Prévenir les expulsions locatives tout en protégeant les propriétaires et anticiper les conséquences de la crise sanitaire (Covid-19)

DEMOULIN, Nicolas ; LEBLANC-LAUGIER, Marianne ; ZERAÏ, Hédi

Auteur moral
France. Conseil général de l'environnement et du développement durable ; France. Ministère de la transition écologique et solidaire
Auteur secondaire
Résumé
<div style="text-align: justify;">Le rapport permet de répondre à un double enjeu : prendre les mesures nécessaires face à la crise actuelle tout en améliorant à long terme la politique de prévention des expulsions locatives, dans le meilleur intérêt des locataires comme des propriétaires. Le « maintien dans le logement » est intégré dans les politiques sociales de lutte contre l'exclusion depuis une trentaine d'années. Devant la gravité de la pandémie (Covid 19) qui a frappé la France en 2020, le gouvernement a adopté un plan renforcé pour éviter toute remise à la rue non accompagnée d'une offre de relogement. Mais la politique de prévention des expulsions locatives présente encore des faiblesses. Le rapport propose de renforcer le pilotage stratégique et la coordination opérationnelle qu'une multitude d acteurs et de commissions ne remplacent pas ; et d'optimiser les procédures pour assurer une meilleure égalité de traitement et éviter leur judiciarisation.</div>
Editeur
Ministère de la transition écologique ; Ministère chargé du logement
Descripteur Urbamet
expulsion ; logement ; prévention des risques ; évaluation des politiques publiques ; politique du logement ; locataire ; location ; protection de l'environnement ; propriétaire ; crise ; procédure ; stratégie
Descripteur écoplanete
Thème
Habitat - Logement
Texte intégral
Prévenir les expulsions locatives tout en protégeant les propriétaires et anticiper les conséquences de la crise sanitaire (Covid-19) Nicolas DÉMOULIN Député de la 8ème circonscription de l'Hérault Parlementaire en mission auprès de la ministre de la transition écologique et de la ministre chargée du logement avec la contribution de Marianne LEBLANC LAUGIER Inspectrice générale de l'administration du développement durable, au CGEDD et la collaboration de Hédi ZERAÏ Attaché parlementaire Rapport remis au Premier ministre Décembre 2020 Je remercie l'ensemble des administrations qui m'ont épaulé au cours de mon travail et notamment M. Sylvain Mathieu, délégué interministériel pour l'accès au logement et à l'hébergement d'urgence ainsi que les équipes du pôle prévention des expulsions locatives de la DIHAL. Les services du ministère de la transition écologique en charge du logement et plus particulièrement Mme Marianne Leblanc Laugier, Inspectrice Générale au Conseil général de l'environnement et du développement durable, section Habitat, cohésion sociale et développement territorial M. Hédi Zéraï, collaborateur parlementaire à Paris. Je tiens également à adresser des remerciements à M. Éric N'Zengui, Mme Céline Attard, M. Bruno Bertrand, Mme Lucie Pollin, M. Jean-Claude Rodde et à l'ensemble des personnes avec lesquelles j'ai eu le plaisir d'échanger au cours de cette mission. Toutes vos contributions m'ont été précieuses dans l'élaboration de ce rapport. Pour finir, et parce que mon travail de parlementaire ne serait pas le même sans eux, je remercie mes collaborateurs, M. Gilles Hervio, M. Olivier Boudet, M. Alexis Cabière, M. Romain Lesenne, Mme. Michèle Ledroit, ainsi que mon épouse Mme Sophie Démoulin. Sommaire Liste des recommandations................................................................................................................. 7 « Prévenir plutôt que guérir » .......................................................................................................... 14 1 Active depuis 30 ans et objet de mesures renforcées le temps de l'urgence sanitaire, la politique de prévention des expulsions locatives présente encore des faiblesses ............................................................................................................................................. 16 1.1 Le « maintien dans le logement » est intégré dans les politiques sociales de lutte contre l'exclusion depuis une trentaine d'années......................................................................16 1.2 Devant la gravité de la pandémie (Covid-19) qui a frappé la France en 2020, le gouvernement a adopté un plan renforcé pour éviter toute remise à la rue non accompagnée d'une offre de relogement.......................................................................................17 1.3 Le système global de prévention des expulsions présente encore des faiblesses à corriger........................................................................................................................................................18 2 Renforcer le pilotage stratégique et la coordination opérationnelle qu'une multitude d'acteurs et de commissions ne remplacent pas ............................................. 20 2.1 Beaucoup d'acteurs interviennent dans les procédures mais trop faiblement en prévention initiale ..................................................................................................................................21 2.2 Limiter le nombre d'instances de médiation, de conciliation et de coordination, qui rendent le système peu lisible et difficile d'accès aux non-initiés .......................................24 2.3 Renforcer les moyens et les informations dont disposent les CCAPEX pour atteindre une pleine efficacité ...............................................................................................................................26 2.4 Engager la concertation pour partager les bonnes pratiques et éviter la disparité des remèdes et des moyens mis en place, à l'origine d'inégalités de traitement ..........28 2.5 Eviter les conséquences d'une certaine fracture territoriale ................................................31 2.6 Optimiser la coordination opérationnelle et la généraliser au plus près des arrondissements en étroite concertation avec les collectivités territoriales .................31 2.7 Consolider le pilotage stratégique aux plans départemental et national et le doter d'instruments de data appropriés ....................................................................................................33 3 Optimiser les procédures pour assurer une meilleure égalité de traitement et éviter leur judiciarisation ............................................................................................................. 36 3.1 Les données disponibles révèlent un séquencement différencié entre parc social et parc privé ...................................................................................................................................................36 3.2 Améliorer l'instruction des affaires dans le cadre des procédures judiciaires ..............38 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 4/86 3.3 Mieux utiliser le commandement de payer (CDP) en prévention et permettre une phase de négociation à confier à l'huissier ...................................................................................39 3.4 Abaisser ou supprimer les seuils de signalement des CDP aux CCAPEX ..........................40 3.5 Rendre plus lisibles les actes de la procédure pour diminuer le taux de non-réponse ........................................................................................................................................................................41 3.6 Lutter contre le non-recours au droit, une des plus grandes défaillances de notre société ..........................................................................................................................................................41 3.7 Prendre des dispositions pour éviter le refus, par certains propriétaires, du versement du FSL destiné au maintien du locataire dans le logement .............................42 3.8 Mobiliser plus souvent les mesures existantes d'accompagnement social personnalisé (MASP) .............................................................................................................................42 3.9 Intégrer la prévention des troubles pathologiques du comportement, notamment psychiques .................................................................................................................................................43 3.10 3.11 Renforcer les liens entre les magistrats et les autres acteurs ...................................43 Poursuivre le dialogue sur la « mauvaise foi » ................................................................44 3.12 Mieux réguler l'octroi du concours de la force publique (CFP), étape ultime avant l'expulsion......................................................................................................................................45 4 Mobiliser l'offre disponible de logement au plus tôt .......................................................... 47 4.1 Identifier l'offre de logements mobilisable à court et moyen termes ................................47 4.2 Mobiliser la part disponible des logements vacants du parc social ....................................48 4.3 Restructurer le parc social pour adapter l'offre aux besoins ................................................49 5 Optimiser les moyens financiers de nos politiques de prévention ................................ 50 5.1 Eviter le dérapage des dettes et des charges collectives liées à l'enchaînement des délais de procédures ..............................................................................................................................50 5.2 Connaître les coûts des procédures pour les réduire ...............................................................50 5.3 Miser sur le « retour sur investissement social » .......................................................................51 5.4 Evaluer le régime de l'APL à l'aune des non-bénéficiaires .....................................................52 6 Anticiper les effets économiques de la crise sanitaire pour les locataires et les propriétaires ..................................................................................................................................... 53 6.1 La crise sanitaire a mis au ralenti de nombreux dispositifs et de nombreux acteurs .53 6.2 Evaluer et suivre le risque d'augmentation des impayés locatifs........................................53 6.3 Identifier et soutenir les « petits » propriétaires, fragilisés par l'aggravation des Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 5/86 impayés .......................................................................................................................................................55 6.4 Le recours aux systèmes de garanties est trop faiblement répandu mais doit être encadré ........................................................................................................................................................57 6.5 Bien qu'exposés aux conséquences économiques de la crise sanitaire, les bailleurs sociaux sont mieux armés....................................................................................................................58 7 Consolider le « bouclier » de l'urgence sanitaire (Covid-19) et anticiper la sortie de la trêve hivernale au printemps 2021 ................................................................................ 62 7.1 Veiller de manière active sur un nouveau public à risque......................................................62 7.2 Anticiper et préparer la sortie de la trêve hivernale 2021 .....................................................63 7.2.1 Identifier les ménages concernés par un CFP en 2021 .................................................65 7.2.2 Mobiliser les capacités de logement pour les ménages en voie d'expulsion ........65 7.2.3 Déterminer des priorités dans la reprise des expulsions ............................................67 7.2.4 Echelonnement et maîtrise de la reprise des CFP...........................................................67 7.2.5 Abonder le budget destiné à l'indemnisation des bailleurs ........................................68 7.2.6 Valoriser et partager les retours d'expériences autour de cellules d'urgence ....68 Annexes ..................................................................................................................................................... 71 1 Lettre de mission du Premier ministre .................................................................................... 72 2 Actes d'huissiers lors de la procédure d'expulsion ............................................................. 74 3 Liste des services et personnes auditionnées........................................................................ 81 4 Glossaire .............................................................................................................................................. 84 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 6/86 Liste des recommandations Recommandation 1. Déployer des sous commissions opérationnelles des CCAPEX, à l'échelon intercommunal ou métropolitain en fonction des données démographiques et des choix de gouvernance, de manière à augmenter les capacités et la fluidité du traitement préventif au plus près des territoires ....................................... 25 Recommandation 2. Etudier l'opportunité d'intégrer les commissions locales d'impayés de loyers (CLIL) et les commissions départementales de conciliation (CDC) dans les sous-commissions opérationnelles des CCAPEX pour faciliter l'identification d'une instance unique et son accès à tout public. ........................................ 26 Recommandation 3. Confier aux huissiers de justice la transmission d'informations (composition du ménage, âge du locataire et téléphone portable) dès la première rencontre des locataires lors de la signification du commandement de payer et la transmettre à la CCAPEX. .................................................................................................................... 28 Recommandation 4. Engager une concertation avec l'ADF et France urbaine sur (i) le financement des FSL, (ii) l'abondement des fonds par tous les opérateurs de l'énergie, de l'eau et des réseaux de télécommunications, (iii) l'harmonisation des critères d'accès aux aides en vue de mettre fin aux inégalités de traitement d'un département ou d'une métropole à l'autre. Ne pas exclure un encadrement réglementaire des dispositions relatives aux conditions d'accès aux aides octroyées par les FSL. ............................................................................................................................................... 29 Recommandation 5. Mettre en conformité les règlements intérieurs des FSL avec les chartes départementales pour la prévention des expulsions. .............................................. 30 Recommandation 6. Etablir des rapprochements par l'intermédiaire des associations de maires avec les élus pour les associer à la stratégie nationale de prévention des expulsions locatives. .............................................................................................. 31 Recommandation 7. Mobiliser les collectivités territoriales pour qu'ils prennent une part active à la stratégie de prévention des expulsions, en participant aux CCAPEX et en rationalisant leurs liens avec les communes et leurs CCAS. ............................................. 32 Recommandation 8. Renforcer le rôle des CCAPEX en rendant leurs avis exécutoires et en introduisant, des obligations de présence des différents acteurs. ........................... 32 Recommandation 9. Faire évoluer le système d'information EXPLOC pour qu'il soit davantage partagé, accessible à l'ensemble des acteurs de la procédure (huissiers, services sociaux des CCAS, CIAS, départements et métropoles, CAF, MSA, représentants des bailleurs privés et sociaux), dans le respect des règles de la CNIL et du RGPD et qu'il permette un suivi opérationnel par la transmission obligatoire Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 7/86 d'informations à toutes les étapes. Créer des interfaces avec d'autres systèmes d'information comme celui propre aux commissions de médiation (COMDALO) et celui du système national d'enregistrement des demandes de logements sociaux (SNE). ......................................................................................................................................................... 33 Recommandation 10. Engager une étude interministérielle sur la comptabilisation au titre du compte du logement des indemnités à verser aux propriétaires bailleurs en cas de refus du concours de la force publique, afin de dissocier la question des troubles potentiels à l'ordre public de la simple contrepartie accordée à la nonexécution des décisions judiciaires. ............................................................................................... 35 Recommandation 11. Renforcer les capacités de pilotage du pôle PEX de la DIHAL avec le doublement de son effectif et la création d'un ETP dédié à l'exploitation du logiciel EXPLOC. ..................................................................................................................................... 35 Recommandation 12. Confier à une mission spécifique à caractère interministériel un diagnostic des causes de la lenteur des délais des procédures conduisant à l'expulsion locative. .............................................................................................................................. 38 Recommandation 13. Lancer un appel à manifestation d'intérêt auprès des départements et des métropoles pour expérimenter de nouvelles organisations visant à généraliser les diagnostics sociaux et financiers destinés aux juges et à les produire le plus en amont possible - dès le CDP - à l'intention des CCAPEX. ................... 39 Recommandation 14. Permettre l'accès des huissiers aux parties communes des immeubles afin qu'ils puissent entrer en contact direct avec les personnes menacées d'expulsion ou, à défaut, déposer leurs actes et informations relatifs à la procédure et aux dispositifs de prévention dans les boîtes aux lettres. ................................................. 40 Recommandation 15. Instaurer par voie législative une phase de négociation qui pourrait être conduite par les huissiers de justice sur mandat des bailleurs avant l'assignation. Augmenter d'un mois le délai qui précède l'assignation pour ce faire et réduire d'autant le déla légal qui suit l'assignation avant l'audience en cas d'échec. .. 40 Recommandation 16. Supprimer le seuil fixé par décret pour le signalement des CDP à la CCAPEX par les huissiers de justice, afin de pouvoir agir sur le traitement précoce de tous les impayés. .............................................................................................................................. 41 Recommandation 17. Simplifier le contenu et l'accès aux informations transmises aux locataires dans le cadre de la procédure d'expulsion en utilisant la méthodologie "Facile à lire et à comprendre" (FALC) promue au niveau gouvernemental (Sms locataires aux différents stades de la procédure : actes d'huissiers, courriers transmis par les préfectures)............................................................................................................ 41 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 8/86 Recommandation 18. Confier à l'huissier, lors de la délivrance du CDP, le soin de remettre au locataire une notice détaillant toutes les aides et accompagnements appropriés. Solliciter l'ANIL pour l'élaboration de cette notice en lien avec les ADIL afin d'adapter les aides et les contacts à chaque département. Cette notice devrait inviter le locataire à prendre contact avec une agence de proximité de l'ADIL avec pour première consigne de vérifier le décompte qui lui a été remis. ................................. 42 Recommandation 19. Faire évoluer la loi pour rendre effectif l'octroi du FSL au bailleur. ..................................................................................................................................................... 42 Recommandation 20. Permettre aux CCAPEX de saisir le préfet pour une demande de MASP 3. ................................................................................................................................................ 42 Recommandation 21. Transmettre aux ADIL la cartographie des ressources territoriales en matière de santé mentale et leurs acteurs (Santé Mentale France). ... 43 Recommandation 22. Renforcer les liens informels entre les magistrats, les services préfectoraux, ceux de l'aide sociale des collectivités et les bailleurs, en lien avec les CCAPEX. ..................................................................................................................................................... 44 Recommandation 23. Etablir une concertation au niveau national sur les déterminants de la « mauvaise foi » en matière d'impayés locatifs de façon à permettre aux dispositifs administratifs (FSL, CCAPEX, CAF) de mieux objectiver leurs avis, à l'instar de la commission de surendettement de la Banque de France. .... 45 Recommandation 24. Autoriser la transmission aux commissariats, par l'intermédiaire des services préfectoraux, des données sociales et familiales présentes dans les diagnostics sociaux et financiers effectués en amont des procédures à destination des juges. ............................................................................................... 46 Recommandation 25. Mobiliser l'offre de logement des bailleurs sociaux dès que l'évaluation sociale et financière établie par les travailleurs sociaux au stade du commandement de payer permet de conclure au besoin d'un relogement adapté aux revenus des locataires en difficulté. ............................................................................................... 48 Recommandation 26. Faciliter la signature d'accords de mutualisation de l'offre entre bailleurs sociaux d'une part et avec les réservataires de logements du parc social d'autre part pour disposer d'un volant d'offre immédiatement employable...... 48 Recommandation 27. Réaliser une étude sur l'intermédiation locative dans le parc social pour adapter l'offre disponible aux niveaux de loyers requis dans le cadre des besoins de relogement des locataires menacés d'expulsion. ................................................ 48 Recommandation 28. Mobiliser les plus de 30.000 logements sociaux vides et Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 9/86 vacants depuis plusieurs années, ne serait-ce qu'à titre transitoire. ................................. 49 Recommandation 29. Concevoir de nouvelles formes de baux pour faciliter la cohabitation par la colocation dans le parc social..................................................................... 49 Recommandation 30. Etudier la restructuration de grands logements d'une partie du parc social en fonction des besoins recensés dans chaque territoire, en intégrant les besoins relevés par les CCAPEX. ................................................................................................ 49 Recommandation 31. Miser sur le renforcement de l'instruction dès le CDP et l'identification d'une proposition de relogement en sous-commission des CCAPEX pour décharger la collectivité des coûts induits par l'enchaînement des procédures et éviter dans le même temps aux propriétaires l'immobilisation de leurs biens et l'accroissement de leurs pertes financières. ............................................................................... 50 Recommandation 32. Confier à l'IGF et l'IGAS une étude des charges induites par les différentes phases des procédures visant la prévention des expulsions locatives ........ 51 Recommandation 33. Valoriser par appel à manifestation d'intérêt à lancer auprès des métropoles et des départements en tant que porteurs de projets, des expérimentations de mobilisation du secteur associatif en lien avec des bailleurs sociaux pour mettre en valeur le retour sur investissement social. ................................... 52 Recommandation 34. Evaluer l'impact de l'absence d'accompagnement par les CAF/MSA en cas d'impayés pour les ménages qui ne bénéficient pas des APL. .............. 52 Recommandation 35. Assouplir les règles d'attribution (cotation, ancienneté, règles de priorité...) pour pouvoir mobiliser des logements en attribution immédiate, notamment pour les jeunes, sur la base d'un volume annuel d'attributions. ................. 55 Recommandation 36. Renforcer les moyens dédiés à « l'aller-vers » les locataires en situation de fragilité économique et sociale qui rencontrent des difficultés de paiement de leurs loyers. ................................................................................................................... 55 Recommandation 37. Mettre fin aux pratiques de négociation des indemnités dues aux bailleurs par les préfets lorsqu'ils n'accordent pas le concours de la force publique. Systématiser le paiement de ces indemnités. En revoir l'imputation budgétaire (compte du logement)................................................................................................... 57 Recommandation 38. Intégrer pleinement les assureurs dans les politiques de préventions d'expulsions (Signataire des chartes départementales, contributions FSL, ADIL...) .............................................................................................................................................. 57 Recommandation 39. Concevoir une évolution de l'offre de garantie, pour permettre Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 10/86 à des bailleurs privés d'adhérer directement à ce système d'assurance. Ceci suppose d'en redéfinir les conditions financières et les clauses d'intervention, sans faire obstacle au rôle des intermédiaires de l'administration de biens. ..................................... 57 Recommandation 40. Proposer aux départements et métropoles d'expérimenter un repérage précoce de ménages pouvant basculer dans l'impayé locatif par recours aux acteurs associatifs, de façon à les orienter rapidement vers le conseil des ADIL. ......... 62 Recommandation 41. Dans le parc social, formaliser une méthodologie de signalement des ménages à risque d'impayés par les gardiens d'immeubles en capitalisant sur les expériences réalisées dans le cadre de l'appel à projets "10.000 logements accompagnés". .................................................................................................................. 62 Recommandation 42. Prendre en compte rapidement le cas des personnes ayant signé des protocoles de cohésion sociale ou en cours de remboursement d'échéancier fixé par le juge et envisager des aides pour tous les ménages qui assumaient leur échéancier avant la crise sanitaire et qui démontreraient une baisse de leurs revenus liée à la crise sanitaire. ...................................................................................... 63 Recommandation 43. Prévoir dès le premier trimestre 2021 la multiplication des équipes mobiles déployées sur le terrain. .................................................................................... 63 Recommandation 44. Elaborer un plan d'actions destiné à gérer dès maintenant la fin de la trêve hivernale. Le faire en liaison étroite avec les représentants des collectivités territoriales, des administrations et des différents acteurs sociaux. ........ 65 Recommandation 45. Fixer dans chaque département des objectifs mensuels d'attribution de logements ciblés pour les ménages faisant l'objet d'une réquisition de la force publique aux fins d'expulsion. .................................................................................... 66 Recommandation 46. Renforcer temporairement les effectifs des DDCS et des CCAPEX en charge de la coordination des dispositifs d'accompagnement social, du relogement et de l'hébergement. ..................................................................................................... 66 Recommandation 47. Renforcer temporairement les effectifs des préfectures en charge de l'instruction des CFP. ........................................................................................................ 67 Recommandation 48. Négocier au niveau national les modalités de contribution des bailleurs sociaux à l'effort d'échelonnement de l'exécution des CFP en 2021. ............... 68 Recommandation 49. Échelonner la reprise de l'exécution des CFP accordés sur les années 2021 et 2022. ........................................................................................................................... 68 Recommandation 50. Abonder le budget du programme 216 destiné à indemniser Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 11/86 les propriétaires bailleurs pour lesquels l'exécution de la force publique sera reportée au-delà de la fin de la trêve hivernale ou suspendue dans l'attente d'un relogement effectif des occupants. .................................................................................................. 68 Recommandation 51. Mettre en place une conférence PEX début 2021 réunissant les collectivités territoriales pour partager les pratiques innovantes en matière de FSL. 70 Recommandation 52. Prévoir les moyens d'agir en urgence pour soutenir les ménages fragiles impactés financièrement par la crise. ......................................................... 70 Recommandation 53. Mettre en place début 2021 une cellule d'urgence dans chaque département destiné à coordonner les efforts de tous les acteurs de la politique de prévention des expulsions et à piloter un plan d'actions........................................................ 70 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 12/86 « Prévenir plutôt que guérir » L'expulsion d'un locataire est un drame humain, dont la societe ne peut se satisfaire. C'est le symptome le plus souvent d'un accident de la vie et la consequence d'une situation conflictuelle ou problematique non resolue. C'est le denouement d'une periode critique, souvent longue, malgre la mobilisation des acteurs publics et prives concernes. C'est la raison pour laquelle la prevention des expulsions locatives a ete integree dans les politiques sociales portees par l'Etat depuis plus de trente ans. L'instauration de dispositifs dédiés a la prevention des expulsions locatives a permis d'ameliorer le recensement, la comprehension des causes et la capacite de suivi et de traitement des situations rencontrees : impayes de loyers pour l'essentiel, dont la resolution passe par l'apurement des dettes rencontrees ou l'alternative du « delogement » suivi d'un relogement. Chaque cas est singulier et merite attention pour parvenir a une solution adaptee le plus tot possible. Mais les milliers de cas signales ont conduit a engorger le systeme de traitement mis en place. Il est decevant de constater la multitude de situations qui connaissent une aggravation par derive dans le temps malgre l'implication des acteurs associes au processus. Le contexte particulier de la crise sanitaire traversee par la France depuis mars 2020, due a la pandemie mondiale de la Covid-19, constitue un substrat renforce de risques de decrochage economique et social pour de nombreuses personnes isolees et familles. Les mesures exceptionnelles prises par le gouvernement ont pu, jusqu'a ce jour, amortir les effets attendus en matiere d'impayes de loyers, mais les observateurs s'accordent a prevoir une resurgence du nombre de cas problematiques au printemps prochain, a l'issue de l'habituelle treve hivernale. En outre, il n'est pas exclu que la situation puisse etre durablement degradee au plan economique et social pour des publics precaires, si l'on admet que la France devra apprendre a vivre avec le virus. C'est dans ce contexte que le Premier ministre m'a confié une mission aupres de la ministre de la transition ecologique et de la ministre deleguee aupres de la ministre de la transition ecologique, chargee du logement, pour « identifier des mesures d'urgence à mettre en oeuvre dès à présent pour organiser au plus vite des relogements lorsque des solutions sont possibles, y compris pendant la période hivernale pour sécuriser à la fois les locataires endettés et les propriétaires (et pour veiller) également à proposer des actions de prévention structurelles à moyen et long termes. » Une large part d'écoute a ete accordee dans la conduite de cette mission a toutes les parties prenantes : associations d'insertion et de lutte contre l'exclusion, associations de defense des droits des locataires, associations de proprietaires prives et federations de bailleurs sociaux, organisations professionnelles representatives des administrateurs de biens, magistrats et commissaires de justice, instances departementales et metropolitaines, services de l'Etat tant en administration centrale qu'au plus pres des territoires. J'ai tenu a rencontrer de nombreux acteurs, a assister a plusieurs commissions locales de coordination. Le constat que j'en retiens peut paraître sévère, d'une certaine complexite du processus judiciarise, de l'illisibilite due a la multiplicite des acteurs et des commissions auxquels locataires et proprietaires peuvent s'adresser, de l'obsolescence des outils de pilotage et de suivi des donnees, d'une differenciation departementale dans la prise en compte des situations individuelles conduisant a des inegalites de traitement, d'organisations de proximite plus ou moins bien coordonnees et de couts partiellement evitables pour la puissance publique, les proprietaires et les contributeurs. Certaines difficultes et insuffisances relevees ont pourtant deja ete soulignees par des rapports anterieurs sans etre suivies des corrections attendues. L'intérêt général commande que l'expulsion locative ne soit exécutée qu'en « dernier ressort » apres examen des alternatives possibles et sous reserve de disposer d'une proposition adaptee de relogement ou d'hebergement, a fortiori dans un contexte épidémique (Covid-19). Cela suppose que Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 14/86 l'organisation soit optimisee et le systeme simplifie et ameliore pour que l'ensemble des parties prenantes puissent apporter leurs concours au plus pres des personnes menacees d'expulsion, au plus tot et a moindre charge collective. Puissent mes propositions trouver leur juste place dans les mesures qui seront prises par le gouvernement dans les jours a venir, au coeur de la crise et dans les reformes structurelles a engager dans un horizon que j'espere proche. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 15/86 1 Active depuis 30 ans et objet de mesures renforcées le temps de l'urgence sanitaire, la politique de prévention des expulsions locatives présente encore des faiblesses 1.1 Le « maintien dans le logement » est intégré dans les politiques sociales de lutte contre l'exclusion depuis une trentaine d'années Depuis une trentaine d'annees, les politiques sociales de lutte contre l'exclusion ont integre l'acces au logement et la prevention des expulsions locatives dans leurs objectifs. L'ecart entre l'evolution des ressources des menages et celle des prix de l'immobilier1 est revelateur d'une augmentation du taux d'effort des menages, avec un doublement du poids du loyer dans le revenu des locataires en 40 ans, plus accentue dans certaines metropoles et territoires en tension. Les impayes de loyers qui resultent de ces difficultes financieres ont ete a l'origine d'une augmentation des procedures d'expulsion avant de connaître une certaine stabilisation (Cf. § 3). Cette stabilisation est en partie due a l'ensemble des dispositifs progressivement mis en place pour traiter les situations signalees aux services sociaux en amont et tout au long des procedures contentieuses engagees en resiliation de bail. Il est donc utile de rappeler les dispositions significatives portees par les gouvernements successifs dans le cadre des lois suivantes : la loi n° 90-449 du 31 mai 1990, dite loi Besson, visant « la mise en oeuvre du droit au logement » avec la creation des « plans départementaux d'action pour le logement des personnes défavorisées » (PDALPD) et l'introduction du Fonds de solidarité pour le logement (FSL) cogere et cofinance par l'Etat et le Conseil general, dont une des fonctions vise au « maintien dans les lieux » ; la loi d'orientation n° 98-657 du 29 juillet 1998 relative a la lutte contre les exclusions avec l'objectif d'un accompagnement des menages en situation d'impayes, la saisine de la Commission départementale des aides publiques au logement (CDAPL) ­ remplacee depuis par les CCAPEX ­ avant tout engagement de procedure, et l'instauration de chartes départementales de prévention des expulsions locatives ; la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohesion sociale, qui transfere aux départements le pilotage des FSL, avec la possibilite de maintenir les aides au logement dans le parc social une fois la résiliation du bail prononcee par le juge, et la signature de protocoles d'apurement de dette entre bailleur et locataire sous le controle des CDAPL ; la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007, dite loi DALO, instituant le droit au logement opposable, avec le classement des « menaces d'expulsion » parmi les cibles de populations fragiles susceptibles de beneficier d'un droit à relogement par l'État sur le contingent préfectoral, et le relogement dans le parc social rendu possible aux differents stades des procedures d'expulsion engagees ; la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, dite loi MOLLE, de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion, instaurant les « plans departementaux d'accueil, d'hebergement et d'insertion » (PDAHI) et rendant obligatoires les commissions de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (CCAPEX) en responsabilite conjointe de l'Etat et de l'executif departemental avec la volonte d'assurer une meilleure coordination des acteurs impliques (huissiers ou Banque de France par exemple) ; la loi de finances rectificative du 29 juillet 2011, mettant en place le fonds national Cf. Graphiques de l'immobilier par Jacques Friggit pour le CGEDD : http://www.cgedd.fr/loyer-revenu-2013.pdf et diapos 39 et suivantes de http://www.cgedd.fr/prix-immobilier-presentation.pdf. 1 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 16/86 d'accompagnement vers et dans le logement (FNAVDL) pour recueillir les astreintes payees par l'Etat en cas de non relogement des personnes reconnues « prioritaires et urgentes » par les commissions de mediation dans le cadre du DALO, et financer des mesures d'accompagnement social pour aider au relogement de ces personnes ; la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014, dite loi ALUR, pour l'acces au logement et un urbanisme renove, avec l'encadrement des loyers, le projet de deploiement d'une garantie universelle des loyers, l'interdiction de pénalités pour les retards de loyers, la réduction du délai de prescription en matiere de recouvrement de loyers impayes a 3 ans au lieu de 5 ans, le report de la date d'échéance de la trêve hivernale du 15 au 31 mars de chaque annee, mais aussi d'autres mesures de protection du locataire telles que le modele de bail incluant plus de transparence dans l'etat des lieux, la reduction du preavis en zones tendues ou pour les locataires handicapes et ceux en sante fragile, la reduction du delai de restitution du depot de garantie a un mois, l'encadrement des frais des intermediaires de la location ; en parallele, la fusion des PDALPD et des PDAHI en « PDLHPD » et la consécration des Services intégrés d'accueil et d'orientation (SIAO) déjà mis en place par circulaire du 8 avril 2010 pour organiser la coordination des acteurs et rassembler les donnees de l'offre potentielle en vue de simplifier les demarches d'acces a l'hebergement et au logement ; la loi n°2018-1021 du 23 novembre 2018, dite loi ELAN, portant evolution du logement, de l'amenagement et du numerique, visant notamment a renforcer le modele du logement social, avec l'incitation a mieux employer l'offre dans le parc social existant, via plus de transparence dans les attributions et le renforcement des mutations. 1.2 Devant la gravité de la pandémie (Covid-19) qui a frappé la France en 2020, le gouvernement a adopté un plan renforcé pour éviter toute remise à la rue non accompagnée d'une offre de relogement Le President de la Republique avait engage en septembre 2017 un plan quinquennal 2018-2022 appele « Logement d'abord » destine a prioriser une strategie inclusive pour l'acces au logement des personnes sans-abris. Le maintien dans le logement des personnes en situation de rupture familiale ou professionnelle risquant de connaître une expulsion a aussitot ete integre a cette strategie, afin d'eviter de mettre la collectivite en responsabilite de nouvelles « mises a la rue ». Cette politique a ete relayee a tous les niveaux de l'Etat et placee notamment sous la vigilance de la delegation interministerielle pour l'hebergement et l'acces au logement (DIHAL), chargee d'animer le reseau des acteurs de la prevention et de l'insertion sociale, aux cotes des collectivites territoriales. La-dessus surgit l'épidémie de la Covid-19 en France au debut de l'annee 2020, a laquelle le gouvernement fait face par l'adoption de lois constatant « l'état d'urgence sanitaire », l'autorisant a legiferer par ordonnances. Une serie de mesures sont alors prises par le gouvernement pour gerer cette situation exceptionnelle : prolongement à deux reprises de la trêve hivernale, jusqu'au 31 mai puis 10 juillet 2020, par ordonnance n°2020-331 du 25 mars 2020 puis prorogation similaire a celle de l'etat d'urgence sanitaire jusqu'au 10 juillet 2020 ; instruction du ministre chargé du logement aux préfets le 2 juillet 2020 pour (i) eviter les remises a la rue a l'issue de la treve dite hivernale, soit apres le 10 juillet 2020, (ii) assortir tout concours de la force publique à une proposition de relogement effective et adaptee aux besoins des personnes ayant fait l'objet d'une decision de justice visant leur eviction du logement occupe, ou tout au moins une solution d'hebergement et d'accompagnement des cas les plus difficiles pour des raisons de sante (mentales ou psychiques en particulier), (iii) recenser en lien avec les CCAPEX les personnes concernées par un commandement de Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 17/86 quitter les lieux et verifier qu'elles se soient prealablement inscrites comme demandeurs de logements sociaux et puis qu'elles soient bien identifiees comme prioritaires 2 pour les attributions a venir, (iv) utiliser enfin les capacités d'attribution tant sur le contingent de reservation prefectorale que sur celui des autres reservataires (collectivites ayant apporte leur garantie, Action Logement) au vu de leurs capacites et obligations d'attributions3, (v) inciter les bailleurs sociaux a effectuer toutes les mutations potentielles au sein de leur parc locatif ; intensification d'une veille nationale dans la gestion de la crise confiee au pôle national de prévention des expulsions locatives de la DIHAL, avec une animation territoriale renforcee (visioconferences frequentes avec les DDCS, foire aux questions) ; concertation avec Action Logement, qui a abouti a l'allocation d'une enveloppe de 100 M destinee a prévenir les impayés de loyers par une aide ponctuelle aux menages confrontes a une baisse significative de leurs ressources d'au moins 15% le temps de l'etat d'urgence sanitaire (subvention forfaitisee a 150/mois sur deux mois, conditionnée à un plafond de revenus de 1,5 fois SMIC et un taux d'effort d'au moins 40%) ; nouvelle instruction de la ministre chargée du logement aux préfets le 17 octobre 2020 pour preparer la campagne hivernale 2020-2021 dans le contexte de crise sanitaire, en rappelant l'impératif du maintien dans le logement ou l'hébergement prevu par la circulaire du 2 juillet et notamment le refus du concours de la force publique si une solution de logement ou d'hebergement n'a pas ete prealablement identifiee. Les mesures prises le temps de la crise sanitaire ont vocation à être réinterrogées, non pour alléger les dispositifs de prévention des expulsions locatives, indispensables dans la durée, mais pour anticiper la nécessaire « sortie de la trêve hivernale » qui aura lieu au printemps 2021 et prendre en considération les effets de la crise pour les propriétaires bailleurs. 1.3 Le système global de prévention des expulsions présente encore des faiblesses à corriger Il serait prétentieux de vouloir refaire ici une évaluation exhaustive de la politique de prévention des expulsions locatives tracee par l'excellent rapport interministeriel reunissant les inspections generales de l'administration des ministeres de l'interieur (IGA), des affaires sociales (IGAS), des services judiciaires (IGSJ) et le conseil general de l'environnement et du developpement durable (CGEDD) rendu en août 2014 dans le cadre des missions de modernisation de l'action publique (MAP) sous l'egide du premier ministre. L'analyse des organisations et procedures en place aboutissait a mettre en exergue : la mobilisation effective des acteurs de la prevention, mais trop tardive, le plus souvent au stade ultime precedent l'expulsion accordee par decision judiciaire ; le manque de coordination des acteurs ; la logique de l'apurement generalement privilegiee, sans prendre suffisamment tot en compte la nature des difficultes conjoncturelles ou structurelles rencontrees, privant les personnes fragilisees d'une solution rapide de relogement adapte ; des inégalités de traitement manifestes entre locataires du parc social et ceux du parc residentiel prive ; l'absence de gouvernance nationale et de priorisation des objectifs ; le developpement necessaire d'une offre de logement abordable. Public prioritaire au sens du L.441-1 du code de la construction et de l'habitation Obligations d'attribution de 25% aux beneficiaires du DALO hors quartiers sensibles PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 18/86 2 3 Rapport Nicolas DÉMOULIN A la suite de ces constats, le gouvernement adressait aux préfets de régions et de départements le 22 mars 2017 une instruction4 relative à la mise en oeuvre d'un plan interministériel pour la prévention des expulsions locatives, visant à renforcer la coordination des acteurs en amont et en aval de la décision judiciaire. Force est de constater que l'application de cette instruction est très inégale et à parfaire d'une manière générale. D'autres sources d'informations ont nourri mes travaux, dont la thèse de Camille François5 en 2017 qui a recueilli de nombreux témoignages très éclairants au plus près du terrain. A l'issue de mes auditions, je relève trois grandes faiblesses encore présentes dans le système en place en 2020, qu'il s'agisse : 1° - du pilotage stratégique et de la coordination opérationnelle 2° - de la doctrine qui préside à la déclinaison des procédures 3° - de la mobilisation tardive de l'offre disponible de logement Instruction des Ministeres des affaires sociales et de la sante, de l'interieur, du logement et de l'habitat durable, des familles, de l'enfance et des droits des femmes, des personnes handicapees et de la lutte contre l'exclusion 4 Cf. These de sociologie et science politique de Camille François : « Deloger le peuple ­ l'Etat et l'administration des expulsions locatives » - novembre 2017 - Universite Paris 8. 5 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 19/86 2 Renforcer le pilotage stratégique et la coordination opérationnelle qu'une multitude d'acteurs et de commissions ne remplacent pas La politique sociale de prevention des expulsions a donne lieu a l'instauration d'un systeme global assez complexe, qui repose sur de nombreuses instances et releve de multiples acteurs. Il convient de rappeler au prealable que 96 % des procedures visant la rupture du bail locatif concernent des impayes de loyers, ce qui constitue la colonne vertebrale des dispositifs mis en place. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 20/86 2.1 Beaucoup d'acteurs interviennent dans les procédures mais trop faiblement en prévention initiale Bien que l'expulsion locative soit le resultat final d'une rupture de la relation contractuelle entre un bailleur et son locataire, elle releve d'une procedure qui met en jeu l'intervention de nombreux acteurs. Leur ordre d'intervention n'est pas systematiquement ordonne, tant la prevention peut se faire aux differents stades d'une procedure en recouvrement d'impayes. Le rappel suivant n'est donc justifie ni par l'importance des responsabilites ni par la chronologie des evenements : l'Etat : plusieurs ministères sont concernes, le logement, l'intérieur, les affaires sociales, la justice, auxquels on pourrait ajouter l'outre-mer ; ceci justifie la presence de la délégation interministérielle, la DIHAL, chargee d'assurer l'interface et de faire des propositions ; ils sont relayes par les services déconcentrés places sous l'egide des préfets, au plan regional (DREAL en region hexagonale, DEAL en outre-mer et DRIHL en Ile-de-France) pour une veille permanente au respect des orientations de cette politique et au plan departemental (DDCS) pour participer a la coordination des operations de prevention, a la mise en place et au suivi des PDALHPD ; en amont des procedures contentieuses, des conciliateurs de justice et lorsque ces procedures sont engagees, des magistrats ; au terme des procedures, sur ordre des prefets, interviennent les forces de police pour rendre l'expulsion effective ; les collectivités territoriales : au premier rang desquelles les conseils départementaux pour leur competence en matiere de politique sociale, a la fois en situation de declinaison des politiques de prevention avec la determination des criteres d'acces aux FSL, la definition des chartes de prévention des expulsions locatives, la coordination des CCAPEX en lien avec les services prefectoraux et DDCS, mais aussi en capacite de conduite d'actions d'ecoute, de conseil et d'accompagnement social des familles par leurs travailleurs sociaux polyvalents ; s'ajoutent aux departements les communes avec leurs centres communaux d'action sociale (CCAS), pourvoyeurs d'aides et d'informations sur les dispositifs existants, les intercommunalités avec les centres intercommunaux d'action sociale (CIAS) et les métropoles, qui disposent de travailleurs sociaux aupres desquels les locataires peuvent s'adresser pour obtenir de l'information et parfois de l'aide financiere ; les « contributeurs » : parmi eux, les principaux gestionnaires des aides personnelles au logement que sont les caisses departementales d'allocations familiales (CAF) et la mutualite sociale agricole (MSA), disposent des informations relatives aux ressources des locataires et de travailleurs sociaux de grande proximité ; on pourrait ajouter pour memoire certains fournisseurs d'énergie qui collectent une contribution pour les FSL depuis que le soutien au paiement des factures d'energie a ete fusionne dans un meme fonds que l'aide au paiement des loyers ; des professionnels du droit et des procédures, au premier rang desquels interviennent les huissiers de justice, officiers ministeriels incontournables pour la redaction et la signification d'actes decisifs dans le deroulement des procedures et en capacite d'apporter des prestations complémentaires de conseil, de médiation et d'orientation par une evaluation des situations budgetaires et sociales des locataires qu'ils sont souvent les seuls a approcher ; interviennent egalement des avocats dans le cadre des assignations en justice ; la Banque de France dont les decisions en apurement de dettes ont une influence majeure ; des professionnels de l'immobilier : administrateurs de biens, gestionnaires pour le compte des proprietaires en relation directe avec les locataires et les services assurantiels qu'ils proposent ; des associations prestataires d'accompagnement social et d'aide a l'insertion, nombreuses sur l'ensemble des departements, et dont certaines sont organisees en federations : Fondation Abbe Pierre (FAP), Droit au logement (DAL), SOLIHA... ; des associations délivrant de l'information et des conseils juridiques pour tout public Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 21/86 comme les associations departementales d'information pour le logement (ADIL), mais aussi les associations de consommateurs (CLCV) et les associations de locataires (CNL) et de proprietaires (Chambres départementales ou régionales) dont certaines se rassemblent dans des federations, telles l'Association nationale pour l'information sur le logement(ANIL) ou l'Union nationale des proprietaires immobiliers (UNPI). Les collectivités disposent de travailleurs sociaux dedies a l'ecoute et au conseil des personnes en difficulte financiere et sociale (les departements et communes principalement, mais aussi les intercommunalites depuis quelque temps), mais ce sont des agents « polyvalents » pas assez nombreux pour etre affectes a la seule question des impayes alors qu'il faut des competences particulieres et qu'ils ne sont pas toujours disponibles ni formés pour aller au-devant des personnes et des situations sur le terrain. Ils y ont egalement parfois renonce du fait que les conditions de securite n'etaient pas reunies dans certains quartiers sensibles depuis quelques annees. En réalité, la question des moyens humains ­ travailleurs sociaux dont les competences se chevauchent ou bien qui sont en nombre insuffisant et qui attendent d'etre saisis plutot que d'aller audevant des cas ­ apparaît cruciale pour traiter le plus en amont possible les situations. C'est un des axes de réformes à engager. Les différences de moyens consacrés à l'aide sociale, notamment au niveau des effectifs des CCSA et CIAS ressortent nettement de la carte de France publiee par l'Observatoire des finances et de la gestion publique locales (OFGPL) en octobre 20206 : L'etude de l'OFGPL indique : « Les CCAS-CIAS regroupent plus de 126 000 agents au 31 décembre 2018 (dont environ 5 000 dans les CIAS). Les effectifs par région peuvent fortement varier selon le territoire considéré. Le nombre d'agents pour 10 000 habitants est par exemple 10 fois plus élevé en Bretagne, région la plus fortement dotée (41) qu'en Guyane, région la plus faiblement dotée (4). Ces disparités « Cap sur les enjeux financiers portes par les CCAS et CIAS » - Octobre 2020 - Une publication de l'Observatoire des Finances et de la Gestion publique Locales 6 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 22/86 peuvent traduire des différences de moyens, mais surtout une diversité dans la politique d'action sociale menée localement. ». De leur côté, les CAF sont plus opérationnelles en la matiere. Les ressources dont elles disposent au niveau de l'information sur les revenus des locataires et etant immanquablement averties des le commencement des situations d'impayes, leur permettent une plus grande vigilance et une proactivite. Cependant, la gestion économe des allocations familiales pose la question d'une augmentation de leur participation à la prévention. De plus, les locataires ne bénéficient pas tous de ces allocations, ce qui pourrait présenter un inconvénient à l'extension de leur rôle au profit de tous. Enfin, la Mutualité sociale agricole est le pendant des CAF pour les actifs et les retraités de l'économie agricole, ce qui imposerait de dupliquer le dispositif. A l'aune des pratiques observées dans de nombreux departements (cf. § 2.4), il apparaît interessant de convenir de faire appel à des professionnels, associatifs notamment, pour pallier les insuffisances de moyens et de competences. En conclusion, les compétences sociales présentes dans chaque département doivent être recensées précisément pour vérifier l'adéquation des capacités disponibles au regard du nombre de locataires susceptibles de connaître des situations de décrochage social et financier. Cela suppose un veritable pilotage strategique en presence des differents acteurs institutionnels et des associations representant les bailleurs prives et sociaux (cf. § 2.7). De fait, le nombre de locataires devant être approchés et suivis est récurrent dans chaque departement, si l'on en juge par les statistiques et les temoignages recueillis. C'est egalement corrobore par l'etude conduite par le Centre de recherche pour l'etude et l'observation des conditions de vie (CREDOC) pour le compte de l'Observatoire de la pauvrete et de l'exclusion sociale (ONSES)7 : « La phase économétrique, nécessaire à l'objectivation et à la quantification des disparités territoriales en matière de demandes d'expulsion locative et de décisions de justice, parvient à expliciter 65% de la variance du phénomène entre 2007 et 2014. La structure sociale, démographique et économique des territoires apparaît déterminante. La cherté des loyers, l'importance du taux d'effort des locataires, la part des familles monoparentales, des ménages surendettés accentuent grandement le risque d'expulsion locative. L'impact de la crise économique, du renchérissement du coût du logement n'est toutefois pas évident. Les corrélations entre les taux d'assignation et l'évolution du chômage, du taux de pauvreté ou du niveau de vie ne sont pas immédiates. A l'issue de cette phase, 35% de la variance reste inexpliquée. L'analyse qualitative de contextes départementaux « hors modèle », présentant un risque d'expulsion plus ou moins important par rapport au modèle prédictif, apporte des éléments de compréhension quant aux effets de structure (état de l'offre locative dans le parc social et privé, coût du logement...) et de jeux d'acteurs sur les dispositifs de prévention, les conditions d'assignation et la gestion de la phase contentieuse de l'impayé. » Lorsque le recensement des compétences met en évidence un manque de travailleurs sociaux en capacite de faire de « l'aller-vers » les locataires des leurs premieres defaillances, il convient de prendre la décision d'y remédier par le renforcement des effectifs ciblés sur les communes et intercommunalités qui en manquent ou la mise en place d'un partenariat avec des professionnels sous l'égide des conseils départementaux. Par ailleurs, le nombre d'intervenants tout au long des procedures impose de pouvoir disposer d'une vision d'ensemble et de données suffisantes pour séquencer les interventions. C'est le sujet du pilotage et du partage des informations (cf. § 2.4 et 2.6). « Etude econometrique et qualitative sur le debut du processus d'expulsion locative » du CREDOC pour l'ONPES ­ Fevrier 2017 7 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 23/86 2.2 Limiter le nombre d'instances de médiation, de conciliation et de coordination, qui rendent le système peu lisible et difficile d'accès aux non-initiés Les ADIL, dont on constate une forte presence sur l'ensemble du territoire metropolitain, mais l'absence dans une quinzaine de départements, constatent jour apres jour une mauvaise connaissance des dispositifs et des aides a mobiliser par les locataires et les proprietaires. Il est un fait que plusieurs instances de mediation ou de conciliation ont ete instaurees au fil des decennies dans le domaine du logement, destinees a remedier aux situations conflictuelles entre proprietaires et locataires ou a venir en aide aux locataires impecunieux. Ces instances tiennent leur existence des collectivités auxquelles elles sont rattachées et des organisations professionnelles qui les animent. Certaines commissions délivrent des contributions financières pour aider a la resorption des difficultes budgetaires rencontrees, notamment en impayes de loyers. La plupart de ces instances sont cependant consultatives. La collégialité qui les caracterise est determinee par la necessite de reunir les avis des representants des differentes parties prenantes mais egalement retenue pour faciliter la prise de decisions et partager la responsabilité des arbitrages, comme le soulignent certains universitaires8. Les instances suivantes sont operantes dans le cadre de la prevention des expulsions locatives : les commissions locales d'impayés de loyers (CLIL) deployees sur certaines communes par les collectivites volontaires, les bailleurs et les services sociaux des conseils departementaux, ces instances partenariales permettent un reperage des difficultes des menages et une coordination des interventions a une echelle de proximite favorisant un traitement d'impayes locatifs le plus en amont possible de la procedure, en general, avant l'assignation ; les commissions départementales de conciliation (CDC) qui traitent rarement de dettes de loyers, sauf sur la base de contestations des bases de loyers et de charges (hausses de loyers sous-evalues au moment du renouvellement des baux, respect de l'encadrement des loyers : dans ce cas, il est même obligatoire de la saisir avant de faire appel au juge) ; elles rassemblent a part egale des representants des bailleurs prives (Chambres departementales de proprietaires adherentes a l'UNPI) et des locataires (CNL, CLCV, CGL, etc.) et obtiennent des resultats dans 70 a 80% des cas par l'adoption de solutions amiables (etat des lieux, decence...) ; leur activite est cependant tres inegale selon les departements avec parfois peu de representants disponibles ; les commissions départementales de médiation (DALO) pour la mise en oeuvre du droit opposable au logement, sous la responsabilite des prefets de departements, qui emettent un avis sur le caractère prioritaire ou non des demandes de logements sociaux et peuvent tenir compte à ce titre du risque d'expulsion locative, tout en etudiant la composition familiale, l'etat de sante et les aptitudes physiques ou les handicaps des personnes concernees ; dans la mesure ou la priorite est retenue, le prefet doit mettre tout en oeuvre, en liaison avec les bailleurs sociaux et les associations gerant des structures d'hebergement pour faire des propositions de logement adaptees aux besoins dans un delai contraint ; les commissions spécialisées de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (CCAPEX), placees sous la presidence conjointe du prefet et du president du conseil departemental et dotees d'un secretariat generalement assure par la DDCS(PP), elles comptent parmi les membres de droit les representants des CAF et MSA, les maires des communes concernees et de maniere facultative des representants de bailleurs sociaux ; elles peuvent etre saisies par les bailleurs, le.s cautionnaires, les menages en impayes, les commissions DALO, les agences immobilieres, mais egalement les commissions locales d'impayes, les CCAS et CIAS, 8 Cf. These de sociologie et science politique de Camille François deja citee PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 24/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN tous les travailleurs sociaux et associations ; elles émettent de simples avis aupres d'autres instances decisionnelles et des bailleurs, notamment sur le maintien ou sur la suspension des APL, sur l'approbation ou le rejet d'un plan d'apurement ; elles sont informees des decisions qui sont prises posterieurement a leurs avis ; des sous-commissions techniques peuvent être déployées au niveau de chaque arrondissement ; la commission de surendettement des particuliers de la Banque de France (BdF), qui est mentionnee ici pour memoire, dans la mesure ou elle peut decider d'un reechelonnement des dettes (sur une duree de 7 ans maximum), d'une suspension des dettes (pendant 2 ans au maximum), de l'effacement partiel de creances (sauf celles payees par la caution) combine avec les mesures precedentes, ce qui a un impact sur le cours des procedures ; les commissions départementales du FSL, qui gerent le fonds de solidarite pour le logement mis en place par chaque departement (voire metropole) suivant des criteres d'eligibilite et d'octroi d'aides, determines par un reglement interieur ; elles accordent des aides financieres (sous forme de subventions ou de prets), par l'intermediaire de travailleurs sociaux (assistantes sociales, conseilleres en economie sociale et familiale...) aux personnes rencontrant des difficultes dans le paiement des depenses liees a leur logement, soit a l'entree du logement (depot de garantie, premier loyer, frais d'agence, frais de demenagement, assurance du logement, achat du mobilier de premiere necessite...), soit pour s'y maintenir (loyers, charges, factures d'electricite, de gaz, d'eau et de telephone, frais d'huissier...). Plusieurs observations s'imposent, sur les rôles respectifs de ces instances et les moyens dont elles disposent. La question merite tout d'abord d'etre posee : comment peuvent se repérer les locataires et les propriétaires isolés dans tout ceci ? Bien que ces instances aient un role bien defini, plusieurs d'entre elles ont une vocation similaire consistant a traiter de situations precontentieuses. Dès lors, ne faudrait-il pas les regrouper pour disposer d'un interlocuteur unique plus facilement identifiable ? En premier lieu, le rôle des CLIL lorsqu'elles existent, pourrait etre accompli par les souscommissions des CCAPEX a condition de pourvoir a leur mise en place a cette echelle locale. Les representants des communes y siegent naturellement. D'une manière plus radicale, tous les départements devraient être dotés de CCAPEX opérationnelles au plus près des territoires sur lesquels ces commissions ont a intervenir, l'arrondissement étant désigné en raison de la presence d'un sous-prefet representant de l'Etat, mais ce pourrait etre à l'échelon intercommunal ou métropolitain pour disposer d'une force d'intervention à la hauteur des enjeux ; substituer aux CLIL des sous-commissions des CCAPEX serait donc judicieux pour disposer d'une seule structure de coordination, parfaitement identifiée. En second lieu, les CLIL et les CCAPEX restent peu accessibles aux propriétaires privés, bien qu'ils puissent y etre representes, mais parce qu'ils sont rarement accompagnes dans leurs demarches, alors que les CDC leur sont ouvertes, notamment parce qu'ils y sont contraints avant de pouvoir ester en justice dans certains cas particuliers (desaccords sur les niveaux de loyers pratiques). En définitive, n'y aurait-il pas lieu de faire absorber les compétences des CDC par les CCAPEX opérationnelles au plus pres de chaque arrondissement ou echelon territorial optimal ? De cette maniere, une seule instance de coordination pourrait traiter l'ensemble des cas émanant de locataires du parc privé comme du parc des bailleurs sociaux, avec une identification immédiate. Recommandation 1. Déployer des sous commissions opérationnelles des CCAPEX, à l'échelon intercommunal ou métropolitain en fonction des données démographiques et des choix de gouvernance, de manière à augmenter les capacités et la fluidité du traitement préventif au plus près des territoires. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 25/86 Recommandation 2. Etudier l'opportunité d'intégrer les commissions locales d'impayés de loyers (CLIL) et les commissions départementales de conciliation (CDC) dans les souscommissions opérationnelles des CCAPEX pour faciliter l'identification d'une instance unique et son accès à tout public. Par ailleurs, les nouvelles dispositions introduites par la loi ELAN en 2018 pour améliorer l'articulation entre les procédures en surendettement et les procédures visant la résiliation du bail, doivent faire leurs preuves (cf. § 2.3 et 2.4). Enfin, le fait que les decisions prises par les CCAPEX ne soient pas opposables aux parties interessees en limite considerablement la portee. Il conviendrait, au contraire, de renforcer le rôle des CCAPEX pour qu'il devienne prépondérant dans le traitement de la prévention des expulsions locatives. 2.3 Renforcer les moyens et les informations dont disposent les CCAPEX pour atteindre une pleine efficacité Le constat est regrettable. Les CCAPEX réunissent des acteurs qui démontrent une énergie remarquable mais manquent de moyens. Cela empeche de traiter efficacement les nombreux dossiers qui leur sont transmis. Ces instances essentielles travaillent « dans le brouillard », par manque d'informations. La transmission et la qualite des informations concernant chaque dossier en procedure d'expulsion sont pourtant des éléments déterminants pour orienter la prévention vers le maintien et l'apurement de la dette ou le relogement du ménage en difficulté. Il a ete observe dans differentes CCAPEX que plus de trois quarts du temps est consacré à la recherche des informations du locataire et du bailleur au détriment du temps de l'analyse et des préconisations. Faute de disposer des informations necessaires a temps, il n'est pas rare que des cas particuliers soient étudiés à plusieurs reprises, ce qui grève inutilement le temps disponible des partenaires reunis dans ces commissions. Cette « improductivité » rend meme toute presence optionnelle de bailleurs dissuasive, alors que cette présence permettrait de déterminer des voies de solutions de relogement en adequation avec le profil des locataires beaucoup plus tôt. Les faiblesses des CCAPEX relevées par la mission du CGEDD en 20129 sont encore d'actualité, comme j'ai pu le constater en ayant assisté à certaines séances et entendu de nombreux acteurs : - des moyens humains trop réduits - des chartes souvent sans portée - des avis non contraignants - un nombre de cas traités infime par rapport à la masse des assignations - des avis qui dépendent des décisions des CAF pour une reprise ou un rappel des aides au logement - des avis qui dépendent des bailleurs sociaux pour fournir une offre alternative de relogement - des avis qui dépendent de la commission de surendettement - des avis qui ont un effet aléatoire sur la mise en place du FSL, très diversement pris en compte Pourtant, dans l'esprit de la loi ALUR de mars 2014 comme dans le cadre de l'instruction interministérielle du 22 mars 2017 relative a la mise en oeuvre du plan interministériel pour la prévention des expulsions locatives, il est essentiel que les CCAPEX agissent le plus tôt possible dans la procedure. A quelques rares exceptions, ce n'est malheureusement pas le cas. Dans certaines CCAPEX, nous avons note un manque de mobilisation important de certains acteurs. Cf. Rapport du Conseil general de l'environnement et du developpement durable (CGEDD) sur « les bonnes pratiques des CCAPEX » - juin 2012 9 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 26/86 Tous les observateurs sont unanimes a ce sujet. L'étude du CREDOC10 menee aupres d'un tres grand nombre de departements confirme cette « rareté des actions de prévention des impayés et de l'expulsion locative à un stade précoce (et le fait que) hormis les bailleurs sociaux, très peu d'acteurs investissent ce temps en amont ou post assignation. La difficulté à évaluer les risques, à estimer les perspectives ou chances de rétablissement des ménages, le manque de moyens des CCAPEX pour un accompagnement à ce stade de l'ensemble des situations et, plus généralement, la mauvaise information des bailleurs privés sur les procédures sont les principaux motifs de cette vacance préventive. » La note de l'ANIL publiee en septembre 2020 souligne « une mobilisation des acteurs réelle, mais trop tardive, des dispositifs de prévention qui existent, mais privilégient les interventions en aval, la mise en place de démarches amiables souvent compromise par une mauvaise connaissance des dispositifs et des aides à mobiliser, et des locataires enquêtés qui prennent conscience trop tardivement des conséquences d'un impayé de loyer et du risque d'expulsion. » La DIHAL qui est en correspondance avec les DDCS de l'ensemble des departements et un certain nombre de collectivites territoriales et d'acteurs de l'insertion sociale confirme « des avis émis souvent trop tard dans le processus pour avoir quelque effet préventif, des diagnostics sociaux et financiers qui parviennent aux services préfectoraux au moment seulement de délivrer ou non le concours de la force publique. » Alors que les CCAPEX ont l'opportunité de réunir les acteurs principaux de la prévention (collectivites dont le conseil departemental en qualite de chef de file de l'action sociale, bailleurs et CAF), on note selon les territoires une disparite des acteurs signataires des chartes departementales de prevention des expulsions. La signature de ces chartes ne prevaut cependant aucunement d'une presence effective lors des commissions. Il a ete constate que les magistrats, la MSA et dans une moindre mesure la Banque de France y siegeaient rarement. Or, il est imperatif d'en accroître l'efficacite par une mobilisation et une presence effective des signataires des chartes departementales. Acteurs signataires des chartes départementales de prévention des expulsions locatives Une recherche d'efficacité suppose que le traitement des dossiers soit mieux renseigné en amont pour permettre d'adapter l'accompagnement « sur mesure » au plus tot, au stade des premiers impayes. 10 Etude CREDOC 2017 deja citee au § 2.2 PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 27/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN Meme au dernier stade des procedures d'expulsion, il n'est pas rare de constater que les policiers charges d'apporter leur concours ne disposent pas d'elements determinants pour leur intervention, tels que l'age du locataire et la composition de sa famille. C'est symptomatique d'une défaillance du système à laquelle il est urgent de remédier. Cette faille dans le système global de prévention doit être comblée : non seulement ce diagnostic doit être systématique, mais il doit être établi le plus tôt possible et continuellement enrichi par le suivi des situations individuelles. De l'avis de différents acteurs auditionnés, et sur proposition de la chambre nationale des commissaires de justice, la preeminence des huissiers de justice a pouvoir rencontrer les locataires des le commencement des procedures en recouvrement d'impayes leur confere une capacite de dialogue indiscutable. Leur qualité d'officiers publics et ministériels et leur rôle incontournable aux differents stades des procedures en recouvrement d'impayes est une opportunite mal employee. De cette situation privilégiée, à rebours d'une stigmatisation de leur profession, les huissiers de justice, futurs « commissaires de justice »11, pourraient jouer un rôle accru pour combler le déficit d'information constaté au niveau des CCAPEX, faciliter l'orientation dans le traitement des situations individuelles rencontrées et en prévenir le dérapage. Recommandation 3. Confier aux huissiers de justice la transmission d'informations (composition du ménage, âge du locataire et téléphone portable) dès la première rencontre des locataires lors de la signification du commandement de payer et la transmettre à la CCAPEX. 2.4 Engager la concertation pour partager les bonnes pratiques et éviter la disparité des remèdes et des moyens mis en place, à l'origine d'inégalités de traitement Les orientations retenues par les conseils departementaux, et certaines metropoles competentes depuis 2015 sur leur perimetre, donnent lieu a des moyens et des pratiques divers. Ces divergences concernent en premier lieu les orientations retenues dans le cadre du fonctionnement des CCAPEX, mais aussi du FSL et des effectifs dedies a l'accueil, a l'ecoute et au conseil des populations fragiles, avec le concours parfois d'acteurs de l'insertion sociale dans le cadre de partenariats. La liberté d'objectifs et de moyens donnée aux CCAPEX, malgre les directives adressees aux prefets par l'instruction interministerielle du 22 mars 2017, donne lieu a des differences d'approche et d'organisation entre departements. Les chartes departementales de prevention des expulsions locatives comportent des plans d'actions plus ou moins flechees. Les commissions sont plus ou moins doctrinales et leurs declinaisons operationnelles ne sont pas systematiquement deployees (cf. § 2.2). Les prefets de departements assistent rarement a ces commissions, en raison de leur caractere operationnel, de leur lourdeur et de leur repetition. La preparation de ces commissions est souvent faible, faute d'echanges suffisants entre les services des collectivites et de l'Etat, mais faute egalement d'informations suffisamment partagees (cf. § 2.6). La forte disparité des règlements FSL geres par les departements ou les metropoles est egalement saisissante : bien que leur role commun soit d'aider a sortir un menage d'une Par decret n° 2019-1185 du 15 novembre 2019 relatif a la formation professionnelle des commissaires de justice et aux conditions d'acces a cette profession, pris en application de l'ordonnance n° 2016-728 du 2 juin 2016 relative au statut de commissaire de justice sur habilitation de la loi n° 2015-990 du 6 aout 2015, dite loi PACTE, pour la croissance, l'activite et l'egalite des chances economiques, les metiers d'huissier de justice et de commissaire-priseur judiciaire fusionneront pour donner naissance a la profession unique de commissaire de justice a compter du mois de juillet 2022, 11 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 28/86 situation particuliere non recurrente, les critères d'éligibilité aux aides (taux d'effort, niveau de revenus, probabilite d'une admission en surendettement...), la nature et le plafonnement des aides (prets ou subventions) et les plafonds de dettes ou de loyers exiges creent de véritables distorsions au détriment des locataires et bailleurs concernés de certains départements par rapport aux mêmes situations traitées dans d'autres départements. De plus, les orientations retenues par de nombreux departements tendent a favoriser l'accompagnement dans l'accès au logement (par la prise en charge du depot de garantie, de la premiere cotisation d'assurance habitation, voire du paiement du premier loyer...) plutôt que le maintien dans le logement 12 . Bien que cela puisse se justifier dans certains contextes en fonction de la rareté de l'offre et de la cherté des loyers, pour des publics jeunes par exemple, l'insuffisance d'aides au maintien dans le logement entraîne des différences de traitement entre différents départements pour des situations similaires difficilement acceptables. Ces arbitrages s'expliquent par l'augmentation du flux des demandeurs et une insuffisance de moyens financiers dédiés. Ce sujet mérite à lui seul une réflexion collective avec l'assemblée des départements de France (ADF) et France urbaine pour les métropoles, afin de : - permettre d'abonder ces fonds pour faire face à l'augmentation des besoins, surtout en temps de crise (cf. § 6) ; - harmoniser les règlements intérieurs pour éviter de fortes inégalités de traitement entre les départements, non justifiées par des réalités locales. A défaut, un encadrement réglementaire pourrait s'imposer, si l'on ne souhaite pas remettre en cause la décentralisation de la gestion de ces fonds. L'inégalité des contributions aux FSL est relevée : il est d'abord constate une absence de contribution de certains fournisseurs d'énergie, mais aussi des opérateurs de réseaux téléphoniques alors que les subventions et prets octroyes par les FSL prennent en compte des depenses de cet ordre, de plus en plus13 ; ceci serait source d'une distorsion de concurrence a laquelle il faut imperativement remedier. Il s'ajoute parfois a cela un manque de solidarité absolument inacceptable entre certains contributeurs occasionnels qui exigent le « flechage » des aides au benefice de leurs seuls clients. Et si le public fragile a tendance a opter pour un « petit » operateur non-contributeur, il n'est pas acceptable non plus que ce type d'opérateur ne contribue pas au FSL. Or la crise pourrait donner lieu a davantage d'impayes de toute nature, et les fournisseurs d'eau, d'énergie et de télécommunications seraient bien avisés de mutualiser leurs efforts au titre de la prevention. Il pourrait être également envisagé d'imposer une contribution minimale en pourcentage du chiffre d'affaires de chaque fournisseur d'eau, d'energie et de telecommunications. Recommandation 4. Engager une concertation avec l'ADF et France urbaine sur (i) le financement des FSL, (ii) l'abondement des fonds par tous les opérateurs de l'énergie, de l'eau et des réseaux de télécommunications, (iii) l'harmonisation des critères d'accès aux aides en vue de mettre fin aux inégalités de traitement d'un département ou d'une métropole à l'autre. Ne pas exclure un encadrement réglementaire des dispositions relatives aux conditions d'accès aux aides octroyées par les FSL. La Fondation Abbe Pierre estime qu'environ 50 millions d'euros sur les 350 millions budgetises par les FSL concerneraient les aides au maintien ­ Septembre 2020 12 13 Voir le rapport 2002 du CGEDD sur la fusion des fonds d'aide aux impayes d'eau, energie dans le FSL PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 29/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN Recommandation 5. Mettre en conformité les règlements intérieurs des FSL avec les chartes départementales pour la prévention des expulsions. En ce qui concerne le milieu associatif, prestataire de missions caritatives ou d'accompagnement social de personnes en difficulte, leur presence et leurs capacites d'intervention varient fortement d'un departement a l'autre. Les collectivites peuvent donc leur confier des missions, de meme que certains bailleurs sociaux, en fonction du nombre de situations auxquelles ils sont confrontes et des effectifs dont ils disposent eux-memes. Il existe de multiples exemples de bonnes pratiques, parmi lesquelles : Le projet ÉTAGE dans la Métropole de Lyon cite par l'USH, porte par Grand Lyon Habitat et regroupant plusieurs bailleurs de la metropole ; ETAGE (Equipe territoriale d'alternative globale a l'expulsion) a pour objet de maintenir dans un logement ordinaire des personnes cumulant des difficultes economiques et sociales. Il intervient sur des situations pour lesquelles les outils et dispositifs de droit commun n'apportent pas de reponse efficace pour prevenir l'expulsion. Il permet le maintien dans le logement ou l'orientation vers une solution d'habitat plus adaptee. Des plateformes territoriales permettent le reperage de ces menages et leur accompagnement coordonne. Plusieurs associations pouvant intervenir aupres du menage sont associees a cette plateforme. Le projet Déclic à Toulouse porte par la SA des Chalets en lien avec deux associations, le Relais et le Touril est une experimentation visant au reperage et a l'accompagnement pluridisciplinaire des menages presentant des risques importants de `'decrochage social'', en situation `'de deni'' face au risque d'expulsion, et avec une problematique necessitant une intervention de proximite souple, adaptable et reactive. L'objectif est de retablir le lien et le dialogue entre les locataires en situation d'isolement et a risque d'expulsion et leur bailleur et autres services d'accompagnement du droit commun (sante, logement). La permanence A.P.P.E.L de Lyon, dispositif existant depuis plus de 20 ans, est un rapprochement des competences juridiques des avocats et des competences sociales des associations et des travailleurs de la C.A.F, qui se fait a un rythme hebdomadaire, chaque vendredi matin au tribunal de grande instance de Lyon et au tribunal d'instance de Villeurbanne, notamment. L'accueil se fait sans rendez-vous et sans conditions, pour delivrer aux menages une information sur leurs droits et obligations, des conseils juridiques, une orientation au regard de leur situation et la mise en place d'un plan pour faire face a l'impaye. L'action "Maintien dans le logement" renforcée sur la métropole de Montpellier, avec le concours de l'association GESTARE : dispositif mis en place par la DDCS 34 avec pour objectif principal le maintien dans le logement social des menages qui presentent un risque avere et serieux de perte de leur logement et susceptibles d'etre pris en charge a tres court terme par des structures d'hebergement ou de logement adapte, alors que celles-ci sont actuellement saturees. Ce dispositif intervient avant la CCAPEX, avec pour objectif d'eviter a tout prix le declenchement de la procedure d'expulsion. La vraie plus-value est la complementarite avec les dispositifs de droit commun existants, le developpement des liens et de la cooperation entre les bailleurs et les acteurs sociaux (federer des acteurs qui se voient peu autour d'un menage en difficulte), associer des le depart le bailleur a la construction du projet du menage. L'action intervient en amont, juste apres le commandement de payer. L'action comporte 4 piliers : actions aupres du menage (visites, demarches, entretiens), un travail social (diagnostic, ouverture de droit, gestion budgetaire, relogement ...), un partenariat pour le relogement avec les bailleurs (contractualisation avec les menages) et le suivi de l'action (outils de suivi, reunions d'equipe, etc.). Le dispositif GRAAL à Lille, propose une intermediation locative et sociale moyennant une Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 30/86 convention tripartite entre le bailleur (suspension de la procedure d'expulsion, adaptation a la situation particuliere du locataire), le locataire (paiement d'une partie du loyer au GRAAL, plan d'apurement de la dette locative) et le GRAAL (diagnostic, mediation, securisation du paiement du loyer, accompagnement global). La presence d'un tiers favorise beaucoup la relation locataire/bailleur, et l'expertise du GRAAL va au-dela de la question de l'expulsion locative. Les perspectives a terme sont de fluidifier les liens avec le service FSL, de mettre en place une evaluation quantitative et qualitative integrant la notion de cout global de l'action, dans le cadre du logement d'abord, pour envisager sa perennisation dans le cadre du PDALHPD, et de faire homologuer la convention tripartite par un juge pour lui donner force d'execution. Enfin, les ADIL constituent de véritables centres de ressources : presents dans la plupart des departements, sauf sur une quinzaine d'entre eux. Ceci est regrettable, bien qu'il y ait l'appui national apporté par l'ANIL et son numéro spécial « SOS impayés », mais il serait bien utile de les developper dans tous les departements. En tant que centres d'information, ils ont des compétences juridiques avérées et s'appuient en cela sur les travaux d'etudes et de reflexions conduits au niveau national par l'ANIL. Ils delivrent donc du conseil a tout public, proprietaires et locataires. En conséquence, à l'instar de certaines ADIL14 qui ont été sollicitées pour apporter des services visant notamment l'établissement de diagnostics sociaux et financiers, il conviendrait de poursuivre et d'encourager ces pratiques. 2.5 Eviter les conséquences d'une certaine fracture territoriale Les territoires ultra-marins, certains departements ruraux sont peu associes aux politiques de preventions des expulsions. La presence des travailleurs sociaux dans ces territoires se fait rare, ainsi certains locataires se retrouvent encore plus isoles face a une procedure. Il en resulte un risque d'inegalite d'acces aux droits., Il serait utile d'organiser un rapprochement par l'intermediaire des associations de maires, et d'effectuer une campagne d'information ciblee sur la politique de prevention des expulsions locatives. Recommandation 6. Etablir des rapprochements par l'intermédiaire des associations de maires avec les élus pour les associer à la stratégie nationale de prévention des expulsions locatives. 2.6 Optimiser la coordination opérationnelle et la généraliser au plus près des arrondissements en étroite concertation avec les collectivités territoriales La multiplicité des acteurs, les différences d'organisation et de traitement des situations selon les departements, le manque de lisibilite des procedures, sans compter leur complexite, confirment la necessite d'un pilotage opérationnel renforcé. L'objectif ne me semble pas devoir être l'application d'un modèle unique à tous les territoires. Je crois cependant indispensable d'opter pour un système commun d'échange d'informations et de coordination bien mieux outillé afin d'éviter les « pertes en ligne » que connaît le système aujourd'hui. Exemple du Vaucluse, ou l'ADIL a ete chargee d'une mission de maîtrise d'oeuvre urbaine et sociale (MOUS) pour instruire des situations du parc prive decouvertes au stade du commandement de payer pour le compte de la CCAPEX. 14 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 31/86 Il y a d'abord une question d'échelle. La coordination operationnelle ne peut se regler au niveau departemental, sauf exception. Les prefets de departements et les executifs metropolitains et departementaux devraient determiner les échelons territoriaux optimum pour assurer une fluidité du traitement des dossiers de prevention des expulsions locatives, susceptibles de pouvoir réunir tous les acteurs indispensables dans la chaîne des interventions. Le transfert de competences du FSL a de nombreuses metropoles a permis de reelles ameliorations sur l'efficacite de la prevention, cependant il reste encore quelques ecueils qu'il conviendrait de combler. Des nombreux reglements FSL n'ont pas evolue a la suite du transfert de competences, de sorte que le reglement FSL d'une grande ville adopte les memes regles que celle du departement et ne prend donc pas en compte les specificites des habitants de la Metropole. Certains seuils permettant l'attribution d'un FSL ne sont ainsi plus adaptes a la population. Recommandation 7. Mobiliser les collectivités territoriales pour qu'ils prennent une part active à la stratégie de prévention des expulsions, en participant aux CCAPEX et en rationalisant leurs liens avec les communes et leurs CCAS. S'il est d'ailleurs revendiqué par quelques services départementaux (DDCS) une présence effective des préfets pour qualifier l'importance attendue des arbitrages à rendre et forcer la présence des partenaires, le nombre de sous-commissions et de seances me fait plutot recommander une présence effective des sous-préfets d'arrondissements et dans certaines circonstances des préfets délégués à l'égalité des chances presents dans les departements a forte densite de quartiers sensibles et de population economiquement et socialement defavorisee. Recommandation 8. Renforcer le rôle des CCAPEX en rendant leurs avis exécutoires et en introduisant, des obligations de présence des différents acteurs. Il faut noter essentiellement le problème du défaut d'instruction continue des dossiers par manque de moyens. Faute d'un système d'information performant, ce sont les effectifs qui apparaissent manquer. Mais en considerant le temps passé, voire perdu, a rassembler au cours des seances des CCAPEX les elements relatifs aux situations individuelles, en sachant que certains dossiers sont etudies au cours de nombreuses seances pour finir par etre mieux saisis, il apparaît urgent de résoudre cet obstacle majeur qu'est l'absence de disponibilité de l'information pour l'efficacité du dispositif. Il est par ailleurs indispensable que les donnees collectees par le systeme national d'enregistrement des demandes de logements sociaux « SNE » soient directement consultables par une interface à créer avec le systeme de suivi des expulsions locatives EXPLOC. Il en est de meme pour ce qui est de connaître les personnes reconnues prioritaires par les commissions de médiation au titre du DALO. Une interface est donc également requise entre le systeme d'information « COMDALO » et EXPLOC. Il y aurait lieu egalement de systématiser l'accès à certaines données des allocataires détenues par les CAF, par une interface à mettre en place avec leur système d'information « CDAP », vu que la CNAF octroie deja par convention des acces specifiques aux acteurs sociaux, parmi lesquels les bailleurs sociaux, les commissions de surendettement, les commissions de mediation du DALO, les commissions FSL et les CCAPEX. A ce sujet, il est rapporté l'existence de trop nombreux cas de locataires au comportement délictueux, partis sans laisser d'adresse avec des dettes de loyers, et qui obtiennent dans leur departement de nouvelle domiciliation l'octroi de nouvelles allocations. Ces situations n'etant pas exceptionnelles, il paraît recommandable d'instaurer au plus tôt un Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 32/86 croisement des systèmes d'information des CAF departementales ou l'instauration d'un fichier national unique auprès de la CNAF pour signaler les cas des allocataires multirécidivistes. Recommandation 9. Faire évoluer le système d'information EXPLOC pour qu'il soit davantage partagé, accessible à l'ensemble des acteurs de la procédure (huissiers, services sociaux des CCAS, CIAS, départements et métropoles, CAF, MSA, représentants des bailleurs privés et sociaux), dans le respect des règles de la CNIL et du RGPD et qu'il permette un suivi opérationnel par la transmission obligatoire d'informations à toutes les étapes. Créer des interfaces avec d'autres systèmes d'information comme celui propre aux commissions de médiation (COMDALO) et celui du système national d'enregistrement des demandes de logements sociaux (SNE). 2.7 Consolider le pilotage stratégique aux plans départemental et national et le doter d'instruments de data appropriés Bien que l'ensemble des ministeres concernes par la politique de prevention des expulsions locatives (logement, interieur, affaires sociales, justice) soient attentifs a l'evolution des situations au plan national, et qu'une circulaire ait donné courant mars 2017 des directives pour le pilotage départemental, la mise en oeuvre et les effets des recommandations exprimees ne sont pas totalement au rendez-vous. Les défauts du système global de prévention tiennent principalement aux défauts de coordination opérationnelle au plan départemental et infra-départemental (cf. § 2.6), aux défauts d'instruction (cf. § 2.3), aux défauts dans le partage des informations et de fait aux manques de moyens des différents travailleurs sociaux qui ne peuvent pallier les difficultés que je viens de rappeler. On ne peut donc se satisfaire de tendances générales sur le long terme d'apparence satisfaisante (cf. schéma ci-après), si l'on connaît les errements des acteurs pour surmonter les obstacles permanents dans la gestion des dossiers, le temps perdu économiquement, et le dérapage consécutif des dettes pesant sur les bailleurs et sur les locataires privés de solutions alternatives à plus court terme. Les résultats de la politique de prévention des expulsions locatives pourraient certainement être encore meilleurs. Evolution des differentes etapes de la procedure d'expulsion sur les vingt dernieres annees : Source : mission d'apres EXPLOC (DIHAL) Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 33/86 Apres avoir connu une hausse continue de 2001 à 2014, de pres de 40%, la courbe a tendance a s'inflechir depuis quelques annees. La DIHAL souligne la baisse tendancielle du nombre de nouvelles procédures, passée de 173.703 en 2014 à 153.127 en 2019. Mais le nombre d'assignations n'est qu'un indicateur. L'année 2019 a malheureusement connu une hausse des décisions judiciaires accordant la resiliation du bail a hauteur de 130.514, contre 119.554 un an plus tot (+ 9% en une année) tandis que le nombre d'expulsions avec le concours de la force publique atteignait 16.700 contre 15.993 en 2018 (+ 4,4%). Ainsi, sur 20 ans alors que les procédures augmentaient de 30%, le nombre d'expulsions avec le concours de la force publique était multiplié par 3. Nous constatons ainsi que depuis quelques annees, une derive et une defaillance de nos politiques font augmenter tres fortement les decisions de CFP executes au regard du nombre de procedures. Bien sûr, 2020 est une année particulière. Compte tenu des mesures gouvernementales de prolongation de la trêve hivernale d'abord jusqu'au 31 mai, puis jusqu'au 10 juillet, et de la quasiparalysie des tribunaux lors du premier confinement, l'annee 2020 va connaître, d'une part, un ralentissement des décisions judiciaires, et d'autre part, l'absence d'expulsions "sèches". A ce titre, les instructions ministerielles contenues dans l'instruction du 2 juillet 2020, en cohérence avec les principes du plan Logement d'abord, ont ete mises en oeuvre. La mobilisation des services territoriaux de l'État et de l'ensemble de leurs partenaires a permis de proposer des solutions concretes de relogement ou d'hebergement a la majorite des personnes menacees d'expulsion, en particulier aux menages presentant des vulnerabilites (personnes agees, handicapees, ou en presence d'enfants). La DIHAL a pu annoncer debut novembre « une diminution historique du nombre d'expulsions locatives en 2020 », puisqu'au 31 octobre, date d'entree en vigueur de la treve hivernale 2020-2021, moins de 3 500 personnes avaient été expulsées de leur logement, soit une baisse de 79% par rapport a l'annee 2019. Cela reste problematique puisque nombre de procedures connaissent une suspension provisoire (cf. § 7.). La politique de prévention des expulsions locatives doit donc être poursuivie et ses performances améliorées. Au niveau départemental, le renforcement de l'opérationnalité des sous-commissions des CCAPEX (cf. § 2.2 à 2.6) doit être assorti d'un pilotage départemental à la mesure des enjeux. Il est important que les préfets s'investissent à ce niveau-là pour convenir avec les executifs des collectivites territoriales competentes (métropoles, départements, mais aussi communes et intercommunalités) des inflexions à donner aux politiques locales et de l'adaptation des moyens a leur conferer. C'est egalement dans cette enceinte que la présence de représentants des professions de justice (huissiers et magistrats) et d'une délégation de la commission de surendettement de la Banque de France prendrait toute son importance. Au niveau national, la politique de prevention des expulsions locatives concerne quatre ministeres, Logement, Santé, Justice et Intérieur. Malgre des efforts indeniables, les objectifs de ces ministères s'opposent encore dans certaines circonstances. Il est evident que les doctrines du ministere du Logement et du ministere de l'Interieur ne s'accordent pas entre le maintien dans le logement, pour l'un et l'expulsion pour l'autre. Non pas que le ministere de l'Interieur soit « friand » de l'expulsion locative, mais la « pénalité » relative aux dédommagements accordés aux propriétaires apres le refus du concours de la force publique est comptabilisee sur un « budget operationnel de programme » (BOP 216) du ministere de l'Interieur. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 34/86 C'est aussi le cas pour le recueil des donnees via le logiciel EXPLOC, dont la charge est portee par le ministere de l'Interieur. Il apparaît plus que necessaire de porter un regard sur l'opportunite de transferer la charge de ces deux volets d'action vers le ministere du logement. Recommandation 10. Engager une étude interministérielle sur la comptabilisation au titre du compte du logement des indemnités à verser aux propriétaires bailleurs en cas de refus du concours de la force publique, afin de dissocier la question des troubles potentiels à l'ordre public de la simple contrepartie accordée à la non-exécution des décisions judiciaires. Par ailleurs, il est indéniable que le pilotage interministériel a été consolidé par le renforcement de la DIHAL avec la création de son pôle de prévention des expulsions locatives. Mais leurs moyens sont relativement limites, avec un effectif de deux personnes seulement. Cet effectif est évidemment insuffisant dans la période actuelle, en raison des besoins engendrés par la crise sanitaire, avec des demandes d'interventions supplementaires, a la suite du signalement de nombreux acteurs de terrain tels que les associations d'insertion sociale et le besoin d'un partage d'informations resserre avec les services departementaux donnant lieu a des conseils et des orientations rediffusees a tous. La faiblesse de l'effectif se ressent d'autant plus que les « instruments de bord » sont modestes. La surveillance des donnees n'est pas optimale si elle repose sur un système d'information aussi obsolète. Il n'est pas acceptable d'attendre plus d'un an pour disposer des données départementales et nationales consolidées, alors qu'il est devenu imperatif de pouvoir les connaître a minima tous les six mois. Recommandation 11. Renforcer les capacités de pilotage du pôle PEX de la DIHAL avec le doublement de son effectif et la création d'un ETP dédié à l'exploitation du logiciel EXPLOC. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 35/86 3 Optimiser les procédures pour assurer une meilleure égalité de traitement et éviter leur judiciarisation 3.1 Les données disponibles révèlent un séquencement différencié entre parc social et parc privé Dans la grande majorité des situations, les impayés de loyers font suite à un accident de la vie (perte d'emploi, sante, divorce, rupture familiale, deces...). Face aux difficultes nouvelles, il n'est pas rare que le loyer devienne la variable d'ajustement du budget familial. A la suite de ces accidents, il advient generalement une rupture des droits, la suspension des aides personnelles au logement, l'augmentation insurmontable des charges. Ces situations nous conduisent a un devoir de solidarité nationale. A l'oppose, pour la minorité de locataires qui font preuve d'une mauvaise foi caractérisée, il s'agit de disposer de moyens plus coercitifs comme l'utilisation des saisies (mobilier, salaire, retenues d'aides sociales), et de renforcer la surveillance des multirécidivistes. Tout se joue à l'origine des situations d'impayes. Apres plusieurs echeances impayees, locataires et bailleurs s'opposent, leurs relations et liens de confiance se brisent et les situations finissent par leur echapper si les bailleurs ne sont pas des bailleurs professionnels. Je mets a part les 4,6 millions de logements geres par les bailleurs sociaux (cf. § 6.5). Sur les 7 millions de logements du parc privé, 35% sont administrés par des professionnels de l'immobilier15 et il reste 5 millions de logements pour lesquels bailleurs et locataires sont assez démunis. Une fois que les procedures en recouvrement de loyers sont engagees, l'engrenage judiciaire peut s'avérer difficilement contrôlable. Pourtant, la politique de prevention des expulsions locatives impose justement d'etre en mesure d'analyser les situations pour ajuster au mieux les dispositifs d'accompagnement et les solutions alternatives tout au long des procedures engagees. Le résultat de la politique de prévention peut être examiné à partir du séquencement des procedures, tel qu'il resulte des donnees consolidees disponibles pour l'annee 2018 (dans le logiciel EXPLOC et par deduction des donnees USH) : Pour les 4,5 millions de locataires du parc social : - 138.000 commandements de payer (CDP), soit 3,1% du parc social 68.000 assignations, soit 1,5% 35.000 decisions de justice, soit 0,8% 31.000 commandements de quitter les lieux (CQL), soit 0,7% 20.000 demandes de concours de la force publique (CFP), soit 0,4% 8.000 expulsions realisees avec le CFP, soit 0,2% Pour les 7 millions de locataires du parc privé : - 352.000 commandements de payer (CDP), soit 4,9% du parc privé 86.000 assignations, soit 1,2% 85.000 decisions de justice, soit 1,2% 37.200 commandements de quitter les lieux (CQL), soit 0,5% 29.200 demandes de concours de la force publique (CFP), soit 0,4% 8.000 expulsions realisees avec le CFP, soit 0,1% Abstraction faite du patrimoine des investisseurs institutionnels (plus tres nombreux dans le parc prive depuis trente ans) 15 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 36/86 Impact du sequencement des procedures pour les locataires : Source : mission a partir des donnees EXPLOC et USH au titre de 2018 Ce sequencement met en evidence les differences de gestion entre parc social et parc prive. Les bailleurs sociaux conduisent des démarches de prévention, de suivi et de relance très tôt, ce qui induit un moindre pourcentage de signification par CDP (3,1% du parc). A contrario, les bailleurs privés qui arrivent au CDP, sont plus nombreux en proportion (4,9%) mais ils obtiennent de vrais résultats à ce stade, puisque a la suite des CDP, ils n'engagent de procédures judiciaires que dans 1,2% des cas. Ce sont donc 266.000 locataires du parc privé qui sont a priori supposés avoir repris le paiement de leur loyer ou pu obtenir un plan d'apurement de leurs creances locatives, ou bien ont opte pour se reloger par ailleurs, mais qui ne sont pas « embarqués » vers une expulsion de leur logement (sauf si la situation se degrade a nouveau, mais il y a en quelque sorte un temps de repit). Les entrées en procédure judiciaire sont assez équivalentes en nombre et en pourcentage entre les deux types de gestion, mais les décisions de justice sont beaucoup plus systématiquement favorables (à 98,8%) aux recours exercés par les bailleurs du parc privé (85.000 decisions pour 86.000 assignations), alors qu'elles representent à peine plus de 50% des recours exercés par les bailleurs sociaux. Au final, le nombre d'expulsions réalisées avec le concours de la force publique est equivalent en nombre (8.000 locataires du parc social et autant du parc prive), mais pour près de deux fois plus de logements dans le parc privé, donc en plus forte proportion dans le parc social (0,2% contre 0,1%). Ces resultats meritent d'etre etudies a la loupe, au cas par cas, au plus près des situations locales, très diverses. Le cadre partenarial a renforcer au niveau des CCAPEX doit en etre l'occasion. Cela plaide aussi pour un renforcement de l'instruction. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 37/86 3.2 Améliorer l'instruction des affaires dans le cadre des procédures judiciaires Les tribunaux judiciaires connaissent aujourd'hui un engorgement, du fait notamment des recours pour impayes de loyers. Cette « sur-judiciarisation » induit également des délais très longs pour obtenir une audience. C'est variable selon les territoires, mais il faut compter de 2 à 10 mois d'attente. Le legislateur a retenu 4 etapes censees creer une prise de conscience du locataire avec des delais successifs pour reagir (4 x 2 mois), mais en réalité, la procédure s'étend en moyenne sur près de 18 mois (cf.2). Autant dire que toutes les etapes durent plus longtemps. Il est indispensable d'obtenir une meilleure maîtrise des delais de traitement de chaque etape de la procedure. Dans la meme volonte de transparence, le depute Mickael NOGAL 16 , a propose la creation d'un observatoire temporaire specialement dedie a ce sujet. Il y a effectivement un sujet récurrent à traiter, préjudiciable aux parties prenantes et par voie de conséquence au marché de l'offre locative. Recommandation 12. Confier à une mission spécifique à caractère interministériel un diagnostic des causes de la lenteur des délais des procédures conduisant à l'expulsion locative. Le délai minimal de 2 mois imparti entre l'assignation et l'audience, cense permettre d'etablir et de fournir au juge un diagnostic eclairant sur la situation du locataire endette, est une période que l'on pourrait considérer comme « morte », dans la mesure où ce diagnostic social et financier est insuffisamment établi, ce qui aggrave de nombreuses situations. Une réflexion concertée avec les collectivités semble nécessaire sur les moyens dedies a la realisation du diagnostic social et financier. A ce jour, ce diagnostic est confie aux travailleurs sociaux des conseils departementaux en grande majorite. Or les auditions ont mis en avant de nombreux ecueils : ils sont realises trop tard dans la procedure (assignation) ; ils ne sont pas systematiquement realises (plus des deux tiers ne seraient pas remis aux juges) ; certains travailleurs sociaux n'ont pas les competences requises pour effectuer ce type de diagnostics ; par manque de temps et souvent parce que la pratique du « Aller vers » a tres fortement diminue depuis de nombreuses annees, les propositions de rendez-vous sont rarement honorees par les locataires (des raisons de pudeur, de repli sur soi ne sont pas absentes a priori). Or le juge s'appuie sur le diagnostic social et financier pour prendre sa décision. Je retiens l'accord de nombreux acteurs sur la necessite d'ameliorer le dispositif en faisant du CDP le moment declencheur du diagnostic. Il est evident qu'une telle modification dans le processus d'instruction imposerait de disposer de moyens humains beaucoup plus importants puisque le nombre de CDP est pres de 3 fois superieur au nombre d'assignations. Il serait opportun de formaliser des propositions en concertation avec les collectivites territoriales, par 16 Cf. Rapport NOGAL : « Louer en confiance » 2019 PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 38/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN le biais de nouvelles experimentations, dans le cadre legislatif actuel. Certaines bonnes pratiques, comme la MOUS confiee a l'ADIL du Vaucluse meriteraient d'etre dupliquees (cf. § 2.4). Recommandation 13. Lancer un appel à manifestation d'intérêt auprès des départements et des métropoles pour expérimenter de nouvelles organisations visant à généraliser les diagnostics sociaux et financiers destinés aux juges et à les produire le plus en amont possible - dès le CDP - à l'intention des CCAPEX. Il s'ajoute a cette sous-instruction patente, une forte absence des locataires assignés aux audiences, rendant alors le contradictoire quasi inopérant. Cette présence est très variable selon les départements, les determinants de la presence des locataires a l'audience sont multiples, on note que le locataire - comme l'a souligne Camille François17 - est bien plus present a l'audience lorsqu'il est accompagne par un travailleur social ou s'il est loge dans le parc social. *Source : mission a partir des donnees EXPLOC au titre de 2018 sur les departements metropolitains enregistrant plus de 500 procedures judiciaires d'expulsions locatives ­ pourcentage sur la base du nombre d'assignations Ce constat devrait également retenir l'attention des collectivités disposant de travailleurs sociaux et des CCAPEX pour établir des actions d'accompagnement renforcées, en lien avec les SIAO. 3.3 Mieux utiliser le commandement de payer (CDP) en prévention et permettre une phase de négociation à confier à l'huissier Le commandement de payer est effectivement une étape décisive pour la politique de prevention des expulsions. Près de 500.000 CDP sont délivrés par an en moyenne en France, dont les deuxtiers dans le parc privé. La delivrance s'effectue par les huissiers a domicile et constitue le premier acte de la procedure. Les huissiers connaissent parfaitement les territoires et malgré encore quelques freins pour accéder aux parties communes des immeubles, ils accedent dans la plupart des cas au logement du locataire. Ce frein devrait etre leve. 17 Cf. These Camille François deja citee PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 39/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN Recommandation 14. Permettre l'accès des huissiers aux parties communes des immeubles afin qu'ils puissent entrer en contact direct avec les personnes menacées d'expulsion ou, à défaut, déposer leurs actes et informations relatifs à la procédure et aux dispositifs de prévention dans les boîtes aux lettres. Ce moment crucial est le plus souvent le point de rupture de confiance entre locataire et proprietaire, alors que cette etape devrait permettre des solutions. La connaissance renforcee de chaque situation individuelle des le CDP permettrait d'orienter le plus souvent possible vers une solution durable autre que judiciaire. Il apparaît donc essentiel que le rôle de l'huissier soit élargi car ce premier contact présentiel est déterminant pour la suite de la procédure. Des mesures doivent etre prises, en urgence, tant pour la période actuelle que pour le long terme. L'huissier de justice pourrait se voir confier un rôle de négociateur avec l'accord du bailleur. La periode entre le CDP et l'assignation pourrait etre mise a profit pour engager une phase de dialogue et de negociation amiable. Ce temps de negociation amiable pourrait beneficier d'une periode supplementaire d'un mois, a comptabiliser avant l'assignation (soit 2 + 1 mois). Des lors, deux hypotheses : un accord est trouve durant la periode de 3 mois : alors l'huissier demande au juge une audience en refere et s'assure que la date d'audience proposee est bien posterieure a la periode ouverte par le commandement de payer afin que le juge puisse constater l'acquisition de la clause resolutoire ; aucun accord n'est trouve durant la periode de 3 mois : alors l'huissier signifie l'assignation et la periode anterieurement incompressible entre l'assignation et l'audience est alors reduite a 1 mois au lieu de 2. - Cette evolution semble recueillir un assentiment de tous les acteurs, tant il est notoire que les 2 mois qui suivent l'assignation en vue de l'audience peuvent etre consideres comme une periode « morte », cause d'une accentuation de la dette. Cela suppose que le diagnostic social et financier ait bien ete effectue en amont. Recommandation 15. Instaurer par voie législative une phase de négociation qui pourrait être conduite par les huissiers de justice sur mandat des bailleurs avant l'assignation. Augmenter d'un mois le délai qui précède l'assignation pour ce faire et réduire d'autant le délai légal qui suit l'assignation avant l'audience en cas d'échec. 3.4 Abaisser ou supprimer les seuils de signalement des CDP aux CCAPEX Il conviendrait en outre de s'assurer que les CDP soient transmis le plus tot possible aux CCAPEX. Or, ces actes delivres par les huissiers de justice sont transmis aux CCAPEX selon des criteres de seuil fixes par arretes departementaux en application du decret n°2015-1384 du 30 octobre 2015. Le seuil peut etre fixe a partir de 3 mois d'impayes de loyers sans interruption ou un cumul de dette equivalent a au moins 3 mois de loyer et charge, et peut atteindre 6 mois, a l'appreciation des prefets de departements. Ce seuil minimal actuel est encore trop important, car une grande majorite des CDP ne sont pas Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 40/86 remontes aux CCAPEX ni a la base de donnees EXPLOC. Si notre objectif, est d'agir le plus en amont possible, il est clairement contradictoire de ne pas se saisir de tous les CDP. Recommandation 16. Supprimer le seuil fixé par décret pour le signalement des CDP à la CCAPEX par les huissiers de justice, afin de pouvoir agir sur le traitement précoce de tous les impayés. 3.5 Rendre plus lisibles les actes de la procédure pour diminuer le taux de non-réponse Au regard des differents actes de la procédure que nous avons pu obtenir, force est de constater qu'ils sont très nombreux et très complexes. Les CDP, les assignations et les CQL (cf. voir annexes) sont des formulaires fastidieux qui ont tendance a effrayer et decourager les locataires vises par ces actes. Meme constat pour les courriers transmis par les differents acteurs (Prefecture, CAF). Or ces actes et ces courriers sont essentiels pour que le locataire se sente implique dans la procedure et puisse se tourner le plus rapidement possible vers un tiers et active les aides auxquels il a droit. Recommandation 17. Simplifier le contenu et l'accès aux informations transmises aux locataires dans le cadre de la procédure d'expulsion en utilisant la méthodologie "Facile à lire et à comprendre" (FALC) promue au niveau gouvernemental (Sms locataires aux différents stades de la procédure : actes d'huissiers, courriers transmis par les préfectures). 3.6 Lutter contre le non-recours au droit, une des plus grandes défaillances de notre société De tres nombreux cas illustrent que de nombreux citoyens basculent dans la precarite alors que des aides existent et les concernent : Un proprietaire qui se retrouve en grande difficulte financiere parce qu'il n'a pas connaissance des dispositifs d'indemnisations. Un locataire, qui lors d'une audience decouvre qu'il pouvait pretendre a l'aide d'action logement ou a une aide FSL maintien. Or, autour des nombreux acteurs et des nombreuses étapes, il manque un fil conducteur, une porte d'entrée. A travers les nombreuses auditions, il apparaît clairement que les competences necessaires au deroulement de cette longue procedure sont juridiques. Ainsi, il conviendrait de confier aux ADIL plus de responsabilités. Elles pourraient dans un premier temps jouer le role de controle du decompte presente aux locataires lors du CDP (plus de 2/3 seraient errones) ; puis celui de l'informateur des aides et soutiens existants a ce meme stade. Nous avons constate que la clarte et la diffusion des aides a la procedure d'expulsion etaient deficientes. Et pourtant, elles sont nombreuses et efficaces quand elles sont employees au bon moment. L'ADIL pourrait donc avoir un role preponderant dans la diffusion de ces informations et pour ce faire Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 41/86 il est imperatif qu'elle s'appuie sur ses antennes departementales car de nombreuses aides sont territorialisees. En agissant ainsi plus en amont, les locataires et proprietaires jusqu'a present depourvus d'informations pourraient apprehender dans de meilleures conditions les moyens a leur disposition. Recommandation 18. Confier à l'huissier, lors de la délivrance du CDP, le soin de remettre au locataire une notice détaillant toutes les aides et accompagnements appropriés. Solliciter l'ANIL pour l'élaboration de cette notice en lien avec les ADIL afin d'adapter les aides et les contacts à chaque département. Cette notice devrait inviter le locataire à prendre contact avec une agence de proximité de l'ADIL avec pour première consigne de vérifier le décompte qui lui a été remis. 3.7 Prendre des dispositions pour éviter le refus, par certains propriétaires, du versement du FSL destiné au maintien du locataire dans le logement De nombreux acteurs dont l'association DAL, la FAP, ont evoque le refus de certains bailleurs d'accepter le FSL, pour ne pas ralentir la procedure d'expulsion. Ces cas sont rares mais meriteraient d'etre etudies afin que le droit soit respecte et que les pratiques abusives soient denoncees. Depuis la loi ALUR de 2014, les bailleurs n'ont plus le droit de refuser le FSL. Cependant, il est encore constate que certains trouvent le moyen de contourner cette obligation, en ne fournissant pas leurs coordonnees bancaires pour en eviter le versement. Recommandation 19. Faire évoluer la loi pour rendre effectif l'octroi du FSL au bailleur. 3.8 Mobiliser plus souvent les mesures existantes d'accompagnement social personnalisé (MASP) Les MASP ont ete creees par la loi du 5 mars 2007 notamment aux fins de prevention des expulsions locatives. Definies aux articles L. 271-1 et suivants du Code de l'action sociale et des familles, ces mesures administratives sont mises en oeuvre par les services sociaux des departements a destination de personnes majeures en difficulte, notamment dans la gestion de leurs ressources et de leurs allocations, notamment lorsqu'il y a un risque pour leur securite ou leur sante. Les deux premiers niveaux de MASP 1 et 2 (accompagnement social et budgetaire et gestion des prestations sociales) sont contractuels avec un engagement reciproque, tandis que le versement direct des prestations sociales au bailleur sous conditions (le MASP 3) est contraignant. Cette derniere possibilite peut etre dans certaines situations une securite essentielle pour maintenir le menage dans son logement et une assurance pour le bailleur. Or, cette possibilite est rarement demandee par le conseil departemental malgre les preconisations des CCAPEX alors qu'il s'agit d'une veritable solution pour perenniser certaines situations ou contraindre les locataires qui disposent des ressources financieres suffisantes pour le paiement notamment du residuel du loyer. Afin de rendre ces demandes d'accompagnement effectives, les CCAPEX pourrait saisir le prefet pour qu'il effectue cette demande. Recommandation 20. Permettre aux CCAPEX de saisir le préfet pour une demande de MASP 3. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 42/86 3.9 Intégrer la prévention des troubles pathologiques du comportement, notamment psychiques Le facteur santé n'était que trop rarement pris en compte dans la procédure d'expulsion locative, alors que les pathologies lourdes dont peuvent etre atteints certains locataires ont des consequences en matiere de repli sur soi, d'isolement et de desengagement vis-a-vis des obligations administratives. Les gestionnaires d'appartements de coordination therapeutique (ACT) constatent regulierement les difficultes des bailleurs, syndics et coproprietaires a gerer les relations avec ce type de public en difficulte de sante. De fait, l'administration et les bailleurs disposent de peu de moyens de detection de ce type de locataires, et le reperage des difficultes potentielles provoquees par la maladie A ce titre, l'instruction du 27 avril 2017 relative a la campagne budgetaire pour l'annee 2017 des etablissements et services medico-sociaux accueillant des personnes confrontees a des difficultes specifiques a mis en place une experimentation dans 5 regions pour que les ACT puissent intervenir directement au domicile des personnes sans attendre leur mise a la rue. Recommandation 21. Transmettre aux ADIL la cartographie des ressources territoriales en matière de santé mentale et leurs acteurs (Santé Mentale France). 3.10 Renforcer les liens entre les magistrats et les autres acteurs Il y a une inégalité face à la procédure, faute d'une doctrine suffisamment partagée quant à la manière de sortir des situations d'impayés de loyers. Les magistrats manquent trop souvent d'informations pour accomplir leur role dans de bonnes conditions. Les partenaires relevent cependant de fortes disparités dans les décisions de justice, ce qui donne des resultats contrastes suivant les departements et presente un risque d'inegalite de traitement. Ainsi, certains departements connaissent des decisions d'expulsion ferme dans moins de la moitie des cas, alors que d'autres les constatent sur plus de huit decisions sur dix. De telles differences apparaissent egalement entre departements pourtant limitrophes et similaires aux plans sociologique, demographique et economique. *Source : mission a partir des donnees EXPLOC au titre de 2018 sur les departements metropolitains enregistrant plus de 500 procedures judiciaires d'expulsions locatives ­ pourcentage sur la base du nombre d'assignations Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 43/86 Par ailleurs, les magistrats expliquent les raisons pour lesquelles l'apurement des dettes est souvent privilégié par rapport a la resiliation du bail et le « delogement » qui l'accompagne. Sont evoques notamment l'attachement d'une personne a son logement et les reperes sociaux indispensables a son retablissement. Mais parallelement, la mise en place de plans d'apurement s'avère ne pas être toujours concluante sur le court et moyen terme, ce qui remet alors en cause le choix effectue, et entraîne de facto un allongement de situations inconfortables pour les proprietaires comme pour les locataires. C'est pourquoi il semble d'autant plus imperatif de disposer tres tot de suffisamment d'elements sociaux et financiers de diagnostic, pour eviter d'etre trop indifferemment conduit a la procedure judiciaire et trop indifferemment oriente vers l'apurement versus l'expulsion et le relogement. Les partenariats avec le monde de la justice pourraient être renforcés, dans la logique de mobiliser des outils (partage d'informations entre CCAPEX et magistrats) ou d'animer et de renforcer le reseau local des conciliateurs de justice ainsi que le role des huissiers comme je le propose. Un travail de sensibilisation aupres des juges et des greffiers serait utile pour permettre une meilleure comprehension des logiques de chacun et tendre a une harmonisation doctrinale. Et puis la prise en compte de l'offre de logements susceptible d'être mobilisée à court terme pourrait etre decisive dans le cadre de l'instruction judiciaire (cf. § 4). Recommandation 22. Renforcer les liens informels entre les magistrats, les services préfectoraux, ceux de l'aide sociale des collectivités et les bailleurs, en lien avec les CCAPEX. 3.11 Poursuivre le dialogue sur la « mauvaise foi » Les auditions ont permis de constater une forte occurrence d'un debat autour des notions de « bonne » ou de « mauvaise foi » des locataires. De façon generale, elles ont pointe le fait que la grande majorite de ces derniers presentaient la volonte de payer le loyer. La loi n'en donnant pas de definition etayee, cette notion est laissee a l'appreciation subjective de chacun (locataire, bailleur), elle releve principalement de l'appreciation et de la responsabilite du juge. Si l'article 2274 du Code civil dispose que la bonne foi se presume et que la mauvaise foi se demontre, seul le juge du fond est habilité à les établir. En complement de ces principes, la Cour de cassation a precise le cadre de l'appreciation du juge dans sa jurisprudence, notamment dans les situations de surendettement : d'une part, la bonne foi du debiteur est toujours presumee. D'autre part, les consequences de l'etablissement de la mauvaise foi sont personnelles, ce qui signifie que les effets juridiques ne peuvent etre etendus au conjoint ou au concubin. De la meme maniere, la mauvaise foi n'est pas une notion figee : si le debiteur produit des elements nouveaux de nature a necessiter un reexamen de sa situation apres avoir ete considere comme etant de mauvaise foi dans un premier temps, le juge peut reviser sa position et en faire un debiteur de bonne foi. Enfin, la causalite entre la mauvaise foi et la situation du debiteur doit egalement etre directe : les fautes qui n'ont qu'un lien indirect avec les difficultes et le passif du debiteur (par exemple une faute professionnelle ayant conduit a un licenciement) ne peuvent etre considerees comme de nature a etablir sa mauvaise foi. La mission a releve dans le guide annexe a la circulaire du 22 mars 2017 relative a la mise en oeuvre du plan interministeriel de prevention des expulsions locatives, que l'administration avait tente d'etablir une approche de la notion de « mauvaise foi ». Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 44/86 Il pourrait etre utile de prolonger cette reflexion avec l'ensemble des representants des parties prenantes dans le cadre specifique de la procedure d'expulsion locative. Recommandation 23. Etablir une concertation au niveau national sur les déterminants de la « mauvaise foi » en matière d'impayés locatifs de façon à permettre aux dispositifs administratifs (FSL, CCAPEX, CAF) de mieux objectiver leurs avis, à l'instar de la commission de surendettement de la Banque de France. 3.12 Mieux réguler l'octroi du concours de la force publique (CFP), étape ultime avant l'expulsion Un premier constat s'impose sur le pourcentage contraste d'octroi du CFP entre departements (cf. schéma ci-dessous). La question de cet arbitrage, qui releve indeniablement de la responsabilite du prefet, depend de facteurs qui ne sont pas seulement du ressort de l'ordre public. *Source : mission a partir des donnees EXPLOC au titre de 2018 sur les departements metropolitains enregistrant plus de 500 procedures juridiques d'expulsions locatives ­ pourcentage sur la base du nombre d'assignations Bien qu'il ne puisse etre nie l'interet de disposer du CFP pour permettre l'execution des decisions judicaires, y compris des expulsions, tout a fait legitimes, il semble que les moyens dont disposent les commissariats a cette ultime etape ne soient pas en concordance avec l'importance de l'enjeu. En effet l'enquete sociale, familiale et financiere qui devrait etre effectuee par les commissariats a ce stade, n'est pas realisee de maniere uniforme sur le territoire, par manque de moyens, selon toute vraisemblance. Car, meme a l'extremite de cette procedure, a la veille de l'expulsion, les commissariats n'ont pas suffisamment d'informations (composition du menage, age des locataires). C'est ce qui ressort de nombreux temoignages de policiers. Or, les moyens rassembles par la chaîne des acteurs sociaux du departement y compris les bailleurs sociaux aupres des services prefectoraux devraient permettre a la fois de communiquer les informations disponibles, et de disposer egalement des alternatives a l'expulsion a cette ultime etape : relogement ou hebergement, notamment. A cet egard, le diagnostic social et financier, s'il etait etabli systematiquement et au plus tot, permettrait de transmettre aux services de police par l'intermediaire des services prefectoraux, les donnees essentielles a leur intervention. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 45/86 Recommandation 24. Autoriser la transmission aux commissariats, par l'intermédiaire des services préfectoraux, des données sociales et familiales présentes dans les diagnostics sociaux et financiers effectués en amont des procédures à destination des juges. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 46/86 4 Mobiliser l'offre disponible de logement au plus tôt L'inflexion a donner au processus consiste a envisager au plus tot une solution alternative au plan d'apurement des dettes d'un locataire, si celle-ci est vouee a l'echec, et cela au plus tard lorsque la composante operationnelle de la CCAPEX en etudie la situation. 4.1 Identifier l'offre de logements mobilisable à court et moyen termes C'est la raison pour laquelle il faut être en mesure d'identifier et de mobiliser une offre de logements locatifs a loyers tres moderes des ce stade. D'ou l'importance d'un protocole que l'Etat et les collectivites territoriales devraient signer avec les bailleurs sociaux dans chaque territoire. L'offre est cependant problématique, selon la tension de la demande et les capacités offertes par le flux induit par la rotation dans le parc social. S'y ajoute la dimension du niveau des loyers. Pourtant, quelles que soient les difficultes en la matiere, cette offre est toujours mobilisée à la fin du processus d'expulsion, lorsque la remise a la rue n'est pas admise par le prefet. Il y a donc une opportunité à saisir, que la crise sanitaire rend évidente : si l'expulsion peut etre la seule solution par rapport a une situation donnee, dans le respect des procedures, celle-ci n'est acceptable qu'à la condition d'avoir identifié au préalable une solution concrète de relogement ou d'hébergement adapté. Cette cause me paraît devoir être étendue au-delà du contexte de la crise sanitaire, et notamment dès la sortie de la trêve hivernale, au printemps 2021. Tout doit etre fait dans cette logique. Dans le cadre strategique defini par le plan gouvernemental du « Logement d'abord », l'hébergement constitue une alternative résiduelle, qui doit etre reservee aux personnes les plus en difficultes mentales, psychiques ou physiques avec l'accompagnement social indispensable a leur reinsertion. Le parc social présente l'avantage de permettre d'user des modalités de réservation ouvertes avec l'Etat, les collectivités locales et Action Logement. En consequence, l'obligation de relogement que la collectivite s'impose a elle-meme doit donner lieu a une mobilisation renforcée des acteurs pour identifier l'offre de logement et la tenir à disposition en gérant le stock au plus près des besoins et sans alourdir inutilement la charge collective. Cette politique repose sur une chaîne de décisions à prendre de manière concertée entre l'Etat, les collectivités et les organismes du logement social : dès la détermination des besoins en logements a loyers tres moderes (de type PLA insertion) dans le cadre des programmes locaux de l'habitat (PLH) ; dans la programmation annuelle de la production d'une offre de logements a loyers dits « abordables », dont les niveaux doivent etre precises suivant les secteurs (cf. carte geographique mise en ligne par le ministere du logement en ce debut decembre) ; dans les conventions d'utilité sociale des bailleurs (CUS) ; dans des protocoles à mettre en oeuvre avec les différents réservataires (collectivités territoriales, Action Logement) pour pouvoir disposer d'une capacite d'attribution sans delais ; dans des protocoles à mettre en place pour faciliter la mutualisation de l'offre des differents bailleurs sociaux, ainsi que le proposait deja l'instruction interministerielle de mars 2017 adressee aux prefets : « Vous encouragerez particulièrement la collaboration interRapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 47/86 bailleurs et inter-réservataires au niveau local afin de permettre les relogements ou les échanges de logements mais aussi les mutations provoquées des locataires dont la dépense de logement est inadaptée à leurs ressources. Il vous revient à cette fin de mettre en place un dispositif de coordination entre les bailleurs sociaux au sein de la Charte de prévention et d'en assurer l'animation en y associant l'ensemble des partenaires susceptibles de participer à la réalisation de cet objectif. » dans des formes d'intermédiation locative, que les bailleurs sociaux envisagent euxmêmes de développer avec le concours d'associations specialisees dans l'accompagnement et la reinsertion sociale, et qui leur permettrait d'offrir des logements a loyers plus bas que ceux aujourd'hui pratiques au regard de leur financement d'origine. Recommandation 25. Mobiliser l'offre de logement des bailleurs sociaux dès que l'évaluation sociale et financière établie par les travailleurs sociaux au stade du commandement de payer permet de conclure au besoin d'un relogement adapté aux revenus des locataires en difficulté. Recommandation 26. Faciliter la signature d'accords de mutualisation de l'offre entre bailleurs sociaux d'une part et avec les réservataires de logements du parc social d'autre part pour disposer d'un volant d'offre immédiatement employable. Recommandation 27. Réaliser une étude sur l'intermédiation locative dans le parc social pour adapter l'offre disponible aux niveaux de loyers requis dans le cadre des besoins de relogement des locataires menacés d'expulsion. Il faut noter que les locataires du parc privé sont également concernés par cette mobilisation du parc social, des lors que la procedure judiciaire engagee ne permet plus l'apurement des dettes contractees, et que les locataires ne trouvent pas par eux-memes une solution de relogement dans le parc prive. 4.2 Mobiliser la part disponible des logements vacants du parc social Sur les 200.000 logements vacants du parc social, la part des logements vides proposés à la location depuis plus de trois ans a été évaluée à environ 33 000 logements18. Sont exclus de ce compte les logements voues a la demolition ou a des structurations lourdes (plus de 75.000). Cette offre disponible présente cependant deux inconvénients qu'il faut intégrer : la qualité ou l'aspect qualitatif, l'aspect environnemental, peuvent etre moindres par rapport aux autres biens proposes sur le marche, localement, mais en cas d'alternative a l'expulsion, cela reste une veritable opportunite ; la répartition géographique, directement liee a l'attractivite des territoires, au sens de l'emploi et du cadre de vie, peut ne pas correspondre exactement aux localites ou resident les locataires concernes par un besoin de relogement plus en phase avec leurs ressources et leur emploi. Ces deux obstacles ne sont pas intangibles et meritent d'etre pris en compte dans la perspective des relogements a proposer. 18 Cf. rapport IGF/CGEDD de janvier 2015 sur la mobilisation des logements et des bureaux vacants PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 48/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN Recommandation 28. Mobiliser les plus de 30.000 logements sociaux vides et vacants depuis plusieurs années, ne serait-ce qu'à titre transitoire. 4.3 Restructurer le parc social pour adapter l'offre aux besoins Les 2/3 des logements des bailleurs sociaux sont très faiblement occupés : 1,8 million de logements sont occupes par une personne seule et 1,2 million de logements sont occupes par deux personnes, ce qui totalise 3 millions de logements sur les 4,7 millions de logements du parc social. La typologie du parc est quant à elle constituée aux 3/4, pour des raisons historiques, de moyens et grands logements (3,5 millions de 3 pieces a 5 pieces). Il s'ensuit une sous-occupation manifeste du parc de logements sociaux. Ce constat n'est pas propre au parc social puisque cela correspond a un phenomene generalise, en partie du au vieillissement de la population et a l'evolution de la typologie des familles. On releve au plan national 65% de menages ne comptant pas plus de deux personnes, dont la moitie (33%) sont constitues d'une personne seule19. Or, parallèlement, on constate une forte demande de personnes seules, jeunes et plus ages, qui peut atteindre 1/3 de la demande recensée dans certaines localites. Tout ceci tend a demontrer l'opportunite de solliciter les organismes de logements sociaux pour concevoir de nouveaux modèles d'occupation des logements et une part de restructuration de l'offre en correspondance avec les besoins. Dans ce cadre, il est evident que les besoins issus de la prévention des expulsions locatives doivent etre integres. Recommandation 29. Concevoir de nouvelles formes de baux pour faciliter la cohabitation par la colocation dans le parc social. Recommandation 30. Etudier la restructuration de grands logements d'une partie du parc social en fonction des besoins recensés dans chaque territoire, en intégrant les besoins relevés par les CCAPEX. Pour clore, provisoirement, ce chapitre dont l'importance justifierait une mission d'interet national, je releverais que l'offre de logement social pourrait être plus fluide si l'on admettait à la fois : de reconsidérer les plafonds de ressources pour accéder au logement social afin de reserver davantage cette offre aux personnes les plus vulnerables, et de renforcer les obligations de quitter un logement social lorsque les revenus excedent exagerement les plafonds de ressources en vigueur. Selon les statistiques du Commissariat general au developpement durable (CGDD) du ministere de la transition ecologique a partir des fichiers Filocom de la DGFIP et la base RPLS (septembre 2014) 19 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 49/86 5 Optimiser les moyens financiers de nos politiques de prévention 5.1 Eviter le dérapage des dettes et des charges collectives liées à l'enchaînement des délais de procédures Plus le temps des procedures s'allonge et plus les impayés et les frais de procédures en recouvrement s'accumulent pour les propriétaires. Plus le temps des arbitrages et des temps morts entre ces arbitrages s'etire, et plus les charges collectives s'amoncellent. La mobilisation d'effectifs des services publics avec leurs équipes de travailleurs sociaux (CCAS, DIAS, métropoles, départements et CAF) est un des principaux postes de depenses. L'optimisation de l'instruction, des le CDP, doit permettre de reduire le temps de prise en charge, et donc les couts supportes par la collectivite tout le temps que durent les etapes successives des procedures, et naturellement par les bailleurs. De même, la disponibilité de l'offre de relogement, si elle est identifiee au plus tot, des qu'il apparaît qu'un apurement de la dette ne pourra pas sauver la situation du locataire durablement lors de l'examen en sous-commission des CCAPEX, permettrait d'eviter un temps long de procedures et les charges collectives que cela entraîne du cote des services publics (collectivites territoriales, Etat, partenaires associes, BdF, CAF...) et du cote des proprietaires. Recommandation 31. Miser sur le renforcement de l'instruction dès le CDP et l'identification d'une proposition de relogement en sous-commission des CCAPEX pour décharger la collectivité des coûts induits par l'enchaînement des procédures et éviter dans le même temps aux propriétaires l'immobilisation de leurs biens et l'accroissement de leurs pertes financières. Il en est de même de la logique d'intervention des FSL. Plus c'est tot, plus cela permet de recuperer une defaillance passagere. Les mesures d'aides ponctuelles prises par Action Logement dans le cadre des consequences financieres de la crise sanitaire pour venir en aide aux salaries, et qui s'ajoutent aux aides ponctuelles deja existantes, sont absolument en phase avec l'intérêt d'une intervention dès l'origine d'un desequilibre budgetaire familial. 5.2 Connaître les coûts des procédures pour les réduire Combien coûte à la puissance publique une procédure d'expulsion ? A combien en moyenne s'elevent les dettes et frais pour le proprietaire ? Et pour tous les acteurs impliques dans le processus ? De nombreuses approches ont ete esquissees pour obtenir ces donnees qui permettraient d'observer la realite des couts collectifs et favoriseraient l'optimisation de nos politiques de prevention des expulsions. Ces premières études doivent nous interpeller sur tous les coûts qui peuvent être évités de la procédure. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 50/86 Recommandation 32. Confier à l'IGF et l'IGAS une étude des charges induites par les différentes phases des procédures visant la prévention des expulsions locatives. 5.3 Miser sur le « retour sur investissement social » Y aurait-il encore des freins a rendre plus transparentes nos politiques en faveur des plus fragiles, je ne le pense plus. Parce qu'il s'agit d'argent public et parce qu'il y va de notre capacite a etre plus efficaces. Les etudes realisees depuis des annees demontrent que la prevention des expulsions doit s'effectuer le plus en amont possible. Malgré la difficulté d'une étude exhaustive sur les coûts évités, il a été démontré en France et en Europe qu'un euro dépensé en prévention pourrait faire économiser jusqu'à huit euros aux pouvoirs publics. Des etudes en France (GRAAL et GESTARE) et a l'etranger 20 lors des actions menees en amont de la procedure ont demontre que le retour sur investissement social pouvait etre tres important. Ainsi 1000 euros investis en amont pourraient faire économiser à la puissance publique 8000 euros. Sur le nombre total de procedures d'expulsions en France, il serait hasardeux de pretendre qu'une action globale permettrait de mettre fin a la totalite des procedures. Mais nous pouvons raisonnablement avancer que plus d'un tiers pourraient etre evite a long terme. A l'instar de la stratégie du logement d'abord, investir en amont permet d'éviter de nombreux coûts par la suite. Nos futures politiques devront s'appuyer sur cette doctrine et valoriser toutes les initiatives qui s'inspirent de cette approche budgetaire. L'expérimentation à Montpellier conduite par des bailleurs sociaux avec GESTARE et le prestataire FORS tend effectivement a demontrer l'interet d'un « retour social sur investissement (RSOI) ». Le retour sur investissement est social pour les locataires mieux accompagnés des les premiers signes de difficultes, en relation avec les bailleurs sociaux engages dans ce partenariat. Et le retour sur investissement est également économique, puisqu'il permet d'eviter un derapage financier des situations rencontrees. C'est donc un gain considérable pour les bailleurs. J'ajoute que le retour sur investissement social concerne tout autant la puissance publique. Le groupe Erilia, bailleur social, a reduit de pres d'un tiers le nombre d'expulsions en renforçant le travail de ses conseillers en economie sociale et familiale (CESF) pour un maintien dans le logement. Ces pratiques devront donc etre encouragees et eclairer nos futures politiques de prevention. Elles pourraient etre portees par la DIHAL comme actuellement mais aussi par les DREAL avec les missions en « aller vers et dans le logement » (AVDL). Il conviendrait donc de lancer rapidement des Appels a manifestation d'interet pour mobiliser des acteurs associatifs. 20 Fondation Abbe Pierre ­ 2eme regard sur le mal-logement en Europe - 2017 PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 51/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN Recommandation 33. Valoriser par appel à manifestation d'intérêt à lancer auprès des métropoles et des départements en tant que porteurs de projets, des expérimentations de mobilisation du secteur associatif en lien avec des bailleurs sociaux pour mettre en valeur le retour sur investissement social. 5.4 Evaluer le régime de l'APL à l'aune des non-bénéficiaires Je ne reviendrai pas ici sur le régime des aides personnelles au logement (APL), veritable sujet d'importance, qui est un secours véritable pour les locataires du parc social et pour ceux du parc privé conventionné (ANAH). Mais le sort d'une partie des 50% de locataires qui ne sont pas allocataires est préoccupant. L'APL est non seulement un complément budgétaire, mais elle offre l'assistance des conseillers sociaux de la CAF, donc l'ouverture de voies de solutions. Recommandation 34. Evaluer l'impact de l'absence d'accompagnement par les CAF/MSA en cas d'impayés pour les ménages qui ne bénéficient pas des APL. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 52/86 6 Anticiper les effets économiques de la crise sanitaire pour les locataires et les propriétaires 6.1 La crise sanitaire a mis au ralenti de nombreux dispositifs et de nombreux acteurs Dans la plupart des departements, le confinement et dans une moindre mesure les mouvements sociaux ont fortement ralenti les procedures judiciaires. De nombreux dossiers se sont accumules, augmentant de facto le montant des dettes de certains menages. Le travail social s'est lui aussi affaibli, perturbant tres fortement l'accompagnement social des locataires. Ce sont aussi toutes les commissions (CCAPEX, DALO, FSL, surendettement) qui ont fonctionne de maniere tres chaotique. Ainsi de nombreuses situations ont empire et vont demander une attention toute particuliere afin de prendre en compte les consequences concretes de la crise sanitaire. Il s'agira pour tous les acteurs de prendre en compte ces elements. Il est par exemple souhaitable que les criteres de seuil des FSL soient modifies en consequence. 6.2 Evaluer et suivre le risque d'augmentation des impayés locatifs L'ANIL vient de publier debut novembre son barometre 21 des risques d'impayes et d'expulsions a partir des appels reçus en septembre et octobre 2020. Elle constate une hausse des consultations pour impayés de la part de locataires du parc prive de l'ordre de 15% par rapport a la situation de septembre-octobre 2019. Ce sont majoritairement des locataires actifs exposés à une perte d'emploi ou à une baisse de revenus. La situation paraît plus grave qu'au cours du premier confinement, selon le meme barometre publie fin juillet pour les mois de mars avril et mai. Une part des questionnements supplémentaires s'explique aussi par l'intérêt porté aux aides mises en place par Action Logement sur cette periode. A contrario, les consultations consecutives a la reception d'un commandement de payer ou se situant a des stades judiciaires ulterieurs ont atteint des niveaux particulierement bas pendant la periode du confinement en raison d'une activite reduite des tribunaux et des huissiers, de la suspension de certains delais et du report de la fin de la treve hivernale. La Banque de France a annonce le 9 novembre 2020 que le PIB pourrait reculer de 12% au mois de novembre par rapport au meme mois de l'annee anterieure. Une étude de l'Institut de recherches économiques et sociales (Ires), organisme au service des organisations syndicales, considere que 4,3 millions de menages sont soumis a un effet de ciseaux lie a la baisse des revenus face aux depenses contraintes constituees principalement par les depenses de logement dans une proportion passee, selon l'Insee, de 12% en 1960 a 27% en 2017. Nonobstant les mesures de chomage partiel prises par le gouvernement, certains actifs de professions indépendantes, des intérimaires, des artisans, des commerçants et des autoentrepreneurs risquent d'etre confrontes a une baisse de leurs revenus a court terme. Des faillites d'entreprises sont pressenties dont les effets seront sensibles dans les prochains mois. Selon l'USH, les bailleurs sociaux anticipent dans les mois a venir une augmentation forte des Il s'agit en l'occurrence d'un indicateur base non pas sur le nombre effectif d'impayes ou d'expulsions, mais fonde sur les consultations realisees dans les Adil (agences departementales) sur ces sujets. Cet indicateur s'inscrit dans une demarche plus large, lancee en avril 2020 par la DIHAL avec les professionnels du secteur. Bien que fermees en periode de confinement, les agences sont restees neanmoins joignables, soit via la ligne de chaque Adil ­ presentes sur tout le territoire a l'exception d'une quinzaine de departements ­, soit via la plateforme nationale "SOS loyers impayes", ainsi que par mail. 21 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 53/86 difficultes financieres de certains de leurs locataires, travailleurs independants, travailleurs pauvres, salaries en difficulte, du fait de la cessation des mesures de chômage partiel et de la faillite de certaines entreprises. Un autre baromètre réalisé22 courant septembre 2020 par Diffusis France pour le compte de Meelo, un specialiste de la data financiere, 32% des proprietaires et 16% des locataires sont en difficulté pour honorer leur emprunt immobilier ou payer leur loyer. Ils n'étaient respectivement que 17% et 6% lors du précédent baromètre an avril. Face a cela Meelo souleve le risque de surendettement qui augmente. 7% des personnes interrogées pensent avoir recours à un dossier de surendettement aupres de la Banque de France aujourd'hui. Ils n'étaient que 2,1% il y a quatre mois. Par ailleurs, le 16 novembre dernier a été installé l'Observatoire des impayés de loyers et de charges par Emmanuelle Wargon, ministre déléguée au Logement. L'objectif de l'Observatoire est de disposer de donnees chiffrees sur les situations d'impayes de loyers pour mieux agir et proteger les personnes en situation de precarite dans le contexte de la crise sanitaire relative a l'epidemie de la Covid-19. Les premiers elements de l'Observatoire des impayes locatifs ont permis d'etablir plusieurs constats : l'ANIL a noté à partir du mois d'octobre une hausse des consultations en matiere d'impayes locatifs de la part des locataires, que ce soit dans le parc prive ou le parc social (environ 50 % d'augmentation par rapport a novembre 2019). d'après les données croisées des caisses d'allocations familiales, de l'Union sociale de l'habitat, d'Action logement et des bailleurs privés, on ne constate pas en decembre 2020 d'augmentation du niveau de nouveaux impayes. Le chiffre d'allocataires des CAF en situation d'impayes s'etablit de maniere stable a 309 000 menages depuis septembre 2020. les bailleurs émettent toutefois un point de vigilance sur le maintien d'un niveau significatif de retards de paiement. De plus, la CNAF signale egalement que si le nombre de menages en situation d'impayes reste stable, le volume des impayes augmente, ce qui signifie que ces menages restent plus longtemps dans cette situation. Dans ce contexte, les jeunes actifs sont particulièrement touchés, non seulement sur un plan professionnel, mais parce qu'ils ne font généralement pas partie des publics prioritaires pour l'accès au logement social, a l'oppose des familles avec enfants. En consequence, s'ils se retrouvent en difficulte de paiement, et ceci peut etre plus frequent pour des emplois precaires, ils risquent de ne pas connaître rapidement une solution de relogement. De plus, il faut admettre que les jeunes ne puissent pas « souffrir » d'attendre de longs mois une attribution, surtout si l'offre d'emploi les oblige a changer de domicile plus souvent. La présence des moins de 30 ans dans le parc social a chuté de 24 % à 8 % en moins de 30 ans ! La responsabilité en incombe de manière évidente aux règles d'attributions : du côté de l'Etat par la détermination des publics « prioritaires », dont les jeunes ne font pas partie ; du côté des commissions d'attribution des organismes de logement social qui s'y opposent pour plusieurs « mauvaises raisons » : de nombreuses autres familles en attente, des durees de location trop courtes dont le turnover occasionne des frais a chaque changement de locataire, et un manque de logements de petite taille adaptes a leurs besoins (cf. § 4). Ce constat appelle des mesures de simplification à brève échéance. Il serait judicieux d'apporter Barometre realise en ligne sur l'ensemble du territoire français aupres d'un echantillon de 1.072 personnes, representatif de la population française agee de 18 ans et plus, durant la periode du 14 au 18 septembre 2020. 22 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 54/86 une suite favorable aux propositions de l'USH reprises ci-dessous. Recommandation 35. Assouplir les règles d'attribution (cotation, ancienneté, règles de priorité...) pour pouvoir mobiliser des logements en attribution immédiate, notamment pour les jeunes, sur la base d'un volume annuel d'attributions. La prise de conscience n'est cependant pas nouvelle. Et certains dispositifs ont ete mis en place, par Action Logement notamment, en partenariat avec des organismes de logement social pour assurer un relais aupres des jeunes actifs, augmenter l'offre de logements et leur apporter un soutien financier. Le développement d'une offre spécifique est a l'oeuvre egalement, mais reste insuffisante. Il y a davantage de production de residences etudiantes, plus rentables et de gestion plus stable que de residences pour jeunes actifs. De nouvelles formes d'habitat, comme les experiences d'habitat dit « inclusif », ou intergénérationnel, la mise en colocation, sont des alternatives. Les locataires non-allocataires sont également pénalisés, lorsqu'ils se retrouvent en situation d'impayes de loyers. La prevention des expulsions locatives est egalement inegale selon que le locataire beneficie ou non de l'aide personnelle au logement (APL). Cette inegalite se traduit par le bénéfice ou non du relais quasi-automatique des CAF, tant en accompagnement social qu'en surcroît d'aides ponctuelles. Cette inégalité trouve son origine dans le statut des logements, conventionnes par nature dans le parc social, et conventionnes parfois dans le parc prive (suite a des travaux realises par les proprietaires avec l'aide de l'ANAH), ou « hors champ ». L'ignorance des processus en place et une incapacite a solliciter les aides existantes sont tres repandues chez les locataires du parc prive. Les dispositions adoptees par l'ANIL, d'un numero d'appel « SOS impayés », et de conseils delivres sur leur site internet, ou dans les ADIL sont interessants, mais encore peu connus. La politique de prevention doit se preoccuper de renforcer « l'aller vers » les personnes en situation de fragilite economique et sociale, en plus d'une coordination renforcee des le stade du commandement de payer et d'une communication a la hauteur de ces enjeux. Recommandation 36. Renforcer les moyens dédiés à « l'aller-vers » les locataires en situation de fragilité économique et sociale qui rencontrent des difficultés de paiement de leurs loyers. 6.3 Identifier et soutenir les « petits » propriétaires, fragilisés par l'aggravation des impayés La grande majorite des bailleurs prives sont des « petits proprietaires ». Sur les 7 millions de bailleurs privés, 85 % possèdent un à deux logements seulement et sont des gens relativement modestes, dependants financierement des revenus locatifs, et sensibles a la soutenabilité des charges (emprunts et entretien de copropriete). Ces bailleurs sont donc très exposés aux impayés de loyers. Seulement 1/3 d'entre eux recourent aux services de professionnels de la gestion immobiliere, par mandats de gestion. Dans ce cas, les professionnels exercent une plus grande vigilance dans les rappels en cas de retards de loyers et l'engagement de procédures si necessaire. Ils recourent egalement plus facilement aux systemes assuranciels, dont ils proposent le service aux proprietaires. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 55/86 Le recours à l'intermédiation locative est une autre solution securisante pour le proprietaire pour la régularité du paiement des loyers, mais ce type de solutions, consistant a louer par bail glissant a un operateur (en general associatif) qui loue a son tour a des locataires modestes, avec un niveau de loyers inferieur au marche ne connaît pas le succès qu'il mérite. Les plafonds de ressources et de loyers sont notamment en cause, en particulier dans les secteurs en forte tension immobiliere. Le plus connu de ces dispositifs est Solibail avec seulement 8000 logements captes depuis sa creation en 2007. Les deux autres tiers des bailleurs privés qui ne font appel à aucune prestation sont effectivement très vulnérables face à l'aggravation des impayés et démunis devant les procédures à conduire. Les bailleurs tardent à réagir aux créances de loyers, par empathie ou par ignorance, et lorsqu'ils s'engagent dans des procedures en recouvrement par l'intermediaire des huissiers de justice et des avocats, les situations sont généralement irrécupérables. Passe ce stade, les procedures leur echappent en quelque sorte. Ces bailleurs « solitaires », puisque non accompagnes, optent également rarement pour une couverture assurancielle des loyers et charges. Ces régimes ont un coût (autour de 2% des revenus fonciers encaisses) et ce sont les proprietaires les plus modestes et donc les plus fragiles qui evitent cette charge supplementaire. De plus, ils n'en ont pas forcément connaissance, a l'inverse des proprietaires ayant recours aux administrateurs de biens. Dans le déroulement des procédures, il n'est pas rare que les dossiers des locataires de ce parc prive ne soient pas particulierement suivis, n'ayant pas été signalés par des travailleurs sociaux aux commissions de coordination. Et la représentation des bailleurs privés aux CCAPEX connaît quelques défaillances dans certains départements. La recherche d'une alternative par le relogement n'est pas maîtrisée par les bailleurs privés, qui sont isoles. Les préconisations d'une orientation systématique et très immédiate (au moment du commandement de payer) des locataires vers un relogement adapte a leurs ressources trouvent ici tout leur intérêt (cf. § 2.3). A défaut de trouver une solution alternative de relogement, les procedures s'enchaînent dans un véritable engrenage qui echappe aux proprietaires. Lorsque leurs locataires ont recours a la commission de surendettement, il y a de forts risques que les plans d'apurement ou de redressement leur fassent connaître in fine des pertes de loyers, sans pour autant pouvoir disposer de leur bien pour le remettre a la location. Lorsque les procedures en recouvrement d'impayes s'acheminent vers l'expulsion locative, il faut compter de longs mois pour obtenir la libération des lieux, ce que les proprietaires attendent le plus. Suivant une procedure dite « classique », le respect des delais conjugues represente souvent plus de deux ans contre 4 à 6 mois en Grande Bretagne23, moins de six mois en Suède et un an en Allemagne24. En resultat, ces bailleurs doivent faire face a des délais importants pour recouvrer leur bien, des charges et des taxes courantes qui s'ajoutent au manque à gagner et aux frais de justice avancés. Le concours de la force publique finit par concerner 8.000 locataires du parc privé en moyenne ces dernieres annees, soit autant en nombre que dans le parc social, mais cela represente deux fois moins de cas en proportion (0,1%) des 7 millions de logements du parc prive (cf. graphique figurant au § 3.1). 23 24 Cf. Rapport NOGAL deja cite Cf. Rapport IGA/CGEDD/IGAS/IGSJ qui cite l'etude Stenberg, Van Doorn, Gerull; « Locked down in Europe », European journal of homelessness, decembre 2011 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 56/86 Les indemnités dues par l'Etat en cas de refus du concours de la force publique constituent un obstacle supplémentaire. Le paiement de cette indemnisation est devenu avec le temps arbitraire et inégalitaire selon les territoires. Outre des délais de règlement excessivement longs (jusqu'a un an), le montant de l'indemnisation ne couvre généralement pas le montant dû (70% en moyenne). Au final, par ignorance, ou pour ne pas avoir à engager une ultime requête aupres des services prefectoraux, ou par voie judiciaire, seuls 53,8% des propriétaires font une demande d'indemnisation. Ce cumul d'inconvenients est dissuasif pour la remise sur le marché de biens à la location. Les « petits propriétaires » bailleurs doivent être mieux pris en considération dans la politique de l'offre locative et faire de facto l'objet d'une attention particulière dans la politique de prévention des expulsions. Tous ces sujets plaident pour une attention et un accompagnement renforcés des proprietaires prives dans le contexte de la crise sanitaire (Covid-19). De nouveaux profils (commerçants, artisans, intérimaires...) risquent d'être confrontés aux fragilités des locataires accentuées par la crise. Recommandation 37. Mettre fin aux pratiques de négociation des indemnités dues aux bailleurs par les préfets lorsqu'ils n'accordent pas le concours de la force publique. Systématiser le paiement de ces indemnités. En revoir l'imputation budgétaire (compte du logement). 6.4 Le recours aux systèmes de garanties est trop faiblement répandu mais doit être encadré Les proprietaires prives ont tres faiblement recours aux garanties offertes par le systeme assuranciel. Sur les 7 millions de logements du parc privé, seulement 35% sont gérés par des professionnels sous mandat, et seulement 15% de ces proprietaires acceptent de payer une garantie pour impayes de loyers (GLI). Cela ne represente donc que 5% du parc privé couvert par une garantie. Il pourrait etre souhaitable d'étendre davantage ces couvertures assurancielles aux propriétaires privés des 4,5 millions de logements non gérés par des professionnels et des 2 millions de logements supplémentaires gérés sans garantie de loyers impayés. Mais le prix de ces garanties devrait être réexaminé en lien notamment avec la possibilité d'y accéder directement sans l'intermédiaire des professionnels de l'administration de biens. Cependant, il est impératif que les acteurs assuranciels participent de manière plus officielle à la prévention des expulsions. Je suggère qu'ils soient davantage associés à la détermination des politiques départementales et qu'ils contribuent par dotation aux FSL ainsi qu'au financement des ADIL. Recommandation 38. Intégrer pleinement les assureurs dans les politiques de préventions d'expulsions (Signataire des chartes départementales, contributions FSL, ADIL...) Recommandation 39. Concevoir une évolution de l'offre de garantie, pour permettre à des bailleurs privés d'adhérer directement à ce système d'assurance. Ceci suppose d'en redéfinir les conditions financières et les clauses d'intervention, sans faire obstacle au rôle des intermédiaires de l'administration de biens. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 57/86 La « garantie » VISALE mise en place par ACTION LOGEMENT depuis janvier 2016 est une alternative à la caution physique : Finance exclusivement par Action Logement, et gere par sa filiale APAGL, le dispositif « Visale » est un systeme de cautionnement gratuit et dématérialisé couvrant les loyers impayés pendant toute la duree d'occupation du logement, dans la limite de 36 echeances impayees et, exclusivement pour le parc prive, la prise en charge de degradations locatives. Ce service de caution vise a faciliter l'acces au logement de candidats25 plus fragiles economiquement tout en offrant une garantie intéressante pour le propriétaire, équivalente à une assurance. Pres des 2/3 des menages entrant dans le parc locatif prive sont eligibles a Visale. Depuis le debut du dispositif en 2016, seulement 375 000 ménages ont bénéficié de Visale (dont 130.000 sur l'annee 2019). Avec une hausse des contrats souscrits de 21% entre janvier et fin novembre 2020 par rapport a la meme periode 2019, Visale a continue, malgre la crise sanitaire, d'accompagner les beneficiaires et particulierement les jeunes (+ 42% par rapport a 2019). Cette garantie est mise en jeu dans 4,7% des cas, tandis que 1% des dossiers d'impayes concernes a abouti a une expulsion. Bien que financé par les fonds de la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC), le public beneficiaire a ete elargi a tous les jeunes de moins de 30 ans, ce qui est appreciable. La question se pose d'un élargissement éventuel des bénéficiaires de ce dispositif, sans en souhaiter une extension immodérée qui serait de nature à déresponsabiliser les locataires. Independamment de cette question, les modalités de prise en charge restent très procédurales, sans véritable système d'accompagnement social, hormis le cas de proprietaires en intermediation locative. 6.5 Bien qu'exposés aux conséquences économiques de la crise sanitaire, les bailleurs sociaux sont mieux armés Du côté des bailleurs sociaux, les relations institutionnelles sont établies depuis longtemps avec la chaîne des acteurs du departement, des services de l'Etat et des collectivites, en raison du regime general lie au conventionnement et des garanties apportees sur le pan de l'investissement, mais aussi des contacts permanents etablis pour le suivi des attributions, la gestion des contingents de reservation et des publics prioritaires. De plus, les bailleurs sociaux, qui logent une forte proportion de personnes a faibles ressources, ont depuis longtemps acquis un professionnalisme dans la gestion locative, alliant les competences de travailleurs sociaux, leurs « conseillers en économie sociale et familiale », des agents de proximite en capacite de dialogue et de detection des fragilites sociales sur le terrain au quotidien (gardiens et régisseurs de quartiers) et des services contentieux particulierement exercés à faire du précontentieux des les premiers mois d'impayes. Il peut etre ajoute que la majorité des locataires logés par les organismes de logement social bénéficie de l'aide personnelle au logement (APL), de par leurs niveaux de ressources et le statut A ce jour, peuvent beneficier de Visale : tous les jeunes de 30 ans au plus ; les etudiants et alternants de 30 ans au plus loges dans le parc prive, le parc social ou les residences etudiantes ; les salaries de plus de 30 ans en mobilite professionnelle, y compris les salaries en CDI en mutation professionnelle et les salaries du secteur agricole ; les salaries et demandeurs d'emploi de plus de 30 ans, confrontes a un evenement exceptionnel fragilisant leur lien a l'emploi et au logement ; les menages accompagnes par une association d'intermediation locative ; les menages loges dans le cadre du bail mobilite. 25 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 58/86 des logements conventionnes avec l'Etat. Ces allocations versées directement aux bailleurs en « tiers payant » par les CAF et MSA ­ et qui representent de l'ordre de 70% des loyers encaisses ­ leur procurent egalement un lien étroit avec les travailleurs sociaux des CAF en particulier. Ce rapport est essentiel. En résultat, les locataires logés par les bailleurs sociaux bénéficient d'une assistance quasi permanente. Comme le souligne le CREDOC dans l'etude deja citee, « Hormis les bailleurs sociaux, très peu d'acteurs investissent ce temps en amont ou post assignation. De fait, les ménages du parc social locatif apparaissent moins exposés aux risques d'expulsion même si les mutations dans le parc social semblent rares. » Les données consolidées communiquées par l'Union sociale pour l'habitat (USH) a notre intention (voir schéma suivant) montrent l'efficacité du suivi opéré par les organismes, la proportion de locataires restant en impaye de loyer superieur a 3 mois n'etant que de 6,5% du parc global malgre l'apparition de difficultes de paiement chez 18,6% d'entre eux, et la proportion de locataires qui restent en impayé plus d'un an n'est plus que de 1,5% des 4,6 millions de locataires, soit 64.000 familles. Nombre de logements sociaux 4 000 000 3 500 000 3 000 000 2 500 000 2 000 000 1 500 000 1 000 000 500 000 0 Sans difficulté de paiement 3 680 000 820 000 286 000 64 000 en difficulté de paiement en impayé > 3 mois en impayé > 12 mois Source : mission a partir des donnees USH pour l'annee 2018 Compte-tenu des capacités des organismes à faciliter le recours de leurs locataires aux aides FSL ou à celles d'Action Logement, à permettre le maintien ou le rétablissement des APL (via le dialogue avec les CAF) et à faire des propositions de mutations dans des logements de leur parc aux loyers plus adaptes a la taille et aux ressources des menages en difficulte, ce score doit être relativisé. Les mutations restent d'ailleurs une pierre d'achoppement des organismes de logement social. Le sujet est connu et pourrait faire l'objet d'un long developpement. Independamment de la culture des commissions d'attributions, les frais occasionnes par les mutations ne sont notamment pas negligeables. Et la structure du parc de logements sociaux est egalement en cause (cf. § 4). Quant aux niveaux de loyers, ils peuvent expliquer aussi, du fait de l'augmentation des prix de l'immobilier au sens large (charge fonciere et couts de construction) ces dernieres decennies, des difficultes a offrir des relogements a des niveaux de loyers dits « tres sociaux ». Les organismes ont euxmemes identifie parmi les voies de progrès, le choix de l'intermédiation locative en confiant la location d'une partie de leur parc a des associations a vocation tres sociale. Le manifeste de l'USH Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 59/86 publié en septembre 2020 26 , fait état du double intérêt de ce partenariat « sur le modèle de « Solibail », visant, d'une part, à assurer un accompagnement personnalisé des personnes logées par une association et, d'autre part, à assurer un niveau de quittance très maîtrisé, compatible avec les ressources du ménage. Ce dispositif permettrait par exemple de loger des personnes à très faibles ressources dans des logements sociaux dont le niveau de quittance est trop élevé, en raison des loyers (PLS...) ou des charges ». Une part des logements vacants du parc social pourrait être davantage mobilisée (cf. § 4.2). Ces vacances peuvent toutefois etre le resultat de certaines decroissances demographiques ou d'une certaine obsolescence d'immeubles voues a la demolition dans le cadre de la renovation urbaine en particulier (cf. § 4 .1). Les bailleurs eux-mêmes reconnaissent, dans le document publie par l'USH en septembre 2020 l'opportunite de mobiliser les logements vacants de leur propre parc situe en particulier dans « certains territoires en régions, en périphérie de métropoles et de villes moyennes ». Des travaux collectifs s'imposent au niveau national (DHUP et DIHAL, USH) comme au niveau régional dans le cadre des comites regionaux de l'habitat et de l'hebergement (CRHH), et au niveau territorial (prefets, DDT et DDCS, conseils departementaux, communes et EPCI, bailleurs sociaux) par la prise en compte des disponibilites dans les programmes locaux de l'habitat (PLH) et les chartes départementales de prévention des expulsions locatives. Il s'agit de cibler le réemploi des 33.000 logements vacants environ proposés à la location et restant vacants plusieurs années27. A ce sujet, il ne devrait pas être tabou de pouvoir proposer des logements à des personnes menacées d'expulsion dans une autre localité que celle dont elles sont issues, dans une période où l'attractivité des territoires pourrait avoir tendance à s'inverser, dans la mesure où l'éloignement de leur emploi n'en serait pas un obstacle. Finalement, les professionnels du logement social devraient avoir les moyens, accentués depuis leurs regroupements, de mutualiser leurs forces pour palier la question d'une offre adaptee au relogement de locataires en difficulte, toutes les fois que cela se pose. A contrario, ces organismes sont confrontés, comme les bailleurs prives, à l'accroissement des pertes de loyers lorsque les locataires en impayes font l'objet de décisions judiciaires de resiliation de bail et que le concours de la force publique ne leur est pas accordé. Les indemnités accordées par l'Etat en cas de refus du concours de la force publique sont rarement versees a la hauteur des pertes de loyers. La proportion est voisine de 70% et fait l'objet de véritables « négociations » avec les services préfectoraux. Ce manque de recettes s'ajoute aux dettes effacées par les plans accordés par la commission de surendettement de la Banque de France. Pour l'ensemble des bailleurs sociaux, l'USH indique que ces effacements de dettes sont deja passés de 54 M en 2014 a 89 M en 2018, soit une augmentation de 65% en seulement quatre ans. Des indications sur les effets de la crise sanitaire ont été données : l'USH constate un surplus des retards de paiement de 65 M - seulement, pourrait-on dire - a fin octobre 2020 par rapport a la situation de fevrier 2020, ce pour l'ensemble des organismes ; il y a meme une diminution du nombre de nouveaux cas de locataires en impayes en septembre et octobre, pour atteindre un niveau inferieur a son seuil d'avant crise, en fevrier 2020 ; avec l'amplification des mesures gouvernementales, les refus d'octroi du concours de la force publique risquent d'etre multiplies au moment de la fin de la trêve hivernale au printemps « Pour etre utiles ensemble - Les propositions du Mouvement Hlm pour une relance juste et durable » - septembre 2020 - https://www.union-habitat.org/centre-de-ressources/politique-du-logement-mouvement-hlm/pour-etreutiles-ensemble-les-propositions 26 27 Cf. rapport IGF/CGEDD de janvier 2016 sur la mobilisation des logements et des bureaux vacants PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 60/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN 2021 avec des conséquences financières pour les bailleurs sociaux comme pour les bailleurs prives, car les « negociations » avec les services prefectoraux pour obtenir le paiement d'indemnités correspondant aux périodes couvertes par le confinement devraient porter sur des montants beaucoup plus importants. Des mesures préventives ont été engagées par le « Mouvement HLM » : En mai dernier, l'USH se dotait d'une charte en faveur des locataires "en fragilité économique", signée avec cinq organisations de locataires siegeant a la commission nationale de concertation. Cette charte comportait des recommandations destinees aux bailleurs : le developpement d'outils et de dispositifs d'appui facilement accessibles : demarche proactive, incitation des locataires en difficulte a se manifester, contact telephonique regulier avec les locataires « montrant des signes de fragilité », signalement par les associations, tout « en respectant un cadre déontologique de discrétion », des situations de detresse economique ; la mise en place de possibilités d'étalement du paiement des loyers et des charges : « des solutions personnalisées, adaptées à chaque situation », des regles « précises et transparentes d'étalement [...] définies conjointement dans un protocole local concerté entre l'organisme HLM et les associations de locataires », moyennant une large information des locataires et la conclusion de protocoles individuels avec un dispositif conjoint de suivi entre l'organisme et les associations ; l'aménagement de la facturation des charges locatives récupérables, lors de la regularisation annuelle, avec la possibilite de reporter les regularisations ou de les traiter differemment selon qu'elles sont debitrices ou creditrices, l'adaptation des provisions pour charges en fonction des prestations effectivement assurees pendant le confinement (par exemple, avec la suspension de l'entretien des espaces verts) ; la mobilisation des dispositifs de solvabilisation de droit commun (FSL, Action logement, CCAS, aides de l'Etat...). Dans le contexte de la reprise de la pandémie cet automne et la mise en place d'un second confinement, un avenant à cette charte vient d'etre signe avec quatre des cinq associations de locataires initiales, la Confederation nationale du logement (CNL) s'étant retirée faute d'obtenir un consensus sur l'ajout d'autres mesures comme le gel des loyers en 2021. L'avenant confirme que « la crise sanitaire continue de dégrader la situation économique des locataires HLM », ajoute de nouveaux engagements. Ainsi, la possibilite d'accorder des délais de paiement des loyers, prevue par la charte, est prorogee jusqu'à la quittance du mois de mai 2021 incluse. Un engagement met aussi un accent spécifique sur le soutien et l'accompagnement des victimes de violences conjugales et familiales, « dont la vulnérabilité est accrue en période de confinement ». Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 61/86 7 Consolider le « bouclier » de l'urgence sanitaire (Covid-19) et anticiper la sortie de la trêve hivernale au printemps 2021 7.1 Veiller de manière active sur un nouveau public à risque Les associations situees les plus en amont du soutien aux menages (banques alimentaires, Restos du Coeur, Secours catholique, Secours populaire etc.) constatent une augmentation globale du nombre de demandeurs. Certaines structures comme le Secours populaire ont deja ete confrontees a des situations alarmantes, avec 45 % des nouveaux demandeurs en 2020 qui correspondaient a des menages non connus de leurs services28. Le nombre d'allocataires du revenu de solidarite active (RSA) a progresse de plus de 8% en 2020. Les CAF et l'ADF ont constate que de nouveaux profils ont fait une demande de RSA. Il s'agit souvent d'auto-entrepreneurs, artisans, ou commerçants. L'arbitrage sur le budget de certains menages les amene a demander de l'aide de premiere necessite (aides alimentaires, aides au paiement des fluides). S'appuyer sur ces associations, qui nouent souvent un premier contact approfondi avec les ménages en difficulté, devient indispensable pour identifier les nouveaux publics fragilisés et susceptibles d'être concernés par des procédures d'expulsion locative. Nombreux sont ces menages qui ne font pas appel a un travailleur social, par meconnaissance ou par pudeur. Afin d'anticiper le plus tot possible le risque d'un impaye locatif et celui d'une procedure judiciaire, ces acteurs de solidarite pourraient mener une mission de reperage de ces nouveaux publics, et il serait judicieux d'utiliser les ressources des ADIL afin de les aider a s'orienter tres rapidement. Recommandation 40. Proposer aux départements et métropoles d'expérimenter un repérage précoce de ménages pouvant basculer dans l'impayé locatif par recours aux acteurs associatifs, de façon à les orienter rapidement vers le conseil des ADIL. Dans le parc social, le programme de financement « 10.000 logements HLM accompagnés » lance en 2014 avec les bailleurs sociaux a permis de mettre en oeuvre des actions innovantes relatives a l'acces ou au maintien dans le logement des menages en grande difficulte (troubles de la sante mentale, personnes a la rue, victimes de violences conjugales, etc.). Ces actions ont ete menees notamment par le gardien d'immeuble : sa capacite a pouvoir reperer des menages en difficulte est averee et doit etre fortement encouragee. Il pourrait etre opportun de formaliser un modele de detection. Recommandation 41. Dans le parc social, formaliser une méthodologie de signalement des ménages à risque d'impayés par les gardiens d'immeubles en capitalisant sur les expériences réalisées dans le cadre de l'appel à projets "10.000 logements accompagnés". 28 Barometre du Secours Populaire du 30 septembre 2020 PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 62/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN Par ailleurs, 140 000 personnes se seraient vu accorder un plan d'apurement par les tribunaux ces 3 dernieres annees, selon la Fondation Abbe Pierre. Les consequences de la crise impacteront forcement le respect de certains de ces echeanciers et pourraient ainsi augmenter fortement les situations conduisant a des procedures d'expulsion avec CFP, des lors que la clause resolutoire est acquise des qu'une echeance n'est pas respectee. Ainsi, de nombreux protocoles de cohesion sociale pourraient etre remis en cause dans le parc social. Recommandation 42. Prendre en compte rapidement le cas des personnes ayant signé des protocoles de cohésion sociale ou en cours de remboursement d'échéancier fixé par le juge et envisager des aides pour tous les ménages qui assumaient leur échéancier avant la crise sanitaire et qui démontreraient une baisse de leurs revenus liée à la crise sanitaire. Le « Aller vers » est un impératif qui doit s'inscrire en profondeur dans nos doctrines de politiques de solidarité. Dans cette periode inedite et aux perspectives inquietantes de 2021, il sera essentiel d'aller a la rencontre des menages les plus exposes. L'emploi de ces dispositifs sera indispensable pour permettre de mobiliser tous les leviers existants pour le maintien dans le logement ou le relogement. Dans ce contexte, le gouvernement vient d'annoncer la création d'équipes mobiles de visite a domicile le 16 decembre 2020. Des le debut de l'annee 2021, 26 equipes mobiles, composees de 3 a 5 travailleurs sociaux ou juristes, seront deployees dans les departements les plus tendus en matiere de logement et concernes par de nombreuses procedures engagees sur le plan d'une expulsion locative. Il conviendra que ces equipes soient le plus rapidement operationnelles des le debut de l'annee. Vu l'ampleur des taches qui les attend, il faudrait envisager de renforcer ces equipes au cours du premier trimestre 2021 afin de couvrir un territoire plus large. Recommandation 43. Prévoir dès le premier trimestre 2021 la multiplication des équipes mobiles déployées sur le terrain. 7.2 Anticiper et préparer la sortie de la trêve hivernale 2021 En ce moment si singulier, les propositions qui suivent auront à tenir compte de la future évolution de la crise sanitaire qui par définition est inconnue. Un nouveau confinement ou d'autres mesures de précaution pourraient conduire à des évolutions significatives et obliger à revoir certaines recommandations. La crise sanitaire a fortement impacte la prevention des expulsions locatives, aussi bien par ses consequences immediates sur la gestion de la procedure d'expulsion elle-meme que par les risques nouveaux que font peser a terme ses consequences economiques sur la capacite de paiement du loyer par les menages. Afin de maîtriser la propagation de l'epidemie de la Covid-19, le gouvernement a ete amene a prendre une serie de mesures inedites de protection des locataires menaces d'expulsion durant l'annee 2020. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 63/86 Dans le cadre de l'etat d'urgence sanitaire, la treve hivernale a ainsi ete allongee du 1er avril au 10 juillet, reportant d'autant l'execution des concours de la force publique (CFP) par les prefets. Prenant le relais de ce dispositif initial, l'instruction du 2 juillet 2020 a ensuite permis de limiter, de façon temporaire et jusqu'a la treve hivernale suivante, le nombre d'execution des concours de la force publique, tout en indemnisant les proprietaires concernes. Conçus comme une reponse d'urgence devant le caractere exceptionnel de la crise sanitaire, ces dispositifs derogatoires ne peuvent cependant se substituer de maniere perenne au cadre constitutionnel et legislatif regissant les rapports locatifs et le droit de propriete. La réduction historique des expulsions que ces dispositifs ont permis d'obtenir en 202029 a également eu pour impact de fragiliser la situation financière de nombreux bailleurs du parc privé qui dépendent financièrement de leurs revenus locatifs. Ces reports contribuent également à l'aggravation de l'endettement des occupants dont la situation était déjà précaire, ce qui n'est pas favorable à leur réinsertion sociale. Cette reduction a egalement eu pour contrepartie l'accumulation simultanée des procédures administratives d'expulsion au sein des préfectures tout au long de l'annee 2020, generant in fine un risque différé de hausse massive des expulsions a court et moyen termes. D'apres les premieres estimations 30 , le nombre de CFP accumules au cours de l'annee 2020 qui demeurent en attente correspondrait a 70% de son niveau de 2019. Ce serait ainsi 22 000 CFP octroyés qui seraient en attente d'une exécution au 31 décembre 2020, auxquels il faut par ailleurs ajouter les nouveaux CFP qui seront requis et octroyes d'ici la fin de la treve hivernale du fait de la poursuite des procedures judiciaires d'expulsion durant l'annee 2020, soit approximativement 12 500 CFP requis et 8 000 octroyés sur 3 mois, dans l'hypothèse d'une fin de trêve au 1er avril. En tenant compte du travail d'instruction que meneraient a moyens constants les services des prefectures d'ici la fin de la treve, on peut ainsi estimer que plus de 35 000 CFP seraient à instruire pendant le seul premier trimestre 2021, ce qui serait trois fois supérieur au flux courant, et pres de 30 000 seraient a executer a la seule date du 1er avril 2021, ce qui equivaut a la totalite du volume d'une annee courante a l'issue du seul premier trimestre. L'enjeu immédiat en matière de prévention des expulsions est donc d'élaborer en 2021 les étapes d'une transition progressive en tenant compte de la permanence des risques sanitaires et socioeconomiques lies a la Covid-19 qui demeurent pour les personnes les plus vulnerables. L'objectif prioritaire est de réduire le nombre d'expulsions et d'éviter la précarisation des locataires ainsi que celle des bailleurs concernés. Dans l'hypothese d'une fin de treve hivernale conventionnelle au 1er avril 2021 allant de pair avec une reprise des executions de concours de la force publique a cette date, il faut programmer la coordination des interventions des partenaires de la prevention au niveau national et local de façon a : Réduire le niveau de CFP accumulés en 2020 a executer a partir du 1er avril ; Echelonner sur l'année 2021 la reprise de l'exécution de ces CFP ; Limiter l'afflux de nouvelles réquisitions de CFP susceptibles d'être octroyées en 2021. 29 30 3 500 personnes ­ selon le communique de la DIHAL en date du 31 Octobre 2020 Estimation etablie par le pole prevention des expulsions locatives de la DIHAL PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 64/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN Il s'agirait de reduire dans un premier temps le niveau de CFP a executer a l'issue de la treve hivernale puis d'echelonner dans un deuxieme temps leur reprise sur le reste de l'annee avant de travailler a la reduction du flux de CFP nouvellement requis. Recommandation 44. Elaborer un plan d'actions destiné à gérer dès maintenant la fin de la trêve hivernale. Le faire en liaison étroite avec les représentants des collectivités territoriales, des administrations et des différents acteurs sociaux. 7.2.1 Identifier les ménages concernés par un CFP en 2021 La condition préalable qui permettra de limiter le nombre d'expulsions sera la connaissance des ménages concernés, or la moitie d'entre eux serait en effet inconnue des services sociaux au stade du CFP et ils n'auraient pour la plupart engage aucune demarche de relogement. L'enjeu d'aller au plus près de ces ménages est donc immense mais indispensable pour limiter le nombre d'expulsions sans solution de relogement ou d'hebergement en 2021. Une cooperation de tous les acteurs est donc necessaire, les CCAPEX pourraient sur cette mission d'identification etre en pilotage et mobiliser tous les acteurs territoriaux, et en particulier tout le tissu associatif Comme cela a ete fait dans les Bouches-du-Rhone, les CCAPEX pourraient communiquer aux CCAS et CIAS la liste des locataires concernes. Les equipes mobiles mises en place par le Gouvernement devraient prioritairement se rendre au domicile des locataires du parc prive faisant l'objet d'un CFP octroye et reste en attente d'execution alors que ces personnes seraient inconnues des services sociaux. 7.2.2 Mobiliser les capacités de logement pour les ménages en voie d'expulsion L'augmentation des capacités de relogement sera la condition sine qua non d'une réduction effective du nombre de dossiers accumulés en 2020 pour limiter la hausse des expulsions effectives sur l'annee 2021. En vue de limiter autant que possible le nombre d'expulsions a realiser a l'issue de la treve hivernale et tout au long de l'annee 2021, l'objectif prioritaire est de mener une action conjointe d'accompagnement et de relogement des personnes faisant deja l'objet a ce jour de CFP requis et octroyes. Il est ainsi indispensable de reserver les disponibilités de logement pour ces personnes, dont celles qui ont deja realise des demarches de demandes de logement social (DLS). Quoi qu'il en soit, il conviendra aussi d'accelerer voire de simplifier les contributions d'attribution et les delais qui s'y rapportent pour accelerer le relogement de ces familles. Ces objectifs de relogement ne pourront pas etre atteints sans mobiliser les reservataires n'ayant pas respecte leur obligation d'attribution de 25% et le contingent prefectoral. Les commissions d'attributions logement devront aussi s'inscrire dans cette dynamique. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 65/86 Vu l'ampleur du defi et les enjeux humains, il est incontournable de se fixer des objectifs mensuels des le debut d'annee. Recommandation 45. Fixer dans chaque département des objectifs mensuels d'attribution de logements ciblés pour les ménages faisant l'objet d'une réquisition de la force publique aux fins d'expulsion. Meme si nous connaissons les difficultes des bailleurs sociaux a developper le nombre de mutations, ces dernieres sont plus que jamais une des solutions les plus pertinentes pour affronter les enjeux du relogement des personnes sous la menace d'une expulsion par CFP en 2021. Les CCAPEX pourraient par exemple demander aux bailleurs sociaux de faire la demonstration qu'ils ne disposent d'aucun logement adapte a la situation du menage pour lequel ils demandent l'expulsion au sein de leurs parcs, en tenant compte des differents contingents de reservation mobilisables. Parallèlement, tout maintien dans le logement dans le parc social, s'il est encore possible, doit être une priorité. Depuis la loi ELAN, le protocole de cohésion sociale (PCS) peut etre mis en place y compris en cas d'impossibilite de remboursement de la dette locative, a la seule condition que le loyer courant soit repris. Dans le contexte actuel, les bailleurs sociaux devront en responsabilite mettre tout en oeuvre pour suspendre la procedure de CFP. La disponibilité de logements abordables hors conventionnement dans le parc locatif privé sur certains territoires est reelle, avec les federations nationales de bailleurs et d'agences, il serait interessant d'etablir dans les territoires un contingent de logements vacants pour les menages menaces d'expulsion que les CCAPEX identifieraient. Enfin, l'augmentation des objectifs d'hebergement offre un moyen complementaire de prise en charge des personnes les moins vulnerables et faisant l'objet d'une execution de CFP. Les CCAPEX, en lien avec les services des prefectures en charge de l'hebergement, pourraient etablir la liste des menages faisant l'objet de CFP a heberger et les orienter vers les services integres d'accueils et d'orientation (SIAO). Un objectif mensuel semble necessaire pour que cette action soit efficace. Toutes ces actions d'accompagnement, de relogement et d'hebergement necessiteront des moyens humains supplementaires au sein des services des DDCS. Recommandation 46. Renforcer temporairement les effectifs des DDCS et des CCAPEX en charge de la coordination des dispositifs d'accompagnement social, du relogement et de l'hébergement. Le quasi-doublement au niveau national de la masse de CFP à traiter en 2021 sera difficilement supporte par les effectifs des prefectures actuels qui etaient deja sous tension pour gerer le simple flux courant avant crise. Il apparaît donc necessaire de faciliter temporairement le recrutement de personnels contractuels ou vacataires, sur la base des besoins remontes par les prefectures. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 66/86 Recommandation 47. Renforcer temporairement les effectifs des préfectures en charge de l'instruction des CFP. 7.2.3 Déterminer des priorités dans la reprise des expulsions Il y aura une necessite difficile mais indispensable de prioriser en 2021 la reprise des executions des CFP. Pour ce faire, il paraît indispensable de tenir compte, de la qualite des bailleurs, de leur capacite financiere et de la vulnerabilite des occupants. L'enjeu est a la fois sanitaire, en termes de limitation de l'exposition des populations les plus a risque et de propagation du virus, et socioeconomique, en termes de limitation de l'impact des expulsions sur les personnes les moins susceptibles de se reinserer ou pour lesquelles les consequences seraient relativement les plus lourdes. Je suggère de favoriser le maintien dans le logement ou le relogement des personnes souffrant de maladies chroniques, des personnes âgées, des personnes handicapées et des familles avec enfants, déjà reconnues prioritaires par la loi. A l'exclusion de ces personnes, il s'agirait de concentrer la reprise des expulsions dans le parc privé, en priorite pour les petits bailleurs individuels qui ne disposent que d'un seul logement et dependent du revenu locatif pour leur subsistance. Les fédérations nationales de bailleurs et d'agences immobilières pourraient servir de relais a cette fin aupres de leurs adherents. Dans un deuxième temps, la reprise des expulsions pourrait se concentrer sur les dettes locatives les plus élevées et les CFP les plus anciens. Enfin, meme si cela reste une minorite, la reprise des expulsions sur les personnes constituant une menace pour leur environnement physique et materiel immediat ainsi que sur les personnes n'ayant pas repris le paiement de leur loyer alors qu'elles disposent des capacites budgetaires pour ce faire devraient etre priorisee. 7.2.4 Echelonnement et maîtrise de la reprise des CFP Parallelement a la reduction du niveau de CFP, le defi majeur de l'annee 2021 est d'organiser la transition de l'etat d'urgence vers une reprise maîtrisee de la procedure d'expulsion locative en 2021. Cela passe en particulier par l'organisation d'une reprise progressive et maîtrisee de l'execution des concours de la force publique (CFP) qui evite tout effet de rattrapage massif et desorganise. Il s'agit en particulier de reduire autant que faire se peut l'incidence socioeconomique, sanitaire mais aussi budgetaire des expulsions pour les locataires comme pour les bailleurs dans le contexte actuel de crise sanitaire. Une reprise des expulsions non anticipée pourrait ainsi conduire sur l'annee a une hausse inedite de 30 000 CFP executes sur l'annee en 2021 contre 17 000 en 2019. Il est donc necessaire de prevoir un echelonnement du traitement des CFP, s'etendant potentiellement jusqu'au debut de la treve 2021-2022, voire en 2022, qui permette autant que possible de limiter le nombre d'expulsions et de soulager la contrainte temporelle relative a la vitesse de l'instruction des CFP, afin que chaque dossier puisse être évalué avec le même niveau d'attention. L'enjeu est Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 67/86 d'obtenir une reduction aussi importante que possible du nombre d'expulsions realisees en 2021 dans le parc social. Elle permettrait egalement d'inciter fortement les bailleurs a utiliser cette periode pour rechercher en interne des modalites alternatives a l'expulsion (mutations provoquees, mise en place de PCS...). Il s'agit de definir conjointement avec les federations nationales de bailleurs et reservataires du parc social, les conditions d'une reprise limitee des executions de CFP en 2021 ainsi que les modalites d'indemnisation financiere des bailleurs par l'Etat en cas de suspension prolongee de l'execution des CFP au cours de l'annee. Il serait envisageable de limiter la reprise partielle des executions limitee aux seuls CFP accumules en 2020. Recommandation 48. Négocier au niveau national les modalités de contribution des bailleurs sociaux à l'effort d'échelonnement de l'exécution des CFP en 2021. Recommandation 49. Échelonner la reprise de l'exécution des CFP accordés sur les années 2021 et 2022. 7.2.5 Abonder le budget destiné à l'indemnisation des bailleurs Du fait de l'action de suspension du CFP au-delà de la période de trêve hivernale le risque de fragilisation des petits bailleurs qui dépendent de leur loyer est réelle. Ainsi, Il conviendrait d'abonder en consequence le programme budgetaire (BOP 216) en charge de l'indemnisation des bailleurs par suite d'un refus d'octroi du concours de la force publique. A l'echelle nationale, ce besoin d'indemnisation supplementaire genere par le report de l'execution du « stock » de CFP accumule en 2020 pourrait se traduire par un abondement du programme estime a hauteur de 80 millions d'euros pour l'annee 2021 31. Recommandation 50. Abonder le budget du programme 216 destiné à indemniser les propriétaires bailleurs pour lesquels l'exécution de la force publique sera reportée au-delà de la fin de la trêve hivernale ou suspendue dans l'attente d'un relogement effectif des occupants. 7.2.6 Valoriser et partager les retours d'expériences autour de cellules d'urgence L'observatoire des impayes cree en novembre 2020 va permettre un suivi de leur evolution. Pour l'instant, les amortisseurs de la crise economique due a la crise sanitaire mis en place par le gouvernement ont pu limiter cette augmentation. Cependant, et parce que nous faisons face à une crise inédite et donc à des conséquences difficilement quantifiables, il est impératif de se préparer à plusieurs scénarios et d'être en capacité le moment venu d'actionner des leviers supplémentaires d'aides aux locataires. L'exemple d'Action Logement, qui a mis en place un dispositif de secours temporaire pour aider les personnes les plus vulnérables parmi les actifs et les jeunes, a été très pertinente. 31 Estimation du pole prevention des expulsions de la DIHAL PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 68/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN Au 30 novembre 2020, Action Logement comptait pres de 78 000 aides distribuees dans le cadre du deploiement d'une aide exceptionnelle. La depense s'est elevee a 23,5 millions d'euros. L'aide consiste en une subvention de 150 euros par mois sur 2 mois pour les salaries ayant eu a faire face a une baisse d'au moins 15 % de leurs revenus. Renouvelable une fois, elle est accordee sous plafond de ressources des menages (ressources a 1,5 SMIC). La depense de logement devait representer plus de 40% des revenus impactes par la crise. Action Logement Services a estime le nombre de beneficiaires potentiels a environ 300 000 salaries. Le public touche a fin novembre represente donc a peine le tiers du public potentiel. En octobre, les partenaires sociaux ont engage une nouvelle discussion avec l'Etat pour faire valoir que le deploiement de cette aide devait etre renforce. Ainsi, le taux d'effort a ete abaisse (passe de 40% a 33 %) et le plafond d'aides renforce de 300 a 900 (6 versements de 150 ) pour la seule categorie des demandeurs d'emplois ou des beneficiaires qui auraient perdu leur emploi depuis leur premiere demande. En ce qui concerne le risque locatif des jeunes, 95 millions d'euros ont ete mobilises sur la meme periode pour les jeunes de moins de 30 ans en alternance, avec des subventions allant de 10 euros a 100 euros, flechees sur le paiement du loyer. Lors du confinement de mars 2020, de nombreuses collectivités territoriales ont adapte leur reglement FSL a l'urgence sociale : augmentation des seuils, creation d'un fonds d'urgence d'aide a la quittance ou a l'impaye, par exemple. Dans certains départements, le raccourcissement des délais de traitement des dossiers (entre 15 jours et 3 mois hors periode de crise) a ete impulse grace a la dematerialisation partielle ou totale de la procedure. Pour accelerer l'instruction des dossiers, certains departements comme le Nord ont egalement repousse a un temps ulterieur la remise des pieces justificatives necessaires a l'octroi du FSL. L'interet etait de deroger aux regles habituellement en vigueur sans avoir a modifier le reglement interieur de chaque FSL, d'ou le choix de l'assouplissement des delais ou des conditions d'acceptation des dossiers. Des dispositifs specifiques ont egalement ete mis en place afin d'eponger rapidement les dettes de nouveaux publics. D'autres FSL ont fait le choix de la révision du règlement intérieur, notamment pour modifier les criteres de calcul des ressources du demandeur (pour la reduire par exemple au dernier mois ecoule, comme dans le Finistere) ou ouvrir des plafonds derogatoires. On a également pu assister à un degré de réactivité important de la part des métropoles. La Metropole de Lyon a par exemple vote en juin un fonds d'urgence de 1 300 000 euros pour les impayes de loyers et de charges des locataires non-eligibles au FSL. Dans le meme temps, Brest Metropole a mis en place un « fonds d'urgence logement » de 300 000 euros a destination des proprietaires, menages et locataires dont le niveau de revenus a baisse par suite du confinement. La Metropole de Rennes a quant a elle directement abonde le FSL a hauteur de 500 000 euros. Meme si ces acteurs reconnaissent qu'il existe encore des freins et des ecueils, ces initiatives meritent d'etre rapidement evaluees afin de pouvoir les deployer sur tout le territoire pour amortir de nouveaux impayes de loyers. Comme l'a souligne la Fondation Abbe Pierre32, les collectivites en charge du FSL vont devoir faire 32Fondation Abbe Pierre - Prevenir les impayes et les expulsions dans le contexte d'Etat d'urgence sanitaire ­ Septembre 2020 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 69/86 preuve de reactivite et de simplicite. L'urgence impose de savoir privilegier une decision rapide et effective plutot que de s'assurer de la presence obligatoire de tous les membres d'une commission. D'autres pratiques innovantes ont ete mise en place sur notre territoire, il serait ainsi pertinent de les repertorier et de les objectiver pour creer une boîte a outil en debut d'annee 2021. Afin de partager les retours d'experience sur ces dispositifs, il me semble opportun de mettre en place une conference dite « PEX » reunissant les collectivites competentes sur le FSL a l'initiative du Ministere de la Transition ecologique, charge du logement ou de la DIHAL. Recommandation 51. Mettre en place une conférence PEX début 2021 réunissant les collectivités territoriales pour partager les pratiques innovantes en matière de FSL. Recommandation 52. Prévoir les moyens d'agir en urgence pour soutenir les ménages fragiles impactés financièrement par la crise. Recommandation 53. Mettre en place début 2021 une cellule d'urgence dans chaque département destiné à coordonner les efforts de tous les acteurs de la politique de prévention des expulsions et à piloter un plan d'actions. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 70/86 Annexes Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 71/86 1 Lettre de mission du Premier ministre Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 72/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 73/86 2 Actes d'huissiers lors de la procédure d'expulsion33 Avec l'aimable autorisation du president de la chambre nationale des commissaires de justice Patrick Sannino et de Maurice Lotte, Huissier de justice 33 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 74/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 75/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 76/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 77/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 78/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 79/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 80/86 3 Liste des services et personnes auditionnées Administration Banque de France (Mark Béguery, responsable du pôle surendettement, et Véronique BensaidCohen, conseillère parlementaire auprès du Gouverneur.) Direction des libertés publiques et des affaires juridiques du Ministère de l'Intérieur (Pascale Léglise, adjointe au directeur des libertés publiques et des affaires juridiques, Laurent Hanoteaux, adjoint au chef du service du conseil juridique et du contentieux). Direction des affaires civiles et du sceau du Ministère de la justice (Catherine Raynouard, sous-directrice du droit civil, Françoise Catton, cheffe du bureau du droit processuel et du droit social, Elodie Guennec, adjointe à la cheffe du bureau). Délégation interministérielle à l'hébergement et au logement (Sylvain Mathieu, délégué interministériel). Pôle prévention des expulsions locatives de la DIHAL (Benoît Linot, responsable de pôle et Hugo Ruiz, chef de projet). Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (Laurent BRESSON, sous-directeur Politiques de l'habitat, Benoît AMEYE, adjoint au sous-directeur du Financement de l'économie, du Logement et de l'aménagement). Haut comité pour le logement des personnes défavorisées (René Dutrey, secrétaire général). Direction départementale de la cohésion sociale du Vaucluse (Christine Maison, directrice de la DDCS et Brigitte Plane, Responsable du pôle logement et hébergement). Agence nationale de l'information sur le logement (Roselyne Conan, directrice générale et Louis du Merle, responsable du Pôle juridique). Agence départementale de l'information sur le logement du Gard (Yves Maurel, directeur adjoint). Direction départementale de la sécurité publique de l'Hérault (Philippe Plégat, commandant divisionnaire). Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement Occitanie (Fabrice Clastre, chargé du développement du logement social). Caisse d'allocations familiales de l'Hérault (Thierry Mathieu, directeur, Mylaine Fontange (directrice des affaires sociales). Caisse nationale d'allocations familiales (Jean-Marc Bedon, responsable du pôle « Logement et vie sociale », Frédéric Marinacce, directeur des politiques familiales et sociales). Plan Bâtiment Durable et Adlis (Philippe Pelletier, directeur, avocat au barreau de paris). - - - - - - - - - - - - - Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 81/86 - Direction régionale et interdépartementale de l'hébergement et du logement d'Île-deFrance (Isabelle Rougier, directrice, Patrick Le Gall, directeur adjoint, Pascale Mossan, cheffe du service action logement et prévention des expulsions, Simon Vidal, adjoint à la cheffe de service, Christine Richard, chargée de la définition de la stratégie de prévention). Préfecture de Seine-Saint-Denis (Anne-Claire Mialot, préfète déléguée pour l'égalité des chances). Direction départementale de la cohésion sociale de la Côte d'Or (Nicolas Nibourel, directeur départemental délégué). Direction départementale de la cohésion sociale du Nord (Sylvie Labare, cheffe de la mission Accès au Logement, Delphine Wyart, cheffe du pôle prévention et expulsions). Direction départementale de la cohésion sociale du Vaucluse (Christine Maison, directrice, Brigitte Plane, cheffe du pôle accès et maintien dans le logement). Direction départementale de la cohésion sociale de l'Hérault (Pascale Mathey, directrice adjointe). Action Logement Services (Jean-Michel Royo, directeur général, Corinne Bedos-Toulgoat, directrice du développement et de l'offre, Marie-Noëlle Granjard, suivi du développement produit). - - - - - - Collectivités territoriales Lille Métropole Habitat (José ARNOUX, directeur adjoint de Lille Métropole Habitat) Montpellier Méditerranée Métropole (Michel CALVO, adjoint au maire de Montpellier) Métropole du Grand Lyon (Corinne AUBIN-VASSELIN, directrice générale adjointe et Magali ROBERT, cheffe du service Inclusion par le logement). Fédérations immobilières, agences at associations de propriétaires Fédération nationale de l'immobilier (Jean-Marc Torrollion, président, et Bénédicte Rouault, cheffe de cabinet). Chambre des propriétaires du Grand Paris (Jean PINSOLLE, président). Union nationale des propriétaires immobiliers (Pierre Hautus, président). Fédération SOLIHA Solidaires pour l'Habitat (Marie-Françoise Lavieville, vice-présidente, Kamel Senni, responsable du Pôle Logement d'Abord, Dorine Branget, chargée de mission gestion locative sociale). Erilia (William Hochedez, chef de service prévention sociale et contentieux locatif, Arold Ballesteros, responsable du pôle contentieux locatif sur Montpellier, Bruno Favre, directeur d'agence Montpellier). Foncia (Guillemette Roger, directrice du contentieux). - - - Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 82/86 - Gallian (Alain Ledemay, directeur général, Gérard Col, président du conseil d'administration). Union sociale de l'habitat (Thierry ASSELIN, Directeur des politiques urbaines et sociales, Dominique HOORENS, directeur des études économiques, Maryse SYLVESTRE, conseillère politiques sociales, Delphine BAUDET-COLLINET, adjointe à la responsable du pôle politiques clientèles et sociales). Union des syndicats de l'immobilier (Denis Géniteau, Vice-président, Emmanuel Benhamou, juriste immobilier, Géraud Delvolvé, délégué général). Cercle des propriétaires (Gilbert Spéry, Président). - - Associations de lutte contre la pauvreté et la précarité Fédération des associations et des acteurs pour la promotion et l'insertion par le logement (Sébastien Cuny, délégué général, Thierry Debrand, directeur de FREHA et Sylvain Camuzat, directeur de l'association AVDL de Villeurbanne). Fondation Abbé Pierre (Marie Rothhahn, chargée de mission action juridique et Manuel Domergue, directeur des études) et Fondation Abbé Pierre de Montpellier (Sylvie Chamvoux, directrice agence Occitanie). Association Droit au Logement (Jean-Baptiste Eyraud Porte-parole, Micheline Unger, responsable). Fédération santé habitat (Léonard Nzitunga, président, Laurent Thévenin, délégué national) Groupe de recherche pour l'aide et l'accès au logement (Olivier Desrousseaux, Président, Maïté Parent, chargée de mission). Action Tank Entreprise et Pauvreté (Jacques Berger, directeur, Julie Laurent, cheffe de projet Innovation sociale, Guillaume Ginebre, chef de projet). Confédération nationale du logement (Eddie Jacquemart, président) Fondation recherche sociale et Gestare (Didier Vanoni et Clémence Petit). Secours catholique (Fanny Plançon, chargée de projets, Romain Bordeyne, chargé de mission). - - - - - Magistrats, avocats et huissiers Syndicat national de la magistrature (Nils Monsarrat, secrétaire national, et Anne-Sophie Wallach, vice-présidente). Chambre nationale des commissaires de justice (Patrick Sannino, Président, Paul Schiepan, chef de cabinet du président, Maurice Lotte, huissier). - Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 83/86 4 Glossaire AAH : Allocation Adulte Handicape. AAP : Appel a Projet. ACT : Appartements de Coordination Therapeutique. ADIL : Agences departementales pour l'information sur le logement. AGBF : Mesure d'Aide a la Gestion du Budget Familial. AL : Allocation logement. ALF : Allocation logement a caractere familial. ALPIL : Action pour l'Insertion Par le Logement. ALS : Allocation logement a caractere social. ALT : Aide au logement temporaire. ALUR : loi du 24 mars 2014 pour l'Acces au Logement et un Urbanisme Renove. ANAH : Agence Nationale de l'Habitat. ANIL : Agence Nationale pour l'Information sur le Logement. APAGL : Association Pour l'Acces aux Garanties Locatives. APPEL : Action Permanente de Prevention des Expulsions Locatives. APL : Aide Personnalisee au Logement. ASLL : Accompagnement Social Lie au Logement. ASPA : Allocation de Solidarite aux Personnes Agees. AVDL : Accompagnement Vers et Dans le Logement. CAF : Caisse d'Allocations Familiales. CAL : Commission d'Attribution de Logement. CCAPEX : Commission de Coordination des Actions de Prevention des Expulsions Locatives. CCAS : Centre communal d'action sociale. CCH : Code la Construction et de l'Habitation. CDAPL : Commission Departementale d'Aide Publique au Logement. CDC : Commission Departementale de Conciliation. CDPEL : Charte Departementale de Prevention des Expulsions Locatives. CESF : Conseiller en Economie Sociale et Familiale. CFP : Concours de la Force Publique. CIDFF : Centre d'Information sur les Droits des Femmes et des Familles. CDP : Commandement de payer ; CIL : Comite Interprofessionnel du Logement. CLIC : Commission Locale d'Impayes de Loyer. CNAF : Caisse Nationale d'Allocations Familiales. CNAV : Caisse Nationale d'Assurance Vieillesse. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 84/86 CNIL : Commission Nationale de l'Informatique et des Libertes. CNIS : Conseil national de l'information Statistique. COMDALO : application de gestion du Droit Au Logement Opposable. CREDOC : Centre de Recherche pour l'Etude et l'Observation des Conditions de vie. CUS : Convention d'Utilite Sociale. DAL : Association Droit Au Logement. DALO: Droit Au Logement Opposable. DDASS : Direction Departementale des Affaires Sanitaires et Sociales. DDCS : Direction Departementale de la Cohesion Sociale. DGCS : Direction Departementale de la Cohesion Sociale. DIHAL : Delegation Interministerielle pour l'Hebergement et l'Acces au Logement. DREAL : Direction Regionale de l'Environnement, de l'Amenagement et du Logement. DREES : Direction de la recherche, des etudes, de l'evaluation et des statistiques. DRIHL : Direction Regionale et Interdepartementale de l'Hebergement et du Logement. ENL : loi du 13 juillet 2006 portant Engagement National pour le Logement. EPCI : Etablissement Public de Cooperation Intercommunal. EXPLOC : plateforme de traçabilite dans les procedures engagees. FAP : Fondation Abbe Pierre. FILOCOM : Fichier du Logement Communal. FNAVDL : Fonds National d'Accompagnement Vers et Dans le Logement. FSL : Fonds de Solidarite Logement. GIP : Groupement d'interet public. GLI : Garantie aux Loyers Impayes. GRL : Garantie des Risques Locatifs. HCLPD : Haut Comite pour le Logement des Personnes Defavorisees. HLM : Habitation a Loyer Modere. IGA : Inspection Generale de l'Administration. IGAS : Inspection Generale des Affaires Sociales. IGSJ : Inspection Generale de le Justice. INSEE : Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques. IRES : Institut de Recherches Economiques et Sociales. IRL : Indice de Reference des Loyers. MAJ : Mesure d'Accompagnement Judiciaire. MASP : Mesure d'Accompagnement Social Personnalise. MDS : Maison Departementale des Solidarites. MSA : Mutualite Sociale Agricole. MASP : Mesure d'Accompagnement Social Personnalisee. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 85/86 OFGPL : Observatoire des Finances et de la Gestion Publique Locales. ONPES : Observatoire National de la Pauvrete et de l'Exclusion Sociale. PCS : Protocole de Cohesion Sociale. PDALHPD : Plan Departemental pour le Logement et l'Hebergement des Personnes Defavorisees. PDALPD : Plan Departemental pour le Logement des Personnes Defavorisees. PEEC : Participation des Employeurs a l'Effort de Construction. PLH : Programme Local de l'Habitat. RGPD : Reglement General sur la Protection des Donnees. RSOI : Retour social sur investissement. SIAO : Service Integre de l'Accueil et de l'Orientation. SOeS : Service de l'Observation et des Statistiques. UDAF: Union Departementale des Associations Familiales. UDCCAS: Union Departementale des Centres Communaux d'Action Sociale. UNPI : Union Nationale de la Propriete Immobiliere. USH : Union Sociale pour l'Habitat. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 86/86 (ATTENTION: OPTION es solutions alternatives tout au long des procedures engagees. Le résultat de la politique de prévention peut être examiné à partir du séquencement des procedures, tel qu'il resulte des donnees consolidees disponibles pour l'annee 2018 (dans le logiciel EXPLOC et par deduction des donnees USH) : Pour les 4,5 millions de locataires du parc social : - 138.000 commandements de payer (CDP), soit 3,1% du parc social 68.000 assignations, soit 1,5% 35.000 decisions de justice, soit 0,8% 31.000 commandements de quitter les lieux (CQL), soit 0,7% 20.000 demandes de concours de la force publique (CFP), soit 0,4% 8.000 expulsions realisees avec le CFP, soit 0,2% Pour les 7 millions de locataires du parc privé : - 352.000 commandements de payer (CDP), soit 4,9% du parc privé 86.000 assignations, soit 1,2% 85.000 decisions de justice, soit 1,2% 37.200 commandements de quitter les lieux (CQL), soit 0,5% 29.200 demandes de concours de la force publique (CFP), soit 0,4% 8.000 expulsions realisees avec le CFP, soit 0,1% Abstraction faite du patrimoine des investisseurs institutionnels (plus tres nombreux dans le parc prive depuis trente ans) 15 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 36/86 Impact du sequencement des procedures pour les locataires : Source : mission a partir des donnees EXPLOC et USH au titre de 2018 Ce sequencement met en evidence les differences de gestion entre parc social et parc prive. Les bailleurs sociaux conduisent des démarches de prévention, de suivi et de relance très tôt, ce qui induit un moindre pourcentage de signification par CDP (3,1% du parc). A contrario, les bailleurs privés qui arrivent au CDP, sont plus nombreux en proportion (4,9%) mais ils obtiennent de vrais résultats à ce stade, puisque a la suite des CDP, ils n'engagent de procédures judiciaires que dans 1,2% des cas. Ce sont donc 266.000 locataires du parc privé qui sont a priori supposés avoir repris le paiement de leur loyer ou pu obtenir un plan d'apurement de leurs creances locatives, ou bien ont opte pour se reloger par ailleurs, mais qui ne sont pas « embarqués » vers une expulsion de leur logement (sauf si la situation se degrade a nouveau, mais il y a en quelque sorte un temps de repit). Les entrées en procédure judiciaire sont assez équivalentes en nombre et en pourcentage entre les deux types de gestion, mais les décisions de justice sont beaucoup plus systématiquement favorables (à 98,8%) aux recours exercés par les bailleurs du parc privé (85.000 decisions pour 86.000 assignations), alors qu'elles representent à peine plus de 50% des recours exercés par les bailleurs sociaux. Au final, le nombre d'expulsions réalisées avec le concours de la force publique est equivalent en nombre (8.000 locataires du parc social et autant du parc prive), mais pour près de deux fois plus de logements dans le parc privé, donc en plus forte proportion dans le parc social (0,2% contre 0,1%). Ces resultats meritent d'etre etudies a la loupe, au cas par cas, au plus près des situations locales, très diverses. Le cadre partenarial a renforcer au niveau des CCAPEX doit en etre l'occasion. Cela plaide aussi pour un renforcement de l'instruction. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 37/86 3.2 Améliorer l'instruction des affaires dans le cadre des procédures judiciaires Les tribunaux judiciaires connaissent aujourd'hui un engorgement, du fait notamment des recours pour impayes de loyers. Cette « sur-judiciarisation » induit également des délais très longs pour obtenir une audience. C'est variable selon les territoires, mais il faut compter de 2 à 10 mois d'attente. Le legislateur a retenu 4 etapes censees creer une prise de conscience du locataire avec des delais successifs pour reagir (4 x 2 mois), mais en réalité, la procédure s'étend en moyenne sur près de 18 mois (cf.2). Autant dire que toutes les etapes durent plus longtemps. Il est indispensable d'obtenir une meilleure maîtrise des delais de traitement de chaque etape de la procedure. Dans la meme volonte de transparence, le depute Mickael NOGAL 16 , a propose la creation d'un observatoire temporaire specialement dedie a ce sujet. Il y a effectivement un sujet récurrent à traiter, préjudiciable aux parties prenantes et par voie de conséquence au marché de l'offre locative. Recommandation 12. Confier à une mission spécifique à caractère interministériel un diagnostic des causes de la lenteur des délais des procédures conduisant à l'expulsion locative. Le délai minimal de 2 mois imparti entre l'assignation et l'audience, cense permettre d'etablir et de fournir au juge un diagnostic eclairant sur la situation du locataire endette, est une période que l'on pourrait considérer comme « morte », dans la mesure où ce diagnostic social et financier est insuffisamment établi, ce qui aggrave de nombreuses situations. Une réflexion concertée avec les collectivités semble nécessaire sur les moyens dedies a la realisation du diagnostic social et financier. A ce jour, ce diagnostic est confie aux travailleurs sociaux des conseils departementaux en grande majorite. Or les auditions ont mis en avant de nombreux ecueils : ils sont realises trop tard dans la procedure (assignation) ; ils ne sont pas systematiquement realises (plus des deux tiers ne seraient pas remis aux juges) ; certains travailleurs sociaux n'ont pas les competences requises pour effectuer ce type de diagnostics ; par manque de temps et souvent parce que la pratique du « Aller vers » a tres fortement diminue depuis de nombreuses annees, les propositions de rendez-vous sont rarement honorees par les locataires (des raisons de pudeur, de repli sur soi ne sont pas absentes a priori). Or le juge s'appuie sur le diagnostic social et financier pour prendre sa décision. Je retiens l'accord de nombreux acteurs sur la necessite d'ameliorer le dispositif en faisant du CDP le moment declencheur du diagnostic. Il est evident qu'une telle modification dans le processus d'instruction imposerait de disposer de moyens humains beaucoup plus importants puisque le nombre de CDP est pres de 3 fois superieur au nombre d'assignations. Il serait opportun de formaliser des propositions en concertation avec les collectivites territoriales, par 16 Cf. Rapport NOGAL : « Louer en confiance » 2019 PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 38/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN le biais de nouvelles experimentations, dans le cadre legislatif actuel. Certaines bonnes pratiques, comme la MOUS confiee a l'ADIL du Vaucluse meriteraient d'etre dupliquees (cf. § 2.4). Recommandation 13. Lancer un appel à manifestation d'intérêt auprès des départements et des métropoles pour expérimenter de nouvelles organisations visant à généraliser les diagnostics sociaux et financiers destinés aux juges et à les produire le plus en amont possible - dès le CDP - à l'intention des CCAPEX. Il s'ajoute a cette sous-instruction patente, une forte absence des locataires assignés aux audiences, rendant alors le contradictoire quasi inopérant. Cette présence est très variable selon les départements, les determinants de la presence des locataires a l'audience sont multiples, on note que le locataire - comme l'a souligne Camille François17 - est bien plus present a l'audience lorsqu'il est accompagne par un travailleur social ou s'il est loge dans le parc social. *Source : mission a partir des donnees EXPLOC au titre de 2018 sur les departements metropolitains enregistrant plus de 500 procedures judiciaires d'expulsions locatives ­ pourcentage sur la base du nombre d'assignations Ce constat devrait également retenir l'attention des collectivités disposant de travailleurs sociaux et des CCAPEX pour établir des actions d'accompagnement renforcées, en lien avec les SIAO. 3.3 Mieux utiliser le commandement de payer (CDP) en prévention et permettre une phase de négociation à confier à l'huissier Le commandement de payer est effectivement une étape décisive pour la politique de prevention des expulsions. Près de 500.000 CDP sont délivrés par an en moyenne en France, dont les deuxtiers dans le parc privé. La delivrance s'effectue par les huissiers a domicile et constitue le premier acte de la procedure. Les huissiers connaissent parfaitement les territoires et malgré encore quelques freins pour accéder aux parties communes des immeubles, ils accedent dans la plupart des cas au logement du locataire. Ce frein devrait etre leve. 17 Cf. These Camille François deja citee PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 39/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN Recommandation 14. Permettre l'accès des huissiers aux parties communes des immeubles afin qu'ils puissent entrer en contact direct avec les personnes menacées d'expulsion ou, à défaut, déposer leurs actes et informations relatifs à la procédure et aux dispositifs de prévention dans les boîtes aux lettres. Ce moment crucial est le plus souvent le point de rupture de confiance entre locataire et proprietaire, alors que cette etape devrait permettre des solutions. La connaissance renforcee de chaque situation individuelle des le CDP permettrait d'orienter le plus souvent possible vers une solution durable autre que judiciaire. Il apparaît donc essentiel que le rôle de l'huissier soit élargi car ce premier contact présentiel est déterminant pour la suite de la procédure. Des mesures doivent etre prises, en urgence, tant pour la période actuelle que pour le long terme. L'huissier de justice pourrait se voir confier un rôle de négociateur avec l'accord du bailleur. La periode entre le CDP et l'assignation pourrait etre mise a profit pour engager une phase de dialogue et de negociation amiable. Ce temps de negociation amiable pourrait beneficier d'une periode supplementaire d'un mois, a comptabiliser avant l'assignation (soit 2 + 1 mois). Des lors, deux hypotheses : un accord est trouve durant la periode de 3 mois : alors l'huissier demande au juge une audience en refere et s'assure que la date d'audience proposee est bien posterieure a la periode ouverte par le commandement de payer afin que le juge puisse constater l'acquisition de la clause resolutoire ; aucun accord n'est trouve durant la periode de 3 mois : alors l'huissier signifie l'assignation et la periode anterieurement incompressible entre l'assignation et l'audience est alors reduite a 1 mois au lieu de 2. - Cette evolution semble recueillir un assentiment de tous les acteurs, tant il est notoire que les 2 mois qui suivent l'assignation en vue de l'audience peuvent etre consideres comme une periode « morte », cause d'une accentuation de la dette. Cela suppose que le diagnostic social et financier ait bien ete effectue en amont. Recommandation 15. Instaurer par voie législative une phase de négociation qui pourrait être conduite par les huissiers de justice sur mandat des bailleurs avant l'assignation. Augmenter d'un mois le délai qui précède l'assignation pour ce faire et réduire d'autant le délai légal qui suit l'assignation avant l'audience en cas d'échec. 3.4 Abaisser ou supprimer les seuils de signalement des CDP aux CCAPEX Il conviendrait en outre de s'assurer que les CDP soient transmis le plus tot possible aux CCAPEX. Or, ces actes delivres par les huissiers de justice sont transmis aux CCAPEX selon des criteres de seuil fixes par arretes departementaux en application du decret n°2015-1384 du 30 octobre 2015. Le seuil peut etre fixe a partir de 3 mois d'impayes de loyers sans interruption ou un cumul de dette equivalent a au moins 3 mois de loyer et charge, et peut atteindre 6 mois, a l'appreciation des prefets de departements. Ce seuil minimal actuel est encore trop important, car une grande majorite des CDP ne sont pas Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 40/86 remontes aux CCAPEX ni a la base de donnees EXPLOC. Si notre objectif, est d'agir le plus en amont possible, il est clairement contradictoire de ne pas se saisir de tous les CDP. Recommandation 16. Supprimer le seuil fixé par décret pour le signalement des CDP à la CCAPEX par les huissiers de justice, afin de pouvoir agir sur le traitement précoce de tous les impayés. 3.5 Rendre plus lisibles les actes de la procédure pour diminuer le taux de non-réponse Au regard des differents actes de la procédure que nous avons pu obtenir, force est de constater qu'ils sont très nombreux et très complexes. Les CDP, les assignations et les CQL (cf. voir annexes) sont des formulaires fastidieux qui ont tendance a effrayer et decourager les locataires vises par ces actes. Meme constat pour les courriers transmis par les differents acteurs (Prefecture, CAF). Or ces actes et ces courriers sont essentiels pour que le locataire se sente implique dans la procedure et puisse se tourner le plus rapidement possible vers un tiers et active les aides auxquels il a droit. Recommandation 17. Simplifier le contenu et l'accès aux informations transmises aux locataires dans le cadre de la procédure d'expulsion en utilisant la méthodologie "Facile à lire et à comprendre" (FALC) promue au niveau gouvernemental (Sms locataires aux différents stades de la procédure : actes d'huissiers, courriers transmis par les préfectures). 3.6 Lutter contre le non-recours au droit, une des plus grandes défaillances de notre société De tres nombreux cas illustrent que de nombreux citoyens basculent dans la precarite alors que des aides existent et les concernent : Un proprietaire qui se retrouve en grande difficulte financiere parce qu'il n'a pas connaissance des dispositifs d'indemnisations. Un locataire, qui lors d'une audience decouvre qu'il pouvait pretendre a l'aide d'action logement ou a une aide FSL maintien. Or, autour des nombreux acteurs et des nombreuses étapes, il manque un fil conducteur, une porte d'entrée. A travers les nombreuses auditions, il apparaît clairement que les competences necessaires au deroulement de cette longue procedure sont juridiques. Ainsi, il conviendrait de confier aux ADIL plus de responsabilités. Elles pourraient dans un premier temps jouer le role de controle du decompte presente aux locataires lors du CDP (plus de 2/3 seraient errones) ; puis celui de l'informateur des aides et soutiens existants a ce meme stade. Nous avons constate que la clarte et la diffusion des aides a la procedure d'expulsion etaient deficientes. Et pourtant, elles sont nombreuses et efficaces quand elles sont employees au bon moment. L'ADIL pourrait donc avoir un role preponderant dans la diffusion de ces informations et pour ce faire Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 41/86 il est imperatif qu'elle s'appuie sur ses antennes departementales car de nombreuses aides sont territorialisees. En agissant ainsi plus en amont, les locataires et proprietaires jusqu'a present depourvus d'informations pourraient apprehender dans de meilleures conditions les moyens a leur disposition. Recommandation 18. Confier à l'huissier, lors de la délivrance du CDP, le soin de remettre au locataire une notice détaillant toutes les aides et accompagnements appropriés. Solliciter l'ANIL pour l'élaboration de cette notice en lien avec les ADIL afin d'adapter les aides et les contacts à chaque département. Cette notice devrait inviter le locataire à prendre contact avec une agence de proximité de l'ADIL avec pour première consigne de vérifier le décompte qui lui a été remis. 3.7 Prendre des dispositions pour éviter le refus, par certains propriétaires, du versement du FSL destiné au maintien du locataire dans le logement De nombreux acteurs dont l'association DAL, la FAP, ont evoque le refus de certains bailleurs d'accepter le FSL, pour ne pas ralentir la procedure d'expulsion. Ces cas sont rares mais meriteraient d'etre etudies afin que le droit soit respecte et que les pratiques abusives soient denoncees. Depuis la loi ALUR de 2014, les bailleurs n'ont plus le droit de refuser le FSL. Cependant, il est encore constate que certains trouvent le moyen de contourner cette obligation, en ne fournissant pas leurs coordonnees bancaires pour en eviter le versement. Recommandation 19. Faire évoluer la loi pour rendre effectif l'octroi du FSL au bailleur. 3.8 Mobiliser plus souvent les mesures existantes d'accompagnement social personnalisé (MASP) Les MASP ont ete creees par la loi du 5 mars 2007 notamment aux fins de prevention des expulsions locatives. Definies aux articles L. 271-1 et suivants du Code de l'action sociale et des familles, ces mesures administratives sont mises en oeuvre par les services sociaux des departements a destination de personnes majeures en difficulte, notamment dans la gestion de leurs ressources et de leurs allocations, notamment lorsqu'il y a un risque pour leur securite ou leur sante. Les deux premiers niveaux de MASP 1 et 2 (accompagnement social et budgetaire et gestion des prestations sociales) sont contractuels avec un engagement reciproque, tandis que le versement direct des prestations sociales au bailleur sous conditions (le MASP 3) est contraignant. Cette derniere possibilite peut etre dans certaines situations une securite essentielle pour maintenir le menage dans son logement et une assurance pour le bailleur. Or, cette possibilite est rarement demandee par le conseil departemental malgre les preconisations des CCAPEX alors qu'il s'agit d'une veritable solution pour perenniser certaines situations ou contraindre les locataires qui disposent des ressources financieres suffisantes pour le paiement notamment du residuel du loyer. Afin de rendre ces demandes d'accompagnement effectives, les CCAPEX pourrait saisir le prefet pour qu'il effectue cette demande. Recommandation 20. Permettre aux CCAPEX de saisir le préfet pour une demande de MASP 3. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 42/86 3.9 Intégrer la prévention des troubles pathologiques du comportement, notamment psychiques Le facteur santé n'était que trop rarement pris en compte dans la procédure d'expulsion locative, alors que les pathologies lourdes dont peuvent etre atteints certains locataires ont des consequences en matiere de repli sur soi, d'isolement et de desengagement vis-a-vis des obligations administratives. Les gestionnaires d'appartements de coordination therapeutique (ACT) constatent regulierement les difficultes des bailleurs, syndics et coproprietaires a gerer les relations avec ce type de public en difficulte de sante. De fait, l'administration et les bailleurs disposent de peu de moyens de detection de ce type de locataires, et le reperage des difficultes potentielles provoquees par la maladie A ce titre, l'instruction du 27 avril 2017 relative a la campagne budgetaire pour l'annee 2017 des etablissements et services medico-sociaux accueillant des personnes confrontees a des difficultes specifiques a mis en place une experimentation dans 5 regions pour que les ACT puissent intervenir directement au domicile des personnes sans attendre leur mise a la rue. Recommandation 21. Transmettre aux ADIL la cartographie des ressources territoriales en matière de santé mentale et leurs acteurs (Santé Mentale France). 3.10 Renforcer les liens entre les magistrats et les autres acteurs Il y a une inégalité face à la procédure, faute d'une doctrine suffisamment partagée quant à la manière de sortir des situations d'impayés de loyers. Les magistrats manquent trop souvent d'informations pour accomplir leur role dans de bonnes conditions. Les partenaires relevent cependant de fortes disparités dans les décisions de justice, ce qui donne des resultats contrastes suivant les departements et presente un risque d'inegalite de traitement. Ainsi, certains departements connaissent des decisions d'expulsion ferme dans moins de la moitie des cas, alors que d'autres les constatent sur plus de huit decisions sur dix. De telles differences apparaissent egalement entre departements pourtant limitrophes et similaires aux plans sociologique, demographique et economique. *Source : mission a partir des donnees EXPLOC au titre de 2018 sur les departements metropolitains enregistrant plus de 500 procedures judiciaires d'expulsions locatives ­ pourcentage sur la base du nombre d'assignations Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 43/86 Par ailleurs, les magistrats expliquent les raisons pour lesquelles l'apurement des dettes est souvent privilégié par rapport a la resiliation du bail et le « delogement » qui l'accompagne. Sont evoques notamment l'attachement d'une personne a son logement et les reperes sociaux indispensables a son retablissement. Mais parallelement, la mise en place de plans d'apurement s'avère ne pas être toujours concluante sur le court et moyen terme, ce qui remet alors en cause le choix effectue, et entraîne de facto un allongement de situations inconfortables pour les proprietaires comme pour les locataires. C'est pourquoi il semble d'autant plus imperatif de disposer tres tot de suffisamment d'elements sociaux et financiers de diagnostic, pour eviter d'etre trop indifferemment conduit a la procedure judiciaire et trop indifferemment oriente vers l'apurement versus l'expulsion et le relogement. Les partenariats avec le monde de la justice pourraient être renforcés, dans la logique de mobiliser des outils (partage d'informations entre CCAPEX et magistrats) ou d'animer et de renforcer le reseau local des conciliateurs de justice ainsi que le role des huissiers comme je le propose. Un travail de sensibilisation aupres des juges et des greffiers serait utile pour permettre une meilleure comprehension des logiques de chacun et tendre a une harmonisation doctrinale. Et puis la prise en compte de l'offre de logements susceptible d'être mobilisée à court terme pourrait etre decisive dans le cadre de l'instruction judiciaire (cf. § 4). Recommandation 22. Renforcer les liens informels entre les magistrats, les services préfectoraux, ceux de l'aide sociale des collectivités et les bailleurs, en lien avec les CCAPEX. 3.11 Poursuivre le dialogue sur la « mauvaise foi » Les auditions ont permis de constater une forte occurrence d'un debat autour des notions de « bonne » ou de « mauvaise foi » des locataires. De façon generale, elles ont pointe le fait que la grande majorite de ces derniers presentaient la volonte de payer le loyer. La loi n'en donnant pas de definition etayee, cette notion est laissee a l'appreciation subjective de chacun (locataire, bailleur), elle releve principalement de l'appreciation et de la responsabilite du juge. Si l'article 2274 du Code civil dispose que la bonne foi se presume et que la mauvaise foi se demontre, seul le juge du fond est habilité à les établir. En complement de ces principes, la Cour de cassation a precise le cadre de l'appreciation du juge dans sa jurisprudence, notamment dans les situations de surendettement : d'une part, la bonne foi du debiteur est toujours presumee. D'autre part, les consequences de l'etablissement de la mauvaise foi sont personnelles, ce qui signifie que les effets juridiques ne peuvent etre etendus au conjoint ou au concubin. De la meme maniere, la mauvaise foi n'est pas une notion figee : si le debiteur produit des elements nouveaux de nature a necessiter un reexamen de sa situation apres avoir ete considere comme etant de mauvaise foi dans un premier temps, le juge peut reviser sa position et en faire un debiteur de bonne foi. Enfin, la causalite entre la mauvaise foi et la situation du debiteur doit egalement etre directe : les fautes qui n'ont qu'un lien indirect avec les difficultes et le passif du debiteur (par exemple une faute professionnelle ayant conduit a un licenciement) ne peuvent etre considerees comme de nature a etablir sa mauvaise foi. La mission a releve dans le guide annexe a la circulaire du 22 mars 2017 relative a la mise en oeuvre du plan interministeriel de prevention des expulsions locatives, que l'administration avait tente d'etablir une approche de la notion de « mauvaise foi ». Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 44/86 Il pourrait etre utile de prolonger cette reflexion avec l'ensemble des representants des parties prenantes dans le cadre specifique de la procedure d'expulsion locative. Recommandation 23. Etablir une concertation au niveau national sur les déterminants de la « mauvaise foi » en matière d'impayés locatifs de façon à permettre aux dispositifs administratifs (FSL, CCAPEX, CAF) de mieux objectiver leurs avis, à l'instar de la commission de surendettement de la Banque de France. 3.12 Mieux réguler l'octroi du concours de la force publique (CFP), étape ultime avant l'expulsion Un premier constat s'impose sur le pourcentage contraste d'octroi du CFP entre departements (cf. schéma ci-dessous). La question de cet arbitrage, qui releve indeniablement de la responsabilite du prefet, depend de facteurs qui ne sont pas seulement du ressort de l'ordre public. *Source : mission a partir des donnees EXPLOC au titre de 2018 sur les departements metropolitains enregistrant plus de 500 procedures juridiques d'expulsions locatives ­ pourcentage sur la base du nombre d'assignations Bien qu'il ne puisse etre nie l'interet de disposer du CFP pour permettre l'execution des decisions judicaires, y compris des expulsions, tout a fait legitimes, il semble que les moyens dont disposent les commissariats a cette ultime etape ne soient pas en concordance avec l'importance de l'enjeu. En effet l'enquete sociale, familiale et financiere qui devrait etre effectuee par les commissariats a ce stade, n'est pas realisee de maniere uniforme sur le territoire, par manque de moyens, selon toute vraisemblance. Car, meme a l'extremite de cette procedure, a la veille de l'expulsion, les commissariats n'ont pas suffisamment d'informations (composition du menage, age des locataires). C'est ce qui ressort de nombreux temoignages de policiers. Or, les moyens rassembles par la chaîne des acteurs sociaux du departement y compris les bailleurs sociaux aupres des services prefectoraux devraient permettre a la fois de communiquer les informations disponibles, et de disposer egalement des alternatives a l'expulsion a cette ultime etape : relogement ou hebergement, notamment. A cet egard, le diagnostic social et financier, s'il etait etabli systematiquement et au plus tot, permettrait de transmettre aux services de police par l'intermediaire des services prefectoraux, les donnees essentielles a leur intervention. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 45/86 Recommandation 24. Autoriser la transmission aux commissariats, par l'intermédiaire des services préfectoraux, des données sociales et familiales présentes dans les diagnostics sociaux et financiers effectués en amont des procédures à destination des juges. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 46/86 4 Mobiliser l'offre disponible de logement au plus tôt L'inflexion a donner au processus consiste a envisager au plus tot une solution alternative au plan d'apurement des dettes d'un locataire, si celle-ci est vouee a l'echec, et cela au plus tard lorsque la composante operationnelle de la CCAPEX en etudie la situation. 4.1 Identifier l'offre de logements mobilisable à court et moyen termes C'est la raison pour laquelle il faut être en mesure d'identifier et de mobiliser une offre de logements locatifs a loyers tres moderes des ce stade. D'ou l'importance d'un protocole que l'Etat et les collectivites territoriales devraient signer avec les bailleurs sociaux dans chaque territoire. L'offre est cependant problématique, selon la tension de la demande et les capacités offertes par le flux induit par la rotation dans le parc social. S'y ajoute la dimension du niveau des loyers. Pourtant, quelles que soient les difficultes en la matiere, cette offre est toujours mobilisée à la fin du processus d'expulsion, lorsque la remise a la rue n'est pas admise par le prefet. Il y a donc une opportunité à saisir, que la crise sanitaire rend évidente : si l'expulsion peut etre la seule solution par rapport a une situation donnee, dans le respect des procedures, celle-ci n'est acceptable qu'à la condition d'avoir identifié au préalable une solution concrète de relogement ou d'hébergement adapté. Cette cause me paraît devoir être étendue au-delà du contexte de la crise sanitaire, et notamment dès la sortie de la trêve hivernale, au printemps 2021. Tout doit etre fait dans cette logique. Dans le cadre strategique defini par le plan gouvernemental du « Logement d'abord », l'hébergement constitue une alternative résiduelle, qui doit etre reservee aux personnes les plus en difficultes mentales, psychiques ou physiques avec l'accompagnement social indispensable a leur reinsertion. Le parc social présente l'avantage de permettre d'user des modalités de réservation ouvertes avec l'Etat, les collectivités locales et Action Logement. En consequence, l'obligation de relogement que la collectivite s'impose a elle-meme doit donner lieu a une mobilisation renforcée des acteurs pour identifier l'offre de logement et la tenir à disposition en gérant le stock au plus près des besoins et sans alourdir inutilement la charge collective. Cette politique repose sur une chaîne de décisions à prendre de manière concertée entre l'Etat, les collectivités et les organismes du logement social : dès la détermination des besoins en logements a loyers tres moderes (de type PLA insertion) dans le cadre des programmes locaux de l'habitat (PLH) ; dans la programmation annuelle de la production d'une offre de logements a loyers dits « abordables », dont les niveaux doivent etre precises suivant les secteurs (cf. carte geographique mise en ligne par le ministere du logement en ce debut decembre) ; dans les conventions d'utilité sociale des bailleurs (CUS) ; dans des protocoles à mettre en oeuvre avec les différents réservataires (collectivités territoriales, Action Logement) pour pouvoir disposer d'une capacite d'attribution sans delais ; dans des protocoles à mettre en place pour faciliter la mutualisation de l'offre des differents bailleurs sociaux, ainsi que le proposait deja l'instruction interministerielle de mars 2017 adressee aux prefets : « Vous encouragerez particulièrement la collaboration interRapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 47/86 bailleurs et inter-réservataires au niveau local afin de permettre les relogements ou les échanges de logements mais aussi les mutations provoquées des locataires dont la dépense de logement est inadaptée à leurs ressources. Il vous revient à cette fin de mettre en place un dispositif de coordination entre les bailleurs sociaux au sein de la Charte de prévention et d'en assurer l'animation en y associant l'ensemble des partenaires susceptibles de participer à la réalisation de cet objectif. » dans des formes d'intermédiation locative, que les bailleurs sociaux envisagent euxmêmes de développer avec le concours d'associations specialisees dans l'accompagnement et la reinsertion sociale, et qui leur permettrait d'offrir des logements a loyers plus bas que ceux aujourd'hui pratiques au regard de leur financement d'origine. Recommandation 25. Mobiliser l'offre de logement des bailleurs sociaux dès que l'évaluation sociale et financière établie par les travailleurs sociaux au stade du commandement de payer permet de conclure au besoin d'un relogement adapté aux revenus des locataires en difficulté. Recommandation 26. Faciliter la signature d'accords de mutualisation de l'offre entre bailleurs sociaux d'une part et avec les réservataires de logements du parc social d'autre part pour disposer d'un volant d'offre immédiatement employable. Recommandation 27. Réaliser une étude sur l'intermédiation locative dans le parc social pour adapter l'offre disponible aux niveaux de loyers requis dans le cadre des besoins de relogement des locataires menacés d'expulsion. Il faut noter que les locataires du parc privé sont également concernés par cette mobilisation du parc social, des lors que la procedure judiciaire engagee ne permet plus l'apurement des dettes contractees, et que les locataires ne trouvent pas par eux-memes une solution de relogement dans le parc prive. 4.2 Mobiliser la part disponible des logements vacants du parc social Sur les 200.000 logements vacants du parc social, la part des logements vides proposés à la location depuis plus de trois ans a été évaluée à environ 33 000 logements18. Sont exclus de ce compte les logements voues a la demolition ou a des structurations lourdes (plus de 75.000). Cette offre disponible présente cependant deux inconvénients qu'il faut intégrer : la qualité ou l'aspect qualitatif, l'aspect environnemental, peuvent etre moindres par rapport aux autres biens proposes sur le marche, localement, mais en cas d'alternative a l'expulsion, cela reste une veritable opportunite ; la répartition géographique, directement liee a l'attractivite des territoires, au sens de l'emploi et du cadre de vie, peut ne pas correspondre exactement aux localites ou resident les locataires concernes par un besoin de relogement plus en phase avec leurs ressources et leur emploi. Ces deux obstacles ne sont pas intangibles et meritent d'etre pris en compte dans la perspective des relogements a proposer. 18 Cf. rapport IGF/CGEDD de janvier 2015 sur la mobilisation des logements et des bureaux vacants PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 48/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN Recommandation 28. Mobiliser les plus de 30.000 logements sociaux vides et vacants depuis plusieurs années, ne serait-ce qu'à titre transitoire. 4.3 Restructurer le parc social pour adapter l'offre aux besoins Les 2/3 des logements des bailleurs sociaux sont très faiblement occupés : 1,8 million de logements sont occupes par une personne seule et 1,2 million de logements sont occupes par deux personnes, ce qui totalise 3 millions de logements sur les 4,7 millions de logements du parc social. La typologie du parc est quant à elle constituée aux 3/4, pour des raisons historiques, de moyens et grands logements (3,5 millions de 3 pieces a 5 pieces). Il s'ensuit une sous-occupation manifeste du parc de logements sociaux. Ce constat n'est pas propre au parc social puisque cela correspond a un phenomene generalise, en partie du au vieillissement de la population et a l'evolution de la typologie des familles. On releve au plan national 65% de menages ne comptant pas plus de deux personnes, dont la moitie (33%) sont constitues d'une personne seule19. Or, parallèlement, on constate une forte demande de personnes seules, jeunes et plus ages, qui peut atteindre 1/3 de la demande recensée dans certaines localites. Tout ceci tend a demontrer l'opportunite de solliciter les organismes de logements sociaux pour concevoir de nouveaux modèles d'occupation des logements et une part de restructuration de l'offre en correspondance avec les besoins. Dans ce cadre, il est evident que les besoins issus de la prévention des expulsions locatives doivent etre integres. Recommandation 29. Concevoir de nouvelles formes de baux pour faciliter la cohabitation par la colocation dans le parc social. Recommandation 30. Etudier la restructuration de grands logements d'une partie du parc social en fonction des besoins recensés dans chaque territoire, en intégrant les besoins relevés par les CCAPEX. Pour clore, provisoirement, ce chapitre dont l'importance justifierait une mission d'interet national, je releverais que l'offre de logement social pourrait être plus fluide si l'on admettait à la fois : de reconsidérer les plafonds de ressources pour accéder au logement social afin de reserver davantage cette offre aux personnes les plus vulnerables, et de renforcer les obligations de quitter un logement social lorsque les revenus excedent exagerement les plafonds de ressources en vigueur. Selon les statistiques du Commissariat general au developpement durable (CGDD) du ministere de la transition ecologique a partir des fichiers Filocom de la DGFIP et la base RPLS (septembre 2014) 19 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 49/86 5 Optimiser les moyens financiers de nos politiques de prévention 5.1 Eviter le dérapage des dettes et des charges collectives liées à l'enchaînement des délais de procédures Plus le temps des procedures s'allonge et plus les impayés et les frais de procédures en recouvrement s'accumulent pour les propriétaires. Plus le temps des arbitrages et des temps morts entre ces arbitrages s'etire, et plus les charges collectives s'amoncellent. La mobilisation d'effectifs des services publics avec leurs équipes de travailleurs sociaux (CCAS, DIAS, métropoles, départements et CAF) est un des principaux postes de depenses. L'optimisation de l'instruction, des le CDP, doit permettre de reduire le temps de prise en charge, et donc les couts supportes par la collectivite tout le temps que durent les etapes successives des procedures, et naturellement par les bailleurs. De même, la disponibilité de l'offre de relogement, si elle est identifiee au plus tot, des qu'il apparaît qu'un apurement de la dette ne pourra pas sauver la situation du locataire durablement lors de l'examen en sous-commission des CCAPEX, permettrait d'eviter un temps long de procedures et les charges collectives que cela entraîne du cote des services publics (collectivites territoriales, Etat, partenaires associes, BdF, CAF...) et du cote des proprietaires. Recommandation 31. Miser sur le renforcement de l'instruction dès le CDP et l'identification d'une proposition de relogement en sous-commission des CCAPEX pour décharger la collectivité des coûts induits par l'enchaînement des procédures et éviter dans le même temps aux propriétaires l'immobilisation de leurs biens et l'accroissement de leurs pertes financières. Il en est de même de la logique d'intervention des FSL. Plus c'est tot, plus cela permet de recuperer une defaillance passagere. Les mesures d'aides ponctuelles prises par Action Logement dans le cadre des consequences financieres de la crise sanitaire pour venir en aide aux salaries, et qui s'ajoutent aux aides ponctuelles deja existantes, sont absolument en phase avec l'intérêt d'une intervention dès l'origine d'un desequilibre budgetaire familial. 5.2 Connaître les coûts des procédures pour les réduire Combien coûte à la puissance publique une procédure d'expulsion ? A combien en moyenne s'elevent les dettes et frais pour le proprietaire ? Et pour tous les acteurs impliques dans le processus ? De nombreuses approches ont ete esquissees pour obtenir ces donnees qui permettraient d'observer la realite des couts collectifs et favoriseraient l'optimisation de nos politiques de prevention des expulsions. Ces premières études doivent nous interpeller sur tous les coûts qui peuvent être évités de la procédure. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 50/86 Recommandation 32. Confier à l'IGF et l'IGAS une étude des charges induites par les différentes phases des procédures visant la prévention des expulsions locatives. 5.3 Miser sur le « retour sur investissement social » Y aurait-il encore des freins a rendre plus transparentes nos politiques en faveur des plus fragiles, je ne le pense plus. Parce qu'il s'agit d'argent public et parce qu'il y va de notre capacite a etre plus efficaces. Les etudes realisees depuis des annees demontrent que la prevention des expulsions doit s'effectuer le plus en amont possible. Malgré la difficulté d'une étude exhaustive sur les coûts évités, il a été démontré en France et en Europe qu'un euro dépensé en prévention pourrait faire économiser jusqu'à huit euros aux pouvoirs publics. Des etudes en France (GRAAL et GESTARE) et a l'etranger 20 lors des actions menees en amont de la procedure ont demontre que le retour sur investissement social pouvait etre tres important. Ainsi 1000 euros investis en amont pourraient faire économiser à la puissance publique 8000 euros. Sur le nombre total de procedures d'expulsions en France, il serait hasardeux de pretendre qu'une action globale permettrait de mettre fin a la totalite des procedures. Mais nous pouvons raisonnablement avancer que plus d'un tiers pourraient etre evite a long terme. A l'instar de la stratégie du logement d'abord, investir en amont permet d'éviter de nombreux coûts par la suite. Nos futures politiques devront s'appuyer sur cette doctrine et valoriser toutes les initiatives qui s'inspirent de cette approche budgetaire. L'expérimentation à Montpellier conduite par des bailleurs sociaux avec GESTARE et le prestataire FORS tend effectivement a demontrer l'interet d'un « retour social sur investissement (RSOI) ». Le retour sur investissement est social pour les locataires mieux accompagnés des les premiers signes de difficultes, en relation avec les bailleurs sociaux engages dans ce partenariat. Et le retour sur investissement est également économique, puisqu'il permet d'eviter un derapage financier des situations rencontrees. C'est donc un gain considérable pour les bailleurs. J'ajoute que le retour sur investissement social concerne tout autant la puissance publique. Le groupe Erilia, bailleur social, a reduit de pres d'un tiers le nombre d'expulsions en renforçant le travail de ses conseillers en economie sociale et familiale (CESF) pour un maintien dans le logement. Ces pratiques devront donc etre encouragees et eclairer nos futures politiques de prevention. Elles pourraient etre portees par la DIHAL comme actuellement mais aussi par les DREAL avec les missions en « aller vers et dans le logement » (AVDL). Il conviendrait donc de lancer rapidement des Appels a manifestation d'interet pour mobiliser des acteurs associatifs. 20 Fondation Abbe Pierre ­ 2eme regard sur le mal-logement en Europe - 2017 PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 51/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN Recommandation 33. Valoriser par appel à manifestation d'intérêt à lancer auprès des métropoles et des départements en tant que porteurs de projets, des expérimentations de mobilisation du secteur associatif en lien avec des bailleurs sociaux pour mettre en valeur le retour sur investissement social. 5.4 Evaluer le régime de l'APL à l'aune des non-bénéficiaires Je ne reviendrai pas ici sur le régime des aides personnelles au logement (APL), veritable sujet d'importance, qui est un secours véritable pour les locataires du parc social et pour ceux du parc privé conventionné (ANAH). Mais le sort d'une partie des 50% de locataires qui ne sont pas allocataires est préoccupant. L'APL est non seulement un complément budgétaire, mais elle offre l'assistance des conseillers sociaux de la CAF, donc l'ouverture de voies de solutions. Recommandation 34. Evaluer l'impact de l'absence d'accompagnement par les CAF/MSA en cas d'impayés pour les ménages qui ne bénéficient pas des APL. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 52/86 6 Anticiper les effets économiques de la crise sanitaire pour les locataires et les propriétaires 6.1 La crise sanitaire a mis au ralenti de nombreux dispositifs et de nombreux acteurs Dans la plupart des departements, le confinement et dans une moindre mesure les mouvements sociaux ont fortement ralenti les procedures judiciaires. De nombreux dossiers se sont accumules, augmentant de facto le montant des dettes de certains menages. Le travail social s'est lui aussi affaibli, perturbant tres fortement l'accompagnement social des locataires. Ce sont aussi toutes les commissions (CCAPEX, DALO, FSL, surendettement) qui ont fonctionne de maniere tres chaotique. Ainsi de nombreuses situations ont empire et vont demander une attention toute particuliere afin de prendre en compte les consequences concretes de la crise sanitaire. Il s'agira pour tous les acteurs de prendre en compte ces elements. Il est par exemple souhaitable que les criteres de seuil des FSL soient modifies en consequence. 6.2 Evaluer et suivre le risque d'augmentation des impayés locatifs L'ANIL vient de publier debut novembre son barometre 21 des risques d'impayes et d'expulsions a partir des appels reçus en septembre et octobre 2020. Elle constate une hausse des consultations pour impayés de la part de locataires du parc prive de l'ordre de 15% par rapport a la situation de septembre-octobre 2019. Ce sont majoritairement des locataires actifs exposés à une perte d'emploi ou à une baisse de revenus. La situation paraît plus grave qu'au cours du premier confinement, selon le meme barometre publie fin juillet pour les mois de mars avril et mai. Une part des questionnements supplémentaires s'explique aussi par l'intérêt porté aux aides mises en place par Action Logement sur cette periode. A contrario, les consultations consecutives a la reception d'un commandement de payer ou se situant a des stades judiciaires ulterieurs ont atteint des niveaux particulierement bas pendant la periode du confinement en raison d'une activite reduite des tribunaux et des huissiers, de la suspension de certains delais et du report de la fin de la treve hivernale. La Banque de France a annonce le 9 novembre 2020 que le PIB pourrait reculer de 12% au mois de novembre par rapport au meme mois de l'annee anterieure. Une étude de l'Institut de recherches économiques et sociales (Ires), organisme au service des organisations syndicales, considere que 4,3 millions de menages sont soumis a un effet de ciseaux lie a la baisse des revenus face aux depenses contraintes constituees principalement par les depenses de logement dans une proportion passee, selon l'Insee, de 12% en 1960 a 27% en 2017. Nonobstant les mesures de chomage partiel prises par le gouvernement, certains actifs de professions indépendantes, des intérimaires, des artisans, des commerçants et des autoentrepreneurs risquent d'etre confrontes a une baisse de leurs revenus a court terme. Des faillites d'entreprises sont pressenties dont les effets seront sensibles dans les prochains mois. Selon l'USH, les bailleurs sociaux anticipent dans les mois a venir une augmentation forte des Il s'agit en l'occurrence d'un indicateur base non pas sur le nombre effectif d'impayes ou d'expulsions, mais fonde sur les consultations realisees dans les Adil (agences departementales) sur ces sujets. Cet indicateur s'inscrit dans une demarche plus large, lancee en avril 2020 par la DIHAL avec les professionnels du secteur. Bien que fermees en periode de confinement, les agences sont restees neanmoins joignables, soit via la ligne de chaque Adil ­ presentes sur tout le territoire a l'exception d'une quinzaine de departements ­, soit via la plateforme nationale "SOS loyers impayes", ainsi que par mail. 21 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 53/86 difficultes financieres de certains de leurs locataires, travailleurs independants, travailleurs pauvres, salaries en difficulte, du fait de la cessation des mesures de chômage partiel et de la faillite de certaines entreprises. Un autre baromètre réalisé22 courant septembre 2020 par Diffusis France pour le compte de Meelo, un specialiste de la data financiere, 32% des proprietaires et 16% des locataires sont en difficulté pour honorer leur emprunt immobilier ou payer leur loyer. Ils n'étaient respectivement que 17% et 6% lors du précédent baromètre an avril. Face a cela Meelo souleve le risque de surendettement qui augmente. 7% des personnes interrogées pensent avoir recours à un dossier de surendettement aupres de la Banque de France aujourd'hui. Ils n'étaient que 2,1% il y a quatre mois. Par ailleurs, le 16 novembre dernier a été installé l'Observatoire des impayés de loyers et de charges par Emmanuelle Wargon, ministre déléguée au Logement. L'objectif de l'Observatoire est de disposer de donnees chiffrees sur les situations d'impayes de loyers pour mieux agir et proteger les personnes en situation de precarite dans le contexte de la crise sanitaire relative a l'epidemie de la Covid-19. Les premiers elements de l'Observatoire des impayes locatifs ont permis d'etablir plusieurs constats : l'ANIL a noté à partir du mois d'octobre une hausse des consultations en matiere d'impayes locatifs de la part des locataires, que ce soit dans le parc prive ou le parc social (environ 50 % d'augmentation par rapport a novembre 2019). d'après les données croisées des caisses d'allocations familiales, de l'Union sociale de l'habitat, d'Action logement et des bailleurs privés, on ne constate pas en decembre 2020 d'augmentation du niveau de nouveaux impayes. Le chiffre d'allocataires des CAF en situation d'impayes s'etablit de maniere stable a 309 000 menages depuis septembre 2020. les bailleurs émettent toutefois un point de vigilance sur le maintien d'un niveau significatif de retards de paiement. De plus, la CNAF signale egalement que si le nombre de menages en situation d'impayes reste stable, le volume des impayes augmente, ce qui signifie que ces menages restent plus longtemps dans cette situation. Dans ce contexte, les jeunes actifs sont particulièrement touchés, non seulement sur un plan professionnel, mais parce qu'ils ne font généralement pas partie des publics prioritaires pour l'accès au logement social, a l'oppose des familles avec enfants. En consequence, s'ils se retrouvent en difficulte de paiement, et ceci peut etre plus frequent pour des emplois precaires, ils risquent de ne pas connaître rapidement une solution de relogement. De plus, il faut admettre que les jeunes ne puissent pas « souffrir » d'attendre de longs mois une attribution, surtout si l'offre d'emploi les oblige a changer de domicile plus souvent. La présence des moins de 30 ans dans le parc social a chuté de 24 % à 8 % en moins de 30 ans ! La responsabilité en incombe de manière évidente aux règles d'attributions : du côté de l'Etat par la détermination des publics « prioritaires », dont les jeunes ne font pas partie ; du côté des commissions d'attribution des organismes de logement social qui s'y opposent pour plusieurs « mauvaises raisons » : de nombreuses autres familles en attente, des durees de location trop courtes dont le turnover occasionne des frais a chaque changement de locataire, et un manque de logements de petite taille adaptes a leurs besoins (cf. § 4). Ce constat appelle des mesures de simplification à brève échéance. Il serait judicieux d'apporter Barometre realise en ligne sur l'ensemble du territoire français aupres d'un echantillon de 1.072 personnes, representatif de la population française agee de 18 ans et plus, durant la periode du 14 au 18 septembre 2020. 22 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 54/86 une suite favorable aux propositions de l'USH reprises ci-dessous. Recommandation 35. Assouplir les règles d'attribution (cotation, ancienneté, règles de priorité...) pour pouvoir mobiliser des logements en attribution immédiate, notamment pour les jeunes, sur la base d'un volume annuel d'attributions. La prise de conscience n'est cependant pas nouvelle. Et certains dispositifs ont ete mis en place, par Action Logement notamment, en partenariat avec des organismes de logement social pour assurer un relais aupres des jeunes actifs, augmenter l'offre de logements et leur apporter un soutien financier. Le développement d'une offre spécifique est a l'oeuvre egalement, mais reste insuffisante. Il y a davantage de production de residences etudiantes, plus rentables et de gestion plus stable que de residences pour jeunes actifs. De nouvelles formes d'habitat, comme les experiences d'habitat dit « inclusif », ou intergénérationnel, la mise en colocation, sont des alternatives. Les locataires non-allocataires sont également pénalisés, lorsqu'ils se retrouvent en situation d'impayes de loyers. La prevention des expulsions locatives est egalement inegale selon que le locataire beneficie ou non de l'aide personnelle au logement (APL). Cette inegalite se traduit par le bénéfice ou non du relais quasi-automatique des CAF, tant en accompagnement social qu'en surcroît d'aides ponctuelles. Cette inégalité trouve son origine dans le statut des logements, conventionnes par nature dans le parc social, et conventionnes parfois dans le parc prive (suite a des travaux realises par les proprietaires avec l'aide de l'ANAH), ou « hors champ ». L'ignorance des processus en place et une incapacite a solliciter les aides existantes sont tres repandues chez les locataires du parc prive. Les dispositions adoptees par l'ANIL, d'un numero d'appel « SOS impayés », et de conseils delivres sur leur site internet, ou dans les ADIL sont interessants, mais encore peu connus. La politique de prevention doit se preoccuper de renforcer « l'aller vers » les personnes en situation de fragilite economique et sociale, en plus d'une coordination renforcee des le stade du commandement de payer et d'une communication a la hauteur de ces enjeux. Recommandation 36. Renforcer les moyens dédiés à « l'aller-vers » les locataires en situation de fragilité économique et sociale qui rencontrent des difficultés de paiement de leurs loyers. 6.3 Identifier et soutenir les « petits » propriétaires, fragilisés par l'aggravation des impayés La grande majorite des bailleurs prives sont des « petits proprietaires ». Sur les 7 millions de bailleurs privés, 85 % possèdent un à deux logements seulement et sont des gens relativement modestes, dependants financierement des revenus locatifs, et sensibles a la soutenabilité des charges (emprunts et entretien de copropriete). Ces bailleurs sont donc très exposés aux impayés de loyers. Seulement 1/3 d'entre eux recourent aux services de professionnels de la gestion immobiliere, par mandats de gestion. Dans ce cas, les professionnels exercent une plus grande vigilance dans les rappels en cas de retards de loyers et l'engagement de procédures si necessaire. Ils recourent egalement plus facilement aux systemes assuranciels, dont ils proposent le service aux proprietaires. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 55/86 Le recours à l'intermédiation locative est une autre solution securisante pour le proprietaire pour la régularité du paiement des loyers, mais ce type de solutions, consistant a louer par bail glissant a un operateur (en general associatif) qui loue a son tour a des locataires modestes, avec un niveau de loyers inferieur au marche ne connaît pas le succès qu'il mérite. Les plafonds de ressources et de loyers sont notamment en cause, en particulier dans les secteurs en forte tension immobiliere. Le plus connu de ces dispositifs est Solibail avec seulement 8000 logements captes depuis sa creation en 2007. Les deux autres tiers des bailleurs privés qui ne font appel à aucune prestation sont effectivement très vulnérables face à l'aggravation des impayés et démunis devant les procédures à conduire. Les bailleurs tardent à réagir aux créances de loyers, par empathie ou par ignorance, et lorsqu'ils s'engagent dans des procedures en recouvrement par l'intermediaire des huissiers de justice et des avocats, les situations sont généralement irrécupérables. Passe ce stade, les procedures leur echappent en quelque sorte. Ces bailleurs « solitaires », puisque non accompagnes, optent également rarement pour une couverture assurancielle des loyers et charges. Ces régimes ont un coût (autour de 2% des revenus fonciers encaisses) et ce sont les proprietaires les plus modestes et donc les plus fragiles qui evitent cette charge supplementaire. De plus, ils n'en ont pas forcément connaissance, a l'inverse des proprietaires ayant recours aux administrateurs de biens. Dans le déroulement des procédures, il n'est pas rare que les dossiers des locataires de ce parc prive ne soient pas particulierement suivis, n'ayant pas été signalés par des travailleurs sociaux aux commissions de coordination. Et la représentation des bailleurs privés aux CCAPEX connaît quelques défaillances dans certains départements. La recherche d'une alternative par le relogement n'est pas maîtrisée par les bailleurs privés, qui sont isoles. Les préconisations d'une orientation systématique et très immédiate (au moment du commandement de payer) des locataires vers un relogement adapte a leurs ressources trouvent ici tout leur intérêt (cf. § 2.3). A défaut de trouver une solution alternative de relogement, les procedures s'enchaînent dans un véritable engrenage qui echappe aux proprietaires. Lorsque leurs locataires ont recours a la commission de surendettement, il y a de forts risques que les plans d'apurement ou de redressement leur fassent connaître in fine des pertes de loyers, sans pour autant pouvoir disposer de leur bien pour le remettre a la location. Lorsque les procedures en recouvrement d'impayes s'acheminent vers l'expulsion locative, il faut compter de longs mois pour obtenir la libération des lieux, ce que les proprietaires attendent le plus. Suivant une procedure dite « classique », le respect des delais conjugues represente souvent plus de deux ans contre 4 à 6 mois en Grande Bretagne23, moins de six mois en Suède et un an en Allemagne24. En resultat, ces bailleurs doivent faire face a des délais importants pour recouvrer leur bien, des charges et des taxes courantes qui s'ajoutent au manque à gagner et aux frais de justice avancés. Le concours de la force publique finit par concerner 8.000 locataires du parc privé en moyenne ces dernieres annees, soit autant en nombre que dans le parc social, mais cela represente deux fois moins de cas en proportion (0,1%) des 7 millions de logements du parc prive (cf. graphique figurant au § 3.1). 23 24 Cf. Rapport NOGAL deja cite Cf. Rapport IGA/CGEDD/IGAS/IGSJ qui cite l'etude Stenberg, Van Doorn, Gerull; « Locked down in Europe », European journal of homelessness, decembre 2011 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 56/86 Les indemnités dues par l'Etat en cas de refus du concours de la force publique constituent un obstacle supplémentaire. Le paiement de cette indemnisation est devenu avec le temps arbitraire et inégalitaire selon les territoires. Outre des délais de règlement excessivement longs (jusqu'a un an), le montant de l'indemnisation ne couvre généralement pas le montant dû (70% en moyenne). Au final, par ignorance, ou pour ne pas avoir à engager une ultime requête aupres des services prefectoraux, ou par voie judiciaire, seuls 53,8% des propriétaires font une demande d'indemnisation. Ce cumul d'inconvenients est dissuasif pour la remise sur le marché de biens à la location. Les « petits propriétaires » bailleurs doivent être mieux pris en considération dans la politique de l'offre locative et faire de facto l'objet d'une attention particulière dans la politique de prévention des expulsions. Tous ces sujets plaident pour une attention et un accompagnement renforcés des proprietaires prives dans le contexte de la crise sanitaire (Covid-19). De nouveaux profils (commerçants, artisans, intérimaires...) risquent d'être confrontés aux fragilités des locataires accentuées par la crise. Recommandation 37. Mettre fin aux pratiques de négociation des indemnités dues aux bailleurs par les préfets lorsqu'ils n'accordent pas le concours de la force publique. Systématiser le paiement de ces indemnités. En revoir l'imputation budgétaire (compte du logement). 6.4 Le recours aux systèmes de garanties est trop faiblement répandu mais doit être encadré Les proprietaires prives ont tres faiblement recours aux garanties offertes par le systeme assuranciel. Sur les 7 millions de logements du parc privé, seulement 35% sont gérés par des professionnels sous mandat, et seulement 15% de ces proprietaires acceptent de payer une garantie pour impayes de loyers (GLI). Cela ne represente donc que 5% du parc privé couvert par une garantie. Il pourrait etre souhaitable d'étendre davantage ces couvertures assurancielles aux propriétaires privés des 4,5 millions de logements non gérés par des professionnels et des 2 millions de logements supplémentaires gérés sans garantie de loyers impayés. Mais le prix de ces garanties devrait être réexaminé en lien notamment avec la possibilité d'y accéder directement sans l'intermédiaire des professionnels de l'administration de biens. Cependant, il est impératif que les acteurs assuranciels participent de manière plus officielle à la prévention des expulsions. Je suggère qu'ils soient davantage associés à la détermination des politiques départementales et qu'ils contribuent par dotation aux FSL ainsi qu'au financement des ADIL. Recommandation 38. Intégrer pleinement les assureurs dans les politiques de préventions d'expulsions (Signataire des chartes départementales, contributions FSL, ADIL...) Recommandation 39. Concevoir une évolution de l'offre de garantie, pour permettre à des bailleurs privés d'adhérer directement à ce système d'assurance. Ceci suppose d'en redéfinir les conditions financières et les clauses d'intervention, sans faire obstacle au rôle des intermédiaires de l'administration de biens. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 57/86 La « garantie » VISALE mise en place par ACTION LOGEMENT depuis janvier 2016 est une alternative à la caution physique : Finance exclusivement par Action Logement, et gere par sa filiale APAGL, le dispositif « Visale » est un systeme de cautionnement gratuit et dématérialisé couvrant les loyers impayés pendant toute la duree d'occupation du logement, dans la limite de 36 echeances impayees et, exclusivement pour le parc prive, la prise en charge de degradations locatives. Ce service de caution vise a faciliter l'acces au logement de candidats25 plus fragiles economiquement tout en offrant une garantie intéressante pour le propriétaire, équivalente à une assurance. Pres des 2/3 des menages entrant dans le parc locatif prive sont eligibles a Visale. Depuis le debut du dispositif en 2016, seulement 375 000 ménages ont bénéficié de Visale (dont 130.000 sur l'annee 2019). Avec une hausse des contrats souscrits de 21% entre janvier et fin novembre 2020 par rapport a la meme periode 2019, Visale a continue, malgre la crise sanitaire, d'accompagner les beneficiaires et particulierement les jeunes (+ 42% par rapport a 2019). Cette garantie est mise en jeu dans 4,7% des cas, tandis que 1% des dossiers d'impayes concernes a abouti a une expulsion. Bien que financé par les fonds de la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC), le public beneficiaire a ete elargi a tous les jeunes de moins de 30 ans, ce qui est appreciable. La question se pose d'un élargissement éventuel des bénéficiaires de ce dispositif, sans en souhaiter une extension immodérée qui serait de nature à déresponsabiliser les locataires. Independamment de cette question, les modalités de prise en charge restent très procédurales, sans véritable système d'accompagnement social, hormis le cas de proprietaires en intermediation locative. 6.5 Bien qu'exposés aux conséquences économiques de la crise sanitaire, les bailleurs sociaux sont mieux armés Du côté des bailleurs sociaux, les relations institutionnelles sont établies depuis longtemps avec la chaîne des acteurs du departement, des services de l'Etat et des collectivites, en raison du regime general lie au conventionnement et des garanties apportees sur le pan de l'investissement, mais aussi des contacts permanents etablis pour le suivi des attributions, la gestion des contingents de reservation et des publics prioritaires. De plus, les bailleurs sociaux, qui logent une forte proportion de personnes a faibles ressources, ont depuis longtemps acquis un professionnalisme dans la gestion locative, alliant les competences de travailleurs sociaux, leurs « conseillers en économie sociale et familiale », des agents de proximite en capacite de dialogue et de detection des fragilites sociales sur le terrain au quotidien (gardiens et régisseurs de quartiers) et des services contentieux particulierement exercés à faire du précontentieux des les premiers mois d'impayes. Il peut etre ajoute que la majorité des locataires logés par les organismes de logement social bénéficie de l'aide personnelle au logement (APL), de par leurs niveaux de ressources et le statut A ce jour, peuvent beneficier de Visale : tous les jeunes de 30 ans au plus ; les etudiants et alternants de 30 ans au plus loges dans le parc prive, le parc social ou les residences etudiantes ; les salaries de plus de 30 ans en mobilite professionnelle, y compris les salaries en CDI en mutation professionnelle et les salaries du secteur agricole ; les salaries et demandeurs d'emploi de plus de 30 ans, confrontes a un evenement exceptionnel fragilisant leur lien a l'emploi et au logement ; les menages accompagnes par une association d'intermediation locative ; les menages loges dans le cadre du bail mobilite. 25 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 58/86 des logements conventionnes avec l'Etat. Ces allocations versées directement aux bailleurs en « tiers payant » par les CAF et MSA ­ et qui representent de l'ordre de 70% des loyers encaisses ­ leur procurent egalement un lien étroit avec les travailleurs sociaux des CAF en particulier. Ce rapport est essentiel. En résultat, les locataires logés par les bailleurs sociaux bénéficient d'une assistance quasi permanente. Comme le souligne le CREDOC dans l'etude deja citee, « Hormis les bailleurs sociaux, très peu d'acteurs investissent ce temps en amont ou post assignation. De fait, les ménages du parc social locatif apparaissent moins exposés aux risques d'expulsion même si les mutations dans le parc social semblent rares. » Les données consolidées communiquées par l'Union sociale pour l'habitat (USH) a notre intention (voir schéma suivant) montrent l'efficacité du suivi opéré par les organismes, la proportion de locataires restant en impaye de loyer superieur a 3 mois n'etant que de 6,5% du parc global malgre l'apparition de difficultes de paiement chez 18,6% d'entre eux, et la proportion de locataires qui restent en impayé plus d'un an n'est plus que de 1,5% des 4,6 millions de locataires, soit 64.000 familles. Nombre de logements sociaux 4 000 000 3 500 000 3 000 000 2 500 000 2 000 000 1 500 000 1 000 000 500 000 0 Sans difficulté de paiement 3 680 000 820 000 286 000 64 000 en difficulté de paiement en impayé > 3 mois en impayé > 12 mois Source : mission a partir des donnees USH pour l'annee 2018 Compte-tenu des capacités des organismes à faciliter le recours de leurs locataires aux aides FSL ou à celles d'Action Logement, à permettre le maintien ou le rétablissement des APL (via le dialogue avec les CAF) et à faire des propositions de mutations dans des logements de leur parc aux loyers plus adaptes a la taille et aux ressources des menages en difficulte, ce score doit être relativisé. Les mutations restent d'ailleurs une pierre d'achoppement des organismes de logement social. Le sujet est connu et pourrait faire l'objet d'un long developpement. Independamment de la culture des commissions d'attributions, les frais occasionnes par les mutations ne sont notamment pas negligeables. Et la structure du parc de logements sociaux est egalement en cause (cf. § 4). Quant aux niveaux de loyers, ils peuvent expliquer aussi, du fait de l'augmentation des prix de l'immobilier au sens large (charge fonciere et couts de construction) ces dernieres decennies, des difficultes a offrir des relogements a des niveaux de loyers dits « tres sociaux ». Les organismes ont euxmemes identifie parmi les voies de progrès, le choix de l'intermédiation locative en confiant la location d'une partie de leur parc a des associations a vocation tres sociale. Le manifeste de l'USH Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 59/86 publié en septembre 2020 26 , fait état du double intérêt de ce partenariat « sur le modèle de « Solibail », visant, d'une part, à assurer un accompagnement personnalisé des personnes logées par une association et, d'autre part, à assurer un niveau de quittance très maîtrisé, compatible avec les ressources du ménage. Ce dispositif permettrait par exemple de loger des personnes à très faibles ressources dans des logements sociaux dont le niveau de quittance est trop élevé, en raison des loyers (PLS...) ou des charges ». Une part des logements vacants du parc social pourrait être davantage mobilisée (cf. § 4.2). Ces vacances peuvent toutefois etre le resultat de certaines decroissances demographiques ou d'une certaine obsolescence d'immeubles voues a la demolition dans le cadre de la renovation urbaine en particulier (cf. § 4 .1). Les bailleurs eux-mêmes reconnaissent, dans le document publie par l'USH en septembre 2020 l'opportunite de mobiliser les logements vacants de leur propre parc situe en particulier dans « certains territoires en régions, en périphérie de métropoles et de villes moyennes ». Des travaux collectifs s'imposent au niveau national (DHUP et DIHAL, USH) comme au niveau régional dans le cadre des comites regionaux de l'habitat et de l'hebergement (CRHH), et au niveau territorial (prefets, DDT et DDCS, conseils departementaux, communes et EPCI, bailleurs sociaux) par la prise en compte des disponibilites dans les programmes locaux de l'habitat (PLH) et les chartes départementales de prévention des expulsions locatives. Il s'agit de cibler le réemploi des 33.000 logements vacants environ proposés à la location et restant vacants plusieurs années27. A ce sujet, il ne devrait pas être tabou de pouvoir proposer des logements à des personnes menacées d'expulsion dans une autre localité que celle dont elles sont issues, dans une période où l'attractivité des territoires pourrait avoir tendance à s'inverser, dans la mesure où l'éloignement de leur emploi n'en serait pas un obstacle. Finalement, les professionnels du logement social devraient avoir les moyens, accentués depuis leurs regroupements, de mutualiser leurs forces pour palier la question d'une offre adaptee au relogement de locataires en difficulte, toutes les fois que cela se pose. A contrario, ces organismes sont confrontés, comme les bailleurs prives, à l'accroissement des pertes de loyers lorsque les locataires en impayes font l'objet de décisions judiciaires de resiliation de bail et que le concours de la force publique ne leur est pas accordé. Les indemnités accordées par l'Etat en cas de refus du concours de la force publique sont rarement versees a la hauteur des pertes de loyers. La proportion est voisine de 70% et fait l'objet de véritables « négociations » avec les services préfectoraux. Ce manque de recettes s'ajoute aux dettes effacées par les plans accordés par la commission de surendettement de la Banque de France. Pour l'ensemble des bailleurs sociaux, l'USH indique que ces effacements de dettes sont deja passés de 54 M en 2014 a 89 M en 2018, soit une augmentation de 65% en seulement quatre ans. Des indications sur les effets de la crise sanitaire ont été données : l'USH constate un surplus des retards de paiement de 65 M - seulement, pourrait-on dire - a fin octobre 2020 par rapport a la situation de fevrier 2020, ce pour l'ensemble des organismes ; il y a meme une diminution du nombre de nouveaux cas de locataires en impayes en septembre et octobre, pour atteindre un niveau inferieur a son seuil d'avant crise, en fevrier 2020 ; avec l'amplification des mesures gouvernementales, les refus d'octroi du concours de la force publique risquent d'etre multiplies au moment de la fin de la trêve hivernale au printemps « Pour etre utiles ensemble - Les propositions du Mouvement Hlm pour une relance juste et durable » - septembre 2020 - https://www.union-habitat.org/centre-de-ressources/politique-du-logement-mouvement-hlm/pour-etreutiles-ensemble-les-propositions 26 27 Cf. rapport IGF/CGEDD de janvier 2016 sur la mobilisation des logements et des bureaux vacants PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 60/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN 2021 avec des conséquences financières pour les bailleurs sociaux comme pour les bailleurs prives, car les « negociations » avec les services prefectoraux pour obtenir le paiement d'indemnités correspondant aux périodes couvertes par le confinement devraient porter sur des montants beaucoup plus importants. Des mesures préventives ont été engagées par le « Mouvement HLM » : En mai dernier, l'USH se dotait d'une charte en faveur des locataires "en fragilité économique", signée avec cinq organisations de locataires siegeant a la commission nationale de concertation. Cette charte comportait des recommandations destinees aux bailleurs : le developpement d'outils et de dispositifs d'appui facilement accessibles : demarche proactive, incitation des locataires en difficulte a se manifester, contact telephonique regulier avec les locataires « montrant des signes de fragilité », signalement par les associations, tout « en respectant un cadre déontologique de discrétion », des situations de detresse economique ; la mise en place de possibilités d'étalement du paiement des loyers et des charges : « des solutions personnalisées, adaptées à chaque situation », des regles « précises et transparentes d'étalement [...] définies conjointement dans un protocole local concerté entre l'organisme HLM et les associations de locataires », moyennant une large information des locataires et la conclusion de protocoles individuels avec un dispositif conjoint de suivi entre l'organisme et les associations ; l'aménagement de la facturation des charges locatives récupérables, lors de la regularisation annuelle, avec la possibilite de reporter les regularisations ou de les traiter differemment selon qu'elles sont debitrices ou creditrices, l'adaptation des provisions pour charges en fonction des prestations effectivement assurees pendant le confinement (par exemple, avec la suspension de l'entretien des espaces verts) ; la mobilisation des dispositifs de solvabilisation de droit commun (FSL, Action logement, CCAS, aides de l'Etat...). Dans le contexte de la reprise de la pandémie cet automne et la mise en place d'un second confinement, un avenant à cette charte vient d'etre signe avec quatre des cinq associations de locataires initiales, la Confederation nationale du logement (CNL) s'étant retirée faute d'obtenir un consensus sur l'ajout d'autres mesures comme le gel des loyers en 2021. L'avenant confirme que « la crise sanitaire continue de dégrader la situation économique des locataires HLM », ajoute de nouveaux engagements. Ainsi, la possibilite d'accorder des délais de paiement des loyers, prevue par la charte, est prorogee jusqu'à la quittance du mois de mai 2021 incluse. Un engagement met aussi un accent spécifique sur le soutien et l'accompagnement des victimes de violences conjugales et familiales, « dont la vulnérabilité est accrue en période de confinement ». Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 61/86 7 Consolider le « bouclier » de l'urgence sanitaire (Covid-19) et anticiper la sortie de la trêve hivernale au printemps 2021 7.1 Veiller de manière active sur un nouveau public à risque Les associations situees les plus en amont du soutien aux menages (banques alimentaires, Restos du Coeur, Secours catholique, Secours populaire etc.) constatent une augmentation globale du nombre de demandeurs. Certaines structures comme le Secours populaire ont deja ete confrontees a des situations alarmantes, avec 45 % des nouveaux demandeurs en 2020 qui correspondaient a des menages non connus de leurs services28. Le nombre d'allocataires du revenu de solidarite active (RSA) a progresse de plus de 8% en 2020. Les CAF et l'ADF ont constate que de nouveaux profils ont fait une demande de RSA. Il s'agit souvent d'auto-entrepreneurs, artisans, ou commerçants. L'arbitrage sur le budget de certains menages les amene a demander de l'aide de premiere necessite (aides alimentaires, aides au paiement des fluides). S'appuyer sur ces associations, qui nouent souvent un premier contact approfondi avec les ménages en difficulté, devient indispensable pour identifier les nouveaux publics fragilisés et susceptibles d'être concernés par des procédures d'expulsion locative. Nombreux sont ces menages qui ne font pas appel a un travailleur social, par meconnaissance ou par pudeur. Afin d'anticiper le plus tot possible le risque d'un impaye locatif et celui d'une procedure judiciaire, ces acteurs de solidarite pourraient mener une mission de reperage de ces nouveaux publics, et il serait judicieux d'utiliser les ressources des ADIL afin de les aider a s'orienter tres rapidement. Recommandation 40. Proposer aux départements et métropoles d'expérimenter un repérage précoce de ménages pouvant basculer dans l'impayé locatif par recours aux acteurs associatifs, de façon à les orienter rapidement vers le conseil des ADIL. Dans le parc social, le programme de financement « 10.000 logements HLM accompagnés » lance en 2014 avec les bailleurs sociaux a permis de mettre en oeuvre des actions innovantes relatives a l'acces ou au maintien dans le logement des menages en grande difficulte (troubles de la sante mentale, personnes a la rue, victimes de violences conjugales, etc.). Ces actions ont ete menees notamment par le gardien d'immeuble : sa capacite a pouvoir reperer des menages en difficulte est averee et doit etre fortement encouragee. Il pourrait etre opportun de formaliser un modele de detection. Recommandation 41. Dans le parc social, formaliser une méthodologie de signalement des ménages à risque d'impayés par les gardiens d'immeubles en capitalisant sur les expériences réalisées dans le cadre de l'appel à projets "10.000 logements accompagnés". 28 Barometre du Secours Populaire du 30 septembre 2020 PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 62/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN Par ailleurs, 140 000 personnes se seraient vu accorder un plan d'apurement par les tribunaux ces 3 dernieres annees, selon la Fondation Abbe Pierre. Les consequences de la crise impacteront forcement le respect de certains de ces echeanciers et pourraient ainsi augmenter fortement les situations conduisant a des procedures d'expulsion avec CFP, des lors que la clause resolutoire est acquise des qu'une echeance n'est pas respectee. Ainsi, de nombreux protocoles de cohesion sociale pourraient etre remis en cause dans le parc social. Recommandation 42. Prendre en compte rapidement le cas des personnes ayant signé des protocoles de cohésion sociale ou en cours de remboursement d'échéancier fixé par le juge et envisager des aides pour tous les ménages qui assumaient leur échéancier avant la crise sanitaire et qui démontreraient une baisse de leurs revenus liée à la crise sanitaire. Le « Aller vers » est un impératif qui doit s'inscrire en profondeur dans nos doctrines de politiques de solidarité. Dans cette periode inedite et aux perspectives inquietantes de 2021, il sera essentiel d'aller a la rencontre des menages les plus exposes. L'emploi de ces dispositifs sera indispensable pour permettre de mobiliser tous les leviers existants pour le maintien dans le logement ou le relogement. Dans ce contexte, le gouvernement vient d'annoncer la création d'équipes mobiles de visite a domicile le 16 decembre 2020. Des le debut de l'annee 2021, 26 equipes mobiles, composees de 3 a 5 travailleurs sociaux ou juristes, seront deployees dans les departements les plus tendus en matiere de logement et concernes par de nombreuses procedures engagees sur le plan d'une expulsion locative. Il conviendra que ces equipes soient le plus rapidement operationnelles des le debut de l'annee. Vu l'ampleur des taches qui les attend, il faudrait envisager de renforcer ces equipes au cours du premier trimestre 2021 afin de couvrir un territoire plus large. Recommandation 43. Prévoir dès le premier trimestre 2021 la multiplication des équipes mobiles déployées sur le terrain. 7.2 Anticiper et préparer la sortie de la trêve hivernale 2021 En ce moment si singulier, les propositions qui suivent auront à tenir compte de la future évolution de la crise sanitaire qui par définition est inconnue. Un nouveau confinement ou d'autres mesures de précaution pourraient conduire à des évolutions significatives et obliger à revoir certaines recommandations. La crise sanitaire a fortement impacte la prevention des expulsions locatives, aussi bien par ses consequences immediates sur la gestion de la procedure d'expulsion elle-meme que par les risques nouveaux que font peser a terme ses consequences economiques sur la capacite de paiement du loyer par les menages. Afin de maîtriser la propagation de l'epidemie de la Covid-19, le gouvernement a ete amene a prendre une serie de mesures inedites de protection des locataires menaces d'expulsion durant l'annee 2020. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 63/86 Dans le cadre de l'etat d'urgence sanitaire, la treve hivernale a ainsi ete allongee du 1er avril au 10 juillet, reportant d'autant l'execution des concours de la force publique (CFP) par les prefets. Prenant le relais de ce dispositif initial, l'instruction du 2 juillet 2020 a ensuite permis de limiter, de façon temporaire et jusqu'a la treve hivernale suivante, le nombre d'execution des concours de la force publique, tout en indemnisant les proprietaires concernes. Conçus comme une reponse d'urgence devant le caractere exceptionnel de la crise sanitaire, ces dispositifs derogatoires ne peuvent cependant se substituer de maniere perenne au cadre constitutionnel et legislatif regissant les rapports locatifs et le droit de propriete. La réduction historique des expulsions que ces dispositifs ont permis d'obtenir en 202029 a également eu pour impact de fragiliser la situation financière de nombreux bailleurs du parc privé qui dépendent financièrement de leurs revenus locatifs. Ces reports contribuent également à l'aggravation de l'endettement des occupants dont la situation était déjà précaire, ce qui n'est pas favorable à leur réinsertion sociale. Cette reduction a egalement eu pour contrepartie l'accumulation simultanée des procédures administratives d'expulsion au sein des préfectures tout au long de l'annee 2020, generant in fine un risque différé de hausse massive des expulsions a court et moyen termes. D'apres les premieres estimations 30 , le nombre de CFP accumules au cours de l'annee 2020 qui demeurent en attente correspondrait a 70% de son niveau de 2019. Ce serait ainsi 22 000 CFP octroyés qui seraient en attente d'une exécution au 31 décembre 2020, auxquels il faut par ailleurs ajouter les nouveaux CFP qui seront requis et octroyes d'ici la fin de la treve hivernale du fait de la poursuite des procedures judiciaires d'expulsion durant l'annee 2020, soit approximativement 12 500 CFP requis et 8 000 octroyés sur 3 mois, dans l'hypothèse d'une fin de trêve au 1er avril. En tenant compte du travail d'instruction que meneraient a moyens constants les services des prefectures d'ici la fin de la treve, on peut ainsi estimer que plus de 35 000 CFP seraient à instruire pendant le seul premier trimestre 2021, ce qui serait trois fois supérieur au flux courant, et pres de 30 000 seraient a executer a la seule date du 1er avril 2021, ce qui equivaut a la totalite du volume d'une annee courante a l'issue du seul premier trimestre. L'enjeu immédiat en matière de prévention des expulsions est donc d'élaborer en 2021 les étapes d'une transition progressive en tenant compte de la permanence des risques sanitaires et socioeconomiques lies a la Covid-19 qui demeurent pour les personnes les plus vulnerables. L'objectif prioritaire est de réduire le nombre d'expulsions et d'éviter la précarisation des locataires ainsi que celle des bailleurs concernés. Dans l'hypothese d'une fin de treve hivernale conventionnelle au 1er avril 2021 allant de pair avec une reprise des executions de concours de la force publique a cette date, il faut programmer la coordination des interventions des partenaires de la prevention au niveau national et local de façon a : Réduire le niveau de CFP accumulés en 2020 a executer a partir du 1er avril ; Echelonner sur l'année 2021 la reprise de l'exécution de ces CFP ; Limiter l'afflux de nouvelles réquisitions de CFP susceptibles d'être octroyées en 2021. 29 30 3 500 personnes ­ selon le communique de la DIHAL en date du 31 Octobre 2020 Estimation etablie par le pole prevention des expulsions locatives de la DIHAL PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 64/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN Il s'agirait de reduire dans un premier temps le niveau de CFP a executer a l'issue de la treve hivernale puis d'echelonner dans un deuxieme temps leur reprise sur le reste de l'annee avant de travailler a la reduction du flux de CFP nouvellement requis. Recommandation 44. Elaborer un plan d'actions destiné à gérer dès maintenant la fin de la trêve hivernale. Le faire en liaison étroite avec les représentants des collectivités territoriales, des administrations et des différents acteurs sociaux. 7.2.1 Identifier les ménages concernés par un CFP en 2021 La condition préalable qui permettra de limiter le nombre d'expulsions sera la connaissance des ménages concernés, or la moitie d'entre eux serait en effet inconnue des services sociaux au stade du CFP et ils n'auraient pour la plupart engage aucune demarche de relogement. L'enjeu d'aller au plus près de ces ménages est donc immense mais indispensable pour limiter le nombre d'expulsions sans solution de relogement ou d'hebergement en 2021. Une cooperation de tous les acteurs est donc necessaire, les CCAPEX pourraient sur cette mission d'identification etre en pilotage et mobiliser tous les acteurs territoriaux, et en particulier tout le tissu associatif Comme cela a ete fait dans les Bouches-du-Rhone, les CCAPEX pourraient communiquer aux CCAS et CIAS la liste des locataires concernes. Les equipes mobiles mises en place par le Gouvernement devraient prioritairement se rendre au domicile des locataires du parc prive faisant l'objet d'un CFP octroye et reste en attente d'execution alors que ces personnes seraient inconnues des services sociaux. 7.2.2 Mobiliser les capacités de logement pour les ménages en voie d'expulsion L'augmentation des capacités de relogement sera la condition sine qua non d'une réduction effective du nombre de dossiers accumulés en 2020 pour limiter la hausse des expulsions effectives sur l'annee 2021. En vue de limiter autant que possible le nombre d'expulsions a realiser a l'issue de la treve hivernale et tout au long de l'annee 2021, l'objectif prioritaire est de mener une action conjointe d'accompagnement et de relogement des personnes faisant deja l'objet a ce jour de CFP requis et octroyes. Il est ainsi indispensable de reserver les disponibilités de logement pour ces personnes, dont celles qui ont deja realise des demarches de demandes de logement social (DLS). Quoi qu'il en soit, il conviendra aussi d'accelerer voire de simplifier les contributions d'attribution et les delais qui s'y rapportent pour accelerer le relogement de ces familles. Ces objectifs de relogement ne pourront pas etre atteints sans mobiliser les reservataires n'ayant pas respecte leur obligation d'attribution de 25% et le contingent prefectoral. Les commissions d'attributions logement devront aussi s'inscrire dans cette dynamique. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 65/86 Vu l'ampleur du defi et les enjeux humains, il est incontournable de se fixer des objectifs mensuels des le debut d'annee. Recommandation 45. Fixer dans chaque département des objectifs mensuels d'attribution de logements ciblés pour les ménages faisant l'objet d'une réquisition de la force publique aux fins d'expulsion. Meme si nous connaissons les difficultes des bailleurs sociaux a developper le nombre de mutations, ces dernieres sont plus que jamais une des solutions les plus pertinentes pour affronter les enjeux du relogement des personnes sous la menace d'une expulsion par CFP en 2021. Les CCAPEX pourraient par exemple demander aux bailleurs sociaux de faire la demonstration qu'ils ne disposent d'aucun logement adapte a la situation du menage pour lequel ils demandent l'expulsion au sein de leurs parcs, en tenant compte des differents contingents de reservation mobilisables. Parallèlement, tout maintien dans le logement dans le parc social, s'il est encore possible, doit être une priorité. Depuis la loi ELAN, le protocole de cohésion sociale (PCS) peut etre mis en place y compris en cas d'impossibilite de remboursement de la dette locative, a la seule condition que le loyer courant soit repris. Dans le contexte actuel, les bailleurs sociaux devront en responsabilite mettre tout en oeuvre pour suspendre la procedure de CFP. La disponibilité de logements abordables hors conventionnement dans le parc locatif privé sur certains territoires est reelle, avec les federations nationales de bailleurs et d'agences, il serait interessant d'etablir dans les territoires un contingent de logements vacants pour les menages menaces d'expulsion que les CCAPEX identifieraient. Enfin, l'augmentation des objectifs d'hebergement offre un moyen complementaire de prise en charge des personnes les moins vulnerables et faisant l'objet d'une execution de CFP. Les CCAPEX, en lien avec les services des prefectures en charge de l'hebergement, pourraient etablir la liste des menages faisant l'objet de CFP a heberger et les orienter vers les services integres d'accueils et d'orientation (SIAO). Un objectif mensuel semble necessaire pour que cette action soit efficace. Toutes ces actions d'accompagnement, de relogement et d'hebergement necessiteront des moyens humains supplementaires au sein des services des DDCS. Recommandation 46. Renforcer temporairement les effectifs des DDCS et des CCAPEX en charge de la coordination des dispositifs d'accompagnement social, du relogement et de l'hébergement. Le quasi-doublement au niveau national de la masse de CFP à traiter en 2021 sera difficilement supporte par les effectifs des prefectures actuels qui etaient deja sous tension pour gerer le simple flux courant avant crise. Il apparaît donc necessaire de faciliter temporairement le recrutement de personnels contractuels ou vacataires, sur la base des besoins remontes par les prefectures. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 66/86 Recommandation 47. Renforcer temporairement les effectifs des préfectures en charge de l'instruction des CFP. 7.2.3 Déterminer des priorités dans la reprise des expulsions Il y aura une necessite difficile mais indispensable de prioriser en 2021 la reprise des executions des CFP. Pour ce faire, il paraît indispensable de tenir compte, de la qualite des bailleurs, de leur capacite financiere et de la vulnerabilite des occupants. L'enjeu est a la fois sanitaire, en termes de limitation de l'exposition des populations les plus a risque et de propagation du virus, et socioeconomique, en termes de limitation de l'impact des expulsions sur les personnes les moins susceptibles de se reinserer ou pour lesquelles les consequences seraient relativement les plus lourdes. Je suggère de favoriser le maintien dans le logement ou le relogement des personnes souffrant de maladies chroniques, des personnes âgées, des personnes handicapées et des familles avec enfants, déjà reconnues prioritaires par la loi. A l'exclusion de ces personnes, il s'agirait de concentrer la reprise des expulsions dans le parc privé, en priorite pour les petits bailleurs individuels qui ne disposent que d'un seul logement et dependent du revenu locatif pour leur subsistance. Les fédérations nationales de bailleurs et d'agences immobilières pourraient servir de relais a cette fin aupres de leurs adherents. Dans un deuxième temps, la reprise des expulsions pourrait se concentrer sur les dettes locatives les plus élevées et les CFP les plus anciens. Enfin, meme si cela reste une minorite, la reprise des expulsions sur les personnes constituant une menace pour leur environnement physique et materiel immediat ainsi que sur les personnes n'ayant pas repris le paiement de leur loyer alors qu'elles disposent des capacites budgetaires pour ce faire devraient etre priorisee. 7.2.4 Echelonnement et maîtrise de la reprise des CFP Parallelement a la reduction du niveau de CFP, le defi majeur de l'annee 2021 est d'organiser la transition de l'etat d'urgence vers une reprise maîtrisee de la procedure d'expulsion locative en 2021. Cela passe en particulier par l'organisation d'une reprise progressive et maîtrisee de l'execution des concours de la force publique (CFP) qui evite tout effet de rattrapage massif et desorganise. Il s'agit en particulier de reduire autant que faire se peut l'incidence socioeconomique, sanitaire mais aussi budgetaire des expulsions pour les locataires comme pour les bailleurs dans le contexte actuel de crise sanitaire. Une reprise des expulsions non anticipée pourrait ainsi conduire sur l'annee a une hausse inedite de 30 000 CFP executes sur l'annee en 2021 contre 17 000 en 2019. Il est donc necessaire de prevoir un echelonnement du traitement des CFP, s'etendant potentiellement jusqu'au debut de la treve 2021-2022, voire en 2022, qui permette autant que possible de limiter le nombre d'expulsions et de soulager la contrainte temporelle relative a la vitesse de l'instruction des CFP, afin que chaque dossier puisse être évalué avec le même niveau d'attention. L'enjeu est Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 67/86 d'obtenir une reduction aussi importante que possible du nombre d'expulsions realisees en 2021 dans le parc social. Elle permettrait egalement d'inciter fortement les bailleurs a utiliser cette periode pour rechercher en interne des modalites alternatives a l'expulsion (mutations provoquees, mise en place de PCS...). Il s'agit de definir conjointement avec les federations nationales de bailleurs et reservataires du parc social, les conditions d'une reprise limitee des executions de CFP en 2021 ainsi que les modalites d'indemnisation financiere des bailleurs par l'Etat en cas de suspension prolongee de l'execution des CFP au cours de l'annee. Il serait envisageable de limiter la reprise partielle des executions limitee aux seuls CFP accumules en 2020. Recommandation 48. Négocier au niveau national les modalités de contribution des bailleurs sociaux à l'effort d'échelonnement de l'exécution des CFP en 2021. Recommandation 49. Échelonner la reprise de l'exécution des CFP accordés sur les années 2021 et 2022. 7.2.5 Abonder le budget destiné à l'indemnisation des bailleurs Du fait de l'action de suspension du CFP au-delà de la période de trêve hivernale le risque de fragilisation des petits bailleurs qui dépendent de leur loyer est réelle. Ainsi, Il conviendrait d'abonder en consequence le programme budgetaire (BOP 216) en charge de l'indemnisation des bailleurs par suite d'un refus d'octroi du concours de la force publique. A l'echelle nationale, ce besoin d'indemnisation supplementaire genere par le report de l'execution du « stock » de CFP accumule en 2020 pourrait se traduire par un abondement du programme estime a hauteur de 80 millions d'euros pour l'annee 2021 31. Recommandation 50. Abonder le budget du programme 216 destiné à indemniser les propriétaires bailleurs pour lesquels l'exécution de la force publique sera reportée au-delà de la fin de la trêve hivernale ou suspendue dans l'attente d'un relogement effectif des occupants. 7.2.6 Valoriser et partager les retours d'expériences autour de cellules d'urgence L'observatoire des impayes cree en novembre 2020 va permettre un suivi de leur evolution. Pour l'instant, les amortisseurs de la crise economique due a la crise sanitaire mis en place par le gouvernement ont pu limiter cette augmentation. Cependant, et parce que nous faisons face à une crise inédite et donc à des conséquences difficilement quantifiables, il est impératif de se préparer à plusieurs scénarios et d'être en capacité le moment venu d'actionner des leviers supplémentaires d'aides aux locataires. L'exemple d'Action Logement, qui a mis en place un dispositif de secours temporaire pour aider les personnes les plus vulnérables parmi les actifs et les jeunes, a été très pertinente. 31 Estimation du pole prevention des expulsions de la DIHAL PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 68/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN Au 30 novembre 2020, Action Logement comptait pres de 78 000 aides distribuees dans le cadre du deploiement d'une aide exceptionnelle. La depense s'est elevee a 23,5 millions d'euros. L'aide consiste en une subvention de 150 euros par mois sur 2 mois pour les salaries ayant eu a faire face a une baisse d'au moins 15 % de leurs revenus. Renouvelable une fois, elle est accordee sous plafond de ressources des menages (ressources a 1,5 SMIC). La depense de logement devait representer plus de 40% des revenus impactes par la crise. Action Logement Services a estime le nombre de beneficiaires potentiels a environ 300 000 salaries. Le public touche a fin novembre represente donc a peine le tiers du public potentiel. En octobre, les partenaires sociaux ont engage une nouvelle discussion avec l'Etat pour faire valoir que le deploiement de cette aide devait etre renforce. Ainsi, le taux d'effort a ete abaisse (passe de 40% a 33 %) et le plafond d'aides renforce de 300 a 900 (6 versements de 150 ) pour la seule categorie des demandeurs d'emplois ou des beneficiaires qui auraient perdu leur emploi depuis leur premiere demande. En ce qui concerne le risque locatif des jeunes, 95 millions d'euros ont ete mobilises sur la meme periode pour les jeunes de moins de 30 ans en alternance, avec des subventions allant de 10 euros a 100 euros, flechees sur le paiement du loyer. Lors du confinement de mars 2020, de nombreuses collectivités territoriales ont adapte leur reglement FSL a l'urgence sociale : augmentation des seuils, creation d'un fonds d'urgence d'aide a la quittance ou a l'impaye, par exemple. Dans certains départements, le raccourcissement des délais de traitement des dossiers (entre 15 jours et 3 mois hors periode de crise) a ete impulse grace a la dematerialisation partielle ou totale de la procedure. Pour accelerer l'instruction des dossiers, certains departements comme le Nord ont egalement repousse a un temps ulterieur la remise des pieces justificatives necessaires a l'octroi du FSL. L'interet etait de deroger aux regles habituellement en vigueur sans avoir a modifier le reglement interieur de chaque FSL, d'ou le choix de l'assouplissement des delais ou des conditions d'acceptation des dossiers. Des dispositifs specifiques ont egalement ete mis en place afin d'eponger rapidement les dettes de nouveaux publics. D'autres FSL ont fait le choix de la révision du règlement intérieur, notamment pour modifier les criteres de calcul des ressources du demandeur (pour la reduire par exemple au dernier mois ecoule, comme dans le Finistere) ou ouvrir des plafonds derogatoires. On a également pu assister à un degré de réactivité important de la part des métropoles. La Metropole de Lyon a par exemple vote en juin un fonds d'urgence de 1 300 000 euros pour les impayes de loyers et de charges des locataires non-eligibles au FSL. Dans le meme temps, Brest Metropole a mis en place un « fonds d'urgence logement » de 300 000 euros a destination des proprietaires, menages et locataires dont le niveau de revenus a baisse par suite du confinement. La Metropole de Rennes a quant a elle directement abonde le FSL a hauteur de 500 000 euros. Meme si ces acteurs reconnaissent qu'il existe encore des freins et des ecueils, ces initiatives meritent d'etre rapidement evaluees afin de pouvoir les deployer sur tout le territoire pour amortir de nouveaux impayes de loyers. Comme l'a souligne la Fondation Abbe Pierre32, les collectivites en charge du FSL vont devoir faire 32Fondation Abbe Pierre - Prevenir les impayes et les expulsions dans le contexte d'Etat d'urgence sanitaire ­ Septembre 2020 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 69/86 preuve de reactivite et de simplicite. L'urgence impose de savoir privilegier une decision rapide et effective plutot que de s'assurer de la presence obligatoire de tous les membres d'une commission. D'autres pratiques innovantes ont ete mise en place sur notre territoire, il serait ainsi pertinent de les repertorier et de les objectiver pour creer une boîte a outil en debut d'annee 2021. Afin de partager les retours d'experience sur ces dispositifs, il me semble opportun de mettre en place une conference dite « PEX » reunissant les collectivites competentes sur le FSL a l'initiative du Ministere de la Transition ecologique, charge du logement ou de la DIHAL. Recommandation 51. Mettre en place une conférence PEX début 2021 réunissant les collectivités territoriales pour partager les pratiques innovantes en matière de FSL. Recommandation 52. Prévoir les moyens d'agir en urgence pour soutenir les ménages fragiles impactés financièrement par la crise. Recommandation 53. Mettre en place début 2021 une cellule d'urgence dans chaque département destiné à coordonner les efforts de tous les acteurs de la politique de prévention des expulsions et à piloter un plan d'actions. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 70/86 Annexes Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 71/86 1 Lettre de mission du Premier ministre Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 72/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 73/86 2 Actes d'huissiers lors de la procédure d'expulsion33 Avec l'aimable autorisation du president de la chambre nationale des commissaires de justice Patrick Sannino et de Maurice Lotte, Huissier de justice 33 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 74/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 75/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 76/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 77/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 78/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 79/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 80/86 3 Liste des services et personnes auditionnées Administration Banque de France (Mark Béguery, responsable du pôle surendettement, et Véronique BensaidCohen, conseillère parlementaire auprès du Gouverneur.) Direction des libertés publiques et des affaires juridiques du Ministère de l'Intérieur (Pascale Léglise, adjointe au directeur des libertés publiques et des affaires juridiques, Laurent Hanoteaux, adjoint au chef du service du conseil juridique et du contentieux). Direction des affaires civiles et du sceau du Ministère de la justice (Catherine Raynouard, sous-directrice du droit civil, Françoise Catton, cheffe du bureau du droit processuel et du droit social, Elodie Guennec, adjointe à la cheffe du bureau). Délégation interministérielle à l'hébergement et au logement (Sylvain Mathieu, délégué interministériel). Pôle prévention des expulsions locatives de la DIHAL (Benoît Linot, responsable de pôle et Hugo Ruiz, chef de projet). Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (Laurent BRESSON, sous-directeur Politiques de l'habitat, Benoît AMEYE, adjoint au sous-directeur du Financement de l'économie, du Logement et de l'aménagement). Haut comité pour le logement des personnes défavorisées (René Dutrey, secrétaire général). Direction départementale de la cohésion sociale du Vaucluse (Christine Maison, directrice de la DDCS et Brigitte Plane, Responsable du pôle logement et hébergement). Agence nationale de l'information sur le logement (Roselyne Conan, directrice générale et Louis du Merle, responsable du Pôle juridique). Agence départementale de l'information sur le logement du Gard (Yves Maurel, directeur adjoint). Direction départementale de la sécurité publique de l'Hérault (Philippe Plégat, commandant divisionnaire). Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement Occitanie (Fabrice Clastre, chargé du développement du logement social). Caisse d'allocations familiales de l'Hérault (Thierry Mathieu, directeur, Mylaine Fontange (directrice des affaires sociales). Caisse nationale d'allocations familiales (Jean-Marc Bedon, responsable du pôle « Logement et vie sociale », Frédéric Marinacce, directeur des politiques familiales et sociales). Plan Bâtiment Durable et Adlis (Philippe Pelletier, directeur, avocat au barreau de paris). - - - - - - - - - - - - - Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 81/86 - Direction régionale et interdépartementale de l'hébergement et du logement d'Île-deFrance (Isabelle Rougier, directrice, Patrick Le Gall, directeur adjoint, Pascale Mossan, cheffe du service action logement et prévention des expulsions, Simon Vidal, adjoint à la cheffe de service, Christine Richard, chargée de la définition de la stratégie de prévention). Préfecture de Seine-Saint-Denis (Anne-Claire Mialot, préfète déléguée pour l'égalité des chances). Direction départementale de la cohésion sociale de la Côte d'Or (Nicolas Nibourel, directeur départemental délégué). Direction départementale de la cohésion sociale du Nord (Sylvie Labare, cheffe de la mission Accès au Logement, Delphine Wyart, cheffe du pôle prévention et expulsions). Direction départementale de la cohésion sociale du Vaucluse (Christine Maison, directrice, Brigitte Plane, cheffe du pôle accès et maintien dans le logement). Direction départementale de la cohésion sociale de l'Hérault (Pascale Mathey, directrice adjointe). Action Logement Services (Jean-Michel Royo, directeur général, Corinne Bedos-Toulgoat, directrice du développement et de l'offre, Marie-Noëlle Granjard, suivi du développement produit). - - - - - - Collectivités territoriales Lille Métropole Habitat (José ARNOUX, directeur adjoint de Lille Métropole Habitat) Montpellier Méditerranée Métropole (Michel CALVO, adjoint au maire de Montpellier) Métropole du Grand Lyon (Corinne AUBIN-VASSELIN, directrice générale adjointe et Magali ROBERT, cheffe du service Inclusion par le logement). Fédérations immobilières, agences at associations de propriétaires Fédération nationale de l'immobilier (Jean-Marc Torrollion, président, et Bénédicte Rouault, cheffe de cabinet). Chambre des propriétaires du Grand Paris (Jean PINSOLLE, président). Union nationale des propriétaires immobiliers (Pierre Hautus, président). Fédération SOLIHA Solidaires pour l'Habitat (Marie-Françoise Lavieville, vice-présidente, Kamel Senni, responsable du Pôle Logement d'Abord, Dorine Branget, chargée de mission gestion locative sociale). Erilia (William Hochedez, chef de service prévention sociale et contentieux locatif, Arold Ballesteros, responsable du pôle contentieux locatif sur Montpellier, Bruno Favre, directeur d'agence Montpellier). Foncia (Guillemette Roger, directrice du contentieux). - - - Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 82/86 - Gallian (Alain Ledemay, directeur général, Gérard Col, président du conseil d'administration). Union sociale de l'habitat (Thierry ASSELIN, Directeur des politiques urbaines et sociales, Dominique HOORENS, directeur des études économiques, Maryse SYLVESTRE, conseillère politiques sociales, Delphine BAUDET-COLLINET, adjointe à la responsable du pôle politiques clientèles et sociales). Union des syndicats de l'immobilier (Denis Géniteau, Vice-président, Emmanuel Benhamou, juriste immobilier, Géraud Delvolvé, délégué général). Cercle des propriétaires (Gilbert Spéry, Président). - - Associations de lutte contre la pauvreté et la précarité Fédération des associations et des acteurs pour la promotion et l'insertion par le logement (Sébastien Cuny, délégué général, Thierry Debrand, directeur de FREHA et Sylvain Camuzat, directeur de l'association AVDL de Villeurbanne). Fondation Abbé Pierre (Marie Rothhahn, chargée de mission action juridique et Manuel Domergue, directeur des études) et Fondation Abbé Pierre de Montpellier (Sylvie Chamvoux, directrice agence Occitanie). Association Droit au Logement (Jean-Baptiste Eyraud Porte-parole, Micheline Unger, responsable). Fédération santé habitat (Léonard Nzitunga, président, Laurent Thévenin, délégué national) Groupe de recherche pour l'aide et l'accès au logement (Olivier Desrousseaux, Président, Maïté Parent, chargée de mission). Action Tank Entreprise et Pauvreté (Jacques Berger, directeur, Julie Laurent, cheffe de projet Innovation sociale, Guillaume Ginebre, chef de projet). Confédération nationale du logement (Eddie Jacquemart, président) Fondation recherche sociale et Gestare (Didier Vanoni et Clémence Petit). Secours catholique (Fanny Plançon, chargée de projets, Romain Bordeyne, chargé de mission). - - - - - Magistrats, avocats et huissiers Syndicat national de la magistrature (Nils Monsarrat, secrétaire national, et Anne-Sophie Wallach, vice-présidente). Chambre nationale des commissaires de justice (Patrick Sannino, Président, Paul Schiepan, chef de cabinet du président, Maurice Lotte, huissier). - Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 83/86 4 Glossaire AAH : Allocation Adulte Handicape. AAP : Appel a Projet. ACT : Appartements de Coordination Therapeutique. ADIL : Agences departementales pour l'information sur le logement. AGBF : Mesure d'Aide a la Gestion du Budget Familial. AL : Allocation logement. ALF : Allocation logement a caractere familial. ALPIL : Action pour l'Insertion Par le Logement. ALS : Allocation logement a caractere social. ALT : Aide au logement temporaire. ALUR : loi du 24 mars 2014 pour l'Acces au Logement et un Urbanisme Renove. ANAH : Agence Nationale de l'Habitat. ANIL : Agence Nationale pour l'Information sur le Logement. APAGL : Association Pour l'Acces aux Garanties Locatives. APPEL : Action Permanente de Prevention des Expulsions Locatives. APL : Aide Personnalisee au Logement. ASLL : Accompagnement Social Lie au Logement. ASPA : Allocation de Solidarite aux Personnes Agees. AVDL : Accompagnement Vers et Dans le Logement. CAF : Caisse d'Allocations Familiales. CAL : Commission d'Attribution de Logement. CCAPEX : Commission de Coordination des Actions de Prevention des Expulsions Locatives. CCAS : Centre communal d'action sociale. CCH : Code la Construction et de l'Habitation. CDAPL : Commission Departementale d'Aide Publique au Logement. CDC : Commission Departementale de Conciliation. CDPEL : Charte Departementale de Prevention des Expulsions Locatives. CESF : Conseiller en Economie Sociale et Familiale. CFP : Concours de la Force Publique. CIDFF : Centre d'Information sur les Droits des Femmes et des Familles. CDP : Commandement de payer ; CIL : Comite Interprofessionnel du Logement. CLIC : Commission Locale d'Impayes de Loyer. CNAF : Caisse Nationale d'Allocations Familiales. CNAV : Caisse Nationale d'Assurance Vieillesse. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 84/86 CNIL : Commission Nationale de l'Informatique et des Libertes. CNIS : Conseil national de l'information Statistique. COMDALO : application de gestion du Droit Au Logement Opposable. CREDOC : Centre de Recherche pour l'Etude et l'Observation des Conditions de vie. CUS : Convention d'Utilite Sociale. DAL : Association Droit Au Logement. DALO: Droit Au Logement Opposable. DDASS : Direction Departementale des Affaires Sanitaires et Sociales. DDCS : Direction Departementale de la Cohesion Sociale. DGCS : Direction Departementale de la Cohesion Sociale. DIHAL : Delegation Interministerielle pour l'Hebergement et l'Acces au Logement. DREAL : Direction Regionale de l'Environnement, de l'Amenagement et du Logement. DREES : Direction de la recherche, des etudes, de l'evaluation et des statistiques. DRIHL : Direction Regionale et Interdepartementale de l'Hebergement et du Logement. ENL : loi du 13 juillet 2006 portant Engagement National pour le Logement. EPCI : Etablissement Public de Cooperation Intercommunal. EXPLOC : plateforme de traçabilite dans les procedures engagees. FAP : Fondation Abbe Pierre. FILOCOM : Fichier du Logement Communal. FNAVDL : Fonds National d'Accompagnement Vers et Dans le Logement. FSL : Fonds de Solidarite Logement. GIP : Groupement d'interet public. GLI : Garantie aux Loyers Impayes. GRL : Garantie des Risques Locatifs. HCLPD : Haut Comite pour le Logement des Personnes Defavorisees. HLM : Habitation a Loyer Modere. IGA : Inspection Generale de l'Administration. IGAS : Inspection Generale des Affaires Sociales. IGSJ : Inspection Generale de le Justice. INSEE : Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques. IRES : Institut de Recherches Economiques et Sociales. IRL : Indice de Reference des Loyers. MAJ : Mesure d'Accompagnement Judiciaire. MASP : Mesure d'Accompagnement Social Personnalise. MDS : Maison Departementale des Solidarites. MSA : Mutualite Sociale Agricole. MASP : Mesure d'Accompagnement Social Personnalisee. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 85/86 OFGPL : Observatoire des Finances et de la Gestion Publique Locales. ONPES : Observatoire National de la Pauvrete et de l'Exclusion Sociale. PCS : Protocole de Cohesion Sociale. PDALHPD : Plan Departemental pour le Logement et l'Hebergement des Personnes Defavorisees. PDALPD : Plan Departemental pour le Logement des Personnes Defavorisees. PEEC : Participation des Employeurs a l'Effort de Construction. PLH : Programme Local de l'Habitat. RGPD : Reglement General sur la Protection des Donnees. RSOI : Retour social sur investissement. SIAO : Service Integre de l'Accueil et de l'Orientation. SOeS : Service de l'Observation et des Statistiques. UDAF: Union Departementale des Associations Familiales. UDCCAS: Union Departementale des Centres Communaux d'Action Sociale. UNPI : Union Nationale de la Propriete Immobiliere. USH : Union Sociale pour l'Habitat. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 86/86 INVALIDE) (ATTENTION: OPTION consolidees disponibles pour l'annee 2018 (dans le logiciel EXPLOC et par deduction des donnees USH) : Pour les 4,5 millions de locataires du parc social : - 138.000 commandements de payer (CDP), soit 3,1% du parc social 68.000 assignations, soit 1,5% 35.000 decisions de justice, soit 0,8% 31.000 commandements de quitter les lieux (CQL), soit 0,7% 20.000 demandes de concours de la force publique (CFP), soit 0,4% 8.000 expulsions realisees avec le CFP, soit 0,2% Pour les 7 millions de locataires du parc privé : - 352.000 commandements de payer (CDP), soit 4,9% du parc privé 86.000 assignations, soit 1,2% 85.000 decisions de justice, soit 1,2% 37.200 commandements de quitter les lieux (CQL), soit 0,5% 29.200 demandes de concours de la force publique (CFP), soit 0,4% 8.000 expulsions realisees avec le CFP, soit 0,1% Abstraction faite du patrimoine des investisseurs institutionnels (plus tres nombreux dans le parc prive depuis trente ans) 15 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 36/86 Impact du sequencement des procedures pour les locataires : Source : mission a partir des donnees EXPLOC et USH au titre de 2018 Ce sequencement met en evidence les differences de gestion entre parc social et parc prive. Les bailleurs sociaux conduisent des démarches de prévention, de suivi et de relance très tôt, ce qui induit un moindre pourcentage de signification par CDP (3,1% du parc). A contrario, les bailleurs privés qui arrivent au CDP, sont plus nombreux en proportion (4,9%) mais ils obtiennent de vrais résultats à ce stade, puisque a la suite des CDP, ils n'engagent de procédures judiciaires que dans 1,2% des cas. Ce sont donc 266.000 locataires du parc privé qui sont a priori supposés avoir repris le paiement de leur loyer ou pu obtenir un plan d'apurement de leurs creances locatives, ou bien ont opte pour se reloger par ailleurs, mais qui ne sont pas « embarqués » vers une expulsion de leur logement (sauf si la situation se degrade a nouveau, mais il y a en quelque sorte un temps de repit). Les entrées en procédure judiciaire sont assez équivalentes en nombre et en pourcentage entre les deux types de gestion, mais les décisions de justice sont beaucoup plus systématiquement favorables (à 98,8%) aux recours exercés par les bailleurs du parc privé (85.000 decisions pour 86.000 assignations), alors qu'elles representent à peine plus de 50% des recours exercés par les bailleurs sociaux. Au final, le nombre d'expulsions réalisées avec le concours de la force publique est equivalent en nombre (8.000 locataires du parc social et autant du parc prive), mais pour près de deux fois plus de logements dans le parc privé, donc en plus forte proportion dans le parc social (0,2% contre 0,1%). Ces resultats meritent d'etre etudies a la loupe, au cas par cas, au plus près des situations locales, très diverses. Le cadre partenarial a renforcer au niveau des CCAPEX doit en etre l'occasion. Cela plaide aussi pour un renforcement de l'instruction. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 37/86 3.2 Améliorer l'instruction des affaires dans le cadre des procédures judiciaires Les tribunaux judiciaires connaissent aujourd'hui un engorgement, du fait notamment des recours pour impayes de loyers. Cette « sur-judiciarisation » induit également des délais très longs pour obtenir une audience. C'est variable selon les territoires, mais il faut compter de 2 à 10 mois d'attente. Le legislateur a retenu 4 etapes censees creer une prise de conscience du locataire avec des delais successifs pour reagir (4 x 2 mois), mais en réalité, la procédure s'étend en moyenne sur près de 18 mois (cf.2). Autant dire que toutes les etapes durent plus longtemps. Il est indispensable d'obtenir une meilleure maîtrise des delais de traitement de chaque etape de la procedure. Dans la meme volonte de transparence, le depute Mickael NOGAL 16 , a propose la creation d'un observatoire temporaire specialement dedie a ce sujet. Il y a effectivement un sujet récurrent à traiter, préjudiciable aux parties prenantes et par voie de conséquence au marché de l'offre locative. Recommandation 12. Confier à une mission spécifique à caractère interministériel un diagnostic des causes de la lenteur des délais des procédures conduisant à l'expulsion locative. Le délai minimal de 2 mois imparti entre l'assignation et l'audience, cense permettre d'etablir et de fournir au juge un diagnostic eclairant sur la situation du locataire endette, est une période que l'on pourrait considérer comme « morte », dans la mesure où ce diagnostic social et financier est insuffisamment établi, ce qui aggrave de nombreuses situations. Une réflexion concertée avec les collectivités semble nécessaire sur les moyens dedies a la realisation du diagnostic social et financier. A ce jour, ce diagnostic est confie aux travailleurs sociaux des conseils departementaux en grande majorite. Or les auditions ont mis en avant de nombreux ecueils : ils sont realises trop tard dans la procedure (assignation) ; ils ne sont pas systematiquement realises (plus des deux tiers ne seraient pas remis aux juges) ; certains travailleurs sociaux n'ont pas les competences requises pour effectuer ce type de diagnostics ; par manque de temps et souvent parce que la pratique du « Aller vers » a tres fortement diminue depuis de nombreuses annees, les propositions de rendez-vous sont rarement honorees par les locataires (des raisons de pudeur, de repli sur soi ne sont pas absentes a priori). Or le juge s'appuie sur le diagnostic social et financier pour prendre sa décision. Je retiens l'accord de nombreux acteurs sur la necessite d'ameliorer le dispositif en faisant du CDP le moment declencheur du diagnostic. Il est evident qu'une telle modification dans le processus d'instruction imposerait de disposer de moyens humains beaucoup plus importants puisque le nombre de CDP est pres de 3 fois superieur au nombre d'assignations. Il serait opportun de formaliser des propositions en concertation avec les collectivites territoriales, par 16 Cf. Rapport NOGAL : « Louer en confiance » 2019 PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 38/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN le biais de nouvelles experimentations, dans le cadre legislatif actuel. Certaines bonnes pratiques, comme la MOUS confiee a l'ADIL du Vaucluse meriteraient d'etre dupliquees (cf. § 2.4). Recommandation 13. Lancer un appel à manifestation d'intérêt auprès des départements et des métropoles pour expérimenter de nouvelles organisations visant à généraliser les diagnostics sociaux et financiers destinés aux juges et à les produire le plus en amont possible - dès le CDP - à l'intention des CCAPEX. Il s'ajoute a cette sous-instruction patente, une forte absence des locataires assignés aux audiences, rendant alors le contradictoire quasi inopérant. Cette présence est très variable selon les départements, les determinants de la presence des locataires a l'audience sont multiples, on note que le locataire - comme l'a souligne Camille François17 - est bien plus present a l'audience lorsqu'il est accompagne par un travailleur social ou s'il est loge dans le parc social. *Source : mission a partir des donnees EXPLOC au titre de 2018 sur les departements metropolitains enregistrant plus de 500 procedures judiciaires d'expulsions locatives ­ pourcentage sur la base du nombre d'assignations Ce constat devrait également retenir l'attention des collectivités disposant de travailleurs sociaux et des CCAPEX pour établir des actions d'accompagnement renforcées, en lien avec les SIAO. 3.3 Mieux utiliser le commandement de payer (CDP) en prévention et permettre une phase de négociation à confier à l'huissier Le commandement de payer est effectivement une étape décisive pour la politique de prevention des expulsions. Près de 500.000 CDP sont délivrés par an en moyenne en France, dont les deuxtiers dans le parc privé. La delivrance s'effectue par les huissiers a domicile et constitue le premier acte de la procedure. Les huissiers connaissent parfaitement les territoires et malgré encore quelques freins pour accéder aux parties communes des immeubles, ils accedent dans la plupart des cas au logement du locataire. Ce frein devrait etre leve. 17 Cf. These Camille François deja citee PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 39/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN Recommandation 14. Permettre l'accès des huissiers aux parties communes des immeubles afin qu'ils puissent entrer en contact direct avec les personnes menacées d'expulsion ou, à défaut, déposer leurs actes et informations relatifs à la procédure et aux dispositifs de prévention dans les boîtes aux lettres. Ce moment crucial est le plus souvent le point de rupture de confiance entre locataire et proprietaire, alors que cette etape devrait permettre des solutions. La connaissance renforcee de chaque situation individuelle des le CDP permettrait d'orienter le plus souvent possible vers une solution durable autre que judiciaire. Il apparaît donc essentiel que le rôle de l'huissier soit élargi car ce premier contact présentiel est déterminant pour la suite de la procédure. Des mesures doivent etre prises, en urgence, tant pour la période actuelle que pour le long terme. L'huissier de justice pourrait se voir confier un rôle de négociateur avec l'accord du bailleur. La periode entre le CDP et l'assignation pourrait etre mise a profit pour engager une phase de dialogue et de negociation amiable. Ce temps de negociation amiable pourrait beneficier d'une periode supplementaire d'un mois, a comptabiliser avant l'assignation (soit 2 + 1 mois). Des lors, deux hypotheses : un accord est trouve durant la periode de 3 mois : alors l'huissier demande au juge une audience en refere et s'assure que la date d'audience proposee est bien posterieure a la periode ouverte par le commandement de payer afin que le juge puisse constater l'acquisition de la clause resolutoire ; aucun accord n'est trouve durant la periode de 3 mois : alors l'huissier signifie l'assignation et la periode anterieurement incompressible entre l'assignation et l'audience est alors reduite a 1 mois au lieu de 2. - Cette evolution semble recueillir un assentiment de tous les acteurs, tant il est notoire que les 2 mois qui suivent l'assignation en vue de l'audience peuvent etre consideres comme une periode « morte », cause d'une accentuation de la dette. Cela suppose que le diagnostic social et financier ait bien ete effectue en amont. Recommandation 15. Instaurer par voie législative une phase de négociation qui pourrait être conduite par les huissiers de justice sur mandat des bailleurs avant l'assignation. Augmenter d'un mois le délai qui précède l'assignation pour ce faire et réduire d'autant le délai légal qui suit l'assignation avant l'audience en cas d'échec. 3.4 Abaisser ou supprimer les seuils de signalement des CDP aux CCAPEX Il conviendrait en outre de s'assurer que les CDP soient transmis le plus tot possible aux CCAPEX. Or, ces actes delivres par les huissiers de justice sont transmis aux CCAPEX selon des criteres de seuil fixes par arretes departementaux en application du decret n°2015-1384 du 30 octobre 2015. Le seuil peut etre fixe a partir de 3 mois d'impayes de loyers sans interruption ou un cumul de dette equivalent a au moins 3 mois de loyer et charge, et peut atteindre 6 mois, a l'appreciation des prefets de departements. Ce seuil minimal actuel est encore trop important, car une grande majorite des CDP ne sont pas Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 40/86 remontes aux CCAPEX ni a la base de donnees EXPLOC. Si notre objectif, est d'agir le plus en amont possible, il est clairement contradictoire de ne pas se saisir de tous les CDP. Recommandation 16. Supprimer le seuil fixé par décret pour le signalement des CDP à la CCAPEX par les huissiers de justice, afin de pouvoir agir sur le traitement précoce de tous les impayés. 3.5 Rendre plus lisibles les actes de la procédure pour diminuer le taux de non-réponse Au regard des differents actes de la procédure que nous avons pu obtenir, force est de constater qu'ils sont très nombreux et très complexes. Les CDP, les assignations et les CQL (cf. voir annexes) sont des formulaires fastidieux qui ont tendance a effrayer et decourager les locataires vises par ces actes. Meme constat pour les courriers transmis par les differents acteurs (Prefecture, CAF). Or ces actes et ces courriers sont essentiels pour que le locataire se sente implique dans la procedure et puisse se tourner le plus rapidement possible vers un tiers et active les aides auxquels il a droit. Recommandation 17. Simplifier le contenu et l'accès aux informations transmises aux locataires dans le cadre de la procédure d'expulsion en utilisant la méthodologie "Facile à lire et à comprendre" (FALC) promue au niveau gouvernemental (Sms locataires aux différents stades de la procédure : actes d'huissiers, courriers transmis par les préfectures). 3.6 Lutter contre le non-recours au droit, une des plus grandes défaillances de notre société De tres nombreux cas illustrent que de nombreux citoyens basculent dans la precarite alors que des aides existent et les concernent : Un proprietaire qui se retrouve en grande difficulte financiere parce qu'il n'a pas connaissance des dispositifs d'indemnisations. Un locataire, qui lors d'une audience decouvre qu'il pouvait pretendre a l'aide d'action logement ou a une aide FSL maintien. Or, autour des nombreux acteurs et des nombreuses étapes, il manque un fil conducteur, une porte d'entrée. A travers les nombreuses auditions, il apparaît clairement que les competences necessaires au deroulement de cette longue procedure sont juridiques. Ainsi, il conviendrait de confier aux ADIL plus de responsabilités. Elles pourraient dans un premier temps jouer le role de controle du decompte presente aux locataires lors du CDP (plus de 2/3 seraient errones) ; puis celui de l'informateur des aides et soutiens existants a ce meme stade. Nous avons constate que la clarte et la diffusion des aides a la procedure d'expulsion etaient deficientes. Et pourtant, elles sont nombreuses et efficaces quand elles sont employees au bon moment. L'ADIL pourrait donc avoir un role preponderant dans la diffusion de ces informations et pour ce faire Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 41/86 il est imperatif qu'elle s'appuie sur ses antennes departementales car de nombreuses aides sont territorialisees. En agissant ainsi plus en amont, les locataires et proprietaires jusqu'a present depourvus d'informations pourraient apprehender dans de meilleures conditions les moyens a leur disposition. Recommandation 18. Confier à l'huissier, lors de la délivrance du CDP, le soin de remettre au locataire une notice détaillant toutes les aides et accompagnements appropriés. Solliciter l'ANIL pour l'élaboration de cette notice en lien avec les ADIL afin d'adapter les aides et les contacts à chaque département. Cette notice devrait inviter le locataire à prendre contact avec une agence de proximité de l'ADIL avec pour première consigne de vérifier le décompte qui lui a été remis. 3.7 Prendre des dispositions pour éviter le refus, par certains propriétaires, du versement du FSL destiné au maintien du locataire dans le logement De nombreux acteurs dont l'association DAL, la FAP, ont evoque le refus de certains bailleurs d'accepter le FSL, pour ne pas ralentir la procedure d'expulsion. Ces cas sont rares mais meriteraient d'etre etudies afin que le droit soit respecte et que les pratiques abusives soient denoncees. Depuis la loi ALUR de 2014, les bailleurs n'ont plus le droit de refuser le FSL. Cependant, il est encore constate que certains trouvent le moyen de contourner cette obligation, en ne fournissant pas leurs coordonnees bancaires pour en eviter le versement. Recommandation 19. Faire évoluer la loi pour rendre effectif l'octroi du FSL au bailleur. 3.8 Mobiliser plus souvent les mesures existantes d'accompagnement social personnalisé (MASP) Les MASP ont ete creees par la loi du 5 mars 2007 notamment aux fins de prevention des expulsions locatives. Definies aux articles L. 271-1 et suivants du Code de l'action sociale et des familles, ces mesures administratives sont mises en oeuvre par les services sociaux des departements a destination de personnes majeures en difficulte, notamment dans la gestion de leurs ressources et de leurs allocations, notamment lorsqu'il y a un risque pour leur securite ou leur sante. Les deux premiers niveaux de MASP 1 et 2 (accompagnement social et budgetaire et gestion des prestations sociales) sont contractuels avec un engagement reciproque, tandis que le versement direct des prestations sociales au bailleur sous conditions (le MASP 3) est contraignant. Cette derniere possibilite peut etre dans certaines situations une securite essentielle pour maintenir le menage dans son logement et une assurance pour le bailleur. Or, cette possibilite est rarement demandee par le conseil departemental malgre les preconisations des CCAPEX alors qu'il s'agit d'une veritable solution pour perenniser certaines situations ou contraindre les locataires qui disposent des ressources financieres suffisantes pour le paiement notamment du residuel du loyer. Afin de rendre ces demandes d'accompagnement effectives, les CCAPEX pourrait saisir le prefet pour qu'il effectue cette demande. Recommandation 20. Permettre aux CCAPEX de saisir le préfet pour une demande de MASP 3. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 42/86 3.9 Intégrer la prévention des troubles pathologiques du comportement, notamment psychiques Le facteur santé n'était que trop rarement pris en compte dans la procédure d'expulsion locative, alors que les pathologies lourdes dont peuvent etre atteints certains locataires ont des consequences en matiere de repli sur soi, d'isolement et de desengagement vis-a-vis des obligations administratives. Les gestionnaires d'appartements de coordination therapeutique (ACT) constatent regulierement les difficultes des bailleurs, syndics et coproprietaires a gerer les relations avec ce type de public en difficulte de sante. De fait, l'administration et les bailleurs disposent de peu de moyens de detection de ce type de locataires, et le reperage des difficultes potentielles provoquees par la maladie A ce titre, l'instruction du 27 avril 2017 relative a la campagne budgetaire pour l'annee 2017 des etablissements et services medico-sociaux accueillant des personnes confrontees a des difficultes specifiques a mis en place une experimentation dans 5 regions pour que les ACT puissent intervenir directement au domicile des personnes sans attendre leur mise a la rue. Recommandation 21. Transmettre aux ADIL la cartographie des ressources territoriales en matière de santé mentale et leurs acteurs (Santé Mentale France). 3.10 Renforcer les liens entre les magistrats et les autres acteurs Il y a une inégalité face à la procédure, faute d'une doctrine suffisamment partagée quant à la manière de sortir des situations d'impayés de loyers. Les magistrats manquent trop souvent d'informations pour accomplir leur role dans de bonnes conditions. Les partenaires relevent cependant de fortes disparités dans les décisions de justice, ce qui donne des resultats contrastes suivant les departements et presente un risque d'inegalite de traitement. Ainsi, certains departements connaissent des decisions d'expulsion ferme dans moins de la moitie des cas, alors que d'autres les constatent sur plus de huit decisions sur dix. De telles differences apparaissent egalement entre departements pourtant limitrophes et similaires aux plans sociologique, demographique et economique. *Source : mission a partir des donnees EXPLOC au titre de 2018 sur les departements metropolitains enregistrant plus de 500 procedures judiciaires d'expulsions locatives ­ pourcentage sur la base du nombre d'assignations Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 43/86 Par ailleurs, les magistrats expliquent les raisons pour lesquelles l'apurement des dettes est souvent privilégié par rapport a la resiliation du bail et le « delogement » qui l'accompagne. Sont evoques notamment l'attachement d'une personne a son logement et les reperes sociaux indispensables a son retablissement. Mais parallelement, la mise en place de plans d'apurement s'avère ne pas être toujours concluante sur le court et moyen terme, ce qui remet alors en cause le choix effectue, et entraîne de facto un allongement de situations inconfortables pour les proprietaires comme pour les locataires. C'est pourquoi il semble d'autant plus imperatif de disposer tres tot de suffisamment d'elements sociaux et financiers de diagnostic, pour eviter d'etre trop indifferemment conduit a la procedure judiciaire et trop indifferemment oriente vers l'apurement versus l'expulsion et le relogement. Les partenariats avec le monde de la justice pourraient être renforcés, dans la logique de mobiliser des outils (partage d'informations entre CCAPEX et magistrats) ou d'animer et de renforcer le reseau local des conciliateurs de justice ainsi que le role des huissiers comme je le propose. Un travail de sensibilisation aupres des juges et des greffiers serait utile pour permettre une meilleure comprehension des logiques de chacun et tendre a une harmonisation doctrinale. Et puis la prise en compte de l'offre de logements susceptible d'être mobilisée à court terme pourrait etre decisive dans le cadre de l'instruction judiciaire (cf. § 4). Recommandation 22. Renforcer les liens informels entre les magistrats, les services préfectoraux, ceux de l'aide sociale des collectivités et les bailleurs, en lien avec les CCAPEX. 3.11 Poursuivre le dialogue sur la « mauvaise foi » Les auditions ont permis de constater une forte occurrence d'un debat autour des notions de « bonne » ou de « mauvaise foi » des locataires. De façon generale, elles ont pointe le fait que la grande majorite de ces derniers presentaient la volonte de payer le loyer. La loi n'en donnant pas de definition etayee, cette notion est laissee a l'appreciation subjective de chacun (locataire, bailleur), elle releve principalement de l'appreciation et de la responsabilite du juge. Si l'article 2274 du Code civil dispose que la bonne foi se presume et que la mauvaise foi se demontre, seul le juge du fond est habilité à les établir. En complement de ces principes, la Cour de cassation a precise le cadre de l'appreciation du juge dans sa jurisprudence, notamment dans les situations de surendettement : d'une part, la bonne foi du debiteur est toujours presumee. D'autre part, les consequences de l'etablissement de la mauvaise foi sont personnelles, ce qui signifie que les effets juridiques ne peuvent etre etendus au conjoint ou au concubin. De la meme maniere, la mauvaise foi n'est pas une notion figee : si le debiteur produit des elements nouveaux de nature a necessiter un reexamen de sa situation apres avoir ete considere comme etant de mauvaise foi dans un premier temps, le juge peut reviser sa position et en faire un debiteur de bonne foi. Enfin, la causalite entre la mauvaise foi et la situation du debiteur doit egalement etre directe : les fautes qui n'ont qu'un lien indirect avec les difficultes et le passif du debiteur (par exemple une faute professionnelle ayant conduit a un licenciement) ne peuvent etre considerees comme de nature a etablir sa mauvaise foi. La mission a releve dans le guide annexe a la circulaire du 22 mars 2017 relative a la mise en oeuvre du plan interministeriel de prevention des expulsions locatives, que l'administration avait tente d'etablir une approche de la notion de « mauvaise foi ». Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 44/86 Il pourrait etre utile de prolonger cette reflexion avec l'ensemble des representants des parties prenantes dans le cadre specifique de la procedure d'expulsion locative. Recommandation 23. Etablir une concertation au niveau national sur les déterminants de la « mauvaise foi » en matière d'impayés locatifs de façon à permettre aux dispositifs administratifs (FSL, CCAPEX, CAF) de mieux objectiver leurs avis, à l'instar de la commission de surendettement de la Banque de France. 3.12 Mieux réguler l'octroi du concours de la force publique (CFP), étape ultime avant l'expulsion Un premier constat s'impose sur le pourcentage contraste d'octroi du CFP entre departements (cf. schéma ci-dessous). La question de cet arbitrage, qui releve indeniablement de la responsabilite du prefet, depend de facteurs qui ne sont pas seulement du ressort de l'ordre public. *Source : mission a partir des donnees EXPLOC au titre de 2018 sur les departements metropolitains enregistrant plus de 500 procedures juridiques d'expulsions locatives ­ pourcentage sur la base du nombre d'assignations Bien qu'il ne puisse etre nie l'interet de disposer du CFP pour permettre l'execution des decisions judicaires, y compris des expulsions, tout a fait legitimes, il semble que les moyens dont disposent les commissariats a cette ultime etape ne soient pas en concordance avec l'importance de l'enjeu. En effet l'enquete sociale, familiale et financiere qui devrait etre effectuee par les commissariats a ce stade, n'est pas realisee de maniere uniforme sur le territoire, par manque de moyens, selon toute vraisemblance. Car, meme a l'extremite de cette procedure, a la veille de l'expulsion, les commissariats n'ont pas suffisamment d'informations (composition du menage, age des locataires). C'est ce qui ressort de nombreux temoignages de policiers. Or, les moyens rassembles par la chaîne des acteurs sociaux du departement y compris les bailleurs sociaux aupres des services prefectoraux devraient permettre a la fois de communiquer les informations disponibles, et de disposer egalement des alternatives a l'expulsion a cette ultime etape : relogement ou hebergement, notamment. A cet egard, le diagnostic social et financier, s'il etait etabli systematiquement et au plus tot, permettrait de transmettre aux services de police par l'intermediaire des services prefectoraux, les donnees essentielles a leur intervention. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 45/86 Recommandation 24. Autoriser la transmission aux commissariats, par l'intermédiaire des services préfectoraux, des données sociales et familiales présentes dans les diagnostics sociaux et financiers effectués en amont des procédures à destination des juges. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 46/86 4 Mobiliser l'offre disponible de logement au plus tôt L'inflexion a donner au processus consiste a envisager au plus tot une solution alternative au plan d'apurement des dettes d'un locataire, si celle-ci est vouee a l'echec, et cela au plus tard lorsque la composante operationnelle de la CCAPEX en etudie la situation. 4.1 Identifier l'offre de logements mobilisable à court et moyen termes C'est la raison pour laquelle il faut être en mesure d'identifier et de mobiliser une offre de logements locatifs a loyers tres moderes des ce stade. D'ou l'importance d'un protocole que l'Etat et les collectivites territoriales devraient signer avec les bailleurs sociaux dans chaque territoire. L'offre est cependant problématique, selon la tension de la demande et les capacités offertes par le flux induit par la rotation dans le parc social. S'y ajoute la dimension du niveau des loyers. Pourtant, quelles que soient les difficultes en la matiere, cette offre est toujours mobilisée à la fin du processus d'expulsion, lorsque la remise a la rue n'est pas admise par le prefet. Il y a donc une opportunité à saisir, que la crise sanitaire rend évidente : si l'expulsion peut etre la seule solution par rapport a une situation donnee, dans le respect des procedures, celle-ci n'est acceptable qu'à la condition d'avoir identifié au préalable une solution concrète de relogement ou d'hébergement adapté. Cette cause me paraît devoir être étendue au-delà du contexte de la crise sanitaire, et notamment dès la sortie de la trêve hivernale, au printemps 2021. Tout doit etre fait dans cette logique. Dans le cadre strategique defini par le plan gouvernemental du « Logement d'abord », l'hébergement constitue une alternative résiduelle, qui doit etre reservee aux personnes les plus en difficultes mentales, psychiques ou physiques avec l'accompagnement social indispensable a leur reinsertion. Le parc social présente l'avantage de permettre d'user des modalités de réservation ouvertes avec l'Etat, les collectivités locales et Action Logement. En consequence, l'obligation de relogement que la collectivite s'impose a elle-meme doit donner lieu a une mobilisation renforcée des acteurs pour identifier l'offre de logement et la tenir à disposition en gérant le stock au plus près des besoins et sans alourdir inutilement la charge collective. Cette politique repose sur une chaîne de décisions à prendre de manière concertée entre l'Etat, les collectivités et les organismes du logement social : dès la détermination des besoins en logements a loyers tres moderes (de type PLA insertion) dans le cadre des programmes locaux de l'habitat (PLH) ; dans la programmation annuelle de la production d'une offre de logements a loyers dits « abordables », dont les niveaux doivent etre precises suivant les secteurs (cf. carte geographique mise en ligne par le ministere du logement en ce debut decembre) ; dans les conventions d'utilité sociale des bailleurs (CUS) ; dans des protocoles à mettre en oeuvre avec les différents réservataires (collectivités territoriales, Action Logement) pour pouvoir disposer d'une capacite d'attribution sans delais ; dans des protocoles à mettre en place pour faciliter la mutualisation de l'offre des differents bailleurs sociaux, ainsi que le proposait deja l'instruction interministerielle de mars 2017 adressee aux prefets : « Vous encouragerez particulièrement la collaboration interRapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 47/86 bailleurs et inter-réservataires au niveau local afin de permettre les relogements ou les échanges de logements mais aussi les mutations provoquées des locataires dont la dépense de logement est inadaptée à leurs ressources. Il vous revient à cette fin de mettre en place un dispositif de coordination entre les bailleurs sociaux au sein de la Charte de prévention et d'en assurer l'animation en y associant l'ensemble des partenaires susceptibles de participer à la réalisation de cet objectif. » dans des formes d'intermédiation locative, que les bailleurs sociaux envisagent euxmêmes de développer avec le concours d'associations specialisees dans l'accompagnement et la reinsertion sociale, et qui leur permettrait d'offrir des logements a loyers plus bas que ceux aujourd'hui pratiques au regard de leur financement d'origine. Recommandation 25. Mobiliser l'offre de logement des bailleurs sociaux dès que l'évaluation sociale et financière établie par les travailleurs sociaux au stade du commandement de payer permet de conclure au besoin d'un relogement adapté aux revenus des locataires en difficulté. Recommandation 26. Faciliter la signature d'accords de mutualisation de l'offre entre bailleurs sociaux d'une part et avec les réservataires de logements du parc social d'autre part pour disposer d'un volant d'offre immédiatement employable. Recommandation 27. Réaliser une étude sur l'intermédiation locative dans le parc social pour adapter l'offre disponible aux niveaux de loyers requis dans le cadre des besoins de relogement des locataires menacés d'expulsion. Il faut noter que les locataires du parc privé sont également concernés par cette mobilisation du parc social, des lors que la procedure judiciaire engagee ne permet plus l'apurement des dettes contractees, et que les locataires ne trouvent pas par eux-memes une solution de relogement dans le parc prive. 4.2 Mobiliser la part disponible des logements vacants du parc social Sur les 200.000 logements vacants du parc social, la part des logements vides proposés à la location depuis plus de trois ans a été évaluée à environ 33 000 logements18. Sont exclus de ce compte les logements voues a la demolition ou a des structurations lourdes (plus de 75.000). Cette offre disponible présente cependant deux inconvénients qu'il faut intégrer : la qualité ou l'aspect qualitatif, l'aspect environnemental, peuvent etre moindres par rapport aux autres biens proposes sur le marche, localement, mais en cas d'alternative a l'expulsion, cela reste une veritable opportunite ; la répartition géographique, directement liee a l'attractivite des territoires, au sens de l'emploi et du cadre de vie, peut ne pas correspondre exactement aux localites ou resident les locataires concernes par un besoin de relogement plus en phase avec leurs ressources et leur emploi. Ces deux obstacles ne sont pas intangibles et meritent d'etre pris en compte dans la perspective des relogements a proposer. 18 Cf. rapport IGF/CGEDD de janvier 2015 sur la mobilisation des logements et des bureaux vacants PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 48/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN Recommandation 28. Mobiliser les plus de 30.000 logements sociaux vides et vacants depuis plusieurs années, ne serait-ce qu'à titre transitoire. 4.3 Restructurer le parc social pour adapter l'offre aux besoins Les 2/3 des logements des bailleurs sociaux sont très faiblement occupés : 1,8 million de logements sont occupes par une personne seule et 1,2 million de logements sont occupes par deux personnes, ce qui totalise 3 millions de logements sur les 4,7 millions de logements du parc social. La typologie du parc est quant à elle constituée aux 3/4, pour des raisons historiques, de moyens et grands logements (3,5 millions de 3 pieces a 5 pieces). Il s'ensuit une sous-occupation manifeste du parc de logements sociaux. Ce constat n'est pas propre au parc social puisque cela correspond a un phenomene generalise, en partie du au vieillissement de la population et a l'evolution de la typologie des familles. On releve au plan national 65% de menages ne comptant pas plus de deux personnes, dont la moitie (33%) sont constitues d'une personne seule19. Or, parallèlement, on constate une forte demande de personnes seules, jeunes et plus ages, qui peut atteindre 1/3 de la demande recensée dans certaines localites. Tout ceci tend a demontrer l'opportunite de solliciter les organismes de logements sociaux pour concevoir de nouveaux modèles d'occupation des logements et une part de restructuration de l'offre en correspondance avec les besoins. Dans ce cadre, il est evident que les besoins issus de la prévention des expulsions locatives doivent etre integres. Recommandation 29. Concevoir de nouvelles formes de baux pour faciliter la cohabitation par la colocation dans le parc social. Recommandation 30. Etudier la restructuration de grands logements d'une partie du parc social en fonction des besoins recensés dans chaque territoire, en intégrant les besoins relevés par les CCAPEX. Pour clore, provisoirement, ce chapitre dont l'importance justifierait une mission d'interet national, je releverais que l'offre de logement social pourrait être plus fluide si l'on admettait à la fois : de reconsidérer les plafonds de ressources pour accéder au logement social afin de reserver davantage cette offre aux personnes les plus vulnerables, et de renforcer les obligations de quitter un logement social lorsque les revenus excedent exagerement les plafonds de ressources en vigueur. Selon les statistiques du Commissariat general au developpement durable (CGDD) du ministere de la transition ecologique a partir des fichiers Filocom de la DGFIP et la base RPLS (septembre 2014) 19 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 49/86 5 Optimiser les moyens financiers de nos politiques de prévention 5.1 Eviter le dérapage des dettes et des charges collectives liées à l'enchaînement des délais de procédures Plus le temps des procedures s'allonge et plus les impayés et les frais de procédures en recouvrement s'accumulent pour les propriétaires. Plus le temps des arbitrages et des temps morts entre ces arbitrages s'etire, et plus les charges collectives s'amoncellent. La mobilisation d'effectifs des services publics avec leurs équipes de travailleurs sociaux (CCAS, DIAS, métropoles, départements et CAF) est un des principaux postes de depenses. L'optimisation de l'instruction, des le CDP, doit permettre de reduire le temps de prise en charge, et donc les couts supportes par la collectivite tout le temps que durent les etapes successives des procedures, et naturellement par les bailleurs. De même, la disponibilité de l'offre de relogement, si elle est identifiee au plus tot, des qu'il apparaît qu'un apurement de la dette ne pourra pas sauver la situation du locataire durablement lors de l'examen en sous-commission des CCAPEX, permettrait d'eviter un temps long de procedures et les charges collectives que cela entraîne du cote des services publics (collectivites territoriales, Etat, partenaires associes, BdF, CAF...) et du cote des proprietaires. Recommandation 31. Miser sur le renforcement de l'instruction dès le CDP et l'identification d'une proposition de relogement en sous-commission des CCAPEX pour décharger la collectivité des coûts induits par l'enchaînement des procédures et éviter dans le même temps aux propriétaires l'immobilisation de leurs biens et l'accroissement de leurs pertes financières. Il en est de même de la logique d'intervention des FSL. Plus c'est tot, plus cela permet de recuperer une defaillance passagere. Les mesures d'aides ponctuelles prises par Action Logement dans le cadre des consequences financieres de la crise sanitaire pour venir en aide aux salaries, et qui s'ajoutent aux aides ponctuelles deja existantes, sont absolument en phase avec l'intérêt d'une intervention dès l'origine d'un desequilibre budgetaire familial. 5.2 Connaître les coûts des procédures pour les réduire Combien coûte à la puissance publique une procédure d'expulsion ? A combien en moyenne s'elevent les dettes et frais pour le proprietaire ? Et pour tous les acteurs impliques dans le processus ? De nombreuses approches ont ete esquissees pour obtenir ces donnees qui permettraient d'observer la realite des couts collectifs et favoriseraient l'optimisation de nos politiques de prevention des expulsions. Ces premières études doivent nous interpeller sur tous les coûts qui peuvent être évités de la procédure. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 50/86 Recommandation 32. Confier à l'IGF et l'IGAS une étude des charges induites par les différentes phases des procédures visant la prévention des expulsions locatives. 5.3 Miser sur le « retour sur investissement social » Y aurait-il encore des freins a rendre plus transparentes nos politiques en faveur des plus fragiles, je ne le pense plus. Parce qu'il s'agit d'argent public et parce qu'il y va de notre capacite a etre plus efficaces. Les etudes realisees depuis des annees demontrent que la prevention des expulsions doit s'effectuer le plus en amont possible. Malgré la difficulté d'une étude exhaustive sur les coûts évités, il a été démontré en France et en Europe qu'un euro dépensé en prévention pourrait faire économiser jusqu'à huit euros aux pouvoirs publics. Des etudes en France (GRAAL et GESTARE) et a l'etranger 20 lors des actions menees en amont de la procedure ont demontre que le retour sur investissement social pouvait etre tres important. Ainsi 1000 euros investis en amont pourraient faire économiser à la puissance publique 8000 euros. Sur le nombre total de procedures d'expulsions en France, il serait hasardeux de pretendre qu'une action globale permettrait de mettre fin a la totalite des procedures. Mais nous pouvons raisonnablement avancer que plus d'un tiers pourraient etre evite a long terme. A l'instar de la stratégie du logement d'abord, investir en amont permet d'éviter de nombreux coûts par la suite. Nos futures politiques devront s'appuyer sur cette doctrine et valoriser toutes les initiatives qui s'inspirent de cette approche budgetaire. L'expérimentation à Montpellier conduite par des bailleurs sociaux avec GESTARE et le prestataire FORS tend effectivement a demontrer l'interet d'un « retour social sur investissement (RSOI) ». Le retour sur investissement est social pour les locataires mieux accompagnés des les premiers signes de difficultes, en relation avec les bailleurs sociaux engages dans ce partenariat. Et le retour sur investissement est également économique, puisqu'il permet d'eviter un derapage financier des situations rencontrees. C'est donc un gain considérable pour les bailleurs. J'ajoute que le retour sur investissement social concerne tout autant la puissance publique. Le groupe Erilia, bailleur social, a reduit de pres d'un tiers le nombre d'expulsions en renforçant le travail de ses conseillers en economie sociale et familiale (CESF) pour un maintien dans le logement. Ces pratiques devront donc etre encouragees et eclairer nos futures politiques de prevention. Elles pourraient etre portees par la DIHAL comme actuellement mais aussi par les DREAL avec les missions en « aller vers et dans le logement » (AVDL). Il conviendrait donc de lancer rapidement des Appels a manifestation d'interet pour mobiliser des acteurs associatifs. 20 Fondation Abbe Pierre ­ 2eme regard sur le mal-logement en Europe - 2017 PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 51/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN Recommandation 33. Valoriser par appel à manifestation d'intérêt à lancer auprès des métropoles et des départements en tant que porteurs de projets, des expérimentations de mobilisation du secteur associatif en lien avec des bailleurs sociaux pour mettre en valeur le retour sur investissement social. 5.4 Evaluer le régime de l'APL à l'aune des non-bénéficiaires Je ne reviendrai pas ici sur le régime des aides personnelles au logement (APL), veritable sujet d'importance, qui est un secours véritable pour les locataires du parc social et pour ceux du parc privé conventionné (ANAH). Mais le sort d'une partie des 50% de locataires qui ne sont pas allocataires est préoccupant. L'APL est non seulement un complément budgétaire, mais elle offre l'assistance des conseillers sociaux de la CAF, donc l'ouverture de voies de solutions. Recommandation 34. Evaluer l'impact de l'absence d'accompagnement par les CAF/MSA en cas d'impayés pour les ménages qui ne bénéficient pas des APL. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 52/86 6 Anticiper les effets économiques de la crise sanitaire pour les locataires et les propriétaires 6.1 La crise sanitaire a mis au ralenti de nombreux dispositifs et de nombreux acteurs Dans la plupart des departements, le confinement et dans une moindre mesure les mouvements sociaux ont fortement ralenti les procedures judiciaires. De nombreux dossiers se sont accumules, augmentant de facto le montant des dettes de certains menages. Le travail social s'est lui aussi affaibli, perturbant tres fortement l'accompagnement social des locataires. Ce sont aussi toutes les commissions (CCAPEX, DALO, FSL, surendettement) qui ont fonctionne de maniere tres chaotique. Ainsi de nombreuses situations ont empire et vont demander une attention toute particuliere afin de prendre en compte les consequences concretes de la crise sanitaire. Il s'agira pour tous les acteurs de prendre en compte ces elements. Il est par exemple souhaitable que les criteres de seuil des FSL soient modifies en consequence. 6.2 Evaluer et suivre le risque d'augmentation des impayés locatifs L'ANIL vient de publier debut novembre son barometre 21 des risques d'impayes et d'expulsions a partir des appels reçus en septembre et octobre 2020. Elle constate une hausse des consultations pour impayés de la part de locataires du parc prive de l'ordre de 15% par rapport a la situation de septembre-octobre 2019. Ce sont majoritairement des locataires actifs exposés à une perte d'emploi ou à une baisse de revenus. La situation paraît plus grave qu'au cours du premier confinement, selon le meme barometre publie fin juillet pour les mois de mars avril et mai. Une part des questionnements supplémentaires s'explique aussi par l'intérêt porté aux aides mises en place par Action Logement sur cette periode. A contrario, les consultations consecutives a la reception d'un commandement de payer ou se situant a des stades judiciaires ulterieurs ont atteint des niveaux particulierement bas pendant la periode du confinement en raison d'une activite reduite des tribunaux et des huissiers, de la suspension de certains delais et du report de la fin de la treve hivernale. La Banque de France a annonce le 9 novembre 2020 que le PIB pourrait reculer de 12% au mois de novembre par rapport au meme mois de l'annee anterieure. Une étude de l'Institut de recherches économiques et sociales (Ires), organisme au service des organisations syndicales, considere que 4,3 millions de menages sont soumis a un effet de ciseaux lie a la baisse des revenus face aux depenses contraintes constituees principalement par les depenses de logement dans une proportion passee, selon l'Insee, de 12% en 1960 a 27% en 2017. Nonobstant les mesures de chomage partiel prises par le gouvernement, certains actifs de professions indépendantes, des intérimaires, des artisans, des commerçants et des autoentrepreneurs risquent d'etre confrontes a une baisse de leurs revenus a court terme. Des faillites d'entreprises sont pressenties dont les effets seront sensibles dans les prochains mois. Selon l'USH, les bailleurs sociaux anticipent dans les mois a venir une augmentation forte des Il s'agit en l'occurrence d'un indicateur base non pas sur le nombre effectif d'impayes ou d'expulsions, mais fonde sur les consultations realisees dans les Adil (agences departementales) sur ces sujets. Cet indicateur s'inscrit dans une demarche plus large, lancee en avril 2020 par la DIHAL avec les professionnels du secteur. Bien que fermees en periode de confinement, les agences sont restees neanmoins joignables, soit via la ligne de chaque Adil ­ presentes sur tout le territoire a l'exception d'une quinzaine de departements ­, soit via la plateforme nationale "SOS loyers impayes", ainsi que par mail. 21 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 53/86 difficultes financieres de certains de leurs locataires, travailleurs independants, travailleurs pauvres, salaries en difficulte, du fait de la cessation des mesures de chômage partiel et de la faillite de certaines entreprises. Un autre baromètre réalisé22 courant septembre 2020 par Diffusis France pour le compte de Meelo, un specialiste de la data financiere, 32% des proprietaires et 16% des locataires sont en difficulté pour honorer leur emprunt immobilier ou payer leur loyer. Ils n'étaient respectivement que 17% et 6% lors du précédent baromètre an avril. Face a cela Meelo souleve le risque de surendettement qui augmente. 7% des personnes interrogées pensent avoir recours à un dossier de surendettement aupres de la Banque de France aujourd'hui. Ils n'étaient que 2,1% il y a quatre mois. Par ailleurs, le 16 novembre dernier a été installé l'Observatoire des impayés de loyers et de charges par Emmanuelle Wargon, ministre déléguée au Logement. L'objectif de l'Observatoire est de disposer de donnees chiffrees sur les situations d'impayes de loyers pour mieux agir et proteger les personnes en situation de precarite dans le contexte de la crise sanitaire relative a l'epidemie de la Covid-19. Les premiers elements de l'Observatoire des impayes locatifs ont permis d'etablir plusieurs constats : l'ANIL a noté à partir du mois d'octobre une hausse des consultations en matiere d'impayes locatifs de la part des locataires, que ce soit dans le parc prive ou le parc social (environ 50 % d'augmentation par rapport a novembre 2019). d'après les données croisées des caisses d'allocations familiales, de l'Union sociale de l'habitat, d'Action logement et des bailleurs privés, on ne constate pas en decembre 2020 d'augmentation du niveau de nouveaux impayes. Le chiffre d'allocataires des CAF en situation d'impayes s'etablit de maniere stable a 309 000 menages depuis septembre 2020. les bailleurs émettent toutefois un point de vigilance sur le maintien d'un niveau significatif de retards de paiement. De plus, la CNAF signale egalement que si le nombre de menages en situation d'impayes reste stable, le volume des impayes augmente, ce qui signifie que ces menages restent plus longtemps dans cette situation. Dans ce contexte, les jeunes actifs sont particulièrement touchés, non seulement sur un plan professionnel, mais parce qu'ils ne font généralement pas partie des publics prioritaires pour l'accès au logement social, a l'oppose des familles avec enfants. En consequence, s'ils se retrouvent en difficulte de paiement, et ceci peut etre plus frequent pour des emplois precaires, ils risquent de ne pas connaître rapidement une solution de relogement. De plus, il faut admettre que les jeunes ne puissent pas « souffrir » d'attendre de longs mois une attribution, surtout si l'offre d'emploi les oblige a changer de domicile plus souvent. La présence des moins de 30 ans dans le parc social a chuté de 24 % à 8 % en moins de 30 ans ! La responsabilité en incombe de manière évidente aux règles d'attributions : du côté de l'Etat par la détermination des publics « prioritaires », dont les jeunes ne font pas partie ; du côté des commissions d'attribution des organismes de logement social qui s'y opposent pour plusieurs « mauvaises raisons » : de nombreuses autres familles en attente, des durees de location trop courtes dont le turnover occasionne des frais a chaque changement de locataire, et un manque de logements de petite taille adaptes a leurs besoins (cf. § 4). Ce constat appelle des mesures de simplification à brève échéance. Il serait judicieux d'apporter Barometre realise en ligne sur l'ensemble du territoire français aupres d'un echantillon de 1.072 personnes, representatif de la population française agee de 18 ans et plus, durant la periode du 14 au 18 septembre 2020. 22 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 54/86 une suite favorable aux propositions de l'USH reprises ci-dessous. Recommandation 35. Assouplir les règles d'attribution (cotation, ancienneté, règles de priorité...) pour pouvoir mobiliser des logements en attribution immédiate, notamment pour les jeunes, sur la base d'un volume annuel d'attributions. La prise de conscience n'est cependant pas nouvelle. Et certains dispositifs ont ete mis en place, par Action Logement notamment, en partenariat avec des organismes de logement social pour assurer un relais aupres des jeunes actifs, augmenter l'offre de logements et leur apporter un soutien financier. Le développement d'une offre spécifique est a l'oeuvre egalement, mais reste insuffisante. Il y a davantage de production de residences etudiantes, plus rentables et de gestion plus stable que de residences pour jeunes actifs. De nouvelles formes d'habitat, comme les experiences d'habitat dit « inclusif », ou intergénérationnel, la mise en colocation, sont des alternatives. Les locataires non-allocataires sont également pénalisés, lorsqu'ils se retrouvent en situation d'impayes de loyers. La prevention des expulsions locatives est egalement inegale selon que le locataire beneficie ou non de l'aide personnelle au logement (APL). Cette inegalite se traduit par le bénéfice ou non du relais quasi-automatique des CAF, tant en accompagnement social qu'en surcroît d'aides ponctuelles. Cette inégalité trouve son origine dans le statut des logements, conventionnes par nature dans le parc social, et conventionnes parfois dans le parc prive (suite a des travaux realises par les proprietaires avec l'aide de l'ANAH), ou « hors champ ». L'ignorance des processus en place et une incapacite a solliciter les aides existantes sont tres repandues chez les locataires du parc prive. Les dispositions adoptees par l'ANIL, d'un numero d'appel « SOS impayés », et de conseils delivres sur leur site internet, ou dans les ADIL sont interessants, mais encore peu connus. La politique de prevention doit se preoccuper de renforcer « l'aller vers » les personnes en situation de fragilite economique et sociale, en plus d'une coordination renforcee des le stade du commandement de payer et d'une communication a la hauteur de ces enjeux. Recommandation 36. Renforcer les moyens dédiés à « l'aller-vers » les locataires en situation de fragilité économique et sociale qui rencontrent des difficultés de paiement de leurs loyers. 6.3 Identifier et soutenir les « petits » propriétaires, fragilisés par l'aggravation des impayés La grande majorite des bailleurs prives sont des « petits proprietaires ». Sur les 7 millions de bailleurs privés, 85 % possèdent un à deux logements seulement et sont des gens relativement modestes, dependants financierement des revenus locatifs, et sensibles a la soutenabilité des charges (emprunts et entretien de copropriete). Ces bailleurs sont donc très exposés aux impayés de loyers. Seulement 1/3 d'entre eux recourent aux services de professionnels de la gestion immobiliere, par mandats de gestion. Dans ce cas, les professionnels exercent une plus grande vigilance dans les rappels en cas de retards de loyers et l'engagement de procédures si necessaire. Ils recourent egalement plus facilement aux systemes assuranciels, dont ils proposent le service aux proprietaires. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 55/86 Le recours à l'intermédiation locative est une autre solution securisante pour le proprietaire pour la régularité du paiement des loyers, mais ce type de solutions, consistant a louer par bail glissant a un operateur (en general associatif) qui loue a son tour a des locataires modestes, avec un niveau de loyers inferieur au marche ne connaît pas le succès qu'il mérite. Les plafonds de ressources et de loyers sont notamment en cause, en particulier dans les secteurs en forte tension immobiliere. Le plus connu de ces dispositifs est Solibail avec seulement 8000 logements captes depuis sa creation en 2007. Les deux autres tiers des bailleurs privés qui ne font appel à aucune prestation sont effectivement très vulnérables face à l'aggravation des impayés et démunis devant les procédures à conduire. Les bailleurs tardent à réagir aux créances de loyers, par empathie ou par ignorance, et lorsqu'ils s'engagent dans des procedures en recouvrement par l'intermediaire des huissiers de justice et des avocats, les situations sont généralement irrécupérables. Passe ce stade, les procedures leur echappent en quelque sorte. Ces bailleurs « solitaires », puisque non accompagnes, optent également rarement pour une couverture assurancielle des loyers et charges. Ces régimes ont un coût (autour de 2% des revenus fonciers encaisses) et ce sont les proprietaires les plus modestes et donc les plus fragiles qui evitent cette charge supplementaire. De plus, ils n'en ont pas forcément connaissance, a l'inverse des proprietaires ayant recours aux administrateurs de biens. Dans le déroulement des procédures, il n'est pas rare que les dossiers des locataires de ce parc prive ne soient pas particulierement suivis, n'ayant pas été signalés par des travailleurs sociaux aux commissions de coordination. Et la représentation des bailleurs privés aux CCAPEX connaît quelques défaillances dans certains départements. La recherche d'une alternative par le relogement n'est pas maîtrisée par les bailleurs privés, qui sont isoles. Les préconisations d'une orientation systématique et très immédiate (au moment du commandement de payer) des locataires vers un relogement adapte a leurs ressources trouvent ici tout leur intérêt (cf. § 2.3). A défaut de trouver une solution alternative de relogement, les procedures s'enchaînent dans un véritable engrenage qui echappe aux proprietaires. Lorsque leurs locataires ont recours a la commission de surendettement, il y a de forts risques que les plans d'apurement ou de redressement leur fassent connaître in fine des pertes de loyers, sans pour autant pouvoir disposer de leur bien pour le remettre a la location. Lorsque les procedures en recouvrement d'impayes s'acheminent vers l'expulsion locative, il faut compter de longs mois pour obtenir la libération des lieux, ce que les proprietaires attendent le plus. Suivant une procedure dite « classique », le respect des delais conjugues represente souvent plus de deux ans contre 4 à 6 mois en Grande Bretagne23, moins de six mois en Suède et un an en Allemagne24. En resultat, ces bailleurs doivent faire face a des délais importants pour recouvrer leur bien, des charges et des taxes courantes qui s'ajoutent au manque à gagner et aux frais de justice avancés. Le concours de la force publique finit par concerner 8.000 locataires du parc privé en moyenne ces dernieres annees, soit autant en nombre que dans le parc social, mais cela represente deux fois moins de cas en proportion (0,1%) des 7 millions de logements du parc prive (cf. graphique figurant au § 3.1). 23 24 Cf. Rapport NOGAL deja cite Cf. Rapport IGA/CGEDD/IGAS/IGSJ qui cite l'etude Stenberg, Van Doorn, Gerull; « Locked down in Europe », European journal of homelessness, decembre 2011 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 56/86 Les indemnités dues par l'Etat en cas de refus du concours de la force publique constituent un obstacle supplémentaire. Le paiement de cette indemnisation est devenu avec le temps arbitraire et inégalitaire selon les territoires. Outre des délais de règlement excessivement longs (jusqu'a un an), le montant de l'indemnisation ne couvre généralement pas le montant dû (70% en moyenne). Au final, par ignorance, ou pour ne pas avoir à engager une ultime requête aupres des services prefectoraux, ou par voie judiciaire, seuls 53,8% des propriétaires font une demande d'indemnisation. Ce cumul d'inconvenients est dissuasif pour la remise sur le marché de biens à la location. Les « petits propriétaires » bailleurs doivent être mieux pris en considération dans la politique de l'offre locative et faire de facto l'objet d'une attention particulière dans la politique de prévention des expulsions. Tous ces sujets plaident pour une attention et un accompagnement renforcés des proprietaires prives dans le contexte de la crise sanitaire (Covid-19). De nouveaux profils (commerçants, artisans, intérimaires...) risquent d'être confrontés aux fragilités des locataires accentuées par la crise. Recommandation 37. Mettre fin aux pratiques de négociation des indemnités dues aux bailleurs par les préfets lorsqu'ils n'accordent pas le concours de la force publique. Systématiser le paiement de ces indemnités. En revoir l'imputation budgétaire (compte du logement). 6.4 Le recours aux systèmes de garanties est trop faiblement répandu mais doit être encadré Les proprietaires prives ont tres faiblement recours aux garanties offertes par le systeme assuranciel. Sur les 7 millions de logements du parc privé, seulement 35% sont gérés par des professionnels sous mandat, et seulement 15% de ces proprietaires acceptent de payer une garantie pour impayes de loyers (GLI). Cela ne represente donc que 5% du parc privé couvert par une garantie. Il pourrait etre souhaitable d'étendre davantage ces couvertures assurancielles aux propriétaires privés des 4,5 millions de logements non gérés par des professionnels et des 2 millions de logements supplémentaires gérés sans garantie de loyers impayés. Mais le prix de ces garanties devrait être réexaminé en lien notamment avec la possibilité d'y accéder directement sans l'intermédiaire des professionnels de l'administration de biens. Cependant, il est impératif que les acteurs assuranciels participent de manière plus officielle à la prévention des expulsions. Je suggère qu'ils soient davantage associés à la détermination des politiques départementales et qu'ils contribuent par dotation aux FSL ainsi qu'au financement des ADIL. Recommandation 38. Intégrer pleinement les assureurs dans les politiques de préventions d'expulsions (Signataire des chartes départementales, contributions FSL, ADIL...) Recommandation 39. Concevoir une évolution de l'offre de garantie, pour permettre à des bailleurs privés d'adhérer directement à ce système d'assurance. Ceci suppose d'en redéfinir les conditions financières et les clauses d'intervention, sans faire obstacle au rôle des intermédiaires de l'administration de biens. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 57/86 La « garantie » VISALE mise en place par ACTION LOGEMENT depuis janvier 2016 est une alternative à la caution physique : Finance exclusivement par Action Logement, et gere par sa filiale APAGL, le dispositif « Visale » est un systeme de cautionnement gratuit et dématérialisé couvrant les loyers impayés pendant toute la duree d'occupation du logement, dans la limite de 36 echeances impayees et, exclusivement pour le parc prive, la prise en charge de degradations locatives. Ce service de caution vise a faciliter l'acces au logement de candidats25 plus fragiles economiquement tout en offrant une garantie intéressante pour le propriétaire, équivalente à une assurance. Pres des 2/3 des menages entrant dans le parc locatif prive sont eligibles a Visale. Depuis le debut du dispositif en 2016, seulement 375 000 ménages ont bénéficié de Visale (dont 130.000 sur l'annee 2019). Avec une hausse des contrats souscrits de 21% entre janvier et fin novembre 2020 par rapport a la meme periode 2019, Visale a continue, malgre la crise sanitaire, d'accompagner les beneficiaires et particulierement les jeunes (+ 42% par rapport a 2019). Cette garantie est mise en jeu dans 4,7% des cas, tandis que 1% des dossiers d'impayes concernes a abouti a une expulsion. Bien que financé par les fonds de la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC), le public beneficiaire a ete elargi a tous les jeunes de moins de 30 ans, ce qui est appreciable. La question se pose d'un élargissement éventuel des bénéficiaires de ce dispositif, sans en souhaiter une extension immodérée qui serait de nature à déresponsabiliser les locataires. Independamment de cette question, les modalités de prise en charge restent très procédurales, sans véritable système d'accompagnement social, hormis le cas de proprietaires en intermediation locative. 6.5 Bien qu'exposés aux conséquences économiques de la crise sanitaire, les bailleurs sociaux sont mieux armés Du côté des bailleurs sociaux, les relations institutionnelles sont établies depuis longtemps avec la chaîne des acteurs du departement, des services de l'Etat et des collectivites, en raison du regime general lie au conventionnement et des garanties apportees sur le pan de l'investissement, mais aussi des contacts permanents etablis pour le suivi des attributions, la gestion des contingents de reservation et des publics prioritaires. De plus, les bailleurs sociaux, qui logent une forte proportion de personnes a faibles ressources, ont depuis longtemps acquis un professionnalisme dans la gestion locative, alliant les competences de travailleurs sociaux, leurs « conseillers en économie sociale et familiale », des agents de proximite en capacite de dialogue et de detection des fragilites sociales sur le terrain au quotidien (gardiens et régisseurs de quartiers) et des services contentieux particulierement exercés à faire du précontentieux des les premiers mois d'impayes. Il peut etre ajoute que la majorité des locataires logés par les organismes de logement social bénéficie de l'aide personnelle au logement (APL), de par leurs niveaux de ressources et le statut A ce jour, peuvent beneficier de Visale : tous les jeunes de 30 ans au plus ; les etudiants et alternants de 30 ans au plus loges dans le parc prive, le parc social ou les residences etudiantes ; les salaries de plus de 30 ans en mobilite professionnelle, y compris les salaries en CDI en mutation professionnelle et les salaries du secteur agricole ; les salaries et demandeurs d'emploi de plus de 30 ans, confrontes a un evenement exceptionnel fragilisant leur lien a l'emploi et au logement ; les menages accompagnes par une association d'intermediation locative ; les menages loges dans le cadre du bail mobilite. 25 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 58/86 des logements conventionnes avec l'Etat. Ces allocations versées directement aux bailleurs en « tiers payant » par les CAF et MSA ­ et qui representent de l'ordre de 70% des loyers encaisses ­ leur procurent egalement un lien étroit avec les travailleurs sociaux des CAF en particulier. Ce rapport est essentiel. En résultat, les locataires logés par les bailleurs sociaux bénéficient d'une assistance quasi permanente. Comme le souligne le CREDOC dans l'etude deja citee, « Hormis les bailleurs sociaux, très peu d'acteurs investissent ce temps en amont ou post assignation. De fait, les ménages du parc social locatif apparaissent moins exposés aux risques d'expulsion même si les mutations dans le parc social semblent rares. » Les données consolidées communiquées par l'Union sociale pour l'habitat (USH) a notre intention (voir schéma suivant) montrent l'efficacité du suivi opéré par les organismes, la proportion de locataires restant en impaye de loyer superieur a 3 mois n'etant que de 6,5% du parc global malgre l'apparition de difficultes de paiement chez 18,6% d'entre eux, et la proportion de locataires qui restent en impayé plus d'un an n'est plus que de 1,5% des 4,6 millions de locataires, soit 64.000 familles. Nombre de logements sociaux 4 000 000 3 500 000 3 000 000 2 500 000 2 000 000 1 500 000 1 000 000 500 000 0 Sans difficulté de paiement 3 680 000 820 000 286 000 64 000 en difficulté de paiement en impayé > 3 mois en impayé > 12 mois Source : mission a partir des donnees USH pour l'annee 2018 Compte-tenu des capacités des organismes à faciliter le recours de leurs locataires aux aides FSL ou à celles d'Action Logement, à permettre le maintien ou le rétablissement des APL (via le dialogue avec les CAF) et à faire des propositions de mutations dans des logements de leur parc aux loyers plus adaptes a la taille et aux ressources des menages en difficulte, ce score doit être relativisé. Les mutations restent d'ailleurs une pierre d'achoppement des organismes de logement social. Le sujet est connu et pourrait faire l'objet d'un long developpement. Independamment de la culture des commissions d'attributions, les frais occasionnes par les mutations ne sont notamment pas negligeables. Et la structure du parc de logements sociaux est egalement en cause (cf. § 4). Quant aux niveaux de loyers, ils peuvent expliquer aussi, du fait de l'augmentation des prix de l'immobilier au sens large (charge fonciere et couts de construction) ces dernieres decennies, des difficultes a offrir des relogements a des niveaux de loyers dits « tres sociaux ». Les organismes ont euxmemes identifie parmi les voies de progrès, le choix de l'intermédiation locative en confiant la location d'une partie de leur parc a des associations a vocation tres sociale. Le manifeste de l'USH Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 59/86 publié en septembre 2020 26 , fait état du double intérêt de ce partenariat « sur le modèle de « Solibail », visant, d'une part, à assurer un accompagnement personnalisé des personnes logées par une association et, d'autre part, à assurer un niveau de quittance très maîtrisé, compatible avec les ressources du ménage. Ce dispositif permettrait par exemple de loger des personnes à très faibles ressources dans des logements sociaux dont le niveau de quittance est trop élevé, en raison des loyers (PLS...) ou des charges ». Une part des logements vacants du parc social pourrait être davantage mobilisée (cf. § 4.2). Ces vacances peuvent toutefois etre le resultat de certaines decroissances demographiques ou d'une certaine obsolescence d'immeubles voues a la demolition dans le cadre de la renovation urbaine en particulier (cf. § 4 .1). Les bailleurs eux-mêmes reconnaissent, dans le document publie par l'USH en septembre 2020 l'opportunite de mobiliser les logements vacants de leur propre parc situe en particulier dans « certains territoires en régions, en périphérie de métropoles et de villes moyennes ». Des travaux collectifs s'imposent au niveau national (DHUP et DIHAL, USH) comme au niveau régional dans le cadre des comites regionaux de l'habitat et de l'hebergement (CRHH), et au niveau territorial (prefets, DDT et DDCS, conseils departementaux, communes et EPCI, bailleurs sociaux) par la prise en compte des disponibilites dans les programmes locaux de l'habitat (PLH) et les chartes départementales de prévention des expulsions locatives. Il s'agit de cibler le réemploi des 33.000 logements vacants environ proposés à la location et restant vacants plusieurs années27. A ce sujet, il ne devrait pas être tabou de pouvoir proposer des logements à des personnes menacées d'expulsion dans une autre localité que celle dont elles sont issues, dans une période où l'attractivité des territoires pourrait avoir tendance à s'inverser, dans la mesure où l'éloignement de leur emploi n'en serait pas un obstacle. Finalement, les professionnels du logement social devraient avoir les moyens, accentués depuis leurs regroupements, de mutualiser leurs forces pour palier la question d'une offre adaptee au relogement de locataires en difficulte, toutes les fois que cela se pose. A contrario, ces organismes sont confrontés, comme les bailleurs prives, à l'accroissement des pertes de loyers lorsque les locataires en impayes font l'objet de décisions judiciaires de resiliation de bail et que le concours de la force publique ne leur est pas accordé. Les indemnités accordées par l'Etat en cas de refus du concours de la force publique sont rarement versees a la hauteur des pertes de loyers. La proportion est voisine de 70% et fait l'objet de véritables « négociations » avec les services préfectoraux. Ce manque de recettes s'ajoute aux dettes effacées par les plans accordés par la commission de surendettement de la Banque de France. Pour l'ensemble des bailleurs sociaux, l'USH indique que ces effacements de dettes sont deja passés de 54 M en 2014 a 89 M en 2018, soit une augmentation de 65% en seulement quatre ans. Des indications sur les effets de la crise sanitaire ont été données : l'USH constate un surplus des retards de paiement de 65 M - seulement, pourrait-on dire - a fin octobre 2020 par rapport a la situation de fevrier 2020, ce pour l'ensemble des organismes ; il y a meme une diminution du nombre de nouveaux cas de locataires en impayes en septembre et octobre, pour atteindre un niveau inferieur a son seuil d'avant crise, en fevrier 2020 ; avec l'amplification des mesures gouvernementales, les refus d'octroi du concours de la force publique risquent d'etre multiplies au moment de la fin de la trêve hivernale au printemps « Pour etre utiles ensemble - Les propositions du Mouvement Hlm pour une relance juste et durable » - septembre 2020 - https://www.union-habitat.org/centre-de-ressources/politique-du-logement-mouvement-hlm/pour-etreutiles-ensemble-les-propositions 26 27 Cf. rapport IGF/CGEDD de janvier 2016 sur la mobilisation des logements et des bureaux vacants PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 60/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN 2021 avec des conséquences financières pour les bailleurs sociaux comme pour les bailleurs prives, car les « negociations » avec les services prefectoraux pour obtenir le paiement d'indemnités correspondant aux périodes couvertes par le confinement devraient porter sur des montants beaucoup plus importants. Des mesures préventives ont été engagées par le « Mouvement HLM » : En mai dernier, l'USH se dotait d'une charte en faveur des locataires "en fragilité économique", signée avec cinq organisations de locataires siegeant a la commission nationale de concertation. Cette charte comportait des recommandations destinees aux bailleurs : le developpement d'outils et de dispositifs d'appui facilement accessibles : demarche proactive, incitation des locataires en difficulte a se manifester, contact telephonique regulier avec les locataires « montrant des signes de fragilité », signalement par les associations, tout « en respectant un cadre déontologique de discrétion », des situations de detresse economique ; la mise en place de possibilités d'étalement du paiement des loyers et des charges : « des solutions personnalisées, adaptées à chaque situation », des regles « précises et transparentes d'étalement [...] définies conjointement dans un protocole local concerté entre l'organisme HLM et les associations de locataires », moyennant une large information des locataires et la conclusion de protocoles individuels avec un dispositif conjoint de suivi entre l'organisme et les associations ; l'aménagement de la facturation des charges locatives récupérables, lors de la regularisation annuelle, avec la possibilite de reporter les regularisations ou de les traiter differemment selon qu'elles sont debitrices ou creditrices, l'adaptation des provisions pour charges en fonction des prestations effectivement assurees pendant le confinement (par exemple, avec la suspension de l'entretien des espaces verts) ; la mobilisation des dispositifs de solvabilisation de droit commun (FSL, Action logement, CCAS, aides de l'Etat...). Dans le contexte de la reprise de la pandémie cet automne et la mise en place d'un second confinement, un avenant à cette charte vient d'etre signe avec quatre des cinq associations de locataires initiales, la Confederation nationale du logement (CNL) s'étant retirée faute d'obtenir un consensus sur l'ajout d'autres mesures comme le gel des loyers en 2021. L'avenant confirme que « la crise sanitaire continue de dégrader la situation économique des locataires HLM », ajoute de nouveaux engagements. Ainsi, la possibilite d'accorder des délais de paiement des loyers, prevue par la charte, est prorogee jusqu'à la quittance du mois de mai 2021 incluse. Un engagement met aussi un accent spécifique sur le soutien et l'accompagnement des victimes de violences conjugales et familiales, « dont la vulnérabilité est accrue en période de confinement ». Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 61/86 7 Consolider le « bouclier » de l'urgence sanitaire (Covid-19) et anticiper la sortie de la trêve hivernale au printemps 2021 7.1 Veiller de manière active sur un nouveau public à risque Les associations situees les plus en amont du soutien aux menages (banques alimentaires, Restos du Coeur, Secours catholique, Secours populaire etc.) constatent une augmentation globale du nombre de demandeurs. Certaines structures comme le Secours populaire ont deja ete confrontees a des situations alarmantes, avec 45 % des nouveaux demandeurs en 2020 qui correspondaient a des menages non connus de leurs services28. Le nombre d'allocataires du revenu de solidarite active (RSA) a progresse de plus de 8% en 2020. Les CAF et l'ADF ont constate que de nouveaux profils ont fait une demande de RSA. Il s'agit souvent d'auto-entrepreneurs, artisans, ou commerçants. L'arbitrage sur le budget de certains menages les amene a demander de l'aide de premiere necessite (aides alimentaires, aides au paiement des fluides). S'appuyer sur ces associations, qui nouent souvent un premier contact approfondi avec les ménages en difficulté, devient indispensable pour identifier les nouveaux publics fragilisés et susceptibles d'être concernés par des procédures d'expulsion locative. Nombreux sont ces menages qui ne font pas appel a un travailleur social, par meconnaissance ou par pudeur. Afin d'anticiper le plus tot possible le risque d'un impaye locatif et celui d'une procedure judiciaire, ces acteurs de solidarite pourraient mener une mission de reperage de ces nouveaux publics, et il serait judicieux d'utiliser les ressources des ADIL afin de les aider a s'orienter tres rapidement. Recommandation 40. Proposer aux départements et métropoles d'expérimenter un repérage précoce de ménages pouvant basculer dans l'impayé locatif par recours aux acteurs associatifs, de façon à les orienter rapidement vers le conseil des ADIL. Dans le parc social, le programme de financement « 10.000 logements HLM accompagnés » lance en 2014 avec les bailleurs sociaux a permis de mettre en oeuvre des actions innovantes relatives a l'acces ou au maintien dans le logement des menages en grande difficulte (troubles de la sante mentale, personnes a la rue, victimes de violences conjugales, etc.). Ces actions ont ete menees notamment par le gardien d'immeuble : sa capacite a pouvoir reperer des menages en difficulte est averee et doit etre fortement encouragee. Il pourrait etre opportun de formaliser un modele de detection. Recommandation 41. Dans le parc social, formaliser une méthodologie de signalement des ménages à risque d'impayés par les gardiens d'immeubles en capitalisant sur les expériences réalisées dans le cadre de l'appel à projets "10.000 logements accompagnés". 28 Barometre du Secours Populaire du 30 septembre 2020 PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 62/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN Par ailleurs, 140 000 personnes se seraient vu accorder un plan d'apurement par les tribunaux ces 3 dernieres annees, selon la Fondation Abbe Pierre. Les consequences de la crise impacteront forcement le respect de certains de ces echeanciers et pourraient ainsi augmenter fortement les situations conduisant a des procedures d'expulsion avec CFP, des lors que la clause resolutoire est acquise des qu'une echeance n'est pas respectee. Ainsi, de nombreux protocoles de cohesion sociale pourraient etre remis en cause dans le parc social. Recommandation 42. Prendre en compte rapidement le cas des personnes ayant signé des protocoles de cohésion sociale ou en cours de remboursement d'échéancier fixé par le juge et envisager des aides pour tous les ménages qui assumaient leur échéancier avant la crise sanitaire et qui démontreraient une baisse de leurs revenus liée à la crise sanitaire. Le « Aller vers » est un impératif qui doit s'inscrire en profondeur dans nos doctrines de politiques de solidarité. Dans cette periode inedite et aux perspectives inquietantes de 2021, il sera essentiel d'aller a la rencontre des menages les plus exposes. L'emploi de ces dispositifs sera indispensable pour permettre de mobiliser tous les leviers existants pour le maintien dans le logement ou le relogement. Dans ce contexte, le gouvernement vient d'annoncer la création d'équipes mobiles de visite a domicile le 16 decembre 2020. Des le debut de l'annee 2021, 26 equipes mobiles, composees de 3 a 5 travailleurs sociaux ou juristes, seront deployees dans les departements les plus tendus en matiere de logement et concernes par de nombreuses procedures engagees sur le plan d'une expulsion locative. Il conviendra que ces equipes soient le plus rapidement operationnelles des le debut de l'annee. Vu l'ampleur des taches qui les attend, il faudrait envisager de renforcer ces equipes au cours du premier trimestre 2021 afin de couvrir un territoire plus large. Recommandation 43. Prévoir dès le premier trimestre 2021 la multiplication des équipes mobiles déployées sur le terrain. 7.2 Anticiper et préparer la sortie de la trêve hivernale 2021 En ce moment si singulier, les propositions qui suivent auront à tenir compte de la future évolution de la crise sanitaire qui par définition est inconnue. Un nouveau confinement ou d'autres mesures de précaution pourraient conduire à des évolutions significatives et obliger à revoir certaines recommandations. La crise sanitaire a fortement impacte la prevention des expulsions locatives, aussi bien par ses consequences immediates sur la gestion de la procedure d'expulsion elle-meme que par les risques nouveaux que font peser a terme ses consequences economiques sur la capacite de paiement du loyer par les menages. Afin de maîtriser la propagation de l'epidemie de la Covid-19, le gouvernement a ete amene a prendre une serie de mesures inedites de protection des locataires menaces d'expulsion durant l'annee 2020. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 63/86 Dans le cadre de l'etat d'urgence sanitaire, la treve hivernale a ainsi ete allongee du 1er avril au 10 juillet, reportant d'autant l'execution des concours de la force publique (CFP) par les prefets. Prenant le relais de ce dispositif initial, l'instruction du 2 juillet 2020 a ensuite permis de limiter, de façon temporaire et jusqu'a la treve hivernale suivante, le nombre d'execution des concours de la force publique, tout en indemnisant les proprietaires concernes. Conçus comme une reponse d'urgence devant le caractere exceptionnel de la crise sanitaire, ces dispositifs derogatoires ne peuvent cependant se substituer de maniere perenne au cadre constitutionnel et legislatif regissant les rapports locatifs et le droit de propriete. La réduction historique des expulsions que ces dispositifs ont permis d'obtenir en 202029 a également eu pour impact de fragiliser la situation financière de nombreux bailleurs du parc privé qui dépendent financièrement de leurs revenus locatifs. Ces reports contribuent également à l'aggravation de l'endettement des occupants dont la situation était déjà précaire, ce qui n'est pas favorable à leur réinsertion sociale. Cette reduction a egalement eu pour contrepartie l'accumulation simultanée des procédures administratives d'expulsion au sein des préfectures tout au long de l'annee 2020, generant in fine un risque différé de hausse massive des expulsions a court et moyen termes. D'apres les premieres estimations 30 , le nombre de CFP accumules au cours de l'annee 2020 qui demeurent en attente correspondrait a 70% de son niveau de 2019. Ce serait ainsi 22 000 CFP octroyés qui seraient en attente d'une exécution au 31 décembre 2020, auxquels il faut par ailleurs ajouter les nouveaux CFP qui seront requis et octroyes d'ici la fin de la treve hivernale du fait de la poursuite des procedures judiciaires d'expulsion durant l'annee 2020, soit approximativement 12 500 CFP requis et 8 000 octroyés sur 3 mois, dans l'hypothèse d'une fin de trêve au 1er avril. En tenant compte du travail d'instruction que meneraient a moyens constants les services des prefectures d'ici la fin de la treve, on peut ainsi estimer que plus de 35 000 CFP seraient à instruire pendant le seul premier trimestre 2021, ce qui serait trois fois supérieur au flux courant, et pres de 30 000 seraient a executer a la seule date du 1er avril 2021, ce qui equivaut a la totalite du volume d'une annee courante a l'issue du seul premier trimestre. L'enjeu immédiat en matière de prévention des expulsions est donc d'élaborer en 2021 les étapes d'une transition progressive en tenant compte de la permanence des risques sanitaires et socioeconomiques lies a la Covid-19 qui demeurent pour les personnes les plus vulnerables. L'objectif prioritaire est de réduire le nombre d'expulsions et d'éviter la précarisation des locataires ainsi que celle des bailleurs concernés. Dans l'hypothese d'une fin de treve hivernale conventionnelle au 1er avril 2021 allant de pair avec une reprise des executions de concours de la force publique a cette date, il faut programmer la coordination des interventions des partenaires de la prevention au niveau national et local de façon a : Réduire le niveau de CFP accumulés en 2020 a executer a partir du 1er avril ; Echelonner sur l'année 2021 la reprise de l'exécution de ces CFP ; Limiter l'afflux de nouvelles réquisitions de CFP susceptibles d'être octroyées en 2021. 29 30 3 500 personnes ­ selon le communique de la DIHAL en date du 31 Octobre 2020 Estimation etablie par le pole prevention des expulsions locatives de la DIHAL PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 64/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN Il s'agirait de reduire dans un premier temps le niveau de CFP a executer a l'issue de la treve hivernale puis d'echelonner dans un deuxieme temps leur reprise sur le reste de l'annee avant de travailler a la reduction du flux de CFP nouvellement requis. Recommandation 44. Elaborer un plan d'actions destiné à gérer dès maintenant la fin de la trêve hivernale. Le faire en liaison étroite avec les représentants des collectivités territoriales, des administrations et des différents acteurs sociaux. 7.2.1 Identifier les ménages concernés par un CFP en 2021 La condition préalable qui permettra de limiter le nombre d'expulsions sera la connaissance des ménages concernés, or la moitie d'entre eux serait en effet inconnue des services sociaux au stade du CFP et ils n'auraient pour la plupart engage aucune demarche de relogement. L'enjeu d'aller au plus près de ces ménages est donc immense mais indispensable pour limiter le nombre d'expulsions sans solution de relogement ou d'hebergement en 2021. Une cooperation de tous les acteurs est donc necessaire, les CCAPEX pourraient sur cette mission d'identification etre en pilotage et mobiliser tous les acteurs territoriaux, et en particulier tout le tissu associatif Comme cela a ete fait dans les Bouches-du-Rhone, les CCAPEX pourraient communiquer aux CCAS et CIAS la liste des locataires concernes. Les equipes mobiles mises en place par le Gouvernement devraient prioritairement se rendre au domicile des locataires du parc prive faisant l'objet d'un CFP octroye et reste en attente d'execution alors que ces personnes seraient inconnues des services sociaux. 7.2.2 Mobiliser les capacités de logement pour les ménages en voie d'expulsion L'augmentation des capacités de relogement sera la condition sine qua non d'une réduction effective du nombre de dossiers accumulés en 2020 pour limiter la hausse des expulsions effectives sur l'annee 2021. En vue de limiter autant que possible le nombre d'expulsions a realiser a l'issue de la treve hivernale et tout au long de l'annee 2021, l'objectif prioritaire est de mener une action conjointe d'accompagnement et de relogement des personnes faisant deja l'objet a ce jour de CFP requis et octroyes. Il est ainsi indispensable de reserver les disponibilités de logement pour ces personnes, dont celles qui ont deja realise des demarches de demandes de logement social (DLS). Quoi qu'il en soit, il conviendra aussi d'accelerer voire de simplifier les contributions d'attribution et les delais qui s'y rapportent pour accelerer le relogement de ces familles. Ces objectifs de relogement ne pourront pas etre atteints sans mobiliser les reservataires n'ayant pas respecte leur obligation d'attribution de 25% et le contingent prefectoral. Les commissions d'attributions logement devront aussi s'inscrire dans cette dynamique. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 65/86 Vu l'ampleur du defi et les enjeux humains, il est incontournable de se fixer des objectifs mensuels des le debut d'annee. Recommandation 45. Fixer dans chaque département des objectifs mensuels d'attribution de logements ciblés pour les ménages faisant l'objet d'une réquisition de la force publique aux fins d'expulsion. Meme si nous connaissons les difficultes des bailleurs sociaux a developper le nombre de mutations, ces dernieres sont plus que jamais une des solutions les plus pertinentes pour affronter les enjeux du relogement des personnes sous la menace d'une expulsion par CFP en 2021. Les CCAPEX pourraient par exemple demander aux bailleurs sociaux de faire la demonstration qu'ils ne disposent d'aucun logement adapte a la situation du menage pour lequel ils demandent l'expulsion au sein de leurs parcs, en tenant compte des differents contingents de reservation mobilisables. Parallèlement, tout maintien dans le logement dans le parc social, s'il est encore possible, doit être une priorité. Depuis la loi ELAN, le protocole de cohésion sociale (PCS) peut etre mis en place y compris en cas d'impossibilite de remboursement de la dette locative, a la seule condition que le loyer courant soit repris. Dans le contexte actuel, les bailleurs sociaux devront en responsabilite mettre tout en oeuvre pour suspendre la procedure de CFP. La disponibilité de logements abordables hors conventionnement dans le parc locatif privé sur certains territoires est reelle, avec les federations nationales de bailleurs et d'agences, il serait interessant d'etablir dans les territoires un contingent de logements vacants pour les menages menaces d'expulsion que les CCAPEX identifieraient. Enfin, l'augmentation des objectifs d'hebergement offre un moyen complementaire de prise en charge des personnes les moins vulnerables et faisant l'objet d'une execution de CFP. Les CCAPEX, en lien avec les services des prefectures en charge de l'hebergement, pourraient etablir la liste des menages faisant l'objet de CFP a heberger et les orienter vers les services integres d'accueils et d'orientation (SIAO). Un objectif mensuel semble necessaire pour que cette action soit efficace. Toutes ces actions d'accompagnement, de relogement et d'hebergement necessiteront des moyens humains supplementaires au sein des services des DDCS. Recommandation 46. Renforcer temporairement les effectifs des DDCS et des CCAPEX en charge de la coordination des dispositifs d'accompagnement social, du relogement et de l'hébergement. Le quasi-doublement au niveau national de la masse de CFP à traiter en 2021 sera difficilement supporte par les effectifs des prefectures actuels qui etaient deja sous tension pour gerer le simple flux courant avant crise. Il apparaît donc necessaire de faciliter temporairement le recrutement de personnels contractuels ou vacataires, sur la base des besoins remontes par les prefectures. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 66/86 Recommandation 47. Renforcer temporairement les effectifs des préfectures en charge de l'instruction des CFP. 7.2.3 Déterminer des priorités dans la reprise des expulsions Il y aura une necessite difficile mais indispensable de prioriser en 2021 la reprise des executions des CFP. Pour ce faire, il paraît indispensable de tenir compte, de la qualite des bailleurs, de leur capacite financiere et de la vulnerabilite des occupants. L'enjeu est a la fois sanitaire, en termes de limitation de l'exposition des populations les plus a risque et de propagation du virus, et socioeconomique, en termes de limitation de l'impact des expulsions sur les personnes les moins susceptibles de se reinserer ou pour lesquelles les consequences seraient relativement les plus lourdes. Je suggère de favoriser le maintien dans le logement ou le relogement des personnes souffrant de maladies chroniques, des personnes âgées, des personnes handicapées et des familles avec enfants, déjà reconnues prioritaires par la loi. A l'exclusion de ces personnes, il s'agirait de concentrer la reprise des expulsions dans le parc privé, en priorite pour les petits bailleurs individuels qui ne disposent que d'un seul logement et dependent du revenu locatif pour leur subsistance. Les fédérations nationales de bailleurs et d'agences immobilières pourraient servir de relais a cette fin aupres de leurs adherents. Dans un deuxième temps, la reprise des expulsions pourrait se concentrer sur les dettes locatives les plus élevées et les CFP les plus anciens. Enfin, meme si cela reste une minorite, la reprise des expulsions sur les personnes constituant une menace pour leur environnement physique et materiel immediat ainsi que sur les personnes n'ayant pas repris le paiement de leur loyer alors qu'elles disposent des capacites budgetaires pour ce faire devraient etre priorisee. 7.2.4 Echelonnement et maîtrise de la reprise des CFP Parallelement a la reduction du niveau de CFP, le defi majeur de l'annee 2021 est d'organiser la transition de l'etat d'urgence vers une reprise maîtrisee de la procedure d'expulsion locative en 2021. Cela passe en particulier par l'organisation d'une reprise progressive et maîtrisee de l'execution des concours de la force publique (CFP) qui evite tout effet de rattrapage massif et desorganise. Il s'agit en particulier de reduire autant que faire se peut l'incidence socioeconomique, sanitaire mais aussi budgetaire des expulsions pour les locataires comme pour les bailleurs dans le contexte actuel de crise sanitaire. Une reprise des expulsions non anticipée pourrait ainsi conduire sur l'annee a une hausse inedite de 30 000 CFP executes sur l'annee en 2021 contre 17 000 en 2019. Il est donc necessaire de prevoir un echelonnement du traitement des CFP, s'etendant potentiellement jusqu'au debut de la treve 2021-2022, voire en 2022, qui permette autant que possible de limiter le nombre d'expulsions et de soulager la contrainte temporelle relative a la vitesse de l'instruction des CFP, afin que chaque dossier puisse être évalué avec le même niveau d'attention. L'enjeu est Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 67/86 d'obtenir une reduction aussi importante que possible du nombre d'expulsions realisees en 2021 dans le parc social. Elle permettrait egalement d'inciter fortement les bailleurs a utiliser cette periode pour rechercher en interne des modalites alternatives a l'expulsion (mutations provoquees, mise en place de PCS...). Il s'agit de definir conjointement avec les federations nationales de bailleurs et reservataires du parc social, les conditions d'une reprise limitee des executions de CFP en 2021 ainsi que les modalites d'indemnisation financiere des bailleurs par l'Etat en cas de suspension prolongee de l'execution des CFP au cours de l'annee. Il serait envisageable de limiter la reprise partielle des executions limitee aux seuls CFP accumules en 2020. Recommandation 48. Négocier au niveau national les modalités de contribution des bailleurs sociaux à l'effort d'échelonnement de l'exécution des CFP en 2021. Recommandation 49. Échelonner la reprise de l'exécution des CFP accordés sur les années 2021 et 2022. 7.2.5 Abonder le budget destiné à l'indemnisation des bailleurs Du fait de l'action de suspension du CFP au-delà de la période de trêve hivernale le risque de fragilisation des petits bailleurs qui dépendent de leur loyer est réelle. Ainsi, Il conviendrait d'abonder en consequence le programme budgetaire (BOP 216) en charge de l'indemnisation des bailleurs par suite d'un refus d'octroi du concours de la force publique. A l'echelle nationale, ce besoin d'indemnisation supplementaire genere par le report de l'execution du « stock » de CFP accumule en 2020 pourrait se traduire par un abondement du programme estime a hauteur de 80 millions d'euros pour l'annee 2021 31. Recommandation 50. Abonder le budget du programme 216 destiné à indemniser les propriétaires bailleurs pour lesquels l'exécution de la force publique sera reportée au-delà de la fin de la trêve hivernale ou suspendue dans l'attente d'un relogement effectif des occupants. 7.2.6 Valoriser et partager les retours d'expériences autour de cellules d'urgence L'observatoire des impayes cree en novembre 2020 va permettre un suivi de leur evolution. Pour l'instant, les amortisseurs de la crise economique due a la crise sanitaire mis en place par le gouvernement ont pu limiter cette augmentation. Cependant, et parce que nous faisons face à une crise inédite et donc à des conséquences difficilement quantifiables, il est impératif de se préparer à plusieurs scénarios et d'être en capacité le moment venu d'actionner des leviers supplémentaires d'aides aux locataires. L'exemple d'Action Logement, qui a mis en place un dispositif de secours temporaire pour aider les personnes les plus vulnérables parmi les actifs et les jeunes, a été très pertinente. 31 Estimation du pole prevention des expulsions de la DIHAL PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 68/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN Au 30 novembre 2020, Action Logement comptait pres de 78 000 aides distribuees dans le cadre du deploiement d'une aide exceptionnelle. La depense s'est elevee a 23,5 millions d'euros. L'aide consiste en une subvention de 150 euros par mois sur 2 mois pour les salaries ayant eu a faire face a une baisse d'au moins 15 % de leurs revenus. Renouvelable une fois, elle est accordee sous plafond de ressources des menages (ressources a 1,5 SMIC). La depense de logement devait representer plus de 40% des revenus impactes par la crise. Action Logement Services a estime le nombre de beneficiaires potentiels a environ 300 000 salaries. Le public touche a fin novembre represente donc a peine le tiers du public potentiel. En octobre, les partenaires sociaux ont engage une nouvelle discussion avec l'Etat pour faire valoir que le deploiement de cette aide devait etre renforce. Ainsi, le taux d'effort a ete abaisse (passe de 40% a 33 %) et le plafond d'aides renforce de 300 a 900 (6 versements de 150 ) pour la seule categorie des demandeurs d'emplois ou des beneficiaires qui auraient perdu leur emploi depuis leur premiere demande. En ce qui concerne le risque locatif des jeunes, 95 millions d'euros ont ete mobilises sur la meme periode pour les jeunes de moins de 30 ans en alternance, avec des subventions allant de 10 euros a 100 euros, flechees sur le paiement du loyer. Lors du confinement de mars 2020, de nombreuses collectivités territoriales ont adapte leur reglement FSL a l'urgence sociale : augmentation des seuils, creation d'un fonds d'urgence d'aide a la quittance ou a l'impaye, par exemple. Dans certains départements, le raccourcissement des délais de traitement des dossiers (entre 15 jours et 3 mois hors periode de crise) a ete impulse grace a la dematerialisation partielle ou totale de la procedure. Pour accelerer l'instruction des dossiers, certains departements comme le Nord ont egalement repousse a un temps ulterieur la remise des pieces justificatives necessaires a l'octroi du FSL. L'interet etait de deroger aux regles habituellement en vigueur sans avoir a modifier le reglement interieur de chaque FSL, d'ou le choix de l'assouplissement des delais ou des conditions d'acceptation des dossiers. Des dispositifs specifiques ont egalement ete mis en place afin d'eponger rapidement les dettes de nouveaux publics. D'autres FSL ont fait le choix de la révision du règlement intérieur, notamment pour modifier les criteres de calcul des ressources du demandeur (pour la reduire par exemple au dernier mois ecoule, comme dans le Finistere) ou ouvrir des plafonds derogatoires. On a également pu assister à un degré de réactivité important de la part des métropoles. La Metropole de Lyon a par exemple vote en juin un fonds d'urgence de 1 300 000 euros pour les impayes de loyers et de charges des locataires non-eligibles au FSL. Dans le meme temps, Brest Metropole a mis en place un « fonds d'urgence logement » de 300 000 euros a destination des proprietaires, menages et locataires dont le niveau de revenus a baisse par suite du confinement. La Metropole de Rennes a quant a elle directement abonde le FSL a hauteur de 500 000 euros. Meme si ces acteurs reconnaissent qu'il existe encore des freins et des ecueils, ces initiatives meritent d'etre rapidement evaluees afin de pouvoir les deployer sur tout le territoire pour amortir de nouveaux impayes de loyers. Comme l'a souligne la Fondation Abbe Pierre32, les collectivites en charge du FSL vont devoir faire 32Fondation Abbe Pierre - Prevenir les impayes et les expulsions dans le contexte d'Etat d'urgence sanitaire ­ Septembre 2020 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 69/86 preuve de reactivite et de simplicite. L'urgence impose de savoir privilegier une decision rapide et effective plutot que de s'assurer de la presence obligatoire de tous les membres d'une commission. D'autres pratiques innovantes ont ete mise en place sur notre territoire, il serait ainsi pertinent de les repertorier et de les objectiver pour creer une boîte a outil en debut d'annee 2021. Afin de partager les retours d'experience sur ces dispositifs, il me semble opportun de mettre en place une conference dite « PEX » reunissant les collectivites competentes sur le FSL a l'initiative du Ministere de la Transition ecologique, charge du logement ou de la DIHAL. Recommandation 51. Mettre en place une conférence PEX début 2021 réunissant les collectivités territoriales pour partager les pratiques innovantes en matière de FSL. Recommandation 52. Prévoir les moyens d'agir en urgence pour soutenir les ménages fragiles impactés financièrement par la crise. Recommandation 53. Mettre en place début 2021 une cellule d'urgence dans chaque département destiné à coordonner les efforts de tous les acteurs de la politique de prévention des expulsions et à piloter un plan d'actions. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 70/86 Annexes Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 71/86 1 Lettre de mission du Premier ministre Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 72/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 73/86 2 Actes d'huissiers lors de la procédure d'expulsion33 Avec l'aimable autorisation du president de la chambre nationale des commissaires de justice Patrick Sannino et de Maurice Lotte, Huissier de justice 33 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 74/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 75/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 76/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 77/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 78/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 79/86 Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 80/86 3 Liste des services et personnes auditionnées Administration Banque de France (Mark Béguery, responsable du pôle surendettement, et Véronique BensaidCohen, conseillère parlementaire auprès du Gouverneur.) Direction des libertés publiques et des affaires juridiques du Ministère de l'Intérieur (Pascale Léglise, adjointe au directeur des libertés publiques et des affaires juridiques, Laurent Hanoteaux, adjoint au chef du service du conseil juridique et du contentieux). Direction des affaires civiles et du sceau du Ministère de la justice (Catherine Raynouard, sous-directrice du droit civil, Françoise Catton, cheffe du bureau du droit processuel et du droit social, Elodie Guennec, adjointe à la cheffe du bureau). Délégation interministérielle à l'hébergement et au logement (Sylvain Mathieu, délégué interministériel). Pôle prévention des expulsions locatives de la DIHAL (Benoît Linot, responsable de pôle et Hugo Ruiz, chef de projet). Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (Laurent BRESSON, sous-directeur Politiques de l'habitat, Benoît AMEYE, adjoint au sous-directeur du Financement de l'économie, du Logement et de l'aménagement). Haut comité pour le logement des personnes défavorisées (René Dutrey, secrétaire général). Direction départementale de la cohésion sociale du Vaucluse (Christine Maison, directrice de la DDCS et Brigitte Plane, Responsable du pôle logement et hébergement). Agence nationale de l'information sur le logement (Roselyne Conan, directrice générale et Louis du Merle, responsable du Pôle juridique). Agence départementale de l'information sur le logement du Gard (Yves Maurel, directeur adjoint). Direction départementale de la sécurité publique de l'Hérault (Philippe Plégat, commandant divisionnaire). Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement Occitanie (Fabrice Clastre, chargé du développement du logement social). Caisse d'allocations familiales de l'Hérault (Thierry Mathieu, directeur, Mylaine Fontange (directrice des affaires sociales). Caisse nationale d'allocations familiales (Jean-Marc Bedon, responsable du pôle « Logement et vie sociale », Frédéric Marinacce, directeur des politiques familiales et sociales). Plan Bâtiment Durable et Adlis (Philippe Pelletier, directeur, avocat au barreau de paris). - - - - - - - - - - - - - Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 81/86 - Direction régionale et interdépartementale de l'hébergement et du logement d'Île-deFrance (Isabelle Rougier, directrice, Patrick Le Gall, directeur adjoint, Pascale Mossan, cheffe du service action logement et prévention des expulsions, Simon Vidal, adjoint à la cheffe de service, Christine Richard, chargée de la définition de la stratégie de prévention). Préfecture de Seine-Saint-Denis (Anne-Claire Mialot, préfète déléguée pour l'égalité des chances). Direction départementale de la cohésion sociale de la Côte d'Or (Nicolas Nibourel, directeur départemental délégué). Direction départementale de la cohésion sociale du Nord (Sylvie Labare, cheffe de la mission Accès au Logement, Delphine Wyart, cheffe du pôle prévention et expulsions). Direction départementale de la cohésion sociale du Vaucluse (Christine Maison, directrice, Brigitte Plane, cheffe du pôle accès et maintien dans le logement). Direction départementale de la cohésion sociale de l'Hérault (Pascale Mathey, directrice adjointe). Action Logement Services (Jean-Michel Royo, directeur général, Corinne Bedos-Toulgoat, directrice du développement et de l'offre, Marie-Noëlle Granjard, suivi du développement produit). - - - - - - Collectivités territoriales Lille Métropole Habitat (José ARNOUX, directeur adjoint de Lille Métropole Habitat) Montpellier Méditerranée Métropole (Michel CALVO, adjoint au maire de Montpellier) Métropole du Grand Lyon (Corinne AUBIN-VASSELIN, directrice générale adjointe et Magali ROBERT, cheffe du service Inclusion par le logement). Fédérations immobilières, agences at associations de propriétaires Fédération nationale de l'immobilier (Jean-Marc Torrollion, président, et Bénédicte Rouault, cheffe de cabinet). Chambre des propriétaires du Grand Paris (Jean PINSOLLE, président). Union nationale des propriétaires immobiliers (Pierre Hautus, président). Fédération SOLIHA Solidaires pour l'Habitat (Marie-Françoise Lavieville, vice-présidente, Kamel Senni, responsable du Pôle Logement d'Abord, Dorine Branget, chargée de mission gestion locative sociale). Erilia (William Hochedez, chef de service prévention sociale et contentieux locatif, Arold Ballesteros, responsable du pôle contentieux locatif sur Montpellier, Bruno Favre, directeur d'agence Montpellier). Foncia (Guillemette Roger, directrice du contentieux). - - - Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 82/86 - Gallian (Alain Ledemay, directeur général, Gérard Col, président du conseil d'administration). Union sociale de l'habitat (Thierry ASSELIN, Directeur des politiques urbaines et sociales, Dominique HOORENS, directeur des études économiques, Maryse SYLVESTRE, conseillère politiques sociales, Delphine BAUDET-COLLINET, adjointe à la responsable du pôle politiques clientèles et sociales). Union des syndicats de l'immobilier (Denis Géniteau, Vice-président, Emmanuel Benhamou, juriste immobilier, Géraud Delvolvé, délégué général). Cercle des propriétaires (Gilbert Spéry, Président). - - Associations de lutte contre la pauvreté et la précarité Fédération des associations et des acteurs pour la promotion et l'insertion par le logement (Sébastien Cuny, délégué général, Thierry Debrand, directeur de FREHA et Sylvain Camuzat, directeur de l'association AVDL de Villeurbanne). Fondation Abbé Pierre (Marie Rothhahn, chargée de mission action juridique et Manuel Domergue, directeur des études) et Fondation Abbé Pierre de Montpellier (Sylvie Chamvoux, directrice agence Occitanie). Association Droit au Logement (Jean-Baptiste Eyraud Porte-parole, Micheline Unger, responsable). Fédération santé habitat (Léonard Nzitunga, président, Laurent Thévenin, délégué national) Groupe de recherche pour l'aide et l'accès au logement (Olivier Desrousseaux, Président, Maïté Parent, chargée de mission). Action Tank Entreprise et Pauvreté (Jacques Berger, directeur, Julie Laurent, cheffe de projet Innovation sociale, Guillaume Ginebre, chef de projet). Confédération nationale du logement (Eddie Jacquemart, président) Fondation recherche sociale et Gestare (Didier Vanoni et Clémence Petit). Secours catholique (Fanny Plançon, chargée de projets, Romain Bordeyne, chargé de mission). - - - - - Magistrats, avocats et huissiers Syndicat national de la magistrature (Nils Monsarrat, secrétaire national, et Anne-Sophie Wallach, vice-présidente). Chambre nationale des commissaires de justice (Patrick Sannino, Président, Paul Schiepan, chef de cabinet du président, Maurice Lotte, huissier). - Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 83/86 4 Glossaire AAH : Allocation Adulte Handicape. AAP : Appel a Projet. ACT : Appartements de Coordination Therapeutique. ADIL : Agences departementales pour l'information sur le logement. AGBF : Mesure d'Aide a la Gestion du Budget Familial. AL : Allocation logement. ALF : Allocation logement a caractere familial. ALPIL : Action pour l'Insertion Par le Logement. ALS : Allocation logement a caractere social. ALT : Aide au logement temporaire. ALUR : loi du 24 mars 2014 pour l'Acces au Logement et un Urbanisme Renove. ANAH : Agence Nationale de l'Habitat. ANIL : Agence Nationale pour l'Information sur le Logement. APAGL : Association Pour l'Acces aux Garanties Locatives. APPEL : Action Permanente de Prevention des Expulsions Locatives. APL : Aide Personnalisee au Logement. ASLL : Accompagnement Social Lie au Logement. ASPA : Allocation de Solidarite aux Personnes Agees. AVDL : Accompagnement Vers et Dans le Logement. CAF : Caisse d'Allocations Familiales. CAL : Commission d'Attribution de Logement. CCAPEX : Commission de Coordination des Actions de Prevention des Expulsions Locatives. CCAS : Centre communal d'action sociale. CCH : Code la Construction et de l'Habitation. CDAPL : Commission Departementale d'Aide Publique au Logement. CDC : Commission Departementale de Conciliation. CDPEL : Charte Departementale de Prevention des Expulsions Locatives. CESF : Conseiller en Economie Sociale et Familiale. CFP : Concours de la Force Publique. CIDFF : Centre d'Information sur les Droits des Femmes et des Familles. CDP : Commandement de payer ; CIL : Comite Interprofessionnel du Logement. CLIC : Commission Locale d'Impayes de Loyer. CNAF : Caisse Nationale d'Allocations Familiales. CNAV : Caisse Nationale d'Assurance Vieillesse. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 84/86 CNIL : Commission Nationale de l'Informatique et des Libertes. CNIS : Conseil national de l'information Statistique. COMDALO : application de gestion du Droit Au Logement Opposable. CREDOC : Centre de Recherche pour l'Etude et l'Observation des Conditions de vie. CUS : Convention d'Utilite Sociale. DAL : Association Droit Au Logement. DALO: Droit Au Logement Opposable. DDASS : Direction Departementale des Affaires Sanitaires et Sociales. DDCS : Direction Departementale de la Cohesion Sociale. DGCS : Direction Departementale de la Cohesion Sociale. DIHAL : Delegation Interministerielle pour l'Hebergement et l'Acces au Logement. DREAL : Direction Regionale de l'Environnement, de l'Amenagement et du Logement. DREES : Direction de la recherche, des etudes, de l'evaluation et des statistiques. DRIHL : Direction Regionale et Interdepartementale de l'Hebergement et du Logement. ENL : loi du 13 juillet 2006 portant Engagement National pour le Logement. EPCI : Etablissement Public de Cooperation Intercommunal. EXPLOC : plateforme de traçabilite dans les procedures engagees. FAP : Fondation Abbe Pierre. FILOCOM : Fichier du Logement Communal. FNAVDL : Fonds National d'Accompagnement Vers et Dans le Logement. FSL : Fonds de Solidarite Logement. GIP : Groupement d'interet public. GLI : Garantie aux Loyers Impayes. GRL : Garantie des Risques Locatifs. HCLPD : Haut Comite pour le Logement des Personnes Defavorisees. HLM : Habitation a Loyer Modere. IGA : Inspection Generale de l'Administration. IGAS : Inspection Generale des Affaires Sociales. IGSJ : Inspection Generale de le Justice. INSEE : Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques. IRES : Institut de Recherches Economiques et Sociales. IRL : Indice de Reference des Loyers. MAJ : Mesure d'Accompagnement Judiciaire. MASP : Mesure d'Accompagnement Social Personnalise. MDS : Maison Departementale des Solidarites. MSA : Mutualite Sociale Agricole. MASP : Mesure d'Accompagnement Social Personnalisee. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 85/86 OFGPL : Observatoire des Finances et de la Gestion Publique Locales. ONPES : Observatoire National de la Pauvrete et de l'Exclusion Sociale. PCS : Protocole de Cohesion Sociale. PDALHPD : Plan Departemental pour le Logement et l'Hebergement des Personnes Defavorisees. PDALPD : Plan Departemental pour le Logement des Personnes Defavorisees. PEEC : Participation des Employeurs a l'Effort de Construction. PLH : Programme Local de l'Habitat. RGPD : Reglement General sur la Protection des Donnees. RSOI : Retour social sur investissement. SIAO : Service Integre de l'Accueil et de l'Orientation. SOeS : Service de l'Observation et des Statistiques. UDAF: Union Departementale des Associations Familiales. UDCCAS: Union Departementale des Centres Communaux d'Action Sociale. UNPI : Union Nationale de la Propriete Immobiliere. USH : Union Sociale pour l'Habitat. Rapport Nicolas DÉMOULIN PREVENIR LES EXPULSIONS LOCATIVES Page 86/86 INVALIDE)

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