Biodiversité et territoires 2030 : cinq scénarios d'évolution - synthèse de l'exercice prospective : volets 1 et 2
Auteur moral
France. Commissariat général au développement durable
Auteur secondaire
Résumé
Afin de disposer d'une vision prospective de la biodiversité dans les territoires à l'horizon 2030, la Mission prospective du MEDDE a lancé en 2010 une démarche prospective "Biodiversité et Territoires 2030".<br />Ce rapport propose une synthèse des scénarios exploratoires d'évolution de la biodiversité dans les territoires à l'horizon 2030 ainsi que de leur territorialisation (volets 1 et 2). Les propositions de pistes de stratégies pour une gestion efficace et pérenne de la biodiversité feront l'objet d'une publication distincte (volets 3 et 4).
Editeur
MEDDE-CGDD
Descripteur Urbamet
prospective
;scénario
;paysage
;évolution
Descripteur écoplanete
biodiversité
Thème
Environnement - Paysage
;Aménagement du territoire
Texte intégral
COMMISSARIAT
GÉNÉRAL AU
DÉVELOPPEMENT
DURABLE
n° 86
Juin
2013
Délégation au développement durable
www.developpement-durable.gouv.fr
Études & documents
Biodiversité et Territoires 2030 :
Cinq scénarios d'évolution
Synthèse de l'exercice de prospective : volets 1 et 2
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Collection « Études et documents » de la Délégation au développement durable (DDD) du Commissariat
Général au Développement Durable (CGDD)
Titre du document : Biodiversité et Territoires 2030 : cinq scénarios d'évolution - synthèse de
l'exercice de prospective : volets 1 et 2.
Directeur de la publication : Catherine Larrieu
Rédacteur en chef : Nathalie Etahiri
Auteur(s) : Patricia Sala
Date de publication : Juin 2013
Remerciements : Nous tenons à remercier les membres du groupe de prospective de cette démarche (cf.
Annexes 1 et 2).
L?objet de cette diffusion est de mettre en débat ces résultats et d'appeler des commentaires.
Biodiversité et Territoires 2030 :
cinq scénarios d'évolution
Synthèse de l'exercice de prospective : volets 1 et 2
Mission Prospective
Juin 2013
Études & documents | n°86 | Juin 2013
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Sommaire
1 Introduction............................................................................................................................. 3
2 Cadrage de la démarche......................................................................................................5
2.1 Pourquoi une approche par la prospective ?.........................................................................................5
2.2 Cadrage préalable de la démarche........................................................................................................5
2.3 Le groupe d'experts « Biodiversité et Territoires 2030 ».....................................................................7
2.4 Le système prospectif « Biodiversité et Territoires » : une approche par les paysages.....................7
2.5 Les étapes suivantes.............................................................?..............................................................9
3 L'analyse rétrospective et les composantes-clés du système « Biodiversité et
Territoires ».............................................................................................................................. 11
4 Les scénarios........................................................................................................................ 14
4.1 Les 5 scénarios exploratoires.........................................................................................................................15
4.2 Enseignements.....................................................................................................................................20
5 Une territorialisation par grandes entités paysagères : sortir des représentations
ordinaires.................................................................................................................................. 21
5.1 Méthodologie.......................................................................................................................................22
5.2 Résultats et enseignements................................................................................................................24
6 Conclusion et perspectives................................................................................................28
Annexe 1 : Personnes ayant participé au cadrage préalable de la démarche........................................29
Annexe 2 : Liste des experts sollicités durant la démarche prospective ................................................30
Table des illustrations.................................................................................................................................31
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1 Introduction
« L?anticipation n?a de sens que pour éclairer l?action »1
Depuis plusieurs décennies on constate une détérioration continue de l'état de la biodiversité, ce qui n'est pas
sans conséquence sur le bien-être humain et sur celui des générations futures.
Initialement, les stratégies de gestion et de préservation de la biodiversité visant à résorber ce phénomène
sont principalement orientées vers la préservation d'espèces protégées. Cette préservation repose sur la
définition d'aires protégées dans lesquelles les activités humaines sont restreintes. Au regard du recul constant
du capital naturel, cela n'apparaît pas suffisant pour enrayer voire inverser cette tendance.
En effet, de récents travaux, comme ceux du Millenium Ecosystem Assessment2 (MEA) en 2005, ont souligné
l'importance d'une approche intégrée : celle-ci met en évidence, tant les facteurs directs et indirects
entraînant des changements de la biodiversité, que les services dont nous dépendons et le bien-être que nous
en retirons.
Cette conception a également permis de porter un éclairage sur les enjeux de biodiversité et les pressions qui
s'exercent sur elle. Les cinq causes majeures d'érosion de la biodiversité qui font l'objet d'un consensus
scientifique et politique au niveau international sont : la destruction des habitats, les invasions biologiques, les
pollutions, la surexploitation des espèces et le changement climatique. Ces pressions ne sont pas identiques
en fonction des écosystèmes et des échelles spatiales et temporelles d'observation considérées. Pour mettre
en application des actions efficaces pour préserver la biodiversité, il est donc nécessaire de prendre en compte
sa composante dynamique mais aussi les changements dans les activités et pratiques humaines qui
conditionnent son évolution.
Or un grand nombre d'incertitudes existent à moyen et long terme sur ces facteurs environnementaux et
socio-économiques : comment l'agriculture va-t-elle évoluer en France sous l'influence de la PAC actuelle et
au-delà ? Quels seront les enjeux futurs de la biodiversité ? Comment va évoluer l'étalement urbain ? En quoi
l'évolution des dynamiques socio-économiques agira-t-elle sur la biodiversité? Comment les acteurs des
territoires institutionnels ou privés l'appréhenderont-ils ? Comment les acteurs se positionneront-ils face à des
choix économiques et sociaux qui pourraient entraver les efforts déjà entrepris sur la biodiversité ?
Afin de disposer d'une vision prospective de la biodiversité à l'horizon 2030 pour favoriser la mobilisation de
tous et une meilleure intégration de la biodiversité dans les politiques sectorielles et dans les territoires, la
Mission Prospective du Ministère de l?Écologie, du Développement durable et de l?Énergie a lancé en 2010 une
démarche prospective « Biodiversité et Territoires 2030 ».
1 GODET M., (1997). Manuel de prospective stratégique. Dunod
2 Rapports en ligne sur www.maweb.org
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Cette démarche a pour objectifs :
? (1) d'anticiper les nouveaux enjeux pour la biodiversité à l'horizon 2030 ;
? (2) de les spatialiser et d'identifier les territoires présentant les plus forts enjeux au regard des
caractéristiques majeures de la biodiversité ;
? (3) de mieux prendre en compte la biodiversité sur le long terme dans les politiques publiques et
les activités sectorielles ;
? (4) de proposer des pistes de stratégies pour une gestion efficace et pérenne de la biodiversité
dans les territoires et les mettre en débat.
Ce type de travail est relativement nouveau. En effet, il existe peu de projets relatifs à la prospective des
milieux naturels et a fortiori à la prospective de la biodiversité dans les territoires. On peut citer, par
exemple, les scénarios à 2050 du MEA, le projet « Globlal Biodiversity Outlook » - conduit aux Pays-Bas à la
demande de la CDB (Convention sur la diversité biologique) - un travail sur la biodiversité à l'échelle
mondiale3 ou encore les scénarios d'évolution de l'environnement à l'horizon 2030 réalisée par l'Agence
pour l'Environnement de Grande Bretagne (Environment Agency scenarios 2030). Un certain nombre
d'autres travaux portent sur des scénarios d?occupation des sols : le projet PRELUDE4, développé par
l?Agence européenne de l?Environnement), le projet « Land Use Futures » réalisé par le Departement of
Buisness Innovation and Skills du gouvernement britannique ou encore le projet EURURALIS conduit par le
ministère de l'agriculture, de la qualité de la nature et de l'alimentation des Pays-Bas et concernant les
espaces ruraux en Europe.
L'apport de la prospective dans un tel contexte n'est pas tant de déterminer avec exactitude les ressources
et les demandes futures en biodiversité mais de clarifier ces différents enjeux, d'analyser et de suggérer
quelques marges de manoeuvre pour une transition écologique souhaitée, concertée et réaliste.
Après avoir au préalable rappelé le cadrage et les étapes clés de cet exercice de prospective, les résultats
des volets (1) et (2) sont présentés dans le présent document.
3 Chapin, J.J., F.S., O.E. Sala, and E. Huber-Sannwald, (eds.), 2001: Global Biodiversity in a Changing Environment: Scenarios for
the 21st Century. Springer-Verlag, New York, 376 pp.
4 PRELUDE : PRospective Environmental analysis of Land Use Development in Europe
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2 Cadrage de la démarche
2.1 Pourquoi une approche par la prospective ?
La prospective invite à penser l?avenir comme un domaine de liberté et de responsabilité, comme un espace
de projet et un domaine de pouvoir. Elle s?applique à l?avenir, non pour le prédire, mais pour le circonscrire et
s?inscrire ainsi dans la culture de l?anticipation.
Une démarche de prospective se nourrit de tendances et réserve une place importante aux raisonnements
qualitatifs, aux jeux d?acteurs et aux contingences : il y a toujours plusieurs futurs probables, d?où l?anticipation
nécessaire de faits inédits et de ruptures. Les ruptures sont des discontinuités subies ou voulues, résultant de
facteurs aussi divers que des effets de seuil, par exemple la saturation d?un marché, l?irruption d?innovations
« briseuses d?habitudes » ou encore la volonté humaine de modifier les règles du jeu.
Une telle démarche permet ainsi de susciter le débat sur les avenirs possibles et de favoriser la co-construction
d?une vision à long terme de la biodiversité. Elle s?appuie également sur une bonne connaissance du passé et
du présent, sur des faits avérés et sur des tendances objectivées.
Parmi les différentes démarches de prospective, la méthode des scénarios a été retenue pour l'exercice de
prospective « Biodiversité et Territoires 2030 ». Elle repose sur une approche systémique en croisant des
variables appropriées aussi bien socio-économiques qu'institutionnelles et environnementales pour aboutir à
des cheminements et des visions contrastées de la biodiversité dans différents contextes territoriaux. Elle
permet ainsi de replacer la gestion de la biodiversité au coeur de l'évolution de la société, dans une approche
pluridisciplinaire et intégratrice.
La méthode des scénarios incorpore également les notions de crise et de rupture, paramètres indispensables
dans une démarche qui se veut dresser un panorama des futurs possibles pour mieux préparer l'avenir.
L'exercice de prospective « Biodiversité et Territoires 2030 » a été mené selon cette approche, afin d?entretenir
nos capacités d?action et de réaction face à ce qu'il adviendra réellement.
2.2 Cadrage préalable de la démarche
Un cadrage plus fin de la démarche a été défini au cours d?entretiens préalables (cf. Annexe 1). Il a précédé le
lancement de la démarche.
Les objectifs
La majorité des experts interrogés ont considéré que l?objectif principal de la démarche est d?orienter les
politiques publiques pour une meilleure prise en compte de la biodiversité et de se constituer ainsi comme un
outil d?aide à la décision.
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Ils ont également corroboré la volonté de mieux comprendre et analyser les enjeux, en regardant le passé,
et en identifiant les forces agissant sur l?évolution de la biodiversité ainsi que les lacunes de connaissances.
Ils ont également conforté la nécessité de réfléchir à l?avenir (anticipation), de sensibiliser et de convaincre
les acteurs du territoire sur les enjeux de préservation de la biodiversité.
Le public visé
Les experts ont estimé que ces résultats doivent s?adresser en priorité aux collectivités territoriales qui sont
actuellement les organes en charge de la protection de la biodiversité, mais qu?ils doivent également
s?adresser à l?État et à l?administration centrale.
Cependant, ces résultats doivent aussi s?adresser au grand public, ce qui nécessite donc un effort
d?accessibilité des résultats de la démarche.
Les entreprises et les professionnels de l?aménagement doivent également faire partie du public ciblé en
tant que gestionnaires ou propriétaires de vastes espaces naturels ou semi-naturels, où ils peuvent avoir un
impact significatif sur la biodiversité de par leurs activités.
Les objets à prendre en compte
L?évolution de la biodiversité ayant été très largement dépendante des activités humaines lors des
dernières décennies, les personnes interrogées ont identifié les acteurs politiques, les gestionnaires de
biodiversité, les modes de consommation parmi les variables les plus importantes à prendre en compte.
Les experts consultés ont mis au même niveau l?importance cruciale de prendre en compte les
écosystèmes, et non les espèces car ce sont des éléments beaucoup plus intégrateurs et donc plus faciles à
manier dans une démarche de grande envergure telle que « Biodiversité et Territoires 2030 ». En dernier
lieu a été évoquée la prise en compte des représentations sociales de la biodiversité.
Les principaux déterminants de l?évolution de la biodiversité et des territoires
Les politiques publiques ont été identifiées comme des déterminants principaux. La PAC est ressorti comme
un des éléments clés. Viennent ensuite l?urbanisation, la démographie et le droit de l?environnement (loi
de Protection de la Nature, Loi du Littoral).
Ont également été évoqués les facteurs socio-économiques : mondialisation des marchés, généralisation
des pratiques intensives, énergie bon marché, urbanisation, etc.
Enfin, les changements sociétaux ont été mentionnés : étalement urbain, exode rural, perte du lien sociétal
avec la nature, modes de consommation, et les différences de perception de la biodiversité.
Les points de vigilance
Au cours de ces entretiens, les experts ont identifié des points sur lesquels l'attention devait être portée
tout au long de la démarche.
Le principal écueil cité a été la prise en compte des espèces remarquables au lieu d?un facteur beaucoup
plus intégrateur que serait la notion des espaces et de leur occupation. En effet, la difficulté majeure
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identifiée est celle d?articuler les différentes dimensions de la biodiversité et des territoires.
Les écueils suivant ont également été signalés :
? avoir une lecture trop « naturaliste » des territoires et trop pointue sur des cas particuliers, ou encore
la confusion entre biodiversité et espaces naturels ;
? dissocier complètement la biodiversité des phénomènes socio-économiques sous-jacents ;
? réfléchir à l?échelle du territoire national, en faisant abstraction du contexte mondial ;
? ne pas envisager les alternatives et les ruptures possibles et courir le risque de ne pas identifier un
ensemble des possibles, qui n?est pas la continuation du passé et qui n?est pas non plus une tendance
moyenne.
? se considérer comme un groupe représentatif du « grand public » au motif de notre diversité, en
particulier s?imaginer que l?ensemble de la société se préoccupe de l?érosion de la biodiversité.
2.3 Le groupe d'experts « Biodiversité et Territoires 2030 »
Pour mener « Biodiversité et Territoires 2030 », la Mission Prospective s'est appuyée sur un groupe d'une
trentaine d'experts (cf. Annexe 2) ainsi que sur les bureaux d'étude Biotope, pour son expertise en matière de
biodiversité, Asca et ACTéon pour leurs compétences en prospective et en animation de groupes.
Réunis par la Mission Prospective et l'équipe-projet, les membres de ce groupe ont été choisis de manière à
atteindre un équilibre entre la diversité des compétences et des points de vue apportés, la richesse et la
praticabilité des échanges. Les expertises des personnes sollicitées recouvrent un grand nombre de
thématiques : agriculture, forêt, écologie, énergie, transports, gestion des risques, littoral, sociologie et
écologie urbaine, interaction nature-société, gestion locale des questions environnementales ou encore
économie de l?environnement. Chacune des étapes de la démarche a été menée par le groupe de prospective.
Il s'est réuni huit fois au cours d'ateliers prospectifs entre mai 2010 et juin 2012.
2.4 Le système prospectif « Biodiversité et Territoires » : une approche par les paysages
La démarche « Biodiversité et Territoires 2030 » est structurée autour de six étapes (cf. Illustration 1) :
1. Définition du système et de l'horizon temporel de l'étude (une étude de faisabilité d'une analyse
prospective de l'évolution de la biodiversité en France a précédé cette étape) ;
2. Analyse rétrospective de l'évolution de la biodiversité dans les territoires ;
3. Décomposition du système « Biodiversité et Territoires » en composantes-clés ;
4. Élaboration pour chaque composante d'un jeu d'hypothèses contrastées quant à leurs évolutions
futures ;
5. Exploration des combinaisons possibles entre ces hypothèses et élaboration de scénarios contrastés
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des évolutions entre 2010 et 2030 des liens entre biodiversité et territoires5;
6. Territorialisation des scénarios afin d'identifier leurs impacts sur les territoires.
L'horizon temporel « 2030 » a été retenu car il permet d'une part, de s'émanciper des problématiques de
court-terme et d'autre part, de ne pas sortir du champ d'action des acteurs en allant trop loin dans le
temps.
La complexité même des notions de biodiversité, de territoire et de leurs interdépendances a rendu
nécessaire d'opérer une simplification du système « Biodiversité et Territoires ».
La biodiversité a été étudiée à l'échelle de la diversité écosystémique et plus précisément à celle du milieu
qui soutient les êtres vivants composant l'écosystème considéré. L'échelle de la diversité écosystémique
rend alors compte implicitement de la biodiversité génétique et spécifique. En effet, le développement
d'une espèce dépend pour une part importante de l'habitat dans lequel elle évolue.
L?approche par le milieu a également permis une simplification des relations entre territoires et
biodiversité. Le milieu est le support physique des dynamiques territoriales, anthropiques, à la fois
culturelles, économiques et socio-politiques.
5 Il faut voir les micro-scénarios comme des supports de réflexions à la construction des scénarios, les multiples échanges au
cours des ateliers étant venus enrichir ces éléments au fur et à mesure de l'avancement de la démarche.
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Illustration 1 : Les étapes de la démarche (volets 1 et 2, cf. Introduction).
Il peut donc être appréhendé en tant qu'objet écologique et en tant qu'objet territorial. De plus, le milieu se
retranscrivant visuellement sous la forme du paysage, ce dernier a ainsi été retenu comme média le plus
pertinent.
L'évolution du système « Biodiversité et Territoires » a alors été analysée au travers de la répartition et des
formes de paysage (cf. Illustration 2), circonscrit aux écosystèmes terrestres et à la France métropolitaine. Il a
ensuite été nécessaire d'analyser les tendances passées et présentes régissant l'évolution de la biodiversité et
des territoires afin d'identifier des variables motrices.
2.5 Les étapes suivantes
La présente synthèse des volets 1 et 2 de l'exercice de prospective vise à une première mise en débat des
résultats. Elle sera complétée par un rapport plus détaillé au second semestre 2013.
Les volets 3 et 4 de la démarche porteront sur la meilleure prise en compte de la biodiversité sur le long
terme dans les politiques publiques et les activités sectorielles ainsi que sur les propositions de pistes de
stratégies pour une gestion efficace et pérenne de la biodiversité dans les territoires (cf. Introduction). Ils font
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Illustration 2 : Schéma illustrant les correspondances entre un territoire (en jaune) et les formes du paysage traduites
par les milieux (occupation des sols) et les espèces qu?ils abritent (en vert).
l'objet d'un travail associant plusieurs Directions Régionales de l'Environnement, de l'Aménagement et du
Logement et Directions Départementales des Territoires, au travers d'un test expérimental des scénarios
nationaux sur des territoires régionaux ou départementaux, lancé par la Mission Prospective au premier
semestre 2013.
Cette expérimentation porte principalement sur les scénarios de la démarche plus globale « Territoire
Durable 2030 » initié en 2010 par la Mission Prospective. Les démarches « Eau, milieux aquatiques et
Territoires durables 2030 » et « Biodiversité et Territoires 2030 » en constituent des focus sur les enjeux
environnementaux6. Les résultats de cette expérimentation sont attendus au second semestre 2013 et
feront également l'objet d'une publication.
6 Pour en savoir plus sur ces programmes : http://www.developpement-durable.gouv.fr/La-mission-prospective.html
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3 L'analyse rétrospective et les composantes-clés du système « Biodiversité et
Territoires »
Toute démarche prospective, et en particulier l?élaboration de scénarios, suppose de définir un point de départ
pour l?exploration du futur. Cette « base » dans le vocabulaire de la prospective, remplit plusieurs fonctions :
? définir l?objet auquel s?applique la réflexion prospective ;
? révéler son fonctionnement, ainsi que les tendances dynamiques passées et présentes qui régissent
son développement.
C?est au regard de cette analyse rétrospective et des diverses interprétations qui peuvent en être faites qu'ont
été fondées les projections dans le futur.
Réalisé par le groupe d'experts, l'analyse rétrospective sur la biodiversité et ses formes dans les territoires a
recouvert la période de 1945 à 2010 et a été décomposée en trois cheminements : 1945-1976 ; 1976-1992 et
1992-2010. Chaque cheminement décrit l?évolution :
? du contexte institutionnel et politique ;
? de la démographie, des modes de vie et de l?expression des différentes attentes en matière de nature
et de biodiversité ;
? des évolutions des secteurs d?activité dont l?emprise spatiale et les formes techniques expliquent
l?évolution de la biodiversité : urbanisme, équipements (transports, énergie), agriculture et forêt.
L?image des territoires et de la biodiversité de 1945 constitue le point de départ du récit, au sortir de la
seconde guerre mondiale dans le contexte particulier de l?après-guerre.
L'année 1976 correspond à l?année de parution de la Loi de protection de la nature. Cette loi a posé les bases
de la protection de la nature en France, considérant qu?il s?agit d?un élément d?intérêt général. Cette loi est à
l?origine de la plupart des articles du code de l?environnement (dont les études d?impacts) et des listes
d?espèces protégées.
L'année 1992 correspond à l?année où a eu lieu la Convention sur la diversité biologique. Cette convention est
un traité international adopté lors du sommet de la Terre à Rio de Janeiro. Elle inscrit trois objectifs
majeurs : conservation de la diversité biologique, utilisation durable de ses éléments et partage juste et
équitable des avantages découlant de l?exploitation des ressources génétiques.
Ainsi, cette analyse rétrospective articule des images de la biodiversité et des territoires et les cheminements
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qui explicitent les dynamiques à l?oeuvre entre chaque étape.
Cette analyse a permis d'identifier quatre composantes structurant fortement le système (cf. Illustration
3) : le jeu institutionnel et les politiques publiques, la demande sociale, les activités sectorielles et
l'établissement humain et les dynamiques naturelles. Cette dernière composante a été traitée de manière
transversale, comme variable de contexte. Lors du séminaire d'Arc et Senans les 16 et 17 mai 2011, le
groupe de prospective a co-construit pour chaque composante des micro-scénarios, cheminement logique
d'une situation actuelle vers un avenir imaginé. Les différents micro-scénarios ont ensuite été assemblés de
façon à établir des scénarios globaux (cf. Illustrations 1 et 4).
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Illustration 3 : Synthèse des composantes influant sur la biodiversité et ses formes dans les
différents territoires. En jaune, les forces motrices d?évolution de la biodiversité identifiées au
travers de l?analyse rétrospective. En rose, les facteurs situés à l?interface entre ces forces
motrices.
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Illustration 4 : Tableau récapitulatif des micro-scénarios produits pour chaque composante.
Composante jeu institutionnel et politiques publiques Composante demande sociale
Micro-scénario 1
Micro-scénario 2
Micro-scénario 3
Micro-scénario 4
Micro-scénario 5
Composante activités sectorielles et établissement
humain
L'environnement: une politique au 2nd rang
Connaissances de plus en plus développées sur la biodiversité
(généralisation des observatoires, recherche,
professionnalisation de l?expertise).
Réglementation environnementale plus forte, toujours
d?origine Européenne.
MAIS des arbitrages toujours en faveur des aspects socio-
économiques : l?érosion de la biodiversité est ralentie mais pas
arrêtée.
Une nature fabriquée en réponse à une société duale
Dualité entre d?un côté l?émergence d?une génération « éco-
responsable » et une demande sociale de plus en plus
individualiste. La demande va de plus en plus vers une nature
« maîtrisée » correspondant aux attentes d?un citoyen-
consommateur.
Une vision à court-terme dominante
Ce scénario exprime une optique de vision à court terme, le
tout dans un contexte de changement climatique et de
Grenelle de l?Environnement. La tendance se poursuit avec une
réglementation environnementale qui se renforce
progressivement mais n?entrave pas l?artificialisation du
territoire. Les espaces connaissant la pression la plus faible
(forêt) servent de base aux politiques de conservation.
La biodiversité ça suffit
Difficultés économiques et focalisation sur des questions de
santé, d?alimentation, au détriment notamment de
l?environnement.
Baisse progressive de la force de la réglementation
environnementale car baisse de la demande sociale et des
moyens, de contrôle entre autres
Développement socio-économique prévalant sur tout le reste.
Biodiversité: la construction d'un bien commun
Prise de conscience importante avec notamment une réduction
du clivage entre les scientifiques et la société.
Gestion proactive des écosystèmes en vue d?éviter une
dégradation trop importante de l?environnement.
Le tout «local»: la décentralisation
Ce scénario se place dans le cadre d?un contexte de
catastrophes climatiques : incendies, sécheresses, tornades
etc. Suite à cela on observe une augmentation forte du coût de
l?énergie (baisse de la production d?énergie nucléaire) et donc
des déplacements de personnes et de marchandises. Par
conséquent, on se tourne de plus en plus vers une économie
locale associée à un repeuplement des campagnes pour une
recherche d?autonomie alimentaire et énergétique.
60 millions d'acteurs
Suite à une catastrophe naturelle ou écologique majeure, se
produit une prise de conscience conséquente. L?écologie
devient un objectif prioritaire avec un renforcement massif
des politiques en faveur de la biodiversité. Cet objectif est
partagé par l?ensemble des acteurs de la société et les
questions d?environnement sont de plus en plus gérées de
façon participative.
La nature service (une vision marchande)
Prise de conscience importante du besoin de préserver mais
reprise de ces questions dans une vision marchande et
rentable.
Mise en place de marché des services écosystémiques avec
dérégulation faible : l?État se fait le garant mais délègue
l?application au privé.
L?État développeur volontariste: structuration par le
Ministère en charge de l?Écologie
Réglementation environnementale très forte à l?échelle
nationale et européenne avec une politique concertée
intégrant la conservation dans les schémas d?aménagement,
redensification imposée des zones urbaines et arrêt du
déploiement périurbain et des ZAC, une conversion des friches
industrielles urbaines et non urbaines vers des lieux publics
(hôpitaux, écoles, loisirs, etc.).
Réintroduction de la biodiversité dans l?agriculture :
polycultures, plantation de haies, réduction d'intrants,
phytosanitaires ou encore variétés horticoles.
Ressources primaires durables
Suite à une catastrophe naturelle ou écologique majeure, se
produit une prise de conscience importante de l?importance de
préserver l?environnement. L?État se fait le garant de cette
conservation, et va miser sur son capital naturel (ressources
primaires) pour relancer sa croissance économique. Il met
ainsi en place un certain nombre d?outils réglementaires forts
pour y parvenir.
La nature ça suffit
Aggravation de la crise socio-économique ayant pour
conséquence le refus de consacrer le peu de moyens
disponibles aux questions d?environnement et de biodiversité.
Ces questions sont reprises de la même façon que dans le
scénario précédent mais en ne se posant les questions que par
le truchement de la rentabilité et du coût.
L'ingénierie écologique: une structuration par les
lois du marché
Pénétration plus importante de l?économie dans les arbitrages
de conservation dans un contexte de mondialisation continue
avec pour acteurs dominants le commerce et l?industrie. Forte
compétition spatiale entre l?industrie, le bâti et les espaces
naturels et semi-naturels (étalement urbain, infrastructures de
commerce et de transport) avec un développement structuré
autour des pôles urbains. Forte dualité de la forêt et de
l?agriculture, entre production de masse et production de
«niche», c?est-à-dire à forte valeur ajoutée.
Biodiversity Incorporated
Suite à une catastrophe naturelle ou écologique majeure, se
produit une prise de conscience importante dont l?État se fait
le garant mais faute de moyens va déléguer une partie de la
gestion de l?environnement au «privé», avec une possible
orientation vers des arbitrages basés sur des critères de
rentabilité.
La nature inaccessible (entre crises économiques et
conflits sociaux)
L?aggravation des crises économiques et sociales entraîne la
montée des inégalités sociales vis-à-vis de l?accès à la nature.
La nature devient de plus en plus inaccessible en raison du
manque d?infrastructures, du coût du pétrole (transports) et de
la prévalence de questions plutôt liées à la survie : santé,
éducation, etc.
4 Les scénarios
Les scénarios ainsi obtenus sont volontairement contrastés et représentent les visions résultantes du
groupe de prospective (cf. Illustration 5). Ce travail exploratoire permet entre autres de prendre conscience
du champ des futurs possibles, de prendre du recul vis-a-vis des tendances actuelles, de soulever des
problèmes, des interdépendances ou encore d'imaginer les impacts de ruptures possibles sur le système
« Biodiversité et Territoires ». Ils ne sont ni hiérarchisés ni probabilisés.
4.1 Les 5 scénarios exploratoires
La description de chacun des cinq scénarios ci-après a pour principal objectif d'en donner la tonalité
principale.
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Illustration 5 : Les cinq scénarios "Biodiversité et Territoires 2030".
Scénario 1 (tendanciel)
Biodiversité arbitrée
Moteur du scénario:
Arbitrage final en faveur des intérêts économiques
Scénario 3
Biodiversité imposée
Moteur du scénario:
Crises, isolationnisme, dépendance aux ressources et
services écosystémiques locaux,
Etat garant des fonctions naturelles de long terme,
retour au rural
Scénario 2
Biodiversité citoyenne
Moteur du scénario:
Amélioration de la connaissance et
crise environnementale majeure,
déclencheurs d?un vaste mouvement pro-biodiversité
Scénario 5
Biodiversité sur les marchés
Moteur du scénario:
Crise budgétaire de l'Etat,
privatisation de la gestion de la biodiversité,
autorégulation des pressions sur la biodiversité et
mise en place de marché des services écosystémiques
Scénario 4
Biodiversité ignorée
Moteurs du scénario:
Relance économique planifiée, isolationnisme,
utilisation maximale des ressources locales à court terme
en relançant l?industrie et l?agriculture
4.1 Les 5 scénarios exploratoires
Scénario 1 (tendanciel) : Biodiversité arbitrée
Moteur du scénario : Arbitrage final en faveur des intérêts économiques.
Esprit général du scénario : Concurrence entre dynamiques socio-économiques et politique
environnementale. Renforcement progressif de la réglementation environnementale mais les arbitrages
socio-économiques prévalent toujours sur la préservation de l?environnement.
Dans ce scénario de poursuite des tendances actuelles, les dynamiques socio-économiques et les politiques
environnementales se concurrencent. Vers 2020, l'Union Européenne (ci-après désigné par UE) qui a renforcé
son statut de cadre grâce à la crise demeure l'élément principal de gouvernance des réglementations
environnementales, qu'elle renforce. Cependant ces politiques publiques se heurtent aux intérêts socio-
économiques locaux, qui freinent leur mise en oeuvre. On observe rapidement la mise en place d'un marché
économique des services rendus par la biodiversité. Certaines voix s?élèvent contre cette mise en place tandis
que d?autres alertent sur les risques attenant à la création d?une « bulle » financière susceptible d?éclater
rapidement, avec des conséquences importantes et déjà expérimentées. En terme d'aménagement, les
agglomérations continuent leur développement avec une périurbanisation concomitante.
La demande citoyenne se tourne vers une production locale, suite à une remise en question des modes de
consommation induite par la crise économique et l'augmentation du coût de la vie. Les entreprises ralentissent
également leur délocalisation et apportent un soutien financier au public dans les actions de conservation. La
forêt et l'agriculture deviennent de plus en plus duales, d'un côté préservées et de l'autre intensifiées.
L'artificialisation des littoraux et des vallées se poursuit. Seules les haute et moyenne montagnes restent peu
impactées.
L'image qui en résulte en 2030 est celle d'une biodiversité ordinaire en baisse, en raison de la fragmentation
et de l?artificialisation, mais d'une augmentation des espèces généralistes seules capables de résister à
l'artificialisation croissante. La biodiversité remarquable se maintient dans quelques îlots de conservation.
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Scénario 2 : Biodiversité citoyenne
Moteur du scénario : Amélioration de la connaissance et crise environnementale majeure, déclencheurs
d?un vaste mouvement pro-biodiversité ; Etat fort gérant une protection des ressources à long terme.
Esprit général du scénario : Forte prise de conscience et demande de prise en charge citoyenne des
questions d?environnement dans un système participatif et plus incitatif que répressif.
Dans ce scénario, bien que la crise financière ait rapidement été maîtrisée par l'UE, on assiste à une perte
de confiance des citoyens qui se tournent vers des valeurs refuge et aspirent à une plus grande autonomie
aussi bien alimentaire qu'énergétique. Parallèlement, l'érosion continue de la biodiversité et l'amélioration
des connaissances viennent alimenter une prise de conscience croissante de sa préservation. Ce contexte
est alors favorable à la résorption du clivage entre les scientifiques et la société sur les perceptions de la
biodiversité. La survenue d'une catastrophe majeure à moyen terme (aux alentours de 2015-2017) en est
d'ailleurs le catalyseur. La biodiversité devient alors un véritable référentiel politique, au-delà des
divergences partisanes.
Dans ce cadre, les arbitrages sont favorables à la biodiversité, de l'individuel au collectif, du public au privé
et quels que soient les secteurs de la société. Les collectivités territoriales qui maîtrisent la gestion foncière
deviennent les chefs de file de la gouvernance de la biodiversité, avec en toile de fond une participation
active des citoyens. La contractualisation et l'incitation sont préférées à la réglementation, dont l?État
demeure le garant. Circuits courts, intégration directe et effective des trames vertes et bleues dans les
Plans Locaux d'Urbanisme (PLU), villages « biodivers » sont autant d'exemples d'une gestion intégrative de
la biodiversité et de sa territorialisation. De fortes hétérogénéités locales en résultent. Les modes de
gestion intègrent des pratiques favorisant une baisse des impacts sur les milieux.
En dépit d'un repeuplement des milieux ruraux, l'autogestion citoyenne bénéficie à la biodiversité
ordinaire, avec des conséquences positives : l'arrêt de l'artificialisation sur le littoral, dans les vallées
alpines, en région parisienne ; l'interruption de la fragmentation par les grandes infrastructures ; la
diminution de l'exploitation intensive et de la pollution dans les milieux agricoles et la valorisation des
milieux forestiers par une gestion améliorée liée aux questions énergétiques. La biodiversité remarquable
est cependant moins protégée.
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Scénario 3 : Biodiversité imposée
Moteur du scénario : Crises, isolationnisme, dépendance aux ressources et services écosystémiques
locaux, État garant des fonctions naturelles de long terme, retour au rural.
Esprit général du scénario : Positionnement fort de l?État sur les questions environnementales et
développement d?une économie autour des ressources primaires et de l?environnement (police de la
nature, sylviculture etc.)
Dans ce scénario, l?État peine à sortir de la crise installée depuis 2010 et la mise en place de mesures
d'austérité et de rigueur remportent peu d'adhésion auprès des citoyens. Ce qui a pour conséquence une
rupture entre gouvernance et citoyens et débouche sur une crise majeure aux alentours de 2015 puis à une
explosion sociale quelques années plus tard. Dans ce contexte, la dette publique insurmontable de l?État, la
relégation au second plan des questions environnementales par les citoyens et une volonté de souveraineté
de l?État sur son territoire, notamment sur l'ensemble du processus de réglementation environnementale - au
détriment de l'UE - contribuent à une prise en main forte de ce dernier sur la gouvernance de son territoire.
Aux alentours de 2017, également, la survenue d'une catastrophe naturelle conduit l?État à voir dans la
biodiversité un capital naturel qu'elle doit conserver sur le long terme afin de toujours subvenir à ses besoins.
Il pilote alors entièrement la gestion de l'environnement, limitant les pouvoirs locaux à un rôle de mise en
oeuvre de ses politiques. Se développe ainsi une forme de « sacralisation » de la biodiversité pour laquelle la
société a pris conscience de sa dépendance et de son impuissance à contrôler certains mécanismes.
Ces évolutions impactent le territoire de façon duale : des espaces protégés désertés par l'homme sous les
contraintes fortes de l?État, et des espaces très anthropisés en raison des migrations forcées ou volontaires
vers les milieux ruraux afin de retrouver une autonomie alimentaire et énergétique.
L'état de la biodiversité s'améliore grâce à la préservation de l'ensemble des composantes des écosystèmes
dans des zones protégées. Cependant, les zones non protégées connaissent une érosion globale de la
biodiversité.
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Scénario 4 : Biodiversité ignorée
Moteurs du scénario : Relance économique planifiée, isolationnisme, utilisation maximale des ressources
locales à court terme en relançant l?industrie et l?agriculture.
Esprit général du scénario : Positionnement volontariste de l?État qui base la relance économique sur
l?industrie, l?agriculture intensive et la construction au détriment des questions environnementales (entrave
au développement).
Le contexte socio-politico-économique est identique à celui du scénario précédent exception faite qu'en
2017 aucune catastrophe naturelle ne se produit. Vers 2020, dans une situation de crise budgétaire et
d?isolationnisme, l?État planifie alors sa relance économique sur l'utilisation maximale des ressources
locales. La réglementation environnementale est réduite a minima afin de privilégier le développement
économique.
L?État s'oriente ainsi vers une « réindustrialisation » du pays, ce qui implique une relocalisation des
industries en périphérie urbaine, une redensification concomitante des pôles urbains, la reprise des grands
chantiers d'aménagement, une agriculture intensive, une exploitation forte de la forêt et enfin une forte
limitation des espaces naturels.
A l'horizon 2030, la biodiversité est alors cantonnée à ses fonctions primaires les plus productives dans une
optique d'exploitation à court-terme. Le concept même de biodiversité s'efface dans la société pour laisser
place à des notions essentiellement utilitaristes.
La fragmentation et l'artificialisation de l'espace, l'agriculture intensive et les pollutions en résultant ont un
impact défavorable sur la biodiversité ordinaire, notamment dans les milieux agricoles et forestiers. La
biodiversité remarquable jusqu'alors protégée par la délimitation d'aires spécifiques pâtit également dans
ce scénario.
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Scénario 5 : Biodiversité sur les marchés
Moteurs du scénario : Crise budgétaire de l?État, privatisation de la gestion de la biodiversité,
autorégulation des pressions sur la biodiversité et mise en place de marché des services écosystémiques via
la mise en place d?un mécanisme de marché.
Esprit général du scénario : Forte similarité avec le scénario tendanciel mais arbitrage de rentabilité plus
fort ; État ne pouvant assurer l?ensemble des aspects de conservation, et déléguant certains aspects à des
entreprises privées souhaitant investir sur ce marché.
Vers 2015, la crise financière qui touche l'UE depuis 2010 a fortement atteint le budget de l?État et la confiance
des citoyens. Toujours garant de la réglementation et soucieux de préserver certaines de ces missions mais
manquant de moyens, l?État se tourne vers les acteurs privés pour certains aspects de la gestion de la
biodiversité et se positionne alors en organe de contrôle. La montée de la demande sociale d'une
compensation des atteintes au capital naturel et de services récréatifs et esthétiques offre par ailleurs un
terrain favorable à la mise en oeuvre de ces mécanismes.
La mise en place en 2020 de paiements pour les services écosystémiques et de mécanismes de compensation
écologique amorce une marchandisation et une privatisation de la gestion de la biodiversité.
Il en résulte une accentuation des inégalités sociales concernant l'accès à la nature. Au niveau de
l'aménagement du territoire, le développement économique reste structuré autours des pôles urbains, avec
une périurbanisation continue et un développement des axes de communication entre les agglomérations.
Dans ce contexte, les impacts sur la biodiversité sont très hétérogènes avec une spécialisation accrue des
espaces.
D'un côté des « hotspots 7» protégés se développent en raison de leur fort potentiel patrimonial et récréatif.
Les cortèges d'espèces spécialistes y trouvent alors refuge et y prospèrent : sont principalement concernés les
milieux de haute montagne, le littoral, les abords et parties des centres des métropoles. De l'autre côté, les
milieux forestiers et agricoles sont exploités de façon duale. Des espaces au meilleur potentiel productif et
soumis à une intensification de la production grâce à l'achat d' « unité de biodiversité » coexistent avec des
espaces moins productifs qui vendent leurs quotas de biodiversité et mettent en valeur l'extensification et la
qualité de leur milieu.
Alors que les zones extensives - de surface plus importante - permettent le développement des cortèges
7 Dans le contexte du texte, il s'agit de zones présentant une très grande diversité biologique et non pas des hotspots tels que définis par la
communauté scientifique.
Pour celle-ci, « un point chaud ou hotspot de biodiversité est une zone géographique contenant au moins 1500 espèces végétales endémiques mais qui
a déjà perdu au moins 70 % des espèces présentes dans leur état originel. La surface totale des points chauds ne représente que 2,3 % de la surface de
la Terre. A l?heure actuelle, 34 zones sont des points chauds. Plus de 50 % des espèces végétales et 42 % des espèces de vertébrés terrestres vivent
dans ces points chauds » (source : http://www.developpement-durable.gouv.fr/Qu-est-ce-qu-un-point-chaud-de-la.html, site visualisé le 13 mai 2013).
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http://www.developpement-durable.gouv.fr/Qu-est-ce-qu-un-point-chaud-de-la.html
spécialistes et généralistes, les zones de production intensive et offrant les services les plus demandés - de
surface plus limitée mais riche en termes de biodiversité et de fonctionnalité des milieux - voient leur
biodiversité se réduire fortement.
4.2 Enseignements
L'élaboration de ces scénarios contrastés a permis de mettre en évidence certains éléments.
Tout d'abord, à moins d'une catastrophe déclenchant une gestion citoyenne de la biodiversité dans un
contexte favorable, comme présenté dans le scénario 2 (« Biodiversité citoyenne »), la réglementation
demeure un élément essentiel pour la préservation de la biodiversité.
Ce travail prospectif a confirmé également que la perception et l'implication de la société dans la
conservation de la biodiversité est tributaire du contexte socio-économique. Ainsi, en cas de crise, les
préoccupations environnementales sont reléguées au second plan au profit des besoins d'alimentation, de
logement, de santé et d'éducation. Seuls les scénarios 2 et 3 envisagent la possibilité concomitante d'une
crise économique et d'une prise en compte des questions environnementales. Cependant, une catastrophe
naturelle serait à même de provoquer cette bifurcation vers une meilleure prise en compte des questions
environnementales par la société.
La territorialisation de ces scénarios a permis d'analyser plus finement les impacts sur les milieux et de les
spatialiser.
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5 Une territorialisation par grandes entités paysagères : sortir des représentations
ordinaires
La prospective favorise la proactivité de la part d'acteurs ayant des marges de manoeuvre sur des territoires
spécifiques. Par son approche systémique, elle invite également à s'affranchir des schémas habituels de
pensée, à réactiver le présent grâce à un éclairage sur le champ des futurs possibles. C'est pourquoi, l'exercice
de prospective « Biodiversité et Territoires 2030 » a également porté sur un changement de représentation
des territoires pour mettre au jour de nouvelles marges de manoeuvre, de nouveaux enjeux qui n'étaient pas
forcément explicites dans les représentations précédentes.
En effet, la délimitation d'un territoire s'effectue aux moyens de caractéristiques cohérentes pouvant être
socio-économiques, culturelles, écologiques ou encore renvoyer à une zone d'exercice du pouvoir sur et dans
un espace donné. Les dynamiques territoriales dans la gestion de la biodiversité étant au coeur de cet exercice
de prospective, il est apparu nécessaire de territorialiser les scénarios sur la base d'une nouvelle délimitation
pour :
? identifier des représentations territoriales cohérentes sur le plan écologique, historique et socio-
économique afin de sensibiliser les acteurs des territoires actuels aux liens biodiversité/dynamiques
territoriales ;
? spatialiser les impacts sur la biodiversité dans ces nouveaux territoires en mettant en évidence leurs
spécificités ;
? identifier les territoires les plus menacés par les impacts de chaque scénario en indiquant les milieux
et espèces associés.
La conception de tels territoires a ainsi pour but de mettre en débat et de repenser les cadrages actuels, au
bénéfice d'une action plus efficace. Elle offre alors un nouveau regard sur les liens entre biodiversité et réalités
territoriales.
Ainsi, la dimension territoriale renvoie à deux enjeux spécifiques : d?une part, la spatialisation des
dynamiques, dans lesquelles interviennent également des caractères géographiques (les plaines, le littoral, les
montagnes?) ; d?autre part, la gouvernance et l?organisation des différents acteurs en fonction d?un contexte
rural, urbain ou périurbain et d?un cadre socio-politique.
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5.1 Méthodologie
La première étape de cette territorialisation a porté sur la définition de grands paysages synthétiques,
rendant compte de la diversité du territoire métropolitain. Pour cela, la carte d'occupation des sols (Corine
Land Cover 2006), des données altitudinales, une carte relative à l'évolution de 150 ans d'élevage produite
par l'Agreste8- sur l'influence de l'agriculture - et une carte relative aux paysages ruraux en 19509 ont été
superposées (il est à noter que la disponibilité et la qualité des données ont limité le choix de ces cartes).
Afin d'être homogène à l'échelle nationale et de pouvoir traiter les questions à large échelle, le croisement
de ces couches a permis un découpage en sept grands paysages dont les limites ont été affinées par le
groupe de prospective : milieux urbains/artificialisés, terres arables (milieux agricoles/cultivés),
arboriculture/viticulture, praires permanentes, milieux de type « bocager », forêts et littoral. Trois autres
grands paysages ont été identifiés, « autres », « glaciers » et « zones humides intérieures » mais non
analysés car représentant une surface très limitée et des caractéristiques trop éloignées de celles des
autres paysages pour y être intégrées (cf. Illustration 6).
Sur la base de critères à la fois écologiques, biogéographiques et socio-économiques provenant de l'analyse
rétrospective, la carte obtenue précédemment a été décomposée en dix grands territoires représentés
Illustrations 6 et 7.
Une fois cette représentation réalisée, une description de l'évolution de la biodiversité et de ses formes de
1945 à 2010 a permis de dégager les moteurs d'évolution spécifique à chacun, pré-requis à la
territorialisation des scénarios. Ainsi, dans le Grand Bassin Parisien, dominent les milieux anthropisés, les
terres arables et les forêts alors que le Grand Massif Central est structuré par les prairies permanentes, les
forêts et les milieux de types « bocager ».
Dix-sept indicateurs appropriés ont ensuite été construits par le groupe de prospective, à dire d'experts,
homogènes et disponibles à l'échelle de la France métropolitaine et sur une période de temps
significative, spécifiques à chaque entité paysagère, reflétant les changements d'usage et de pression
identifiés depuis 1945 et enfin, synthétiques et discriminatoires aux regards des grands territoires et des
scénarios.
Ces indicateurs ont permis d'évaluer qualitativement la sensibilité des grands paysages et territoires aux
scénarios.
8 « Sept grandes zones différenciées par le milieu et par l?histoire », dans « Un siècle et demi d?élevage en France », Analyses et
Études, Étude n°8, Agreste, 1991
9 « Les paysages ruraux au milieu du XXème siècle », in « Atlas des paysages de France », dir. P. Brunet, éd. Jean-Pierre de
Monza, 1992
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Illustration 6 : Les 7 grands paysages et les 10 grands territoires écologiquement et historiquement cohérents.
5.2 Résultats et enseignements
L?Illustration 7 présente, pour chaque grand territoire, la sensibilité au scénario tendanciel,
« Biodiversité arbitrée », des paysages soumis aux pressions les plus fortes. Ces paysages sont
hiérarchisés, à dire d'experts, selon un niveau de pression décroissant : le paysage soumis aux pressions les
plus fortes est décrit en premier.
Par exemple, si les plateaux et montagnes de l'Est vont connaître une pression démographique très faible,
le Grand Ouest verra une augmentation significative de la population, plus marquée sur le littoral, à
l'horizon 2030.
S'agissant de la Loire Moyenne, dominée par les grands paysages milieux cultivés et forêts, elle verra ses
forêts soumises à une pression plus forte en raison de l'intensification de l'usage dans ce secteur à forte
densité. La forêt serait alors principalement utilisée pour ses services récréatifs, et en tant que ressource
primaire (bois-énergie). Le volume de gros bois sur pied devrait diminuer alors que les résineux non
autochtones seraient de plus en plus plantés. L'augmentation des pressions sur la forêt auraient des causes
identiques dans le Grand Bassin Parisien, hormis la plantation de résineux non autochtones.
Sur le grand territoire Aquitaine, les milieux urbains et le littoral verraient une augmentation significative
de la population, plus marquée sur le littoral mais également en profondeur et autour des agglomérations
de Toulouse et Bordeaux.
En revanche, bien qu'également sujet aux pressions les plus fortes, les impacts sur ces deux milieux
différeraient sur le grand territoire Méditerranée. En effet, l'urbanisation forte dégraderait plus
particulièrement les milieux littoraux et arables.
Les grands territoires Pyrénées et Corse ainsi que les Alpes seraient également soumis à une forte
augmentation de la population à l'horizon 2030 dans le scénario « Biodiversité arbitrée ». On noterait
toutefois, pour les Alpes une fragmentation des vallées.
Enfin, les grands territoires Saône et Rhône ainsi que Grand Massif Central subiraient une pression très forte
sur les milieux cultivés. Alors que la tendance serait à la déprise agricole et à la fermeture des milieux dans
le Grand Massif Central, une hausse de la viticulture biologique et une stabilité de la qualité de ces milieux
en raison des grandes cultures céréalières - ces dernières présentant une forte inertie des surfaces ?
seraient présentes sur le grand territoire Saône et Rhône.
Ces résultats ont pour vocation à être mis en débat auprès des acteurs territoriaux. Ainsi, la territorialisation
du scénario « Biodiversité arbitrée » à l'échelle nationale au travers des 7 grands paysages et des 10
grands territoires propose une nouvelle grille de lecture des territoires à l'horizon 2030, sensibilisant aux
enjeux futurs. L'analyse au travers des grands paysages et des grands territoires n'a pas été réalisée pour
les quatre autres scénarios en raison de l'incertitude sur le choix et l'extrapolation des données pertinentes
projetées à l'horizon 2030 ainsi que de la délimitation dans le temps de la démarche. Cela aurait nécessité
des moyens d'investigation supplémentaires.
Cependant, l'ensemble des cinq scénarios a fait l'objet d'une analyse par grand paysage sans le filtre des
grands territoires (cf. Illustration 8).
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Illustration 7 : Sensibilité des grands paysages au scénario tendanciel par grand territoire (entre
parenthèses succédant le nom du grand territoire sont rappelés les grands paysages majeurs).
Les résultats de l'analyse présentés à l'illustration 8 montrent que les milieux anthropisés, l'arboriculture et
la viticulture et les milieux de types « bocager » sont peu sensibles aux différents scénarios. Leur
dynamique d'évolution est soit stable, soit positive en termes de surface.
Seul le scénario « biodiversité ignorée » implique une baisse ou une stabilité de la qualité de l'ensemble
des milieux pour la biodiversité en raison de l'augmentation de l'artificialisation et le degré de
fragmentation des espaces. Si la surface des milieux sujets à l'arboriculture et à la viticulture reste stable
quel que soit le scénario, seuls les scénarios « biodiversité citoyenne » et « biodiversité imposée » lui sont
favorables en raison de l'augmentation des cultures extensives ou biologiques due à une demande sociale
accrue. Ces scénarios sont également propices à une progression des milieux de types « bocagers » aussi
bien qualitative que quantitative grâce à une prise de conscience de l'importance de ces éléments
paysagers, ou essentiellement pour des besoins de bois-énergie.
Certains milieux révèlent des enjeux de conservation majeurs au vu de leur sensibilité de réponse aux
scénarios :
? le littoral en raison d'une pression foncière et démographique très forte, à laquelle s'ajoute un
risque d'impact fort du changement climatique ;
? les terres arables, milieux susceptibles d'abriter une importante biodiversité, jusqu'ici exploitées en
majorité de manière intensive. L'évolution vers un scénario particulier sera déterminante pour la
qualité de ces milieux (cf. Illustration 8) ;
? les prairies permanentes protégées aujourd?hui par des mesures financières mais particulièrement
sensibles à la pression démographique, aux orientations stratégiques et aux choix économiques et
budgétaires ;
? les milieux forestiers, influencés par une forte dualité de perception qui se dégage des scénarios :
par exemple, perception du fort potentiel de réservoir de biodiversité dans le scénario
« Biodiversité citoyenne » ou encore perception du fort potentiel d'exploitation pour le bois dans le
scénario « Biodiversité ignorée ».
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Illustration 8 : Sensibilité de chacun des grands paysages identifiés dans cet exercice de prospective,
au contenu des cinq scénarios globaux. Les signes ?+?, ?-? et ?=? traduisent la variation de la surface
du paysage, tandis que les couleurs (vert, gris et rouge) traduisent l?évolution de la qualité
écologique de ces paysages, toujours selon les scénarios produits. Un dégradé a été utilisé
lorsqu?une incertitude existe sur la devenir de la qualité du paysage.
6 Conclusion et perspectives
Fin 2010, alors que l'exercice était en cours, l'Agence Européenne de l'Environnement a publié un rapport 10
relatif à l'état et aux perspectives de l'environnement en Europe : les tendances mises en évidence dans
cet opus n'ont fait que renforcer la nécessité de sortir du court-termisme et de se projeter sur le long terme.
Ce rapport indique que l'UE n'a pas atteint son objectif de stopper la perte de biodiversité en 2010, que les
changements d'occupation des terres entraînent une perte de biodiversité, que les forêts sont fortement
exploitées ou encore que les prairies riches en espèce se dégradent en dépit d'une diminution des surfaces
agricoles et en raison d'une intensification de l'exploitation.
La démarche prospective « Biodiversité et Territoires 2030 » a montré que ces tendances peuvent être
atténuées voire inversées pour peu que le contexte y soit propice.
Au travers de l'élaboration de cinq scénarios contrastés et territorialisés, elle a permis d'élargir la vision des
liens possibles entre biodiversité et territoires.
Les réflexions prospectives sur les dix entités écologiquement et historiquement cohérentes, ont permis de
mettre en évidence les disparités spatiales et la sensibilité de chaque entité aux différents scénarios et
invitent donc à affiner la démarche « Biodiversité et Territoires 2030 ».
Ces scénarios et leur territorialisation doivent ainsi être perçus comme une ouverture à la réflexion sur
l'avenir que l'on veut construire ensemble, tout en favorisant la concertation afin de produire des
recommandations éclairées et partagées sur le long terme. La mise en oeuvre de la Stratégie Nationale
pour la Biodiversité, l'instauration prochainement d'une loi cadre sur la Biodiversité ainsi que les réflexions
sur la transition écologique renforceront nos politiques publiques sur la biodiversité à court et moyen
termes. L'articulation entre les divers horizons temporels est de ce fait un enjeu primordial pour préserver
dès à présent notre capital naturel et notre bien-être actuel et futur.
10 European Environment Agency/Thomas Henrichs EEA, 2010 The European environment ? state and outlook 2010:
synthesis, EEA Copenhagen.
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28 | Commissariat général au développement durable ? Délégation au développement durable
Annexe 1 : Personnes ayant participé au cadrage préalable de la démarche
Prénom Nom Fonctions occupées
Alain Ayong-le-Kama
Professeur des universités, en économie, Université des sciences et
technologies de Lille 1, Conseiller scientifique permanent au MEDDE
Bernard Chevassus-au-Louis
Inspecteur général de l?Agriculture et membre du CGAAER (Conseil
général de l?Agriculture, de l?Alimentation et de l?Espace Rural)
Paul Delduc
Sous-directeur de la protection et de la valorisation des espèces et de
leurs milieux à la Direction de l'Eau et de la Biodiversité, MEDDE
Catherine Larrieu Chef de la Délégation au Développement Durable du (CGDD /MEDDE)
Jean-François Le Grand Président du Conseil Général de la Manche
François Letourneux
Président du Comité Français de l'IUCN (International Union for
Conservation of Nature)
Brice Quenouille CDC-Biodiversité
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Annexe 2 : Liste des experts sollicités durant la démarche prospective
Prénom NOM Institution
Alain AYONG-LE-KAMA Université de Lille
Jacques BAUDRY INRA
Patrick BAZIN CELRL
Gilles BENEST Université Paris 7 - Environnement, populations, société
Nathalie BLANC CNRS - Ladyss
Éric BLOCH CETE
Mathieu CALAME FPH
Jean CARSIGNOL CETE
Daniel CATTELAIN Maire de Caligny
Christophe CHARRIER DREAL Auvergne
Christophe CHAUVIN CEMAGREF
Nathalie ETAHIRI Mission Prospective
Philippe GIRARDIN PNR
Élisabeth JAKUSKLE Sofiprotéol
Cécile JOUCAN Entreprises pour l'Environnement
Romain JULLIARD MNHN
Guy LANDMANN GIP Ecofor
Thierry LAVOUX CGEDD
Jean-Claude LEFEUVRE
Ancien Président de la Fédération française des sociétés de protection de la
nature (FFSPN) - Ancien professeur MNHN
Pascal MARTY CNRS - CEFE
Isabelle MAUZ CEMAGREF
Laura MAXIM NatureParif
Laurent MERMET Agro ParisTech
Murièle MILLOT MEDDE
Sébastien MONCOPRS IUCN
Olivier MORA INRA
Thierry MOUGEY PNR
Elodie PIQUETTE Unistra
Dominique RICHARD Centre Thématique Européen sur la diversité biologique
Jean-Michel SALLES SupAgro
Jacques THEYS Mission Prospective
Yves VERILHAC Atelier Technique des Espaces Naturels
Julien VERT Ministère de l'Agriculture
Maurice WINTZ Unistra
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30 | Commissariat général au développement durable ? Délégation au développement durable
Table des illustrations
Illustration 1 : Les étapes de la démarche (volets 1 et 2, cf. Introduction)..........................................8
Illustration 2 : Schéma illustrant les correspondances entre un territoire (en jaune) et les formes du
paysage traduites par les milieux (occupation des sols) et les espèces qu?ils abritent (en vert).......9
Illustration 3 : Synthèse des composantes influant sur la biodiversité et ses formes dans les différents
territoires.................................................................................................................................................12
Illustration 4 : Tableau récapitulatif des micro-scénarios produits pour chaque composante...........13
Illustration 5 : Les cinq scénarios "Biodiversité et Territoires 2030"....................................................14
Illustration 6 : Les 7 grands paysages et les 10 grands territoires écologiquement et historiquement
cohérents ...............................................................................................................................................23
Illustration 7 : Sensibilité des grands paysages au scénario tendanciel par grand territoire.............25
Illustration 8 : Sensibilité de chacun des grands paysages identifiés dans cet exercice de prospective,
au contenu des cinq scénarios globaux................................................................................................27
Études & documents | n°86 | Juin 2013
Commissariat général au développement durable ? Délégation au développement durable | 31
Études & documents | n°86 | Juin 2013
32 | Commissariat général au développement durable ? Délégation au développement durable
Commissariat général au développement durable
Délégation au développement durable
244 Boulevard Saint-Germain
75007 Paris
Tél : 01.40.81.21.22
Retrouver cette publication sur le site :
http://www.developpement-durable.gouv.fr/developpement-durable
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Résumé
Depuis plusieurs décennies on constate une détérioration continue de
l'état de la biodiversité, ce qui n'est pas sans conséquence sur le bien-
être humain et sur celui des générations futures.
Les cinq causes majeures d'érosion de la biodiversité qui font l'objet
d'un consensus scientifique et politique au niveau international sont la
destruction des habitats, les invasions biologiques, les pollutions, la
surexploitation des espèces et le changement climatique.
Pour choisir et mettre en application des actions efficaces pour la
préservation de la biodiversité, il est donc nécessaire de prendre en
compte la composante dynamique de cette dernière mais aussi les
changements dans les activités et pratiques humaines qui
conditionnent l'évolution de la biodiversité.
Or un grand nombre d'incertitudes existent à moyen et long terme sur
ces facteurs environnementaux et socio-économiques : comment
l'agriculture va-t-elle évoluer en France sous l'influence de la PAC
actuelle et au-delà ? Quels seront les enjeux futurs de la biodiversité ?
Comment va évoluer l'étalement urbain ? Comment les acteurs se
positionneront-ils face à des choix économiques et sociaux qui
pourraient entraver les efforts déjà entrepris sur la biodiversité ?
Afin de disposer d'une vision prospective de la biodiversité dans les
territoires à l'horizon 2030, la Mission Prospective du Ministère de
l?Écologie, du Développement Durable et de l?Énergie a lancé en 2010
une démarche prospective « Biodiversité et Territoires 2030 ».
Le présent rapport propose une synthèse des scénarios exploratoires
d'évolution de la biodiversité dans les territoires à l'horizon 2030 ainsi
que de leur territorialisation (volets 1 et 2). Les propositions de pistes
de stratégies pour une gestion efficace et pérenne de la biodiversité
feront l'objet d'une publication distincte (volets 3 et 4).
Dépôt légal : Juin 2013
ISSN : 2102 - 4723
Délégation au développement durable
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