeurs pour les pistes des lignes à grande vitesse de SNCF Réseau, ou le désherbage électrique. D'autres alternatives ne sont pas adaptées aux caractéristiques de l'objet technique à désherber. En raison de risques d'incendie, de leurs capteurs et autres appareils électroniques, les voies ferrées ne peuvent pas être traitées avec des dispositifs thermiques. Les exigences de rapidité, pour ne pas perturber le trafic dans les sillons, rendent inapplicable le désherbage mécanique sur les voies (les trains désherbeurs roulent à 60 km/h). Dans le
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cas des sites industriels, les référentiels formulent de fortes exigences contre le risque d'incendie. Le désherbage thermique et même mécanique n'est pas envisageable pour des motifs de sécurité et de conception des lieux. Le troisième critère concerne l'existence d'inconvénients économiques ou pratiques majeurs. La mission expose les inconvénients recensés en fonction de chaque utilisation examinée. Selon les données collectées auprès des utilisateurs professionnels, les méthodes alternatives non chimiques renchérissent le désherbage d'un facteur allant de 5 à 10 en raison de l'allongement du temps de travail, et de la nécessité de faire plusieurs passages. Les employeurs soulignent que leur personnel est exposé à des risques quantitativement plus importants liés à la pénibilité plus importante du désherbage mécanique ou manuel : risques de sécurité, troubles musculosquelettiques, risques psychosociaux. Pour ces motifs, la disponibilité de la main d'oeuvre correspondante est déjà problématique. Elle est peu vraisemblable à grande échelle.
La mission a aussi examiné les possibilités des produits de biocontrôle herbicides sur le marché, à base d'acide pélargonique, d'acide acétique et d'acide caprylique. Ces produits sont des produits chimiques au titre de la réglementation européenne. Ils ne peuvent pas entrer dans le dispositif d'évaluation comparative. Ils montrent toutefois un intérêt comme alternative au glyphosate, notamment en association avec d'autres produits phytopharmaceutiques pour la SNCF. Mais ils présentent des inconvénients liés à leur coût, leur efficacité moindre et leur volume d'application. De leur côté, les produits phytopharmaceutiques à faible risque, au sens du règlement 1107/2009, ne comportent aucun herbicide. Au final, en raison des exigences formulées, l'article 50 apparaît comme essentiellement conçu pour des usages agricoles, et comme un levier d'un intérêt limité pour les usages non agricoles. Sauf exception, dans les ZNA étudiées qui sont les plus consommatrices, les qualités techniques et économiques du glyphosate n'ont pas permis l'émergence de solutions alternatives courantes dans les objets techniques considérés. Par ailleurs, beaucoup d'organismes rencontrés par la mission ne se sont pas préoccupés de chercher des solutions de remplacement en vue d'un retrait total du glyphosate. S'ils travaillent tous volontairement pour une réduction des quantités utilisées, ils considèrent que l'abandon du glyphosate nécessite la reconception des installations concernées. Ces reconceptions, en plus d'être nécessairement coûteuses, sortent du cadre de l'analyse définie par l'article 50. Hors du cadre imposé par l'article 50, l'abandon du glyphosate peut passer par des voies autres que celles du désherbage manuel ou mécanique notamment. Ainsi, SNCF Réseau pourrait, selon un concepteur de train désherbeur, réduire des deux tiers sa consommation de glyphosate en équipant ses trains désherbeurs d'un système de détection des adventices pilotant l'ouverture des buses d'application. La reconception des sites désherbés avec du glyphosate (postes électriques par exemple) pour les rendre moins favorables aux adventices est également une option.
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Cependant, la mission fait observer que l'article 50 exige également que les conséquences sur les retraits d'autorisations pour des utilisations mineures soient prises en compte. Or, tous les usages réservés aux ZNA, dans le catalogue français des usages sont classés en usages mineurs. Pour la mission, ces deux considérations combinées ouvrent la voie à une utilisation limitée du glyphosate, à définir dans le catalogue national des usages et à mettre en oeuvre à travers les AMM.
Pour ces raisons, sur la base des constats formulés au cours des entretiens, la mission présente des pistes de réflexion : s'il est souhaité de rester cohérent avec la loi Labbé, introduire dans les AMM de produits à base de glyphosate, pour leurs usages spécifiques en ZNA classés comme mineurs, une utilisation limitée aux seuls motifs de la sécurité des personnes et des biens, et d'ordre culturel ; prendre en compte les zones non agricoles et les professionnels concernés dans le dispositif mis en place par le plan de sortie du glyphosate ; être vigilant sur l'effet de report vers d'autres herbicides chimiques autorisés ; élargir d'ores et déjà le dispositif d'épidémiosurveillance aux adventices dans les zones non agricoles et à leur environnement, pour piloter le désherbage sur une longue durée en lien avec le monde agricole ; favoriser en amont et en aval les travaux de la recherche publique et les actions de transfert nécessaires aux ZNA.
Signatures des auteurs
Bernard MÉNORET
Anne DUFOUR
Michel LARGUIER
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ANNEXES
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: Lettre de mission
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: Liste des personnes rencontrées
ADMINISTRATION
Date de Organisme Prénom Nom Fonction rencontre Agence sécurité nationale sanitaire de de de Jean ADRIEN Chargé de mission pour 5-juil
évaluation comparative des PPP content du glyphosate à la
l'alimentation,
l'environnement et du travail
Direction des autorisations de mise sur le marché MarieChristine Roger GENET DE GUENIN Directrice des autorisations de mise sur le marché (DAMM) Directeur Général 29-avr 5-juil 29-avr
Caroline
SEMAILLE
Directrice Générale Déléguée en charge du pôle Produits
29-avr
Réglementés Claude VERGNET Chef d'Unité des décisions AMM 29-avr
Françoise
WEBER
Ex Directrice Générale Déléguée en charge du pôle Produits
29-avr
Réglementés Autorité de régulation des activités routières Olivier CGAAER Didier SALESSE PINCONNET ferroviaires et Julien COULIER Responsable de l'unité régulation des gestionnaires d'infrastructure ferroviaire Directeur du transport ferroviaire Membre de la task force du plan de sortie du glyphosate CGEDD Louis HUBERT Membre de la task force du plan de sortie du glyphosate Direction générale de Guillaume VAN REYSEL Adjoint au chef de bureau de l'environnement 03-juil 23-juil 03-juil 23-juil
l'aviation civile DTA-SDDSDD1 DRAAF service BRETAGNE, régional de Françoise Florence CHARTIER FERNANDEZ
Chef de service Chargée de mission
14-août 14-août
l'alimentation DRAAF Pays de Loire Ministère de la Culture Jérôme Marie-José JULLIEN DOUBROFF Expert national ZNA Chargée de mission , ingénieure 20-juin
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Date de Organisme Prénom Nom Fonction rencontre du patrimoine, architecte
JeanMichel JeanMichel Ministère de la transition écologique et solidaire Murielle
LOYER-HASCOËT
Directeur du service du patrimoine
20-juin
SAINSARD
Expert parcs et jardins
20-juin
LETOFFET
Adjointe au chef du Bureau des produits
10-mai
Direction générale de la prévention des risques sousdirection environnement santéproduits MarieLaure METAYER Sous-directrice 10-mai
chimiques agriculture Ministère de la transition écologique Direction et solidaire, des des de la des Elvire HENRY Chargée d'étude 04-juin Éric GARDAIS Adjoint au chef de bureau 04-juin
générale
infrastructures, transports mer /Direction et
infrastructures de transport/ Sous-direction de Michel HERSEMUL Sous-directeur de l'aménagement du réseau national 04-juin
l'aménagement du réseau routier national
Alexandre
KAVAJ
Chef du bureau de la politique de l'environnement
04-juin
Ministère de la Transition Ecologique et Solidaire,
Delphine
RUEL
Sous-directrice accidentels
des
risques
25-juin
Direction Générale de la Prévention des Risques Ministère de la transition écologique direction et solidaire, de Guglielmina OLIVEROS-TORO Adjointe à la sous-directrice de la protection et de la gestion des ressources en eau et minérales 11-avr
générale
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Date de Organisme l'aménagement, du Prénom Nom Fonction rencontre Dominique POUJEAUX Chargé de mission pesticides en ZNA (axe 4 du plan Écophyto) 11-avr
logement et de la nature. Direction de l'eau et de la biodiversité, sous-direction Emmanuel STEINMAN
de la protection et de la gestion des ressources en eau et minérales
Chef du bureau « qualité de l'eau et agriculture »
11-avr
Ministère Direction
de
l'agriculture, de
Anne Cécile
COTILLON
Sous-directrice de la qualité, de la santé et de la protection des végétaux (Service des actions sanitaires en production primaire)
11-avr
générale
l'alimentation
Ministère Secrétariat
des
armées, pour
Rozenn
LE TOUZET
Chargée de mission
25-sept
général
l'administration, des patrimoines,
Direction de la Hélène PERRE Chef de bureau 25-sept
mémoire et des archives, Chef de bureau et de du
l'environnement
développement durable Préfet de région(h), PierreEtienne BISCH Coordinateur interministériel du plan de sortie du glyphosate 03-juil
Conseiller d'État en service extraordinaire
Pauline
BODIN
Ancienne Chargée de mission Ecophyto en ZNA à la DRIAAF
25-juil
Autres organisations :
Organisme Prénom Nom Fonction Date de
rencontre Association applicateurs professionnels de produits phytopharmaceutiques Association des maires de France André Sylviane FLAJOLET OBERLÉ Vice-président Chargée de mission prévention des pollutions Association des sociétés Christophe BOUTIN Délégué général 26-juin 22-mai 22-mai Tanguy CLABON Vice-président 20-août des Philippe BEUSTE Président 20-août
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Organisme
Prénom
Nom
Fonction
Date
de
rencontre françaises d'autoroutes BAYER Florence Hélène PORTELETTE BRUN Chargée de mission environnement Responsable France de Bayer 26-juin 13-mai
environnemental science (usages non agricoles) Pascal DAY Chef du projet Smart Weeding Train Europe Sylvestre JOBIC Responsible Stakeholder Affairs and Sustainable Development. COVERGARDEN JeanPierre Fédération golf France Environnement Thibault LEROUX Nature Jonathan BOURDEAU Référent national FNE sur les questions pesticides en zones non agricoles Chargé de mission Santé-Environnement & Agriculture GENERATIONS FUTURES INRA IRSTEA La Demeure Historique Réseau d'électricité Ruffine Frédéric SNCF réseau Dominique LE-VILLAIN ROY JANOT de transport Christian Vincent Armelle Claire HUYGHE DE RUDNICKI VERJAT GRANDET Directeur Scientifique Adjoint Ingénieur de recherche Déléguée générale Directeur du département concertation et environnement Chargée d'affaires environnement Chef de groupe environnement Direction technique Réseau, chef de projet du programme post-glyphosate 26-mai 26-mai 23-mai 27-mai 12-août 29-août 26-mai François VEILLERETTE Directeur 17-sept 19-sept 19-sept française de Thomas CHARRIER Responsable environnement FIOCRE Directeur technique et R&D 11-avr 13-mai 13-mai
Michel JeanPierre
MORIN PUJOLS
Chef du département voies et abords Direction technique Réseau, responsable du pôle maîtrise de la végétation
23-mai 23-mai
Société des autoroutes du Nord et de l'Est de la France
JeanMarie
DECK
Responsable département
26-juin
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Organisme
Prénom
Nom
Fonction
Date
de
rencontre Union des entreprises pour la protection des jardins et espaces publics Union Nationale des Fanny DEVOGHELAERE Conseillère technique qualité, sécurité, environnement Barbara DEKEYSER Secrétaire adjointe déléguée à la qualité, la sécurité et l'environnement 29-mai 29-mai Nicolas MARQUET Directeur général 29-mai
Entreprises du Paysage
VITIROVER
Arnaud
DE FOUCHARDIERE
LA
Directeur général
16-sept
ZASSO ZASSO
Olivier Benjamin Olivier
BOULY ERGAS DOURS
Ingénieur Executive Chairman Expert gazon
27-juin 27-juin 11-avr
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: Liste des sigles utilisés
ACTA AMM ANR ANSES APCA ARAFER ASFA ATEX BNV-D CASDAR CEI CER CEREMA CGAAER CGDD CGEDD CIRC CMPC CRE DGAL DIR DRAAF DVP ECHA EFSA EMR FIFA HLM Association de coordination technique agricole Autorisation de mise sur le marché Agence nationale de la recherche Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail Assemblée permanente des Chambres d'agriculture Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières Association des sociétés françaises d'autoroutes ATmospheres EXplosive Banque nationale des ventes Compte d'affectation spécial « Développement agricole et rural » Centre d'entretien et d'intervention (des routes au sein d'une DIR) Communauté européenne du rail Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux Commissariat général au développement durable Conseil général de l'environnement et du développement durable Centre international de recherche sur le cancer Coût moyen pondéré du capital Commission Régulation de l'Energie Direction Générale de l'Alimentation Directions interdépartementales des routes nationales Direction régionale de l'agriculture et de la forêt Dispositif végétalisé permanent Agence européenne des produits chimiques Autorité européenne de sécurité des aliments État membre rapporteur Fédération internationale de football association Habitation à loyer modéré
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IAU Ile de France ICPE JEVI INRA INSERM LGV LMR ONF OPECST PPP PSD RAR RD RNN RTE SANEF SLO SNCF TGV TMS TPC TRI TURPE UEFA UNEP VC ZNA ZNT
Institut d'aménagement et d'urbanisme de la région d'Île-de-France (Institut Paris Région depuis 2019) Installations classées pour la protection de l'environnement Jardins, espaces végétalisés et infrastructures Institut national de la recherche agronomique Institut national de la santé et de la recherche médicale Ligne à grande vitesse limite maximale de résidus Office national des forêts Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques Produit(s) phytopharmaceutique(s) Plantain, Sétaire verte, Digitaire rapport d'évaluation de renouvellement Routes départementales Réseau routier national Réseau de transport d'électricité Société des autoroutes du Nord et de l'Est de la France Services librement organisés Société nationale des chemins de fer français Train à grande vitesse. Troubles musculosquelettiques Terre-plein central Taux de rentabilité interne Tarif d'Utilisation des Réseaux Publics d'Électricité Union of European Football Associations Union Nationale des Entreprises du Paysage Voirie communale Zone non agricole Zone non traitée
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: Les produits alternatifs aux produits phytopharmaceutiques de synthèse
1 Les différentes catégories de produits alternatifs La réglementation sur l'utilisation des produits phytopharmaceutiques prévoit des mesures dérogatoires pour certaines catégories de produits alternatifs aux produits de synthèse. Il s'agit notamment des produits de biocontrôle, des produits qualifiés à faible risque, des produits autorisés en agriculture biologique, et de produits composés uniquement de substances de base. La réglementation définit par ailleurs les préparations naturelles peu préoccupantes (PNPP). Dans la littérature technique, les termes de produits de lutte biologique sont également employés. Enfin, les stimulateurs des défenses naturelles et les substances naturelles à effet biostimulant sont souvent citées parmi les produits alternatifs. Ces différentes catégories de produits se recoupent largement, ce qui peut créer de la confusion chez les utilisateurs. Ils sont souvent mentionnés par opposition : aux pesticides, terme employé de façon ambivalente dans le vocabulaire courant, mais défini de façon précise dans la réglementation. L'article 3 de la directive 2009/128/CE pour une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable précise : « Aux fins de la présente directive, on entend par [...] « pesticide » : o un produit phytopharmaceutique au sens du règlement (CE) no 1107/2009 ; o un produit biocide comme défini dans la directive 98/8/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 février 1998 concernant la mise sur le marché des produits biocides. » aux produits de synthèse. Un grand nombre de produits phytopharmaceutiques sont en effet issus de la chimie organique. Toutefois la notion de produit de synthèse est également ambivalente dans la mesure où elle concerne aussi des produits issus de la chimie minérale, comme le sulfate de cuivre, très utilisé en agriculture biologique. De même, les phéromones de synthèse sont classées comme des produits de biocontrôle en tant que médiateurs chimiques.
Les paragraphes suivants se proposent de clarifier les définitions de ces différentes catégories de produits alternatifs, leur nature et d'indiquer les sources donnant des listes de produits mis sur le marché. Parmi tous les produits alternatifs, seuls les produits de biocontrôle et les substances de base proposent des produits classés comme herbicides. 2 Les produits de biocontrôle 2.1 Définition des produits de biocontrôle La France est le seul État membre à donner une définition réglementaire des produits de biocontrôle. En effet, l'article L.253-6 du code rural et de la pêche maritime précise à propos du plan d'action national sur les produits phytopharmaceutiques : « Le plan s'accompagne d'une stratégie nationale de déploiement du biocontrôle, qui sont des agents et produits utilisant des mécanismes naturels dans le cadre de la lutte intégrée contre les ennemis des cultures. Ils comprennent en particulier :
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1° Les macro-organismes ; 2° Les produits phytopharmaceutiques comprenant des micro-organismes, des médiateurs chimiques comme les phéromones et les kairomones et des substances naturelles d'origine végétale, animale ou minérale. » Les micro-organismes sont définis dans le règlement CE) n° 1107/2009 comme « toute entité microbiologique, y compris les champignons inférieurs et les virus, cellulaire ou non, capable de se répliquer ou de transférer du matériel génétique ». Il s'agit par exemple de produits à base de Bacillus thuringiensis (préparation bactérienne contre les larves de lépidoptères), virus de la granulose (préparation virale contre les larves de carpocapse des pommes), Trichoderma sp. (champignon antagoniste) ... Par opposition, les macro-organismes sont définis dans l'article R.258-1 comme : « tout organisme autre qu'un micro-organisme tel que défini à l'article 3 du règlement (CE) n° 1107/2009 ». Les macro-organismes sont des prédateurs94 ou des parasitoïdes95 des organismes nuisibles pour les cultures. Selon leur régime alimentaire, ils sont entomophages (nourriture à base d'insectes) ou acarophages (nourriture à base d'acariens). Les macroorganismes peuvent être : des insectes, appartenant par exemple aux genres Adalia, Anthocoris, Aphelinus, Chrysoperla, Encarsia, Trichogramma... des acariens des genres Amblyseius, Hypoaspis, Macrocheles, Phytoseilulus... des nématodes des genres Heterorhabditis, Phasmarhabditis, Steinernema...
Contrairement aux micro-organismes, les macro-organismes ne sont pas des produits phytopharmaceutiques, et ils peuvent être commercialisés sans faire l'objet d'une autorisation de mise sur le marché. En revanche, l'entrée sur un territoire96 et l'introduction dans l'environnement de macro-organismes non indigènes utiles aux végétaux, notamment dans le cadre de la lutte biologique, sont réglementées par l'article R.258-1 du code rural et de la pêche maritime. Ces organismes doivent faire l'objet d'une évaluation favorable portant sur le risque phytosanitaire et environnemental, incluant l'impact sur la biodiversité. Le recours à des macro-organismes est développé dans les cultures sous serres dans le cadre de la lutte biologique. Des producteurs en agriculture biologique préfèrent toutefois pratiquer une lutte biologique par conservation en favorisant les auxiliaires autochtones, plutôt que par introduction. Un médiateur chimique est une substance sécrétée par un organisme vivant dont les molécules agissent sur sa physiologie, son comportement ou sur d'autres organismes quand elle est émise dans le milieu ambiant97. Dans le domaine de la protection des végétaux, des phéromones de synthèse sont utilisées pour brouiller la communication intraspécifique entre
94
Un prédateur capture sa proie et la tue immédiatement. Un parasitoïde provoque la mort plus ou moins rapidement d'un individu-hôte aux dépens duquel sa ou ses larves effectuent leur développement. 96 Les territoires suivants sont considérés comme distincts : l'ensemble des départements de la France métropolitaine continentale, la Corse, la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, La Réunion, Mayotte, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre et Miquelon. 97 Index phytosanitaire ACTA. 2018.
95
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organismes nuisibles (lépidoptères en particulier), et des kairomones synthétiques sont employées pour renforcer ou perturber la communication interspécifique (attraction des pollinisateurs, recherche des végétaux par les ravageurs).
Les substances naturelles d'origine végétale, animale ou minérale sont définies dans la note de service DGAL/SDQSPV/2019-615 du 22 août 2019 de la façon suivante : « On entend par substance naturelle, toute substance naturellement présente et qui a été identifiée en l'état dans la nature. Cette substance est : soit extraite d'un matériau source naturel ; soit obtenue par synthèse chimique et strictement identique à une substance naturelle telle que décrite ci-dessus.
Les substances issues de procaryotes, eucaryotes unicellulaires ou champignons appartiennent à la catégorie des substances naturelles. » Ces substances naturelles peuvent être par exemple de l'acide acétique (herbicide), de l'acide caprylique (herbicide), de l'acide pélargonique (herbicide), du cerevisane (stimulateur des défenses naturelles), de la farine de sang (répulsif de cerfs), de l'huile de colza estérifiée (adjuvant), de l'huile de paraffine (insecticide et acaricide), de la laminarine (stimulateur de défenses naturelles), des pyréthrines (insecticides), du soufre (fongicide), du spinosad (insecticide), du sulfate de fer (destruction de mousses) ... En revanche, le sulfate de cuivre n'est pas classé dans la catégorie des substances naturelles, puisqu'il est issu de la chimie minérale.
2.2 Listes de produits de biocontrôle La principale source d'information actualisée pour connaître les listes de produits de biocontrôle est la note de service de la Direction générale de l'alimentation intitulée « Liste des produits phytopharmaceutiques de biocontrôle, au titre des articles L.253-5 et L.253-7 du code rural et de la pêche maritime ». Ces deux articles prévoient en effet des mesures dérogatoires pour les « produits de biocontrôle figurant sur une liste établie par l'autorité administrative ». Cette liste est régulièrement mise à jour, et la dernière publication à la date de rédaction est la note de service DGAL/SDQSPV/2019-615 du 22 août 2019. Elle contient 40 produits herbicides, à base d'acide acétique, d'acide caprylique ou d'acide pélargonique. Les produits phytopharmaceutiques de biocontrôle cités dans la note de service répondent aux critères suivants : ils sont conformes à la définition de l'article L.253-6, mais ils ne comportent pas les macro-organismes qui ne sont pas des produits phytopharmaceutiques ; ils bénéficient d'une autorisation de mise sur le marché ; ils respectent des dispositions spécifiques en matière de sécurité pour la santé et l'environnement :
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o o
la substance ne doit pas être candidate à la substitution au sens du point 4 de l'annexe II du règlement 1107/2009 ; le produit ne doit pas comporter une des mentions stipulées de danger soit pour la santé publique, soit pour l'environnement.
La note de service propose quatre listes de produits de biocontrôle à base de : micro-organismes ; médiateurs chimiques ; substances naturelles d'origine végétale, animale ou minérale ; pièges à insectes.
Le site E-PHY (https://ephy.anses.fr) de l'ANSES permet aussi d'obtenir une liste des produits de biocontrôle, qui peut être en retard par rapport à la liste officielle. Lors d'une consultation le 26 septembre 2019, une liste de 360 produits phytopharmaceutiques de biocontrôle a ainsi été obtenue. Enfin, sur une base annuelle, l'Association de coordination technique agricole édite l'« Index ACTA Biocontrôle ». La troisième édition a été publiée en avril 2019. 2.3 Possibilités et freins pour le recours aux produits de biocontrôle Une enquête réalisée par AgroParisTechService Études pour IBMA France lors du 2è trimestre 2018 auprès de 542 agriculteurs aboutit aux conclusions suivantes : « Encore des marges de progrès à atteindre côté notoriété des produits de biocontrôle : près d'un agriculteur sur quatre n'en a jamais entendu parler, même si 17 % d'entre eux utilisent finalement déjà des produits de biocontrôle. La volonté d'utiliser davantage les solutions de biocontrôle dans un proche avenir : 44 % des agriculteurs interrogés utilisent des produits de biocontrôle : o o ils sont plus nombreux dans les cultures spécialisées (jusqu'à 84 %), moins en grandes cultures (34 %). toutes cultures confondues, ils sont plus de la moitié à souhaiter utiliser davantage de produits de biocontrôle dans le futur.
6 % en ont utilisé dans le passé, et ont arrêté ; la moitié d'entre eux se dit prêt à le réenvisager.
Parmi les agriculteurs n'utilisant pas de produits de biocontrôle, la quasi-totalité envisage d'en utiliser dans le futur un agriculteur sur cinq avec certitude. Le biocontrôle a une bonne image auprès des agriculteurs qui voient parmi ses avantages son aspect alternatif aux produits conventionnels, le meilleur respect de l'environnement et de la
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santé, et sa contribution à une meilleure image de l'agriculture auprès des consommateurs. Ils identifient parmi les freins au déploiement du biocontrôle le coût trop élevé de ces produits, le manque d'accompagnement et de formations adaptées, le manque d'efficacité et/ou de preuves d'efficacité et le manque de produits. Le besoin d'accompagnement dans le choix et l'utilisation de ces méthodes alternatives est réclamé par plus de deux agriculteurs sur trois (70 %), alors que 39 % des agriculteurs interrogés disent que leur principal fournisseur de produits phytosanitaires ne leur a jamais proposé de produits de biocontrôle. »
3 Les produits phytopharmaceutiques à faible risque 3.1 Définition des produits phytopharmaceutiques à faible risque Le règlement CE) n° 1107/2009 définit :
1 - les substances à faible risque dans l'article 22 : « Par dérogation à l'article 598, une substance active satisfaisant aux critères prévus à l'article 499 est approuvée pour une période n'excédant pas quinze ans, si elle est considérée comme une substance active à faible risque et s'il est prévisible que les produits phytopharmaceutiques contenant cette substance ne présenteront qu'un faible risque pour la santé humaine, la santé animale et l'environnement, conformément à l'article 47, paragraphe 1. »
2 les produits phytopharmaceutiques à faible risque dans l'article 47 : « Lorsque toutes les substances actives contenues dans un produit phytopharmaceutique sont des substances actives à faible risque telles que visées à l'article 22, ce produit est autorisé comme produit phytopharmaceutique à faible risque à condition que des mesures spécifiques d'atténuation des risques ne se révèlent pas nécessaires à la suite d'une évaluation des risques. Ce produit phytopharmaceutique satisfait en outre aux conditions suivantes : a) les substances actives, phytoprotecteurs et synergistes à faible risque qu'il contient ont été approuvés au titre du chapitre II ; b) il ne contient pas de substance préoccupante100 ; c) il est suffisamment efficace ; d) il ne provoque pas de souffrances ou de douleurs inacceptables chez les vertébrés à combattre ;
98 L'article 5 établit pour la première approbation une durée maximale de dix ans. 99 L'article 4 fixe les critères généraux d'approbation des substances actives. 100 L'article 3 précise la définition des substances préoccupantes : toute substance intrinsèquement capable de provoquer un effet néfaste pour l'homme, les animaux ou l'environnement et contenue ou produite dans un produit phytopharmaceutique à une concentration suffisante pour risquer de provoquer un tel effet.
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e) il est conforme à l'article 29101, paragraphe 1, points b), c) et f) à i). Ces produits sont dénommés « produits phytopharmaceutiques à faible risque ». »
3.2 Listes de produits phytopharmaceutiques à faible risque Les listes de substances actives à faible risque sur la base de données sur les pesticides de l'Union européenne à l'adresse suivante :
https://ec.europa.eu/food/plant/pesticides/eu-pesticidesdatabase/public/?event=homepage&language=FR
Au 26 septembre 2019, cette base présente la liste suivante de 16 substances actives à faible risque. Substances actives classées à faible risque et approuvées au sens du règlement n°1107/2009. (Consultation EU Pesticides database du 26 septembre 2019)
Substance active
ABE-IT 56
Nature
Composants de lysate de Saccharomyces cerevisiae, souche DDSF623 Champignon microscopique hyperparasite de champignons pathogènes
Fonction
Fongicide
Ampelomyces quisqualis strain AQ10 Bacillus amyloliquefaciens strain FZB24 Cerevisane
Fongicide
Bactérie utilisée en lutte bioloqique Fongicide contre des champignons pathogènes Extrait de la souche LAS117 du champignon microscopique Saccharomyces cerevisiae Champignon microscopique hyperparasite de champignons pathogènes Stimulateur de défenses naturelles Fongicide
Clonostachys rosea strain J1446 (Gliocladium catenulatum strain J1446)
Coniothyrium minitans Champignon microscopique du Fongicide strain CON/M/91-08 (DSM sol, hyperparasite des sclérotes de 9660) Sclerotinia sp. COS-OGA Complexe de la famille des oligosaccharides associant des fragments de pectine (OGA) Stimulateur de défenses naturelles
101 L'article 29 fixe les conditions d'autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques.
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Substance active
Nature
extraite de pelure d'agrumes et de pommes, et des fragments de chitosan (COS) provenant de l'exosquelette de crustacés.
Fonction
Ferric phosphate Isaria fumosorosea Apopka strain 97 (formely Paecilomyces fumosoroseus) Laminarin
Phosphate ferrique Champignon microscopique du sol, utilisée en lutte biologique contre des insectes nuisibles. Polysaccharide extrait de l'algue Laminaria digitata Variant du Pepino mosaic virus. Variant du Pepino mosaic virus. Champignon microscopique parasite de nématodes Variant du Pepino mosaic virus.
Molluscicide Insecticide
Stimulateur de défenses naturelles Stimulateur de défenses naturelles Stimulateur de défenses naturelles Nématicide Stimulateur de défenses naturelles, et inoculation de virus contre le Pepino mosaic virus. Fongicide
Mild Pepino Mosaic Virus isolate VC 1 Mild Pepino Mosaic Virus isolate VX 1 Pasteuria nishizawae Pn1 Pepino mosaic virus strain CH2 isolate 1906
Saccharomyces cerevisiae strain LAS02 Trichoderma atroviride strain SC1
Champignon microscopique du groupe des levures, antagoniste de champignons pathogènes Champignon microscopique, antagoniste de champignons pathogènes
Fongicide
La base de données sur internet E-PHY de l'ANSES permet de consulter la liste des produits phytopharmaceutiques autorisés à la mise sur le marché en France, et classés à faible risque. Au 26 septembre 2019, la base de données affiche une liste de 27 produits phytopharmaceutiques à faible risque. À ce jour, il n'y a ni substance active, ni produit phytopharmaceutique à faible risque qui serait classé comme herbicide.
4 Les produits composés uniquement de substances de base
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4.1 Définition des substances de base L'article 23 du règlement 1107/2009 précise : « Une substance de base est une substance active : a) qui n'est pas une substance préoccupante ; et b) qui n'est pas intrinsèquement capable de provoquer des effets perturbateurs sur le système endocrinien, des effets neurotoxiques ou des effets immunotoxiques ; et c) dont la destination principale n'est pas d'être utilisée à des fins phytosanitaires, mais qui est néanmoins utile dans la protection phytosanitaire, soit directement, soit dans un produit constitué par la substance et un simple diluant; et d) qui n'est pas mise sur le marché en tant que produit phytopharmaceutique. » Les substances de base ont donc un statut particulier dans le sens où elles relèvent du règlement 1107/2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, mais sans être elles-mêmes mises sur le marché en tant que produits phytopharmaceutiques, ni pour être employées principalement pour la protection des plantes.
4.2 Listes des substances de base Le liste des substances de base peut être obtenue grâce à la base de données sur les pesticides de l'Union européenne. Au 26 septembre 2019, elle comprend la liste suivante de 20 substances de base, dont 2 avec un effet herbicide mais non utilisables en ZNA.
Substances de base approuvées au sens du règlement n°1107/2009. (Consultation EU Pesticides database du 26 septembre 2019)
Substance active
Beer Calcium hydroxide Chitosan hydrochloride Clayed charcoal Diammonium phosphate Equisetum arvense L. Fructose Hydrogen peroxide Bière
Nature
Fonction
Molluscicide Fongicide Stimulateur de défenses naturelles Protecteur Attractif pour piégeage Fongicide Stimulateur de défenses naturelles Bactéricide, fongicide
Chaux éteinte Chlorhydrate de chitosane Charbon argileux Phosphate de diammonium Prèle Sucre simple présent dans les fruits et le miel Eau oxygénée
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Substance active
Lecithins Mustard seeds powder Onion oil Salix spp. Cortex Sodium chloride Sodium hydrogen carbonate Sucrose Sunflower oil Talc E553B Urtica spp. Vinegar Whey
Nature
Phospholipides extraits du vivant Poudre de graines de moutarde Huile d'oignon Écorce de saule Sel de table Bicarbonate de soude Saccharose Huile de tournesol Talc (roche broyée) Ortie Vinaigre Lactosérum
Fonction
Fongicide Fongicide Masqueur d'odeur Fongicide Fongicide, insecticide Fongicide, herbicide102 Stimulateur de défenses naturelles Fongicide Fongicide, insecticide Fongicide, insecticide, acaricide, Bactéricide, fongicide, herbicide103 Fongicide
5. Produits dont l'usage est autorisé dans le cadre de l'agriculture biologique. 5.1 Définition des produits autorisés en agriculture biologique Les produits destinés à la protection des plantes en agriculture biologique doivent être conformes d'une part aux réglementations communautaires et nationales sur les produits phytopharmaceutiques, et d'autre part aux réglementations encadrant la production en agriculture biologique : les règlements CE n°834/2007 et n°889/2008.
5.2 Listes de produits autorisés en agriculture biologique L'Institut de l'agriculture et de l'alimentation biologiques (ITAB) diffuse sur son site web (http://www.itab.asso.fr) les listes de produits autorisés en agriculture biologique :
102
103
Le bicarbonate de soude est approuvé en tant que substance de base par le règlement 2015/2069. Le rapport SANTE/10667/2015 rev. 4 du 26 janvier 2018précise que l'utilisations comme herbicide est autorisée uniquement sur les sur les plantes en pot dans les serres. Il n'est donc pas possible d'utiliser le bicarbonate de soude comme herbicide en ZNA. Le vinaigre est approuvé en tant que substance de base depuis juillet 2015 par le règlement 2015/1108, pour des fonctions bactéricide et fongicide (traitement de semences et désinfection outils), puis herbicide dans des conditions restreintes. Le rapport SANCO/12896/2014 rev3 du 13 décembre 2018 précise que les utilisations autorisées portent uniquement sur les plantes médicinales, aromatiques ou plantes à parfum (PPAMC) avant la levée de la culture, en raison d'un risque de phytotoxicité sur jeunes plantes. Il n'est donc pas possible d'utiliser le vinaigre comme herbicide en ZNA.
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les produits phytopharmaceutiques, dont aucun n'est classé comme herbicide ; les substances de base, dont deux présentent un effet herbicide.
Le site E-PHY de l'ANSES identifie par ailleurs les produits phytopharmaceutiques utilisables en agriculture biologique. Lors d'une consultation le 26 septembre 2019, une liste de 347 produits phytopharmaceutiques autorisés en agriculture biologique a ainsi été obtenue, dont aucun herbicide.
6. - Les stimulateurs des défenses naturelles Le réseau mixte technologique ELICITRA définit les stimulateurs des défenses naturelles (SDN) ou stimulateurs de défense des plantes (SDP) comme « toute substance ou tout microorganisme vivant non pathogène qui, appliqué sur une plante, est capable de promouvoir un état de résistance significativement plus élevé par rapport à une plante non traitée face à des stress biotiques ». Les SDN activent donc différents mécanismes au sein de la plante pour la rendre plus résistante aux attaques des organismes nuisibles. La définition des SDN est liée à leur mode d'action indirect sur les bioagresseurs, et non à leur nature qui peut être synthétique. Certains produits phytopharmaceutiques sont considérés comme des SDN. Ils contiennent des substances actives telles que l'acibenzolar-S-méthyle, le Bacillus subtilis QST 713, le Bacillus amyloliquefaciens ssp. plantarum strain D747, la cerevisane, le fenugrec, la laminarine, etc. Les SDN comportent donc des produits de synthèse, des produits de biocontrôle, et des produits à faible risque. Certains herbicides réduisent la gravité d'attaques de champignons, ce qui pourrait s'expliquer par une stimulation des défenses naturelles. Mais en sens inverse, il n'y a pas de produit homologué comme herbicide grâce à un effet de stimulation des défenses naturelles.
7. Les substances naturelles à usage biostimulant L'effet des substances naturelles à usage biostimulant est « de stimuler les processus naturels pour améliorer/avantager l'absorption des nutriments, l'efficience des nutriments, la tolérance aux stress abiotiques, et la qualité des cultures, indépendamment du contenu en nutriments du biostimulant »104 Ils peuvent renforcer la résistance des plantes cultivées aux attaques d'organismes nuisibles. Toutefois ils ne relèvent pas du cadre réglementaire des produits phytopharmaceutiques, mais de celui des fertilisants105. Ils bénéficient, comme les autres matières fertilisantes, d'un cadre
104 European Biostimulants Industry Council. Voir : http://www.biostimulants.eu/ 105 En effet, la réglementation des produits phytopharmaceutiques encadre les produits qui protègent les végétaux, exercent une action autre que nutritive, assure la conservation des produits végétaux, détruisent les végétaux et freinent une croissance indésirable des végétaux (Art 2 du Règlement (CE) n° 1107/2009). La réglementation des matières fertilisantes encadre les produits commercialisés en tant qu'engrais CE (Règlement (CE) 2003/2003), les amendements et les biostimulants (Article L. 255-1 du Code rural et de la pêche maritime).
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plus souple pour leur commercialisation, notamment en ce qui concerne leur évaluation.
8. Préparations naturelles peu préoccupantes La France est le seul État membre à avoir créé une catégorie pour les préparations naturelles peu préoccupantes (PNPP). L'article L.253-1 du code rural et de la pêche maritime définit ces produits comme suit : « Une préparation naturelle peu préoccupante est composée exclusivement soit de substances de base, [...] soit de substances naturelles à usage biostimulant. Elle est obtenue par un procédé accessible à tout utilisateur final. Les substances naturelles à usage biostimulant sont autorisées selon une procédure et une évaluation simplifiées, dont les modalités sont fixées par voie réglementaire. La procédure et l'évaluation sont adaptées lorsque la demande d'autorisation porte sur la partie consommable d'une plante utilisée en alimentation animale ou humaine. »
9. Produits de lutte biologique Les produits de lutte biologique permettent de maîtriser les organismes nuisibles pour les cultures au moyen d'organismes vivants antagonistes. Ils correspondent aux macroorganismes et aux microorganismes définis plus haut dans le cadre des produits de biocontrôle. * *
*
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: Extrait de l'interview du sénateur Joël Labbé
Source : « En vert et avec vous » - juillet 2018
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: Données complémentaires sur les méthodes alternatives non chimiques
Source : UNEP
Traitement manuel et mécanique
Traitement thermique
Traitement avec des produits de biocontrôle
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: Amélioration de l'ergonomie avec un désherbeur
Source : Matériel et Paysage, n° 146, avril 2019 (extrait)
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(ATTENTION: OPTION e pas la variété des pratiques agricoles. Ainsi, le désherbage nécessite d'autres libellés, comme : 12705902 Vigne*Désherbage*Cult. Installées Les traitements généraux constituent une catégorie d'usages permet l'autorisation de préparations sur l'ensemble des cultures du catalogue des usages, avec des libellées comme suit : 11015921 Traitements généraux*Désherbage*Zones Cult. Avt Plantat. 11015933 Traitements généraux*Désherbage*Zones non cult. Les ZNA professionnelles et amateurs sont définies comme étant des « espaces aménagés et/ou végétalisés où les plantes ne sont pas cultivées à des fins commerciales ». Ces espaces comprennent41 notamment :
« des compartiments entretenus par un public professionnel :
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les espaces communaux, de collectivités territoriales, et certains espaces privés (jardins - espaces verts, parcs d'attraction et de loisirs, plantations d'alignement et à massifs, abords de bâtiments, voirie, trottoirs et îlots directionnels, terrains de sport, cimetières, cours et plans d'eau, et zones subaquatiques, arboretums, etc.) ; les réseaux de communication (routes et autoroutes, chemins de fer, aéroports, zones fluviales et portuaires), ainsi que leurs abords et accotements ; les zones engazonnées (terrains de sports, golfs, hippodromes, pelouses d'espaces collectifs divers), les zones industrielles en activité (sites de production, de transformation et de transport d'électricité, installations classées Seveso, ou non, centres de fret, aires de stockage, etc.), ainsi que les friches industrielles ; les enceintes militaires ; les forêts suburbaines ainsi que divers espaces naturels ;
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des compartiments entretenus par un public non professionnel amateur : ces espaces dits « jardins amateurs » et jardins partagés regroupent divers compartiments dont des espaces cultivés plantés d'espèces fruitières, potagères, ou ornementales, abords de maison, allées de jardins. ».
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Note de service DGAL/SDQPV/2015-253 du 10/03/2015. Note de service DGAL/SDQPV/2015-253 du 10/03/2015.
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Une distinction nette doit être faite entre le terme « usage » au sens des AMM, tel qu'il vient d'être présenté, et le terme « utilisation ». Pour mémoire, la mission a choisi d'écrire « utilisation » dans le présent rapport lorsqu'il s'agit de qualifier plus précisément un emploi par les opérateurs, notamment sur les infrastructures, sur les voies ferrées, sur les clôtures, avant gazon... La mission considère également que la notion de « usage courant », dans le cadre de l'article 50.2, doit s'entendre comme l'« utilisation courante » à la date de la décision de retrait ou de renouvellement des autorisations pour les produits contenant du glyphosate. À titre d'illustration, le tableau ci-dessous élaboré par la mission, citant la note de service DGAL sur le catalogue des usages, montre des exemples de comparaison entre les notions d'usage et d'utilisation.
Usages des PPP en ZNA au sens des AMM
(non exhaustif)
Utilisations des PPP en ZNA
(non exhaustif)
Usage « Désherbage total »
Utilisations dans des sites désherbés essentiellement pour des raisons de sécurité (risques d'incendie, d'intrusion, de maintien du bon état de réseaux ou d'ouvrages d'art...etc.) avec des produits à fort niveau d'efficacité, montrant un spectre d'activité très large et polyvalent, avec une persistance suffisante pour maintenir un faible niveau d'enherbement toute l'année. Les sites industriels, les voies ferrées, les centrales de transformation et de production d'électricité, etc. constituent les compartiments principaux inclus dans cet usage.
Usages « Désherbage des Utilisations pour l'entretien des zones herbacées extensives zones herbeuses » « sécurisées » peu ou pas fréquentées par le public, dont la
végétation a pour rôle essentiel d'assurer une couverture destinée à ralentir les flux hydrologiques, à réduire l'érosion des sols et à assurer un fond paysager d'accompagnement des infrastructures. Ce sont par exemple les zones herbeuses recouvrant les accotements routiers et autoroutiers, les abords de chemin de fer, de zones aéroportuaires, des sites industriels, etc. Ces zones sont constituées d'une végétation composée d'une multitude d'espèces herbacées à dominante de graminées et autre végétaux de taille basse, résultant d'une pousse naturelle ou d'un ensemencement ou/et plantation. Les objectifs d'entretien de ces zones visent à réguler une végétation herbacée, semi-ligneuse et ligneuse à fort potentiel de développement, allergisante ou urticante, pouvant porter atteinte aux fonctionnalités recherchées (visibilité, sécurité, stabilité, incendie...) pour le maintien d'un bon usage des infrastructures. Les zones herbeuses n'incluent pas les usages « gazons de
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Usages des PPP en ZNA au sens des AMM
(non exhaustif)
Utilisations des PPP en ZNA
(non exhaustif)
graminées » qui constituent un compartiment fondamentalement différent en termes de fonctionnalité et d'objectif d'entretien
Usage « PJT42, cimetière, voies de communication »
Compartiments régulièrement entretenus, fréquentés par le public, souvent en partie plantés, entretenus pour des raisons esthétiques, sanitaires ou commoditaires43, avec des exigences de sélectivité des produits utilisés vis-à-vis des végétaux environnants. Utilisations en zones engazonnées, y compris en production de gazons de placage, dont l'importance à l'échelon national ne pouvait justifier l'attribution d'usages spécifiques. Tous les produits homologués pour ces usages peuvent ainsi être utilisés pour la protection des gazons de placage. La partie engazonnée des terrains de sport rentre dans cette catégorie.
Usages « gazons de graminées »
Tableau 4 : Exemples de correspondance entre les usages et les utilisations de produits phytopharmaceutiques dans les zones non agricoles (Source : DGAL44+ compléments par la mission).
3.3.2. La segmentation des utilisations
Les firmes détentrices des produits phytopharmaceutiques demandent des AMM pour des usages listés dans le catalogue national. Or, ces usages sont définis de façon très globale pour les ZNA, comme «usages non agricoles * désherbage * zones herbeuses». Il n'est pas possible de répondre aux questions posées par l'article 50.2 avec la nomenclature existante. En effet, les usages sont déterminés en zone agricole en fonction de l'efficacité et des impacts sur chaque culture, et les usages définis dans l'AMM recouvrent les utilisations. Il n'en est pas de même en ZNA où existent des utilisations par rapport à des objectifs propres aux industriels lesquels sont d'un autre ordre que la pratique agricole. Parce que l'article 50.2 est construit sur l'existence de méthode non chimique, son application nécessite de préciser les utilisations du glyphosate, suivant les critères introduits par cet article. Ce qui impose l'introduction d'une dimension supplémentaire, non liée au produit, ni à son impact, ni à son efficacité, par rapport au catalogue des usages. Cela conduira à raisonner sur une nouvelle segmentation plus détaillée dans un catalogue révisé. Cette segmentation doit permettre de répondre, pour chacune d'entre elles, de façon plus précise aux questions suivantes :
42 43
PJT : parcs, jardins, trottoirs. Nuisances sur mobilier urbain ou tout bien 44 Note de service DGAL/SDQPV/2015-253 du 10/03/2015.
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Existe-t-il des méthodes alternatives non chimiques ? Sont-elles d'un emploi courant ? Présentent-elles des inconvénients majeurs sur les plans économiques et pratiques ?
Les paragraphes suivants vont proposer une segmentation adaptée aux besoins induits par l'article 50.2. 3.3.2.1 Par activité économique ou par objet technique Se pose donc une première question sur la nature de la segmentation des utilisations à savoir : par activité économique générale (routière, ferroviaire, industrielles, etc.) ; par objet traité (rails et ballast, chaussée, ouvrage d'art, terrain support d'installation industrielle, clôture, pelouses de terrain de sport, etc.).
L'article 50.2 renvoie au 50.1 pour le détail de l'évaluation. Ce dernier article mentionne «que la substitution... ne présente pas d'inconvénient économique majeur», ce qui invite à un examen par activité économique générale. En revanche, l'examen de l'usage courant d'une utilisation et de la même manière de l'inconvénient pratique majeur - n'a de sens que pour chaque objet technique. Par exemple, les clôtures sont communes à toutes ces activités et elles sont très souvent en ZNA des obligations réglementaires. Dans ces conditions se pose la question de savoir comment et avec quoi réglementer «l'utilisation» en ZNA. De fait, l'ANSES avec la DGAL se propose d'ajouter cette dimension sous forme de mentions supplémentaires dans le catalogue des usages et/ou des mentions supplémentaires dans les AMM. Mais cet ajout d'un critère supplémentaire résultant de l'article 50.2 devra évidemment être documenté et traçable par l'ANSES. Il ne pourra en aucun cas être d'initiative du demandeur de l'autorisation, qui évidemment ne peut ni connaître ni se prononcer sur une appréciation au sens des critères de l'article 50.2. Cette considération suffit d'ailleurs à établir qu'il s'agit bien d'une dimension nouvelle par rapport à celle du catalogue des usages. En conséquence, ne laisser personne sans solution à court terme en ZNA conduira probablement à maintenir des AMM dont les usages/utilisations seront restreints aux seuls besoins de certains objets techniques. À titre d'exemple, la considération d'une dizaine d'activités économiques générales et d'une dizaine d'objets techniques conduirait à une centaine de mentions, dont la cohérence d'ensemble serait pour le moins peu perceptible. Ainsi, il ne manquera pas d'apparaître contradictoire, pour un même objet technique (par exemple, les ouvrages d'art ou les clôtures), d'autoriser l'usage du glyphosate dans un secteur économique (par exemple, le transport ferroviaire) au motif d'un «inconvénient économique majeur» et l'interdire dans un autre secteur (par exemple, les concessions autoroutières) au motif que l'inconvénient économique n'y serait pas majeur. Malgré tout, la mission ne peut éviter de prendre en considération en même temps une segmentation par activité économique et une segmentation par objet technique pour l'application de l'article 50.2.
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3.3.2.2 La diversité des objets techniques La seconde question est celle du détail de cette segmentation des utilisations, alors que les objets techniques sont les plus variés et que leur traitement est très spécialisé. L'analyse menée au titre du 50.2 doit ainsi porter de manière détaillée sur chacun de ces objets techniques. Le concept fondamental à considérer est celui d'une technique alternative (non chimique) dans le détail de chaque utilisation. L'usage courant doit aussi, s'apprécier dans le détail de chaque utilisation précisément identifiée. Par exemple, le fauchage est une technique très répandue. Pour autant, elle n'est pas une technique alternative dans le détail de chaque utilisation. Le glyphosate sur les routes est utilisé par exemple non pas "à la place du fauchage45", mais bien parce que pour certaines utilisations très précises, il constitue la seule méthode possible : au regard de la conception de l'infrastructure46 ; dans les conditions normales de son exploitation (service à l'usager, risque pour les travailleurs, etc.).
Cette conception tient évidemment compte de l'état de l'art dont fait partie emploi de PPP depuis les années 1920-1930 et un développement massif dans l'après-guerre. L'exemple des postes électriques est éclairant à cet égard : construire des postes électriques avec des terrains végétalisés suppose une autre conception et ils sont plus coûteux. L'exemple du bunker de golf est aussi éclairant. Faucher un bunker (qui est un objet technique particulier au sein d'un ensemble et d'une activité qui s'appelle un golf) n'est tout simplement pas possible. En effet, par exigence fonctionnelle de ce sport qu'est le golf, un bunker est un obstacle construit en sable aussi pur que possible et maintenu intact dans le temps pour que les joueurs soient confrontés exactement aux mêmes difficultés et que l'on puisse comparer leurs performances à des années d'intervalle. Il n'y a pas de méthode alternative aux PPP autre que le désherbage manuel (sauf peut-être le remplacement complet du sable des bunkers régulièrement). On peut aussi, citer les gazons de placage (proches de l'agriculture et à rapprocher de l'enherbement maîtrisé pratiqué en viticulture). Pour contenir ou supprimer les plantes vivaces, on pourrait considérer qu'il existe une alternative non chimique au glyphosate, à savoir le fauchage et le labourage profond. Or, au regard de l'état de l'art et des exigences sur le gazon de placage, ni le labourage profond ni le fauchage préalable aux semis ne sont en mesure de respecter les exigences du gazon de placage. Le fauchage et le labourage profond ne sont donc pas des alternatives non chimiques à considérer pour le gazon de placage. La diversité des objets techniques est ainsi extrême. Sauf à mener un travail de réingénierie gigantesque sans parler de savoir à l'initiative de qui ou qui pourrait en prendre la responsabilité d'en tirer des conséquences -, analyser dans le détail, pour chaque objet technique, si des méthodes alternatives pourraient être disponibles est impossible.
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puisque les agents d'entretien des routes et autoroutes passent l'essentiel de leur temps à faire du fauchage avec des tracteurs équipés à des endroits conçus pour être enherbés, sur des bas-côtés, des talus, bandes d'urgence enherbées, etc. 46 tant dans sa conception d'ensemble (type de terre-plein centraux (TPC) par exemple) que dans sa conception détaillée (joints de chaussée ou d'assainissement par exemple et ouvrages d'art)
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Il convient donc de raisonner sur des objets appréhendés suivant leurs caractéristiques techniques (et non pas leur caractéristique d'usage), en considération de ce que cette fonction impose quant aux conditions d'entretien au regard de la végétation. À titre d'illustration, le cas d'un giratoire est éclairant. Un giratoire est un cas particulier d'une route, conçu pour organiser des croisements à niveau. Il y a une unicité de fonction, mais c'est un ensemble d'objets techniques extrêmement variés (de façon non exhaustive, des bords en béton, de la terre, de l'enrobé voire des ouvrages d'art, etc.). Suivant les cas, son centre peut ou non être entretenu sans glyphosate non seulement en fonction de ses caractéristiques générales, mais aussi de ses conditions d'exploitation. S'engager dans une voie où, de manière réglementaire, seraient définis et segmentés, au regard de l'autorisation ou de l'interdiction de l'usage du glyphosate, des ensembles d'objets techniques comme les giratoires, ne paraît pas pertinent. Une approche fonctionnelle - au sens donc de la technique et non pas de l'usage s'impose ; par exemple, le «rail et ballast» des voies ferrées, les «chaussées» des routes, les «dispositifs de séparation de trafic et de sécurité» des routes, les «systèmes d'assainissement» des terrains artificialisés, les «pistes» des aéroports, les «clôtures», les «ouvrages d'art» des infrastructures. Cette analyse préalable est nécessaire pour, dans la suite du rapport, structurer les informations quant à la mise en oeuvre des critères définis par l'article 50.2.
3.3.3. La notion d'usage courant
Cette notion «d'usage courant» n'est pas plus avant définie dans le règlement CE 1107/2009. Il convient donc d'examiner comment elle doit concrètement être analysée. 3.3.3.1 L'adaptation à l'objet technique Le mot important est ici le mot courant. Ainsi, il ne saurait être regardé comme un usage courant : La simple existence d'une utilisation particulière dans une situation technique singulière (cf. supra) ou au sein d'une activité économique générale ; La possibilité, à un terme quel qu'il soit, de recourir à une alternative nouvelle résultant par exemple, de la recherche et du développement public ou privé, ne saurait être regardée comme un usage courant.
L'usage courant suppose : L'existence de l'outil au stade opérationnel ; Une technique disponible sur le marché ; Que son fabricant peut mettre sur le marché à hauteur de la demande ; Que cet outil soit adapté à chaque objet technique considéré ; Un caractère habituel, ordinaire au moment présent.
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3.3.3.2 L'effet économique des meilleures techniques disponibles On doit observer que, au regard des objets techniques, il n'y a pas d'usage courant d'une alternative à la technique dominante par simple effet économique. En effet, et sauf cas exceptionnel (micromarché, transition avérée avec des techniques émergentes sur un marché...), tout le monde se range à la meilleure technique disponible47, adaptée à chaque objet technique, ce qu'est le glyphosate en l'état actuel des choses s'agissant de l'élimination des végétaux, cette élimination étant nécessaire au regard des exigences auxquelles doivent répondre ces objets. L'histoire en témoigne, puisque depuis les années 1920-1930, le traitement chimique des voies ferrées s'est imposé, se substituant à la main d'oeuvre des compagnies ferroviaires constituée pour cette activité de détenus soumis ou non au régime des travaux forcés. De ce point de vue, le fait que le glyphosate soit le dernier de ces PPP désherbant total, et hégémonique, démontre que sa molécule est la plus efficace parmi celles de ces PPP Cette situation résulte d'une période suffisamment longue depuis l'après-guerre, pour que se structure progressivement une adaptation des objets techniques aux PPP en général et à la toute dernière remarquable efficacité du glyphosate en particulier. Ainsi les objets techniques se sont adaptés de manière de plus en plus fine à cette efficacité, mais cette efficacité a nourri en retour des performances attendues supérieures pour ces objets techniques. Par exemple, certains des systèmes de sécurité des trains utilisent maintenant comme support les rails des chemins de fer, parce que le glyphosate garantit qu'ils ne seront pas perturbés par la végétation. 3.3.3.3 Les micromarchés La considération de l'existence de micromarchés pourrait faire accroire qu'une technique distincte des techniques usuelles et utilisée dans le cadre de ces micromarchés serait de ce fait même une technique alternative d'usage courant. Ces micromarchés constituent des activités économiques distinctes, car les modèles économiques sont différents. Ces micromarchés sont le résultat d'une recherche de différenciation avec les marchés prédominants différenciation qui peut même justement passer par l'affichage d'une technique différente - qui permet des prix plus élevés au nom de cette différenciation. Pour illustrer le propos, les techniques employées par le «luxe» ne sont donc pas opposables ici d'un usage courant aux techniques employées par le «low cost», même dans un secteur d'activité de même nature, sauf à remettre en question le modèle économique de ce «low cost». Ainsi une clientèle particulière peut-elle accepter de payer cher une «technique» singulière. Mais la particularité de cette clientèle montre que ce n'est pas le même modèle économique. En conséquence, le constat de l'existence d'un micromarché qui ferait 10 % du marché total avec une technique «chère», ne peut permettre d'alléguer que cette technique est d'un usage courant si 90 % du marché fonctionne avec un autre modèle économique, c'est-à-dire une autre clientèle et une technique moins chère. C'est une distinction que l'on peut observer notamment dans le sport, les monuments historiques et même les communes. Pour cette raison, une pratique alternative non chimique que l'on constaterait dans le sport professionnel, le patrimoine historique et même les communes ne signifierait pas que cette même méthode alternative pourrait devenir d'usage courant.
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Cette meilleure technique disponible ne renvoie pas à la seule efficacité technique, mais également à la réalité de sa diffusion à grande échelle et donc corrélativement à sa performance économique.
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Une approche, qui ne prendrait en considération que l'objet technique lui-même, ne respecterait donc pas l'approche double déterminée précédemment qui impose de prendre en compte la réalité économique de marchés distincts. 3.3.3.4 Le point de départ de l'appréciation de l'usage courant L'intervention en France de la loi n° 2017-110 du 6 février 2014 modifiée dite «loi Labbé» a modifié récemment les obligations relatives aux collectivités et aux particuliers quant à l'utilisation des PPP. Ainsi se pose la question de savoir si l'usage courant, est celui antérieur à la loi ou postérieur à celleci. Par exemple, s'agissant des grandes voiries, hors trottoirs, le fauchage régulier de leurs dépendances par les agents d'entretien et d'exploitation et le matériel déployé témoignent d'un emploi déjà limité des PPP en général et du glyphosate en particulier. La considération de ce que la loi Labbé prévoit des exceptions au motif de la sécurité et de l'exploitation routière confirme que de fait il n'y a pas eu de changement de référentiel (cf. infra). La mission constate que le volontarisme de certains maîtres d'ouvrages affiché depuis l'émergence du débat sur les PPP apparaît comme un phénomène analogue à celui des micromarchés. Ainsi des différenciations politiques sont affirmées, mais sans que les moyens soient toujours ajustés au regard des conséquences à long terme. Cette situation se traduit concrètement par une dégradation progressive de l'entretien de ces infrastructures rapportée par les gestionnaires routiers notamment, sans forcément de vision sur la pérennité des structures. Ces éléments d'analyse permettront d'éclairer l'appréciation d'un usage courant ou non pour les utilisations en ZNA qui seront détaillées plus loin.
3.3.4. La notion d'usage sensible
Les usages sensibles que la lettre de mission invite à examiner sont, à notre sens, à rapprocher des enjeux fonctionnels. En effet, les installations ou infrastructures ont été conçues pour répondre à des enjeux fonctionnels bien précis ; il en va de même avec les objets techniques qui les constituent. Les usages sensibles sont donc à rapprocher des référentiels auxquels elles sont soumises. Elles sont construites et exploitées en fonction des réglementations, normes, bonnes pratiques, etc. qui s'appliquent à elles pour des motifs généraux de protection des personnes et des biens. Et par définition, une réglementation en son sens premier existe pour encadrer un usage dans un souci de protection. Elle tient compte d'un grand nombre de facteurs et au premier chef de la sécurité des personnels qui les exploitent, des usagers dans le cas des infrastructures et des riverains. C'est donc aussi, au regard de ce même sens d'enjeux fonctionnels/usages sensibles/référentiels que peuvent notamment s'apprécier les inconvénients pratiques majeurs mentionnés à l'article 50.1. Mais ils doivent être étendus aux autres référentiels commerciaux ou culturels. Le cas de la voirie et des cimetières est éclairant à cet égard avec le débat qu'a provoqué la proposition de loi Labbé. Cette proposition prévoyait notamment en son article 1 « A compter du 1er janvier 2018, il est interdit aux personnes publiques [...] d'utiliser des produits phytopharmaceutiques [...] à l'exception des préparations naturelles peu préoccupantes [...] pour l'entretien des espaces verts, de forêts et de promenades relevant de leur domaine public ou privé ».
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Après avoir été une première fois complétée à l'occasion du vote de la loi, cette formulation a fait l'objet d'un nouveau complément notable avec la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte et son article 68 en ajoutant explicitement la voirie. Mais ce faisant, elle a en même temps prévu l'exemption de l'interdiction de l'usage de PPP au motif de la sécurité des personnels et des usagers de la route lorsque celle-ci était en jeu. Ainsi la loi dite Labbé modifiée, en définissant et organisant des exceptions a déjà confirmé, par là même, que la seule solution existante pour l'entretien d'un certain nombre des objets techniques qui constituent des routes, sont, dans des conditions bien définies, les PPP dont le glyphosate. C'est un exemple d'usage sensible pour lequel il n'existe donc pas de solution non chimique alternative aux PPP d'un usage courant qui aurait pu être raisonnablement imposée. S'agissant des cimetières, la mission fait le constat qu'ils ne sont pas mentionnés dans la loi Labbé. Mais il est admis ce qu'ont révélé les entretiens avec tous les acteurs qu'ils peuvent être traités avec des PPP. Même non explicitement prévue par la loi, cette possibilité laissée ouverte qui concerne les cimetières qui ne peuvent être assimilés à des promenades (et qui ne sont donc d'ores et déjà pas considérés comme des « espaces verts ») confirme en elle-même que des référentiels culturels sont d'ores et déjà également pris en compte par la loi.
Les usages peuvent être considérés comme sensibles lorsqu'ils renvoient à des référentiels motivés par des enjeux de sécurité ou des référentiels culturels y compris dans des aspects commerciaux.
3.3.5. La notion d'utilisation mineure
Trois notions proches sont rencontrées dans les textes réglementaires et infra-réglementaires : utilisation mineure, culture mineure et usage mineur. L'article 50.1 du règlement 1107/2009 précise que lors de l'évaluation comparative mettant en balance les risques et les bénéfices de la substitution, « les conséquences sur les autorisations pour des utilisations mineures sont prises en compte ». L'article 3 apporte la définition suivante : « Utilisation mineure ; l'utilisation d'un produit phytopharmaceutique, dans un État membre particulier, sur les végétaux ou produits végétaux qui : a) ne sont pas largement cultivés dans cet État membre ; ou b) sont largement cultivés, pour répondre à un besoin exceptionnel en matière de protection des végétaux. » Dans le cadre de la fixation des limites maximales de résidus, la Commission européenne a précisé dans un document guide48 les critères définissant une « culture majeure ». Il s'agit de valeurs de consommation, de surfaces cultivées et de quantités produites. Ce texte présente également la liste de toutes les cultures majeures au sens communautaire. Il est précisé que les cultures qui ne sont pas citées sont des « cultures mineures. »
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Guidance document. Guidelines on comparability, extrapolation, group tolerances and data requirements for setting MRLs.SANCO 7525/VI/95 Rev. 10.3. 13 June 2017.
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Enfin, dans le catalogue national des usages phytopharmaceutiques, il est indiqué : « On entend par usage mineur sur une culture majeure un usage de faible importance, de surface limitée par rapport à la couverture de la culture, ayant un caractère aléatoire (fréquence d'apparition et importance). Tous les usages sont considérés comme mineurs pour les cultures mineures. »
Le point essentiel à retenir de cette analyse est que, dans le catalogue, tous les usages dont le libellé commence par « Usages non agricoles » sont classés comme des usages mineurs. Par comparaison, dans la viticulture, les grandes cultures et l'arboriculture, le plus grand nombre des usages sont classés comme majeurs. À l'inverse les usages en cultures maraichères, ornementales et aromatiques sont le plus souvent classés en usages mineurs.
3.4. Le référentiel
Un usage courant n'est pas le fruit du hasard et il n'est en fait que le résultat de différentes contraintes qui s'appliquent au maître d'ouvrage. Figurent parmi ces contraintes, des considérations techniques d'ordre réglementaire de degré divers, mais aussi, des considérations commerciales, voire des considérations culturelles. Ces contraintes extérieures peuvent être regroupées sous le terme de référentiel. De fait, la notion d'usage courant renvoie à une utilisation qui permet de respecter le référentiel qui s'applique à l'objet technique considéré. Cela confirme que l'analyse de l'usage courant doit se faire par rapport à chaque objet technique, renforcé de son référentiel. Et à titre d'exemple, la piste d'un aéroport n'est pas le même objet technique que la chaussée d'une autoroute. Ipso facto, l'appréciation de l'usage courant au sens de l'article 50.2 doit se faire à isoréférentiel quant à l'objectif d'élimination de la végétation à atteindre. Si une interdiction du glyphosate venait à être décidée, les maîtres d'ouvrages pourraient bien sûr envisager ultérieurement une évolution de leur référentiel, voire une reconception de leurs objets techniques en fonction au premier chef de considérations économiques. Les référentiels sont notamment illustrés : pour ceux techniques d'ordre réglementaire : par les objets techniques des voies ferrées, ceux des routes, ceux des postes électriques ou ceux des industries classées comme installations classées pour la protection de l'environnement ; pour les référentiels d'ordre commerciaux : par les exigences des activités sportives, tout spécialement celles de haut niveau ou les golfs, et celles des gazons de placage ; pour les référentiels culturels : comme le cas des cimetières49, y compris avec des considérations relatives à la praticabilité et à l'accessibilité, par exemple, en temps de pluie, ou des considérations esthétiques.
Ces derniers référentiels sont évidemment les plus flous, même s'ils n'en sont pas moins les plus porteurs d'enjeux pour les individus50, et c'est donc bien à leur endroit que s'exprime la question d'un changement de référentiel sous la formule d'une invitation à changer de regard sur leur
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Pour lesquels il ne faudra pas oublier de prendre en compte les cimetières de combattants étrangers morts au combat en France. Ce dont témoigne la loi n° 2014-110 du 6 février 2014 modifiée dite « loi Labbé » et ses débats parlementaires.
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apparence. Formellement plus souples, on observe concrètement aujourd'hui pour ces derniers référentiels une volatilité nouvelle qui résulte de choix très locaux des collectivités, eux-mêmes dépendants de l'expression ressentie de leurs habitants. De ce point de vue, un phénomène analogue à celui des micros-marchés est observable dans les communes, confirmé par les entretiens de la mission, à savoir des différenciations politiques affirmées à travers le choix des techniques, avec à la clef, soit des conséquences assumées en termes de coûts induits, soit des conséquences assumées en termes d'apparence de l'espace public. La mission constate à travers ses entretiens que depuis la loi Labbé un changement de référentiel tacite et non affiché, qui se traduit concrètement sous la forme d'un abandon par délaissement de l`entretien d'un certain nombre d'espaces publics. Dans le meilleur des cas, la sortie de cette situation nécessiterait une reconception, mais celle-ci est coûteuse et nécessitera un choix difficile entre minéralisation et végétalisation maîtrisée sans que la tenue dans le temps soit en rapport avec la durée de vie attendue des objets techniques.
3.5. Les conditions économiques
3.5.1. Les cadres économiques variés des activités en ZNA
L'analyse des conditions économiques n'intervient au titre de l'article 50.2 qu'après l'examen de l'usage courant de techniques alternatives non chimiques. Or, en l'absence d'interdiction des herbicides par la réglementation ou la pression sociale, la logique économique elle-même conduit à l'absence de telles alternatives au glyphosate parce que cette technique est à la fois la plus efficace et la moins coûteuse des méthodes d'élimination de la végétation. De plus, les activités économiques dont ressortent les ZNA sont extrêmement diverses. Elles sont parfois monopolistiques comme les voies ferrées et les postes électriques, mais parfois avec des donneurs d'ordre extrêmement dispersés comme pour les voiries. Elles relèvent de la sphère publique ou de la sphère privée avec au milieu le régime des concessions. Chaque concession est un cas particulier gouverné par son contrat propre, donc avec des conséquences variables, à la suite de toute modification du paysage autour du contrat, sur le concédant ou le concessionnaire. Leurs dispositifs de régulation sont aussi, très divers : ils peuvent être des autorités indépendantes51 dont le rôle n'est jamais exactement le même suivant l'activité considérée, chaque contrat de concession, ou directement la concurrence. La logique économique de chaque secteur est aussi, extrêmement variable entre le monopolistique régulé, le concessif, le public et sa logique budgétaire, enfin le privé pur. Enfin, la situation économique des acteurs peut-elle être très variable, y compris au sein d'une même activité, et elle n'est pas réellement connue, au premier rang celle des communes. Il n'est donc pas possible de fournir des éléments statistiques sur les conséquences financières d'un secteur d'activité autre que les secteurs monopolistiques.
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Comme l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (ARAFER) ou la Commission de régulation de l'énergie (CRE).
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Par ailleurs, si l'article 50.1 mentionne des inconvénients économiques, il semble qu'il faille plutôt l'apprécier comme une conséquence financière majeure sur les entreprises concernées. En effet, l'appréciation de l'inconvénient économique majeur n'aurait de sens économique (ce qui est différent stricto sensu du sens financier) que si une comparaison très globale était réalisable. Il faudrait comparer : l'augmentation des coûts liés à l'interdiction du glyphosate ; le chiffre d'affaires ; les conditions de sa couverture par des recettes nouvelles ; le gain économique global y compris toutes les externalités de cette interdiction comme les bénéfices pour l'environnement et la santé publique.
Ce calcul n'est pas atteignable. En effet, une AMM est délivrée seulement si les évaluations52 concluent que : il n'y a pas d'effet nocif immédiat ou différé sur la santé humaine ou sur la santé animale, soit directement ou par l'intermédiaire de l'eau potable, des denrées alimentaires, des aliments pour animaux, de l'air, des effets sur le lieu de travail... il n'y a pas d'effet inacceptable sur les végétaux ou produits végétaux ; il ne provoque pas de douleurs ou de souffrances chez les animaux vertébrés à combattre ; il n'y a pas d'effet inacceptable sur l'environnement.
La logique de délivrance des AMM ne permet donc pas de faire ce type de calcul. Par ailleurs, il ne semble pas exister d'évaluation des coûts que génère l'emploi du glyphosate pour la société à travers ses impacts pour la santé et l'environnement. Dans ces conditions, il n'apparaît pas possible pour la mission de qualifier ce que serait un impact économique majeur, apprécié d'un point de vue économique stricto sensu ou d'un point de vue financier pour les entreprises. La mission s'efforcera néanmoins de donner quelques éléments significatifs, parfois illustrés de chiffres et qui seront relatifs à des considérations financières.
3.5.2. Les différentes logiques
3.5.2.1 Les secteurs monopolistiques régulés Justement parce qu'ils sont monopolistiques et qu'à ce titre, les tarifs sont potentiellement sans limites fixées par la concurrence, ces secteurs sont régulés, le meilleur exemple étant SNCF Réseau. Toute charge d'exploitation supplémentaire sera donc répercutée sur le tarif sous le contrôle de l'autorité de régulation. Mais pour les activités déjà subventionnées, la puissance publique devra financer cette charge.
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Règlement (CE) n°1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques.
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3.5.2.2 Les concessions L'éventail des logiques économiques des concessions et conséquemment du partage du risque entre concédant et concessionnaire est totalement ouvert entre des concessions «aux risques et périls» pour lesquelles le concessionnaire fixe librement le tarif, et des concessions totalement encadrées qui s'apparentent de fait à une gestion directe par le concédant, même si le financement reste externe et s'il y a paiement d'un tarif. Une des caractéristiques majeures des concessions est de faire appel à des capitaux et des emprunts extérieurs sur un terme long, à la mesure de la durée de vie des infrastructures. Ils doivent être raisonnablement rémunérés. À l'exception rare du véritable «risques et périls», la logique des concessions est ainsi de convenir au départ de ces rémunérations. Le contrat comporte corolairement des clauses de toutes sortes destinées à les garantir, dans le temps limité de la concession, notamment par rapport aux éventuelles modifications unilatérales du contrat par le concédant. De plus, le même mot de «concession» recouvre de fait deux réalités économiques et financières radicalement différentes. Dans un cas, la concession est extrêmement rentable si le trafic est important, car assise sur un monopole de fait. L'enjeu est alors de contrôler la hausse des tarifs du concessionnaire. C'est le cas, par exemple, des sociétés d'autoroutes et d'Aéroports de Paris même s'il ne s'agit pas pour ce dernier d'une concession stricto sensu. Dans l'autre cas, la concession est naturellement déficitaire compte tenu d'une relative faiblesse des recettes commerciales liée à un trafic limité ou à un tarif acceptable trop bas. Elle nécessite alors un apport parfois seulement en subvention d'investissement, mais le plus souvent sous la forme d'une subvention annuelle d'exploitation de l'autorité concédante. C'est, par exemple, le cas pour les concessions des collectivités locales, par exemple de leurs aéroports.
Si chaque concession est un cas particulier gouverné par son contrat propre, et si la solution ultime à tout conflit se trouve chez le juge administratif assez peu prévisible à ce stade, la jurisprudence est clairement celle d'une prise en charge par l'autorité concédante. Cela se traduit naturellement le plus souvent par une augmentation des tarifs dans le premier cas et par une inévitable augmentation de la subvention dans le second. 3.5.2.3 Le secteur public La logique budgétaire gouverne le secteur public. Comme les charges d'exploitation liées à une interdiction éventuelle du glyphosate sont récurrentes, les recettes d'exploitation doivent les financer, dans un cadre doublement contraint, celui de la baisse des dotations de l'État et celui de la diminution des assiettes de leur fiscalité propre. Par ailleurs, la variété des situations financières des collectivités est extrême, sans même pouvoir les corréler à leur taille, ou à leur potentiel fiscal53.
53
Le potentiel fiscal est un indicateur qui peut permettre de comparer la richesse fiscale potentielle des collectivités les unes par rapport aux autres. Un produit fiscal théorique est ainsi calculé, correspondant au montant d'impôts qu'encaisserait chaque collectivité si elle appliquait à ses bases nettes d'imposition les taux ou tarifs moyens. Ce potentiel fiscal est rapporté au nombre d'habitants afin de permettre des analyses et des comparaisons que les montants bruts ne peuvent autoriser à eux seuls.
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Cette variété des situations confirme ce qui a été confié à la mission par des acteurs, à savoir que le coût d'opportunité de l'emploi ou non de PPP dans une collectivité par rapport à une autre dépense n'est de fait que le résultat de considérations politiques quant aux attentes et aux réactions de ses habitants relatives à ces dépenses. 3.5.2.4 Le secteur privé L'appréciation du caractère majeur ou non des inconvénients économiques des alternatives, revient à se poser la question de leur incidence financière pour les entreprises considérées. Or dans une entreprise bien gérée, le chiffre d'affaires et les prix qui le sous-tendent sont par nature au plus haut niveau de ce qu'ils peuvent être. C'est encore plus vrai dans un monde de concurrence libre et ouverte en Europe pour des produits dont le marché dépasse les frontières françaises. Considérer a priori que les prix et le chiffre d'affaires pourront s'ajuster n'est pas possible. Ces indicateurs ne sont d'ailleurs pas les indicateurs de la santé financière d'une entreprise ou d'un secteur d'activité. La variété de la structuration des entreprises, plus ou moins intégrées avec notamment l'existence de filiales de différents périmètres sociaux, conduit à des incidences très différentes d'une augmentation d'une charge d'exploitation, comme celle liée à l'abandon du glyphosate, sur les indicateurs financiers de chaque société. Pour éviter un biais dans l'évaluation de cette incidence, celle-ci doit être prise en compte à la fois tout en amont au plus près de l'utilisation d'herbicide pour la fonction considérée d'élimination de la végétation, et à la fois tout en aval au niveau du résultat économique global de la société. La prédominance de l'impact sur l'amont ou sur l'aval dépend de la structure de l'entreprise et de la part qu'y prend l'utilisation du glyphosate. Aussi, la mission suggère de retenir deux critères : l'augmentation du coût complet de l'utilisation de la méthode alternative non chimique pour la fonction d'élimination de la végétation ; la diminution du résultat d'exploitation ou marge opérationnelle voire de l'excédent brut d'exploitation.
Le dépassement du seuil de tolérance d'un seul d'entre eux établit le caractère majeur de l'incidence économique. À noter que dans les activités de luxe (golf, sport de haut niveau, etc.) l'impact est moindre compte tenu d'un résultat d'exploitation généralement beaucoup plus élevé et une élasticité plus importante des prix, ce qui est aussi, le propre de ces micros-marchés. Mais aucune activité ne se concentre sur le seul luxe. Ainsi toute diminution du résultat d'exploitation liée à cette modification ne sera pas rattrapable au regard de la concurrence pour les secteurs qui y sont soumis. Le résultat sera l'arrêt ou le déplacement de l'activité.
3.5.3. Des alternatives estimées 5 à 10 fois plus chères par les utilisateurs
L'estimation des coûts de techniques alternatives, qu'elles soient chimiques ou non chimiques, est extrêmement difficile, en l'absence justement d'usage à une échelle significative pour les différentes utilisations, sans même considérer qu'il est ou non courant, de ces techniques alternatives. Ce point confirme l'effet économique sur le long terme des meilleures techniques disponibles examiné précédemment.
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En effet, les acteurs rencontrés expriment l'extrême imprécision de toute évaluation, voire leur impossibilité faute d'expérience aujourd'hui, et même leur irréalité matérielle. C'est notamment le cas des techniques mixtes mécaniques et manuelles54 pour lesquels les entreprises spécialisées expriment déjà leur difficulté à trouver de la main d'oeuvre pour ces travaux ingrats, et sûrement leur incapacité à faire face à une demande qui exploserait. D'ores et déjà, elles ont recours à une main d'oeuvre constituée pour l'essentiel de personnel détaché au sens communautaire. Hors le cas de la SNCF dont les surcoûts sont proportionnellement encore plus élevés, compte tenu des enjeux de vitesse pour le désherbage des voies et pistes qui implique de consommer le moins possible de capacité de la voie (sillons) et des enjeux de sécurité au travail sous circulation, l'expression des différents maîtres d'ouvrage et entreprises interrogées par la mission est convergente, même dans l'incertitude. Par rapport à l'emploi de glyphosate, le coût d'une alternative non chimique est estimé en moyenne à 10 fois, voire 20 fois plus cher, et le coût d'une alternative chimique est estimé en moyenne à 5 fois plus cher. La variation autour de la moyenne est estimée de 1 à 2, ce qui montre la grande dispersion des estimations. Certaines méthodes, thermiques notamment, ne sont pas évoquées dans ce paragraphe, car elles sont d'une utilisation trop marginale et le cas échéant seulement complémentaire des techniques précédentes. En tout état de cause, elles resteraient dans une fourchette de coût de 5 à 10 fois plus cher. Ces écarts considérables s'expliquent à travers plusieurs observations. Le glyphosate est systémique, en ce sens que, détruisant les racines, les plantes ne repoussent pas. En conséquence, le nombre de passages annuel est limité, le plus souvent à un seul. Ce n'est pas le cas des autres PPP ni des moyens mécaniques motorisés qui nécessitent 4, voire plus, passages par an. Seul l'arrachage des racines avec des outils manuels présente les mêmes caractéristiques, mais seulement pour des végétaux au système racinaire non traçant. Le glyphosate permet une grande vitesse de mise en oeuvre (typiquement 10 km/h hors cas particulier du ferroviaire), au contraire des méthodes mécaniques, très coûteuses en temps (typiquement le pas de l'homme), et manuelles, considérablement coûteuses en temps (arrachage des racines une à une). Le glyphosate est significativement moins onéreux à l'hectare que les autres PPP disponibles sur le marché qui de plus n'en présentent pas l'efficacité. Contrairement aux méthodes mécaniques, le glyphosate ne nécessite pas d'investissement supplémentaire en matériel souvent très onéreux.
Le cumul de ces considérations, et notamment les deux premières en raison du coût de la main d'oeuvre explique cet écart d'un facteur 10 voire 20, à 5 suivant la méthode alternative envisagée55. La baisse des coûts correspondants est peu probable. D'une part, parce que travail est réalisé manuellement par des salariés. D'autre part, car aujourd'hui, pour le marché des jardins et espaces végétalisés, la mécanisation reste limitée : de nombreux outils manuels sont encore indispensables. En revanche, la probabilité que les coûts augmentent est forte. En effet, aujourd'hui les prix calculés apparaissent exorbitants tant aux yeux des maîtres d'ouvrage qu'à celui des prestataires de service.
54
Ces techniques correspondent à des moyens mécaniques motorisés mais limités, portés le plus souvent, et conduits « à la main », comme les débroussailleuses, rotofils, tondeuses etc. et le plus souvent accompagnés, compte tenu de leur efficacité limitée en ce qu'ils n'atteignent pas les racines des végétaux, d'outils manuels comme les couteaux, binettes, houes, sarcloirs etc. 55 Source UNEP. Fiche d'entretien Désherbage mécanique et manuel
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En conséquence, les clients hésitent à passer commande et ces prestataires peuvent être tentés de commencer à travailler à perte au moins dans un premier temps pour ne pas perdre leurs marchés. Un tel écart de coûts d'un facteur 10 confirme l'absence de toute possibilité économique qu'une méthode alternative non chimique existe face à un usage répandu du glyphosate et soit d'un usage courant, sauf dans le cas exceptionnel de micromarchés où, à l'image de l'agriculture biologique, pourrait exister une frange de consommateurs prêts à payer le surcoût correspondant. Or la mission n'a pas rencontré d'interlocuteurs identifiant de tels micromarchés pour les activités classées en ZNA, sauf d'une certaine manière pour le sport et certaines collectivités. Enfin, un tel écart de coûts d'un facteur 10 traduit également, et même quantifie l'ampleur des inconvénients pratiques liés à la mise en oeuvre d'une méthode alternative non chimique. Cet écart de coût résulte pour l'essentiel d'une augmentation du temps passé, ce qui représente donc une multiplication au moins équivalente de la main d'oeuvre correspondante. À une telle échelle surgit la question de la disponibilité d'une telle main d'oeuvre, de surcroît en un laps de temps aussi court que 18 mois au regard du besoin au printemps 2021. Lors des entretiens menés par la mission, tous les acteurs lui ont fait part de leur inquiétude sur une indisponibilité certaine de cette main d'oeuvre, déjà difficile à recruter, notamment compte tenu de la pénibilité du travail manuel très physique correspondant. En particulier, les représentants des entreprises d'entretien des espaces, contrairement à ce qui est habituellement observé lorsqu'une augmentation du chiffre d'affaires est attendue, s'inquiètent de la perspective de l'abandon du glyphosate, tant au regard de cette question de la main d'oeuvre qu'au regard de perspectives d'une activité en baisse. L'explosion certaine des coûts conduira à un renoncement des maîtres d'ouvrage, renoncement déjà observé par certains interlocuteurs de la mission, clients et fournisseurs.
3.5.4. Quelques écueils en conclusion
Au contraire de l'agriculture avec son modèle économique bien connu par l'administration en fonction de chaque type d'exploitation, ne serait-ce que pour justifier des aides économiques, pour les ZNA, à l'exception des monopoles régulés par l'État comme SNCF Réseau, les sociétés d'autoroutes ou d'ouvrages concédés56 ou RTE, une vision synthétique et quantifiée des conséquences financières d'une interdiction du glyphosate pour le secteur privé n'est pas atteignable sans des analyses détaillées qui sortent du cadre de la présente mission. Mais même si ces éléments étaient accessibles, deux écueils supplémentaires apparaissent. Pour une même utilisation, maintenir ou non l'autorisation des produits contenant du glyphosate, pour des maîtres d'ouvrage variés, sur la base d'un impact financier réparti de façon continue, ce qui est le cas des secteurs considérés, semble impossible au titre du 50.2. Cette continuité peut s'illustrer, par exemple, à travers la diversité des situations des collectivités et des concessions, ou à travers le cas de l'industrie, notamment celle relevant de la réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement. Maintenir ou non l'autorisation, au sein d'une activité, suivant que sur un segment elle relèverait du luxe avec des marges élevées et une faible élasticité au prix (ex. : golf de haut niveau) et que sur un autre s'exercerait une concurrence certaine sur les prix avec des marges faibles et une élasticité importante (ex. : les autres golfs) semble également impossible à justifier.
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Des ouvrages sont aussi concédés par des collectivités locales qui sont alors leurs régulateurs.
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4. LES METHODES ALTERNATIVES EN ZNA
Pour mettre en oeuvre l'article 50.2 du Règlement 1107/2009, il est indispensable de disposer de méthodes non chimiques. Les principales méthodes -curatives et préventives- de désherbage et de maîtrise de la végétation utilisées par les professionnels de l'entretien sont traitées dans ce chapitre. Il ne traite pas de l'usage courant ou non de la méthode selon le secteur économique considéré, décrit dans le chapitre suivant. Toutefois, cette voie réglementaire n'étant pas la seule piste pour réduire l'usage du glyphosate, une troisième partie traite des alternatives chimiques.
4.1. Les méthodes non chimiques curatives
De nombreuses techniques non chimiques existent. Comme toutes méthodes, elles présentent des avantages et des inconvénients ; leur emploi doit être raisonné en fonction d'objectif à atteindre, de la configuration des lieux et du budget disponible. Elles peuvent se combiner entre elles. D'autres méthodes non encore développées sont de l'ordre de méthodes de rupture. Le désherbage électrique usité au Brésil et en cours de développement en Europe sera présenté en chapitre 6.
4.1.1. Traitement manuel et mécanique
Le traitement manuel consiste à éliminer les adventices par arrachage à la main ou à l'aide d'un outil (binette ou matériel porté). C'est un travail pénible et laborieux peu adapté aux grandes surfaces. Le recours à un traitement mécanique par des engins tractés offre des possibilités d'intervention plus importantes si les lieux sont accessibles. Mais ce traitement reste superficiel. Hors arrachage, voire un binage si la configuration de l'objet technique s'y prête, aucun de ces traitements n'éradique le système racinaire qui produit rapidement de nouvelles parties aériennes. Il nécessite donc un nombre de passes supérieur d'un facteur 4 à 5 par rapport à l'emploi de glyphosate. Le traitement mécanique n'est donc pas adapté à l'élimination des végétaux dans les objets techniques non spécialement conçus pour cela. Il est en revanche adapté pour les lieux déjà volontairement végétalisés.
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Tableau 5: solutions manuelles et mécaniques (source UNEP)
Le tableau ci-dessus communiqué par l'Union Nationale des Entreprises du Paysage (UNEP) précise le détail des méthodes manuelles et mécaniques déployées sur les pelouses, le sol nu avant plantation, la voirie et les allées gravillonnées. Leurs avantages sont décrits, mais aussi leurs inconvénients, ce qui permet de mesurer les limites des méthodes alternatives. En revanche, la mission ne peut pas entériner dans ce tableau l'emploi du binage dans le cas des voiries, dans la mesure où il s'agit sauf exception de surfaces dures. En effet, le binage est défini selon la mission par l'ouverture de la surface du sol pour en extirper les mauvaises herbes. La pratique est plutôt d'araser le sol pour trancher au ras les végétaux. L'outil ne pénètre pas le matériau ou juste sa surface pour ne pas le détériorer (enrobés) ou le déstabiliser (compaction des graves). Il convient d'ajouter à ce tableau un inconvénient cité par les interlocuteurs de la mission, à savoir la fréquence de passage plus élevée du désherbage mécanique, car c'est le propre des façons 57 superficielles. L'Annexe 6 présentant des données complémentaires sur les méthodes alternatives non chimiques montre des appréciations sur ces fréquences d'intervention.
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Opération qui a pour but le travail de la terre
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Pour les routes, le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement58 (CEREMA), propose un classement un peu différent avec du nettoyage-balayage et du fauchage, technique la plus utilisée, en particulier parce que les abords des routes sont largement végétalisés et donc alors traités par fauchage59.
Tableau 6 : domaine d'application des différentes méthodes alternatives à l'utilisation des PPP sur les dépendances routières. CEREMA
La loi Labbé a démultiplié les interventions manuelles et secondairement mécaniques. Le personnel est exposé à des risques quantitativement plus importants. Risque de troubles musculosquelettiques (TMS) : ces techniques sont physiquement plus éprouvantes que le passage avec un produit phytopharmaceutique, avec l'arrachage manuel, la manipulation de machines à brosse de 70 kg, l'exposition aux vibrations de l'appareil, posture pour guider la machine ; Risques psychosociaux : manque de considération et incivilité des citoyens lors du travail à pied dans les villes ; Risques de sécurité : accidents liés au temps de travail, nouveau ou augmenté, sur la chaussée ; nouveaux risques de contamination (déjections, huile de vidange...) à prendre en compte.
58 59
Établissement public rattaché aux ministères chargés de l'écologie et de la cohésion des territoires Techniques alternatives à l'usage des produits phytosanitaires. Synthèse des types de gestions alternatives appliquées aux infrastructures du réseau routier national Juin 2016.
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Les entreprises du paysage éprouvent d'importantes difficultés à recruter. SNCF et Réseau de transport d'électricité (RTE) relatent également la difficulté à conclure des marchés, traditionnellement à obligation de résultat, les entreprises ne sachant pas estimer les facteurs de coûts de ces nouvelles prestations. Pour un même résultat (isoréférentiel) qu'avec le glyphosate, ces techniques manuelles sont jusqu'à 20 fois plus onéreuses et les techniques mécaniques le sont de 5 à 10 fois. Le nombre de passages requis est multiplié par 4 à 8 60 avec des durées multipliées pour chaque passage : par 5 en manuel et par 2 à 5 par voie mécanique. Lorsque les moyens internes (nombre et compétence de la main d'oeuvre) ne sont plus disponibles au regard du changement de l'ordre de grandeur des heures de travail requises, une externalisation nécessite d'augmenter les budgets d'entretien. Ces derniers sont souvent insuffisants comme cela a été établi sur les routes nationales. Pour l'entretien du réseau national routier, le CEREMA a chiffré quelques méthodes, mais sans procéder à la comparaison entre la méthode chimique et non chimique.
4.1.2. Traitement thermique
Les végétaux sont éliminés en provoquant un choc thermique de leurs parties aériennes ; les cellules végétales éclatent, mais les racines restent intactes contrairement au glyphosate. Le choc thermique entraîne aussi, une levée de la dormance de certaines graines. Ces inconvénients techniques expliquent l'augmentation du nombre de passages pour obtenir un résultat satisfaisant. Quatre techniques existent sur le marché (Tableau 7). Selon UNEP, le désherbage thermique à flamme notamment pulsée est assez couramment utilisé, mais il ne peut l'être que sur certaines surfaces qui peuvent y résister ; le désherbage à infrarouge et celui à eau sont en réduction. Le risque incendie exclut les interventions thermiques à flamme et oriente vers le désherbage vapeur, mais on observe en même temps que ce dernier a quasiment disparu. Ces systèmes sont tous lents, gros consommateurs d'énergie fossile et émetteurs de gaz à effet de serre. Les lances ou les rampes nécessitent un temps d'exposition à la chaleur minimum pour agir et une intervention humaine pour les placer avec précision.
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Source : UNEP
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Tableau 7: comparatifs solutions thermiques. Plante et Cité
Certaines structures supportent mal leur passage (les flammes sont préjudiciables aux composants plastiques, l'humidité peut endommager les installations de sécurité SNCF) ; un certain nombre de sites ICPE ne sont pas accessibles à du matériel thermique pour des motifs de sécurité, et la quasi - totalité dans l'industrie chimique, pétrolière, gazière etc. Là encore, pour un résultat identique qu'avec le glyphosate, ces techniques sont de 5 à 10 fois plus onéreuses. Le nombre de passages est aussi multiplié par 3 à 4 avec des durées augmentées pour chaque passage de 2 à 3. Il tient aussi à l'achat de matériel plus onéreux. Plante et Cité a réalisé une étude entre le coût du manuel, du thermique (brûleur) et du chimique qui révèle une nette augmentation du coût d'entretien lorsque l'on se passe de chimique et une grande variabilité dans les coûts annuels.
L'étude Compamed ZNA (COMparaison des MEthodes de Désherbage utilisées en zones non agricoles) présente l'évaluation globale des techniques de désherbage curatif. De 2010 à 2013, une enquête, un observatoire national et plusieurs expérimentations ont fourni les données nécessaires pour évaluer leur efficacité et leurs impacts environnementaux à partir d'une Analyse du Cycle de Vie (ACV). Les résultats s'adressent aux gestionnaires d'espaces verts des collectivités territoriales, aux professionnels du paysage et aux gestionnaires d'infrastructures de transport et de sites industriels.
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Itinéraires : imperméable contraignant (35 m linéaires) Perméable contraignant (20m²)
Nombre de passages
Temps par passage
Temps total
Passages
Ratio/ référence chimique
Durée en minutes
Ratio/ référence chimique
Durée en minutes
Ratio/ référence chimique
Chimique Mécanique Binette Thermique eau chaude Chimique Mécanique Binette Thermique eau chaude
7,7 20,3 15,7 17,3 8 15 18 12
1 2,6 2,0 2,2 1 1,875 2,25 1,5
5,1 90,2 123,7 58 9,2 18 206 91
1 18 24 11 1 2 22 10
39 1831 1942 1003 8 29 403 119
1 47 49 26 1 4 50 15
Tableau 8 : calcul du temps de traitement sur surfaces imperméables/perméables à partir de données d'étude Compamed ZNA61
Dans le tableau ci-dessus, on observe une grande variation des temps de traitement selon les surfaces et les méthodes. Or, ce sont bien les temps de traitement à travers la mobilisation de ressources humaines qui gouvernent au principal les coûts.
4.2. Méthodes non chimiques préventives
Pour lutter contre les mauvaises herbes, une autre solution consiste à réaménager les surfaces pour un entretien sans désherbage de manière à limiter la végétation future ou au contraire intégrer le développement de plantes dans la conception. Le paillage
Minéraux, organiques ou sous forme de films, les paillages peuvent présenter de nombreux autres intérêts (esthétiques, économie d'eau ou entretien de la microfaune du sol pour les paillages organiques). Sur le réseau routier, le paillage est une solution ponctuellement utilisée. Mais il ne peut se pratiquer que sur des surfaces engazonnées et conçues comme telles, par exemple, sous les glissières de sécurité implantées sur des bas-côtés engazonnés. Mais si le paillage retarde l'apparition de végétation indésirable, il ne l'empêche pas. Cette végétation réapparaît au bout de 3 à 5 ans et nécessite un gros travail de reprise.
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Evaluation du nombre d'interventions sur une année de désherbage. Essais surfaces perméables/imperméables 2013
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La minéralisation des surfaces/ pontage des fissures sur le revêtement
Ces techniques ont pour objectif de supprimer la surface colonisable et de ne pas laisser d'interstices profitables au développement des adventices. Elles ont un impact paysagé négatif non négligeable en se substituant à l'espace végétalisé recherché à l'origine. La minéralisation représente un coût supplémentaire, car elle correspond à une reconception de tout ou partie de l'infrastructure. Elle ne peut se faire que très progressivement, au rythme des programmes de grosses réparations et des budgets. Le pontage des fissures est déjà une pratique nécessaire. Mais les coulis vieillissent de manière différenciée, notamment suivant l'intensité des usages et les conditions locales. Leur reprise ne peut se faire au fur et à mesure de l'apparition des fissures ce qui rendrait de fait l'infrastructure indisponible. Ainsi ce pontage n'est programmé qu'en fonction d'une dégradation significative et d'ensemble sur tout ou partie de l'infrastructure, ce qui peut prendre plusieurs années. Le traitement des adventices doit donc se faire régulièrement dans l'intervalle, ne serait-ce que pour prévenir une dégradation plus rapide encore consécutive à la présence de ces végétaux. Les plantes couvre-sol, l'enherbement choisi et la tonte de la végétation spontanée
Dans cette configuration, le gestionnaire change de référentiel en acceptant et favorisant la présence d'une végétation qu'il maîtrise : une végétation choisie qui ne laissera pas de place pour le développement d'adventices ou une végétation spontanée maintenue à une hauteur raisonnable par une tonte régulière. Le respect des exigences réglementaires de sécurité est pour autant une limite. Concrètement, ce changement de référentiel conduit à une reconception des espaces et donc là encore à un nouvel investissement qui ne peut être que très progressif. o L'usage de plantes couvre-sol est courant dans les massifs. Certaines constructions de monuments historiques sont protégées de la sorte avec un enjeu esthétique (les arases des remparts) ; L'enherbement peut être une solution dans certains cas particuliers. Mais se pose la question de la praticabilité en cas de pluie, par exemple, dans les cimetières compte tenu des cheminements. Il peut être spontané, sans ou avec apport de substrat, mais nécessite la mobilisation de moyens pour l'entretenir (tonte, fauche). Quelques cas particuliers sont étudiés. La SNCF teste un ensemencement choisi en accompagnant un doctorant ; RTE a lancé un marché cadre d'étude avec des écologues pour choisir les semences selon les régions. Ces techniques ne sont pas encore d'un usage courant dans leur domaine spécifique d'activité ; La hauteur de la végétation est réduite par l'usage de rotofil, de robots de tonte ou encore la mise en place temporaire de moutons (écopâturage) : Le rotofil est une méthode courante, mais longue et avec une forte pénibilité pour le personnel ; il suppose de plus des surfaces exemptes de matières susceptibles d'être projetées, graviers notamment. Les robots de tonte se sont développés sur le marché des pelouses, mais le travail à fournir dans les zones industrielles, le long des réseaux de communication n'est pas identique. La société Vitirover cherche à développer une solution en viticulture et dans d'autres secteurs ZNA en particulier avec les entreprises de fourniture d'énergie éolienne (BayWa en Allemagne, RWA en Autriche). La SNCF conduit une expérimentation sur des voies à grande vitesse.
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Les moutons ont pour inconvénient de salir les parcelles ; le personnel de l'entreprise s'interroge également sur les risques et inconvénients qu'ils peuvent représenter (RTE). Leur présence peut nécessiter une double clôture pour éviter l'introduction des animaux sur les voies de circulation. Malgré les apparences, c'est une solution qui implique une intendance lourde, et qui n'est pas à l'échelle des surfaces à traiter ni des conditions à remplir pour ce traitement.
4.3. Les solutions chimiques ou biologiques
4.3.1. Autres herbicides chimiques
Il existe sur le marché des produits phytopharmaceutiques des herbicides autres que le glyphosate autorisés pour les zones non agricoles. Début 2019, 25 produits sans glyphosate ont une AMM pour une action herbicide autorisée en ZNA professionnelle. Mais aucun n'est à la fois un herbicide systémique62 et un désherbant total.
Tableau 9 : liste des produits herbicides sans glyphosate utilisables en ZNA à usage professionnel (extraction au 9 avril 2019)
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Parmi les autres herbicides autorisés pour des usages ZNA, certains peuvent avoir une action systémique comme le 2,4 D, le tryclopyr, le fluroxypir. Cependant ces derniers ne sont pas des herbicides totaux.
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Certains, en particulier les sulfonylurées, ont déjà sélectionné des adventices résistantes en France. Leur utilisation massive en solution de remplacement du glyphosate pourrait aggraver ces effets négatifs, tout en sachant que le glyphosate lui-même a déjà fait émerger du ray-grass résistant en vigne. Les produits à base d'acide pélargonique nécessitent des quantités de spécialité commerciale à l'hectare, comprises entre 16 et 1000 l/ha pour les usages professionnels contre 5 à 15 l/ ha pour le glyphosate, suivant notamment les concentrations du principe actif. Le glyphosate doit être utilisé peu dilué. Ce point a évidemment une incidence sur les autres intrants (carburant, eau, matériel...).
4.3.2. Les herbicides chimiques de biocontrôle
La France est le seul État membre à avoir défini par la voie réglementaire la notion de produits de biocontrôle63. Leur spécificité est liée à leur caractère naturel ou leur mode d'action reposant sur des mécanismes naturels et exempts de certains classements toxicologiques et écotoxicologiques. Une présentation plus détaillée des produits de biocontrôle est donnée en Annexe 4. La DGAL publie mensuellement la liste officielle des produits de biocontrôle. Une vingtaine de spécialités ont un usage désherbage professionnel. Ce sont des préparations contenant de l'acide pélargonique, acétique ou caprylique. Même si ce sont des désherbants totaux, aucun n'a d'action systémique. Le délai de rentrée pour l'acide pélargonique est de 24 h ou 48 h.
4.3.3. Produits à faible risque
Le règlement CE n° 1107/2009 les définit : 1 - les substances à faible risque dans l'article 22 : «Par dérogation à l'article 5, une substance active satisfaisant aux critères prévus à l'article 4 est approuvée pour une période n'excédant pas quinze ans, si elle est considérée comme une substance active à faible risque et s'il est prévisible que les produits phytopharmaceutiques contenant cette substance ne présenteront qu'un faible risque pour la santé humaine, la santé animale et l'environnement, conformément à l'article 47, paragraphe 1.» 2 les produits phytopharmaceutiques à faible risque dans l'article 47 : «Lorsque toutes les substances actives contenues dans un produit phytopharmaceutique sont des substances actives à faible risque telles que visées à l'article 22, ce produit est autorisé comme produit phytopharmaceutique à faible risque à condition ...» Les produits à faible risque sont présentés plus en détail dans l'Annexe 4.
Les produits à faible risque au sens du règlement 1107/2009 sont des produits de lutte biologique, des stimulateurs de défenses naturelles et du phosphate ferrique. Aucun herbicide ne figure dans cette catégorie.
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Article L. 253-6 du code rural et de la pêche maritime. Les produits phytopharmaceutiques de biocontrôle sont des produits phytopharmaceutiques. Ils sont autorisés à l'issue d'une évaluation complète des risques pour la santé humaine, la santé animale et l'environnement et conforme aux exigences européennes.
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4.3.4. Un effet report prévisible
Compte tenu des conséquences économiques et des inconvénients pratiques des méthodes non chimiques, l'interdiction des produits contenant du glyphosate conduira probablement à un report, sur l'utilisation d'autres substances autorisées. Parmi celles-ci, on peut d'ores et déjà, citer l'acide pélargonique, qui associé à des sulfonylurées font l'objet de tests poussés par la SNCF. Or, déjà, en 2015, une association environnementale avait alerté sur le recours à l'acide pélargonique en remplacement d'autres herbicides64, en raison du contenu de la fiche de données de sécurité et de données écotoxicologiques.
Des pratiques non autorisées sont signalées auprès de la mission chez les particuliers et dans des collectivités territoriales telles qu'un usage intensif de vinaigre65, de sels de déneigement, etc. En conséquence, l'impact de ces reports mérite d'être évalué avec soin avant toute décision, car quand bien même, il existerait une méthode non chimique, usuelle et dont les inconvénients économiques et techniques seraient suffisamment limités pour faire usage de l'article 50.2 du règlement CE 1107/2009, les utilisateurs devraient eu égard au coût préférer la méthode chimique. Or le règlement ne fournit aucun moyen pour empêcher ces reports, sauf à vouloir interdire ces autres substances à travers une nouvelle procédure. Pour ces motifs, le point de vigilance suivant est formulé. Être vigilant sur l'impact des reports vers d'autres herbicides chimiques autorisés, en raison de leurs spécificités et des volumes appelés à augmenter.
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https://deuxsevres.eelv.fr/19/les-nouveaux-desherbants-bio-un-miroir-aux-alouettes/. Consulté le 2 septembre 2019. Le vinaigre est approuvé en tant que substance de base (et non substance active) depuis juillet 2015 par le règlement 2015/1108, pour des fonctions bactéricide et fongicide (traitement de semences et désinfection outils), puis herbicide dans des conditions restreintes. Le rapport SANCO/12896/2014 rev3 du 13 décembre 2018 précise que les utilisations autorisées portent uniquement sur les plantes médicinales, aromatiques ou plantes à parfum (PPAMC) avant la levée de la culture, en raison d'un risque de phytotoxicité sur jeunes plantes. Il n'est donc pas possible d'utiliser le vinaigre comme herbicide en ZNA.
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5. CARTOGRAPHIE DES UTILISATIONS DU GLYPHOSATE EN ZNA ET DES
ALTERNATIVES NON CHIMIQUES
La mission a établi cette cartographie à partir des entretiens menés avec différents maîtres d'ouvrage ou leur représentant À l'intérieur de cette cartographie, la mission n'a pas cru devoir segmenter plus avant les utilisations du glyphosate. En effet, outre que les quantités en jeu sont en elles-mêmes déjà très faibles, elles sont mal connues dans le détail comme pointé précédemment. Toute approche encore plus fine serait illusoire, alors déjà que le glyphosate n'est utilisé que sur les objets techniques où il est nécessaire, sous réserve d'optimisation. La mission souligne que ces maîtres d'ouvrages, qui s'étaient le plus souvent engagés dans des démarches volontaires de réduction de l'usage des pesticides à travers notamment les plans ÉCOPHYTO et assimilés, ont tous découvert lors des entretiens le changement de méthode qu'impliquait le passage par l'article 50.2. du règlement CE 1107/2009. D'une démarche progressive dans le temps, basée sur les meilleurs efforts, ils pourraient être confrontés à une démarche d'interdiction pure et simple applicable dès 2021. Il n'est encore pas certain que les acteurs en aient mesuré toutes les conséquences concrètes pour leurs activités. Par ailleurs, la méthode même de l'article 50.2. est apparue peu lisible pour les interlocuteurs de la mission, puisque nécessitant pour son instruction des évaluations menées sur la base de méthodes non chimiques c'est-à-dire de fait mécaniques et manuelles, compte tenu du caractère marginal des autres méthodes, thermiques notamment. Ces méthodes semblaient parfaitement irréalistes aux yeux de ces maîtres d'ouvrages et par conséquent n'ont jamais été sérieusement envisagées. Audelà de ce constat, il peut en être aussi conclu que les décideurs se tourneront soit vers des méthodes alternatives chimiques en raison de leurs moindres coûts, soit vers de la reconception lorsque cela est possible. Cette solution est bien une alternative mais elle sort alors du cadre du 50.2. Enfin, même si l'absence de méthode alternative d'usage courant au titre de l'article 50.2. est identifiée en ZNA, la mission apportera dans la mesure du possible des éléments relatifs tant aux inconvénients pratiques que économiques majeurs au titre du 50.1.. Enfin, des pistes concrètes de progrès (réduction significative des quantités, réaménagements par exemple) seront le cas échéant mentionnées. S'agissant des Outre-mer, les spécificités floristiques et climatologiques rendent la dépendance aux produits phytopharmaceutiques, et au glyphosate en particulier, encore plus prégnante. Les analyses de la mission s'y appliqueront d'autant plus.
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5.1. Le réseau ferroviaire
SNCF Réseau66 exploite en quasi-totalité le réseau ferroviaire français 67 soit de 30000 km de lignes composées d'une ou plusieurs voies. Ces lignes représentent 61000 km de voies, dont 49000 km de voies principales et 12000 km de voies de service (voies de garage, de triage, etc.). Le patrimoine foncier à entretenir au titre de la végétation est de 95000 ha, dont 34000 ha de voies et de pistes latérales à ces voies. La consommation d'herbicides représente suivant les années environ 63 t pour un montant d'environ 4 M/an. Ceci correspond à 53 t d'herbicides totaux, dont 45 t de glyphosate. Le dosage de 1,8 kg/ha appliqué par SNCF Réseau respecte la dose maximale fixée par l'AMM. Il est plus élevé qu'en agriculture, car le terrain et le type de végétation rencontrée ne sont pas identiques. Le traitement de la végétation (désherbage, suppression des arbres à risque pour la circulation, etc.) représente au total 120 M à 130 M/an sur les voies, pistes et sur les abords, variable en fonction de l'année (besoins d'intervention, gestion des stocks, etc.). Le désherbage des voies et des pistes représente 28,7 M, dont 26,2 M pour le désherbage chimique (y compris le glyphosate) et 2,4 M pour le cas échéant un rattrapage mécanique. Ce traitement est réalisé avec des trains désherbeurs spécialement conçus à cet effet qui pulvérisent le produit sur les voies et les pistes dans le respect des AMM. Certains de ces trains dits à grand rendement peuvent rouler jusqu'à 60 km/h, ce qui permet, outre une grande productivité de l'activité, de ne consommer qu'un minimum de sillons, loués aux entreprises ferroviaires et qui fournissent les recettes de SNCF Réseau.
5.1.1. Les exigences du référentiel
Le référentiel actuel d'entretien exige une absence de végétation sur les voies et sur les pistes. Il est identique pour tous les pays européens regroupés au sein de la Communauté européenne du rail (CER). Il a été conçu pour répondre aux exigences suivantes : Sécurité des circulations : en effet, la voie ferrée est largement instrumentée et la sensibilité des capteurs implique l'absence de végétation. Par exemple, le contrôle des voies par mesures laser est perturbé lorsque la végétation s'installe ; Pérennité et sécurité de l'infrastructure : la végétation, de par le colmatage du drainage, a des effets sur le ballast et entraîne la déformation des voies qui y sont posées. Par ailleurs, les ouvrages d'art doivent également être exempts de végétation, celle-ci entravant la circulation de l'eau et entraînant des déformations ; Sécurité des personnels qui circulent sur les pistes et qui interviennent à partir de cellesci pour la maintenance (les pistes permettent également l'évacuation des voyageurs en cas de nécessité). Elles doivent être à tout moment praticables aisément, en particulier prévenir tout risque de chute et de fait ressembler à un sol nu ; Sécurité incendie : la circulation des trains et leur freinage engendrent des étincelles qui enflamment la végétation l'été.
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SNCF Réseau : SNCF Réseau est l'un des trois établissements publics à caractère industriel et commercial composant le groupe SNCF. L'entreprise est chargée de la maintenance et de l'entretien du réseau ferré, de la construction de nouvelles lignes ferroviaires et gère la circulation de tous les trains empruntant le réseau ferré national Les exceptions sont notamment les Lignes à grande vitesse réalisées à travers un partenariat public-privé, le tunnel sous la Manche, certaines lignes secondaires ou touristiques, les chemins de fer Corse, la ligne Nice-Digne, les voies ferrées portuaires, les voies ferrées des installations industrielles et leurs embranchements.
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Ce référentiel est atteint avec l'emploi de glyphosate, molécule la plus efficace car avec un effet herbicide total et systémique et parmi les moins chers des désherbants. Il est inatteignable à ce jour avec une autre substance active. Mais ce référentiel a également d'autres exigences, par exemple, sur les talus :, Leur stabilité doit être assurée : ils doivent donc être dotés d'une couverture de végétation adaptée qui à la fois les stabilise, mais dont le développement ne conduit ni à leur ruine, ni n'est source d'inconvénients pour les voies et pistes ; Ils doivent éviter de s'enflammer au contact d'étincelles, directement ou via de la végétation sur les pistes ; Le développement des arbres doit être maîtrisé de telle sorte que leur chute ne puisse provoquer d'accidents de circulation, et que la chute de leur feuille en automne n'empêche les trains de circuler (on rappelle que le contact fer/fer entre les roues et la voie de chemin de fer est très limité et sujet au glissement).
Du fauchage, avec des débroussaillants et ponctuellement du glyphosate pour la dévitalisation des souches permettent le respect de ces exigences. Dans cet exemple, on voit bien que le glyphosate n'est pas une alternative au fauchage et réciproquement.
5.1.2. Un plan de substitution par d'autres herbicides chimiques
Depuis les années 1920/1930, le désherbage est chimique. Concomitamment, l'augmentation des exigences techniques sur les voies, nécessaires pour permettre l'augmentation des performances tout en garantissant la sécurité, a conduit au développement de l'utilisation de méthodes chimiques. Face aux annonces sur l'interdiction à terme du glyphosate, SNCF Réseau a mis en place un programme de recherche de solutions par d'autres herbicides, mais qui n'ont pas encore fait l'objet d'expérimentation sur une grande échelle. Suite à une expérimentation en 2018 sur quelques centaines de mètres qui s'est montrée encourageante, un essai a été conduit en 2019 sur 6 x 20 km dans différentes régions avec un mélange d'acide pélargonique (produit de biocontrôle) et de flazasulfuron. Les résultats ne sont pas encore évalués. Néanmoins, par la force des choses, ces expérimentations ont été conduites au cours de deux années particulièrement sèches et donc plutôt favorables à de bons résultats. Si cette méthode s'avérait concluante, ce changement de traitement entraînerait une modification substantielle des trains désherbeurs et nécessiterait un appel d'offres pour l'acquisition de nouveau matériel. En effet, l'acide pélargonique est un acide gras, et les pompes des trains désherbeurs ne sont pas conçues pour un tel produit. SNCF Réseau doit simultanément continuer à mobiliser ses trains désherbeurs actuels et se doter de modules nouveaux adaptés. Ceux-ci ne pourront pas être opérationnels dans le meilleur des cas avant la campagne de 2021. SNCF Réseau est donc confronté à un double risque, en cas d'interdiction du glyphosate applicable dès 2021, à savoir un risque industriel et un risque de calendrier, même si ces deux risques se recoupent. Les points critiques sont les suivants : Des résultats d'essais insatisfaisants ou réalisés avec des conditions météorologiques par trop favorables (ce qui est déjà le cas de l'année 2019) ;
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De nouveaux trains désherbeurs difficiles à mettre au point, voire impossibles et/ou un retard dans leur fabrication et leur déploiement sur l'ensemble du réseau ; La maîtrise de la détection automatique des adventices, puisque l'acide pélargonique est utilisable uniquement par «tache» de mauvaises herbes ; La disponibilité des quantités nécessaires d'acide pélargonique (fabrication à partir de la récolte de colza 2020 sous réserve d'une anticipation de commande à juin de cette même année) et de flazasulfuron.
Les pistes étant l'élément le plus sensible pour le développement de la végétation indésirable, ce seront les agents de SNCF Réseau qui feront face au risque correspondant en tout premier lieu. Une interdiction administrative dès 2020 rendrait tout retour en arrière problématique pour la campagne 2021, alors même que les trains désherbeurs de glyphosate sont toujours disponibles. Enfin les caractéristiques mêmes du flazasulfuron exposent à un risque avéré de sélection d'une végétation résistante qui pourrait devenir impossible à contrôler avec des conséquences industrielles majeures. Un tel risque ne peut être évalué à un premier niveau avant des essais significatifs sur une période d'au moins trois ans. Ces contingences rendent ce projet très incertain pour 2021 et exposerait durablement SNCF Réseau à un risque industriel.
Par ailleurs, le coût et les limites de cette alternative chimique qui nécessiterait au moins 2 passages par an, à comparer à un seul passage général complété le cas échéant par une opération de rattrapage ponctuel pour le glyphosate, a conduit SNCF Réseau à examiner un éventuel référentiel révisé. Il accepterait : une emprise de végétation de l'ordre de 5 % de la surface sur les voies principales (valeur limite par rapport à l'humidité et à la déformation engendrée) ; une hauteur de 10 cm de végétation sur les pistes ; une hauteur de végétation limitée au champignon du rail (10 cm) sur les voies de service et les voies sans voyageurs à petite vitesse, cette végétation étant choisie et ensemencée à cet effet.
Ces standards sont toujours à l'étude. SNCF Réseau ne les a pas validés à ce jour.
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5.1.3. Des solutions non chimiques irréalistes à l'échelle du réseau
Pour SNCF Réseau, un traitement mécanique, voire thermique, est irréaliste à l'échelle du réseau : au regard des risques pour les agents, de la pénibilité du travail et de la mobilisation du personnel nécessaire, même en ayant recours à des prestataires de service. Le pic de main d'oeuvre nécessaire a lieu d'avril à septembre. SNCF Réseau souligne la difficulté pour leur prestataire à disposer de la main d'oeuvre nécessaire ponctuellement même actuellement pour du désherbage manuel. En Allemagne, pour la Deutsche Bahn Netz68 cette main d'oeuvre ponctuelle vient des pays de l'Est, la Roumanie essentiellement. En France, les travaux de désherbage sont très souvent réalisés avec des travailleurs détachés. vis-à-vis de l'exploitation. En effet, le désherbage des voies et pistes ne doit pas engager la capacité à faire passer des trains, c'est-à-dire les sillons qui à ce titre fournissent les recettes de SNCF Réseau. C'est la raison pour laquelle des trains désherbeurs à grand rendement qui peuvent rouler jusqu'à 60 km/h sont employés. Toute autre méthode mécanique doit se faire sous circulation, c'est-à-dire entre le passage des trains. Outre un temps et des moyens humains considérables, cela multiplierait d'autant le risque d'accident pour les agents.
Aujourd'hui, SNCF Réseau traite les 1000 km de ZNT eau (qui correspondent à 22000 coupures courtes pour les cours d'eau) au coup par coup sur alerte après surveillance, au rotofil pour les pistes et à la main pour les voies. Leur traitement coûte environ 2 M/an. De fait, le référentiel correspondant est déjà dégradé sur ces coupures, et l'intervention n'est possible que parce que ce sont des zones courtes en pointillé qui n'engagent pas trop de sillons. Cette solution n'est évidemment pas généralisable à l'ensemble du réseau. De manière analogue, des solutions de reprise de l'infrastructure comme des géotextiles ne sont pas à l'échelle. Outre la limite de leur efficacité dans le temps et les difficultés considérables qu'ils poseraient dans leur mise en oeuvre (à savoir leur enlèvement par les suites rapides de trains-usines spécialisés), leur pose ne peut s'effectuer qu'à l'occasion des travaux de régénération, lesquels représentent seulement 1000 km par an sur un patrimoine de 61000 km de voies.
5.1.4. Évaluation financière
5.1.4.1 Évaluation des coûts des solutions alternatives L'évaluation menée sous la responsabilité de SNCF Réseau en 2017, a permis d'identifier et de chiffrer les différentes alternatives, en fonction des objets techniques auxquels elles pouvaient s'appliquer. Elle rassemblait en synthèse les solutions les plus économiques, en particulier les solutions de traitement par d'autres produits chimiques. À la demande de la mission, la SNCF a repris également les chiffres correspondant seulement aux alternatives non chimiques conformément aux exigences de l'article 50.2. Il en ressort une étude détaillée avec les limites imposées par l'appréciation des coûts de solutions non validées industriellement et pour certaines irréalistes. Elle ne prend en compte que les coûts directs69, en valeur 2017 :
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Équivalent de SNCF Réseau en Allemagne Selon SNCF Réseau, ses résultats sont cohérents avec ceux des autres gestionnaires d'infrastructure de la CER.
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le coût actuel du désherbage des voies et pistes avec du glyphosate se monte à 29 M/an ; le coût d'une solution mécanique à standard constant se monterait à 1220 M/an. Il est à noter que ce serait la référence à prendre en compte au titre de l'article 50 du règlement CE 1107/2009. Il représente un facteur 42 par rapport à la situation actuelle, supérieur au facteur 10 mentionné au paragraphe 4.1.1. et qui s'explique par les contraintes propres considérables du ferroviaire ; le coût d'une solution de substitution chimique à standard constant se monterait à 472 M/an. Il représente un facteur 16 par rapport à la situation actuelle ; le coût d'une solution de substitution chimique à standards révisés se monterait à 274 M/an. Il représente un facteur 9 par rapport à la situation actuelle. 5.1.4.2 Éléments financiers pour SNCF Réseau
Au regard de la situation singulière de SNCF Réseau, de son monopole, de ses recettes, et de son mode de régulation par l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (ARAFER), il est seulement possible pour la mission de rapprocher les coûts mentionnés ci-dessus de quelques éléments des comptes de SNCF Réseau, et notamment ses recettes. Leur marge d'augmentation est extrêmement limitée et repose soit sur l'augmentation de la redevance de circulation et/ou de la redevance de marché qui correspondent à des recettes commerciales, soit de la redevance d'accès qui correspond de fait à une subvention. Une autre piste est l'augmentation de la productivité. Au titre des directives européennes, une augmentation de la redevance de circulation et/ou de la redevance de marché ne peut être imposée que si le marché s'y prête. Ces augmentations tarifaires doivent être réparties à due proportion des dépenses relatives aux types de voies concernées, LGV ou lignes classiques : S'agissant des péages des services librement organisés (SLO) et qui correspondent de fait aux trains à grande vitesse (TGV), le montant perçu est d'environ 2000 M/an. Or dès 2021, ces services seront ouverts à la concurrence et plusieurs entreprises ferroviaires européennes se préparent à faire rouler des trains en France, tant sur lignes à grande vitesse (LGV) que sur lignes classiques. L'ARAFER estime que tant la SNCF que les entreprises concurrentes ne pourraient faire face à des augmentations. Aussi l'ARAFER, constatant de fait les limites atteintes pour les TGV, et cette ouverture à la concurrence, maintient-elle les péages en euros constants. Il en est de même s'agissant des péages des services conventionnés (essentiellement avec les régions) alors qu'une augmentation de 2,4 % avait été demandée.
La redevance d'accès d'un montant d'environ 2000 M est de fait une subvention de l'État et apparaît comme la seule autre variable d'ajustement. S'agissant de l'équation financière de SNCF Réseau, le résultat d'exploitation est de 517 M, le résultat financier est négatif à hauteur de 1484 M et le résultat courant est donc négatif de 967 M. Le service de la dette représente 1300 M.
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Mais les résultats comptables de SNCF Réseau sont conventionnels. En effet, le fait que les redevances de l'État ne sont pas affectées à la dette ne permet pas de faire apparaître un résultat d'exploitation qui soit significatif de la réalité opérationnelle de la gestion. Seule la reconstruction d'un coût normatif de production, et à partir de celui-ci, d'un coût moyen pondéré du capital (CMPC) qui correspond à la rémunération attendue par les financeurs d'une entreprise, à savoir les actionnaires et les banquiers, permettrait de faire apparaître un résultat d'exploitation réellement significatif. Surtout, la trajectoire financière de SNCF Réseau est maintenant encadrée par l'article L. 2111-101 du code des transports qui définit un ratio entre sa dette financière nette et sa marge opérationnelle. Ce ratio ne peut dépasser une limite fixée par décret et le tout constitue ce que l'on baptise la « règle d'or ». Le surcoût lié à toute solution alternative au glyphosate qui pèse sur l'exploitation réduira d'autant la marge opérationnelle et augmentera à due proportion ce ratio. Cela aura pour effet une limitation supplémentaire des investissements de SNCF Réseau dont il convient qu'en soient évaluées toutes les conséquences. Enfin, les gains de productivité sont déjà préemptés sur les cinq années du contrat d'objectif et de performance qui encadre la trajectoire de SNCF Réseau.
5.1.5. Points de vigilance et questions collatérales à traiter
En cas de maintien des AMM pour les produits contenant du glyphosate utilisés sur les voies ferrées, il conviendrait de s'interroger sur la pertinence de la poursuite de la démarche volontariste de substitution du glyphosate par SNCF Réseau, compte tenu des conséquences listées ci-dessus. En effet, en cas de basculement sur d'autres produits chimiques, la mission rappelle que les interrogations qui pèsent sur les effets d'une utilisation conséquente d'acide pélargonique et de sulfonylurées trouvent particulièrement à s'appliquer à SNCF Réseau vu des quantités en jeu et de la répétition de leur application. Il est à noter que les trains désherbeurs ne sont pas équipés de système de détection des adventices qui permettraient de réduire la consommation de glyphosate. Une application systématique est réalisée le long de la voie et des pistes, avec une coupure dans les ZNT pour l'eau, pilotée par un système de localisation par satellite. Avec l'entreprise Bayer, SNCF Réseau mène des essais encourageants pour équiper ses trains de dispositifs de détection des végétaux et de pilotage en conséquence des buses d'application. Sur la base de constats faits sur le réseau, une réduction de 70 % des surfaces traitées et donc des quantités appliquées est attendue. L'enjeu est donc important au regard des quelque 45 t de glyphosate utilisées annuellement par SNCF Réseau puisque cela permettrait une réduction annuelle de 30 t.
5.1.6. Les transports guidés
Les transports guidés comme les métros et tramways présentent des problématiques analogues à celles de la SNCF, dans leurs installations terminales, mais aussi les voies classiques, par exemple celles des RER en Île-de-France. En effet certaines voies à l'air libre, si elles sont végétalisées, ont fait l'objet d'une végétation choisie à la conception et la plateforme elle-même est conçue pour la recevoir sans dommage. Le choix délibéré d'une végétalisation par le maître d'ouvrage résulte de
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considérations urbaines et paysagères, fonction notamment des lieux où s'insère le système de transport. Cette végétation est entretenue mécaniquement. En revanche les installations terminales à l'air libre et les voies classiques sont conçues de manière plus économe de moyens. Elles sont donc soumises au développement d'une végétation spontanée qui leur est dommageable et qui doit donc être éliminée. Les contraintes d'exploitation du transport guidé sont en général renforcées compte tenu d'un trafic très dense sur des amplitudes, horaires notamment, très étendues. Du glyphosate y est donc employé, de manière analogue aux installations ferroviaires, pour répondre aux mêmes contraintes. Les analyses précédentes relatives aux voies ferrées s'appliquent ainsi tout naturellement aux transports guidés. Par exemple en 2018 la RATP a appliqué 311 kg de glyphosate sur une surface de 100 ha. Le montant annuel des prestations de désherbage et qui utilisait du glyphosate s'élevait à 250 000 . Il est estimé à 4 000 000 au minimum le coût d'un traitement sans PPP sur les voies et 1 130 000 avec un autre PPP que le glyphosate pour les parcs et ateliers. De manière générale, les surcoûts s'imputent sur les subventions versées par l'autorité organisatrice de transports (AOT), soit dans le cas d'espèce Île-de-France mobilités. Mais ils peuvent aussi être répartis d'un commun accord entre l'AOT et l'opérateur de transport public.
5.2. Les postes électriques du réseau de transport d'électricité
Le désherbage chimique ne concerne à Réseau de transport d'électricité (RTE), filiale d'Électricité de France (EDF) que les postes électriques dont il est le propriétaire du terrain. Le traitement est aujourd'hui chimique en totalité sur les 529 sites, qui peuvent rassembler plusieurs postes et qui représentent 1 473 ha. Le glyphosate est la molécule utilisée en quasi-totalité soit 3,79 t en 2018. RTE sous-traite à des entreprises spécialisées. Cependant au titre d'une démarche volontariste menée dans le cadre du plan Écophyto, RTE entretient déjà en zéro-phyto une partie de ses 71 sites de moins de 5 000 m² et à ce titre considérés comme «petits». Par ailleurs, les clôtures sont désherbées chimiquement sauf exception dans quelques cas de configuration favorable où les abords peuvent faire l'objet d'un entretien mécanique. L'objectif est d'avoir un accès sans gêne à toute la zone et un contrôle visuel des ouvrages.
5.2.1. Les exigences du référentiel
Le jeu de barres qui constitue le coeur d'un poste électrique doit avoir zéro végétation pour prévenir le risque électrique. Cette zone fait l'objet de désherbage chimique au glyphosate. Les référentiels techniques sont soit génériques à savoir ; l'arrêté technique de 2001 qui définit les conditions techniques auxquelles doivent satisfaire les distributions d'énergie électrique et ses articles 43 et 44 relatifs aux postes et qui définit des obligations de résultat la norme NF C 18-510 (§ 4.3.1 sur la prévention du risque électrique).
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le Code du travail et ses circulaires qui fixent des distances de sécurité des opérateurs visà-vis de la végétation. le Code du travail avec ses articles R4323-41, R4534-11, R4534-13, R4323-553 relatifs à la manutention d'engins.
Soit des référentiels propres à RTE : le référentiel technique poste HTB NT-DI-CNER-DP-ACS-18-51215 qui définit les spécifications relatives aux aménagements de surfaces des postes. Elles prévoient une hauteur de gravier de 7 cm. la note NT-MAIN-DMRP-18-00055 qui établit les règles relatives à la prise en compte du risque électrique en fonction de ces mêmes aménagements de surfaces et qui s'appuie sur les normes suivantes : la norme CEI 60479 qui définit les valeurs de tension maximales admissibles par le corps humain en distinguant : celles relatives aux travailleurs à l'intérieur d'un poste électrique ; et la norme CEI 909 qui définit les critères d'évaluation des contraintes électriques en cas de défaut.
Sauf exception historique (postes très anciens de conception différente), le standard est depuis l'après-guerre le zéro végétation sur gravier. Il est lié à la sécurité électrique du personnel (la résistivité du sol varie d'un facteur 5 entre du gravier seul et de la végétation), notamment en cas de défaut électrique dans les postes, qui par nature et parce qu'ils sont le point de raccordement des lignes, concentrent ces défauts. En effet, à partir du moment où la végétation dépasse 2 cm de haut, elle anéantit le pouvoir isolant des semelles des chaussures de sécurité compte tenu des dispositifs de protection actuels conçus avec les possibilités offertes par les PPP. Par ailleurs, les clôtures représentent un véritable enjeu et leur entretien est chimique. En effet, certains postes sont classés «points d'importance vitale» au sens de la protection contre le sabotage et ont des doubles clôtures. Elles sont de plus en plus instrumentées (vidéo surveillance notamment).
5.2.2. Des essais de substitution par d'autres herbicides chimiques
Un site de 47000 m² a fait l'objet d'une expérimentation avec de l'acide pélargonique. Pour obtenir une absence de végétation, il a fallu 3 passages et 1260 litres de la spécialité contre 1 passage et 23 litres pour le glyphosate pour un poste comparable et de même surface. S'agissant d'un traitement chimique, la question est aussi celle du délai de rentrée sur le terrain traité. Il est beaucoup plus long pour l'acide pélargonique soit 24 h. Or l'exploitation du poste impose de pouvoir intervenir en temps quasi réel en cas d'incidents électriques ou d'interventions pour entretien qui arrivent régulièrement. Ainsi les clauses de RTE imposent 6 heures.
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5.2.3. Des solutions non chimiques irréalistes dans les postes actuels
Au regard de la conception actuelle des postes, la compatibilité apparaît comme quasi nulle entre les critères d'acceptabilité de la végétation avec les contraintes d'exploitation et la capacité à respecter les préconisations d'entretien sur de grandes surfaces non aménagées sans produit phytosanitaire, en particulier sous du matériel électrique. Les possibilités de traitement mécanique (tondeuse, fauchage...) sont des plus limitées. Par exemple, employer des rotofils sur du gravier est impossible (risque important de projection), et encore moins quand le poste est sous tension alors que c'est le cas avec un traitement chimique - pour cause de risque électrique. Il en est de même pour des tondeuses. Ceci rend quasi impossible le traitement de grandes surfaces sans produit phytopharmaceutique. Par ailleurs, la tondeuse ne permet pas de maintenir une végétation à moins de 2 cm, limite au-delà de laquelle, le caractère isolant de la semelle des chaussures de sécurité n'est plus assuré. RTE a cependant commencé à demander à ses prestataires de se passer du glyphosate, mais certaines entreprises ont du mal à s'engager sur des marchés traditionnellement à obligation de résultat, sur 3 ans sous la contrainte du zéro-phyto. Si la première année bénéfice d'effets résiduels des traitements chimiques et la végétation encore maîtrisée, les professionnels savent que la situation sera de plus en plus compliquée les années suivantes. Les entreprises ne savent donc pas où elles vont en termes de coûts et éprouvent d'importantes difficultés pour disposer des moyens nécessaires en personnel. Ce qui apparaît possible pour l'entretien d'une petite surface avec un désherbage mécanique et manuel ne l'est pas en grande surface. Cela impliquerait trop de personnes en zone électrique, si tant est que les prestataires puissent trouver le personnel en nombre suffisant. Un entretien sans désherbage des grandes surfaces supposerait un réaménagement pour ce faire, mais au prix d'un coût important sans service rendu direct supplémentaire.
5.2.4. Évaluation financière
RTE a commencé à conduire des évaluations financières, mais leurs résultats et le caractère irréaliste des méthodes sous-jacentes ont conduit à examiner d'autres solutions qui seront développées au paragraphe suivant. Sur la base d'essais sur des petits postes, le coût d'un traitement mécanique et manuel ressortirait à 0,95 /m² contre 0,20 /m² avec du glyphosate, soit environ 5 fois plus cher. Sur de grandes surfaces et après plusieurs années, l'écart ne pourrait aller qu'en grandissant. Le coût annuel de l'entretien avec du glyphosate des 1473 ha de postes est de 2,9 M. Il passerait à 14,0 M sur cette première base avec des méthodes mécaniques et manuelles.
5.2.5. Des solutions alternatives permises par une reconception des postes
Au regard de ses objectifs dans le cadre du plan Écophyto, les surcoûts et l'inadaptation des postes aux contraintes du zéro-phyto ont donc conduit RTE à imaginer leur réaménagement, prenant en compte les contraintes de l'existant, y compris du maintien de la tension pendant les travaux.
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Deux options sont ouvertes en fonction de la résistivité des sols et de la configuration des postes : une végétalisation choisie (1 à 8 /m² en investissement et 0,37 /m²/an en entretien) avec des plantes couvre-sol qui empêchent les végétaux indésirables de s'installer. Le semis a lieu avec des végétaux qui auront une hauteur limitée. Cette hauteur doit être maîtrisée en fonction des contraintes d'exploitation des installations électriques : 15 cm sous du matériel électrique. Le choix de la végétation dépend de nombreux facteurs : l'existant, la résistivité du sol, le renforcement de la protection électrique, leurs coûts respectifs. La végétalisation impose une étude systématique de la résistivité des sols et donc de mobiliser les électrotechniciens. Or cette ressource est limitée. Un marché-cadre d'étude est lancé avec des écologues pour choisir les semences selon les régions (action de RTE en faveur du végétal local). RTE a choisi de ne pas laisser une végétation spontanée pour aller plus vite et avoir une meilleure maîtrise de la végétation qui s'installe ; le paillage minéral (40 /m²) avec un géotextile et trois couches minérales, plus complexe à mettre en oeuvre. Ce paillage permet de créer un milieu sec et très pauvre défavorable à la pousse. L'entretien est plus limité, mais nécessite cependant un arrachage manuel des pousses, et il y a des doutes sur la pérennité d'un tel aménagement au regard de la maîtrise de la végétation dans le temps.
Par rapport à un objectif de 100 % des postes aménagés pour pouvoir se passer de glyphosate, RTE estime qu'environ 80 % des sites pourraient être simplement végétalisés (végétalisation choisie) et qu'environ 20 % des sites devraient recevoir un paillage minéral. Cependant, ce dernier est complexe à mettre en oeuvre, et il y a des doutes sur sa pérennité. En considération du plan Écophyto dans lequel il s'est engagé et dans le cadre du schéma de développement du réseau, RTE estime le besoin en investissements supplémentaires pour aménager ses sites existant à 139 M. Cela nécessite une prise en compte de ce besoin dans le futur Tarif d'utilisation du réseau public d'électricité (TURPE) qui doit être élaboré puis validé par la Commission de régulation de l'électricité (CRE) avant fin 2020. Les travaux correspondants qui pourraient s'étaler a minima jusqu'à 2024 ne rendront pas possible, si une interdiction du glyphosate était prononcée en 2020, et même en prenant en compte une certaine latence dans la repousse de la végétation, de respecter le référentiel technique. La situation serait difficile. Elle occasionnerait une augmentation des dépenses pour maintenir l'absence de végétation, et rendrait nécessaire de trouver des entreprises extérieures. En revanche, et sous réserve de disposer des ressources nécessaires, l'entreprise pourrait se passer partiellement de glyphosate en 2022, date à laquelle 65 % des sites pourraient déjà se passer de PPP. Pour les 71 postes de moins de 5000 m² précités, RTE considère que la végétalisation ou le paillage minéral sont trop onéreux au regard du surcoût d'un entretien mécanique ou manuel. Au titre du plan Écophyto, RTE a d'ores et déjà, décidé d'imposer à ses prestataires de renoncer aux produits phytosanitaires au fur et à mesure du renouvellement à l'échéance des contrats d'entretien. RTE a décidé de prendre dès à présent en charge les surcoûts correspondants, mais les réintègrera dans l'enveloppe de surcoûts exposés en vue du futur TURPE.
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5.3. Les sites industriels
Les sites industriels relèvent souvent de la réglementation des Installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), au premier rang desquels figurent ceux de l'industrie chimique, de l'industrie pétrolière et parapétrolière et du gaz. Leurs installations sont implantées en plein air sur des terrains le plus souvent simplement stabilisés qui voient inévitablement un développement de la végétation. Aussi ces industriels emploient-ils tous du glyphosate pour l'élimination de cette végétation qui présente un risque dans un environnement industriel, puisqu'inflammable et source, avec le vent, d'envols de poussières végétales enflammées. Ici plus qu'ailleurs, la diversité des établissements et de l'organisation des sociétés qui les gèrent ne permet pas de disposer d'éléments économiques et financiers et conséquemment de mesurer l'impact de l'arrêt du glyphosate. En revanche, un surcoût est estimé par les entreprises.
Les adhérents de l'Association des applicateurs de produits phytopharmaceutiques (AAPP) qui est la principale fédération professionnelle intervenant en entreprises, désherbent 3 200 ha de surfaces de type industrielles avec des produits phytopharmaceutiques à base de glyphosate et aucune surface industrielle en mécanique/thermique.
GLYPHOSATE
Surface Industrielles Publiques Particuliers
BIOCONTRÔLE
Industrielles Publiques Particuliers
THERMIQUE/ MÉCANIQUE
Industrielles Publiques Particuliers
3400 ha
94 %
2% 96,2 %
0,2 %
0,1 %
2% 2,1 %
0%
0%
1,7 % 1,7 %
0%
Tableau 10 : répartition des surfaces traitées par les adhérents de l'Association des applicateurs professionnels de produits phytopharmaceutiques, en fonction du type de méthode et de la nature des terrains.
Ces chiffres confirment qu'aucune autre méthode n'est par ailleurs, pratiquée au titre de la réglementation des ICPE. La consommation annuelle correspondante par les entreprises industrielles est très grossièrement estimée aux alentours de 10 t en regard des concentrations et conditions d'AMM pour différentes spécialités commerciales.
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5.3.1. Les exigences du référentiel
Plusieurs arrêtés techniques ministériels généraux fixent des obligations de résultat, pour prévenir le risque incendie, suivant les différentes rubriques de la nomenclature de ces ICPE. Ces obligations nécessitent une absence de végétaux sous et à proximité des installations. De fait, la méthode retenue, pour ne pas prendre le moindre risque et qui est aussi la méthode la moins onéreuse, est l'emploi du glyphosate. De plus, l'atmosphère explosive autour de ces installations impose le respect de normes spécifiques ATEX, notamment pour l'emploi de matériels électriques ou autres.
5.3.2. La substitution par d'autres herbicides chimiques
Selon les industriels, l'utilisation d'un PPP alternatif au glyphosate, mais qui alors ne détruit pas les systèmes racinaires, multiplierait par 4 ou par 6 environ la fréquence de passage nécessaire pour aboutir au même résultat. En raison de ce constat, les industriels n'ont pas jugé pertinent de développer cette voie.
5.3.3. Des solutions non chimiques irréalistes
Les solutions non chimiques ne sont pas compatibles avec les arrêtés techniques ministériels pour ce qui concerne la protection contre l'incendie. Même si une hypothèse contraire était retenue, la substitution d'une zone traitée avec un PPP par une zone végétalisée nécessiterait une tonte régulière. Cette option n'est pas envisageable dans les zones avec restrictions ATEX en raison des risques d'explosion et du matériel de tonte considéré. Par ailleurs, les zones inaccessibles aux engins peuvent représenter jusqu'à 90 % des zones traitées par le glyphosate aujourd'hui. En conséquence il serait alors nécessaire de recourir à du désherbage manuel permanent et prendre en compte l'exposition du personnel à de nouveaux risques notamment à des troubles musculosquelettiques.
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Pour des raisons identiques, le traitement thermique à la flamme est exclu. Une artificialisation en dur, par exemple en enrobés, serait un investissement coûteux et impliquerait une reconception complète du site avec certainement des incidences sur les superstructures.
5.3.4. Évaluations financières
Aucune évaluation financière d'une alternative non chimique n'a été menée compte tenu de son caractère irréaliste. Les gestionnaires de ces sites estiment le coût d'une substitution du glyphosate par un autre PPP à un facteur 6, compte tenu d'un coût plus important du produit et surtout de l'augmentation de la fréquence des interventions. Le coût passe à 10 fois le coût de référence pour des procédés mécaniques. En fonction de la taille et de l'activité des établissements, le surcoût peut approcher le million d'euros.
5.3.5. Le cas particulier des sites militaires
Le domaine public occupé par les armées est de 258 000 ha en métropole. Il y est appliqué environ au moins 15 000 l/an de produit à base de glyphosate. Les données disponibles ne concernant que 205 000 ha. Ce qui correspond à environ 5 500 kg de glyphosate, en prenant des produits dosés à 360g/l et une surface traitée de 1 400 ha. Les sites militaires à caractère industriel, par exemple les stockages d'hydrocarbures, sont soumis aux mêmes obligations que les ICPE même si leur inspection est interne au ministère de la défense. Certains sites sont encore plus sensibles, comme les dépôts de munitions vis-à-vis du risque incendie. Les clôtures sont également des installations encore plus sensibles que celles relevant du civil, sachant que de très grands espaces doivent être sécurisés comme les terrains de manoeuvre. Du glyphosate est employé, de manière analogue aux installations civiles, pour répondre aux mêmes contraintes. Les analyses précédentes s'appliquent ainsi tout naturellement aux sites militaires. En particulier l'entretien des zones à risques pyrotechniques et d'incendie avec des moyens mécaniques ou thermiques est exclu pour des raisons de sécurité. Par ailleurs aucune alternative non chimique n'est possible pour l'entretien de clôtures. Et suivant les armées, il en est de même des joints des pistes (les alternatives mécaniques et thermiques les détériorent dès le premier usage) et de certains dispositifs de sécurité sur les plateformes aéronautiques. Les espaces militaires sont aussi concernés par des référentiels culturels qui exigent un ordre et une propreté absolue. Ils trouvent à s'appliquer au premier chef aux places d'armes et autres lieux symboliques, mais également aux casernements et plus généralement à toutes les installations.
5.3.6. Questions collatérales à prendre en compte
En cas de basculement sur d'autres produits chimiques, la mission rappelle que les interrogations qui pèsent sur les effets d'une utilisation conséquente d'acide pélargonique et de sulfonylurées trouvent aussi à s'appliquer au secteur industriel vu les quantités en jeu et de la répétition de leur application.
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5.4. Les autoroutes, routes et rues
Le réseau routier français est constitué de 8950 km de réseau autoroutier concédé, de 12200 km de réseau routier national (RRN) qui comprend les autoroutes et voies rapides non concédées), de 376000 km de routes départementales (RD) et de 673000 km de voirie communale (VC). Si chaque réseau véhicule sa propre image, les caractéristiques techniques en sont éminemment variables. Certaines RD ou VC présentent des caractéristiques quasi autoroutières, comme le boulevard périphérique parisien qui est une VC. De plus, si la gestion du RRN est unique, celle des RD et des VC est assurée par autant de collectivités. La consommation d'herbicides sur ces réseaux ne peut ainsi qu'être estimée, même si les ordres de grandeur sont exacts.
5.4.1. Les différents maîtres d'ouvrage
5.4.1.1 Les autoroutes concédées Les autoroutes concédées, représentées par l'Association française des sociétés d'autoroutes (ASFA), consomment annuellement 5500 kg de produits phytopharmaceutiques dont environ la moitié de produits composés exclusivement ou partiellement de glyphosate, ce qui correspond à peu près à 0,06 kg de substance active annuellement utilisée par km de leur réseau. Les zones traitées sont les zones à enjeux pour la sécurité du personnel (situations à risque, zones de pente, position de travail, matériels dangereux de type taille-haies et avec des obligations liées à la visibilité de la signalisation et à l'entretien des ouvrages d'art). Cela concerne quasi exclusivement : Les terre-pleins centraux (TPC) qui doivent assurer en plus de la retenue des véhicules en cas de sortie de route - une signalisation visible, une accessibilité pour les ouvriers et un refuge. La sécurité est donc le premier motif du désherbage. Les dispositifs d'assainissement en TPC et en bord de chaussée notamment, au titre du maintien du patrimoine construit et de l'absence de retenues d'eau. Les sites techniques (radios, sous-postes électriques/transformateurs, ouvrages d'art dont certaines zones sont sensibles comme les perrés70) ; Les clôtures pour prévenir le passage des animaux. En cas d'accident avec des animaux, le juge recherche systématiquement la responsabilité de la société d'autoroute. En conséquence elles sont méthodiquement surveillées et entretenues. En effet les clôtures sont envahies en deux ans par la végétation spontanée. Les zones d'espèces invasives, pour lesquelles le glyphosate reste le recours le plus efficace.
Les bandes d'arrêt d'urgence, lorsqu'elles ne sont pas en enrobés, sont traitées par fauchage, comme les dépendances paysagères. Les aires de service et de repos pour lesquelles il y a un enjeu commercial fort font l'objet d'interventions chimiques ponctuelles.
70
Un perré est un revêtement en pierre sèche ou en pierre liée que l'on aménage au pied ou sur le flanc d'un talus sujet à des glissements ou d'une tranchée susceptible d'être dégradée par les eaux.
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Depuis les lois Grenelle de 2010, les sociétés d'autoroutes ont choisi d'engager des politiques volontaristes pour réduire massivement les consommations de PPP. Les sociétés d'autoroutes ont volontairement déclaré se soumettre à la loi Labbé, ses dérogations leur permettant de respecter leurs obligations, à l'exception de la société APRR qui considère que, comme privé concessionnaire, elle n'y est pas soumise. Dans les deux cas, il s'agit essentiellement d'une présentation, puisque la loi, au regard des exceptions qu'elle prévoit, ne fait que confirmer les pratiques ; à savoir une utilisation du glyphosate et des PPP seulement dans des situations très particulières au regard de la sécurité des personnels et des usagers (Ouvrages d'art, TPC etc.), l'entretien des dépendances vertes définies comme telles lors de la conception étant réalisé par fauchage. Une augmentation forte des accidents des personnels autoroutiers liés au balisage des chantiers est constatée sur les autoroutes concédées pour atteindre 187 accidents en 2017. Elle est attribuée à l'augmentation constatée de l'usage du smartphone au volant. Dans ce contexte, toute augmentation significative des interventions sur les autoroutes entraînerait une augmentation proportionnelle des accidents. Or, l'arrêt de l'emploi du glyphosate sans procédure dérogatoire, telle celle de la loi Labbé pour la sécurité, induira une augmentation et un allongement des chantiers pour la mise en oeuvre du désherbage mécanique, thermique ou manuel. Par exemple un balisage d'une durée de 1 jour peut alors se prolonger sur 4 jours en raison du nombre de passages nécessaires plus élevé, voire 10 jours ou plus en prenant en compte un temps plus long avec une méthode non chimique. Ce ne serait pas non plus sans conséquence sur le service rendu aux usagers. 5.4.1.2 Le réseau routier national Sur instruction de leur administration centrale, les gestionnaires du RRN appliquent depuis 2010 une politique volontariste de réduction de l'usage des PPP en général et en conséquence du glyphosate, pour passer au zéro-phyto. En 2018, 90 % des 220 Centres d'entretien et d'intervention71 (CEI,) ont déclaré ne plus utiliser de PPP. Ainsi la consommation de glyphosate, qui représente 95 % des PPP utilisés, est passée de 378 kg en 2015 à 101 kg en 2018. Ce glyphosate a servi à traiter un linéaire de 562 km le long des voies, bretelles et terre-pleins centraux sur une surface estimée à 83 ha. Six des sept Directions interrégionales des routes (DIR) ont consommé moins de 30 l chacune. La dernière en ayant utilisé 200 l, considérant qu'elle ne peut raisonnablement s'en passer au regard des termes de la loi Labbé. Les CEI font donc un usage très ponctuel pour traiter, comme sur le réseau autoroutier concédé, des zones difficiles d'accès ou trop dangereuses pour les agents ainsi que les ouvrages d'art. 5.4.1.3 Les routes départementales et la voirie communale Si le nombre de maîtres d'ouvrage du réseau routier national et des autoroutes concédées est limité, celui des routes départementales et de la voirie communale est considérable. Il n'a donc pas été possible à la mission de mener des recensements précis sur l'usage du glyphosate, les conditions de son utilisation, et les conséquences de son abandon.
71
Unités de base de gestion du réseau
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Toutefois, l'association des directeurs techniques des départements, métropoles et régions (ADTech) a réalisé un sondage à la demande de la mission sur les routes départementales. Seulement vingt-cinq départements ont répondu ; quatre y utilisent encore des PPP pour des raisons de sécurité, conformément aux possibilités ouvertes par la loi Labbé. Même si cela apparaît mineur, il n'est pas anecdotique de constater qu'un grand nombre d'entre eux laissent l'entretien de leur giratoire aux communes. Mais le taux de réponse au sondage est assez faible et il peut y avoir un biais dans les résultats. S'agissant de la voirie communale, aucun recensement ou sondage ne semble disponible, au-delà des entretiens menés par la mission. Enfin, encore plus que le réseau routier national, les réseaux départemental et communal sont extrêmement hétérogènes quant à leurs caractéristiques et conditions d'exploitation. Certaines sections sont quasi-autoroutières, avec des trafics extrêmement denses quand il s'agit de voies rapides urbaines, d'autres sont de « petites routes de campagne », d'autres enfin sont des rues de centre-ville avec des trottoirs. Les grandes tendances suivantes apparaissent cependant. Un certain nombre de départements et communes ont décidé d'arrêter d'utiliser des PPP par choix volontaire clairement affiché comme tel, avant la loi Labbé. Les procédés alternatifs sont mécaniques ou manuels, toutes les autres techniques s'étant révélées décevantes quant à leur efficacité, y compris la substitution du glyphosate par de l'acide pélargonique. Ces procédés nécessitent des mesures de sécurité adéquates. Les conséquences de l'arrêt du glyphosate déjà constatées pour les ouvrages d'art font émerger de fortes inquiétudes quant à leur pérennité à terme. Un surcoût est certain, mais il n'est pas calculé. Il peut se traduire ou non budgétairement, en fonction d'une externalisation éventuelle. Enfin l'achat de matériel supplémentaire est nécessaire. Une prolifération des plantes invasives (ambroisie, renouée du Japon notamment) est observée, possiblement liée à l'arrêt d'emploi des produits phytopharmaceutiques.
5.4.2. Un abaissement du référentiel
Hors autoroutes concédées, l'abandon des PPP entraîne une série d'inconvénients qui a conduit à un abaissement du référentiel. Sans préjuger des aspects quantitatifs, ces conséquences sont techniques comme dans le cas des ouvrages d'art, mais portent aussi sur la sécurité et le service à l'usager. 5.4.2.1 Les autoroutes concédées Les sociétés d'autoroutes, si elles ont une politique de réduction de l'usage des PPP, considèrent que l'on est sur une asymptote qui ne sera pas à zéro. En effet, les autoroutes concédées sont une exception car elles considèrent les PPP comme toujours nécessaires au respect de leurs référentiels. Ils renvoient non seulement aux enjeux de sécurité, au sens large c'est-à-dire y compris
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des biens à savoir les ouvrages d'art et certains sites techniques, mais également aux enjeux commerciaux liés en premier lieu au service à l'usager (neutralisations des voies considérablement allongées en temps) et également à l'apparence des lieux. 5.4.2.2 La sécurité et le service à l'usager Dans les zones actuellement traitées au glyphosate pour des enjeux de sécurité, le nombre de passes annuelles passerait de 1 à 4 avec des alternatives chimiques et à 10 avec des alternatives non chimiques, multiplierait dans les mêmes proportions le temps des chantiers, et donc le temps d'exposition, en conséquence les risques, et donc in fine les accidents, pour le personnel d'exploitation et pour les usagers des routes. Ce risque avéré est a priori plus élevé sur les voies rapides que sur les voies dont la limitation de vitesse est plus basse. Cependant la question de l'augmentation de ce risque se pose sur l'ensemble du réseau, et doit y être prise en considération. De la même manière, la multiplication des temps de chantier a un effet très néfaste sur le service à l'usager. Les études économiques évaluent le gain de temps comme déterminant à 80 % pour l'usager et son bénéfice. 5.4.2.3 Le cas des ouvrages d'art Les ouvrages d'art sont plus que tous autres, un lieu où la végétation n'a pas sa place, sauf le cas échéant dans des « jardinières » prévues à cet effet. Partout ailleurs, et parce qu'elle menace les constructions qui n'ont pas été prévues pour elle et qui ne peuvent d'ailleurs pas l'être -, elle doit être éliminée. Tous les gestionnaires questionnés soulignent les effets délétères observés à la suite de l'abandon du glyphosate sur les ouvrages d'art. Ils constatent déjà la présence de peupliers, figuiers et acacias, notamment, qui se sont rapidement développés et s'inquiètent des conséquences qui apparaîtront à échéance de très peu d'années. Ces conséquences structurelles nécessiteront des travaux d'importantes réparations programmées et qui devront être largement anticipés, la nature reprenant très vite ses droits. L'effet économique sur la durée de vie de ces ouvrages est substantiel alors qu'ils ont été conçus pour une durée a priori illimitée. 5.4.2.4 Les autres réseaux routiers Les gestionnaires des autres réseaux routiers signalent tous la nécessité de gérer l'acceptabilité sociale des nouveaux modes de gestion à « zéro-phyto », en expliquant que le fait de laisser des herbes à la vue des usagers ne signifie pas pour autant la mise en péril du patrimoine ou un abaissement de la sécurité. Néanmoins ces usagers vérifient par eux-mêmes au coeur de la maçonnerie des ouvrages d'art la présence de véritables arbres. Par ailleurs des bas-côtés d'herbes hautes ne permettent pas à l'usager de s'assurer lui-même de sa propre sécurité en cas d'arrêt d'urgence. En effet, il est constaté que la présence massive d'herbes sur les bas-côtés des routes favorise considérablement l'abandon de détritus de toute nature sur celles-ci. L'abandon de l'entretien d'un lieu, même seulement perçu, a un effet boule de neige bien connu qui s'observe notamment sur le réseau routier francilien.
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5.4.3. Limites des solutions alternatives
Les sociétés d'autoroute ont déjà conclu après quelques essais que les solutions alternatives au glyphosate étaient irréalistes. Sur le RRN, les CEI continuent à chercher de nouvelles solutions alternatives. En effet celles utilisées se limitent à l'extension du domaine d'emploi de techniques habituelles, mais avec un nombre de chantiers multiplié compte tenu des passages supplémentaires nécessaires et un temps de travail lui-même multiplié sur les chantiers. Elles nécessitent néanmoins des achats de matériels supplémentaires. Par ailleurs un mouvement général de minéralisation locale des abords des chaussées est observé. Mais ce mouvement est limité et s'effectue ponctuellement en fonction des disponibilités budgétaires et de la réalisation de chantiers plus importants. De l'acide pélargonique a été testé (notamment 65 l sur un site de 1000 m2 du RRN, et sur un réseau départemental), mais le retour d'expérience n'est pas suffisamment concluant pour y voir une solution fiable et pérenne sur le réseau routier. Il en est de même des techniques thermiques qui endommagent les supports et dont le rendement extrêmement faible fait qu'elles sont hors de portée des agents d'entretien. À noter que des CEI qui n'ont pas consommé de produit en 2018 envisagent d'en utiliser en 2019. Enfin tous les gestionnaires, depuis le niveau central jusqu'au niveau local observent les conséquences très négatives du passage au zéro-phyto, sur la sécurité des agents, sur le niveau de service et l'acceptation des usagers, sur la pérennité du patrimoine, et sur le coût des solutions alternatives, tant en entretien qu'en investissement. Ils relèvent que la maintenance de points pourtant ponctuels comme les ouvrages d'art et les clôtures sont essentiels. Si des constats analogues peuvent être faits sur le réseau routier départemental, l'appréciation de leur ampleur est plus variable, ce qui s'explique sans doute par les caractéristiques générales de ce réseau (ouvrages d'art notamment) et de son exploitation (trafic notamment), qui nécessitent le plus souvent sensiblement moins de recourir aux PPP.
5.4.4. Évaluations financières
5.4.4.1 Les autoroutes concédées Le chiffre d'affaires du secteur autoroutier concédé est de 10 G HT soit 12 G TTC. Sur 10 de péage HT, 1,20 est consacré à l'entretien et l'exploitation, soit environ un volume de 1,5 G. Aucune estimation du coût du passage à une alternative non chimique n'existe. Si des expérimentations de techniques alternatives non chimiques ont été menées à bien (par exemple thermiques), elles ont été limitées, car leur résultat est inadapté à une utilisation à grande échelle. En conséquence il n'a pas été procédé à des tests de marché avec des sociétés prestataires. L'ASFA ne dispose au niveau sectoriel d'aucun scénario alternatif mécanique/manuel/thermique aux PPP.
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Sur l'impact financier, l'ASFA souligne le caractère économique singulier des concessions qui par définition ont une fin. L'indicateur pertinent du contrat est donc celui de son taux de rentabilité interne (TRI) à sa fin. Une simple variation de TRI de 0,1 % est ainsi un enjeu énorme. Toute charge supplémentaire au titre des contrats de concession doit donc à son sens se voir compensée. D'un point de vue juridique, si l'usage du glyphosate restait autorisé dans d'autres ZNA, en particulier celles qui seraient plus consommatrices, il ne pourra être argué par le concédant que son interdiction est une mesure générale et à ce titre de droit commun, ne nécessitant pas un ajustement du contrat de concession. Un ajustement, quel qu'il soit, ne serait pas un précédent, puisque dans une situation analogue qui était bien alors une mesure générale, l'État a pris en charge le coût du changement des panneaux de limitation de vitesse à 80 km/h lorsqu'elle a été abaissée, quelle que soit leur domanialité. 5.4.4.2 Le réseau routier national La Direction des infrastructures de transport estime le coût total associé aux techniques alternatives sur le réseau à hauteur de 8 M/an. Elle pèse sur un budget de 800 M (hors salaires des 6000 agents d'exploitation) déjà insuffisant de 200 M (tel qu'évalué par un audit indépendant), et qui doit déjà porter la situation critique des ouvrages d'art. 5.4.4.3 Les routes départementales et les voies communales Hormis quelques exemples ponctuels peu généralisables et la mise en exergue de la nécessité d'investir dans du matériel supplémentaire spécifique pour le fauchage, aucune évaluation financière n'est disponible. Cela s'explique notamment par les caractéristiques de la gestion publique de ces réseaux.
5.4.5. Points de vigilance et questions collatérales à traiter
La proposition de loi Labbé a été votée après avoir fait l'objet d'un débat au parlement. À cette occasion, l'usage des PPP pour les routes et autoroutes publiques y a été réintroduit au motif de la sécurité. Or, le glyphosate est de loin le plus employé. Il y aurait donc une contradiction apparente à ce que, par une décision administrative qui ne manquera pas d'être contestée, une autorité indépendante revienne sur l'exception au motif de la sécurité d'une loi largement débattue, et qui plus est très récente.
Enfin, une interdiction du glyphosate aurait pour immanquable conséquence sa substitution, notamment pour les autoroutes concédées, par d'autres herbicides chimiques comme les sulfonylurées. Comme pour SNCF Réseau, l'usage significatif et répétitif de ces mêmes substances actives sur tout le territoire, présente l'inconvénient documenté dans la bibliographie de favoriser la sélection d'adventices résistantes, susceptibles de s'étendre aux zones agricoles.
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5.5. Les aéroports et installations liées au trafic aérien
Plus encore que d'autres sortes de ZNA, la variété des aéroports et des installations terrestres intéressant le transport aérien est considérable, depuis l'aéroport Charles de Gaulle d'Aéroports de Paris (ADP) jusqu'au plus petit des terrains de l'aviation légère de loisir. Il existe en France 160 aéroports publics commerciaux et 70 aéroports privés. Cette diversité ne permet pas que soient rapidement disponibles, même après enquête, des chiffres significatifs sur l'emploi et ses conséquences des PPP, et encore moins de glyphosate. Toutefois, la consommation de glyphosate semble être inférieure à 3 000 kg/an. Les aéroports représentent environ 50 000 ha dont 35 000 ha d'espaces verts non ouverts au public côté piste où se situent les enjeux techniques. A l'inverse, les enjeux commerciaux se concentrent sur le côté ville. Si les aéroports disposent de pistes qui sont de même nature qu'une chaussée et de bâtiments, ils sont surtout constitués de grandes étendues enherbées. Elles accueillent aussi des dispositifs d'aide à la navigation aérienne, incluant notamment les « Instrument landing systems (ILS) ». Les exigences du référentiel en matière d'aviation sont singulièrement différentes de celles des ZNA étudiées précédemment. Les zones enherbées des aéroports représentent d'abord une économie par rapport à une artificialisation lourde du terrain. Toutefois leur entretien doit répondre à des exigences précises. Cet entretien s'effectue par fauchage qui doit d'abord ménager une visibilité suffisante sur toute la plateforme. Mais il doit aussi ne pas mettre le terrain à nu, qui multiplie le risque aviaire en attirant les oiseaux à la recherche de vers de terre. Les dispositifs d'aide à la navigation qui y sont implantés sont en nombre limité. Ils sont dégagés des interférences de la végétation soit par du fauchage, soit par une artificialisation à leur entour, soit enfin par la pulvérisation de PPP contenant du glyphosate sur une zone limitée. Les exigences sur le fauchage jusqu'à 12 fois par an - ne rendent pas ces opérations significatives en temps passé supplémentaire de fauchage. De plus les conditions de ce fauchage, sur du terrain plat et dégagé, en dehors du trafic des avions, ne présente pas de risque supplémentaire des personnels. Sur les pistes, les joints entre les carrés qui les constituent sont sources du développement d'une végétation qu'il convient d'éliminer. Mais les pistes font désormais l'objet d'un balayage fréquent afin d'ôter tout objet pouvant dégrader les aéronefs. Il n'est donc plus nécessaire d'utiliser des herbicides et donc du glyphosate. En revanche la question des clôtures reste entière et celles-ci concentrent l'utilisation du glyphosate, même s'il n'est pas possible de distinguer le tonnage correspondant. En particulier leurs pieds doivent rester visibles pour des raisons liées à la sécurité. S'il existe une solution alternative qui consiste à bétonner le bas des grillages, elle est lourde à mettre en oeuvre, onéreuse car elle impose de changer la totalité de la clôture, et qu'elle ne peut s'envisager que comme un investissement à programmer. En conséquence, et à l'exception des clôtures, on doit pouvoir considérer que des alternatives non chimiques d'usage courant existent pour l'entretien des aéroports.
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5.6. Les gazons et les allées de structures non soumises à une concurrence commerciale
Il existe une très grande diversité de structures disposant de pelouses de jeux ou d'espaces verts avec leurs voies de desserte nécessitant un entretien.
5.6.1. Équipements sportifs
La France dispose de 50500 terrains de sports communaux engazonnés avec 43600 ha de gazon naturel dont les ¾ sont dévolus à la pratique du football72. L'entretien est encore possible par les produits phytopharmaceutiques, pour les espaces clos appartenant aux collectivités, et sans restriction pour les structures privées. Le nombre de communes ayant banni tous produits phytopharmaceutiques est aujourd'hui non négligeable. 28 % en Bretagne et 78 % en Île-de-France, selon la dernière enquête de l'IUA IdF73 où ces communes déclarent ne plus utiliser de pesticides dans la gestion des terrains de sport, ce qui témoigne de l'existence de solutions alternatives non chimiques à l'usage du glyphosate. Leur usage est cependant plus fréquent dans les communes urbaines ce qui est mis en relation avec une exigence accrue d'entretien pour les équipes de niveau élevé souvent issues de celles-ci. Pour celles faisant usage de produits phytopharmaceutiques, l'emploi du glyphosate est très probablement exceptionnel sur l'aire de jeu, lequel ne nécessite pas de désherbage total. Le sénateur Labbé, dans son interview (Annexe 5), indique : « Mais surtout, un terrain de foot ou de rugby ne se conçoit pas avec des pelouses pleines d'adventices pour la sécurité des joueurs. Vu le nombre de ces terrains sur le territoire, interdire l'usage des pesticides sans véritable solution alternative aurait été une erreur. » On peut imaginer qu'il perdure pour venir à bout des plantes invasives. Ou qu'il soit encore utilisé pour l'entretien des allées de desserte. Mais la contrainte ressentie de la loi Labbé et le caractère récent de cette contrainte, ainsi que les choix très variables des communes (certaines reviennent même sur leur choix) qui peuvent s'apparenter au choix délibéré de se positionner sur un micromarché tant en fonction des orientations de leur population, que de leur capacité financière, conduisent à rendre incertain une qualification d'usage courant. À noter qu'une des solutions en plein essor est le passage aux terrains synthétiques qui ne sont pas non plus dénués d'inconvénients. L'incidence économique d'arrêt du glyphosate sur le budget de la commune n'est pas mesurable compte tenu de la diversité des situations et de l'arbitrage politique qui y est étroitement attaché. Il impacte suivant les cas le budget de fonctionnement ou d'investissements (achat de machines, implantation d'un terrain de synthèse). Les témoignages recueillis par la mission mettent toutefois en avant une distorsion entre les grandes communes et les plus petites, ces dernières ayant nettement plus de difficulté à faire face à l'arrêt des produits phytopharmaceutiques. L'accompagnement des communes est à ce propos estimé primordial par des représentants locaux de DRAAF. Un point de vigilance s'impose, car il est reconnu que les difficultés s'accroissent entre la première année d'arrêt et la troisième. Or la loi Labbé n'offre que 2 ans de recul.
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Information Plante et cité. Présentation en groupe de travail JEVI ; juin 2019 Note rapide de l'institut d'aménagement et d'urbanisme - Île-de-France. Environnement juillet 2019
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Il existe également des équipements sportifs avec des surfaces de jeux non engazonnés comme les boulodromes et hippodromes, utilisateurs potentiels de glyphosate, mais la mission n'a pas exploré ces éventuels micro-utilisateurs.
5.6.2. Autres structures
Aujourd'hui, tous les propriétaires privés ou collectifs (copropriétés) peuvent légalement faire traiter leur bien par du glyphosate en faisant appel aux professionnels des espaces verts. Ces traitements visent à entretenir les propriétés selon un référentiel culturel en plus de maintenir la praticabilité des allées. En effet, les résidents sont attentifs à l'apparence de leur lieu de vie. Ils ont toujours une mauvaise perception vis-à-vis de la présence d'adventices qui donne une impression de laisser-aller et d'abandon. Selon l'UNEP, il apparaît possible de supprimer encore quelques usages dans ce domaine sous réserve de changer le regard des clients et usagers en acceptant des adventices. Au regard de l'actualité, la mission signale la contradiction entre ces traitements dans des résidences et la démarche actuelle visant à adopter un décret et un arrêté interministériel destinés à éloigner des lieux d'habitation les traitements phytosanitaires réalisés par les agriculteurs.
5.7. Les gazons et allées de structures soumises à une concurrence commerciale
5.7.1. Les gazons de placage
Développé depuis une vingtaine d'années, le gazon de placage est un gazon naturel cultivé en gazonnière sur terrain naturel puis livré sous forme de rouleaux ou de pavés. La filière gazon de placage occupe environ 900 ha. Trois acteurs principaux produisent environ 50 % du total. Le restant est fourni par des pépiniéristes pour des utilisations locales (surfaces d'environ 6 à 10 ha). Une concurrence très importante est exercée par les producteurs hollandais, espagnols, italiens et portugais. Ils disposeraient de produits phytopharmaceutiques qui leur permettent d'avoir des gazons plus propres (moins de 1 % de pâturin annuel) et ainsi de répondre aux hauts standards des pelouses professionnelles avec un coût de production moindre. Il faut compter entre 14 à 18 mois pour obtenir du gazon, selon la période à laquelle il a été semé (printemps ou automne). Les semis sont réalisés sur un sol propre, soit parce qu'ils sont réalisés immédiatement après la précédente récolte, soit parce qu'il a été appliqué une demi-dose de glyphosate entre les deux semis, soit parce qu'on a pratiqué un faux semi avec application d'une demi-dose de glyphosate avant le dernier semis. En raison de la présence de chiendent, de graminées exotiques envahissantes, ou encore des «Plantain, Sétaire verte, Digitaire» (PSD), plus de 60 % de la surface (+- 20 % selon les années) aura été traité au glyphosate. Il n'existe pas de solution non chimique pour les terrains contaminés par du chiendent (le labour est contre-indiqué pour le chiendent qu'il contribue à propager). Pour les autres plantes envahissantes, le labour et d'autres produits phytopharmaceutiques sélectifs peuvent être envisagés.
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Selon les professionnels, sans glyphosate, la présence de chiendent conduira à stopper net la production sur les parcelles concernées. Pour les autres adventices, la disparation des traitements sélectifs entraînera petit à petit le déclin de la filière.
5.7.2. Les équipements sportifs collectifs à usage professionnel
La part des équipements sportifs de haut niveau n'est pas connue par la mission. À titre d'exemple, le stade de France c'est 11000 m² de surface engazonnée et 9000 m² de pelouse pure. Le modèle économique des stades repose essentiellement sur un partenariat public-privé (ou bail emphytéotique ou délégation d'exploitation...). Les collectivités restent propriétaires du stade, mais des opérateurs privés en assurent l'exploitation et la maintenance, puis mettent le stade à disposition des clubs qui reversent un loyer aux collectivités. Le règlement des terrains et installations sportives de la fédération française de football, par exemple, impose que l'aire de jeu permette le classement à tous les niveaux sous réserve de la qualité et l'uniformité de la couverture végétale, laquelle doit faire l'objet d'un entretien régulier. Pour les rencontres internationales, il est nécessaire de respecter les règlements en vigueur (pour le football, fixés par la FIFA, l'UEFA.). Pour le renouvellement de la surface de jeu, les référentiels revoient sur les professionnels du gazon pour replaquer un terrain (en général en situation de crise) ou l'ensemencer.74 ; on se retrouve alors dans la situation technique identique à celle du gazon de placage. Force est de constater qu'il n'existe pas d'alternative non chimique d'usage courant pour ces clubs professionnels, qu'ils concernent le football ou d'autres sports Par ailleurs, les conséquences économiques d'un arrêt du glyphosate sont délicates à évaluer au regard de l'extrême variabilité de la situation financière des structures, de leur niveau et de la variété de leurs ressources en fonction du sport considéré. Si pour le football, le CA généré par les 43 clubs professionnels de football français est chiffré à 2,1 G 75 ; toutefois, «la dynamique fabuleuse dont profitent quelques clubs ne doit pas masquer la réalité des autres clubs, de Ligue 2 notamment». Introduire une nouvelle dimension dans le catalogue des usages qui distinguerait des sports et/ou des niveaux de sport pour tenir compte des recettes des clubs pour délivrer ou non une AMM semble hasardeux au regard d'une coupure extrêmement difficile à établir et donc à justifier.
5.7.3. Les golfs
Il existe environ 700 golfs en France pour 33000 ha. La moitié est aujourd'hui gérée par des sociétés indépendantes et 16 % par des chaînes. Les golfs gérés par des associations (26 %) et les golfs gérés en régie par des collectivités (8 %) complètent le paysage. Un golf de 18 trous occupe une surface d'environ 60 ha dont 60 % sont des surfaces de jeu engazonnées entretenues. La croissance de l'offre a permis au golf de passer du statut de «sport d'élite» à celui de «sport loisir», pratiqué par près de 800000 personnes.
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Directives de l'UEFA en matière de qualité des terrains Gestion des terrains en gazon naturel .édition 2018 Baromètre des impacts économiques et sociaux du football professionnel Changement de rythme novembre 2017.
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Aucune donnée précise n'est fournie par les distributeurs pour glyphosate dans ce secteur, le golf étant englobé avec les autres usages. 700 à 800 litres sont évoqués par la profession. Sachant que les produits homologués ont une concentration variant de 360 g/l à 639 g/l cela pourrait être traduit par une fourchette allant de 250 à 500 kg par an. Le contexte réglementaire de plus en plus contraignant et la prise de conscience de la pression de l'opinion publique poussent de plus en plus de gestionnaires de golfs à tester ou développer des matériels et stratégies alternatives pour remplacer le glyphosate (désherbage manuel, à eau chaude, etc.). Cependant, l'usage du glyphosate au sein des golfs demeure essentiel pour maîtriser les espèces dites envahissantes : En traitement par taches, pour la maîtrise de graminées invasives d'origine tropicales, localisées ; Pour la destruction du gazon existant avant semis d'une nouvelle graminée plus résistante à la sécheresse et aux maladies. Lorsqu'il y a présence de graminées d'origine tropicale ou que la période de levées des PSD est effective, le glyphosate est le seul moyen de les contrôler efficacement et de réussir la conversion de flore.
Hors présence de ces plantes, une tonte très rase puis semis, avec parfois l'utilisation d'un régulateur de croissance est une alternative praticable. La transition sans glyphosate est en cours, mais pour y parvenir sans impacter négativement les exploitants, une solution chimique ou alternative est indispensable. Et sans doute, cette expérimentation est le fait des structures les plus riches, ce qui témoigne d'un phénomène du type micromarché. Force est de constater qu'il n'existe pas à ce jour de solution alternative non chimique d'usage courant.
Leur CA est extrêmement variable de même que leur santé économique, très hétérogène : Une étude de 2018 sur le poids économique mentionne 44 % des golfs commerciaux et 32 % des golfs associatifs ou gérés en régie déclarent une rentabilité nette négative76.
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Les enjeux économiques du golf en France septembre 2018
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Sans surprise, les plus petites structures sont les plus fragiles économiquement (CA moyen de 131 k contre 978 k pour les plus grosses structures). L'impact économique sur l'interdiction du glyphosate n'est pas chiffrable et dépend éminemment du degré d'utilisation actuel et de la santé économique de la structure. Et là encore le maintien ou non d'une AMM en fonction de considérations économiques semble hasardeux.
5.7.4. Les parcs privés ouverts au public
Ils ne sont pas concernés par la loi Labbé et peuvent donc avoir recours à du glyphosate à travers des prestataires agréés. Toutefois, selon l'organisation Vielles Demeures Françaises, les jardins privés ouverts au public se sont orientés depuis plusieurs années, tout comme les jardins du patrimoine public, vers des solutions alternatives et ne traitent plus les allées avec un produit chimique conventionnel. Selon le ministère de la culture, en regard de sa vision sur son propre patrimoine, l'impact d'un arrêt du glyphosate est probablement faible. Ceci est lié à un référentiel qui évolue pour s'adapter aux nouvelles contraintes que ce soit en termes de main d'oeuvre ou de disponibilité de produits phytopharmaceutiques. Il est possible d'en déduire que l'usage de méthodes alternatives non chimique est courant et a été adopté sans inconvénient économique majeur pour ceux qui les mettent en oeuvre. Néanmoins, la mission n'a pas recueilli d'éléments chiffrés sur le coût que représente le non-usage des produits phytopharmaceutiques dans ces espaces ni l'impact sur leur modèle économique. Elle ne peut exclure que l'arrêt du glyphosate ait un impact important pour certains propriétaires.
5.7.5. Les exigences commerciales des autres établissements soumis à concurrence
D'autres établissements/structures ont une exigence vis-à-vis de leur présentation, même en l'absence de référentiel réglementaire et technique. On est purement dans du référentiel culturel qui veut qu'une entreprise qui fonctionne bien ne présente pas de «laisser-aller» ne serait-ce que du côté des végétaux sur leurs gazons ou voies de desserte. Elles font appel à des entreprises du paysage ou disposent des agréments nécessaires pour traiter par elles-mêmes (ex. : organismes HLM). L'arrêt du glyphosate augmenterait le coût du traitement de 5 à 10 fois, sauf à reconcevoir les espaces et à acculturer les usagers à ce nouveau paradigme. Vu la diversité des structures, il est impossible de chiffrer l'impact économique.
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5.8. Les cimetières
Les cimetières représentent un cas particulier parmi les zones non agricoles en raison des attentes des citoyens à l'égard du respect dû aux personnes décédées. Ainsi, les cimetières constituent une exception à l'interdiction d'emploi des produits phytopharmaceutiques de synthèse prévue par la loi Labbé. Il s'agit bien souvent du dernier espace à passer en «zéro phyto». La France métropolitaine compte 40000 cimetières dont 95 % avec moins de 1,5 ha pour une surface totale de 20000 ha77. La commune doit assurer la gestion des parties communes tandis que les concessions sont à la charge des familles. Les cimetières ont des caractéristiques bien particulières, car leur espace est très morcelé. Le coût moyen d'entretien est de 3500 par ha avec une médiane à 2261 . Le temps d'entretien varie de selon le type d'ambiance générale78, avec une valeur médiane de 460 à 730 h/ha/an (les valeurs maximales correspondent aux communes sans pesticides). Dans son étude79 sur plus de 233 collectivités, Plante & Cité rapporte que 35 % des communes ont en 2017 eu recours aux produits phytopharmaceutiques, en majorité des herbicides de synthèse. Néanmoins, les petites communes de moins de 10000 habitants sont sous-représentées dans l'enquête. L'Institut d'aménagement et d'urbanisme de la région Île-de-France (IAU îdF)80 identifie que seulement 27 % des communes (échantillon de 690 communes sur un total de 1276) ont encore recours aux produits phytopharmaceutiques pour leur cimetière. Compte tenu des usages en ces lieux, nous pouvons estimer que 90 % des utilisations portent sur des produits contenant du glyphosate. Au vu de ces deux enquêtes, nous pouvons considérer qu'une part des cimetières en France ne sont plus désherbés avec du glyphosate. Ces derniers peuvent avoir fait l'objet d'une reconception et d'un réaménagement destinés à limiter les travaux d'entretien, soit avec une végétalisation partielle (gazon, plantes couvrantes, végétation spontanée..., même si les allées restent en gravillons pour rester praticables en temps de pluie), soit avec une minéralisation du site, soit avec une combinaison des deux approches selon les zones de l'espace. Une augmentation des coûts d'entretien est observée, notamment avec les opérations de tonte et d'arrachage manuel qui restent nécessaires. Dans les cimetières qui continuent à employer du glyphosate, les méthodes alternatives ont été freinées par les problèmes de surcoût en main d'oeuvre et en équipement, par la pénibilité du travail, par manque de matériel adapté et par la qualité insuffisante du désherbage. Concernant le recours aux méthodes alternatives non chimiques, nous pouvons estimer que : dans les cimetières aménagés (qui ont de fait été réaménagés et qui ont supposé de fait un investissement) pour limiter le développement des mauvaises herbes et entretenus sans glyphosate, elles sont d'un usage courant, tout en sachant que les besoins de maîtrise des adventices restent importants et que les allées, qui restent gravillonnées pour des motifs de praticabilité, posent toujours des difficultés d'entretien ;
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Source info : plante et cité p.36/37 Sont en général distingués les cimetières paysagers, enherbés et arborés, arborés, enherbés, mixtes avec une partie minérale et une végétale, minéral 79 Paysage et entretien des cimetières. Plante&Cité ; novembre 2017 80 https://www.iau-idf.fr/fileadmin/NewEtudes/Etude_1833/NR_814_web.pdf
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dans les autres cimetières, traités avec du glyphosate, les méthodes alternatives non chimiques ne sont pas d'un usage courant. Enfin, l'entretien d'un certain nombre de cimetières est limité compte tenu des contraintes, certaines communes renvoyant même implicitement ou explicitement cet entretien aux particuliers. L'impression peut être celle d'un abandon aux «mauvaises herbes».81
Il existe donc des alternatives à l'usage du glyphosate, mais elles ont des incidences qui peuvent être importantes en termes de budget de fonctionnement ou d'investissement sans que le caractère majeur ou non puisse être quantifié compte tenu de la diversité des situations., même s'il apparaît que les conséquences (investissement, abandon, ou transfert aux particuliers) sont manifestement inhabituelles pour la commune considérée. Le législateur en 2014 a choisi de ne pas appliquer la loi Labbé aux cimetières après avoir fait l'objet d'un débat nourri au parlement. Le sénateur Labbé confirme (cf. son interview parue en juillet 2018 dans la revue professionnelle « En vert et avec vous » : en Annexe 5) que le maintien de ces lieux dans le même état que celui antérieurement constaté résultant des pratiques antérieures n'est pas atteignable, bien au-delà même d'une question de budget ou d'effort humain. De surcroît, si la décision administrative de suppression de l'usage du glyphosate dans les cimetières n'est pas parfaitement justifiée, elle serait susceptible d'être contestée par voie politique compte tenu de la contradiction entre la loi et cette décision.
5.9. Les clôtures
Le cas des clôtures permet d'illustrer la complexité du sujet pour conserver une logique d'ensemble dans la mise en oeuvre de l'article 50.2. En effet, sans être une activité économique en ZNA, elles sont un objet technique commun a un grand nombre de ces activités82, dont la présence est parfois requise par la réglementation, comme c'est le cas notamment pour les voies ferrées et les points d'importance vitale83, et requise par la jurisprudence comme c'est notamment le cas pour les autoroutes84. Ces clôtures sont envahies par de la végétation, ligneuse en particulier. Or non seulement elles doivent assurer leur fonction, mais de plus elles doivent pouvoir être facilement contrôlées visuellement, et en particulier les pieds de clôture pour en relever les brèches éventuelles.
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Toulouse : sans pesticide c'est la jungle. La dépêche.fr. 05/09/2019Gilles-R. Soulliés Les utilisateurs de clôtures sont très nombreux. Parmi ceux-ci : la SNCF, les autoroutes, les sites ICPE, les poste de transformation RTE, les aéroports. Définis au titre de la législation et la réglementation sur les secteur d'activité d'importance vitale. Parce qu'elles concourent à la production et à la distribution de biens ou de services indispensables à l'exercice de l'autorité de l'État, au fonctionnement de l'économie, au maintien du potentiel de défense ou à la sécurité de la Nation, certaines activités sont considérées comme « d'importance vitale ». La responsabilité des gestionnaires est systématiquement engagée en cas d'accidents de la route consécutifs au heurt d'animaux errants dans l'emprise de l'autoroute.
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De plus, certaines sont équipées de dispositifs de sécurité qui compliquent leur entretien : Des barbelés gênant toute intervention manuelle ; Des alarmes dont le détecteur doit être proche du sol. Certains systèmes sont déclenchés par la pousse de végétation.
De fait, le seul usage courant pour l'entretien de ces clôtures est le glyphosate. Un entretien mécanique n'est évidemment pas suffisant et le coût d'un éventuel entretien manuel dépasserait encore le facteur 10 relevé précédemment. Aux difficultés techniques s'ajoutent en effet, des difficultés d'ordre sécuritaires et logistiques (difficultés d'accès au site, accessibilité du matériel, protocoles d'entrée longs, travailleurs isolés dans des zones dangereuses, etc.), et de fait, d'ordre économique. Pour un entretien sans produits chimiques, les passages sur ces sites seraient à l'année de l'ordre de 30 ou 40. Renchérissant au moins d'autant le coût d'entretien. Par ailleurs, les tonnages correspondant à cette utilisation spécifique sont manifestement très faibles, alors qu'ils sont de plus impossibles à appréhender. Ainsi l'emploi du glyphosate pour les clôtures relève assurément d'un usage mineur. Et son usage doit continuer à rester possible avec du glyphosate, indépendamment du secteur d'activité auquel la clôture est destinée.
5.10. Le patrimoine historique bâti
La France compte 44 000 monuments historiques protégés ; 3% seulement appartiennent à l'État et à ses différents ministères (une faible proportion est gérée par le ministère chargé de la culture, essentiellement des parcs), 50% aux collectivités territoriales et sont en grande majorité des églises ; le restant est entre les mains de personnes privées. Mais il existe un beaucoup plus grand nombre de monuments d'intérêt patrimonial qui n'est pas protégé. Les propriétaires-gestionnaires désireux de préserver et mettre en valeur leurs monuments, notamment dans une démarche d'accueil du public sont amenés à utiliser le glyphosate essentiellement pour l'entretien des allées des jardins ou des cours ainsi que pour la préservation des éléments bâtis type douves à sec, murs, enceintes ou ruines particulièrement touchées par la végétation spontanée. Cette végétation a des effets destructeurs sur les vieux murs ce que rappelle par exemple l'appellation familière de la linaire cymbalaire, plante vivace herbacée rebaptisée « ruine-de-Rome ». Néanmoins aucune estimation des consommations de glyphosate ne peut être avancée.
S'agissant du bâti, le ministère de la culture dans son manuel de sensibilisation à la restauration de la maçonnerie éditée en 2006 fait mention de l'emploi d'herbicide commercial. Les préparations à base de glyphosate sont probablement prépondérantes au regard du marché correspondant, même si le terme n'apparaît pas, une autorité publique ne pouvant privilégier un produit. La mission n'a pu identifier aucune méthode alternative en entretien au glyphosate.
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Pour les travaux de rénovation qui dépassent l'entretien et réalisés par des entreprises sélectionnées, les maîtres d'oeuvre spécialisés en restauration du patrimoine bâti prescrivent un désherbage manuel avant de rejointoyer les pierres pour avoir la certitude d'éliminer tout matériel biologique et toute humidité interne.
Le désherbage manuel nécessite généralement le recrutement d'un ou plusieurs jardiniers à mi-temps ou à plein-temps, selon les surfaces concernées et les saisons. L'enveloppe moyenne des dépenses actuelles est estimée par une association de propriétaires privés entre 5 000 et 15 000 par an selon les cas. Les écarts s'expliquent notamment par le fait que, s'agissant des allées des jardins et cours de demeures historiques, la fréquentation du public est un facteur essentiel. En effet le piétinement est le moyen le plus sûr et le plus économique d'élimination de la végétation. Le désherbage mécanique nécessite outre du temps homme, un investissement en matériel adapté. À titre d'exemple, il faut compter environ 2 000 pour un matériel thermique et 3 à 5 000 pour un matériel mécanique. Mais l'un et l'autre sont inefficaces sur les éléments bâtis (douves, murs d'enceinte ou ruines) ou difficilement accessibles, ou dans les espaces non bâtis dont la topologie ne permet pas le passage dudit matériel. En tout état de cause, les propriétaires-gestionnaires sont désireux que soient mises au point des techniques nouvelles et attendent des conseils de l'État. Ces coûts peuvent être mis en relation avec la faiblesse des recettes générées par la visite du public lorsqu'elles existent. L'activité d'ouverture au public est déficitaire pour la plupart des monuments historiques. Aussi, un éventuel coût supplémentaire généré par le non-usage du glyphosate serait une charge supplémentaire directe, d'autant que les propriétaires-gestionnaires ne peuvent s'exonérer de l'entretien des éléments bâtis ou des parcs et jardins. En effet la Charte de Venise (1964) rappelle dès son article 4 que « La conservation des monuments impose d'abord la permanence de leur entretien ». L'absence d'entretien courant risque d'entraîner la disparition des monuments et jardins, ou d'imposer des travaux de restauration substantiels pour en permettre la réhabilitation, travaux davantage coûteux. Cette dialectique entre entretien et travaux de conservation apparaît clairement au ministère de la culture qui regrette que l'entretien courant soit délaissé en général ce qui impose ensuite d'intervenir et de subventionner les travaux nécessaires pour la conservation. Le cas des remparts de Dinan est éclairant à cet égard puisqu'après un désherbage chimique en 2002, une partie des remparts s'est écroulée en 2013 suite à un entretien défectueux. Il n'est pas douteux qu'un renchérissement du coût de l'entretien conduise à une baisse du volume de celui-ci. En toute logique s'appliquerait aussi aux monuments une dérogation au titre de la sécurité des biens, à l'instar des ouvrages d'art et des infrastructures même si le référentiel est implicite.
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6. PISTES DE REFLEXION DANS LE CADRE DE L'ARTICLE 50
Sans préjuger de l'interprétation finale sur l'évaluation comparative qui appartient à l'ANSES, la mission a souhaité examiner les conditions souhaitables d'un retrait des produits phytopharmaceutiques à base de glyphosate dans les ZNA dans le cadre de l'article 50. Les paragraphes ci-dessous développent des préoccupations sur trois points : le morcellement de la réglementation ; la cohérence avec le contenu de la loi Labbé ; les enjeux liés à la sécurité de personnes et des biens et les enjeux culturels.
Sur le premier point, les limitations ciblées au sein des usages risqueraient d'aller à l'encontre d'une réglementation lisible, compréhensible et cohérente. Il faudrait en effet prévoir dans les AMM des traitements différents en fonction du secteur d'activité considéré pour des utilisations sur des objets techniques pourtant analogues. Ni les risques juridiques que porterait une telle réglementation, ni la complication pour les gestionnaires ni le volume de travail à fournir par l'ensemble des acteurs ne semblent en rapport avec les très faibles quantités en jeu.
Sur le second point, la loi Labbé est une dimension supplémentaire à prendre en compte, notamment à l'égard des cimetières, les terrains de sport et des propriétés des particuliers. La loi Labbé et la délivrance des AMM suivent deux logiques différentes, ce qui complique leur articulation : la loi Labbé, déjà complexe, est structurée par la considération des collectivités publiques et par l'accessibilité du public ; les AMM ne portent que les usages sur la base d'une analyse de risque normalisée par des textes communautaires. Ainsi, les AMM ne sont pas modulées selon l'accessibilité ou non du public85. En effet l'impact d'une substance sur les tiers, riverains ou passants, est déjà pris en compte en amont dans les études préalables aux AMM conformément aux règles qui président aux évaluations. L'article 50 ne permettra pas de surmonter cette difficulté car il ne fait pas de « l'accès au public » un critère discriminant de l'évaluation comparative.
La juxtaposition de ces deux logiques risque de faire apparaître des contradictions dans les effets de la loi. Ainsi, une limitation d'AMM qui ne prévoirait pas l'utilisation de glyphosate pour chacune de ces utilisations encore permises par la loi Labbé, par exemple dans les cimetières viderait la loi de son contenu sur ces points. De même, des AMM qui ne comporteraient pas une utilisation pour les routes au motif de la sécurité rendraient inopérante la dérogation prévue par la loi.
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Sachant que l'accessibilité de l'espace public considéré reste toujours sous la maîtrise de la collectivité, en particulier pendant une éventuelle pulvérisation.
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Sur le troisième point, la mission souligne que les quantités en jeu représentent moins de 1,5 % des ventes de produits à base de glyphosate. Ceci est à rapprocher de l'exigence fixée par l'alinéa d) de l'article 50.1. (déclenché par l'article 50.2. dans le cas du glyphosate) qui dispose « que les conséquences sur les utilisations mineures sont prises en compte ». À ce titre, il semblerait possible d'interdire de façon générale des utilisations de produits, mais d'en conserver certaines dès lors qu'elles sont mineures. S'il est souhaité de rester cohérent avec la loi Labbé, une réflexion peut être conduite pour maintenir l'emploi de produits à base de glyphosate pour répondre au motif de la sécurité des personnes et des biens et pour des motifs culturels. Ce dernier terme peut être entendu comme l'ensemble des emplois phytopharmaceutiques encore permis par la loi Labbé. Tous les usages spécifiques en ZNA étant d'ores et déjà classés comme mineurs dans le catalogue national des usages, ce dispositif respecterait à ce titre l'article 50.
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7. APPUI PAR LA RECHERCHE PUBLIQUE
7.1. État des lieux
Lors de ses entretiens sur les alternatives non chimiques au glyphosate dans les zones non agricoles avec les acteurs concernés, la mission a noté le thème récurrent de la faible attractivité de ce domaine pour la recherche privée et la recherche publique. Le marché des zones non agricoles est trop restreint pour motiver la recherche privée et l'inciter à inventer des solutions spécifiques, tout en espérant un retour sur investissement satisfaisant. En pratique, les innovations sont en premier lieu destinées aux zones agricoles ou au secteur industriel, puis un transfert vers les zones non agricoles peut être envisagé. Dans le cas des chemins de fer, il n'y a pas de modèle transférable depuis ce secteur vers les zones agricoles. Les principaux acteurs de la recherche publique dont les travaux peuvent donner lieu à des transferts vers les ZNA sont les suivants : l'Institut national de la recherche agronomique (INRA), dans le domaine de la recherche agronomique. Les zones non agricoles ne font pas partie de son périmètre d'action, mais des alternatives mises au point pour les zones agricoles peuvent faire l'objet d'un transfert vers les ZNA. l'Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (IRSTEA). Ses travaux dans le domaine du machinisme et des robots autonomes se rapprochent des problématiques rencontrées dans les ZNA. Ainsi, l'IRSTEA est en relation avec la SNCF sur les questions de désherbage des voies ferrées.
Au 1er janvier 2020, l'INRA et l'IRSTEA fusionneront pour créer un Établissement public à caractère scientifique et technologique dans les domaines de l'agriculture, de l'alimentation et de l'environnement.
7.2. Les besoins des acteurs et les pistes de recherche
7.2.1. Besoins en produits phytopharmaceutiques alternatifs
La recherche de produits alternatifs aux pesticides de synthèse est réalisée par les entreprises privées, notamment sous la forme de startups, en vue d'une demande d'autorisation de mise sur marché auprès de l'ANSES. Les produits de biocontrôle bénéficient d'un cadre réglementaire favorable à leur développement, notamment à la suite de la loi EGALIM. Mais, actuellement, il y a peu de solutions de biocontrôle pour la lutte contre les mauvaises herbes (voir Annexe 4). Des travaux de recherche et développement sont conduits par exemple sur la radulanine A86, une substance une substance naturelle contenue dans les hépatiques, des mousses végétales. Toutefois, les acteurs rencontrés par la mission ne prévoient pas l'arrivée à court terme d'herbicides avec des qualités très supérieures à celles des produits de biocontrôle déjà présents sur le marché.
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Un nouvel herbicide d'origine naturelle. Bastien Nay Chercheur CNRS. http://www.cnrs.fr/fr/un-nouvel-herbicide-dorigine-naturelle. Consulté le 15 octobre 2019.
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Dans le récent rapport87 de l'Assemblée nationale sur l'état des lieux du biocontrôle, il est souligné que ces produits ne répondent pas encore à toutes les attentes des utilisateurs, et qu'un soutien des autorités publiques est nécessaire, notamment pour la recherche et le développement. Le rapport88 du CGAAER sur le développement des produits de biocontrôle a réalisé le constat suivant : « La recherche publique a surtout vocation à affiner la compréhension des interactions qui permettront un développement efficace des solutions de biocontrôle. Il s'agira en particulier d'acquérir des connaissances sur les mécanismes biologiques à l'origine des interactions entre plantes cultivées, organismes nuisibles, agents de biocontrôle et les milieux. À ce titre, l'utilisation de toutes les ressources de la biologie moderne (génomique notamment) sera utile pour mieux approcher le fonctionnement de milieux biologiquement complexes comme, par exemple, le microbiote des sols cultivés ». Ainsi, une incitation de la recherche publique (CNRS, INRA) pour travailler dans le domaine des interactions entre les végétaux, du jeu d'acteurs et de la mise au point de méthodes d`évaluation permettrait d'accélérer la mise sur le marché d'herbicides de biocontrôle, à la fois pour les zones agricoles et non agricoles. La liste des produits phytopharmaceutiques à faible risque au sens du règlement 1007/2009 ne contient actuellement aucun herbicide (voir Annexe 4). Il s'agit de produits de lutte biologique (bactéries, champignons microscopiques), de stimulateurs de défense naturelle et de phosphate ferrique. Les interlocuteurs de la mission n'ont pas laissé espérer l'arrivée prochaine de produits à faible risque destinés au désherbage. Des travaux de recherche fondamentale pourraient déboucher à long terme sur des méthodes de lutte biologique contre les adventices, mais elles nécessiteront des études spécifiques pour évaluer les risques pour la biodiversité.
7.2.2. Besoins en pulvérisation ultralocalisée pour réduire les quantités
Les produits de biocontrôle herbicides présentent des volumes d'application élevés et ils sont onéreux. Ils peuvent être appliqués aussi en mélange avec un herbicide chimique antigerminatif pour élargir leur efficacité. Outre les enjeux de santé publique et environnementaux, les opérateurs ont tout intérêt à réduire les quantités appliquées. L'innovation dans les techniques de pulvérisation d'herbicides devrait permettre d'éviter de réaliser des applications en plein, au profit de traitements ultralocalisés uniquement sur les adventices présentes. Des dispositifs sont expérimentés par la recherche privée et la recherche publique (IRSTEA), combinant sur du matériel de pulvérisation : un GPS, des caméras et un système de détection des mauvaises herbes, voire plus tard d'identification de ces adventices. Ces travaux portent sur les zones agricoles et les voies ferrées de la SNCF. Une fois ces dispositifs opérationnels, un transfert vers les zones non agricoles peut être envisagé, notamment pour équiper des camions spécialisés dans les travaux de pulvérisation.
87
Rapport fait au nom de la Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire sur le projet de loi, après engagement de la procédure accélérée, de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2018 (n° 1947), par M. Joël GIRAUD, rapporteur général, député. Annexe n°5, agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales : sécurité alimentaire. Rapporteur spécial : M. Michel LAUZZANA, député. 5 juin 2019. http://www.assemblee-nationale.fr/15/rapports/r1990-a5.asp. Consulté le 24 septembre 2019. 88 Les produits de biocontrôle pour la protection des cultures. Jean-Pierre Chomienne, Sylvie Dutartre, Michel Larguier, Didier Pinçonnet, Robert Tessier. CGAAER. 2017.
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La recherche publique peut appuyer le développement de ces travaux, mais la problématique spécifique des ZNA ne pourra être prise en compte que lorsque le transfert technologique sera envisageable. Les ZNA pourront alors bénéficier des capteurs et des dispositifs de détection et d'identification développés pour les zones agricoles.
7.2.3. Besoins en matériel de désherbage mécanique
L'interdiction d'emploi des produits phytopharmaceutiques contenant du glyphosate pourrait entraîner dans plusieurs domaines un recours accru au désherbage mécanique. Or, des interlocuteurs de la mission ont signalé la faiblesse de l'offre en matériel adapté à leurs zones d'intervention, avec des contraintes importantes d'accès, de poids, et de pénibilité du travail pour les employés. L'INRA et l'IRSTEA travaillent sur le thème des liens entre les agroéquipements et l'agroécologie. Mais la recherche et le développement du matériel pour le désherbage mécanique reviennent aux entreprises de machinisme. La mission a dû constater leur peu d'empressement. Sans doute considèrent-elles que le marché est d'une part extrêmement limité ce que montre le classement en usage mineur des usages du glyphosate en ZNA et les quantités estimées -, d'autre part extrêmement morcelé.
7.2.4. Besoins pour réduire la pénibilité du travail
La pratique du désherbage manuel et du désherbage mécanique pourrait également augmenter à la suite de la limitation ou de l'interdiction du glyphosate. Or, plusieurs employeurs de main d'oeuvre ont signalé la pénibilité du travail dans leurs périmètres d'intervention : postures malcommodes, travail répétitif, risques de troubles musculosquelettiques, manutention de charges, risques liés à l'hygiène et à l'incivisme dans la voirie, zones difficiles d'accès dans les sites industriels avec des risques électriques ou d'incendie... Dans les entreprises spécialisées dans les travaux de maîtrise de la végétation, les possibilités d'étalement et de partage de la pénibilité grâce à la planification du travail sont limitées. Le domaine de l'ergonomie appliquée au désherbage manuel ou mécanique paraît peu développé. Par ailleurs, le problème de la pénibilité du travail et de l'ergonomie se pose également pour les autres méthodes non chimiques. À titre d'illustration des travaux sur ce thème, l'Annexe 7 présente un système de harnais destiné à l'amélioration de l'ergonomie pour un désherbeur thermique. La recherche dans les domaines médicaux et industriels travaille sur des projets d'exosquelette d'assistance à l'effort. Selon l'Institut national de recherche et de sécurité89 (INRS) pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles : « De nombreuses entreprises sont aujourd'hui tentées par l'acquisition d'exosquelettes. Avec l'objectif d'assister les salariés lors de la réalisation de certaines tâches, leur usage fait naître un espoir légitime d'améliorer les conditions de travail grâce à la réduction de la charge physique et des risques de troubles musculosquelettiques (TMS). Bien que les exosquelettes s'implantent le plus souvent dans les entreprises sous forme de prototypes ou de premières versions à parfaire, les concepteurs et intégrateurs annoncent leur
Dossier exosquelettes : ce qu'il faut retenir. INRS. http://www.inrs.fr/risques/exosquelettes/ce-qu-il-faut-retenir.html. Consulté le 24 septembre 2019.
89
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volonté de déployer rapidement ces nouvelles technologies dans les années à venir. »
Si l'emploi des dispositifs d'assistance physique se banalise dans les entreprises, un transfert vers les opérateurs en zones non agricoles sera à envisager. L'innovation dans ce domaine est toutefois soutenue par les sociétés privées, qui en sont plus à un stade de développement que de recherche. Il est cependant à noter que les exosquelettes, de par leur conception même, continuent à « employer » un être humain et qu'il n'agit qu'à la vitesse de ce dernier. En conséquence, la question de la productivité reste entière.
7.2.5. Besoins en automatisation
Les entreprises confrontées à une pratique accrue du désherbage manuel et mécanique ont signalé à la mission leurs difficultés pour recruter et conserver leur personnel, en raison de la pénibilité accrue du travail. Dans le domaine agricole, une alternative aux problèmes de main d'oeuvre se présente sous la forme de robots désherbeurs autonomes. Un projet de développement est constaté avec la société VITIROVER et la SNCF. Le dispositif de VITIROVER est fondé sur des robots désherbeurs autonomes qui pratiquent la tonte des adventives. Le système a pour le moment été déployé à petite échelle sur des parcelles de vigne. Des expérimentations sont en cours en vue du désherbage des pistes -auxquelles il devrait se limiter- longeant les lignes à grande vitesse de SNCF Réseau.
Là encore, le déploiement des robots autonomes dans les zones agricoles devra permettre d'élargir les transferts de technologie vers les zones non agricoles, au-delà du cas particulier du chemin de fer. La recherche dans ce domaine est dynamique et elle est portée par des sociétés privées. Toutefois, les obstacles à lever pour les entreprises mettant au point ces appareils concernent principalement des ressources financières plutôt qu'un appui par la recherche publique.
7.2.6. Besoins en technologie de rupture
Au-delà de l'amélioration continue des technologies existantes, un besoin est exprimé pour des technologies radicalement différentes. Pour ce qui est de ces technologies de rupture, la mission a pu constater que beaucoup d'interlocuteurs ne pensent pas que celle-ci puisse venir d'une nouvelle substance active qui aurait les mêmes qualités agronomiques que le glyphosate.
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Le traitement électrique est un exemple de ces technologies de rupture. Cette technique est étudiée depuis fort longtemps pour le désherbage90, mais elle n'a jamais été déployée jusqu'à présent de manière industrielle. Le désherbage haute tension vise à agir comme le glyphosate avec une action systémique : il vise à détruire les parties aériennes et racinaires par conduction en éclatant des cellules. Le résultat est fonction du nombre de watts absorbés par la plante, lequel dépend de nombreux paramètres dont une durée de contact minimale de la plante avec une des deux électrodes, l'autre étant au contact du sol. Mais dans ces conditions, les plantules situées audessous du niveau de la première électrode ne sont pas touchées. Le contrôle de la puissance nécessaire pour atteindre les racines est délicat et le résultat encore aléatoire sur ces dernières. Enfin, le contact avec les plantes suppose un certain développement de celles-ci qui n'est pas toujours compatible avec les objectifs en ZNA. Ce traitement ne peut donc même s'envisager que sur un terrain plat, et n'est en aucun cas possible pour les ouvrages d'art, murs, etc. L'IRSTEA associé avec quatre partenaires dans le consortium WeedElec développe un «robot de désherbage localisé par procédé électrique haute tension combinée avec une gestion prédictive par vision hyperspectrale et post évaluation par drone»91. Au Brésil92, l'entreprise Zasso a développé une technologie. Elle y dispose d'une trentaine de matériels fonctionnant en ZNA sur route et autoroute, pour traiter les bas-côtés enherbés. Elle travaille avec les instances allemandes pour obtenir les certificats nécessaires à la mise sur le marché européen. Leur matériel avance de 3 à 5 km/heure en zone agricole, et de 10 km/h sur les voies ferrées (test en Allemagne), permet d'agir sur des racines entre 5 et 15 cm de profondeur, n'apporte pas de chaleur au sol et ne remue pas la terre93. Le professionnel a pour ambition de proposer une solution à un tarif équivalent, au moyen terme, au modèle glyphosate. Actuellement le prix serait de 10 à 15 % plus cher. Il resterait, toujours suivant le professionnel, toutefois bien moins onéreux que les autres solutions de désherbage mécanique ou thermique. Pour la mission, un tel résultat suppose un seul passage annuel et en conséquence que soit trouvé le moyen que soient traitées en même temps les plantules qui ne dépassent pas la
90 91
Plusieurs brevets ont été déposés aux USA dès les années 1900 Projet WeedElec ; Challenge Rose 92 Une trentaine de matériels de l'entreprise ZASSO fonctionne en ZNA sur route, autoroute et lignes à haute tension. Sao Paulo a été désherbée avec cette technique pendant 5 ans 93 Des études sont en cours pour évaluer les impacts sur les vers de terre et les collemboles. Les premières études montrent qu'il faudrait 3 fois plus de puissance que celle développée actuellement pour porter atteinte aux vers de terre.
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hauteur de l'électrode et que l'on ait l'assurance d'une destruction complète des racines, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
7.2.7. Besoins en biovigilance
L'usage répété pendant des années du glyphosate avec un objectif d'élimination de la végétation a permis de réduire sensiblement le stock de semences du sol. La diminution drastique ou l'arrêt des traitements entrainera une reconstitution de ce stock, avec à terme des problèmes de maîtrise de la végétation. Pour cette raison, des interlocuteurs de la mission ont souligné la nécessité de surveiller l'évolution de la flore spontanée sur une échelle de plusieurs années dans les zones non agricoles. Si des années humides se succèdent, elles favoriseront la croissance des mauvaises herbes. Des évolutions floristiques peuvent se produire, et nécessiter une adaptation du pilotage des méthodes de désherbage. L'utilisation répétée d'acide pélargonique peut favoriser les populations de pâturin annuel (Poa annua), plantes pionnières dans les zones avec des revêtements peu piétinés. Ce développement peut être à l'origine de leur soulèvement. D'ores et déjà les exploitants routiers observent un développement d'espèces invasives (ambroisie et renouée du japon) qu'ils n'arrivent plus à contrôler. La mission s'est interrogée sur l'impact du retrait total du glyphosate sur la maîtrise des plantes invasives. En effet, le rapport de l'INRA de novembre 2017 sur « Les usages et alternatives au glyphosate dans l'agriculture française » cite une contribution de l'Association de coordination technique agricole (ACTA) : « L'objectif est d'identifier des situations qui rencontreront d'importantes difficultés dans le cas d'une interdiction du glyphosate. Nous avons identifié 4 catégories de situations jugées comme très difficiles ou critiques (absence totale d'alternative) : flore invasive ou à enjeu de santé publique, productions sensibles, semis direct sous couverts, utilisations conjoncturelles imposées par le contexte pédoclimatique. » L'ACTA cite notamment l'ambroisie à feuilles d'armoise qui fait l'objet d'une lutte obligatoire en raison de son pollen allergisant. Les grandes renouées (Reynoutria japonica, Reynoutria sacchalinensis, Polygonum polystachyum), et des plantes exotiques (Grand Pétasite, Grande Berce du Caucase, Impatiens glanduleux...) sont également mentionnées. La question de l'impact du retrait total du glyphosate en ZNA sur le développement des plantes invasives nécessiterait une étude spécifique. À défaut, la mission propose d'inclure les plantes invasives dans les actions d'épidémiosurveillance en ZNA afin de piloter le désherbage dans ces secteurs. Il devrait également comprendre la périphérie de ces sites, et notamment s'intéresser aux zones agricoles à proximité.
La recherche publique peut apporter un appui méthodologique sur le dispositif de surveillance à mettre en place sur l'évolution à long terme de la végétation spontanée en ZNA. La surveillance proprement dite relève des réseaux d'épidémiosurveillance qui doivent être renforcés dans les zones non agricoles et élargis aux adventices. Une attention particulière doit être apportée aux plantes invasives. En fonction des évolutions observées, le pilotage du désherbage pourra être ajusté. Un tel dispositif mérite d'être immédiatement mis en place pour déterminer un point de départ des évolutions floristiques dans les ZNA, actuellement traitées au glyphosate.
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Sur la base de ce constat, la mission propose d'abord d'élargir le dispositif d'épidémiosurveillance aux adventices dans les zones non agricoles et à leur périphérie, pour exercer une biovigilance sur l'évolution dans la durée de la flore, en particulier invasive, afin de piloter le désherbage. La mission constate que les principaux domaines d'innovation où la recherche publique peut apporter une animation ou un appui sont : en premier lieu les produits de biocontrôle à effet herbicide, qui peuvent rapidement être appliqués dans les zones non agricoles ; en second lieu la mise au point de capteurs et de dispositifs de détection et d'identification d'adventices, avec un transfert de technologie à réaliser des zones agricoles vers les zones non agricoles.
Les autres innovations bénéficient de la dynamique de la recherche privée. Leur application ultérieure aux zones non agricoles depuis l'agriculture ou l'industrie soulèvera des questions de transfert plus que de recherche. La fusion INRA-IRSTEA est une opportunité pour mieux prendre en compte les besoins des opérateurs dans les zones non agricoles. Il est nécessaire que ce nouvel institut soit ouvert aux professionnels des ZNA et écoute leurs demandes en recherche et en transfert .
Pour répondre aux préoccupations liées au monde de la recherche publique, la mission propose de favoriser en amont et en aval des travaux de la recherche publique à travers : les études pouvant déboucher de nouvelles substances ou agents présentant des effets herbicides, et susceptibles d'être développés sous forme de produits de biocontrôle ; les transferts de technologie depuis les secteurs agricoles ou industriels, répondant aux besoins des opérateurs en zones non agricoles ; l'écoute des acteurs des zones non agricoles au sein du futur institut résultant de la fusion de l'INRA et de l'IRSTEA, notamment en identifiant un point de contact.
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CONCLUSION
La présente mission a pour objet de contribuer, pour les zones non agricoles et non forestières, au plan de sortie du glyphosate, qui prévoit de mettre fin aux principaux usages du glyphosate d'ici la fin de l'année 2020 au plus tard, et d'ici la fin de l'année 2022 pour l'ensemble des usages. L'article 50 du règlement 1007/2009 a été proposé comme levier pour retirer les autorisations des produits phytopharmaceutiques contenant du glyphosate. Le glyphosate relève de l'article 50.2. et, en conséquence, la substitution doit se faire par une méthode non chimique, et non par une autre substance active. Dans ce cadre, la mission a recensé les principales utilisations du glyphosate en ZNA, et examiné les alternatives envisageables en fonction des critères des alinéas 50.2. et 50.1. Ces éléments doivent pouvoir éclairer l'ANSES dans la mise en oeuvre de l'évaluation comparative définie par cet article. La cartographie des utilisations du glyphosate en ZNA a conduit à centrer l'étude sur le réseau ferroviaire, les postes électriques du réseau de transport d'électricité, les sites industriels, les autoroutes, routes et rues, les aéroports, les différentes sortes de gazons, les cimetières, le patrimoine historique bâti et les clôtures. Les quantités de glyphosate employées pour ces utilisations sont extrêmement faibles, comparées aux usages agricoles. Ces usages peuvent être considérés comme sensibles lorsqu'ils renvoient à des référentiels motivés par des enjeux de sécurité ou des référentiels culturels (cimetières, patrimoine...) voire dans des aspects commerciaux. L'article 50 définit trois critères principaux pour mettre en oeuvre l'évaluation comparative. Le premier est l'existence d'une méthode non chimique de prévention ou de lutte pour la même utilisation que le glyphosate. Selon les utilisations, des méthodes non chimiques alternatives très diverses existent : désherbage manuel, mécanique, thermique, paillage, minéralisation des surfaces, plantes couvre-sols, robots de tonte... Le deuxième point clef est que la méthode non chimique doit être d'un usage courant en France. La notion d'usage courant est définie comme désignant, à la date du retrait d'AMM, un outil au stade opérationnel, disponible sur le marché, mis sur le marché par son fabricant à hauteur de la demande, adapté à chaque objet technique à désherber, et présentant un caractère habituel, ordinaire au moment présent. Ce point fondamental est extrêmement contraignant aujourd'hui. Ainsi, des solutions nouvelles ne sont pas encore opérationnelles dans les ZNA. Des essais sont en cours, comme les robots désherbeurs pour les pistes des lignes à grande vitesse de SNCF Réseau, ou le désherbage électrique. D'autres alternatives ne sont pas adaptées aux caractéristiques de l'objet technique à désherber. En raison de risques d'incendie, de leurs capteurs et autres appareils électroniques, les voies ferrées ne peuvent pas être traitées avec des dispositifs thermiques. Les exigences de rapidité, pour ne pas perturber le trafic dans les sillons, rendent inapplicable le désherbage mécanique sur les voies (les trains désherbeurs roulent à 60 km/h). Dans le
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cas des sites industriels, les référentiels formulent de fortes exigences contre le risque d'incendie. Le désherbage thermique et même mécanique n'est pas envisageable pour des motifs de sécurité et de conception des lieux. Le troisième critère concerne l'existence d'inconvénients économiques ou pratiques majeurs. La mission expose les inconvénients recensés en fonction de chaque utilisation examinée. Selon les données collectées auprès des utilisateurs professionnels, les méthodes alternatives non chimiques renchérissent le désherbage d'un facteur allant de 5 à 10 en raison de l'allongement du temps de travail, et de la nécessité de faire plusieurs passages. Les employeurs soulignent que leur personnel est exposé à des risques quantitativement plus importants liés à la pénibilité plus importante du désherbage mécanique ou manuel : risques de sécurité, troubles musculosquelettiques, risques psychosociaux. Pour ces motifs, la disponibilité de la main d'oeuvre correspondante est déjà problématique. Elle est peu vraisemblable à grande échelle.
La mission a aussi examiné les possibilités des produits de biocontrôle herbicides sur le marché, à base d'acide pélargonique, d'acide acétique et d'acide caprylique. Ces produits sont des produits chimiques au titre de la réglementation européenne. Ils ne peuvent pas entrer dans le dispositif d'évaluation comparative. Ils montrent toutefois un intérêt comme alternative au glyphosate, notamment en association avec d'autres produits phytopharmaceutiques pour la SNCF. Mais ils présentent des inconvénients liés à leur coût, leur efficacité moindre et leur volume d'application. De leur côté, les produits phytopharmaceutiques à faible risque, au sens du règlement 1107/2009, ne comportent aucun herbicide. Au final, en raison des exigences formulées, l'article 50 apparaît comme essentiellement conçu pour des usages agricoles, et comme un levier d'un intérêt limité pour les usages non agricoles. Sauf exception, dans les ZNA étudiées qui sont les plus consommatrices, les qualités techniques et économiques du glyphosate n'ont pas permis l'émergence de solutions alternatives courantes dans les objets techniques considérés. Par ailleurs, beaucoup d'organismes rencontrés par la mission ne se sont pas préoccupés de chercher des solutions de remplacement en vue d'un retrait total du glyphosate. S'ils travaillent tous volontairement pour une réduction des quantités utilisées, ils considèrent que l'abandon du glyphosate nécessite la reconception des installations concernées. Ces reconceptions, en plus d'être nécessairement coûteuses, sortent du cadre de l'analyse définie par l'article 50. Hors du cadre imposé par l'article 50, l'abandon du glyphosate peut passer par des voies autres que celles du désherbage manuel ou mécanique notamment. Ainsi, SNCF Réseau pourrait, selon un concepteur de train désherbeur, réduire des deux tiers sa consommation de glyphosate en équipant ses trains désherbeurs d'un système de détection des adventices pilotant l'ouverture des buses d'application. La reconception des sites désherbés avec du glyphosate (postes électriques par exemple) pour les rendre moins favorables aux adventices est également une option.
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Cependant, la mission fait observer que l'article 50 exige également que les conséquences sur les retraits d'autorisations pour des utilisations mineures soient prises en compte. Or, tous les usages réservés aux ZNA, dans le catalogue français des usages sont classés en usages mineurs. Pour la mission, ces deux considérations combinées ouvrent la voie à une utilisation limitée du glyphosate, à définir dans le catalogue national des usages et à mettre en oeuvre à travers les AMM.
Pour ces raisons, sur la base des constats formulés au cours des entretiens, la mission présente des pistes de réflexion : s'il est souhaité de rester cohérent avec la loi Labbé, introduire dans les AMM de produits à base de glyphosate, pour leurs usages spécifiques en ZNA classés comme mineurs, une utilisation limitée aux seuls motifs de la sécurité des personnes et des biens, et d'ordre culturel ; prendre en compte les zones non agricoles et les professionnels concernés dans le dispositif mis en place par le plan de sortie du glyphosate ; être vigilant sur l'effet de report vers d'autres herbicides chimiques autorisés ; élargir d'ores et déjà le dispositif d'épidémiosurveillance aux adventices dans les zones non agricoles et à leur environnement, pour piloter le désherbage sur une longue durée en lien avec le monde agricole ; favoriser en amont et en aval les travaux de la recherche publique et les actions de transfert nécessaires aux ZNA.
Signatures des auteurs
Bernard MÉNORET
Anne DUFOUR
Michel LARGUIER
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ANNEXES
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: Lettre de mission
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: Liste des personnes rencontrées
ADMINISTRATION
Date de Organisme Prénom Nom Fonction rencontre Agence sécurité nationale sanitaire de de de Jean ADRIEN Chargé de mission pour 5-juil
évaluation comparative des PPP content du glyphosate à la
l'alimentation,
l'environnement et du travail
Direction des autorisations de mise sur le marché MarieChristine Roger GENET DE GUENIN Directrice des autorisations de mise sur le marché (DAMM) Directeur Général 29-avr 5-juil 29-avr
Caroline
SEMAILLE
Directrice Générale Déléguée en charge du pôle Produits
29-avr
Réglementés Claude VERGNET Chef d'Unité des décisions AMM 29-avr
Françoise
WEBER
Ex Directrice Générale Déléguée en charge du pôle Produits
29-avr
Réglementés Autorité de régulation des activités routières Olivier CGAAER Didier SALESSE PINCONNET ferroviaires et Julien COULIER Responsable de l'unité régulation des gestionnaires d'infrastructure ferroviaire Directeur du transport ferroviaire Membre de la task force du plan de sortie du glyphosate CGEDD Louis HUBERT Membre de la task force du plan de sortie du glyphosate Direction générale de Guillaume VAN REYSEL Adjoint au chef de bureau de l'environnement 03-juil 23-juil 03-juil 23-juil
l'aviation civile DTA-SDDSDD1 DRAAF service BRETAGNE, régional de Françoise Florence CHARTIER FERNANDEZ
Chef de service Chargée de mission
14-août 14-août
l'alimentation DRAAF Pays de Loire Ministère de la Culture Jérôme Marie-José JULLIEN DOUBROFF Expert national ZNA Chargée de mission , ingénieure 20-juin
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Date de Organisme Prénom Nom Fonction rencontre du patrimoine, architecte
JeanMichel JeanMichel Ministère de la transition écologique et solidaire Murielle
LOYER-HASCOËT
Directeur du service du patrimoine
20-juin
SAINSARD
Expert parcs et jardins
20-juin
LETOFFET
Adjointe au chef du Bureau des produits
10-mai
Direction générale de la prévention des risques sousdirection environnement santéproduits MarieLaure METAYER Sous-directrice 10-mai
chimiques agriculture Ministère de la transition écologique Direction et solidaire, des des de la des Elvire HENRY Chargée d'étude 04-juin Éric GARDAIS Adjoint au chef de bureau 04-juin
générale
infrastructures, transports mer /Direction et
infrastructures de transport/ Sous-direction de Michel HERSEMUL Sous-directeur de l'aménagement du réseau national 04-juin
l'aménagement du réseau routier national
Alexandre
KAVAJ
Chef du bureau de la politique de l'environnement
04-juin
Ministère de la Transition Ecologique et Solidaire,
Delphine
RUEL
Sous-directrice accidentels
des
risques
25-juin
Direction Générale de la Prévention des Risques Ministère de la transition écologique direction et solidaire, de Guglielmina OLIVEROS-TORO Adjointe à la sous-directrice de la protection et de la gestion des ressources en eau et minérales 11-avr
générale
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Date de Organisme l'aménagement, du Prénom Nom Fonction rencontre Dominique POUJEAUX Chargé de mission pesticides en ZNA (axe 4 du plan Écophyto) 11-avr
logement et de la nature. Direction de l'eau et de la biodiversité, sous-direction Emmanuel STEINMAN
de la protection et de la gestion des ressources en eau et minérales
Chef du bureau « qualité de l'eau et agriculture »
11-avr
Ministère Direction
de
l'agriculture, de
Anne Cécile
COTILLON
Sous-directrice de la qualité, de la santé et de la protection des végétaux (Service des actions sanitaires en production primaire)
11-avr
générale
l'alimentation
Ministère Secrétariat
des
armées, pour
Rozenn
LE TOUZET
Chargée de mission
25-sept
général
l'administration, des patrimoines,
Direction de la Hélène PERRE Chef de bureau 25-sept
mémoire et des archives, Chef de bureau et de du
l'environnement
développement durable Préfet de région(h), PierreEtienne BISCH Coordinateur interministériel du plan de sortie du glyphosate 03-juil
Conseiller d'État en service extraordinaire
Pauline
BODIN
Ancienne Chargée de mission Ecophyto en ZNA à la DRIAAF
25-juil
Autres organisations :
Organisme Prénom Nom Fonction Date de
rencontre Association applicateurs professionnels de produits phytopharmaceutiques Association des maires de France André Sylviane FLAJOLET OBERLÉ Vice-président Chargée de mission prévention des pollutions Association des sociétés Christophe BOUTIN Délégué général 26-juin 22-mai 22-mai Tanguy CLABON Vice-président 20-août des Philippe BEUSTE Président 20-août
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Organisme
Prénom
Nom
Fonction
Date
de
rencontre françaises d'autoroutes BAYER Florence Hélène PORTELETTE BRUN Chargée de mission environnement Responsable France de Bayer 26-juin 13-mai
environnemental science (usages non agricoles) Pascal DAY Chef du projet Smart Weeding Train Europe Sylvestre JOBIC Responsible Stakeholder Affairs and Sustainable Development. COVERGARDEN JeanPierre Fédération golf France Environnement Thibault LEROUX Nature Jonathan BOURDEAU Référent national FNE sur les questions pesticides en zones non agricoles Chargé de mission Santé-Environnement & Agriculture GENERATIONS FUTURES INRA IRSTEA La Demeure Historique Réseau d'électricité Ruffine Frédéric SNCF réseau Dominique LE-VILLAIN ROY JANOT de transport Christian Vincent Armelle Claire HUYGHE DE RUDNICKI VERJAT GRANDET Directeur Scientifique Adjoint Ingénieur de recherche Déléguée générale Directeur du département concertation et environnement Chargée d'affaires environnement Chef de groupe environnement Direction technique Réseau, chef de projet du programme post-glyphosate 26-mai 26-mai 23-mai 27-mai 12-août 29-août 26-mai François VEILLERETTE Directeur 17-sept 19-sept 19-sept française de Thomas CHARRIER Responsable environnement FIOCRE Directeur technique et R&D 11-avr 13-mai 13-mai
Michel JeanPierre
MORIN PUJOLS
Chef du département voies et abords Direction technique Réseau, responsable du pôle maîtrise de la végétation
23-mai 23-mai
Société des autoroutes du Nord et de l'Est de la France
JeanMarie
DECK
Responsable département
26-juin
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Organisme
Prénom
Nom
Fonction
Date
de
rencontre Union des entreprises pour la protection des jardins et espaces publics Union Nationale des Fanny DEVOGHELAERE Conseillère technique qualité, sécurité, environnement Barbara DEKEYSER Secrétaire adjointe déléguée à la qualité, la sécurité et l'environnement 29-mai 29-mai Nicolas MARQUET Directeur général 29-mai
Entreprises du Paysage
VITIROVER
Arnaud
DE FOUCHARDIERE
LA
Directeur général
16-sept
ZASSO ZASSO
Olivier Benjamin Olivier
BOULY ERGAS DOURS
Ingénieur Executive Chairman Expert gazon
27-juin 27-juin 11-avr
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: Liste des sigles utilisés
ACTA AMM ANR ANSES APCA ARAFER ASFA ATEX BNV-D CASDAR CEI CER CEREMA CGAAER CGDD CGEDD CIRC CMPC CRE DGAL DIR DRAAF DVP ECHA EFSA EMR FIFA HLM Association de coordination technique agricole Autorisation de mise sur le marché Agence nationale de la recherche Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail Assemblée permanente des Chambres d'agriculture Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières Association des sociétés françaises d'autoroutes ATmospheres EXplosive Banque nationale des ventes Compte d'affectation spécial « Développement agricole et rural » Centre d'entretien et d'intervention (des routes au sein d'une DIR) Communauté européenne du rail Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux Commissariat général au développement durable Conseil général de l'environnement et du développement durable Centre international de recherche sur le cancer Coût moyen pondéré du capital Commission Régulation de l'Energie Direction Générale de l'Alimentation Directions interdépartementales des routes nationales Direction régionale de l'agriculture et de la forêt Dispositif végétalisé permanent Agence européenne des produits chimiques Autorité européenne de sécurité des aliments État membre rapporteur Fédération internationale de football association Habitation à loyer modéré
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IAU Ile de France ICPE JEVI INRA INSERM LGV LMR ONF OPECST PPP PSD RAR RD RNN RTE SANEF SLO SNCF TGV TMS TPC TRI TURPE UEFA UNEP VC ZNA ZNT
Institut d'aménagement et d'urbanisme de la région d'Île-de-France (Institut Paris Région depuis 2019) Installations classées pour la protection de l'environnement Jardins, espaces végétalisés et infrastructures Institut national de la recherche agronomique Institut national de la santé et de la recherche médicale Ligne à grande vitesse limite maximale de résidus Office national des forêts Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques Produit(s) phytopharmaceutique(s) Plantain, Sétaire verte, Digitaire rapport d'évaluation de renouvellement Routes départementales Réseau routier national Réseau de transport d'électricité Société des autoroutes du Nord et de l'Est de la France Services librement organisés Société nationale des chemins de fer français Train à grande vitesse. Troubles musculosquelettiques Terre-plein central Taux de rentabilité interne Tarif d'Utilisation des Réseaux Publics d'Électricité Union of European Football Associations Union Nationale des Entreprises du Paysage Voirie communale Zone non agricole Zone non traitée
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: Les produits alternatifs aux produits phytopharmaceutiques de synthèse
1 Les différentes catégories de produits alternatifs La réglementation sur l'utilisation des produits phytopharmaceutiques prévoit des mesures dérogatoires pour certaines catégories de produits alternatifs aux produits de synthèse. Il s'agit notamment des produits de biocontrôle, des produits qualifiés à faible risque, des produits autorisés en agriculture biologique, et de produits composés uniquement de substances de base. La réglementation définit par ailleurs les préparations naturelles peu préoccupantes (PNPP). Dans la littérature technique, les termes de produits de lutte biologique sont également employés. Enfin, les stimulateurs des défenses naturelles et les substances naturelles à effet biostimulant sont souvent citées parmi les produits alternatifs. Ces différentes catégories de produits se recoupent largement, ce qui peut créer de la confusion chez les utilisateurs. Ils sont souvent mentionnés par opposition : aux pesticides, terme employé de façon ambivalente dans le vocabulaire courant, mais défini de façon précise dans la réglementation. L'article 3 de la directive 2009/128/CE pour une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable précise : « Aux fins de la présente directive, on entend par [...] « pesticide » : o un produit phytopharmaceutique au sens du règlement (CE) no 1107/2009 ; o un produit biocide comme défini dans la directive 98/8/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 février 1998 concernant la mise sur le marché des produits biocides. » aux produits de synthèse. Un grand nombre de produits phytopharmaceutiques sont en effet issus de la chimie organique. Toutefois la notion de produit de synthèse est également ambivalente dans la mesure où elle concerne aussi des produits issus de la chimie minérale, comme le sulfate de cuivre, très utilisé en agriculture biologique. De même, les phéromones de synthèse sont classées comme des produits de biocontrôle en tant que médiateurs chimiques.
Les paragraphes suivants se proposent de clarifier les définitions de ces différentes catégories de produits alternatifs, leur nature et d'indiquer les sources donnant des listes de produits mis sur le marché. Parmi tous les produits alternatifs, seuls les produits de biocontrôle et les substances de base proposent des produits classés comme herbicides. 2 Les produits de biocontrôle 2.1 Définition des produits de biocontrôle La France est le seul État membre à donner une définition réglementaire des produits de biocontrôle. En effet, l'article L.253-6 du code rural et de la pêche maritime précise à propos du plan d'action national sur les produits phytopharmaceutiques : « Le plan s'accompagne d'une stratégie nationale de déploiement du biocontrôle, qui sont des agents et produits utilisant des mécanismes naturels dans le cadre de la lutte intégrée contre les ennemis des cultures. Ils comprennent en particulier :
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1° Les macro-organismes ; 2° Les produits phytopharmaceutiques comprenant des micro-organismes, des médiateurs chimiques comme les phéromones et les kairomones et des substances naturelles d'origine végétale, animale ou minérale. » Les micro-organismes sont définis dans le règlement CE) n° 1107/2009 comme « toute entité microbiologique, y compris les champignons inférieurs et les virus, cellulaire ou non, capable de se répliquer ou de transférer du matériel génétique ». Il s'agit par exemple de produits à base de Bacillus thuringiensis (préparation bactérienne contre les larves de lépidoptères), virus de la granulose (préparation virale contre les larves de carpocapse des pommes), Trichoderma sp. (champignon antagoniste) ... Par opposition, les macro-organismes sont définis dans l'article R.258-1 comme : « tout organisme autre qu'un micro-organisme tel que défini à l'article 3 du règlement (CE) n° 1107/2009 ». Les macro-organismes sont des prédateurs94 ou des parasitoïdes95 des organismes nuisibles pour les cultures. Selon leur régime alimentaire, ils sont entomophages (nourriture à base d'insectes) ou acarophages (nourriture à base d'acariens). Les macroorganismes peuvent être : des insectes, appartenant par exemple aux genres Adalia, Anthocoris, Aphelinus, Chrysoperla, Encarsia, Trichogramma... des acariens des genres Amblyseius, Hypoaspis, Macrocheles, Phytoseilulus... des nématodes des genres Heterorhabditis, Phasmarhabditis, Steinernema...
Contrairement aux micro-organismes, les macro-organismes ne sont pas des produits phytopharmaceutiques, et ils peuvent être commercialisés sans faire l'objet d'une autorisation de mise sur le marché. En revanche, l'entrée sur un territoire96 et l'introduction dans l'environnement de macro-organismes non indigènes utiles aux végétaux, notamment dans le cadre de la lutte biologique, sont réglementées par l'article R.258-1 du code rural et de la pêche maritime. Ces organismes doivent faire l'objet d'une évaluation favorable portant sur le risque phytosanitaire et environnemental, incluant l'impact sur la biodiversité. Le recours à des macro-organismes est développé dans les cultures sous serres dans le cadre de la lutte biologique. Des producteurs en agriculture biologique préfèrent toutefois pratiquer une lutte biologique par conservation en favorisant les auxiliaires autochtones, plutôt que par introduction. Un médiateur chimique est une substance sécrétée par un organisme vivant dont les molécules agissent sur sa physiologie, son comportement ou sur d'autres organismes quand elle est émise dans le milieu ambiant97. Dans le domaine de la protection des végétaux, des phéromones de synthèse sont utilisées pour brouiller la communication intraspécifique entre
94
Un prédateur capture sa proie et la tue immédiatement. Un parasitoïde provoque la mort plus ou moins rapidement d'un individu-hôte aux dépens duquel sa ou ses larves effectuent leur développement. 96 Les territoires suivants sont considérés comme distincts : l'ensemble des départements de la France métropolitaine continentale, la Corse, la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, La Réunion, Mayotte, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre et Miquelon. 97 Index phytosanitaire ACTA. 2018.
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organismes nuisibles (lépidoptères en particulier), et des kairomones synthétiques sont employées pour renforcer ou perturber la communication interspécifique (attraction des pollinisateurs, recherche des végétaux par les ravageurs).
Les substances naturelles d'origine végétale, animale ou minérale sont définies dans la note de service DGAL/SDQSPV/2019-615 du 22 août 2019 de la façon suivante : « On entend par substance naturelle, toute substance naturellement présente et qui a été identifiée en l'état dans la nature. Cette substance est : soit extraite d'un matériau source naturel ; soit obtenue par synthèse chimique et strictement identique à une substance naturelle telle que décrite ci-dessus.
Les substances issues de procaryotes, eucaryotes unicellulaires ou champignons appartiennent à la catégorie des substances naturelles. » Ces substances naturelles peuvent être par exemple de l'acide acétique (herbicide), de l'acide caprylique (herbicide), de l'acide pélargonique (herbicide), du cerevisane (stimulateur des défenses naturelles), de la farine de sang (répulsif de cerfs), de l'huile de colza estérifiée (adjuvant), de l'huile de paraffine (insecticide et acaricide), de la laminarine (stimulateur de défenses naturelles), des pyréthrines (insecticides), du soufre (fongicide), du spinosad (insecticide), du sulfate de fer (destruction de mousses) ... En revanche, le sulfate de cuivre n'est pas classé dans la catégorie des substances naturelles, puisqu'il est issu de la chimie minérale.
2.2 Listes de produits de biocontrôle La principale source d'information actualisée pour connaître les listes de produits de biocontrôle est la note de service de la Direction générale de l'alimentation intitulée « Liste des produits phytopharmaceutiques de biocontrôle, au titre des articles L.253-5 et L.253-7 du code rural et de la pêche maritime ». Ces deux articles prévoient en effet des mesures dérogatoires pour les « produits de biocontrôle figurant sur une liste établie par l'autorité administrative ». Cette liste est régulièrement mise à jour, et la dernière publication à la date de rédaction est la note de service DGAL/SDQSPV/2019-615 du 22 août 2019. Elle contient 40 produits herbicides, à base d'acide acétique, d'acide caprylique ou d'acide pélargonique. Les produits phytopharmaceutiques de biocontrôle cités dans la note de service répondent aux critères suivants : ils sont conformes à la définition de l'article L.253-6, mais ils ne comportent pas les macro-organismes qui ne sont pas des produits phytopharmaceutiques ; ils bénéficient d'une autorisation de mise sur le marché ; ils respectent des dispositions spécifiques en matière de sécurité pour la santé et l'environnement :
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la substance ne doit pas être candidate à la substitution au sens du point 4 de l'annexe II du règlement 1107/2009 ; le produit ne doit pas comporter une des mentions stipulées de danger soit pour la santé publique, soit pour l'environnement.
La note de service propose quatre listes de produits de biocontrôle à base de : micro-organismes ; médiateurs chimiques ; substances naturelles d'origine végétale, animale ou minérale ; pièges à insectes.
Le site E-PHY (https://ephy.anses.fr) de l'ANSES permet aussi d'obtenir une liste des produits de biocontrôle, qui peut être en retard par rapport à la liste officielle. Lors d'une consultation le 26 septembre 2019, une liste de 360 produits phytopharmaceutiques de biocontrôle a ainsi été obtenue. Enfin, sur une base annuelle, l'Association de coordination technique agricole édite l'« Index ACTA Biocontrôle ». La troisième édition a été publiée en avril 2019. 2.3 Possibilités et freins pour le recours aux produits de biocontrôle Une enquête réalisée par AgroParisTechService Études pour IBMA France lors du 2è trimestre 2018 auprès de 542 agriculteurs aboutit aux conclusions suivantes : « Encore des marges de progrès à atteindre côté notoriété des produits de biocontrôle : près d'un agriculteur sur quatre n'en a jamais entendu parler, même si 17 % d'entre eux utilisent finalement déjà des produits de biocontrôle. La volonté d'utiliser davantage les solutions de biocontrôle dans un proche avenir : 44 % des agriculteurs interrogés utilisent des produits de biocontrôle : o o ils sont plus nombreux dans les cultures spécialisées (jusqu'à 84 %), moins en grandes cultures (34 %). toutes cultures confondues, ils sont plus de la moitié à souhaiter utiliser davantage de produits de biocontrôle dans le futur.
6 % en ont utilisé dans le passé, et ont arrêté ; la moitié d'entre eux se dit prêt à le réenvisager.
Parmi les agriculteurs n'utilisant pas de produits de biocontrôle, la quasi-totalité envisage d'en utiliser dans le futur un agriculteur sur cinq avec certitude. Le biocontrôle a une bonne image auprès des agriculteurs qui voient parmi ses avantages son aspect alternatif aux produits conventionnels, le meilleur respect de l'environnement et de la
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santé, et sa contribution à une meilleure image de l'agriculture auprès des consommateurs. Ils identifient parmi les freins au déploiement du biocontrôle le coût trop élevé de ces produits, le manque d'accompagnement et de formations adaptées, le manque d'efficacité et/ou de preuves d'efficacité et le manque de produits. Le besoin d'accompagnement dans le choix et l'utilisation de ces méthodes alternatives est réclamé par plus de deux agriculteurs sur trois (70 %), alors que 39 % des agriculteurs interrogés disent que leur principal fournisseur de produits phytosanitaires ne leur a jamais proposé de produits de biocontrôle. »
3 Les produits phytopharmaceutiques à faible risque 3.1 Définition des produits phytopharmaceutiques à faible risque Le règlement CE) n° 1107/2009 définit :
1 - les substances à faible risque dans l'article 22 : « Par dérogation à l'article 598, une substance active satisfaisant aux critères prévus à l'article 499 est approuvée pour une période n'excédant pas quinze ans, si elle est considérée comme une substance active à faible risque et s'il est prévisible que les produits phytopharmaceutiques contenant cette substance ne présenteront qu'un faible risque pour la santé humaine, la santé animale et l'environnement, conformément à l'article 47, paragraphe 1. »
2 les produits phytopharmaceutiques à faible risque dans l'article 47 : « Lorsque toutes les substances actives contenues dans un produit phytopharmaceutique sont des substances actives à faible risque telles que visées à l'article 22, ce produit est autorisé comme produit phytopharmaceutique à faible risque à condition que des mesures spécifiques d'atténuation des risques ne se révèlent pas nécessaires à la suite d'une évaluation des risques. Ce produit phytopharmaceutique satisfait en outre aux conditions suivantes : a) les substances actives, phytoprotecteurs et synergistes à faible risque qu'il contient ont été approuvés au titre du chapitre II ; b) il ne contient pas de substance préoccupante100 ; c) il est suffisamment efficace ; d) il ne provoque pas de souffrances ou de douleurs inacceptables chez les vertébrés à combattre ;
98 L'article 5 établit pour la première approbation une durée maximale de dix ans. 99 L'article 4 fixe les critères généraux d'approbation des substances actives. 100 L'article 3 précise la définition des substances préoccupantes : toute substance intrinsèquement capable de provoquer un effet néfaste pour l'homme, les animaux ou l'environnement et contenue ou produite dans un produit phytopharmaceutique à une concentration suffisante pour risquer de provoquer un tel effet.
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e) il est conforme à l'article 29101, paragraphe 1, points b), c) et f) à i). Ces produits sont dénommés « produits phytopharmaceutiques à faible risque ». »
3.2 Listes de produits phytopharmaceutiques à faible risque Les listes de substances actives à faible risque sur la base de données sur les pesticides de l'Union européenne à l'adresse suivante :
https://ec.europa.eu/food/plant/pesticides/eu-pesticidesdatabase/public/?event=homepage&language=FR
Au 26 septembre 2019, cette base présente la liste suivante de 16 substances actives à faible risque. Substances actives classées à faible risque et approuvées au sens du règlement n°1107/2009. (Consultation EU Pesticides database du 26 septembre 2019)
Substance active
ABE-IT 56
Nature
Composants de lysate de Saccharomyces cerevisiae, souche DDSF623 Champignon microscopique hyperparasite de champignons pathogènes
Fonction
Fongicide
Ampelomyces quisqualis strain AQ10 Bacillus amyloliquefaciens strain FZB24 Cerevisane
Fongicide
Bactérie utilisée en lutte bioloqique Fongicide contre des champignons pathogènes Extrait de la souche LAS117 du champignon microscopique Saccharomyces cerevisiae Champignon microscopique hyperparasite de champignons pathogènes Stimulateur de défenses naturelles Fongicide
Clonostachys rosea strain J1446 (Gliocladium catenulatum strain J1446)
Coniothyrium minitans Champignon microscopique du Fongicide strain CON/M/91-08 (DSM sol, hyperparasite des sclérotes de 9660) Sclerotinia sp. COS-OGA Complexe de la famille des oligosaccharides associant des fragments de pectine (OGA) Stimulateur de défenses naturelles
101 L'article 29 fixe les conditions d'autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques.
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Substance active
Nature
extraite de pelure d'agrumes et de pommes, et des fragments de chitosan (COS) provenant de l'exosquelette de crustacés.
Fonction
Ferric phosphate Isaria fumosorosea Apopka strain 97 (formely Paecilomyces fumosoroseus) Laminarin
Phosphate ferrique Champignon microscopique du sol, utilisée en lutte biologique contre des insectes nuisibles. Polysaccharide extrait de l'algue Laminaria digitata Variant du Pepino mosaic virus. Variant du Pepino mosaic virus. Champignon microscopique parasite de nématodes Variant du Pepino mosaic virus.
Molluscicide Insecticide
Stimulateur de défenses naturelles Stimulateur de défenses naturelles Stimulateur de défenses naturelles Nématicide Stimulateur de défenses naturelles, et inoculation de virus contre le Pepino mosaic virus. Fongicide
Mild Pepino Mosaic Virus isolate VC 1 Mild Pepino Mosaic Virus isolate VX 1 Pasteuria nishizawae Pn1 Pepino mosaic virus strain CH2 isolate 1906
Saccharomyces cerevisiae strain LAS02 Trichoderma atroviride strain SC1
Champignon microscopique du groupe des levures, antagoniste de champignons pathogènes Champignon microscopique, antagoniste de champignons pathogènes
Fongicide
La base de données sur internet E-PHY de l'ANSES permet de consulter la liste des produits phytopharmaceutiques autorisés à la mise sur le marché en France, et classés à faible risque. Au 26 septembre 2019, la base de données affiche une liste de 27 produits phytopharmaceutiques à faible risque. À ce jour, il n'y a ni substance active, ni produit phytopharmaceutique à faible risque qui serait classé comme herbicide.
4 Les produits composés uniquement de substances de base
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4.1 Définition des substances de base L'article 23 du règlement 1107/2009 précise : « Une substance de base est une substance active : a) qui n'est pas une substance préoccupante ; et b) qui n'est pas intrinsèquement capable de provoquer des effets perturbateurs sur le système endocrinien, des effets neurotoxiques ou des effets immunotoxiques ; et c) dont la destination principale n'est pas d'être utilisée à des fins phytosanitaires, mais qui est néanmoins utile dans la protection phytosanitaire, soit directement, soit dans un produit constitué par la substance et un simple diluant; et d) qui n'est pas mise sur le marché en tant que produit phytopharmaceutique. » Les substances de base ont donc un statut particulier dans le sens où elles relèvent du règlement 1107/2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, mais sans être elles-mêmes mises sur le marché en tant que produits phytopharmaceutiques, ni pour être employées principalement pour la protection des plantes.
4.2 Listes des substances de base Le liste des substances de base peut être obtenue grâce à la base de données sur les pesticides de l'Union européenne. Au 26 septembre 2019, elle comprend la liste suivante de 20 substances de base, dont 2 avec un effet herbicide mais non utilisables en ZNA.
Substances de base approuvées au sens du règlement n°1107/2009. (Consultation EU Pesticides database du 26 septembre 2019)
Substance active
Beer Calcium hydroxide Chitosan hydrochloride Clayed charcoal Diammonium phosphate Equisetum arvense L. Fructose Hydrogen peroxide Bière
Nature
Fonction
Molluscicide Fongicide Stimulateur de défenses naturelles Protecteur Attractif pour piégeage Fongicide Stimulateur de défenses naturelles Bactéricide, fongicide
Chaux éteinte Chlorhydrate de chitosane Charbon argileux Phosphate de diammonium Prèle Sucre simple présent dans les fruits et le miel Eau oxygénée
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Substance active
Lecithins Mustard seeds powder Onion oil Salix spp. Cortex Sodium chloride Sodium hydrogen carbonate Sucrose Sunflower oil Talc E553B Urtica spp. Vinegar Whey
Nature
Phospholipides extraits du vivant Poudre de graines de moutarde Huile d'oignon Écorce de saule Sel de table Bicarbonate de soude Saccharose Huile de tournesol Talc (roche broyée) Ortie Vinaigre Lactosérum
Fonction
Fongicide Fongicide Masqueur d'odeur Fongicide Fongicide, insecticide Fongicide, herbicide102 Stimulateur de défenses naturelles Fongicide Fongicide, insecticide Fongicide, insecticide, acaricide, Bactéricide, fongicide, herbicide103 Fongicide
5. Produits dont l'usage est autorisé dans le cadre de l'agriculture biologique. 5.1 Définition des produits autorisés en agriculture biologique Les produits destinés à la protection des plantes en agriculture biologique doivent être conformes d'une part aux réglementations communautaires et nationales sur les produits phytopharmaceutiques, et d'autre part aux réglementations encadrant la production en agriculture biologique : les règlements CE n°834/2007 et n°889/2008.
5.2 Listes de produits autorisés en agriculture biologique L'Institut de l'agriculture et de l'alimentation biologiques (ITAB) diffuse sur son site web (http://www.itab.asso.fr) les listes de produits autorisés en agriculture biologique :
102
103
Le bicarbonate de soude est approuvé en tant que substance de base par le règlement 2015/2069. Le rapport SANTE/10667/2015 rev. 4 du 26 janvier 2018précise que l'utilisations comme herbicide est autorisée uniquement sur les sur les plantes en pot dans les serres. Il n'est donc pas possible d'utiliser le bicarbonate de soude comme herbicide en ZNA. Le vinaigre est approuvé en tant que substance de base depuis juillet 2015 par le règlement 2015/1108, pour des fonctions bactéricide et fongicide (traitement de semences et désinfection outils), puis herbicide dans des conditions restreintes. Le rapport SANCO/12896/2014 rev3 du 13 décembre 2018 précise que les utilisations autorisées portent uniquement sur les plantes médicinales, aromatiques ou plantes à parfum (PPAMC) avant la levée de la culture, en raison d'un risque de phytotoxicité sur jeunes plantes. Il n'est donc pas possible d'utiliser le vinaigre comme herbicide en ZNA.
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les produits phytopharmaceutiques, dont aucun n'est classé comme herbicide ; les substances de base, dont deux présentent un effet herbicide.
Le site E-PHY de l'ANSES identifie par ailleurs les produits phytopharmaceutiques utilisables en agriculture biologique. Lors d'une consultation le 26 septembre 2019, une liste de 347 produits phytopharmaceutiques autorisés en agriculture biologique a ainsi été obtenue, dont aucun herbicide.
6. - Les stimulateurs des défenses naturelles Le réseau mixte technologique ELICITRA définit les stimulateurs des défenses naturelles (SDN) ou stimulateurs de défense des plantes (SDP) comme « toute substance ou tout microorganisme vivant non pathogène qui, appliqué sur une plante, est capable de promouvoir un état de résistance significativement plus élevé par rapport à une plante non traitée face à des stress biotiques ». Les SDN activent donc différents mécanismes au sein de la plante pour la rendre plus résistante aux attaques des organismes nuisibles. La définition des SDN est liée à leur mode d'action indirect sur les bioagresseurs, et non à leur nature qui peut être synthétique. Certains produits phytopharmaceutiques sont considérés comme des SDN. Ils contiennent des substances actives telles que l'acibenzolar-S-méthyle, le Bacillus subtilis QST 713, le Bacillus amyloliquefaciens ssp. plantarum strain D747, la cerevisane, le fenugrec, la laminarine, etc. Les SDN comportent donc des produits de synthèse, des produits de biocontrôle, et des produits à faible risque. Certains herbicides réduisent la gravité d'attaques de champignons, ce qui pourrait s'expliquer par une stimulation des défenses naturelles. Mais en sens inverse, il n'y a pas de produit homologué comme herbicide grâce à un effet de stimulation des défenses naturelles.
7. Les substances naturelles à usage biostimulant L'effet des substances naturelles à usage biostimulant est « de stimuler les processus naturels pour améliorer/avantager l'absorption des nutriments, l'efficience des nutriments, la tolérance aux stress abiotiques, et la qualité des cultures, indépendamment du contenu en nutriments du biostimulant »104 Ils peuvent renforcer la résistance des plantes cultivées aux attaques d'organismes nuisibles. Toutefois ils ne relèvent pas du cadre réglementaire des produits phytopharmaceutiques, mais de celui des fertilisants105. Ils bénéficient, comme les autres matières fertilisantes, d'un cadre
104 European Biostimulants Industry Council. Voir : http://www.biostimulants.eu/ 105 En effet, la réglementation des produits phytopharmaceutiques encadre les produits qui protègent les végétaux, exercent une action autre que nutritive, assure la conservation des produits végétaux, détruisent les végétaux et freinent une croissance indésirable des végétaux (Art 2 du Règlement (CE) n° 1107/2009). La réglementation des matières fertilisantes encadre les produits commercialisés en tant qu'engrais CE (Règlement (CE) 2003/2003), les amendements et les biostimulants (Article L. 255-1 du Code rural et de la pêche maritime).
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plus souple pour leur commercialisation, notamment en ce qui concerne leur évaluation.
8. Préparations naturelles peu préoccupantes La France est le seul État membre à avoir créé une catégorie pour les préparations naturelles peu préoccupantes (PNPP). L'article L.253-1 du code rural et de la pêche maritime définit ces produits comme suit : « Une préparation naturelle peu préoccupante est composée exclusivement soit de substances de base, [...] soit de substances naturelles à usage biostimulant. Elle est obtenue par un procédé accessible à tout utilisateur final. Les substances naturelles à usage biostimulant sont autorisées selon une procédure et une évaluation simplifiées, dont les modalités sont fixées par voie réglementaire. La procédure et l'évaluation sont adaptées lorsque la demande d'autorisation porte sur la partie consommable d'une plante utilisée en alimentation animale ou humaine. »
9. Produits de lutte biologique Les produits de lutte biologique permettent de maîtriser les organismes nuisibles pour les cultures au moyen d'organismes vivants antagonistes. Ils correspondent aux macroorganismes et aux microorganismes définis plus haut dans le cadre des produits de biocontrôle. * *
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: Extrait de l'interview du sénateur Joël Labbé
Source : « En vert et avec vous » - juillet 2018
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: Données complémentaires sur les méthodes alternatives non chimiques
Source : UNEP
Traitement manuel et mécanique
Traitement thermique
Traitement avec des produits de biocontrôle
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: Amélioration de l'ergonomie avec un désherbeur
Source : Matériel et Paysage, n° 146, avril 2019 (extrait)
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INVALIDE) (ATTENTION: OPTION rie d'usages permet l'autorisation de préparations sur l'ensemble des cultures du catalogue des usages, avec des libellées comme suit : 11015921 Traitements généraux*Désherbage*Zones Cult. Avt Plantat. 11015933 Traitements généraux*Désherbage*Zones non cult. Les ZNA professionnelles et amateurs sont définies comme étant des « espaces aménagés et/ou végétalisés où les plantes ne sont pas cultivées à des fins commerciales ». Ces espaces comprennent41 notamment :
« des compartiments entretenus par un public professionnel :
o
les espaces communaux, de collectivités territoriales, et certains espaces privés (jardins - espaces verts, parcs d'attraction et de loisirs, plantations d'alignement et à massifs, abords de bâtiments, voirie, trottoirs et îlots directionnels, terrains de sport, cimetières, cours et plans d'eau, et zones subaquatiques, arboretums, etc.) ; les réseaux de communication (routes et autoroutes, chemins de fer, aéroports, zones fluviales et portuaires), ainsi que leurs abords et accotements ; les zones engazonnées (terrains de sports, golfs, hippodromes, pelouses d'espaces collectifs divers), les zones industrielles en activité (sites de production, de transformation et de transport d'électricité, installations classées Seveso, ou non, centres de fret, aires de stockage, etc.), ainsi que les friches industrielles ; les enceintes militaires ; les forêts suburbaines ainsi que divers espaces naturels ;
o
o
o
o o
des compartiments entretenus par un public non professionnel amateur : ces espaces dits « jardins amateurs » et jardins partagés regroupent divers compartiments dont des espaces cultivés plantés d'espèces fruitières, potagères, ou ornementales, abords de maison, allées de jardins. ».
40 41
Note de service DGAL/SDQPV/2015-253 du 10/03/2015. Note de service DGAL/SDQPV/2015-253 du 10/03/2015.
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Une distinction nette doit être faite entre le terme « usage » au sens des AMM, tel qu'il vient d'être présenté, et le terme « utilisation ». Pour mémoire, la mission a choisi d'écrire « utilisation » dans le présent rapport lorsqu'il s'agit de qualifier plus précisément un emploi par les opérateurs, notamment sur les infrastructures, sur les voies ferrées, sur les clôtures, avant gazon... La mission considère également que la notion de « usage courant », dans le cadre de l'article 50.2, doit s'entendre comme l'« utilisation courante » à la date de la décision de retrait ou de renouvellement des autorisations pour les produits contenant du glyphosate. À titre d'illustration, le tableau ci-dessous élaboré par la mission, citant la note de service DGAL sur le catalogue des usages, montre des exemples de comparaison entre les notions d'usage et d'utilisation.
Usages des PPP en ZNA au sens des AMM
(non exhaustif)
Utilisations des PPP en ZNA
(non exhaustif)
Usage « Désherbage total »
Utilisations dans des sites désherbés essentiellement pour des raisons de sécurité (risques d'incendie, d'intrusion, de maintien du bon état de réseaux ou d'ouvrages d'art...etc.) avec des produits à fort niveau d'efficacité, montrant un spectre d'activité très large et polyvalent, avec une persistance suffisante pour maintenir un faible niveau d'enherbement toute l'année. Les sites industriels, les voies ferrées, les centrales de transformation et de production d'électricité, etc. constituent les compartiments principaux inclus dans cet usage.
Usages « Désherbage des Utilisations pour l'entretien des zones herbacées extensives zones herbeuses » « sécurisées » peu ou pas fréquentées par le public, dont la
végétation a pour rôle essentiel d'assurer une couverture destinée à ralentir les flux hydrologiques, à réduire l'érosion des sols et à assurer un fond paysager d'accompagnement des infrastructures. Ce sont par exemple les zones herbeuses recouvrant les accotements routiers et autoroutiers, les abords de chemin de fer, de zones aéroportuaires, des sites industriels, etc. Ces zones sont constituées d'une végétation composée d'une multitude d'espèces herbacées à dominante de graminées et autre végétaux de taille basse, résultant d'une pousse naturelle ou d'un ensemencement ou/et plantation. Les objectifs d'entretien de ces zones visent à réguler une végétation herbacée, semi-ligneuse et ligneuse à fort potentiel de développement, allergisante ou urticante, pouvant porter atteinte aux fonctionnalités recherchées (visibilité, sécurité, stabilité, incendie...) pour le maintien d'un bon usage des infrastructures. Les zones herbeuses n'incluent pas les usages « gazons de
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Usages des PPP en ZNA au sens des AMM
(non exhaustif)
Utilisations des PPP en ZNA
(non exhaustif)
graminées » qui constituent un compartiment fondamentalement différent en termes de fonctionnalité et d'objectif d'entretien
Usage « PJT42, cimetière, voies de communication »
Compartiments régulièrement entretenus, fréquentés par le public, souvent en partie plantés, entretenus pour des raisons esthétiques, sanitaires ou commoditaires43, avec des exigences de sélectivité des produits utilisés vis-à-vis des végétaux environnants. Utilisations en zones engazonnées, y compris en production de gazons de placage, dont l'importance à l'échelon national ne pouvait justifier l'attribution d'usages spécifiques. Tous les produits homologués pour ces usages peuvent ainsi être utilisés pour la protection des gazons de placage. La partie engazonnée des terrains de sport rentre dans cette catégorie.
Usages « gazons de graminées »
Tableau 4 : Exemples de correspondance entre les usages et les utilisations de produits phytopharmaceutiques dans les zones non agricoles (Source : DGAL44+ compléments par la mission).
3.3.2. La segmentation des utilisations
Les firmes détentrices des produits phytopharmaceutiques demandent des AMM pour des usages listés dans le catalogue national. Or, ces usages sont définis de façon très globale pour les ZNA, comme «usages non agricoles * désherbage * zones herbeuses». Il n'est pas possible de répondre aux questions posées par l'article 50.2 avec la nomenclature existante. En effet, les usages sont déterminés en zone agricole en fonction de l'efficacité et des impacts sur chaque culture, et les usages définis dans l'AMM recouvrent les utilisations. Il n'en est pas de même en ZNA où existent des utilisations par rapport à des objectifs propres aux industriels lesquels sont d'un autre ordre que la pratique agricole. Parce que l'article 50.2 est construit sur l'existence de méthode non chimique, son application nécessite de préciser les utilisations du glyphosate, suivant les critères introduits par cet article. Ce qui impose l'introduction d'une dimension supplémentaire, non liée au produit, ni à son impact, ni à son efficacité, par rapport au catalogue des usages. Cela conduira à raisonner sur une nouvelle segmentation plus détaillée dans un catalogue révisé. Cette segmentation doit permettre de répondre, pour chacune d'entre elles, de façon plus précise aux questions suivantes :
42 43
PJT : parcs, jardins, trottoirs. Nuisances sur mobilier urbain ou tout bien 44 Note de service DGAL/SDQPV/2015-253 du 10/03/2015.
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Existe-t-il des méthodes alternatives non chimiques ? Sont-elles d'un emploi courant ? Présentent-elles des inconvénients majeurs sur les plans économiques et pratiques ?
Les paragraphes suivants vont proposer une segmentation adaptée aux besoins induits par l'article 50.2. 3.3.2.1 Par activité économique ou par objet technique Se pose donc une première question sur la nature de la segmentation des utilisations à savoir : par activité économique générale (routière, ferroviaire, industrielles, etc.) ; par objet traité (rails et ballast, chaussée, ouvrage d'art, terrain support d'installation industrielle, clôture, pelouses de terrain de sport, etc.).
L'article 50.2 renvoie au 50.1 pour le détail de l'évaluation. Ce dernier article mentionne «que la substitution... ne présente pas d'inconvénient économique majeur», ce qui invite à un examen par activité économique générale. En revanche, l'examen de l'usage courant d'une utilisation et de la même manière de l'inconvénient pratique majeur - n'a de sens que pour chaque objet technique. Par exemple, les clôtures sont communes à toutes ces activités et elles sont très souvent en ZNA des obligations réglementaires. Dans ces conditions se pose la question de savoir comment et avec quoi réglementer «l'utilisation» en ZNA. De fait, l'ANSES avec la DGAL se propose d'ajouter cette dimension sous forme de mentions supplémentaires dans le catalogue des usages et/ou des mentions supplémentaires dans les AMM. Mais cet ajout d'un critère supplémentaire résultant de l'article 50.2 devra évidemment être documenté et traçable par l'ANSES. Il ne pourra en aucun cas être d'initiative du demandeur de l'autorisation, qui évidemment ne peut ni connaître ni se prononcer sur une appréciation au sens des critères de l'article 50.2. Cette considération suffit d'ailleurs à établir qu'il s'agit bien d'une dimension nouvelle par rapport à celle du catalogue des usages. En conséquence, ne laisser personne sans solution à court terme en ZNA conduira probablement à maintenir des AMM dont les usages/utilisations seront restreints aux seuls besoins de certains objets techniques. À titre d'exemple, la considération d'une dizaine d'activités économiques générales et d'une dizaine d'objets techniques conduirait à une centaine de mentions, dont la cohérence d'ensemble serait pour le moins peu perceptible. Ainsi, il ne manquera pas d'apparaître contradictoire, pour un même objet technique (par exemple, les ouvrages d'art ou les clôtures), d'autoriser l'usage du glyphosate dans un secteur économique (par exemple, le transport ferroviaire) au motif d'un «inconvénient économique majeur» et l'interdire dans un autre secteur (par exemple, les concessions autoroutières) au motif que l'inconvénient économique n'y serait pas majeur. Malgré tout, la mission ne peut éviter de prendre en considération en même temps une segmentation par activité économique et une segmentation par objet technique pour l'application de l'article 50.2.
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3.3.2.2 La diversité des objets techniques La seconde question est celle du détail de cette segmentation des utilisations, alors que les objets techniques sont les plus variés et que leur traitement est très spécialisé. L'analyse menée au titre du 50.2 doit ainsi porter de manière détaillée sur chacun de ces objets techniques. Le concept fondamental à considérer est celui d'une technique alternative (non chimique) dans le détail de chaque utilisation. L'usage courant doit aussi, s'apprécier dans le détail de chaque utilisation précisément identifiée. Par exemple, le fauchage est une technique très répandue. Pour autant, elle n'est pas une technique alternative dans le détail de chaque utilisation. Le glyphosate sur les routes est utilisé par exemple non pas "à la place du fauchage45", mais bien parce que pour certaines utilisations très précises, il constitue la seule méthode possible : au regard de la conception de l'infrastructure46 ; dans les conditions normales de son exploitation (service à l'usager, risque pour les travailleurs, etc.).
Cette conception tient évidemment compte de l'état de l'art dont fait partie emploi de PPP depuis les années 1920-1930 et un développement massif dans l'après-guerre. L'exemple des postes électriques est éclairant à cet égard : construire des postes électriques avec des terrains végétalisés suppose une autre conception et ils sont plus coûteux. L'exemple du bunker de golf est aussi éclairant. Faucher un bunker (qui est un objet technique particulier au sein d'un ensemble et d'une activité qui s'appelle un golf) n'est tout simplement pas possible. En effet, par exigence fonctionnelle de ce sport qu'est le golf, un bunker est un obstacle construit en sable aussi pur que possible et maintenu intact dans le temps pour que les joueurs soient confrontés exactement aux mêmes difficultés et que l'on puisse comparer leurs performances à des années d'intervalle. Il n'y a pas de méthode alternative aux PPP autre que le désherbage manuel (sauf peut-être le remplacement complet du sable des bunkers régulièrement). On peut aussi, citer les gazons de placage (proches de l'agriculture et à rapprocher de l'enherbement maîtrisé pratiqué en viticulture). Pour contenir ou supprimer les plantes vivaces, on pourrait considérer qu'il existe une alternative non chimique au glyphosate, à savoir le fauchage et le labourage profond. Or, au regard de l'état de l'art et des exigences sur le gazon de placage, ni le labourage profond ni le fauchage préalable aux semis ne sont en mesure de respecter les exigences du gazon de placage. Le fauchage et le labourage profond ne sont donc pas des alternatives non chimiques à considérer pour le gazon de placage. La diversité des objets techniques est ainsi extrême. Sauf à mener un travail de réingénierie gigantesque sans parler de savoir à l'initiative de qui ou qui pourrait en prendre la responsabilité d'en tirer des conséquences -, analyser dans le détail, pour chaque objet technique, si des méthodes alternatives pourraient être disponibles est impossible.
45
puisque les agents d'entretien des routes et autoroutes passent l'essentiel de leur temps à faire du fauchage avec des tracteurs équipés à des endroits conçus pour être enherbés, sur des bas-côtés, des talus, bandes d'urgence enherbées, etc. 46 tant dans sa conception d'ensemble (type de terre-plein centraux (TPC) par exemple) que dans sa conception détaillée (joints de chaussée ou d'assainissement par exemple et ouvrages d'art)
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Il convient donc de raisonner sur des objets appréhendés suivant leurs caractéristiques techniques (et non pas leur caractéristique d'usage), en considération de ce que cette fonction impose quant aux conditions d'entretien au regard de la végétation. À titre d'illustration, le cas d'un giratoire est éclairant. Un giratoire est un cas particulier d'une route, conçu pour organiser des croisements à niveau. Il y a une unicité de fonction, mais c'est un ensemble d'objets techniques extrêmement variés (de façon non exhaustive, des bords en béton, de la terre, de l'enrobé voire des ouvrages d'art, etc.). Suivant les cas, son centre peut ou non être entretenu sans glyphosate non seulement en fonction de ses caractéristiques générales, mais aussi de ses conditions d'exploitation. S'engager dans une voie où, de manière réglementaire, seraient définis et segmentés, au regard de l'autorisation ou de l'interdiction de l'usage du glyphosate, des ensembles d'objets techniques comme les giratoires, ne paraît pas pertinent. Une approche fonctionnelle - au sens donc de la technique et non pas de l'usage s'impose ; par exemple, le «rail et ballast» des voies ferrées, les «chaussées» des routes, les «dispositifs de séparation de trafic et de sécurité» des routes, les «systèmes d'assainissement» des terrains artificialisés, les «pistes» des aéroports, les «clôtures», les «ouvrages d'art» des infrastructures. Cette analyse préalable est nécessaire pour, dans la suite du rapport, structurer les informations quant à la mise en oeuvre des critères définis par l'article 50.2.
3.3.3. La notion d'usage courant
Cette notion «d'usage courant» n'est pas plus avant définie dans le règlement CE 1107/2009. Il convient donc d'examiner comment elle doit concrètement être analysée. 3.3.3.1 L'adaptation à l'objet technique Le mot important est ici le mot courant. Ainsi, il ne saurait être regardé comme un usage courant : La simple existence d'une utilisation particulière dans une situation technique singulière (cf. supra) ou au sein d'une activité économique générale ; La possibilité, à un terme quel qu'il soit, de recourir à une alternative nouvelle résultant par exemple, de la recherche et du développement public ou privé, ne saurait être regardée comme un usage courant.
L'usage courant suppose : L'existence de l'outil au stade opérationnel ; Une technique disponible sur le marché ; Que son fabricant peut mettre sur le marché à hauteur de la demande ; Que cet outil soit adapté à chaque objet technique considéré ; Un caractère habituel, ordinaire au moment présent.
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3.3.3.2 L'effet économique des meilleures techniques disponibles On doit observer que, au regard des objets techniques, il n'y a pas d'usage courant d'une alternative à la technique dominante par simple effet économique. En effet, et sauf cas exceptionnel (micromarché, transition avérée avec des techniques émergentes sur un marché...), tout le monde se range à la meilleure technique disponible47, adaptée à chaque objet technique, ce qu'est le glyphosate en l'état actuel des choses s'agissant de l'élimination des végétaux, cette élimination étant nécessaire au regard des exigences auxquelles doivent répondre ces objets. L'histoire en témoigne, puisque depuis les années 1920-1930, le traitement chimique des voies ferrées s'est imposé, se substituant à la main d'oeuvre des compagnies ferroviaires constituée pour cette activité de détenus soumis ou non au régime des travaux forcés. De ce point de vue, le fait que le glyphosate soit le dernier de ces PPP désherbant total, et hégémonique, démontre que sa molécule est la plus efficace parmi celles de ces PPP Cette situation résulte d'une période suffisamment longue depuis l'après-guerre, pour que se structure progressivement une adaptation des objets techniques aux PPP en général et à la toute dernière remarquable efficacité du glyphosate en particulier. Ainsi les objets techniques se sont adaptés de manière de plus en plus fine à cette efficacité, mais cette efficacité a nourri en retour des performances attendues supérieures pour ces objets techniques. Par exemple, certains des systèmes de sécurité des trains utilisent maintenant comme support les rails des chemins de fer, parce que le glyphosate garantit qu'ils ne seront pas perturbés par la végétation. 3.3.3.3 Les micromarchés La considération de l'existence de micromarchés pourrait faire accroire qu'une technique distincte des techniques usuelles et utilisée dans le cadre de ces micromarchés serait de ce fait même une technique alternative d'usage courant. Ces micromarchés constituent des activités économiques distinctes, car les modèles économiques sont différents. Ces micromarchés sont le résultat d'une recherche de différenciation avec les marchés prédominants différenciation qui peut même justement passer par l'affichage d'une technique différente - qui permet des prix plus élevés au nom de cette différenciation. Pour illustrer le propos, les techniques employées par le «luxe» ne sont donc pas opposables ici d'un usage courant aux techniques employées par le «low cost», même dans un secteur d'activité de même nature, sauf à remettre en question le modèle économique de ce «low cost». Ainsi une clientèle particulière peut-elle accepter de payer cher une «technique» singulière. Mais la particularité de cette clientèle montre que ce n'est pas le même modèle économique. En conséquence, le constat de l'existence d'un micromarché qui ferait 10 % du marché total avec une technique «chère», ne peut permettre d'alléguer que cette technique est d'un usage courant si 90 % du marché fonctionne avec un autre modèle économique, c'est-à-dire une autre clientèle et une technique moins chère. C'est une distinction que l'on peut observer notamment dans le sport, les monuments historiques et même les communes. Pour cette raison, une pratique alternative non chimique que l'on constaterait dans le sport professionnel, le patrimoine historique et même les communes ne signifierait pas que cette même méthode alternative pourrait devenir d'usage courant.
47
Cette meilleure technique disponible ne renvoie pas à la seule efficacité technique, mais également à la réalité de sa diffusion à grande échelle et donc corrélativement à sa performance économique.
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Une approche, qui ne prendrait en considération que l'objet technique lui-même, ne respecterait donc pas l'approche double déterminée précédemment qui impose de prendre en compte la réalité économique de marchés distincts. 3.3.3.4 Le point de départ de l'appréciation de l'usage courant L'intervention en France de la loi n° 2017-110 du 6 février 2014 modifiée dite «loi Labbé» a modifié récemment les obligations relatives aux collectivités et aux particuliers quant à l'utilisation des PPP. Ainsi se pose la question de savoir si l'usage courant, est celui antérieur à la loi ou postérieur à celleci. Par exemple, s'agissant des grandes voiries, hors trottoirs, le fauchage régulier de leurs dépendances par les agents d'entretien et d'exploitation et le matériel déployé témoignent d'un emploi déjà limité des PPP en général et du glyphosate en particulier. La considération de ce que la loi Labbé prévoit des exceptions au motif de la sécurité et de l'exploitation routière confirme que de fait il n'y a pas eu de changement de référentiel (cf. infra). La mission constate que le volontarisme de certains maîtres d'ouvrages affiché depuis l'émergence du débat sur les PPP apparaît comme un phénomène analogue à celui des micromarchés. Ainsi des différenciations politiques sont affirmées, mais sans que les moyens soient toujours ajustés au regard des conséquences à long terme. Cette situation se traduit concrètement par une dégradation progressive de l'entretien de ces infrastructures rapportée par les gestionnaires routiers notamment, sans forcément de vision sur la pérennité des structures. Ces éléments d'analyse permettront d'éclairer l'appréciation d'un usage courant ou non pour les utilisations en ZNA qui seront détaillées plus loin.
3.3.4. La notion d'usage sensible
Les usages sensibles que la lettre de mission invite à examiner sont, à notre sens, à rapprocher des enjeux fonctionnels. En effet, les installations ou infrastructures ont été conçues pour répondre à des enjeux fonctionnels bien précis ; il en va de même avec les objets techniques qui les constituent. Les usages sensibles sont donc à rapprocher des référentiels auxquels elles sont soumises. Elles sont construites et exploitées en fonction des réglementations, normes, bonnes pratiques, etc. qui s'appliquent à elles pour des motifs généraux de protection des personnes et des biens. Et par définition, une réglementation en son sens premier existe pour encadrer un usage dans un souci de protection. Elle tient compte d'un grand nombre de facteurs et au premier chef de la sécurité des personnels qui les exploitent, des usagers dans le cas des infrastructures et des riverains. C'est donc aussi, au regard de ce même sens d'enjeux fonctionnels/usages sensibles/référentiels que peuvent notamment s'apprécier les inconvénients pratiques majeurs mentionnés à l'article 50.1. Mais ils doivent être étendus aux autres référentiels commerciaux ou culturels. Le cas de la voirie et des cimetières est éclairant à cet égard avec le débat qu'a provoqué la proposition de loi Labbé. Cette proposition prévoyait notamment en son article 1 « A compter du 1er janvier 2018, il est interdit aux personnes publiques [...] d'utiliser des produits phytopharmaceutiques [...] à l'exception des préparations naturelles peu préoccupantes [...] pour l'entretien des espaces verts, de forêts et de promenades relevant de leur domaine public ou privé ».
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Après avoir été une première fois complétée à l'occasion du vote de la loi, cette formulation a fait l'objet d'un nouveau complément notable avec la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte et son article 68 en ajoutant explicitement la voirie. Mais ce faisant, elle a en même temps prévu l'exemption de l'interdiction de l'usage de PPP au motif de la sécurité des personnels et des usagers de la route lorsque celle-ci était en jeu. Ainsi la loi dite Labbé modifiée, en définissant et organisant des exceptions a déjà confirmé, par là même, que la seule solution existante pour l'entretien d'un certain nombre des objets techniques qui constituent des routes, sont, dans des conditions bien définies, les PPP dont le glyphosate. C'est un exemple d'usage sensible pour lequel il n'existe donc pas de solution non chimique alternative aux PPP d'un usage courant qui aurait pu être raisonnablement imposée. S'agissant des cimetières, la mission fait le constat qu'ils ne sont pas mentionnés dans la loi Labbé. Mais il est admis ce qu'ont révélé les entretiens avec tous les acteurs qu'ils peuvent être traités avec des PPP. Même non explicitement prévue par la loi, cette possibilité laissée ouverte qui concerne les cimetières qui ne peuvent être assimilés à des promenades (et qui ne sont donc d'ores et déjà pas considérés comme des « espaces verts ») confirme en elle-même que des référentiels culturels sont d'ores et déjà également pris en compte par la loi.
Les usages peuvent être considérés comme sensibles lorsqu'ils renvoient à des référentiels motivés par des enjeux de sécurité ou des référentiels culturels y compris dans des aspects commerciaux.
3.3.5. La notion d'utilisation mineure
Trois notions proches sont rencontrées dans les textes réglementaires et infra-réglementaires : utilisation mineure, culture mineure et usage mineur. L'article 50.1 du règlement 1107/2009 précise que lors de l'évaluation comparative mettant en balance les risques et les bénéfices de la substitution, « les conséquences sur les autorisations pour des utilisations mineures sont prises en compte ». L'article 3 apporte la définition suivante : « Utilisation mineure ; l'utilisation d'un produit phytopharmaceutique, dans un État membre particulier, sur les végétaux ou produits végétaux qui : a) ne sont pas largement cultivés dans cet État membre ; ou b) sont largement cultivés, pour répondre à un besoin exceptionnel en matière de protection des végétaux. » Dans le cadre de la fixation des limites maximales de résidus, la Commission européenne a précisé dans un document guide48 les critères définissant une « culture majeure ». Il s'agit de valeurs de consommation, de surfaces cultivées et de quantités produites. Ce texte présente également la liste de toutes les cultures majeures au sens communautaire. Il est précisé que les cultures qui ne sont pas citées sont des « cultures mineures. »
48
Guidance document. Guidelines on comparability, extrapolation, group tolerances and data requirements for setting MRLs.SANCO 7525/VI/95 Rev. 10.3. 13 June 2017.
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Enfin, dans le catalogue national des usages phytopharmaceutiques, il est indiqué : « On entend par usage mineur sur une culture majeure un usage de faible importance, de surface limitée par rapport à la couverture de la culture, ayant un caractère aléatoire (fréquence d'apparition et importance). Tous les usages sont considérés comme mineurs pour les cultures mineures. »
Le point essentiel à retenir de cette analyse est que, dans le catalogue, tous les usages dont le libellé commence par « Usages non agricoles » sont classés comme des usages mineurs. Par comparaison, dans la viticulture, les grandes cultures et l'arboriculture, le plus grand nombre des usages sont classés comme majeurs. À l'inverse les usages en cultures maraichères, ornementales et aromatiques sont le plus souvent classés en usages mineurs.
3.4. Le référentiel
Un usage courant n'est pas le fruit du hasard et il n'est en fait que le résultat de différentes contraintes qui s'appliquent au maître d'ouvrage. Figurent parmi ces contraintes, des considérations techniques d'ordre réglementaire de degré divers, mais aussi, des considérations commerciales, voire des considérations culturelles. Ces contraintes extérieures peuvent être regroupées sous le terme de référentiel. De fait, la notion d'usage courant renvoie à une utilisation qui permet de respecter le référentiel qui s'applique à l'objet technique considéré. Cela confirme que l'analyse de l'usage courant doit se faire par rapport à chaque objet technique, renforcé de son référentiel. Et à titre d'exemple, la piste d'un aéroport n'est pas le même objet technique que la chaussée d'une autoroute. Ipso facto, l'appréciation de l'usage courant au sens de l'article 50.2 doit se faire à isoréférentiel quant à l'objectif d'élimination de la végétation à atteindre. Si une interdiction du glyphosate venait à être décidée, les maîtres d'ouvrages pourraient bien sûr envisager ultérieurement une évolution de leur référentiel, voire une reconception de leurs objets techniques en fonction au premier chef de considérations économiques. Les référentiels sont notamment illustrés : pour ceux techniques d'ordre réglementaire : par les objets techniques des voies ferrées, ceux des routes, ceux des postes électriques ou ceux des industries classées comme installations classées pour la protection de l'environnement ; pour les référentiels d'ordre commerciaux : par les exigences des activités sportives, tout spécialement celles de haut niveau ou les golfs, et celles des gazons de placage ; pour les référentiels culturels : comme le cas des cimetières49, y compris avec des considérations relatives à la praticabilité et à l'accessibilité, par exemple, en temps de pluie, ou des considérations esthétiques.
Ces derniers référentiels sont évidemment les plus flous, même s'ils n'en sont pas moins les plus porteurs d'enjeux pour les individus50, et c'est donc bien à leur endroit que s'exprime la question d'un changement de référentiel sous la formule d'une invitation à changer de regard sur leur
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Pour lesquels il ne faudra pas oublier de prendre en compte les cimetières de combattants étrangers morts au combat en France. Ce dont témoigne la loi n° 2014-110 du 6 février 2014 modifiée dite « loi Labbé » et ses débats parlementaires.
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apparence. Formellement plus souples, on observe concrètement aujourd'hui pour ces derniers référentiels une volatilité nouvelle qui résulte de choix très locaux des collectivités, eux-mêmes dépendants de l'expression ressentie de leurs habitants. De ce point de vue, un phénomène analogue à celui des micros-marchés est observable dans les communes, confirmé par les entretiens de la mission, à savoir des différenciations politiques affirmées à travers le choix des techniques, avec à la clef, soit des conséquences assumées en termes de coûts induits, soit des conséquences assumées en termes d'apparence de l'espace public. La mission constate à travers ses entretiens que depuis la loi Labbé un changement de référentiel tacite et non affiché, qui se traduit concrètement sous la forme d'un abandon par délaissement de l`entretien d'un certain nombre d'espaces publics. Dans le meilleur des cas, la sortie de cette situation nécessiterait une reconception, mais celle-ci est coûteuse et nécessitera un choix difficile entre minéralisation et végétalisation maîtrisée sans que la tenue dans le temps soit en rapport avec la durée de vie attendue des objets techniques.
3.5. Les conditions économiques
3.5.1. Les cadres économiques variés des activités en ZNA
L'analyse des conditions économiques n'intervient au titre de l'article 50.2 qu'après l'examen de l'usage courant de techniques alternatives non chimiques. Or, en l'absence d'interdiction des herbicides par la réglementation ou la pression sociale, la logique économique elle-même conduit à l'absence de telles alternatives au glyphosate parce que cette technique est à la fois la plus efficace et la moins coûteuse des méthodes d'élimination de la végétation. De plus, les activités économiques dont ressortent les ZNA sont extrêmement diverses. Elles sont parfois monopolistiques comme les voies ferrées et les postes électriques, mais parfois avec des donneurs d'ordre extrêmement dispersés comme pour les voiries. Elles relèvent de la sphère publique ou de la sphère privée avec au milieu le régime des concessions. Chaque concession est un cas particulier gouverné par son contrat propre, donc avec des conséquences variables, à la suite de toute modification du paysage autour du contrat, sur le concédant ou le concessionnaire. Leurs dispositifs de régulation sont aussi, très divers : ils peuvent être des autorités indépendantes51 dont le rôle n'est jamais exactement le même suivant l'activité considérée, chaque contrat de concession, ou directement la concurrence. La logique économique de chaque secteur est aussi, extrêmement variable entre le monopolistique régulé, le concessif, le public et sa logique budgétaire, enfin le privé pur. Enfin, la situation économique des acteurs peut-elle être très variable, y compris au sein d'une même activité, et elle n'est pas réellement connue, au premier rang celle des communes. Il n'est donc pas possible de fournir des éléments statistiques sur les conséquences financières d'un secteur d'activité autre que les secteurs monopolistiques.
51
Comme l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (ARAFER) ou la Commission de régulation de l'énergie (CRE).
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Par ailleurs, si l'article 50.1 mentionne des inconvénients économiques, il semble qu'il faille plutôt l'apprécier comme une conséquence financière majeure sur les entreprises concernées. En effet, l'appréciation de l'inconvénient économique majeur n'aurait de sens économique (ce qui est différent stricto sensu du sens financier) que si une comparaison très globale était réalisable. Il faudrait comparer : l'augmentation des coûts liés à l'interdiction du glyphosate ; le chiffre d'affaires ; les conditions de sa couverture par des recettes nouvelles ; le gain économique global y compris toutes les externalités de cette interdiction comme les bénéfices pour l'environnement et la santé publique.
Ce calcul n'est pas atteignable. En effet, une AMM est délivrée seulement si les évaluations52 concluent que : il n'y a pas d'effet nocif immédiat ou différé sur la santé humaine ou sur la santé animale, soit directement ou par l'intermédiaire de l'eau potable, des denrées alimentaires, des aliments pour animaux, de l'air, des effets sur le lieu de travail... il n'y a pas d'effet inacceptable sur les végétaux ou produits végétaux ; il ne provoque pas de douleurs ou de souffrances chez les animaux vertébrés à combattre ; il n'y a pas d'effet inacceptable sur l'environnement.
La logique de délivrance des AMM ne permet donc pas de faire ce type de calcul. Par ailleurs, il ne semble pas exister d'évaluation des coûts que génère l'emploi du glyphosate pour la société à travers ses impacts pour la santé et l'environnement. Dans ces conditions, il n'apparaît pas possible pour la mission de qualifier ce que serait un impact économique majeur, apprécié d'un point de vue économique stricto sensu ou d'un point de vue financier pour les entreprises. La mission s'efforcera néanmoins de donner quelques éléments significatifs, parfois illustrés de chiffres et qui seront relatifs à des considérations financières.
3.5.2. Les différentes logiques
3.5.2.1 Les secteurs monopolistiques régulés Justement parce qu'ils sont monopolistiques et qu'à ce titre, les tarifs sont potentiellement sans limites fixées par la concurrence, ces secteurs sont régulés, le meilleur exemple étant SNCF Réseau. Toute charge d'exploitation supplémentaire sera donc répercutée sur le tarif sous le contrôle de l'autorité de régulation. Mais pour les activités déjà subventionnées, la puissance publique devra financer cette charge.
52
Règlement (CE) n°1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques.
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3.5.2.2 Les concessions L'éventail des logiques économiques des concessions et conséquemment du partage du risque entre concédant et concessionnaire est totalement ouvert entre des concessions «aux risques et périls» pour lesquelles le concessionnaire fixe librement le tarif, et des concessions totalement encadrées qui s'apparentent de fait à une gestion directe par le concédant, même si le financement reste externe et s'il y a paiement d'un tarif. Une des caractéristiques majeures des concessions est de faire appel à des capitaux et des emprunts extérieurs sur un terme long, à la mesure de la durée de vie des infrastructures. Ils doivent être raisonnablement rémunérés. À l'exception rare du véritable «risques et périls», la logique des concessions est ainsi de convenir au départ de ces rémunérations. Le contrat comporte corolairement des clauses de toutes sortes destinées à les garantir, dans le temps limité de la concession, notamment par rapport aux éventuelles modifications unilatérales du contrat par le concédant. De plus, le même mot de «concession» recouvre de fait deux réalités économiques et financières radicalement différentes. Dans un cas, la concession est extrêmement rentable si le trafic est important, car assise sur un monopole de fait. L'enjeu est alors de contrôler la hausse des tarifs du concessionnaire. C'est le cas, par exemple, des sociétés d'autoroutes et d'Aéroports de Paris même s'il ne s'agit pas pour ce dernier d'une concession stricto sensu. Dans l'autre cas, la concession est naturellement déficitaire compte tenu d'une relative faiblesse des recettes commerciales liée à un trafic limité ou à un tarif acceptable trop bas. Elle nécessite alors un apport parfois seulement en subvention d'investissement, mais le plus souvent sous la forme d'une subvention annuelle d'exploitation de l'autorité concédante. C'est, par exemple, le cas pour les concessions des collectivités locales, par exemple de leurs aéroports.
Si chaque concession est un cas particulier gouverné par son contrat propre, et si la solution ultime à tout conflit se trouve chez le juge administratif assez peu prévisible à ce stade, la jurisprudence est clairement celle d'une prise en charge par l'autorité concédante. Cela se traduit naturellement le plus souvent par une augmentation des tarifs dans le premier cas et par une inévitable augmentation de la subvention dans le second. 3.5.2.3 Le secteur public La logique budgétaire gouverne le secteur public. Comme les charges d'exploitation liées à une interdiction éventuelle du glyphosate sont récurrentes, les recettes d'exploitation doivent les financer, dans un cadre doublement contraint, celui de la baisse des dotations de l'État et celui de la diminution des assiettes de leur fiscalité propre. Par ailleurs, la variété des situations financières des collectivités est extrême, sans même pouvoir les corréler à leur taille, ou à leur potentiel fiscal53.
53
Le potentiel fiscal est un indicateur qui peut permettre de comparer la richesse fiscale potentielle des collectivités les unes par rapport aux autres. Un produit fiscal théorique est ainsi calculé, correspondant au montant d'impôts qu'encaisserait chaque collectivité si elle appliquait à ses bases nettes d'imposition les taux ou tarifs moyens. Ce potentiel fiscal est rapporté au nombre d'habitants afin de permettre des analyses et des comparaisons que les montants bruts ne peuvent autoriser à eux seuls.
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Cette variété des situations confirme ce qui a été confié à la mission par des acteurs, à savoir que le coût d'opportunité de l'emploi ou non de PPP dans une collectivité par rapport à une autre dépense n'est de fait que le résultat de considérations politiques quant aux attentes et aux réactions de ses habitants relatives à ces dépenses. 3.5.2.4 Le secteur privé L'appréciation du caractère majeur ou non des inconvénients économiques des alternatives, revient à se poser la question de leur incidence financière pour les entreprises considérées. Or dans une entreprise bien gérée, le chiffre d'affaires et les prix qui le sous-tendent sont par nature au plus haut niveau de ce qu'ils peuvent être. C'est encore plus vrai dans un monde de concurrence libre et ouverte en Europe pour des produits dont le marché dépasse les frontières françaises. Considérer a priori que les prix et le chiffre d'affaires pourront s'ajuster n'est pas possible. Ces indicateurs ne sont d'ailleurs pas les indicateurs de la santé financière d'une entreprise ou d'un secteur d'activité. La variété de la structuration des entreprises, plus ou moins intégrées avec notamment l'existence de filiales de différents périmètres sociaux, conduit à des incidences très différentes d'une augmentation d'une charge d'exploitation, comme celle liée à l'abandon du glyphosate, sur les indicateurs financiers de chaque société. Pour éviter un biais dans l'évaluation de cette incidence, celle-ci doit être prise en compte à la fois tout en amont au plus près de l'utilisation d'herbicide pour la fonction considérée d'élimination de la végétation, et à la fois tout en aval au niveau du résultat économique global de la société. La prédominance de l'impact sur l'amont ou sur l'aval dépend de la structure de l'entreprise et de la part qu'y prend l'utilisation du glyphosate. Aussi, la mission suggère de retenir deux critères : l'augmentation du coût complet de l'utilisation de la méthode alternative non chimique pour la fonction d'élimination de la végétation ; la diminution du résultat d'exploitation ou marge opérationnelle voire de l'excédent brut d'exploitation.
Le dépassement du seuil de tolérance d'un seul d'entre eux établit le caractère majeur de l'incidence économique. À noter que dans les activités de luxe (golf, sport de haut niveau, etc.) l'impact est moindre compte tenu d'un résultat d'exploitation généralement beaucoup plus élevé et une élasticité plus importante des prix, ce qui est aussi, le propre de ces micros-marchés. Mais aucune activité ne se concentre sur le seul luxe. Ainsi toute diminution du résultat d'exploitation liée à cette modification ne sera pas rattrapable au regard de la concurrence pour les secteurs qui y sont soumis. Le résultat sera l'arrêt ou le déplacement de l'activité.
3.5.3. Des alternatives estimées 5 à 10 fois plus chères par les utilisateurs
L'estimation des coûts de techniques alternatives, qu'elles soient chimiques ou non chimiques, est extrêmement difficile, en l'absence justement d'usage à une échelle significative pour les différentes utilisations, sans même considérer qu'il est ou non courant, de ces techniques alternatives. Ce point confirme l'effet économique sur le long terme des meilleures techniques disponibles examiné précédemment.
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En effet, les acteurs rencontrés expriment l'extrême imprécision de toute évaluation, voire leur impossibilité faute d'expérience aujourd'hui, et même leur irréalité matérielle. C'est notamment le cas des techniques mixtes mécaniques et manuelles54 pour lesquels les entreprises spécialisées expriment déjà leur difficulté à trouver de la main d'oeuvre pour ces travaux ingrats, et sûrement leur incapacité à faire face à une demande qui exploserait. D'ores et déjà, elles ont recours à une main d'oeuvre constituée pour l'essentiel de personnel détaché au sens communautaire. Hors le cas de la SNCF dont les surcoûts sont proportionnellement encore plus élevés, compte tenu des enjeux de vitesse pour le désherbage des voies et pistes qui implique de consommer le moins possible de capacité de la voie (sillons) et des enjeux de sécurité au travail sous circulation, l'expression des différents maîtres d'ouvrage et entreprises interrogées par la mission est convergente, même dans l'incertitude. Par rapport à l'emploi de glyphosate, le coût d'une alternative non chimique est estimé en moyenne à 10 fois, voire 20 fois plus cher, et le coût d'une alternative chimique est estimé en moyenne à 5 fois plus cher. La variation autour de la moyenne est estimée de 1 à 2, ce qui montre la grande dispersion des estimations. Certaines méthodes, thermiques notamment, ne sont pas évoquées dans ce paragraphe, car elles sont d'une utilisation trop marginale et le cas échéant seulement complémentaire des techniques précédentes. En tout état de cause, elles resteraient dans une fourchette de coût de 5 à 10 fois plus cher. Ces écarts considérables s'expliquent à travers plusieurs observations. Le glyphosate est systémique, en ce sens que, détruisant les racines, les plantes ne repoussent pas. En conséquence, le nombre de passages annuel est limité, le plus souvent à un seul. Ce n'est pas le cas des autres PPP ni des moyens mécaniques motorisés qui nécessitent 4, voire plus, passages par an. Seul l'arrachage des racines avec des outils manuels présente les mêmes caractéristiques, mais seulement pour des végétaux au système racinaire non traçant. Le glyphosate permet une grande vitesse de mise en oeuvre (typiquement 10 km/h hors cas particulier du ferroviaire), au contraire des méthodes mécaniques, très coûteuses en temps (typiquement le pas de l'homme), et manuelles, considérablement coûteuses en temps (arrachage des racines une à une). Le glyphosate est significativement moins onéreux à l'hectare que les autres PPP disponibles sur le marché qui de plus n'en présentent pas l'efficacité. Contrairement aux méthodes mécaniques, le glyphosate ne nécessite pas d'investissement supplémentaire en matériel souvent très onéreux.
Le cumul de ces considérations, et notamment les deux premières en raison du coût de la main d'oeuvre explique cet écart d'un facteur 10 voire 20, à 5 suivant la méthode alternative envisagée55. La baisse des coûts correspondants est peu probable. D'une part, parce que travail est réalisé manuellement par des salariés. D'autre part, car aujourd'hui, pour le marché des jardins et espaces végétalisés, la mécanisation reste limitée : de nombreux outils manuels sont encore indispensables. En revanche, la probabilité que les coûts augmentent est forte. En effet, aujourd'hui les prix calculés apparaissent exorbitants tant aux yeux des maîtres d'ouvrage qu'à celui des prestataires de service.
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Ces techniques correspondent à des moyens mécaniques motorisés mais limités, portés le plus souvent, et conduits « à la main », comme les débroussailleuses, rotofils, tondeuses etc. et le plus souvent accompagnés, compte tenu de leur efficacité limitée en ce qu'ils n'atteignent pas les racines des végétaux, d'outils manuels comme les couteaux, binettes, houes, sarcloirs etc. 55 Source UNEP. Fiche d'entretien Désherbage mécanique et manuel
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En conséquence, les clients hésitent à passer commande et ces prestataires peuvent être tentés de commencer à travailler à perte au moins dans un premier temps pour ne pas perdre leurs marchés. Un tel écart de coûts d'un facteur 10 confirme l'absence de toute possibilité économique qu'une méthode alternative non chimique existe face à un usage répandu du glyphosate et soit d'un usage courant, sauf dans le cas exceptionnel de micromarchés où, à l'image de l'agriculture biologique, pourrait exister une frange de consommateurs prêts à payer le surcoût correspondant. Or la mission n'a pas rencontré d'interlocuteurs identifiant de tels micromarchés pour les activités classées en ZNA, sauf d'une certaine manière pour le sport et certaines collectivités. Enfin, un tel écart de coûts d'un facteur 10 traduit également, et même quantifie l'ampleur des inconvénients pratiques liés à la mise en oeuvre d'une méthode alternative non chimique. Cet écart de coût résulte pour l'essentiel d'une augmentation du temps passé, ce qui représente donc une multiplication au moins équivalente de la main d'oeuvre correspondante. À une telle échelle surgit la question de la disponibilité d'une telle main d'oeuvre, de surcroît en un laps de temps aussi court que 18 mois au regard du besoin au printemps 2021. Lors des entretiens menés par la mission, tous les acteurs lui ont fait part de leur inquiétude sur une indisponibilité certaine de cette main d'oeuvre, déjà difficile à recruter, notamment compte tenu de la pénibilité du travail manuel très physique correspondant. En particulier, les représentants des entreprises d'entretien des espaces, contrairement à ce qui est habituellement observé lorsqu'une augmentation du chiffre d'affaires est attendue, s'inquiètent de la perspective de l'abandon du glyphosate, tant au regard de cette question de la main d'oeuvre qu'au regard de perspectives d'une activité en baisse. L'explosion certaine des coûts conduira à un renoncement des maîtres d'ouvrage, renoncement déjà observé par certains interlocuteurs de la mission, clients et fournisseurs.
3.5.4. Quelques écueils en conclusion
Au contraire de l'agriculture avec son modèle économique bien connu par l'administration en fonction de chaque type d'exploitation, ne serait-ce que pour justifier des aides économiques, pour les ZNA, à l'exception des monopoles régulés par l'État comme SNCF Réseau, les sociétés d'autoroutes ou d'ouvrages concédés56 ou RTE, une vision synthétique et quantifiée des conséquences financières d'une interdiction du glyphosate pour le secteur privé n'est pas atteignable sans des analyses détaillées qui sortent du cadre de la présente mission. Mais même si ces éléments étaient accessibles, deux écueils supplémentaires apparaissent. Pour une même utilisation, maintenir ou non l'autorisation des produits contenant du glyphosate, pour des maîtres d'ouvrage variés, sur la base d'un impact financier réparti de façon continue, ce qui est le cas des secteurs considérés, semble impossible au titre du 50.2. Cette continuité peut s'illustrer, par exemple, à travers la diversité des situations des collectivités et des concessions, ou à travers le cas de l'industrie, notamment celle relevant de la réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement. Maintenir ou non l'autorisation, au sein d'une activité, suivant que sur un segment elle relèverait du luxe avec des marges élevées et une faible élasticité au prix (ex. : golf de haut niveau) et que sur un autre s'exercerait une concurrence certaine sur les prix avec des marges faibles et une élasticité importante (ex. : les autres golfs) semble également impossible à justifier.
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Des ouvrages sont aussi concédés par des collectivités locales qui sont alors leurs régulateurs.
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4. LES METHODES ALTERNATIVES EN ZNA
Pour mettre en oeuvre l'article 50.2 du Règlement 1107/2009, il est indispensable de disposer de méthodes non chimiques. Les principales méthodes -curatives et préventives- de désherbage et de maîtrise de la végétation utilisées par les professionnels de l'entretien sont traitées dans ce chapitre. Il ne traite pas de l'usage courant ou non de la méthode selon le secteur économique considéré, décrit dans le chapitre suivant. Toutefois, cette voie réglementaire n'étant pas la seule piste pour réduire l'usage du glyphosate, une troisième partie traite des alternatives chimiques.
4.1. Les méthodes non chimiques curatives
De nombreuses techniques non chimiques existent. Comme toutes méthodes, elles présentent des avantages et des inconvénients ; leur emploi doit être raisonné en fonction d'objectif à atteindre, de la configuration des lieux et du budget disponible. Elles peuvent se combiner entre elles. D'autres méthodes non encore développées sont de l'ordre de méthodes de rupture. Le désherbage électrique usité au Brésil et en cours de développement en Europe sera présenté en chapitre 6.
4.1.1. Traitement manuel et mécanique
Le traitement manuel consiste à éliminer les adventices par arrachage à la main ou à l'aide d'un outil (binette ou matériel porté). C'est un travail pénible et laborieux peu adapté aux grandes surfaces. Le recours à un traitement mécanique par des engins tractés offre des possibilités d'intervention plus importantes si les lieux sont accessibles. Mais ce traitement reste superficiel. Hors arrachage, voire un binage si la configuration de l'objet technique s'y prête, aucun de ces traitements n'éradique le système racinaire qui produit rapidement de nouvelles parties aériennes. Il nécessite donc un nombre de passes supérieur d'un facteur 4 à 5 par rapport à l'emploi de glyphosate. Le traitement mécanique n'est donc pas adapté à l'élimination des végétaux dans les objets techniques non spécialement conçus pour cela. Il est en revanche adapté pour les lieux déjà volontairement végétalisés.
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Tableau 5: solutions manuelles et mécaniques (source UNEP)
Le tableau ci-dessus communiqué par l'Union Nationale des Entreprises du Paysage (UNEP) précise le détail des méthodes manuelles et mécaniques déployées sur les pelouses, le sol nu avant plantation, la voirie et les allées gravillonnées. Leurs avantages sont décrits, mais aussi leurs inconvénients, ce qui permet de mesurer les limites des méthodes alternatives. En revanche, la mission ne peut pas entériner dans ce tableau l'emploi du binage dans le cas des voiries, dans la mesure où il s'agit sauf exception de surfaces dures. En effet, le binage est défini selon la mission par l'ouverture de la surface du sol pour en extirper les mauvaises herbes. La pratique est plutôt d'araser le sol pour trancher au ras les végétaux. L'outil ne pénètre pas le matériau ou juste sa surface pour ne pas le détériorer (enrobés) ou le déstabiliser (compaction des graves). Il convient d'ajouter à ce tableau un inconvénient cité par les interlocuteurs de la mission, à savoir la fréquence de passage plus élevée du désherbage mécanique, car c'est le propre des façons 57 superficielles. L'Annexe 6 présentant des données complémentaires sur les méthodes alternatives non chimiques montre des appréciations sur ces fréquences d'intervention.
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Opération qui a pour but le travail de la terre
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Pour les routes, le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement58 (CEREMA), propose un classement un peu différent avec du nettoyage-balayage et du fauchage, technique la plus utilisée, en particulier parce que les abords des routes sont largement végétalisés et donc alors traités par fauchage59.
Tableau 6 : domaine d'application des différentes méthodes alternatives à l'utilisation des PPP sur les dépendances routières. CEREMA
La loi Labbé a démultiplié les interventions manuelles et secondairement mécaniques. Le personnel est exposé à des risques quantitativement plus importants. Risque de troubles musculosquelettiques (TMS) : ces techniques sont physiquement plus éprouvantes que le passage avec un produit phytopharmaceutique, avec l'arrachage manuel, la manipulation de machines à brosse de 70 kg, l'exposition aux vibrations de l'appareil, posture pour guider la machine ; Risques psychosociaux : manque de considération et incivilité des citoyens lors du travail à pied dans les villes ; Risques de sécurité : accidents liés au temps de travail, nouveau ou augmenté, sur la chaussée ; nouveaux risques de contamination (déjections, huile de vidange...) à prendre en compte.
58 59
Établissement public rattaché aux ministères chargés de l'écologie et de la cohésion des territoires Techniques alternatives à l'usage des produits phytosanitaires. Synthèse des types de gestions alternatives appliquées aux infrastructures du réseau routier national Juin 2016.
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Les entreprises du paysage éprouvent d'importantes difficultés à recruter. SNCF et Réseau de transport d'électricité (RTE) relatent également la difficulté à conclure des marchés, traditionnellement à obligation de résultat, les entreprises ne sachant pas estimer les facteurs de coûts de ces nouvelles prestations. Pour un même résultat (isoréférentiel) qu'avec le glyphosate, ces techniques manuelles sont jusqu'à 20 fois plus onéreuses et les techniques mécaniques le sont de 5 à 10 fois. Le nombre de passages requis est multiplié par 4 à 8 60 avec des durées multipliées pour chaque passage : par 5 en manuel et par 2 à 5 par voie mécanique. Lorsque les moyens internes (nombre et compétence de la main d'oeuvre) ne sont plus disponibles au regard du changement de l'ordre de grandeur des heures de travail requises, une externalisation nécessite d'augmenter les budgets d'entretien. Ces derniers sont souvent insuffisants comme cela a été établi sur les routes nationales. Pour l'entretien du réseau national routier, le CEREMA a chiffré quelques méthodes, mais sans procéder à la comparaison entre la méthode chimique et non chimique.
4.1.2. Traitement thermique
Les végétaux sont éliminés en provoquant un choc thermique de leurs parties aériennes ; les cellules végétales éclatent, mais les racines restent intactes contrairement au glyphosate. Le choc thermique entraîne aussi, une levée de la dormance de certaines graines. Ces inconvénients techniques expliquent l'augmentation du nombre de passages pour obtenir un résultat satisfaisant. Quatre techniques existent sur le marché (Tableau 7). Selon UNEP, le désherbage thermique à flamme notamment pulsée est assez couramment utilisé, mais il ne peut l'être que sur certaines surfaces qui peuvent y résister ; le désherbage à infrarouge et celui à eau sont en réduction. Le risque incendie exclut les interventions thermiques à flamme et oriente vers le désherbage vapeur, mais on observe en même temps que ce dernier a quasiment disparu. Ces systèmes sont tous lents, gros consommateurs d'énergie fossile et émetteurs de gaz à effet de serre. Les lances ou les rampes nécessitent un temps d'exposition à la chaleur minimum pour agir et une intervention humaine pour les placer avec précision.
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Source : UNEP
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Tableau 7: comparatifs solutions thermiques. Plante et Cité
Certaines structures supportent mal leur passage (les flammes sont préjudiciables aux composants plastiques, l'humidité peut endommager les installations de sécurité SNCF) ; un certain nombre de sites ICPE ne sont pas accessibles à du matériel thermique pour des motifs de sécurité, et la quasi - totalité dans l'industrie chimique, pétrolière, gazière etc. Là encore, pour un résultat identique qu'avec le glyphosate, ces techniques sont de 5 à 10 fois plus onéreuses. Le nombre de passages est aussi multiplié par 3 à 4 avec des durées augmentées pour chaque passage de 2 à 3. Il tient aussi à l'achat de matériel plus onéreux. Plante et Cité a réalisé une étude entre le coût du manuel, du thermique (brûleur) et du chimique qui révèle une nette augmentation du coût d'entretien lorsque l'on se passe de chimique et une grande variabilité dans les coûts annuels.
L'étude Compamed ZNA (COMparaison des MEthodes de Désherbage utilisées en zones non agricoles) présente l'évaluation globale des techniques de désherbage curatif. De 2010 à 2013, une enquête, un observatoire national et plusieurs expérimentations ont fourni les données nécessaires pour évaluer leur efficacité et leurs impacts environnementaux à partir d'une Analyse du Cycle de Vie (ACV). Les résultats s'adressent aux gestionnaires d'espaces verts des collectivités territoriales, aux professionnels du paysage et aux gestionnaires d'infrastructures de transport et de sites industriels.
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Itinéraires : imperméable contraignant (35 m linéaires) Perméable contraignant (20m²)
Nombre de passages
Temps par passage
Temps total
Passages
Ratio/ référence chimique
Durée en minutes
Ratio/ référence chimique
Durée en minutes
Ratio/ référence chimique
Chimique Mécanique Binette Thermique eau chaude Chimique Mécanique Binette Thermique eau chaude
7,7 20,3 15,7 17,3 8 15 18 12
1 2,6 2,0 2,2 1 1,875 2,25 1,5
5,1 90,2 123,7 58 9,2 18 206 91
1 18 24 11 1 2 22 10
39 1831 1942 1003 8 29 403 119
1 47 49 26 1 4 50 15
Tableau 8 : calcul du temps de traitement sur surfaces imperméables/perméables à partir de données d'étude Compamed ZNA61
Dans le tableau ci-dessus, on observe une grande variation des temps de traitement selon les surfaces et les méthodes. Or, ce sont bien les temps de traitement à travers la mobilisation de ressources humaines qui gouvernent au principal les coûts.
4.2. Méthodes non chimiques préventives
Pour lutter contre les mauvaises herbes, une autre solution consiste à réaménager les surfaces pour un entretien sans désherbage de manière à limiter la végétation future ou au contraire intégrer le développement de plantes dans la conception. Le paillage
Minéraux, organiques ou sous forme de films, les paillages peuvent présenter de nombreux autres intérêts (esthétiques, économie d'eau ou entretien de la microfaune du sol pour les paillages organiques). Sur le réseau routier, le paillage est une solution ponctuellement utilisée. Mais il ne peut se pratiquer que sur des surfaces engazonnées et conçues comme telles, par exemple, sous les glissières de sécurité implantées sur des bas-côtés engazonnés. Mais si le paillage retarde l'apparition de végétation indésirable, il ne l'empêche pas. Cette végétation réapparaît au bout de 3 à 5 ans et nécessite un gros travail de reprise.
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Evaluation du nombre d'interventions sur une année de désherbage. Essais surfaces perméables/imperméables 2013
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La minéralisation des surfaces/ pontage des fissures sur le revêtement
Ces techniques ont pour objectif de supprimer la surface colonisable et de ne pas laisser d'interstices profitables au développement des adventices. Elles ont un impact paysagé négatif non négligeable en se substituant à l'espace végétalisé recherché à l'origine. La minéralisation représente un coût supplémentaire, car elle correspond à une reconception de tout ou partie de l'infrastructure. Elle ne peut se faire que très progressivement, au rythme des programmes de grosses réparations et des budgets. Le pontage des fissures est déjà une pratique nécessaire. Mais les coulis vieillissent de manière différenciée, notamment suivant l'intensité des usages et les conditions locales. Leur reprise ne peut se faire au fur et à mesure de l'apparition des fissures ce qui rendrait de fait l'infrastructure indisponible. Ainsi ce pontage n'est programmé qu'en fonction d'une dégradation significative et d'ensemble sur tout ou partie de l'infrastructure, ce qui peut prendre plusieurs années. Le traitement des adventices doit donc se faire régulièrement dans l'intervalle, ne serait-ce que pour prévenir une dégradation plus rapide encore consécutive à la présence de ces végétaux. Les plantes couvre-sol, l'enherbement choisi et la tonte de la végétation spontanée
Dans cette configuration, le gestionnaire change de référentiel en acceptant et favorisant la présence d'une végétation qu'il maîtrise : une végétation choisie qui ne laissera pas de place pour le développement d'adventices ou une végétation spontanée maintenue à une hauteur raisonnable par une tonte régulière. Le respect des exigences réglementaires de sécurité est pour autant une limite. Concrètement, ce changement de référentiel conduit à une reconception des espaces et donc là encore à un nouvel investissement qui ne peut être que très progressif. o L'usage de plantes couvre-sol est courant dans les massifs. Certaines constructions de monuments historiques sont protégées de la sorte avec un enjeu esthétique (les arases des remparts) ; L'enherbement peut être une solution dans certains cas particuliers. Mais se pose la question de la praticabilité en cas de pluie, par exemple, dans les cimetières compte tenu des cheminements. Il peut être spontané, sans ou avec apport de substrat, mais nécessite la mobilisation de moyens pour l'entretenir (tonte, fauche). Quelques cas particuliers sont étudiés. La SNCF teste un ensemencement choisi en accompagnant un doctorant ; RTE a lancé un marché cadre d'étude avec des écologues pour choisir les semences selon les régions. Ces techniques ne sont pas encore d'un usage courant dans leur domaine spécifique d'activité ; La hauteur de la végétation est réduite par l'usage de rotofil, de robots de tonte ou encore la mise en place temporaire de moutons (écopâturage) : Le rotofil est une méthode courante, mais longue et avec une forte pénibilité pour le personnel ; il suppose de plus des surfaces exemptes de matières susceptibles d'être projetées, graviers notamment. Les robots de tonte se sont développés sur le marché des pelouses, mais le travail à fournir dans les zones industrielles, le long des réseaux de communication n'est pas identique. La société Vitirover cherche à développer une solution en viticulture et dans d'autres secteurs ZNA en particulier avec les entreprises de fourniture d'énergie éolienne (BayWa en Allemagne, RWA en Autriche). La SNCF conduit une expérimentation sur des voies à grande vitesse.
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o
Les moutons ont pour inconvénient de salir les parcelles ; le personnel de l'entreprise s'interroge également sur les risques et inconvénients qu'ils peuvent représenter (RTE). Leur présence peut nécessiter une double clôture pour éviter l'introduction des animaux sur les voies de circulation. Malgré les apparences, c'est une solution qui implique une intendance lourde, et qui n'est pas à l'échelle des surfaces à traiter ni des conditions à remplir pour ce traitement.
4.3. Les solutions chimiques ou biologiques
4.3.1. Autres herbicides chimiques
Il existe sur le marché des produits phytopharmaceutiques des herbicides autres que le glyphosate autorisés pour les zones non agricoles. Début 2019, 25 produits sans glyphosate ont une AMM pour une action herbicide autorisée en ZNA professionnelle. Mais aucun n'est à la fois un herbicide systémique62 et un désherbant total.
Tableau 9 : liste des produits herbicides sans glyphosate utilisables en ZNA à usage professionnel (extraction au 9 avril 2019)
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Parmi les autres herbicides autorisés pour des usages ZNA, certains peuvent avoir une action systémique comme le 2,4 D, le tryclopyr, le fluroxypir. Cependant ces derniers ne sont pas des herbicides totaux.
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Certains, en particulier les sulfonylurées, ont déjà sélectionné des adventices résistantes en France. Leur utilisation massive en solution de remplacement du glyphosate pourrait aggraver ces effets négatifs, tout en sachant que le glyphosate lui-même a déjà fait émerger du ray-grass résistant en vigne. Les produits à base d'acide pélargonique nécessitent des quantités de spécialité commerciale à l'hectare, comprises entre 16 et 1000 l/ha pour les usages professionnels contre 5 à 15 l/ ha pour le glyphosate, suivant notamment les concentrations du principe actif. Le glyphosate doit être utilisé peu dilué. Ce point a évidemment une incidence sur les autres intrants (carburant, eau, matériel...).
4.3.2. Les herbicides chimiques de biocontrôle
La France est le seul État membre à avoir défini par la voie réglementaire la notion de produits de biocontrôle63. Leur spécificité est liée à leur caractère naturel ou leur mode d'action reposant sur des mécanismes naturels et exempts de certains classements toxicologiques et écotoxicologiques. Une présentation plus détaillée des produits de biocontrôle est donnée en Annexe 4. La DGAL publie mensuellement la liste officielle des produits de biocontrôle. Une vingtaine de spécialités ont un usage désherbage professionnel. Ce sont des préparations contenant de l'acide pélargonique, acétique ou caprylique. Même si ce sont des désherbants totaux, aucun n'a d'action systémique. Le délai de rentrée pour l'acide pélargonique est de 24 h ou 48 h.
4.3.3. Produits à faible risque
Le règlement CE n° 1107/2009 les définit : 1 - les substances à faible risque dans l'article 22 : «Par dérogation à l'article 5, une substance active satisfaisant aux critères prévus à l'article 4 est approuvée pour une période n'excédant pas quinze ans, si elle est considérée comme une substance active à faible risque et s'il est prévisible que les produits phytopharmaceutiques contenant cette substance ne présenteront qu'un faible risque pour la santé humaine, la santé animale et l'environnement, conformément à l'article 47, paragraphe 1.» 2 les produits phytopharmaceutiques à faible risque dans l'article 47 : «Lorsque toutes les substances actives contenues dans un produit phytopharmaceutique sont des substances actives à faible risque telles que visées à l'article 22, ce produit est autorisé comme produit phytopharmaceutique à faible risque à condition ...» Les produits à faible risque sont présentés plus en détail dans l'Annexe 4.
Les produits à faible risque au sens du règlement 1107/2009 sont des produits de lutte biologique, des stimulateurs de défenses naturelles et du phosphate ferrique. Aucun herbicide ne figure dans cette catégorie.
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Article L. 253-6 du code rural et de la pêche maritime. Les produits phytopharmaceutiques de biocontrôle sont des produits phytopharmaceutiques. Ils sont autorisés à l'issue d'une évaluation complète des risques pour la santé humaine, la santé animale et l'environnement et conforme aux exigences européennes.
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4.3.4. Un effet report prévisible
Compte tenu des conséquences économiques et des inconvénients pratiques des méthodes non chimiques, l'interdiction des produits contenant du glyphosate conduira probablement à un report, sur l'utilisation d'autres substances autorisées. Parmi celles-ci, on peut d'ores et déjà, citer l'acide pélargonique, qui associé à des sulfonylurées font l'objet de tests poussés par la SNCF. Or, déjà, en 2015, une association environnementale avait alerté sur le recours à l'acide pélargonique en remplacement d'autres herbicides64, en raison du contenu de la fiche de données de sécurité et de données écotoxicologiques.
Des pratiques non autorisées sont signalées auprès de la mission chez les particuliers et dans des collectivités territoriales telles qu'un usage intensif de vinaigre65, de sels de déneigement, etc. En conséquence, l'impact de ces reports mérite d'être évalué avec soin avant toute décision, car quand bien même, il existerait une méthode non chimique, usuelle et dont les inconvénients économiques et techniques seraient suffisamment limités pour faire usage de l'article 50.2 du règlement CE 1107/2009, les utilisateurs devraient eu égard au coût préférer la méthode chimique. Or le règlement ne fournit aucun moyen pour empêcher ces reports, sauf à vouloir interdire ces autres substances à travers une nouvelle procédure. Pour ces motifs, le point de vigilance suivant est formulé. Être vigilant sur l'impact des reports vers d'autres herbicides chimiques autorisés, en raison de leurs spécificités et des volumes appelés à augmenter.
64 65
https://deuxsevres.eelv.fr/19/les-nouveaux-desherbants-bio-un-miroir-aux-alouettes/. Consulté le 2 septembre 2019. Le vinaigre est approuvé en tant que substance de base (et non substance active) depuis juillet 2015 par le règlement 2015/1108, pour des fonctions bactéricide et fongicide (traitement de semences et désinfection outils), puis herbicide dans des conditions restreintes. Le rapport SANCO/12896/2014 rev3 du 13 décembre 2018 précise que les utilisations autorisées portent uniquement sur les plantes médicinales, aromatiques ou plantes à parfum (PPAMC) avant la levée de la culture, en raison d'un risque de phytotoxicité sur jeunes plantes. Il n'est donc pas possible d'utiliser le vinaigre comme herbicide en ZNA.
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5. CARTOGRAPHIE DES UTILISATIONS DU GLYPHOSATE EN ZNA ET DES
ALTERNATIVES NON CHIMIQUES
La mission a établi cette cartographie à partir des entretiens menés avec différents maîtres d'ouvrage ou leur représentant À l'intérieur de cette cartographie, la mission n'a pas cru devoir segmenter plus avant les utilisations du glyphosate. En effet, outre que les quantités en jeu sont en elles-mêmes déjà très faibles, elles sont mal connues dans le détail comme pointé précédemment. Toute approche encore plus fine serait illusoire, alors déjà que le glyphosate n'est utilisé que sur les objets techniques où il est nécessaire, sous réserve d'optimisation. La mission souligne que ces maîtres d'ouvrages, qui s'étaient le plus souvent engagés dans des démarches volontaires de réduction de l'usage des pesticides à travers notamment les plans ÉCOPHYTO et assimilés, ont tous découvert lors des entretiens le changement de méthode qu'impliquait le passage par l'article 50.2. du règlement CE 1107/2009. D'une démarche progressive dans le temps, basée sur les meilleurs efforts, ils pourraient être confrontés à une démarche d'interdiction pure et simple applicable dès 2021. Il n'est encore pas certain que les acteurs en aient mesuré toutes les conséquences concrètes pour leurs activités. Par ailleurs, la méthode même de l'article 50.2. est apparue peu lisible pour les interlocuteurs de la mission, puisque nécessitant pour son instruction des évaluations menées sur la base de méthodes non chimiques c'est-à-dire de fait mécaniques et manuelles, compte tenu du caractère marginal des autres méthodes, thermiques notamment. Ces méthodes semblaient parfaitement irréalistes aux yeux de ces maîtres d'ouvrages et par conséquent n'ont jamais été sérieusement envisagées. Audelà de ce constat, il peut en être aussi conclu que les décideurs se tourneront soit vers des méthodes alternatives chimiques en raison de leurs moindres coûts, soit vers de la reconception lorsque cela est possible. Cette solution est bien une alternative mais elle sort alors du cadre du 50.2. Enfin, même si l'absence de méthode alternative d'usage courant au titre de l'article 50.2. est identifiée en ZNA, la mission apportera dans la mesure du possible des éléments relatifs tant aux inconvénients pratiques que économiques majeurs au titre du 50.1.. Enfin, des pistes concrètes de progrès (réduction significative des quantités, réaménagements par exemple) seront le cas échéant mentionnées. S'agissant des Outre-mer, les spécificités floristiques et climatologiques rendent la dépendance aux produits phytopharmaceutiques, et au glyphosate en particulier, encore plus prégnante. Les analyses de la mission s'y appliqueront d'autant plus.
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5.1. Le réseau ferroviaire
SNCF Réseau66 exploite en quasi-totalité le réseau ferroviaire français 67 soit de 30000 km de lignes composées d'une ou plusieurs voies. Ces lignes représentent 61000 km de voies, dont 49000 km de voies principales et 12000 km de voies de service (voies de garage, de triage, etc.). Le patrimoine foncier à entretenir au titre de la végétation est de 95000 ha, dont 34000 ha de voies et de pistes latérales à ces voies. La consommation d'herbicides représente suivant les années environ 63 t pour un montant d'environ 4 M/an. Ceci correspond à 53 t d'herbicides totaux, dont 45 t de glyphosate. Le dosage de 1,8 kg/ha appliqué par SNCF Réseau respecte la dose maximale fixée par l'AMM. Il est plus élevé qu'en agriculture, car le terrain et le type de végétation rencontrée ne sont pas identiques. Le traitement de la végétation (désherbage, suppression des arbres à risque pour la circulation, etc.) représente au total 120 M à 130 M/an sur les voies, pistes et sur les abords, variable en fonction de l'année (besoins d'intervention, gestion des stocks, etc.). Le désherbage des voies et des pistes représente 28,7 M, dont 26,2 M pour le désherbage chimique (y compris le glyphosate) et 2,4 M pour le cas échéant un rattrapage mécanique. Ce traitement est réalisé avec des trains désherbeurs spécialement conçus à cet effet qui pulvérisent le produit sur les voies et les pistes dans le respect des AMM. Certains de ces trains dits à grand rendement peuvent rouler jusqu'à 60 km/h, ce qui permet, outre une grande productivité de l'activité, de ne consommer qu'un minimum de sillons, loués aux entreprises ferroviaires et qui fournissent les recettes de SNCF Réseau.
5.1.1. Les exigences du référentiel
Le référentiel actuel d'entretien exige une absence de végétation sur les voies et sur les pistes. Il est identique pour tous les pays européens regroupés au sein de la Communauté européenne du rail (CER). Il a été conçu pour répondre aux exigences suivantes : Sécurité des circulations : en effet, la voie ferrée est largement instrumentée et la sensibilité des capteurs implique l'absence de végétation. Par exemple, le contrôle des voies par mesures laser est perturbé lorsque la végétation s'installe ; Pérennité et sécurité de l'infrastructure : la végétation, de par le colmatage du drainage, a des effets sur le ballast et entraîne la déformation des voies qui y sont posées. Par ailleurs, les ouvrages d'art doivent également être exempts de végétation, celle-ci entravant la circulation de l'eau et entraînant des déformations ; Sécurité des personnels qui circulent sur les pistes et qui interviennent à partir de cellesci pour la maintenance (les pistes permettent également l'évacuation des voyageurs en cas de nécessité). Elles doivent être à tout moment praticables aisément, en particulier prévenir tout risque de chute et de fait ressembler à un sol nu ; Sécurité incendie : la circulation des trains et leur freinage engendrent des étincelles qui enflamment la végétation l'été.
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SNCF Réseau : SNCF Réseau est l'un des trois établissements publics à caractère industriel et commercial composant le groupe SNCF. L'entreprise est chargée de la maintenance et de l'entretien du réseau ferré, de la construction de nouvelles lignes ferroviaires et gère la circulation de tous les trains empruntant le réseau ferré national Les exceptions sont notamment les Lignes à grande vitesse réalisées à travers un partenariat public-privé, le tunnel sous la Manche, certaines lignes secondaires ou touristiques, les chemins de fer Corse, la ligne Nice-Digne, les voies ferrées portuaires, les voies ferrées des installations industrielles et leurs embranchements.
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Ce référentiel est atteint avec l'emploi de glyphosate, molécule la plus efficace car avec un effet herbicide total et systémique et parmi les moins chers des désherbants. Il est inatteignable à ce jour avec une autre substance active. Mais ce référentiel a également d'autres exigences, par exemple, sur les talus :, Leur stabilité doit être assurée : ils doivent donc être dotés d'une couverture de végétation adaptée qui à la fois les stabilise, mais dont le développement ne conduit ni à leur ruine, ni n'est source d'inconvénients pour les voies et pistes ; Ils doivent éviter de s'enflammer au contact d'étincelles, directement ou via de la végétation sur les pistes ; Le développement des arbres doit être maîtrisé de telle sorte que leur chute ne puisse provoquer d'accidents de circulation, et que la chute de leur feuille en automne n'empêche les trains de circuler (on rappelle que le contact fer/fer entre les roues et la voie de chemin de fer est très limité et sujet au glissement).
Du fauchage, avec des débroussaillants et ponctuellement du glyphosate pour la dévitalisation des souches permettent le respect de ces exigences. Dans cet exemple, on voit bien que le glyphosate n'est pas une alternative au fauchage et réciproquement.
5.1.2. Un plan de substitution par d'autres herbicides chimiques
Depuis les années 1920/1930, le désherbage est chimique. Concomitamment, l'augmentation des exigences techniques sur les voies, nécessaires pour permettre l'augmentation des performances tout en garantissant la sécurité, a conduit au développement de l'utilisation de méthodes chimiques. Face aux annonces sur l'interdiction à terme du glyphosate, SNCF Réseau a mis en place un programme de recherche de solutions par d'autres herbicides, mais qui n'ont pas encore fait l'objet d'expérimentation sur une grande échelle. Suite à une expérimentation en 2018 sur quelques centaines de mètres qui s'est montrée encourageante, un essai a été conduit en 2019 sur 6 x 20 km dans différentes régions avec un mélange d'acide pélargonique (produit de biocontrôle) et de flazasulfuron. Les résultats ne sont pas encore évalués. Néanmoins, par la force des choses, ces expérimentations ont été conduites au cours de deux années particulièrement sèches et donc plutôt favorables à de bons résultats. Si cette méthode s'avérait concluante, ce changement de traitement entraînerait une modification substantielle des trains désherbeurs et nécessiterait un appel d'offres pour l'acquisition de nouveau matériel. En effet, l'acide pélargonique est un acide gras, et les pompes des trains désherbeurs ne sont pas conçues pour un tel produit. SNCF Réseau doit simultanément continuer à mobiliser ses trains désherbeurs actuels et se doter de modules nouveaux adaptés. Ceux-ci ne pourront pas être opérationnels dans le meilleur des cas avant la campagne de 2021. SNCF Réseau est donc confronté à un double risque, en cas d'interdiction du glyphosate applicable dès 2021, à savoir un risque industriel et un risque de calendrier, même si ces deux risques se recoupent. Les points critiques sont les suivants : Des résultats d'essais insatisfaisants ou réalisés avec des conditions météorologiques par trop favorables (ce qui est déjà le cas de l'année 2019) ;
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De nouveaux trains désherbeurs difficiles à mettre au point, voire impossibles et/ou un retard dans leur fabrication et leur déploiement sur l'ensemble du réseau ; La maîtrise de la détection automatique des adventices, puisque l'acide pélargonique est utilisable uniquement par «tache» de mauvaises herbes ; La disponibilité des quantités nécessaires d'acide pélargonique (fabrication à partir de la récolte de colza 2020 sous réserve d'une anticipation de commande à juin de cette même année) et de flazasulfuron.
Les pistes étant l'élément le plus sensible pour le développement de la végétation indésirable, ce seront les agents de SNCF Réseau qui feront face au risque correspondant en tout premier lieu. Une interdiction administrative dès 2020 rendrait tout retour en arrière problématique pour la campagne 2021, alors même que les trains désherbeurs de glyphosate sont toujours disponibles. Enfin les caractéristiques mêmes du flazasulfuron exposent à un risque avéré de sélection d'une végétation résistante qui pourrait devenir impossible à contrôler avec des conséquences industrielles majeures. Un tel risque ne peut être évalué à un premier niveau avant des essais significatifs sur une période d'au moins trois ans. Ces contingences rendent ce projet très incertain pour 2021 et exposerait durablement SNCF Réseau à un risque industriel.
Par ailleurs, le coût et les limites de cette alternative chimique qui nécessiterait au moins 2 passages par an, à comparer à un seul passage général complété le cas échéant par une opération de rattrapage ponctuel pour le glyphosate, a conduit SNCF Réseau à examiner un éventuel référentiel révisé. Il accepterait : une emprise de végétation de l'ordre de 5 % de la surface sur les voies principales (valeur limite par rapport à l'humidité et à la déformation engendrée) ; une hauteur de 10 cm de végétation sur les pistes ; une hauteur de végétation limitée au champignon du rail (10 cm) sur les voies de service et les voies sans voyageurs à petite vitesse, cette végétation étant choisie et ensemencée à cet effet.
Ces standards sont toujours à l'étude. SNCF Réseau ne les a pas validés à ce jour.
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5.1.3. Des solutions non chimiques irréalistes à l'échelle du réseau
Pour SNCF Réseau, un traitement mécanique, voire thermique, est irréaliste à l'échelle du réseau : au regard des risques pour les agents, de la pénibilité du travail et de la mobilisation du personnel nécessaire, même en ayant recours à des prestataires de service. Le pic de main d'oeuvre nécessaire a lieu d'avril à septembre. SNCF Réseau souligne la difficulté pour leur prestataire à disposer de la main d'oeuvre nécessaire ponctuellement même actuellement pour du désherbage manuel. En Allemagne, pour la Deutsche Bahn Netz68 cette main d'oeuvre ponctuelle vient des pays de l'Est, la Roumanie essentiellement. En France, les travaux de désherbage sont très souvent réalisés avec des travailleurs détachés. vis-à-vis de l'exploitation. En effet, le désherbage des voies et pistes ne doit pas engager la capacité à faire passer des trains, c'est-à-dire les sillons qui à ce titre fournissent les recettes de SNCF Réseau. C'est la raison pour laquelle des trains désherbeurs à grand rendement qui peuvent rouler jusqu'à 60 km/h sont employés. Toute autre méthode mécanique doit se faire sous circulation, c'est-à-dire entre le passage des trains. Outre un temps et des moyens humains considérables, cela multiplierait d'autant le risque d'accident pour les agents.
Aujourd'hui, SNCF Réseau traite les 1000 km de ZNT eau (qui correspondent à 22000 coupures courtes pour les cours d'eau) au coup par coup sur alerte après surveillance, au rotofil pour les pistes et à la main pour les voies. Leur traitement coûte environ 2 M/an. De fait, le référentiel correspondant est déjà dégradé sur ces coupures, et l'intervention n'est possible que parce que ce sont des zones courtes en pointillé qui n'engagent pas trop de sillons. Cette solution n'est évidemment pas généralisable à l'ensemble du réseau. De manière analogue, des solutions de reprise de l'infrastructure comme des géotextiles ne sont pas à l'échelle. Outre la limite de leur efficacité dans le temps et les difficultés considérables qu'ils poseraient dans leur mise en oeuvre (à savoir leur enlèvement par les suites rapides de trains-usines spécialisés), leur pose ne peut s'effectuer qu'à l'occasion des travaux de régénération, lesquels représentent seulement 1000 km par an sur un patrimoine de 61000 km de voies.
5.1.4. Évaluation financière
5.1.4.1 Évaluation des coûts des solutions alternatives L'évaluation menée sous la responsabilité de SNCF Réseau en 2017, a permis d'identifier et de chiffrer les différentes alternatives, en fonction des objets techniques auxquels elles pouvaient s'appliquer. Elle rassemblait en synthèse les solutions les plus économiques, en particulier les solutions de traitement par d'autres produits chimiques. À la demande de la mission, la SNCF a repris également les chiffres correspondant seulement aux alternatives non chimiques conformément aux exigences de l'article 50.2. Il en ressort une étude détaillée avec les limites imposées par l'appréciation des coûts de solutions non validées industriellement et pour certaines irréalistes. Elle ne prend en compte que les coûts directs69, en valeur 2017 :
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Équivalent de SNCF Réseau en Allemagne Selon SNCF Réseau, ses résultats sont cohérents avec ceux des autres gestionnaires d'infrastructure de la CER.
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le coût actuel du désherbage des voies et pistes avec du glyphosate se monte à 29 M/an ; le coût d'une solution mécanique à standard constant se monterait à 1220 M/an. Il est à noter que ce serait la référence à prendre en compte au titre de l'article 50 du règlement CE 1107/2009. Il représente un facteur 42 par rapport à la situation actuelle, supérieur au facteur 10 mentionné au paragraphe 4.1.1. et qui s'explique par les contraintes propres considérables du ferroviaire ; le coût d'une solution de substitution chimique à standard constant se monterait à 472 M/an. Il représente un facteur 16 par rapport à la situation actuelle ; le coût d'une solution de substitution chimique à standards révisés se monterait à 274 M/an. Il représente un facteur 9 par rapport à la situation actuelle. 5.1.4.2 Éléments financiers pour SNCF Réseau
Au regard de la situation singulière de SNCF Réseau, de son monopole, de ses recettes, et de son mode de régulation par l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (ARAFER), il est seulement possible pour la mission de rapprocher les coûts mentionnés ci-dessus de quelques éléments des comptes de SNCF Réseau, et notamment ses recettes. Leur marge d'augmentation est extrêmement limitée et repose soit sur l'augmentation de la redevance de circulation et/ou de la redevance de marché qui correspondent à des recettes commerciales, soit de la redevance d'accès qui correspond de fait à une subvention. Une autre piste est l'augmentation de la productivité. Au titre des directives européennes, une augmentation de la redevance de circulation et/ou de la redevance de marché ne peut être imposée que si le marché s'y prête. Ces augmentations tarifaires doivent être réparties à due proportion des dépenses relatives aux types de voies concernées, LGV ou lignes classiques : S'agissant des péages des services librement organisés (SLO) et qui correspondent de fait aux trains à grande vitesse (TGV), le montant perçu est d'environ 2000 M/an. Or dès 2021, ces services seront ouverts à la concurrence et plusieurs entreprises ferroviaires européennes se préparent à faire rouler des trains en France, tant sur lignes à grande vitesse (LGV) que sur lignes classiques. L'ARAFER estime que tant la SNCF que les entreprises concurrentes ne pourraient faire face à des augmentations. Aussi l'ARAFER, constatant de fait les limites atteintes pour les TGV, et cette ouverture à la concurrence, maintient-elle les péages en euros constants. Il en est de même s'agissant des péages des services conventionnés (essentiellement avec les régions) alors qu'une augmentation de 2,4 % avait été demandée.
La redevance d'accès d'un montant d'environ 2000 M est de fait une subvention de l'État et apparaît comme la seule autre variable d'ajustement. S'agissant de l'équation financière de SNCF Réseau, le résultat d'exploitation est de 517 M, le résultat financier est négatif à hauteur de 1484 M et le résultat courant est donc négatif de 967 M. Le service de la dette représente 1300 M.
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Mais les résultats comptables de SNCF Réseau sont conventionnels. En effet, le fait que les redevances de l'État ne sont pas affectées à la dette ne permet pas de faire apparaître un résultat d'exploitation qui soit significatif de la réalité opérationnelle de la gestion. Seule la reconstruction d'un coût normatif de production, et à partir de celui-ci, d'un coût moyen pondéré du capital (CMPC) qui correspond à la rémunération attendue par les financeurs d'une entreprise, à savoir les actionnaires et les banquiers, permettrait de faire apparaître un résultat d'exploitation réellement significatif. Surtout, la trajectoire financière de SNCF Réseau est maintenant encadrée par l'article L. 2111-101 du code des transports qui définit un ratio entre sa dette financière nette et sa marge opérationnelle. Ce ratio ne peut dépasser une limite fixée par décret et le tout constitue ce que l'on baptise la « règle d'or ». Le surcoût lié à toute solution alternative au glyphosate qui pèse sur l'exploitation réduira d'autant la marge opérationnelle et augmentera à due proportion ce ratio. Cela aura pour effet une limitation supplémentaire des investissements de SNCF Réseau dont il convient qu'en soient évaluées toutes les conséquences. Enfin, les gains de productivité sont déjà préemptés sur les cinq années du contrat d'objectif et de performance qui encadre la trajectoire de SNCF Réseau.
5.1.5. Points de vigilance et questions collatérales à traiter
En cas de maintien des AMM pour les produits contenant du glyphosate utilisés sur les voies ferrées, il conviendrait de s'interroger sur la pertinence de la poursuite de la démarche volontariste de substitution du glyphosate par SNCF Réseau, compte tenu des conséquences listées ci-dessus. En effet, en cas de basculement sur d'autres produits chimiques, la mission rappelle que les interrogations qui pèsent sur les effets d'une utilisation conséquente d'acide pélargonique et de sulfonylurées trouvent particulièrement à s'appliquer à SNCF Réseau vu des quantités en jeu et de la répétition de leur application. Il est à noter que les trains désherbeurs ne sont pas équipés de système de détection des adventices qui permettraient de réduire la consommation de glyphosate. Une application systématique est réalisée le long de la voie et des pistes, avec une coupure dans les ZNT pour l'eau, pilotée par un système de localisation par satellite. Avec l'entreprise Bayer, SNCF Réseau mène des essais encourageants pour équiper ses trains de dispositifs de détection des végétaux et de pilotage en conséquence des buses d'application. Sur la base de constats faits sur le réseau, une réduction de 70 % des surfaces traitées et donc des quantités appliquées est attendue. L'enjeu est donc important au regard des quelque 45 t de glyphosate utilisées annuellement par SNCF Réseau puisque cela permettrait une réduction annuelle de 30 t.
5.1.6. Les transports guidés
Les transports guidés comme les métros et tramways présentent des problématiques analogues à celles de la SNCF, dans leurs installations terminales, mais aussi les voies classiques, par exemple celles des RER en Île-de-France. En effet certaines voies à l'air libre, si elles sont végétalisées, ont fait l'objet d'une végétation choisie à la conception et la plateforme elle-même est conçue pour la recevoir sans dommage. Le choix délibéré d'une végétalisation par le maître d'ouvrage résulte de
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considérations urbaines et paysagères, fonction notamment des lieux où s'insère le système de transport. Cette végétation est entretenue mécaniquement. En revanche les installations terminales à l'air libre et les voies classiques sont conçues de manière plus économe de moyens. Elles sont donc soumises au développement d'une végétation spontanée qui leur est dommageable et qui doit donc être éliminée. Les contraintes d'exploitation du transport guidé sont en général renforcées compte tenu d'un trafic très dense sur des amplitudes, horaires notamment, très étendues. Du glyphosate y est donc employé, de manière analogue aux installations ferroviaires, pour répondre aux mêmes contraintes. Les analyses précédentes relatives aux voies ferrées s'appliquent ainsi tout naturellement aux transports guidés. Par exemple en 2018 la RATP a appliqué 311 kg de glyphosate sur une surface de 100 ha. Le montant annuel des prestations de désherbage et qui utilisait du glyphosate s'élevait à 250 000 . Il est estimé à 4 000 000 au minimum le coût d'un traitement sans PPP sur les voies et 1 130 000 avec un autre PPP que le glyphosate pour les parcs et ateliers. De manière générale, les surcoûts s'imputent sur les subventions versées par l'autorité organisatrice de transports (AOT), soit dans le cas d'espèce Île-de-France mobilités. Mais ils peuvent aussi être répartis d'un commun accord entre l'AOT et l'opérateur de transport public.
5.2. Les postes électriques du réseau de transport d'électricité
Le désherbage chimique ne concerne à Réseau de transport d'électricité (RTE), filiale d'Électricité de France (EDF) que les postes électriques dont il est le propriétaire du terrain. Le traitement est aujourd'hui chimique en totalité sur les 529 sites, qui peuvent rassembler plusieurs postes et qui représentent 1 473 ha. Le glyphosate est la molécule utilisée en quasi-totalité soit 3,79 t en 2018. RTE sous-traite à des entreprises spécialisées. Cependant au titre d'une démarche volontariste menée dans le cadre du plan Écophyto, RTE entretient déjà en zéro-phyto une partie de ses 71 sites de moins de 5 000 m² et à ce titre considérés comme «petits». Par ailleurs, les clôtures sont désherbées chimiquement sauf exception dans quelques cas de configuration favorable où les abords peuvent faire l'objet d'un entretien mécanique. L'objectif est d'avoir un accès sans gêne à toute la zone et un contrôle visuel des ouvrages.
5.2.1. Les exigences du référentiel
Le jeu de barres qui constitue le coeur d'un poste électrique doit avoir zéro végétation pour prévenir le risque électrique. Cette zone fait l'objet de désherbage chimique au glyphosate. Les référentiels techniques sont soit génériques à savoir ; l'arrêté technique de 2001 qui définit les conditions techniques auxquelles doivent satisfaire les distributions d'énergie électrique et ses articles 43 et 44 relatifs aux postes et qui définit des obligations de résultat la norme NF C 18-510 (§ 4.3.1 sur la prévention du risque électrique).
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le Code du travail et ses circulaires qui fixent des distances de sécurité des opérateurs visà-vis de la végétation. le Code du travail avec ses articles R4323-41, R4534-11, R4534-13, R4323-553 relatifs à la manutention d'engins.
Soit des référentiels propres à RTE : le référentiel technique poste HTB NT-DI-CNER-DP-ACS-18-51215 qui définit les spécifications relatives aux aménagements de surfaces des postes. Elles prévoient une hauteur de gravier de 7 cm. la note NT-MAIN-DMRP-18-00055 qui établit les règles relatives à la prise en compte du risque électrique en fonction de ces mêmes aménagements de surfaces et qui s'appuie sur les normes suivantes : la norme CEI 60479 qui définit les valeurs de tension maximales admissibles par le corps humain en distinguant : celles relatives aux travailleurs à l'intérieur d'un poste électrique ; et la norme CEI 909 qui définit les critères d'évaluation des contraintes électriques en cas de défaut.
Sauf exception historique (postes très anciens de conception différente), le standard est depuis l'après-guerre le zéro végétation sur gravier. Il est lié à la sécurité électrique du personnel (la résistivité du sol varie d'un facteur 5 entre du gravier seul et de la végétation), notamment en cas de défaut électrique dans les postes, qui par nature et parce qu'ils sont le point de raccordement des lignes, concentrent ces défauts. En effet, à partir du moment où la végétation dépasse 2 cm de haut, elle anéantit le pouvoir isolant des semelles des chaussures de sécurité compte tenu des dispositifs de protection actuels conçus avec les possibilités offertes par les PPP. Par ailleurs, les clôtures représentent un véritable enjeu et leur entretien est chimique. En effet, certains postes sont classés «points d'importance vitale» au sens de la protection contre le sabotage et ont des doubles clôtures. Elles sont de plus en plus instrumentées (vidéo surveillance notamment).
5.2.2. Des essais de substitution par d'autres herbicides chimiques
Un site de 47000 m² a fait l'objet d'une expérimentation avec de l'acide pélargonique. Pour obtenir une absence de végétation, il a fallu 3 passages et 1260 litres de la spécialité contre 1 passage et 23 litres pour le glyphosate pour un poste comparable et de même surface. S'agissant d'un traitement chimique, la question est aussi celle du délai de rentrée sur le terrain traité. Il est beaucoup plus long pour l'acide pélargonique soit 24 h. Or l'exploitation du poste impose de pouvoir intervenir en temps quasi réel en cas d'incidents électriques ou d'interventions pour entretien qui arrivent régulièrement. Ainsi les clauses de RTE imposent 6 heures.
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5.2.3. Des solutions non chimiques irréalistes dans les postes actuels
Au regard de la conception actuelle des postes, la compatibilité apparaît comme quasi nulle entre les critères d'acceptabilité de la végétation avec les contraintes d'exploitation et la capacité à respecter les préconisations d'entretien sur de grandes surfaces non aménagées sans produit phytosanitaire, en particulier sous du matériel électrique. Les possibilités de traitement mécanique (tondeuse, fauchage...) sont des plus limitées. Par exemple, employer des rotofils sur du gravier est impossible (risque important de projection), et encore moins quand le poste est sous tension alors que c'est le cas avec un traitement chimique - pour cause de risque électrique. Il en est de même pour des tondeuses. Ceci rend quasi impossible le traitement de grandes surfaces sans produit phytopharmaceutique. Par ailleurs, la tondeuse ne permet pas de maintenir une végétation à moins de 2 cm, limite au-delà de laquelle, le caractère isolant de la semelle des chaussures de sécurité n'est plus assuré. RTE a cependant commencé à demander à ses prestataires de se passer du glyphosate, mais certaines entreprises ont du mal à s'engager sur des marchés traditionnellement à obligation de résultat, sur 3 ans sous la contrainte du zéro-phyto. Si la première année bénéfice d'effets résiduels des traitements chimiques et la végétation encore maîtrisée, les professionnels savent que la situation sera de plus en plus compliquée les années suivantes. Les entreprises ne savent donc pas où elles vont en termes de coûts et éprouvent d'importantes difficultés pour disposer des moyens nécessaires en personnel. Ce qui apparaît possible pour l'entretien d'une petite surface avec un désherbage mécanique et manuel ne l'est pas en grande surface. Cela impliquerait trop de personnes en zone électrique, si tant est que les prestataires puissent trouver le personnel en nombre suffisant. Un entretien sans désherbage des grandes surfaces supposerait un réaménagement pour ce faire, mais au prix d'un coût important sans service rendu direct supplémentaire.
5.2.4. Évaluation financière
RTE a commencé à conduire des évaluations financières, mais leurs résultats et le caractère irréaliste des méthodes sous-jacentes ont conduit à examiner d'autres solutions qui seront développées au paragraphe suivant. Sur la base d'essais sur des petits postes, le coût d'un traitement mécanique et manuel ressortirait à 0,95 /m² contre 0,20 /m² avec du glyphosate, soit environ 5 fois plus cher. Sur de grandes surfaces et après plusieurs années, l'écart ne pourrait aller qu'en grandissant. Le coût annuel de l'entretien avec du glyphosate des 1473 ha de postes est de 2,9 M. Il passerait à 14,0 M sur cette première base avec des méthodes mécaniques et manuelles.
5.2.5. Des solutions alternatives permises par une reconception des postes
Au regard de ses objectifs dans le cadre du plan Écophyto, les surcoûts et l'inadaptation des postes aux contraintes du zéro-phyto ont donc conduit RTE à imaginer leur réaménagement, prenant en compte les contraintes de l'existant, y compris du maintien de la tension pendant les travaux.
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Deux options sont ouvertes en fonction de la résistivité des sols et de la configuration des postes : une végétalisation choisie (1 à 8 /m² en investissement et 0,37 /m²/an en entretien) avec des plantes couvre-sol qui empêchent les végétaux indésirables de s'installer. Le semis a lieu avec des végétaux qui auront une hauteur limitée. Cette hauteur doit être maîtrisée en fonction des contraintes d'exploitation des installations électriques : 15 cm sous du matériel électrique. Le choix de la végétation dépend de nombreux facteurs : l'existant, la résistivité du sol, le renforcement de la protection électrique, leurs coûts respectifs. La végétalisation impose une étude systématique de la résistivité des sols et donc de mobiliser les électrotechniciens. Or cette ressource est limitée. Un marché-cadre d'étude est lancé avec des écologues pour choisir les semences selon les régions (action de RTE en faveur du végétal local). RTE a choisi de ne pas laisser une végétation spontanée pour aller plus vite et avoir une meilleure maîtrise de la végétation qui s'installe ; le paillage minéral (40 /m²) avec un géotextile et trois couches minérales, plus complexe à mettre en oeuvre. Ce paillage permet de créer un milieu sec et très pauvre défavorable à la pousse. L'entretien est plus limité, mais nécessite cependant un arrachage manuel des pousses, et il y a des doutes sur la pérennité d'un tel aménagement au regard de la maîtrise de la végétation dans le temps.
Par rapport à un objectif de 100 % des postes aménagés pour pouvoir se passer de glyphosate, RTE estime qu'environ 80 % des sites pourraient être simplement végétalisés (végétalisation choisie) et qu'environ 20 % des sites devraient recevoir un paillage minéral. Cependant, ce dernier est complexe à mettre en oeuvre, et il y a des doutes sur sa pérennité. En considération du plan Écophyto dans lequel il s'est engagé et dans le cadre du schéma de développement du réseau, RTE estime le besoin en investissements supplémentaires pour aménager ses sites existant à 139 M. Cela nécessite une prise en compte de ce besoin dans le futur Tarif d'utilisation du réseau public d'électricité (TURPE) qui doit être élaboré puis validé par la Commission de régulation de l'électricité (CRE) avant fin 2020. Les travaux correspondants qui pourraient s'étaler a minima jusqu'à 2024 ne rendront pas possible, si une interdiction du glyphosate était prononcée en 2020, et même en prenant en compte une certaine latence dans la repousse de la végétation, de respecter le référentiel technique. La situation serait difficile. Elle occasionnerait une augmentation des dépenses pour maintenir l'absence de végétation, et rendrait nécessaire de trouver des entreprises extérieures. En revanche, et sous réserve de disposer des ressources nécessaires, l'entreprise pourrait se passer partiellement de glyphosate en 2022, date à laquelle 65 % des sites pourraient déjà se passer de PPP. Pour les 71 postes de moins de 5000 m² précités, RTE considère que la végétalisation ou le paillage minéral sont trop onéreux au regard du surcoût d'un entretien mécanique ou manuel. Au titre du plan Écophyto, RTE a d'ores et déjà, décidé d'imposer à ses prestataires de renoncer aux produits phytosanitaires au fur et à mesure du renouvellement à l'échéance des contrats d'entretien. RTE a décidé de prendre dès à présent en charge les surcoûts correspondants, mais les réintègrera dans l'enveloppe de surcoûts exposés en vue du futur TURPE.
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5.3. Les sites industriels
Les sites industriels relèvent souvent de la réglementation des Installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), au premier rang desquels figurent ceux de l'industrie chimique, de l'industrie pétrolière et parapétrolière et du gaz. Leurs installations sont implantées en plein air sur des terrains le plus souvent simplement stabilisés qui voient inévitablement un développement de la végétation. Aussi ces industriels emploient-ils tous du glyphosate pour l'élimination de cette végétation qui présente un risque dans un environnement industriel, puisqu'inflammable et source, avec le vent, d'envols de poussières végétales enflammées. Ici plus qu'ailleurs, la diversité des établissements et de l'organisation des sociétés qui les gèrent ne permet pas de disposer d'éléments économiques et financiers et conséquemment de mesurer l'impact de l'arrêt du glyphosate. En revanche, un surcoût est estimé par les entreprises.
Les adhérents de l'Association des applicateurs de produits phytopharmaceutiques (AAPP) qui est la principale fédération professionnelle intervenant en entreprises, désherbent 3 200 ha de surfaces de type industrielles avec des produits phytopharmaceutiques à base de glyphosate et aucune surface industrielle en mécanique/thermique.
GLYPHOSATE
Surface Industrielles Publiques Particuliers
BIOCONTRÔLE
Industrielles Publiques Particuliers
THERMIQUE/ MÉCANIQUE
Industrielles Publiques Particuliers
3400 ha
94 %
2% 96,2 %
0,2 %
0,1 %
2% 2,1 %
0%
0%
1,7 % 1,7 %
0%
Tableau 10 : répartition des surfaces traitées par les adhérents de l'Association des applicateurs professionnels de produits phytopharmaceutiques, en fonction du type de méthode et de la nature des terrains.
Ces chiffres confirment qu'aucune autre méthode n'est par ailleurs, pratiquée au titre de la réglementation des ICPE. La consommation annuelle correspondante par les entreprises industrielles est très grossièrement estimée aux alentours de 10 t en regard des concentrations et conditions d'AMM pour différentes spécialités commerciales.
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5.3.1. Les exigences du référentiel
Plusieurs arrêtés techniques ministériels généraux fixent des obligations de résultat, pour prévenir le risque incendie, suivant les différentes rubriques de la nomenclature de ces ICPE. Ces obligations nécessitent une absence de végétaux sous et à proximité des installations. De fait, la méthode retenue, pour ne pas prendre le moindre risque et qui est aussi la méthode la moins onéreuse, est l'emploi du glyphosate. De plus, l'atmosphère explosive autour de ces installations impose le respect de normes spécifiques ATEX, notamment pour l'emploi de matériels électriques ou autres.
5.3.2. La substitution par d'autres herbicides chimiques
Selon les industriels, l'utilisation d'un PPP alternatif au glyphosate, mais qui alors ne détruit pas les systèmes racinaires, multiplierait par 4 ou par 6 environ la fréquence de passage nécessaire pour aboutir au même résultat. En raison de ce constat, les industriels n'ont pas jugé pertinent de développer cette voie.
5.3.3. Des solutions non chimiques irréalistes
Les solutions non chimiques ne sont pas compatibles avec les arrêtés techniques ministériels pour ce qui concerne la protection contre l'incendie. Même si une hypothèse contraire était retenue, la substitution d'une zone traitée avec un PPP par une zone végétalisée nécessiterait une tonte régulière. Cette option n'est pas envisageable dans les zones avec restrictions ATEX en raison des risques d'explosion et du matériel de tonte considéré. Par ailleurs, les zones inaccessibles aux engins peuvent représenter jusqu'à 90 % des zones traitées par le glyphosate aujourd'hui. En conséquence il serait alors nécessaire de recourir à du désherbage manuel permanent et prendre en compte l'exposition du personnel à de nouveaux risques notamment à des troubles musculosquelettiques.
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Pour des raisons identiques, le traitement thermique à la flamme est exclu. Une artificialisation en dur, par exemple en enrobés, serait un investissement coûteux et impliquerait une reconception complète du site avec certainement des incidences sur les superstructures.
5.3.4. Évaluations financières
Aucune évaluation financière d'une alternative non chimique n'a été menée compte tenu de son caractère irréaliste. Les gestionnaires de ces sites estiment le coût d'une substitution du glyphosate par un autre PPP à un facteur 6, compte tenu d'un coût plus important du produit et surtout de l'augmentation de la fréquence des interventions. Le coût passe à 10 fois le coût de référence pour des procédés mécaniques. En fonction de la taille et de l'activité des établissements, le surcoût peut approcher le million d'euros.
5.3.5. Le cas particulier des sites militaires
Le domaine public occupé par les armées est de 258 000 ha en métropole. Il y est appliqué environ au moins 15 000 l/an de produit à base de glyphosate. Les données disponibles ne concernant que 205 000 ha. Ce qui correspond à environ 5 500 kg de glyphosate, en prenant des produits dosés à 360g/l et une surface traitée de 1 400 ha. Les sites militaires à caractère industriel, par exemple les stockages d'hydrocarbures, sont soumis aux mêmes obligations que les ICPE même si leur inspection est interne au ministère de la défense. Certains sites sont encore plus sensibles, comme les dépôts de munitions vis-à-vis du risque incendie. Les clôtures sont également des installations encore plus sensibles que celles relevant du civil, sachant que de très grands espaces doivent être sécurisés comme les terrains de manoeuvre. Du glyphosate est employé, de manière analogue aux installations civiles, pour répondre aux mêmes contraintes. Les analyses précédentes s'appliquent ainsi tout naturellement aux sites militaires. En particulier l'entretien des zones à risques pyrotechniques et d'incendie avec des moyens mécaniques ou thermiques est exclu pour des raisons de sécurité. Par ailleurs aucune alternative non chimique n'est possible pour l'entretien de clôtures. Et suivant les armées, il en est de même des joints des pistes (les alternatives mécaniques et thermiques les détériorent dès le premier usage) et de certains dispositifs de sécurité sur les plateformes aéronautiques. Les espaces militaires sont aussi concernés par des référentiels culturels qui exigent un ordre et une propreté absolue. Ils trouvent à s'appliquer au premier chef aux places d'armes et autres lieux symboliques, mais également aux casernements et plus généralement à toutes les installations.
5.3.6. Questions collatérales à prendre en compte
En cas de basculement sur d'autres produits chimiques, la mission rappelle que les interrogations qui pèsent sur les effets d'une utilisation conséquente d'acide pélargonique et de sulfonylurées trouvent aussi à s'appliquer au secteur industriel vu les quantités en jeu et de la répétition de leur application.
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5.4. Les autoroutes, routes et rues
Le réseau routier français est constitué de 8950 km de réseau autoroutier concédé, de 12200 km de réseau routier national (RRN) qui comprend les autoroutes et voies rapides non concédées), de 376000 km de routes départementales (RD) et de 673000 km de voirie communale (VC). Si chaque réseau véhicule sa propre image, les caractéristiques techniques en sont éminemment variables. Certaines RD ou VC présentent des caractéristiques quasi autoroutières, comme le boulevard périphérique parisien qui est une VC. De plus, si la gestion du RRN est unique, celle des RD et des VC est assurée par autant de collectivités. La consommation d'herbicides sur ces réseaux ne peut ainsi qu'être estimée, même si les ordres de grandeur sont exacts.
5.4.1. Les différents maîtres d'ouvrage
5.4.1.1 Les autoroutes concédées Les autoroutes concédées, représentées par l'Association française des sociétés d'autoroutes (ASFA), consomment annuellement 5500 kg de produits phytopharmaceutiques dont environ la moitié de produits composés exclusivement ou partiellement de glyphosate, ce qui correspond à peu près à 0,06 kg de substance active annuellement utilisée par km de leur réseau. Les zones traitées sont les zones à enjeux pour la sécurité du personnel (situations à risque, zones de pente, position de travail, matériels dangereux de type taille-haies et avec des obligations liées à la visibilité de la signalisation et à l'entretien des ouvrages d'art). Cela concerne quasi exclusivement : Les terre-pleins centraux (TPC) qui doivent assurer en plus de la retenue des véhicules en cas de sortie de route - une signalisation visible, une accessibilité pour les ouvriers et un refuge. La sécurité est donc le premier motif du désherbage. Les dispositifs d'assainissement en TPC et en bord de chaussée notamment, au titre du maintien du patrimoine construit et de l'absence de retenues d'eau. Les sites techniques (radios, sous-postes électriques/transformateurs, ouvrages d'art dont certaines zones sont sensibles comme les perrés70) ; Les clôtures pour prévenir le passage des animaux. En cas d'accident avec des animaux, le juge recherche systématiquement la responsabilité de la société d'autoroute. En conséquence elles sont méthodiquement surveillées et entretenues. En effet les clôtures sont envahies en deux ans par la végétation spontanée. Les zones d'espèces invasives, pour lesquelles le glyphosate reste le recours le plus efficace.
Les bandes d'arrêt d'urgence, lorsqu'elles ne sont pas en enrobés, sont traitées par fauchage, comme les dépendances paysagères. Les aires de service et de repos pour lesquelles il y a un enjeu commercial fort font l'objet d'interventions chimiques ponctuelles.
70
Un perré est un revêtement en pierre sèche ou en pierre liée que l'on aménage au pied ou sur le flanc d'un talus sujet à des glissements ou d'une tranchée susceptible d'être dégradée par les eaux.
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Depuis les lois Grenelle de 2010, les sociétés d'autoroutes ont choisi d'engager des politiques volontaristes pour réduire massivement les consommations de PPP. Les sociétés d'autoroutes ont volontairement déclaré se soumettre à la loi Labbé, ses dérogations leur permettant de respecter leurs obligations, à l'exception de la société APRR qui considère que, comme privé concessionnaire, elle n'y est pas soumise. Dans les deux cas, il s'agit essentiellement d'une présentation, puisque la loi, au regard des exceptions qu'elle prévoit, ne fait que confirmer les pratiques ; à savoir une utilisation du glyphosate et des PPP seulement dans des situations très particulières au regard de la sécurité des personnels et des usagers (Ouvrages d'art, TPC etc.), l'entretien des dépendances vertes définies comme telles lors de la conception étant réalisé par fauchage. Une augmentation forte des accidents des personnels autoroutiers liés au balisage des chantiers est constatée sur les autoroutes concédées pour atteindre 187 accidents en 2017. Elle est attribuée à l'augmentation constatée de l'usage du smartphone au volant. Dans ce contexte, toute augmentation significative des interventions sur les autoroutes entraînerait une augmentation proportionnelle des accidents. Or, l'arrêt de l'emploi du glyphosate sans procédure dérogatoire, telle celle de la loi Labbé pour la sécurité, induira une augmentation et un allongement des chantiers pour la mise en oeuvre du désherbage mécanique, thermique ou manuel. Par exemple un balisage d'une durée de 1 jour peut alors se prolonger sur 4 jours en raison du nombre de passages nécessaires plus élevé, voire 10 jours ou plus en prenant en compte un temps plus long avec une méthode non chimique. Ce ne serait pas non plus sans conséquence sur le service rendu aux usagers. 5.4.1.2 Le réseau routier national Sur instruction de leur administration centrale, les gestionnaires du RRN appliquent depuis 2010 une politique volontariste de réduction de l'usage des PPP en général et en conséquence du glyphosate, pour passer au zéro-phyto. En 2018, 90 % des 220 Centres d'entretien et d'intervention71 (CEI,) ont déclaré ne plus utiliser de PPP. Ainsi la consommation de glyphosate, qui représente 95 % des PPP utilisés, est passée de 378 kg en 2015 à 101 kg en 2018. Ce glyphosate a servi à traiter un linéaire de 562 km le long des voies, bretelles et terre-pleins centraux sur une surface estimée à 83 ha. Six des sept Directions interrégionales des routes (DIR) ont consommé moins de 30 l chacune. La dernière en ayant utilisé 200 l, considérant qu'elle ne peut raisonnablement s'en passer au regard des termes de la loi Labbé. Les CEI font donc un usage très ponctuel pour traiter, comme sur le réseau autoroutier concédé, des zones difficiles d'accès ou trop dangereuses pour les agents ainsi que les ouvrages d'art. 5.4.1.3 Les routes départementales et la voirie communale Si le nombre de maîtres d'ouvrage du réseau routier national et des autoroutes concédées est limité, celui des routes départementales et de la voirie communale est considérable. Il n'a donc pas été possible à la mission de mener des recensements précis sur l'usage du glyphosate, les conditions de son utilisation, et les conséquences de son abandon.
71
Unités de base de gestion du réseau
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Toutefois, l'association des directeurs techniques des départements, métropoles et régions (ADTech) a réalisé un sondage à la demande de la mission sur les routes départementales. Seulement vingt-cinq départements ont répondu ; quatre y utilisent encore des PPP pour des raisons de sécurité, conformément aux possibilités ouvertes par la loi Labbé. Même si cela apparaît mineur, il n'est pas anecdotique de constater qu'un grand nombre d'entre eux laissent l'entretien de leur giratoire aux communes. Mais le taux de réponse au sondage est assez faible et il peut y avoir un biais dans les résultats. S'agissant de la voirie communale, aucun recensement ou sondage ne semble disponible, au-delà des entretiens menés par la mission. Enfin, encore plus que le réseau routier national, les réseaux départemental et communal sont extrêmement hétérogènes quant à leurs caractéristiques et conditions d'exploitation. Certaines sections sont quasi-autoroutières, avec des trafics extrêmement denses quand il s'agit de voies rapides urbaines, d'autres sont de « petites routes de campagne », d'autres enfin sont des rues de centre-ville avec des trottoirs. Les grandes tendances suivantes apparaissent cependant. Un certain nombre de départements et communes ont décidé d'arrêter d'utiliser des PPP par choix volontaire clairement affiché comme tel, avant la loi Labbé. Les procédés alternatifs sont mécaniques ou manuels, toutes les autres techniques s'étant révélées décevantes quant à leur efficacité, y compris la substitution du glyphosate par de l'acide pélargonique. Ces procédés nécessitent des mesures de sécurité adéquates. Les conséquences de l'arrêt du glyphosate déjà constatées pour les ouvrages d'art font émerger de fortes inquiétudes quant à leur pérennité à terme. Un surcoût est certain, mais il n'est pas calculé. Il peut se traduire ou non budgétairement, en fonction d'une externalisation éventuelle. Enfin l'achat de matériel supplémentaire est nécessaire. Une prolifération des plantes invasives (ambroisie, renouée du Japon notamment) est observée, possiblement liée à l'arrêt d'emploi des produits phytopharmaceutiques.
5.4.2. Un abaissement du référentiel
Hors autoroutes concédées, l'abandon des PPP entraîne une série d'inconvénients qui a conduit à un abaissement du référentiel. Sans préjuger des aspects quantitatifs, ces conséquences sont techniques comme dans le cas des ouvrages d'art, mais portent aussi sur la sécurité et le service à l'usager. 5.4.2.1 Les autoroutes concédées Les sociétés d'autoroutes, si elles ont une politique de réduction de l'usage des PPP, considèrent que l'on est sur une asymptote qui ne sera pas à zéro. En effet, les autoroutes concédées sont une exception car elles considèrent les PPP comme toujours nécessaires au respect de leurs référentiels. Ils renvoient non seulement aux enjeux de sécurité, au sens large c'est-à-dire y compris
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des biens à savoir les ouvrages d'art et certains sites techniques, mais également aux enjeux commerciaux liés en premier lieu au service à l'usager (neutralisations des voies considérablement allongées en temps) et également à l'apparence des lieux. 5.4.2.2 La sécurité et le service à l'usager Dans les zones actuellement traitées au glyphosate pour des enjeux de sécurité, le nombre de passes annuelles passerait de 1 à 4 avec des alternatives chimiques et à 10 avec des alternatives non chimiques, multiplierait dans les mêmes proportions le temps des chantiers, et donc le temps d'exposition, en conséquence les risques, et donc in fine les accidents, pour le personnel d'exploitation et pour les usagers des routes. Ce risque avéré est a priori plus élevé sur les voies rapides que sur les voies dont la limitation de vitesse est plus basse. Cependant la question de l'augmentation de ce risque se pose sur l'ensemble du réseau, et doit y être prise en considération. De la même manière, la multiplication des temps de chantier a un effet très néfaste sur le service à l'usager. Les études économiques évaluent le gain de temps comme déterminant à 80 % pour l'usager et son bénéfice. 5.4.2.3 Le cas des ouvrages d'art Les ouvrages d'art sont plus que tous autres, un lieu où la végétation n'a pas sa place, sauf le cas échéant dans des « jardinières » prévues à cet effet. Partout ailleurs, et parce qu'elle menace les constructions qui n'ont pas été prévues pour elle et qui ne peuvent d'ailleurs pas l'être -, elle doit être éliminée. Tous les gestionnaires questionnés soulignent les effets délétères observés à la suite de l'abandon du glyphosate sur les ouvrages d'art. Ils constatent déjà la présence de peupliers, figuiers et acacias, notamment, qui se sont rapidement développés et s'inquiètent des conséquences qui apparaîtront à échéance de très peu d'années. Ces conséquences structurelles nécessiteront des travaux d'importantes réparations programmées et qui devront être largement anticipés, la nature reprenant très vite ses droits. L'effet économique sur la durée de vie de ces ouvrages est substantiel alors qu'ils ont été conçus pour une durée a priori illimitée. 5.4.2.4 Les autres réseaux routiers Les gestionnaires des autres réseaux routiers signalent tous la nécessité de gérer l'acceptabilité sociale des nouveaux modes de gestion à « zéro-phyto », en expliquant que le fait de laisser des herbes à la vue des usagers ne signifie pas pour autant la mise en péril du patrimoine ou un abaissement de la sécurité. Néanmoins ces usagers vérifient par eux-mêmes au coeur de la maçonnerie des ouvrages d'art la présence de véritables arbres. Par ailleurs des bas-côtés d'herbes hautes ne permettent pas à l'usager de s'assurer lui-même de sa propre sécurité en cas d'arrêt d'urgence. En effet, il est constaté que la présence massive d'herbes sur les bas-côtés des routes favorise considérablement l'abandon de détritus de toute nature sur celles-ci. L'abandon de l'entretien d'un lieu, même seulement perçu, a un effet boule de neige bien connu qui s'observe notamment sur le réseau routier francilien.
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5.4.3. Limites des solutions alternatives
Les sociétés d'autoroute ont déjà conclu après quelques essais que les solutions alternatives au glyphosate étaient irréalistes. Sur le RRN, les CEI continuent à chercher de nouvelles solutions alternatives. En effet celles utilisées se limitent à l'extension du domaine d'emploi de techniques habituelles, mais avec un nombre de chantiers multiplié compte tenu des passages supplémentaires nécessaires et un temps de travail lui-même multiplié sur les chantiers. Elles nécessitent néanmoins des achats de matériels supplémentaires. Par ailleurs un mouvement général de minéralisation locale des abords des chaussées est observé. Mais ce mouvement est limité et s'effectue ponctuellement en fonction des disponibilités budgétaires et de la réalisation de chantiers plus importants. De l'acide pélargonique a été testé (notamment 65 l sur un site de 1000 m2 du RRN, et sur un réseau départemental), mais le retour d'expérience n'est pas suffisamment concluant pour y voir une solution fiable et pérenne sur le réseau routier. Il en est de même des techniques thermiques qui endommagent les supports et dont le rendement extrêmement faible fait qu'elles sont hors de portée des agents d'entretien. À noter que des CEI qui n'ont pas consommé de produit en 2018 envisagent d'en utiliser en 2019. Enfin tous les gestionnaires, depuis le niveau central jusqu'au niveau local observent les conséquences très négatives du passage au zéro-phyto, sur la sécurité des agents, sur le niveau de service et l'acceptation des usagers, sur la pérennité du patrimoine, et sur le coût des solutions alternatives, tant en entretien qu'en investissement. Ils relèvent que la maintenance de points pourtant ponctuels comme les ouvrages d'art et les clôtures sont essentiels. Si des constats analogues peuvent être faits sur le réseau routier départemental, l'appréciation de leur ampleur est plus variable, ce qui s'explique sans doute par les caractéristiques générales de ce réseau (ouvrages d'art notamment) et de son exploitation (trafic notamment), qui nécessitent le plus souvent sensiblement moins de recourir aux PPP.
5.4.4. Évaluations financières
5.4.4.1 Les autoroutes concédées Le chiffre d'affaires du secteur autoroutier concédé est de 10 G HT soit 12 G TTC. Sur 10 de péage HT, 1,20 est consacré à l'entretien et l'exploitation, soit environ un volume de 1,5 G. Aucune estimation du coût du passage à une alternative non chimique n'existe. Si des expérimentations de techniques alternatives non chimiques ont été menées à bien (par exemple thermiques), elles ont été limitées, car leur résultat est inadapté à une utilisation à grande échelle. En conséquence il n'a pas été procédé à des tests de marché avec des sociétés prestataires. L'ASFA ne dispose au niveau sectoriel d'aucun scénario alternatif mécanique/manuel/thermique aux PPP.
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Sur l'impact financier, l'ASFA souligne le caractère économique singulier des concessions qui par définition ont une fin. L'indicateur pertinent du contrat est donc celui de son taux de rentabilité interne (TRI) à sa fin. Une simple variation de TRI de 0,1 % est ainsi un enjeu énorme. Toute charge supplémentaire au titre des contrats de concession doit donc à son sens se voir compensée. D'un point de vue juridique, si l'usage du glyphosate restait autorisé dans d'autres ZNA, en particulier celles qui seraient plus consommatrices, il ne pourra être argué par le concédant que son interdiction est une mesure générale et à ce titre de droit commun, ne nécessitant pas un ajustement du contrat de concession. Un ajustement, quel qu'il soit, ne serait pas un précédent, puisque dans une situation analogue qui était bien alors une mesure générale, l'État a pris en charge le coût du changement des panneaux de limitation de vitesse à 80 km/h lorsqu'elle a été abaissée, quelle que soit leur domanialité. 5.4.4.2 Le réseau routier national La Direction des infrastructures de transport estime le coût total associé aux techniques alternatives sur le réseau à hauteur de 8 M/an. Elle pèse sur un budget de 800 M (hors salaires des 6000 agents d'exploitation) déjà insuffisant de 200 M (tel qu'évalué par un audit indépendant), et qui doit déjà porter la situation critique des ouvrages d'art. 5.4.4.3 Les routes départementales et les voies communales Hormis quelques exemples ponctuels peu généralisables et la mise en exergue de la nécessité d'investir dans du matériel supplémentaire spécifique pour le fauchage, aucune évaluation financière n'est disponible. Cela s'explique notamment par les caractéristiques de la gestion publique de ces réseaux.
5.4.5. Points de vigilance et questions collatérales à traiter
La proposition de loi Labbé a été votée après avoir fait l'objet d'un débat au parlement. À cette occasion, l'usage des PPP pour les routes et autoroutes publiques y a été réintroduit au motif de la sécurité. Or, le glyphosate est de loin le plus employé. Il y aurait donc une contradiction apparente à ce que, par une décision administrative qui ne manquera pas d'être contestée, une autorité indépendante revienne sur l'exception au motif de la sécurité d'une loi largement débattue, et qui plus est très récente.
Enfin, une interdiction du glyphosate aurait pour immanquable conséquence sa substitution, notamment pour les autoroutes concédées, par d'autres herbicides chimiques comme les sulfonylurées. Comme pour SNCF Réseau, l'usage significatif et répétitif de ces mêmes substances actives sur tout le territoire, présente l'inconvénient documenté dans la bibliographie de favoriser la sélection d'adventices résistantes, susceptibles de s'étendre aux zones agricoles.
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5.5. Les aéroports et installations liées au trafic aérien
Plus encore que d'autres sortes de ZNA, la variété des aéroports et des installations terrestres intéressant le transport aérien est considérable, depuis l'aéroport Charles de Gaulle d'Aéroports de Paris (ADP) jusqu'au plus petit des terrains de l'aviation légère de loisir. Il existe en France 160 aéroports publics commerciaux et 70 aéroports privés. Cette diversité ne permet pas que soient rapidement disponibles, même après enquête, des chiffres significatifs sur l'emploi et ses conséquences des PPP, et encore moins de glyphosate. Toutefois, la consommation de glyphosate semble être inférieure à 3 000 kg/an. Les aéroports représentent environ 50 000 ha dont 35 000 ha d'espaces verts non ouverts au public côté piste où se situent les enjeux techniques. A l'inverse, les enjeux commerciaux se concentrent sur le côté ville. Si les aéroports disposent de pistes qui sont de même nature qu'une chaussée et de bâtiments, ils sont surtout constitués de grandes étendues enherbées. Elles accueillent aussi des dispositifs d'aide à la navigation aérienne, incluant notamment les « Instrument landing systems (ILS) ». Les exigences du référentiel en matière d'aviation sont singulièrement différentes de celles des ZNA étudiées précédemment. Les zones enherbées des aéroports représentent d'abord une économie par rapport à une artificialisation lourde du terrain. Toutefois leur entretien doit répondre à des exigences précises. Cet entretien s'effectue par fauchage qui doit d'abord ménager une visibilité suffisante sur toute la plateforme. Mais il doit aussi ne pas mettre le terrain à nu, qui multiplie le risque aviaire en attirant les oiseaux à la recherche de vers de terre. Les dispositifs d'aide à la navigation qui y sont implantés sont en nombre limité. Ils sont dégagés des interférences de la végétation soit par du fauchage, soit par une artificialisation à leur entour, soit enfin par la pulvérisation de PPP contenant du glyphosate sur une zone limitée. Les exigences sur le fauchage jusqu'à 12 fois par an - ne rendent pas ces opérations significatives en temps passé supplémentaire de fauchage. De plus les conditions de ce fauchage, sur du terrain plat et dégagé, en dehors du trafic des avions, ne présente pas de risque supplémentaire des personnels. Sur les pistes, les joints entre les carrés qui les constituent sont sources du développement d'une végétation qu'il convient d'éliminer. Mais les pistes font désormais l'objet d'un balayage fréquent afin d'ôter tout objet pouvant dégrader les aéronefs. Il n'est donc plus nécessaire d'utiliser des herbicides et donc du glyphosate. En revanche la question des clôtures reste entière et celles-ci concentrent l'utilisation du glyphosate, même s'il n'est pas possible de distinguer le tonnage correspondant. En particulier leurs pieds doivent rester visibles pour des raisons liées à la sécurité. S'il existe une solution alternative qui consiste à bétonner le bas des grillages, elle est lourde à mettre en oeuvre, onéreuse car elle impose de changer la totalité de la clôture, et qu'elle ne peut s'envisager que comme un investissement à programmer. En conséquence, et à l'exception des clôtures, on doit pouvoir considérer que des alternatives non chimiques d'usage courant existent pour l'entretien des aéroports.
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5.6. Les gazons et les allées de structures non soumises à une concurrence commerciale
Il existe une très grande diversité de structures disposant de pelouses de jeux ou d'espaces verts avec leurs voies de desserte nécessitant un entretien.
5.6.1. Équipements sportifs
La France dispose de 50500 terrains de sports communaux engazonnés avec 43600 ha de gazon naturel dont les ¾ sont dévolus à la pratique du football72. L'entretien est encore possible par les produits phytopharmaceutiques, pour les espaces clos appartenant aux collectivités, et sans restriction pour les structures privées. Le nombre de communes ayant banni tous produits phytopharmaceutiques est aujourd'hui non négligeable. 28 % en Bretagne et 78 % en Île-de-France, selon la dernière enquête de l'IUA IdF73 où ces communes déclarent ne plus utiliser de pesticides dans la gestion des terrains de sport, ce qui témoigne de l'existence de solutions alternatives non chimiques à l'usage du glyphosate. Leur usage est cependant plus fréquent dans les communes urbaines ce qui est mis en relation avec une exigence accrue d'entretien pour les équipes de niveau élevé souvent issues de celles-ci. Pour celles faisant usage de produits phytopharmaceutiques, l'emploi du glyphosate est très probablement exceptionnel sur l'aire de jeu, lequel ne nécessite pas de désherbage total. Le sénateur Labbé, dans son interview (Annexe 5), indique : « Mais surtout, un terrain de foot ou de rugby ne se conçoit pas avec des pelouses pleines d'adventices pour la sécurité des joueurs. Vu le nombre de ces terrains sur le territoire, interdire l'usage des pesticides sans véritable solution alternative aurait été une erreur. » On peut imaginer qu'il perdure pour venir à bout des plantes invasives. Ou qu'il soit encore utilisé pour l'entretien des allées de desserte. Mais la contrainte ressentie de la loi Labbé et le caractère récent de cette contrainte, ainsi que les choix très variables des communes (certaines reviennent même sur leur choix) qui peuvent s'apparenter au choix délibéré de se positionner sur un micromarché tant en fonction des orientations de leur population, que de leur capacité financière, conduisent à rendre incertain une qualification d'usage courant. À noter qu'une des solutions en plein essor est le passage aux terrains synthétiques qui ne sont pas non plus dénués d'inconvénients. L'incidence économique d'arrêt du glyphosate sur le budget de la commune n'est pas mesurable compte tenu de la diversité des situations et de l'arbitrage politique qui y est étroitement attaché. Il impacte suivant les cas le budget de fonctionnement ou d'investissements (achat de machines, implantation d'un terrain de synthèse). Les témoignages recueillis par la mission mettent toutefois en avant une distorsion entre les grandes communes et les plus petites, ces dernières ayant nettement plus de difficulté à faire face à l'arrêt des produits phytopharmaceutiques. L'accompagnement des communes est à ce propos estimé primordial par des représentants locaux de DRAAF. Un point de vigilance s'impose, car il est reconnu que les difficultés s'accroissent entre la première année d'arrêt et la troisième. Or la loi Labbé n'offre que 2 ans de recul.
72 73
Information Plante et cité. Présentation en groupe de travail JEVI ; juin 2019 Note rapide de l'institut d'aménagement et d'urbanisme - Île-de-France. Environnement juillet 2019
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Il existe également des équipements sportifs avec des surfaces de jeux non engazonnés comme les boulodromes et hippodromes, utilisateurs potentiels de glyphosate, mais la mission n'a pas exploré ces éventuels micro-utilisateurs.
5.6.2. Autres structures
Aujourd'hui, tous les propriétaires privés ou collectifs (copropriétés) peuvent légalement faire traiter leur bien par du glyphosate en faisant appel aux professionnels des espaces verts. Ces traitements visent à entretenir les propriétés selon un référentiel culturel en plus de maintenir la praticabilité des allées. En effet, les résidents sont attentifs à l'apparence de leur lieu de vie. Ils ont toujours une mauvaise perception vis-à-vis de la présence d'adventices qui donne une impression de laisser-aller et d'abandon. Selon l'UNEP, il apparaît possible de supprimer encore quelques usages dans ce domaine sous réserve de changer le regard des clients et usagers en acceptant des adventices. Au regard de l'actualité, la mission signale la contradiction entre ces traitements dans des résidences et la démarche actuelle visant à adopter un décret et un arrêté interministériel destinés à éloigner des lieux d'habitation les traitements phytosanitaires réalisés par les agriculteurs.
5.7. Les gazons et allées de structures soumises à une concurrence commerciale
5.7.1. Les gazons de placage
Développé depuis une vingtaine d'années, le gazon de placage est un gazon naturel cultivé en gazonnière sur terrain naturel puis livré sous forme de rouleaux ou de pavés. La filière gazon de placage occupe environ 900 ha. Trois acteurs principaux produisent environ 50 % du total. Le restant est fourni par des pépiniéristes pour des utilisations locales (surfaces d'environ 6 à 10 ha). Une concurrence très importante est exercée par les producteurs hollandais, espagnols, italiens et portugais. Ils disposeraient de produits phytopharmaceutiques qui leur permettent d'avoir des gazons plus propres (moins de 1 % de pâturin annuel) et ainsi de répondre aux hauts standards des pelouses professionnelles avec un coût de production moindre. Il faut compter entre 14 à 18 mois pour obtenir du gazon, selon la période à laquelle il a été semé (printemps ou automne). Les semis sont réalisés sur un sol propre, soit parce qu'ils sont réalisés immédiatement après la précédente récolte, soit parce qu'il a été appliqué une demi-dose de glyphosate entre les deux semis, soit parce qu'on a pratiqué un faux semi avec application d'une demi-dose de glyphosate avant le dernier semis. En raison de la présence de chiendent, de graminées exotiques envahissantes, ou encore des «Plantain, Sétaire verte, Digitaire» (PSD), plus de 60 % de la surface (+- 20 % selon les années) aura été traité au glyphosate. Il n'existe pas de solution non chimique pour les terrains contaminés par du chiendent (le labour est contre-indiqué pour le chiendent qu'il contribue à propager). Pour les autres plantes envahissantes, le labour et d'autres produits phytopharmaceutiques sélectifs peuvent être envisagés.
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Selon les professionnels, sans glyphosate, la présence de chiendent conduira à stopper net la production sur les parcelles concernées. Pour les autres adventices, la disparation des traitements sélectifs entraînera petit à petit le déclin de la filière.
5.7.2. Les équipements sportifs collectifs à usage professionnel
La part des équipements sportifs de haut niveau n'est pas connue par la mission. À titre d'exemple, le stade de France c'est 11000 m² de surface engazonnée et 9000 m² de pelouse pure. Le modèle économique des stades repose essentiellement sur un partenariat public-privé (ou bail emphytéotique ou délégation d'exploitation...). Les collectivités restent propriétaires du stade, mais des opérateurs privés en assurent l'exploitation et la maintenance, puis mettent le stade à disposition des clubs qui reversent un loyer aux collectivités. Le règlement des terrains et installations sportives de la fédération française de football, par exemple, impose que l'aire de jeu permette le classement à tous les niveaux sous réserve de la qualité et l'uniformité de la couverture végétale, laquelle doit faire l'objet d'un entretien régulier. Pour les rencontres internationales, il est nécessaire de respecter les règlements en vigueur (pour le football, fixés par la FIFA, l'UEFA.). Pour le renouvellement de la surface de jeu, les référentiels revoient sur les professionnels du gazon pour replaquer un terrain (en général en situation de crise) ou l'ensemencer.74 ; on se retrouve alors dans la situation technique identique à celle du gazon de placage. Force est de constater qu'il n'existe pas d'alternative non chimique d'usage courant pour ces clubs professionnels, qu'ils concernent le football ou d'autres sports Par ailleurs, les conséquences économiques d'un arrêt du glyphosate sont délicates à évaluer au regard de l'extrême variabilité de la situation financière des structures, de leur niveau et de la variété de leurs ressources en fonction du sport considéré. Si pour le football, le CA généré par les 43 clubs professionnels de football français est chiffré à 2,1 G 75 ; toutefois, «la dynamique fabuleuse dont profitent quelques clubs ne doit pas masquer la réalité des autres clubs, de Ligue 2 notamment». Introduire une nouvelle dimension dans le catalogue des usages qui distinguerait des sports et/ou des niveaux de sport pour tenir compte des recettes des clubs pour délivrer ou non une AMM semble hasardeux au regard d'une coupure extrêmement difficile à établir et donc à justifier.
5.7.3. Les golfs
Il existe environ 700 golfs en France pour 33000 ha. La moitié est aujourd'hui gérée par des sociétés indépendantes et 16 % par des chaînes. Les golfs gérés par des associations (26 %) et les golfs gérés en régie par des collectivités (8 %) complètent le paysage. Un golf de 18 trous occupe une surface d'environ 60 ha dont 60 % sont des surfaces de jeu engazonnées entretenues. La croissance de l'offre a permis au golf de passer du statut de «sport d'élite» à celui de «sport loisir», pratiqué par près de 800000 personnes.
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Directives de l'UEFA en matière de qualité des terrains Gestion des terrains en gazon naturel .édition 2018 Baromètre des impacts économiques et sociaux du football professionnel Changement de rythme novembre 2017.
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Aucune donnée précise n'est fournie par les distributeurs pour glyphosate dans ce secteur, le golf étant englobé avec les autres usages. 700 à 800 litres sont évoqués par la profession. Sachant que les produits homologués ont une concentration variant de 360 g/l à 639 g/l cela pourrait être traduit par une fourchette allant de 250 à 500 kg par an. Le contexte réglementaire de plus en plus contraignant et la prise de conscience de la pression de l'opinion publique poussent de plus en plus de gestionnaires de golfs à tester ou développer des matériels et stratégies alternatives pour remplacer le glyphosate (désherbage manuel, à eau chaude, etc.). Cependant, l'usage du glyphosate au sein des golfs demeure essentiel pour maîtriser les espèces dites envahissantes : En traitement par taches, pour la maîtrise de graminées invasives d'origine tropicales, localisées ; Pour la destruction du gazon existant avant semis d'une nouvelle graminée plus résistante à la sécheresse et aux maladies. Lorsqu'il y a présence de graminées d'origine tropicale ou que la période de levées des PSD est effective, le glyphosate est le seul moyen de les contrôler efficacement et de réussir la conversion de flore.
Hors présence de ces plantes, une tonte très rase puis semis, avec parfois l'utilisation d'un régulateur de croissance est une alternative praticable. La transition sans glyphosate est en cours, mais pour y parvenir sans impacter négativement les exploitants, une solution chimique ou alternative est indispensable. Et sans doute, cette expérimentation est le fait des structures les plus riches, ce qui témoigne d'un phénomène du type micromarché. Force est de constater qu'il n'existe pas à ce jour de solution alternative non chimique d'usage courant.
Leur CA est extrêmement variable de même que leur santé économique, très hétérogène : Une étude de 2018 sur le poids économique mentionne 44 % des golfs commerciaux et 32 % des golfs associatifs ou gérés en régie déclarent une rentabilité nette négative76.
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Les enjeux économiques du golf en France septembre 2018
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Sans surprise, les plus petites structures sont les plus fragiles économiquement (CA moyen de 131 k contre 978 k pour les plus grosses structures). L'impact économique sur l'interdiction du glyphosate n'est pas chiffrable et dépend éminemment du degré d'utilisation actuel et de la santé économique de la structure. Et là encore le maintien ou non d'une AMM en fonction de considérations économiques semble hasardeux.
5.7.4. Les parcs privés ouverts au public
Ils ne sont pas concernés par la loi Labbé et peuvent donc avoir recours à du glyphosate à travers des prestataires agréés. Toutefois, selon l'organisation Vielles Demeures Françaises, les jardins privés ouverts au public se sont orientés depuis plusieurs années, tout comme les jardins du patrimoine public, vers des solutions alternatives et ne traitent plus les allées avec un produit chimique conventionnel. Selon le ministère de la culture, en regard de sa vision sur son propre patrimoine, l'impact d'un arrêt du glyphosate est probablement faible. Ceci est lié à un référentiel qui évolue pour s'adapter aux nouvelles contraintes que ce soit en termes de main d'oeuvre ou de disponibilité de produits phytopharmaceutiques. Il est possible d'en déduire que l'usage de méthodes alternatives non chimique est courant et a été adopté sans inconvénient économique majeur pour ceux qui les mettent en oeuvre. Néanmoins, la mission n'a pas recueilli d'éléments chiffrés sur le coût que représente le non-usage des produits phytopharmaceutiques dans ces espaces ni l'impact sur leur modèle économique. Elle ne peut exclure que l'arrêt du glyphosate ait un impact important pour certains propriétaires.
5.7.5. Les exigences commerciales des autres établissements soumis à concurrence
D'autres établissements/structures ont une exigence vis-à-vis de leur présentation, même en l'absence de référentiel réglementaire et technique. On est purement dans du référentiel culturel qui veut qu'une entreprise qui fonctionne bien ne présente pas de «laisser-aller» ne serait-ce que du côté des végétaux sur leurs gazons ou voies de desserte. Elles font appel à des entreprises du paysage ou disposent des agréments nécessaires pour traiter par elles-mêmes (ex. : organismes HLM). L'arrêt du glyphosate augmenterait le coût du traitement de 5 à 10 fois, sauf à reconcevoir les espaces et à acculturer les usagers à ce nouveau paradigme. Vu la diversité des structures, il est impossible de chiffrer l'impact économique.
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5.8. Les cimetières
Les cimetières représentent un cas particulier parmi les zones non agricoles en raison des attentes des citoyens à l'égard du respect dû aux personnes décédées. Ainsi, les cimetières constituent une exception à l'interdiction d'emploi des produits phytopharmaceutiques de synthèse prévue par la loi Labbé. Il s'agit bien souvent du dernier espace à passer en «zéro phyto». La France métropolitaine compte 40000 cimetières dont 95 % avec moins de 1,5 ha pour une surface totale de 20000 ha77. La commune doit assurer la gestion des parties communes tandis que les concessions sont à la charge des familles. Les cimetières ont des caractéristiques bien particulières, car leur espace est très morcelé. Le coût moyen d'entretien est de 3500 par ha avec une médiane à 2261 . Le temps d'entretien varie de selon le type d'ambiance générale78, avec une valeur médiane de 460 à 730 h/ha/an (les valeurs maximales correspondent aux communes sans pesticides). Dans son étude79 sur plus de 233 collectivités, Plante & Cité rapporte que 35 % des communes ont en 2017 eu recours aux produits phytopharmaceutiques, en majorité des herbicides de synthèse. Néanmoins, les petites communes de moins de 10000 habitants sont sous-représentées dans l'enquête. L'Institut d'aménagement et d'urbanisme de la région Île-de-France (IAU îdF)80 identifie que seulement 27 % des communes (échantillon de 690 communes sur un total de 1276) ont encore recours aux produits phytopharmaceutiques pour leur cimetière. Compte tenu des usages en ces lieux, nous pouvons estimer que 90 % des utilisations portent sur des produits contenant du glyphosate. Au vu de ces deux enquêtes, nous pouvons considérer qu'une part des cimetières en France ne sont plus désherbés avec du glyphosate. Ces derniers peuvent avoir fait l'objet d'une reconception et d'un réaménagement destinés à limiter les travaux d'entretien, soit avec une végétalisation partielle (gazon, plantes couvrantes, végétation spontanée..., même si les allées restent en gravillons pour rester praticables en temps de pluie), soit avec une minéralisation du site, soit avec une combinaison des deux approches selon les zones de l'espace. Une augmentation des coûts d'entretien est observée, notamment avec les opérations de tonte et d'arrachage manuel qui restent nécessaires. Dans les cimetières qui continuent à employer du glyphosate, les méthodes alternatives ont été freinées par les problèmes de surcoût en main d'oeuvre et en équipement, par la pénibilité du travail, par manque de matériel adapté et par la qualité insuffisante du désherbage. Concernant le recours aux méthodes alternatives non chimiques, nous pouvons estimer que : dans les cimetières aménagés (qui ont de fait été réaménagés et qui ont supposé de fait un investissement) pour limiter le développement des mauvaises herbes et entretenus sans glyphosate, elles sont d'un usage courant, tout en sachant que les besoins de maîtrise des adventices restent importants et que les allées, qui restent gravillonnées pour des motifs de praticabilité, posent toujours des difficultés d'entretien ;
77 78
Source info : plante et cité p.36/37 Sont en général distingués les cimetières paysagers, enherbés et arborés, arborés, enherbés, mixtes avec une partie minérale et une végétale, minéral 79 Paysage et entretien des cimetières. Plante&Cité ; novembre 2017 80 https://www.iau-idf.fr/fileadmin/NewEtudes/Etude_1833/NR_814_web.pdf
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dans les autres cimetières, traités avec du glyphosate, les méthodes alternatives non chimiques ne sont pas d'un usage courant. Enfin, l'entretien d'un certain nombre de cimetières est limité compte tenu des contraintes, certaines communes renvoyant même implicitement ou explicitement cet entretien aux particuliers. L'impression peut être celle d'un abandon aux «mauvaises herbes».81
Il existe donc des alternatives à l'usage du glyphosate, mais elles ont des incidences qui peuvent être importantes en termes de budget de fonctionnement ou d'investissement sans que le caractère majeur ou non puisse être quantifié compte tenu de la diversité des situations., même s'il apparaît que les conséquences (investissement, abandon, ou transfert aux particuliers) sont manifestement inhabituelles pour la commune considérée. Le législateur en 2014 a choisi de ne pas appliquer la loi Labbé aux cimetières après avoir fait l'objet d'un débat nourri au parlement. Le sénateur Labbé confirme (cf. son interview parue en juillet 2018 dans la revue professionnelle « En vert et avec vous » : en Annexe 5) que le maintien de ces lieux dans le même état que celui antérieurement constaté résultant des pratiques antérieures n'est pas atteignable, bien au-delà même d'une question de budget ou d'effort humain. De surcroît, si la décision administrative de suppression de l'usage du glyphosate dans les cimetières n'est pas parfaitement justifiée, elle serait susceptible d'être contestée par voie politique compte tenu de la contradiction entre la loi et cette décision.
5.9. Les clôtures
Le cas des clôtures permet d'illustrer la complexité du sujet pour conserver une logique d'ensemble dans la mise en oeuvre de l'article 50.2. En effet, sans être une activité économique en ZNA, elles sont un objet technique commun a un grand nombre de ces activités82, dont la présence est parfois requise par la réglementation, comme c'est le cas notamment pour les voies ferrées et les points d'importance vitale83, et requise par la jurisprudence comme c'est notamment le cas pour les autoroutes84. Ces clôtures sont envahies par de la végétation, ligneuse en particulier. Or non seulement elles doivent assurer leur fonction, mais de plus elles doivent pouvoir être facilement contrôlées visuellement, et en particulier les pieds de clôture pour en relever les brèches éventuelles.
81 82
Toulouse : sans pesticide c'est la jungle. La dépêche.fr. 05/09/2019Gilles-R. Soulliés Les utilisateurs de clôtures sont très nombreux. Parmi ceux-ci : la SNCF, les autoroutes, les sites ICPE, les poste de transformation RTE, les aéroports. Définis au titre de la législation et la réglementation sur les secteur d'activité d'importance vitale. Parce qu'elles concourent à la production et à la distribution de biens ou de services indispensables à l'exercice de l'autorité de l'État, au fonctionnement de l'économie, au maintien du potentiel de défense ou à la sécurité de la Nation, certaines activités sont considérées comme « d'importance vitale ». La responsabilité des gestionnaires est systématiquement engagée en cas d'accidents de la route consécutifs au heurt d'animaux errants dans l'emprise de l'autoroute.
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De plus, certaines sont équipées de dispositifs de sécurité qui compliquent leur entretien : Des barbelés gênant toute intervention manuelle ; Des alarmes dont le détecteur doit être proche du sol. Certains systèmes sont déclenchés par la pousse de végétation.
De fait, le seul usage courant pour l'entretien de ces clôtures est le glyphosate. Un entretien mécanique n'est évidemment pas suffisant et le coût d'un éventuel entretien manuel dépasserait encore le facteur 10 relevé précédemment. Aux difficultés techniques s'ajoutent en effet, des difficultés d'ordre sécuritaires et logistiques (difficultés d'accès au site, accessibilité du matériel, protocoles d'entrée longs, travailleurs isolés dans des zones dangereuses, etc.), et de fait, d'ordre économique. Pour un entretien sans produits chimiques, les passages sur ces sites seraient à l'année de l'ordre de 30 ou 40. Renchérissant au moins d'autant le coût d'entretien. Par ailleurs, les tonnages correspondant à cette utilisation spécifique sont manifestement très faibles, alors qu'ils sont de plus impossibles à appréhender. Ainsi l'emploi du glyphosate pour les clôtures relève assurément d'un usage mineur. Et son usage doit continuer à rester possible avec du glyphosate, indépendamment du secteur d'activité auquel la clôture est destinée.
5.10. Le patrimoine historique bâti
La France compte 44 000 monuments historiques protégés ; 3% seulement appartiennent à l'État et à ses différents ministères (une faible proportion est gérée par le ministère chargé de la culture, essentiellement des parcs), 50% aux collectivités territoriales et sont en grande majorité des églises ; le restant est entre les mains de personnes privées. Mais il existe un beaucoup plus grand nombre de monuments d'intérêt patrimonial qui n'est pas protégé. Les propriétaires-gestionnaires désireux de préserver et mettre en valeur leurs monuments, notamment dans une démarche d'accueil du public sont amenés à utiliser le glyphosate essentiellement pour l'entretien des allées des jardins ou des cours ainsi que pour la préservation des éléments bâtis type douves à sec, murs, enceintes ou ruines particulièrement touchées par la végétation spontanée. Cette végétation a des effets destructeurs sur les vieux murs ce que rappelle par exemple l'appellation familière de la linaire cymbalaire, plante vivace herbacée rebaptisée « ruine-de-Rome ». Néanmoins aucune estimation des consommations de glyphosate ne peut être avancée.
S'agissant du bâti, le ministère de la culture dans son manuel de sensibilisation à la restauration de la maçonnerie éditée en 2006 fait mention de l'emploi d'herbicide commercial. Les préparations à base de glyphosate sont probablement prépondérantes au regard du marché correspondant, même si le terme n'apparaît pas, une autorité publique ne pouvant privilégier un produit. La mission n'a pu identifier aucune méthode alternative en entretien au glyphosate.
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Pour les travaux de rénovation qui dépassent l'entretien et réalisés par des entreprises sélectionnées, les maîtres d'oeuvre spécialisés en restauration du patrimoine bâti prescrivent un désherbage manuel avant de rejointoyer les pierres pour avoir la certitude d'éliminer tout matériel biologique et toute humidité interne.
Le désherbage manuel nécessite généralement le recrutement d'un ou plusieurs jardiniers à mi-temps ou à plein-temps, selon les surfaces concernées et les saisons. L'enveloppe moyenne des dépenses actuelles est estimée par une association de propriétaires privés entre 5 000 et 15 000 par an selon les cas. Les écarts s'expliquent notamment par le fait que, s'agissant des allées des jardins et cours de demeures historiques, la fréquentation du public est un facteur essentiel. En effet le piétinement est le moyen le plus sûr et le plus économique d'élimination de la végétation. Le désherbage mécanique nécessite outre du temps homme, un investissement en matériel adapté. À titre d'exemple, il faut compter environ 2 000 pour un matériel thermique et 3 à 5 000 pour un matériel mécanique. Mais l'un et l'autre sont inefficaces sur les éléments bâtis (douves, murs d'enceinte ou ruines) ou difficilement accessibles, ou dans les espaces non bâtis dont la topologie ne permet pas le passage dudit matériel. En tout état de cause, les propriétaires-gestionnaires sont désireux que soient mises au point des techniques nouvelles et attendent des conseils de l'État. Ces coûts peuvent être mis en relation avec la faiblesse des recettes générées par la visite du public lorsqu'elles existent. L'activité d'ouverture au public est déficitaire pour la plupart des monuments historiques. Aussi, un éventuel coût supplémentaire généré par le non-usage du glyphosate serait une charge supplémentaire directe, d'autant que les propriétaires-gestionnaires ne peuvent s'exonérer de l'entretien des éléments bâtis ou des parcs et jardins. En effet la Charte de Venise (1964) rappelle dès son article 4 que « La conservation des monuments impose d'abord la permanence de leur entretien ». L'absence d'entretien courant risque d'entraîner la disparition des monuments et jardins, ou d'imposer des travaux de restauration substantiels pour en permettre la réhabilitation, travaux davantage coûteux. Cette dialectique entre entretien et travaux de conservation apparaît clairement au ministère de la culture qui regrette que l'entretien courant soit délaissé en général ce qui impose ensuite d'intervenir et de subventionner les travaux nécessaires pour la conservation. Le cas des remparts de Dinan est éclairant à cet égard puisqu'après un désherbage chimique en 2002, une partie des remparts s'est écroulée en 2013 suite à un entretien défectueux. Il n'est pas douteux qu'un renchérissement du coût de l'entretien conduise à une baisse du volume de celui-ci. En toute logique s'appliquerait aussi aux monuments une dérogation au titre de la sécurité des biens, à l'instar des ouvrages d'art et des infrastructures même si le référentiel est implicite.
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6. PISTES DE REFLEXION DANS LE CADRE DE L'ARTICLE 50
Sans préjuger de l'interprétation finale sur l'évaluation comparative qui appartient à l'ANSES, la mission a souhaité examiner les conditions souhaitables d'un retrait des produits phytopharmaceutiques à base de glyphosate dans les ZNA dans le cadre de l'article 50. Les paragraphes ci-dessous développent des préoccupations sur trois points : le morcellement de la réglementation ; la cohérence avec le contenu de la loi Labbé ; les enjeux liés à la sécurité de personnes et des biens et les enjeux culturels.
Sur le premier point, les limitations ciblées au sein des usages risqueraient d'aller à l'encontre d'une réglementation lisible, compréhensible et cohérente. Il faudrait en effet prévoir dans les AMM des traitements différents en fonction du secteur d'activité considéré pour des utilisations sur des objets techniques pourtant analogues. Ni les risques juridiques que porterait une telle réglementation, ni la complication pour les gestionnaires ni le volume de travail à fournir par l'ensemble des acteurs ne semblent en rapport avec les très faibles quantités en jeu.
Sur le second point, la loi Labbé est une dimension supplémentaire à prendre en compte, notamment à l'égard des cimetières, les terrains de sport et des propriétés des particuliers. La loi Labbé et la délivrance des AMM suivent deux logiques différentes, ce qui complique leur articulation : la loi Labbé, déjà complexe, est structurée par la considération des collectivités publiques et par l'accessibilité du public ; les AMM ne portent que les usages sur la base d'une analyse de risque normalisée par des textes communautaires. Ainsi, les AMM ne sont pas modulées selon l'accessibilité ou non du public85. En effet l'impact d'une substance sur les tiers, riverains ou passants, est déjà pris en compte en amont dans les études préalables aux AMM conformément aux règles qui président aux évaluations. L'article 50 ne permettra pas de surmonter cette difficulté car il ne fait pas de « l'accès au public » un critère discriminant de l'évaluation comparative.
La juxtaposition de ces deux logiques risque de faire apparaître des contradictions dans les effets de la loi. Ainsi, une limitation d'AMM qui ne prévoirait pas l'utilisation de glyphosate pour chacune de ces utilisations encore permises par la loi Labbé, par exemple dans les cimetières viderait la loi de son contenu sur ces points. De même, des AMM qui ne comporteraient pas une utilisation pour les routes au motif de la sécurité rendraient inopérante la dérogation prévue par la loi.
85
Sachant que l'accessibilité de l'espace public considéré reste toujours sous la maîtrise de la collectivité, en particulier pendant une éventuelle pulvérisation.
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Sur le troisième point, la mission souligne que les quantités en jeu représentent moins de 1,5 % des ventes de produits à base de glyphosate. Ceci est à rapprocher de l'exigence fixée par l'alinéa d) de l'article 50.1. (déclenché par l'article 50.2. dans le cas du glyphosate) qui dispose « que les conséquences sur les utilisations mineures sont prises en compte ». À ce titre, il semblerait possible d'interdire de façon générale des utilisations de produits, mais d'en conserver certaines dès lors qu'elles sont mineures. S'il est souhaité de rester cohérent avec la loi Labbé, une réflexion peut être conduite pour maintenir l'emploi de produits à base de glyphosate pour répondre au motif de la sécurité des personnes et des biens et pour des motifs culturels. Ce dernier terme peut être entendu comme l'ensemble des emplois phytopharmaceutiques encore permis par la loi Labbé. Tous les usages spécifiques en ZNA étant d'ores et déjà classés comme mineurs dans le catalogue national des usages, ce dispositif respecterait à ce titre l'article 50.
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7. APPUI PAR LA RECHERCHE PUBLIQUE
7.1. État des lieux
Lors de ses entretiens sur les alternatives non chimiques au glyphosate dans les zones non agricoles avec les acteurs concernés, la mission a noté le thème récurrent de la faible attractivité de ce domaine pour la recherche privée et la recherche publique. Le marché des zones non agricoles est trop restreint pour motiver la recherche privée et l'inciter à inventer des solutions spécifiques, tout en espérant un retour sur investissement satisfaisant. En pratique, les innovations sont en premier lieu destinées aux zones agricoles ou au secteur industriel, puis un transfert vers les zones non agricoles peut être envisagé. Dans le cas des chemins de fer, il n'y a pas de modèle transférable depuis ce secteur vers les zones agricoles. Les principaux acteurs de la recherche publique dont les travaux peuvent donner lieu à des transferts vers les ZNA sont les suivants : l'Institut national de la recherche agronomique (INRA), dans le domaine de la recherche agronomique. Les zones non agricoles ne font pas partie de son périmètre d'action, mais des alternatives mises au point pour les zones agricoles peuvent faire l'objet d'un transfert vers les ZNA. l'Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (IRSTEA). Ses travaux dans le domaine du machinisme et des robots autonomes se rapprochent des problématiques rencontrées dans les ZNA. Ainsi, l'IRSTEA est en relation avec la SNCF sur les questions de désherbage des voies ferrées.
Au 1er janvier 2020, l'INRA et l'IRSTEA fusionneront pour créer un Établissement public à caractère scientifique et technologique dans les domaines de l'agriculture, de l'alimentation et de l'environnement.
7.2. Les besoins des acteurs et les pistes de recherche
7.2.1. Besoins en produits phytopharmaceutiques alternatifs
La recherche de produits alternatifs aux pesticides de synthèse est réalisée par les entreprises privées, notamment sous la forme de startups, en vue d'une demande d'autorisation de mise sur marché auprès de l'ANSES. Les produits de biocontrôle bénéficient d'un cadre réglementaire favorable à leur développement, notamment à la suite de la loi EGALIM. Mais, actuellement, il y a peu de solutions de biocontrôle pour la lutte contre les mauvaises herbes (voir Annexe 4). Des travaux de recherche et développement sont conduits par exemple sur la radulanine A86, une substance une substance naturelle contenue dans les hépatiques, des mousses végétales. Toutefois, les acteurs rencontrés par la mission ne prévoient pas l'arrivée à court terme d'herbicides avec des qualités très supérieures à celles des produits de biocontrôle déjà présents sur le marché.
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Un nouvel herbicide d'origine naturelle. Bastien Nay Chercheur CNRS. http://www.cnrs.fr/fr/un-nouvel-herbicide-dorigine-naturelle. Consulté le 15 octobre 2019.
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Dans le récent rapport87 de l'Assemblée nationale sur l'état des lieux du biocontrôle, il est souligné que ces produits ne répondent pas encore à toutes les attentes des utilisateurs, et qu'un soutien des autorités publiques est nécessaire, notamment pour la recherche et le développement. Le rapport88 du CGAAER sur le développement des produits de biocontrôle a réalisé le constat suivant : « La recherche publique a surtout vocation à affiner la compréhension des interactions qui permettront un développement efficace des solutions de biocontrôle. Il s'agira en particulier d'acquérir des connaissances sur les mécanismes biologiques à l'origine des interactions entre plantes cultivées, organismes nuisibles, agents de biocontrôle et les milieux. À ce titre, l'utilisation de toutes les ressources de la biologie moderne (génomique notamment) sera utile pour mieux approcher le fonctionnement de milieux biologiquement complexes comme, par exemple, le microbiote des sols cultivés ». Ainsi, une incitation de la recherche publique (CNRS, INRA) pour travailler dans le domaine des interactions entre les végétaux, du jeu d'acteurs et de la mise au point de méthodes d`évaluation permettrait d'accélérer la mise sur le marché d'herbicides de biocontrôle, à la fois pour les zones agricoles et non agricoles. La liste des produits phytopharmaceutiques à faible risque au sens du règlement 1007/2009 ne contient actuellement aucun herbicide (voir Annexe 4). Il s'agit de produits de lutte biologique (bactéries, champignons microscopiques), de stimulateurs de défense naturelle et de phosphate ferrique. Les interlocuteurs de la mission n'ont pas laissé espérer l'arrivée prochaine de produits à faible risque destinés au désherbage. Des travaux de recherche fondamentale pourraient déboucher à long terme sur des méthodes de lutte biologique contre les adventices, mais elles nécessiteront des études spécifiques pour évaluer les risques pour la biodiversité.
7.2.2. Besoins en pulvérisation ultralocalisée pour réduire les quantités
Les produits de biocontrôle herbicides présentent des volumes d'application élevés et ils sont onéreux. Ils peuvent être appliqués aussi en mélange avec un herbicide chimique antigerminatif pour élargir leur efficacité. Outre les enjeux de santé publique et environnementaux, les opérateurs ont tout intérêt à réduire les quantités appliquées. L'innovation dans les techniques de pulvérisation d'herbicides devrait permettre d'éviter de réaliser des applications en plein, au profit de traitements ultralocalisés uniquement sur les adventices présentes. Des dispositifs sont expérimentés par la recherche privée et la recherche publique (IRSTEA), combinant sur du matériel de pulvérisation : un GPS, des caméras et un système de détection des mauvaises herbes, voire plus tard d'identification de ces adventices. Ces travaux portent sur les zones agricoles et les voies ferrées de la SNCF. Une fois ces dispositifs opérationnels, un transfert vers les zones non agricoles peut être envisagé, notamment pour équiper des camions spécialisés dans les travaux de pulvérisation.
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Rapport fait au nom de la Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire sur le projet de loi, après engagement de la procédure accélérée, de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2018 (n° 1947), par M. Joël GIRAUD, rapporteur général, député. Annexe n°5, agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales : sécurité alimentaire. Rapporteur spécial : M. Michel LAUZZANA, député. 5 juin 2019. http://www.assemblee-nationale.fr/15/rapports/r1990-a5.asp. Consulté le 24 septembre 2019. 88 Les produits de biocontrôle pour la protection des cultures. Jean-Pierre Chomienne, Sylvie Dutartre, Michel Larguier, Didier Pinçonnet, Robert Tessier. CGAAER. 2017.
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La recherche publique peut appuyer le développement de ces travaux, mais la problématique spécifique des ZNA ne pourra être prise en compte que lorsque le transfert technologique sera envisageable. Les ZNA pourront alors bénéficier des capteurs et des dispositifs de détection et d'identification développés pour les zones agricoles.
7.2.3. Besoins en matériel de désherbage mécanique
L'interdiction d'emploi des produits phytopharmaceutiques contenant du glyphosate pourrait entraîner dans plusieurs domaines un recours accru au désherbage mécanique. Or, des interlocuteurs de la mission ont signalé la faiblesse de l'offre en matériel adapté à leurs zones d'intervention, avec des contraintes importantes d'accès, de poids, et de pénibilité du travail pour les employés. L'INRA et l'IRSTEA travaillent sur le thème des liens entre les agroéquipements et l'agroécologie. Mais la recherche et le développement du matériel pour le désherbage mécanique reviennent aux entreprises de machinisme. La mission a dû constater leur peu d'empressement. Sans doute considèrent-elles que le marché est d'une part extrêmement limité ce que montre le classement en usage mineur des usages du glyphosate en ZNA et les quantités estimées -, d'autre part extrêmement morcelé.
7.2.4. Besoins pour réduire la pénibilité du travail
La pratique du désherbage manuel et du désherbage mécanique pourrait également augmenter à la suite de la limitation ou de l'interdiction du glyphosate. Or, plusieurs employeurs de main d'oeuvre ont signalé la pénibilité du travail dans leurs périmètres d'intervention : postures malcommodes, travail répétitif, risques de troubles musculosquelettiques, manutention de charges, risques liés à l'hygiène et à l'incivisme dans la voirie, zones difficiles d'accès dans les sites industriels avec des risques électriques ou d'incendie... Dans les entreprises spécialisées dans les travaux de maîtrise de la végétation, les possibilités d'étalement et de partage de la pénibilité grâce à la planification du travail sont limitées. Le domaine de l'ergonomie appliquée au désherbage manuel ou mécanique paraît peu développé. Par ailleurs, le problème de la pénibilité du travail et de l'ergonomie se pose également pour les autres méthodes non chimiques. À titre d'illustration des travaux sur ce thème, l'Annexe 7 présente un système de harnais destiné à l'amélioration de l'ergonomie pour un désherbeur thermique. La recherche dans les domaines médicaux et industriels travaille sur des projets d'exosquelette d'assistance à l'effort. Selon l'Institut national de recherche et de sécurité89 (INRS) pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles : « De nombreuses entreprises sont aujourd'hui tentées par l'acquisition d'exosquelettes. Avec l'objectif d'assister les salariés lors de la réalisation de certaines tâches, leur usage fait naître un espoir légitime d'améliorer les conditions de travail grâce à la réduction de la charge physique et des risques de troubles musculosquelettiques (TMS). Bien que les exosquelettes s'implantent le plus souvent dans les entreprises sous forme de prototypes ou de premières versions à parfaire, les concepteurs et intégrateurs annoncent leur
Dossier exosquelettes : ce qu'il faut retenir. INRS. http://www.inrs.fr/risques/exosquelettes/ce-qu-il-faut-retenir.html. Consulté le 24 septembre 2019.
89
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volonté de déployer rapidement ces nouvelles technologies dans les années à venir. »
Si l'emploi des dispositifs d'assistance physique se banalise dans les entreprises, un transfert vers les opérateurs en zones non agricoles sera à envisager. L'innovation dans ce domaine est toutefois soutenue par les sociétés privées, qui en sont plus à un stade de développement que de recherche. Il est cependant à noter que les exosquelettes, de par leur conception même, continuent à « employer » un être humain et qu'il n'agit qu'à la vitesse de ce dernier. En conséquence, la question de la productivité reste entière.
7.2.5. Besoins en automatisation
Les entreprises confrontées à une pratique accrue du désherbage manuel et mécanique ont signalé à la mission leurs difficultés pour recruter et conserver leur personnel, en raison de la pénibilité accrue du travail. Dans le domaine agricole, une alternative aux problèmes de main d'oeuvre se présente sous la forme de robots désherbeurs autonomes. Un projet de développement est constaté avec la société VITIROVER et la SNCF. Le dispositif de VITIROVER est fondé sur des robots désherbeurs autonomes qui pratiquent la tonte des adventives. Le système a pour le moment été déployé à petite échelle sur des parcelles de vigne. Des expérimentations sont en cours en vue du désherbage des pistes -auxquelles il devrait se limiter- longeant les lignes à grande vitesse de SNCF Réseau.
Là encore, le déploiement des robots autonomes dans les zones agricoles devra permettre d'élargir les transferts de technologie vers les zones non agricoles, au-delà du cas particulier du chemin de fer. La recherche dans ce domaine est dynamique et elle est portée par des sociétés privées. Toutefois, les obstacles à lever pour les entreprises mettant au point ces appareils concernent principalement des ressources financières plutôt qu'un appui par la recherche publique.
7.2.6. Besoins en technologie de rupture
Au-delà de l'amélioration continue des technologies existantes, un besoin est exprimé pour des technologies radicalement différentes. Pour ce qui est de ces technologies de rupture, la mission a pu constater que beaucoup d'interlocuteurs ne pensent pas que celle-ci puisse venir d'une nouvelle substance active qui aurait les mêmes qualités agronomiques que le glyphosate.
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Le traitement électrique est un exemple de ces technologies de rupture. Cette technique est étudiée depuis fort longtemps pour le désherbage90, mais elle n'a jamais été déployée jusqu'à présent de manière industrielle. Le désherbage haute tension vise à agir comme le glyphosate avec une action systémique : il vise à détruire les parties aériennes et racinaires par conduction en éclatant des cellules. Le résultat est fonction du nombre de watts absorbés par la plante, lequel dépend de nombreux paramètres dont une durée de contact minimale de la plante avec une des deux électrodes, l'autre étant au contact du sol. Mais dans ces conditions, les plantules situées audessous du niveau de la première électrode ne sont pas touchées. Le contrôle de la puissance nécessaire pour atteindre les racines est délicat et le résultat encore aléatoire sur ces dernières. Enfin, le contact avec les plantes suppose un certain développement de celles-ci qui n'est pas toujours compatible avec les objectifs en ZNA. Ce traitement ne peut donc même s'envisager que sur un terrain plat, et n'est en aucun cas possible pour les ouvrages d'art, murs, etc. L'IRSTEA associé avec quatre partenaires dans le consortium WeedElec développe un «robot de désherbage localisé par procédé électrique haute tension combinée avec une gestion prédictive par vision hyperspectrale et post évaluation par drone»91. Au Brésil92, l'entreprise Zasso a développé une technologie. Elle y dispose d'une trentaine de matériels fonctionnant en ZNA sur route et autoroute, pour traiter les bas-côtés enherbés. Elle travaille avec les instances allemandes pour obtenir les certificats nécessaires à la mise sur le marché européen. Leur matériel avance de 3 à 5 km/heure en zone agricole, et de 10 km/h sur les voies ferrées (test en Allemagne), permet d'agir sur des racines entre 5 et 15 cm de profondeur, n'apporte pas de chaleur au sol et ne remue pas la terre93. Le professionnel a pour ambition de proposer une solution à un tarif équivalent, au moyen terme, au modèle glyphosate. Actuellement le prix serait de 10 à 15 % plus cher. Il resterait, toujours suivant le professionnel, toutefois bien moins onéreux que les autres solutions de désherbage mécanique ou thermique. Pour la mission, un tel résultat suppose un seul passage annuel et en conséquence que soit trouvé le moyen que soient traitées en même temps les plantules qui ne dépassent pas la
90 91
Plusieurs brevets ont été déposés aux USA dès les années 1900 Projet WeedElec ; Challenge Rose 92 Une trentaine de matériels de l'entreprise ZASSO fonctionne en ZNA sur route, autoroute et lignes à haute tension. Sao Paulo a été désherbée avec cette technique pendant 5 ans 93 Des études sont en cours pour évaluer les impacts sur les vers de terre et les collemboles. Les premières études montrent qu'il faudrait 3 fois plus de puissance que celle développée actuellement pour porter atteinte aux vers de terre.
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hauteur de l'électrode et que l'on ait l'assurance d'une destruction complète des racines, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
7.2.7. Besoins en biovigilance
L'usage répété pendant des années du glyphosate avec un objectif d'élimination de la végétation a permis de réduire sensiblement le stock de semences du sol. La diminution drastique ou l'arrêt des traitements entrainera une reconstitution de ce stock, avec à terme des problèmes de maîtrise de la végétation. Pour cette raison, des interlocuteurs de la mission ont souligné la nécessité de surveiller l'évolution de la flore spontanée sur une échelle de plusieurs années dans les zones non agricoles. Si des années humides se succèdent, elles favoriseront la croissance des mauvaises herbes. Des évolutions floristiques peuvent se produire, et nécessiter une adaptation du pilotage des méthodes de désherbage. L'utilisation répétée d'acide pélargonique peut favoriser les populations de pâturin annuel (Poa annua), plantes pionnières dans les zones avec des revêtements peu piétinés. Ce développement peut être à l'origine de leur soulèvement. D'ores et déjà les exploitants routiers observent un développement d'espèces invasives (ambroisie et renouée du japon) qu'ils n'arrivent plus à contrôler. La mission s'est interrogée sur l'impact du retrait total du glyphosate sur la maîtrise des plantes invasives. En effet, le rapport de l'INRA de novembre 2017 sur « Les usages et alternatives au glyphosate dans l'agriculture française » cite une contribution de l'Association de coordination technique agricole (ACTA) : « L'objectif est d'identifier des situations qui rencontreront d'importantes difficultés dans le cas d'une interdiction du glyphosate. Nous avons identifié 4 catégories de situations jugées comme très difficiles ou critiques (absence totale d'alternative) : flore invasive ou à enjeu de santé publique, productions sensibles, semis direct sous couverts, utilisations conjoncturelles imposées par le contexte pédoclimatique. » L'ACTA cite notamment l'ambroisie à feuilles d'armoise qui fait l'objet d'une lutte obligatoire en raison de son pollen allergisant. Les grandes renouées (Reynoutria japonica, Reynoutria sacchalinensis, Polygonum polystachyum), et des plantes exotiques (Grand Pétasite, Grande Berce du Caucase, Impatiens glanduleux...) sont également mentionnées. La question de l'impact du retrait total du glyphosate en ZNA sur le développement des plantes invasives nécessiterait une étude spécifique. À défaut, la mission propose d'inclure les plantes invasives dans les actions d'épidémiosurveillance en ZNA afin de piloter le désherbage dans ces secteurs. Il devrait également comprendre la périphérie de ces sites, et notamment s'intéresser aux zones agricoles à proximité.
La recherche publique peut apporter un appui méthodologique sur le dispositif de surveillance à mettre en place sur l'évolution à long terme de la végétation spontanée en ZNA. La surveillance proprement dite relève des réseaux d'épidémiosurveillance qui doivent être renforcés dans les zones non agricoles et élargis aux adventices. Une attention particulière doit être apportée aux plantes invasives. En fonction des évolutions observées, le pilotage du désherbage pourra être ajusté. Un tel dispositif mérite d'être immédiatement mis en place pour déterminer un point de départ des évolutions floristiques dans les ZNA, actuellement traitées au glyphosate.
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Sur la base de ce constat, la mission propose d'abord d'élargir le dispositif d'épidémiosurveillance aux adventices dans les zones non agricoles et à leur périphérie, pour exercer une biovigilance sur l'évolution dans la durée de la flore, en particulier invasive, afin de piloter le désherbage. La mission constate que les principaux domaines d'innovation où la recherche publique peut apporter une animation ou un appui sont : en premier lieu les produits de biocontrôle à effet herbicide, qui peuvent rapidement être appliqués dans les zones non agricoles ; en second lieu la mise au point de capteurs et de dispositifs de détection et d'identification d'adventices, avec un transfert de technologie à réaliser des zones agricoles vers les zones non agricoles.
Les autres innovations bénéficient de la dynamique de la recherche privée. Leur application ultérieure aux zones non agricoles depuis l'agriculture ou l'industrie soulèvera des questions de transfert plus que de recherche. La fusion INRA-IRSTEA est une opportunité pour mieux prendre en compte les besoins des opérateurs dans les zones non agricoles. Il est nécessaire que ce nouvel institut soit ouvert aux professionnels des ZNA et écoute leurs demandes en recherche et en transfert .
Pour répondre aux préoccupations liées au monde de la recherche publique, la mission propose de favoriser en amont et en aval des travaux de la recherche publique à travers : les études pouvant déboucher de nouvelles substances ou agents présentant des effets herbicides, et susceptibles d'être développés sous forme de produits de biocontrôle ; les transferts de technologie depuis les secteurs agricoles ou industriels, répondant aux besoins des opérateurs en zones non agricoles ; l'écoute des acteurs des zones non agricoles au sein du futur institut résultant de la fusion de l'INRA et de l'IRSTEA, notamment en identifiant un point de contact.
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CONCLUSION
La présente mission a pour objet de contribuer, pour les zones non agricoles et non forestières, au plan de sortie du glyphosate, qui prévoit de mettre fin aux principaux usages du glyphosate d'ici la fin de l'année 2020 au plus tard, et d'ici la fin de l'année 2022 pour l'ensemble des usages. L'article 50 du règlement 1007/2009 a été proposé comme levier pour retirer les autorisations des produits phytopharmaceutiques contenant du glyphosate. Le glyphosate relève de l'article 50.2. et, en conséquence, la substitution doit se faire par une méthode non chimique, et non par une autre substance active. Dans ce cadre, la mission a recensé les principales utilisations du glyphosate en ZNA, et examiné les alternatives envisageables en fonction des critères des alinéas 50.2. et 50.1. Ces éléments doivent pouvoir éclairer l'ANSES dans la mise en oeuvre de l'évaluation comparative définie par cet article. La cartographie des utilisations du glyphosate en ZNA a conduit à centrer l'étude sur le réseau ferroviaire, les postes électriques du réseau de transport d'électricité, les sites industriels, les autoroutes, routes et rues, les aéroports, les différentes sortes de gazons, les cimetières, le patrimoine historique bâti et les clôtures. Les quantités de glyphosate employées pour ces utilisations sont extrêmement faibles, comparées aux usages agricoles. Ces usages peuvent être considérés comme sensibles lorsqu'ils renvoient à des référentiels motivés par des enjeux de sécurité ou des référentiels culturels (cimetières, patrimoine...) voire dans des aspects commerciaux. L'article 50 définit trois critères principaux pour mettre en oeuvre l'évaluation comparative. Le premier est l'existence d'une méthode non chimique de prévention ou de lutte pour la même utilisation que le glyphosate. Selon les utilisations, des méthodes non chimiques alternatives très diverses existent : désherbage manuel, mécanique, thermique, paillage, minéralisation des surfaces, plantes couvre-sols, robots de tonte... Le deuxième point clef est que la méthode non chimique doit être d'un usage courant en France. La notion d'usage courant est définie comme désignant, à la date du retrait d'AMM, un outil au stade opérationnel, disponible sur le marché, mis sur le marché par son fabricant à hauteur de la demande, adapté à chaque objet technique à désherber, et présentant un caractère habituel, ordinaire au moment présent. Ce point fondamental est extrêmement contraignant aujourd'hui. Ainsi, des solutions nouvelles ne sont pas encore opérationnelles dans les ZNA. Des essais sont en cours, comme les robots désherbeurs pour les pistes des lignes à grande vitesse de SNCF Réseau, ou le désherbage électrique. D'autres alternatives ne sont pas adaptées aux caractéristiques de l'objet technique à désherber. En raison de risques d'incendie, de leurs capteurs et autres appareils électroniques, les voies ferrées ne peuvent pas être traitées avec des dispositifs thermiques. Les exigences de rapidité, pour ne pas perturber le trafic dans les sillons, rendent inapplicable le désherbage mécanique sur les voies (les trains désherbeurs roulent à 60 km/h). Dans le
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cas des sites industriels, les référentiels formulent de fortes exigences contre le risque d'incendie. Le désherbage thermique et même mécanique n'est pas envisageable pour des motifs de sécurité et de conception des lieux. Le troisième critère concerne l'existence d'inconvénients économiques ou pratiques majeurs. La mission expose les inconvénients recensés en fonction de chaque utilisation examinée. Selon les données collectées auprès des utilisateurs professionnels, les méthodes alternatives non chimiques renchérissent le désherbage d'un facteur allant de 5 à 10 en raison de l'allongement du temps de travail, et de la nécessité de faire plusieurs passages. Les employeurs soulignent que leur personnel est exposé à des risques quantitativement plus importants liés à la pénibilité plus importante du désherbage mécanique ou manuel : risques de sécurité, troubles musculosquelettiques, risques psychosociaux. Pour ces motifs, la disponibilité de la main d'oeuvre correspondante est déjà problématique. Elle est peu vraisemblable à grande échelle.
La mission a aussi examiné les possibilités des produits de biocontrôle herbicides sur le marché, à base d'acide pélargonique, d'acide acétique et d'acide caprylique. Ces produits sont des produits chimiques au titre de la réglementation européenne. Ils ne peuvent pas entrer dans le dispositif d'évaluation comparative. Ils montrent toutefois un intérêt comme alternative au glyphosate, notamment en association avec d'autres produits phytopharmaceutiques pour la SNCF. Mais ils présentent des inconvénients liés à leur coût, leur efficacité moindre et leur volume d'application. De leur côté, les produits phytopharmaceutiques à faible risque, au sens du règlement 1107/2009, ne comportent aucun herbicide. Au final, en raison des exigences formulées, l'article 50 apparaît comme essentiellement conçu pour des usages agricoles, et comme un levier d'un intérêt limité pour les usages non agricoles. Sauf exception, dans les ZNA étudiées qui sont les plus consommatrices, les qualités techniques et économiques du glyphosate n'ont pas permis l'émergence de solutions alternatives courantes dans les objets techniques considérés. Par ailleurs, beaucoup d'organismes rencontrés par la mission ne se sont pas préoccupés de chercher des solutions de remplacement en vue d'un retrait total du glyphosate. S'ils travaillent tous volontairement pour une réduction des quantités utilisées, ils considèrent que l'abandon du glyphosate nécessite la reconception des installations concernées. Ces reconceptions, en plus d'être nécessairement coûteuses, sortent du cadre de l'analyse définie par l'article 50. Hors du cadre imposé par l'article 50, l'abandon du glyphosate peut passer par des voies autres que celles du désherbage manuel ou mécanique notamment. Ainsi, SNCF Réseau pourrait, selon un concepteur de train désherbeur, réduire des deux tiers sa consommation de glyphosate en équipant ses trains désherbeurs d'un système de détection des adventices pilotant l'ouverture des buses d'application. La reconception des sites désherbés avec du glyphosate (postes électriques par exemple) pour les rendre moins favorables aux adventices est également une option.
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Cependant, la mission fait observer que l'article 50 exige également que les conséquences sur les retraits d'autorisations pour des utilisations mineures soient prises en compte. Or, tous les usages réservés aux ZNA, dans le catalogue français des usages sont classés en usages mineurs. Pour la mission, ces deux considérations combinées ouvrent la voie à une utilisation limitée du glyphosate, à définir dans le catalogue national des usages et à mettre en oeuvre à travers les AMM.
Pour ces raisons, sur la base des constats formulés au cours des entretiens, la mission présente des pistes de réflexion : s'il est souhaité de rester cohérent avec la loi Labbé, introduire dans les AMM de produits à base de glyphosate, pour leurs usages spécifiques en ZNA classés comme mineurs, une utilisation limitée aux seuls motifs de la sécurité des personnes et des biens, et d'ordre culturel ; prendre en compte les zones non agricoles et les professionnels concernés dans le dispositif mis en place par le plan de sortie du glyphosate ; être vigilant sur l'effet de report vers d'autres herbicides chimiques autorisés ; élargir d'ores et déjà le dispositif d'épidémiosurveillance aux adventices dans les zones non agricoles et à leur environnement, pour piloter le désherbage sur une longue durée en lien avec le monde agricole ; favoriser en amont et en aval les travaux de la recherche publique et les actions de transfert nécessaires aux ZNA.
Signatures des auteurs
Bernard MÉNORET
Anne DUFOUR
Michel LARGUIER
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ANNEXES
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: Lettre de mission
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: Liste des personnes rencontrées
ADMINISTRATION
Date de Organisme Prénom Nom Fonction rencontre Agence sécurité nationale sanitaire de de de Jean ADRIEN Chargé de mission pour 5-juil
évaluation comparative des PPP content du glyphosate à la
l'alimentation,
l'environnement et du travail
Direction des autorisations de mise sur le marché MarieChristine Roger GENET DE GUENIN Directrice des autorisations de mise sur le marché (DAMM) Directeur Général 29-avr 5-juil 29-avr
Caroline
SEMAILLE
Directrice Générale Déléguée en charge du pôle Produits
29-avr
Réglementés Claude VERGNET Chef d'Unité des décisions AMM 29-avr
Françoise
WEBER
Ex Directrice Générale Déléguée en charge du pôle Produits
29-avr
Réglementés Autorité de régulation des activités routières Olivier CGAAER Didier SALESSE PINCONNET ferroviaires et Julien COULIER Responsable de l'unité régulation des gestionnaires d'infrastructure ferroviaire Directeur du transport ferroviaire Membre de la task force du plan de sortie du glyphosate CGEDD Louis HUBERT Membre de la task force du plan de sortie du glyphosate Direction générale de Guillaume VAN REYSEL Adjoint au chef de bureau de l'environnement 03-juil 23-juil 03-juil 23-juil
l'aviation civile DTA-SDDSDD1 DRAAF service BRETAGNE, régional de Françoise Florence CHARTIER FERNANDEZ
Chef de service Chargée de mission
14-août 14-août
l'alimentation DRAAF Pays de Loire Ministère de la Culture Jérôme Marie-José JULLIEN DOUBROFF Expert national ZNA Chargée de mission , ingénieure 20-juin
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Date de Organisme Prénom Nom Fonction rencontre du patrimoine, architecte
JeanMichel JeanMichel Ministère de la transition écologique et solidaire Murielle
LOYER-HASCOËT
Directeur du service du patrimoine
20-juin
SAINSARD
Expert parcs et jardins
20-juin
LETOFFET
Adjointe au chef du Bureau des produits
10-mai
Direction générale de la prévention des risques sousdirection environnement santéproduits MarieLaure METAYER Sous-directrice 10-mai
chimiques agriculture Ministère de la transition écologique Direction et solidaire, des des de la des Elvire HENRY Chargée d'étude 04-juin Éric GARDAIS Adjoint au chef de bureau 04-juin
générale
infrastructures, transports mer /Direction et
infrastructures de transport/ Sous-direction de Michel HERSEMUL Sous-directeur de l'aménagement du réseau national 04-juin
l'aménagement du réseau routier national
Alexandre
KAVAJ
Chef du bureau de la politique de l'environnement
04-juin
Ministère de la Transition Ecologique et Solidaire,
Delphine
RUEL
Sous-directrice accidentels
des
risques
25-juin
Direction Générale de la Prévention des Risques Ministère de la transition écologique direction et solidaire, de Guglielmina OLIVEROS-TORO Adjointe à la sous-directrice de la protection et de la gestion des ressources en eau et minérales 11-avr
générale
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Date de Organisme l'aménagement, du Prénom Nom Fonction rencontre Dominique POUJEAUX Chargé de mission pesticides en ZNA (axe 4 du plan Écophyto) 11-avr
logement et de la nature. Direction de l'eau et de la biodiversité, sous-direction Emmanuel STEINMAN
de la protection et de la gestion des ressources en eau et minérales
Chef du bureau « qualité de l'eau et agriculture »
11-avr
Ministère Direction
de
l'agriculture, de
Anne Cécile
COTILLON
Sous-directrice de la qualité, de la santé et de la protection des végétaux (Service des actions sanitaires en production primaire)
11-avr
générale
l'alimentation
Ministère Secrétariat
des
armées, pour
Rozenn
LE TOUZET
Chargée de mission
25-sept
général
l'administration, des patrimoines,
Direction de la Hélène PERRE Chef de bureau 25-sept
mémoire et des archives, Chef de bureau et de du
l'environnement
développement durable Préfet de région(h), PierreEtienne BISCH Coordinateur interministériel du plan de sortie du glyphosate 03-juil
Conseiller d'État en service extraordinaire
Pauline
BODIN
Ancienne Chargée de mission Ecophyto en ZNA à la DRIAAF
25-juil
Autres organisations :
Organisme Prénom Nom Fonction Date de
rencontre Association applicateurs professionnels de produits phytopharmaceutiques Association des maires de France André Sylviane FLAJOLET OBERLÉ Vice-président Chargée de mission prévention des pollutions Association des sociétés Christophe BOUTIN Délégué général 26-juin 22-mai 22-mai Tanguy CLABON Vice-président 20-août des Philippe BEUSTE Président 20-août
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Organisme
Prénom
Nom
Fonction
Date
de
rencontre françaises d'autoroutes BAYER Florence Hélène PORTELETTE BRUN Chargée de mission environnement Responsable France de Bayer 26-juin 13-mai
environnemental science (usages non agricoles) Pascal DAY Chef du projet Smart Weeding Train Europe Sylvestre JOBIC Responsible Stakeholder Affairs and Sustainable Development. COVERGARDEN JeanPierre Fédération golf France Environnement Thibault LEROUX Nature Jonathan BOURDEAU Référent national FNE sur les questions pesticides en zones non agricoles Chargé de mission Santé-Environnement & Agriculture GENERATIONS FUTURES INRA IRSTEA La Demeure Historique Réseau d'électricité Ruffine Frédéric SNCF réseau Dominique LE-VILLAIN ROY JANOT de transport Christian Vincent Armelle Claire HUYGHE DE RUDNICKI VERJAT GRANDET Directeur Scientifique Adjoint Ingénieur de recherche Déléguée générale Directeur du département concertation et environnement Chargée d'affaires environnement Chef de groupe environnement Direction technique Réseau, chef de projet du programme post-glyphosate 26-mai 26-mai 23-mai 27-mai 12-août 29-août 26-mai François VEILLERETTE Directeur 17-sept 19-sept 19-sept française de Thomas CHARRIER Responsable environnement FIOCRE Directeur technique et R&D 11-avr 13-mai 13-mai
Michel JeanPierre
MORIN PUJOLS
Chef du département voies et abords Direction technique Réseau, responsable du pôle maîtrise de la végétation
23-mai 23-mai
Société des autoroutes du Nord et de l'Est de la France
JeanMarie
DECK
Responsable département
26-juin
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Organisme
Prénom
Nom
Fonction
Date
de
rencontre Union des entreprises pour la protection des jardins et espaces publics Union Nationale des Fanny DEVOGHELAERE Conseillère technique qualité, sécurité, environnement Barbara DEKEYSER Secrétaire adjointe déléguée à la qualité, la sécurité et l'environnement 29-mai 29-mai Nicolas MARQUET Directeur général 29-mai
Entreprises du Paysage
VITIROVER
Arnaud
DE FOUCHARDIERE
LA
Directeur général
16-sept
ZASSO ZASSO
Olivier Benjamin Olivier
BOULY ERGAS DOURS
Ingénieur Executive Chairman Expert gazon
27-juin 27-juin 11-avr
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: Liste des sigles utilisés
ACTA AMM ANR ANSES APCA ARAFER ASFA ATEX BNV-D CASDAR CEI CER CEREMA CGAAER CGDD CGEDD CIRC CMPC CRE DGAL DIR DRAAF DVP ECHA EFSA EMR FIFA HLM Association de coordination technique agricole Autorisation de mise sur le marché Agence nationale de la recherche Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail Assemblée permanente des Chambres d'agriculture Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières Association des sociétés françaises d'autoroutes ATmospheres EXplosive Banque nationale des ventes Compte d'affectation spécial « Développement agricole et rural » Centre d'entretien et d'intervention (des routes au sein d'une DIR) Communauté européenne du rail Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux Commissariat général au développement durable Conseil général de l'environnement et du développement durable Centre international de recherche sur le cancer Coût moyen pondéré du capital Commission Régulation de l'Energie Direction Générale de l'Alimentation Directions interdépartementales des routes nationales Direction régionale de l'agriculture et de la forêt Dispositif végétalisé permanent Agence européenne des produits chimiques Autorité européenne de sécurité des aliments État membre rapporteur Fédération internationale de football association Habitation à loyer modéré
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IAU Ile de France ICPE JEVI INRA INSERM LGV LMR ONF OPECST PPP PSD RAR RD RNN RTE SANEF SLO SNCF TGV TMS TPC TRI TURPE UEFA UNEP VC ZNA ZNT
Institut d'aménagement et d'urbanisme de la région d'Île-de-France (Institut Paris Région depuis 2019) Installations classées pour la protection de l'environnement Jardins, espaces végétalisés et infrastructures Institut national de la recherche agronomique Institut national de la santé et de la recherche médicale Ligne à grande vitesse limite maximale de résidus Office national des forêts Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques Produit(s) phytopharmaceutique(s) Plantain, Sétaire verte, Digitaire rapport d'évaluation de renouvellement Routes départementales Réseau routier national Réseau de transport d'électricité Société des autoroutes du Nord et de l'Est de la France Services librement organisés Société nationale des chemins de fer français Train à grande vitesse. Troubles musculosquelettiques Terre-plein central Taux de rentabilité interne Tarif d'Utilisation des Réseaux Publics d'Électricité Union of European Football Associations Union Nationale des Entreprises du Paysage Voirie communale Zone non agricole Zone non traitée
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: Les produits alternatifs aux produits phytopharmaceutiques de synthèse
1 Les différentes catégories de produits alternatifs La réglementation sur l'utilisation des produits phytopharmaceutiques prévoit des mesures dérogatoires pour certaines catégories de produits alternatifs aux produits de synthèse. Il s'agit notamment des produits de biocontrôle, des produits qualifiés à faible risque, des produits autorisés en agriculture biologique, et de produits composés uniquement de substances de base. La réglementation définit par ailleurs les préparations naturelles peu préoccupantes (PNPP). Dans la littérature technique, les termes de produits de lutte biologique sont également employés. Enfin, les stimulateurs des défenses naturelles et les substances naturelles à effet biostimulant sont souvent citées parmi les produits alternatifs. Ces différentes catégories de produits se recoupent largement, ce qui peut créer de la confusion chez les utilisateurs. Ils sont souvent mentionnés par opposition : aux pesticides, terme employé de façon ambivalente dans le vocabulaire courant, mais défini de façon précise dans la réglementation. L'article 3 de la directive 2009/128/CE pour une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable précise : « Aux fins de la présente directive, on entend par [...] « pesticide » : o un produit phytopharmaceutique au sens du règlement (CE) no 1107/2009 ; o un produit biocide comme défini dans la directive 98/8/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 février 1998 concernant la mise sur le marché des produits biocides. » aux produits de synthèse. Un grand nombre de produits phytopharmaceutiques sont en effet issus de la chimie organique. Toutefois la notion de produit de synthèse est également ambivalente dans la mesure où elle concerne aussi des produits issus de la chimie minérale, comme le sulfate de cuivre, très utilisé en agriculture biologique. De même, les phéromones de synthèse sont classées comme des produits de biocontrôle en tant que médiateurs chimiques.
Les paragraphes suivants se proposent de clarifier les définitions de ces différentes catégories de produits alternatifs, leur nature et d'indiquer les sources donnant des listes de produits mis sur le marché. Parmi tous les produits alternatifs, seuls les produits de biocontrôle et les substances de base proposent des produits classés comme herbicides. 2 Les produits de biocontrôle 2.1 Définition des produits de biocontrôle La France est le seul État membre à donner une définition réglementaire des produits de biocontrôle. En effet, l'article L.253-6 du code rural et de la pêche maritime précise à propos du plan d'action national sur les produits phytopharmaceutiques : « Le plan s'accompagne d'une stratégie nationale de déploiement du biocontrôle, qui sont des agents et produits utilisant des mécanismes naturels dans le cadre de la lutte intégrée contre les ennemis des cultures. Ils comprennent en particulier :
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1° Les macro-organismes ; 2° Les produits phytopharmaceutiques comprenant des micro-organismes, des médiateurs chimiques comme les phéromones et les kairomones et des substances naturelles d'origine végétale, animale ou minérale. » Les micro-organismes sont définis dans le règlement CE) n° 1107/2009 comme « toute entité microbiologique, y compris les champignons inférieurs et les virus, cellulaire ou non, capable de se répliquer ou de transférer du matériel génétique ». Il s'agit par exemple de produits à base de Bacillus thuringiensis (préparation bactérienne contre les larves de lépidoptères), virus de la granulose (préparation virale contre les larves de carpocapse des pommes), Trichoderma sp. (champignon antagoniste) ... Par opposition, les macro-organismes sont définis dans l'article R.258-1 comme : « tout organisme autre qu'un micro-organisme tel que défini à l'article 3 du règlement (CE) n° 1107/2009 ». Les macro-organismes sont des prédateurs94 ou des parasitoïdes95 des organismes nuisibles pour les cultures. Selon leur régime alimentaire, ils sont entomophages (nourriture à base d'insectes) ou acarophages (nourriture à base d'acariens). Les macroorganismes peuvent être : des insectes, appartenant par exemple aux genres Adalia, Anthocoris, Aphelinus, Chrysoperla, Encarsia, Trichogramma... des acariens des genres Amblyseius, Hypoaspis, Macrocheles, Phytoseilulus... des nématodes des genres Heterorhabditis, Phasmarhabditis, Steinernema...
Contrairement aux micro-organismes, les macro-organismes ne sont pas des produits phytopharmaceutiques, et ils peuvent être commercialisés sans faire l'objet d'une autorisation de mise sur le marché. En revanche, l'entrée sur un territoire96 et l'introduction dans l'environnement de macro-organismes non indigènes utiles aux végétaux, notamment dans le cadre de la lutte biologique, sont réglementées par l'article R.258-1 du code rural et de la pêche maritime. Ces organismes doivent faire l'objet d'une évaluation favorable portant sur le risque phytosanitaire et environnemental, incluant l'impact sur la biodiversité. Le recours à des macro-organismes est développé dans les cultures sous serres dans le cadre de la lutte biologique. Des producteurs en agriculture biologique préfèrent toutefois pratiquer une lutte biologique par conservation en favorisant les auxiliaires autochtones, plutôt que par introduction. Un médiateur chimique est une substance sécrétée par un organisme vivant dont les molécules agissent sur sa physiologie, son comportement ou sur d'autres organismes quand elle est émise dans le milieu ambiant97. Dans le domaine de la protection des végétaux, des phéromones de synthèse sont utilisées pour brouiller la communication intraspécifique entre
94
Un prédateur capture sa proie et la tue immédiatement. Un parasitoïde provoque la mort plus ou moins rapidement d'un individu-hôte aux dépens duquel sa ou ses larves effectuent leur développement. 96 Les territoires suivants sont considérés comme distincts : l'ensemble des départements de la France métropolitaine continentale, la Corse, la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, La Réunion, Mayotte, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre et Miquelon. 97 Index phytosanitaire ACTA. 2018.
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organismes nuisibles (lépidoptères en particulier), et des kairomones synthétiques sont employées pour renforcer ou perturber la communication interspécifique (attraction des pollinisateurs, recherche des végétaux par les ravageurs).
Les substances naturelles d'origine végétale, animale ou minérale sont définies dans la note de service DGAL/SDQSPV/2019-615 du 22 août 2019 de la façon suivante : « On entend par substance naturelle, toute substance naturellement présente et qui a été identifiée en l'état dans la nature. Cette substance est : soit extraite d'un matériau source naturel ; soit obtenue par synthèse chimique et strictement identique à une substance naturelle telle que décrite ci-dessus.
Les substances issues de procaryotes, eucaryotes unicellulaires ou champignons appartiennent à la catégorie des substances naturelles. » Ces substances naturelles peuvent être par exemple de l'acide acétique (herbicide), de l'acide caprylique (herbicide), de l'acide pélargonique (herbicide), du cerevisane (stimulateur des défenses naturelles), de la farine de sang (répulsif de cerfs), de l'huile de colza estérifiée (adjuvant), de l'huile de paraffine (insecticide et acaricide), de la laminarine (stimulateur de défenses naturelles), des pyréthrines (insecticides), du soufre (fongicide), du spinosad (insecticide), du sulfate de fer (destruction de mousses) ... En revanche, le sulfate de cuivre n'est pas classé dans la catégorie des substances naturelles, puisqu'il est issu de la chimie minérale.
2.2 Listes de produits de biocontrôle La principale source d'information actualisée pour connaître les listes de produits de biocontrôle est la note de service de la Direction générale de l'alimentation intitulée « Liste des produits phytopharmaceutiques de biocontrôle, au titre des articles L.253-5 et L.253-7 du code rural et de la pêche maritime ». Ces deux articles prévoient en effet des mesures dérogatoires pour les « produits de biocontrôle figurant sur une liste établie par l'autorité administrative ». Cette liste est régulièrement mise à jour, et la dernière publication à la date de rédaction est la note de service DGAL/SDQSPV/2019-615 du 22 août 2019. Elle contient 40 produits herbicides, à base d'acide acétique, d'acide caprylique ou d'acide pélargonique. Les produits phytopharmaceutiques de biocontrôle cités dans la note de service répondent aux critères suivants : ils sont conformes à la définition de l'article L.253-6, mais ils ne comportent pas les macro-organismes qui ne sont pas des produits phytopharmaceutiques ; ils bénéficient d'une autorisation de mise sur le marché ; ils respectent des dispositions spécifiques en matière de sécurité pour la santé et l'environnement :
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la substance ne doit pas être candidate à la substitution au sens du point 4 de l'annexe II du règlement 1107/2009 ; le produit ne doit pas comporter une des mentions stipulées de danger soit pour la santé publique, soit pour l'environnement.
La note de service propose quatre listes de produits de biocontrôle à base de : micro-organismes ; médiateurs chimiques ; substances naturelles d'origine végétale, animale ou minérale ; pièges à insectes.
Le site E-PHY (https://ephy.anses.fr) de l'ANSES permet aussi d'obtenir une liste des produits de biocontrôle, qui peut être en retard par rapport à la liste officielle. Lors d'une consultation le 26 septembre 2019, une liste de 360 produits phytopharmaceutiques de biocontrôle a ainsi été obtenue. Enfin, sur une base annuelle, l'Association de coordination technique agricole édite l'« Index ACTA Biocontrôle ». La troisième édition a été publiée en avril 2019. 2.3 Possibilités et freins pour le recours aux produits de biocontrôle Une enquête réalisée par AgroParisTechService Études pour IBMA France lors du 2è trimestre 2018 auprès de 542 agriculteurs aboutit aux conclusions suivantes : « Encore des marges de progrès à atteindre côté notoriété des produits de biocontrôle : près d'un agriculteur sur quatre n'en a jamais entendu parler, même si 17 % d'entre eux utilisent finalement déjà des produits de biocontrôle. La volonté d'utiliser davantage les solutions de biocontrôle dans un proche avenir : 44 % des agriculteurs interrogés utilisent des produits de biocontrôle : o o ils sont plus nombreux dans les cultures spécialisées (jusqu'à 84 %), moins en grandes cultures (34 %). toutes cultures confondues, ils sont plus de la moitié à souhaiter utiliser davantage de produits de biocontrôle dans le futur.
6 % en ont utilisé dans le passé, et ont arrêté ; la moitié d'entre eux se dit prêt à le réenvisager.
Parmi les agriculteurs n'utilisant pas de produits de biocontrôle, la quasi-totalité envisage d'en utiliser dans le futur un agriculteur sur cinq avec certitude. Le biocontrôle a une bonne image auprès des agriculteurs qui voient parmi ses avantages son aspect alternatif aux produits conventionnels, le meilleur respect de l'environnement et de la
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santé, et sa contribution à une meilleure image de l'agriculture auprès des consommateurs. Ils identifient parmi les freins au déploiement du biocontrôle le coût trop élevé de ces produits, le manque d'accompagnement et de formations adaptées, le manque d'efficacité et/ou de preuves d'efficacité et le manque de produits. Le besoin d'accompagnement dans le choix et l'utilisation de ces méthodes alternatives est réclamé par plus de deux agriculteurs sur trois (70 %), alors que 39 % des agriculteurs interrogés disent que leur principal fournisseur de produits phytosanitaires ne leur a jamais proposé de produits de biocontrôle. »
3 Les produits phytopharmaceutiques à faible risque 3.1 Définition des produits phytopharmaceutiques à faible risque Le règlement CE) n° 1107/2009 définit :
1 - les substances à faible risque dans l'article 22 : « Par dérogation à l'article 598, une substance active satisfaisant aux critères prévus à l'article 499 est approuvée pour une période n'excédant pas quinze ans, si elle est considérée comme une substance active à faible risque et s'il est prévisible que les produits phytopharmaceutiques contenant cette substance ne présenteront qu'un faible risque pour la santé humaine, la santé animale et l'environnement, conformément à l'article 47, paragraphe 1. »
2 les produits phytopharmaceutiques à faible risque dans l'article 47 : « Lorsque toutes les substances actives contenues dans un produit phytopharmaceutique sont des substances actives à faible risque telles que visées à l'article 22, ce produit est autorisé comme produit phytopharmaceutique à faible risque à condition que des mesures spécifiques d'atténuation des risques ne se révèlent pas nécessaires à la suite d'une évaluation des risques. Ce produit phytopharmaceutique satisfait en outre aux conditions suivantes : a) les substances actives, phytoprotecteurs et synergistes à faible risque qu'il contient ont été approuvés au titre du chapitre II ; b) il ne contient pas de substance préoccupante100 ; c) il est suffisamment efficace ; d) il ne provoque pas de souffrances ou de douleurs inacceptables chez les vertébrés à combattre ;
98 L'article 5 établit pour la première approbation une durée maximale de dix ans. 99 L'article 4 fixe les critères généraux d'approbation des substances actives. 100 L'article 3 précise la définition des substances préoccupantes : toute substance intrinsèquement capable de provoquer un effet néfaste pour l'homme, les animaux ou l'environnement et contenue ou produite dans un produit phytopharmaceutique à une concentration suffisante pour risquer de provoquer un tel effet.
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e) il est conforme à l'article 29101, paragraphe 1, points b), c) et f) à i). Ces produits sont dénommés « produits phytopharmaceutiques à faible risque ». »
3.2 Listes de produits phytopharmaceutiques à faible risque Les listes de substances actives à faible risque sur la base de données sur les pesticides de l'Union européenne à l'adresse suivante :
https://ec.europa.eu/food/plant/pesticides/eu-pesticidesdatabase/public/?event=homepage&language=FR
Au 26 septembre 2019, cette base présente la liste suivante de 16 substances actives à faible risque. Substances actives classées à faible risque et approuvées au sens du règlement n°1107/2009. (Consultation EU Pesticides database du 26 septembre 2019)
Substance active
ABE-IT 56
Nature
Composants de lysate de Saccharomyces cerevisiae, souche DDSF623 Champignon microscopique hyperparasite de champignons pathogènes
Fonction
Fongicide
Ampelomyces quisqualis strain AQ10 Bacillus amyloliquefaciens strain FZB24 Cerevisane
Fongicide
Bactérie utilisée en lutte bioloqique Fongicide contre des champignons pathogènes Extrait de la souche LAS117 du champignon microscopique Saccharomyces cerevisiae Champignon microscopique hyperparasite de champignons pathogènes Stimulateur de défenses naturelles Fongicide
Clonostachys rosea strain J1446 (Gliocladium catenulatum strain J1446)
Coniothyrium minitans Champignon microscopique du Fongicide strain CON/M/91-08 (DSM sol, hyperparasite des sclérotes de 9660) Sclerotinia sp. COS-OGA Complexe de la famille des oligosaccharides associant des fragments de pectine (OGA) Stimulateur de défenses naturelles
101 L'article 29 fixe les conditions d'autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques.
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Substance active
Nature
extraite de pelure d'agrumes et de pommes, et des fragments de chitosan (COS) provenant de l'exosquelette de crustacés.
Fonction
Ferric phosphate Isaria fumosorosea Apopka strain 97 (formely Paecilomyces fumosoroseus) Laminarin
Phosphate ferrique Champignon microscopique du sol, utilisée en lutte biologique contre des insectes nuisibles. Polysaccharide extrait de l'algue Laminaria digitata Variant du Pepino mosaic virus. Variant du Pepino mosaic virus. Champignon microscopique parasite de nématodes Variant du Pepino mosaic virus.
Molluscicide Insecticide
Stimulateur de défenses naturelles Stimulateur de défenses naturelles Stimulateur de défenses naturelles Nématicide Stimulateur de défenses naturelles, et inoculation de virus contre le Pepino mosaic virus. Fongicide
Mild Pepino Mosaic Virus isolate VC 1 Mild Pepino Mosaic Virus isolate VX 1 Pasteuria nishizawae Pn1 Pepino mosaic virus strain CH2 isolate 1906
Saccharomyces cerevisiae strain LAS02 Trichoderma atroviride strain SC1
Champignon microscopique du groupe des levures, antagoniste de champignons pathogènes Champignon microscopique, antagoniste de champignons pathogènes
Fongicide
La base de données sur internet E-PHY de l'ANSES permet de consulter la liste des produits phytopharmaceutiques autorisés à la mise sur le marché en France, et classés à faible risque. Au 26 septembre 2019, la base de données affiche une liste de 27 produits phytopharmaceutiques à faible risque. À ce jour, il n'y a ni substance active, ni produit phytopharmaceutique à faible risque qui serait classé comme herbicide.
4 Les produits composés uniquement de substances de base
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4.1 Définition des substances de base L'article 23 du règlement 1107/2009 précise : « Une substance de base est une substance active : a) qui n'est pas une substance préoccupante ; et b) qui n'est pas intrinsèquement capable de provoquer des effets perturbateurs sur le système endocrinien, des effets neurotoxiques ou des effets immunotoxiques ; et c) dont la destination principale n'est pas d'être utilisée à des fins phytosanitaires, mais qui est néanmoins utile dans la protection phytosanitaire, soit directement, soit dans un produit constitué par la substance et un simple diluant; et d) qui n'est pas mise sur le marché en tant que produit phytopharmaceutique. » Les substances de base ont donc un statut particulier dans le sens où elles relèvent du règlement 1107/2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, mais sans être elles-mêmes mises sur le marché en tant que produits phytopharmaceutiques, ni pour être employées principalement pour la protection des plantes.
4.2 Listes des substances de base Le liste des substances de base peut être obtenue grâce à la base de données sur les pesticides de l'Union européenne. Au 26 septembre 2019, elle comprend la liste suivante de 20 substances de base, dont 2 avec un effet herbicide mais non utilisables en ZNA.
Substances de base approuvées au sens du règlement n°1107/2009. (Consultation EU Pesticides database du 26 septembre 2019)
Substance active
Beer Calcium hydroxide Chitosan hydrochloride Clayed charcoal Diammonium phosphate Equisetum arvense L. Fructose Hydrogen peroxide Bière
Nature
Fonction
Molluscicide Fongicide Stimulateur de défenses naturelles Protecteur Attractif pour piégeage Fongicide Stimulateur de défenses naturelles Bactéricide, fongicide
Chaux éteinte Chlorhydrate de chitosane Charbon argileux Phosphate de diammonium Prèle Sucre simple présent dans les fruits et le miel Eau oxygénée
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Substance active
Lecithins Mustard seeds powder Onion oil Salix spp. Cortex Sodium chloride Sodium hydrogen carbonate Sucrose Sunflower oil Talc E553B Urtica spp. Vinegar Whey
Nature
Phospholipides extraits du vivant Poudre de graines de moutarde Huile d'oignon Écorce de saule Sel de table Bicarbonate de soude Saccharose Huile de tournesol Talc (roche broyée) Ortie Vinaigre Lactosérum
Fonction
Fongicide Fongicide Masqueur d'odeur Fongicide Fongicide, insecticide Fongicide, herbicide102 Stimulateur de défenses naturelles Fongicide Fongicide, insecticide Fongicide, insecticide, acaricide, Bactéricide, fongicide, herbicide103 Fongicide
5. Produits dont l'usage est autorisé dans le cadre de l'agriculture biologique. 5.1 Définition des produits autorisés en agriculture biologique Les produits destinés à la protection des plantes en agriculture biologique doivent être conformes d'une part aux réglementations communautaires et nationales sur les produits phytopharmaceutiques, et d'autre part aux réglementations encadrant la production en agriculture biologique : les règlements CE n°834/2007 et n°889/2008.
5.2 Listes de produits autorisés en agriculture biologique L'Institut de l'agriculture et de l'alimentation biologiques (ITAB) diffuse sur son site web (http://www.itab.asso.fr) les listes de produits autorisés en agriculture biologique :
102
103
Le bicarbonate de soude est approuvé en tant que substance de base par le règlement 2015/2069. Le rapport SANTE/10667/2015 rev. 4 du 26 janvier 2018précise que l'utilisations comme herbicide est autorisée uniquement sur les sur les plantes en pot dans les serres. Il n'est donc pas possible d'utiliser le bicarbonate de soude comme herbicide en ZNA. Le vinaigre est approuvé en tant que substance de base depuis juillet 2015 par le règlement 2015/1108, pour des fonctions bactéricide et fongicide (traitement de semences et désinfection outils), puis herbicide dans des conditions restreintes. Le rapport SANCO/12896/2014 rev3 du 13 décembre 2018 précise que les utilisations autorisées portent uniquement sur les plantes médicinales, aromatiques ou plantes à parfum (PPAMC) avant la levée de la culture, en raison d'un risque de phytotoxicité sur jeunes plantes. Il n'est donc pas possible d'utiliser le vinaigre comme herbicide en ZNA.
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les produits phytopharmaceutiques, dont aucun n'est classé comme herbicide ; les substances de base, dont deux présentent un effet herbicide.
Le site E-PHY de l'ANSES identifie par ailleurs les produits phytopharmaceutiques utilisables en agriculture biologique. Lors d'une consultation le 26 septembre 2019, une liste de 347 produits phytopharmaceutiques autorisés en agriculture biologique a ainsi été obtenue, dont aucun herbicide.
6. - Les stimulateurs des défenses naturelles Le réseau mixte technologique ELICITRA définit les stimulateurs des défenses naturelles (SDN) ou stimulateurs de défense des plantes (SDP) comme « toute substance ou tout microorganisme vivant non pathogène qui, appliqué sur une plante, est capable de promouvoir un état de résistance significativement plus élevé par rapport à une plante non traitée face à des stress biotiques ». Les SDN activent donc différents mécanismes au sein de la plante pour la rendre plus résistante aux attaques des organismes nuisibles. La définition des SDN est liée à leur mode d'action indirect sur les bioagresseurs, et non à leur nature qui peut être synthétique. Certains produits phytopharmaceutiques sont considérés comme des SDN. Ils contiennent des substances actives telles que l'acibenzolar-S-méthyle, le Bacillus subtilis QST 713, le Bacillus amyloliquefaciens ssp. plantarum strain D747, la cerevisane, le fenugrec, la laminarine, etc. Les SDN comportent donc des produits de synthèse, des produits de biocontrôle, et des produits à faible risque. Certains herbicides réduisent la gravité d'attaques de champignons, ce qui pourrait s'expliquer par une stimulation des défenses naturelles. Mais en sens inverse, il n'y a pas de produit homologué comme herbicide grâce à un effet de stimulation des défenses naturelles.
7. Les substances naturelles à usage biostimulant L'effet des substances naturelles à usage biostimulant est « de stimuler les processus naturels pour améliorer/avantager l'absorption des nutriments, l'efficience des nutriments, la tolérance aux stress abiotiques, et la qualité des cultures, indépendamment du contenu en nutriments du biostimulant »104 Ils peuvent renforcer la résistance des plantes cultivées aux attaques d'organismes nuisibles. Toutefois ils ne relèvent pas du cadre réglementaire des produits phytopharmaceutiques, mais de celui des fertilisants105. Ils bénéficient, comme les autres matières fertilisantes, d'un cadre
104 European Biostimulants Industry Council. Voir : http://www.biostimulants.eu/ 105 En effet, la réglementation des produits phytopharmaceutiques encadre les produits qui protègent les végétaux, exercent une action autre que nutritive, assure la conservation des produits végétaux, détruisent les végétaux et freinent une croissance indésirable des végétaux (Art 2 du Règlement (CE) n° 1107/2009). La réglementation des matières fertilisantes encadre les produits commercialisés en tant qu'engrais CE (Règlement (CE) 2003/2003), les amendements et les biostimulants (Article L. 255-1 du Code rural et de la pêche maritime).
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plus souple pour leur commercialisation, notamment en ce qui concerne leur évaluation.
8. Préparations naturelles peu préoccupantes La France est le seul État membre à avoir créé une catégorie pour les préparations naturelles peu préoccupantes (PNPP). L'article L.253-1 du code rural et de la pêche maritime définit ces produits comme suit : « Une préparation naturelle peu préoccupante est composée exclusivement soit de substances de base, [...] soit de substances naturelles à usage biostimulant. Elle est obtenue par un procédé accessible à tout utilisateur final. Les substances naturelles à usage biostimulant sont autorisées selon une procédure et une évaluation simplifiées, dont les modalités sont fixées par voie réglementaire. La procédure et l'évaluation sont adaptées lorsque la demande d'autorisation porte sur la partie consommable d'une plante utilisée en alimentation animale ou humaine. »
9. Produits de lutte biologique Les produits de lutte biologique permettent de maîtriser les organismes nuisibles pour les cultures au moyen d'organismes vivants antagonistes. Ils correspondent aux macroorganismes et aux microorganismes définis plus haut dans le cadre des produits de biocontrôle. * *
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PUBLIÉ
: Extrait de l'interview du sénateur Joël Labbé
Source : « En vert et avec vous » - juillet 2018
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: Données complémentaires sur les méthodes alternatives non chimiques
Source : UNEP
Traitement manuel et mécanique
Traitement thermique
Traitement avec des produits de biocontrôle
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PUBLIÉ
: Amélioration de l'ergonomie avec un désherbeur
Source : Matériel et Paysage, n° 146, avril 2019 (extrait)
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INVALIDE)